Préparatif à 2h15 It’s D-Day. Réveil à 1h, comme d’habitude c’est Vincent qui me réveille. Hugo n’a pas dormi de la nuit, pour Vincent et moi ça sera une nuit plutôt agitée, pas très reposante. Mon mal de tête de la veille était passé pendant la nuit, mais me reprend aussitôt, au premier effort : se lever. On se prépare dans le calme, stress pression et adrénaline sont omniprésents. On avale une petite part de gâteau, un doliprane pour la tête et un thé à la coca pour l’altitude. Plusieurs groupes sont déjà partis, on voit la lueur de leur lampe se refléter sur l’immensité blanche du glacier, ils semblent si petits. Le spectacle extérieur qui s’offre à nous est fabuleux, la lune nous éclaire suffisamment pour voir distinctement et se reflète très nettement sur la glace. Elle est assez petite pour laisser la place aux étoiles qui sont parsemées tout le long du ciel, la Voie Lactée est reconnaissable.
Retour à nos préparatifs. David notre guide avec Vincent nous dis qu’on partira vers 2h30 finalement. Cela nous semble bizarre, il parlait de 6h d’ascension or le levé de soleil est à 6h30 et c’est l’objectif. Donc on devrait réduire ces 6h en 4h. Avec Vincent et le binôme des Hugo, on ne veut pas se presser on préfère aller doucement et aller au bout. De plus, certains groupes sont partis aux alentours de minuit, gros décalage. Finalement, on part vers 2h15 crampons aux pieds, piolets à la main, plusieurs couches de vêtements pour le froid et le vent au sommet et un sac à dos (ce qui n’était pas prévu) pour deux.
Première partie : on aperçoit le sommet éclairé par la lune Nous sommes un des derniers groupes à partir, cinq minutes après les deux Hugo. Je commence à prendre le sac à dos. Notre guide David part d’un bon rythme. Nous sommes donc une cordée de trois comme au premier jour constitué de David devant, Vincent derrière, et moi au milieu. Contrairement aux autres groupes, on s’éclairera à la lumière de la lune et non pas avec nos lampes torches. On rattrape le groupe des Hugo en dix minutes à peine, le guide les double en passant dans de la neige profonde. Premier gros effort, on est quand même à 5300m. Mon mal de tête ne fait que s’empirer mais ça reste supportable. On continue sur un bon train et arrivons au point de la première pause en 35 minutes au lieu d’une heure. Vincent ne se sent pas au top non plus, je vais donc garder le sac pour toute l’ascension. On ne comprend pas l’utilité d’aller si vite même si nous trouvons cela plus contraignant de marcher lentement : on va arriver trop tôt et rater le lever du soleil nous dis notre guide, mais il ne ralenti pas ! On double groupe après groupe, passant cols et zones de plat d’un pas assuré. On rejoint notre chère amie Valérie, puis Jonas et enfin le couple de brésiliens qui étaient parti à minuit. Ils étaient entrain de faire demi-tour à cause du mal d’altitude.
Le spectacle de la montagne de nuit est à couper le souffle. On ne peut même plus compter les étoiles filantes que l’on voit. La Paz, au loin, entre deux pics de roches, s’offre à nous par toutes ses illuminations. L’Illimani est reconnaissable au loin grâce à la lueur de la lune. Au sol nous passons de crevasses en crevasses les traversant par de simples petits ponts de neige. Les plus grosses feront des dizaines de mètres de profondeur et 5-6 mètres de largeur mais nous nous en rendrons compte qu’en redescendant.
Dernière partie : 250 m de dénivelé de paroie à 90% en escalade mixte roche/glace/neigeDavid nous surprend alors en nous proposant une autre voie. On lui dit simplement qu’on ne veut pas que ce soit trop dur ni trop technique, mais on lui laisse le choix. Pour tout vous dire, je voulais y aller vincent non par peur d’un effort trop long et de ne pas arriver au sommet. Le guide après quelques minutes de réflexion reprend le chemin normal mais on commence à en avoir marre de faire que de la marche. Le sommet est maintenant 250-300m au dessus de nos têtes. Il s’arrête de nouveau nous proposant une variante de la « french Way» qu’il nous avait proposé auparavant. Il nous explique pas vraiment de quoi il s’agit, mais nous dis que c’est pas trop dur, intéressant et qu’on sera à la bonne heure au sommet. Aller c’est parti, il sort immédiatement du chemin et commence l’ascension en neige profonde, à pic, direction le sommet. Physiquement c’est vraiment dur mais vraiment intéressant. Nous sommes les seuls à emprunter cette voie. C’est de plus en plus raide, de plus en plus dur. Nous sommes sur des pentes à 90% nous dis le guide entrain d’escalader ce qui s’appelle une voie mixte (Roche, neige et glace). Toujours à la lumière de la lune on progresse lentement, quand on fait un pas on recule à chaque fois : les marches que l’on tente de faire avec nos pieds s’effondrent la plupart du temps. On est très prudent, on prend notre temps. David nous propose une première pause, nous sommes simplement attachés à son piolet par un noeud de cabestan et une simple roche d’un mètre de long et 20 centimètres de large en guise de lieux de repos. En dessous, la pente est similaire à du vide, on est à 5900m d’altitude entrain de réaliser un gros gros effort. Notre cerveau a changé de mode, on est en automatique. Je ne pense même plus au sommet de toute façon vu où on est embarqué, on a pas le temps d’être fatigué et pas le droit d’avoir peur. De toute façon, on ne peut plus faire demi tour. Je plante le piolet et fait pas après pas. C’est tout ce qui m’importe. Plus on monte plus c’est dur. Chaque pas est un réel effort. David nous demande d’être prudent et de bien tendre la cordée. Cette voie comporte plus de 200m de dénivelé jusqu’au sommet et je n’ai plus aucune notion du temps. David nous encourage par des cris virulents, le sommet est au bout, plus que 10 mètres, je reprends mes esprits et fournis les derniers efforts. Un autre groupe arrive, David veut qu’on soit les premiers, ils nous tirent, Vincent est encore au milieu des rochers.
Le sommet : 6088m et le bonheur à l’etat pur ! D’abord que tous les 3 puis avec les autres cordéesÇa y est le sommet, Huyana Potosí : 6088m. On l’a même que pour nous pour quelques secondes avant que d’autres cordées arrivent. L’émotion est immense ! C’est pour moi un rêve qui se réalise enfin, on en a voulu et on a réussi. Le mélange de l’émotion et de la fin de l’effort me fait fondre en larmes, larmes dues à une joie immense, un sentiment de fierté, fier de moi, fier de Vincent. David nous félicite, avant de profiter de la vue c’est d’abord un moment de partage à trois, puis une séance photos. Il fait très froid mais peu importe, on y est. De plus en plus de groupe arrive, Valérie, Jonas mais toujours pas les Hugo ... le soleil va bientôt se lever sur la cordillère. Un petit bonhomme en larme caché par son guide Célestin pointe son nez. On y est tous les trois, on a réussi !! Hugo a dû lâché son copain de cordée portant le même nom au milieu de l’ascension. Place aux photos de groupes tous aussi fier les uns que les autres comme Valérie (53 ans) qui est grimpée courageusement sans le moindre signe de faiblesse jusqu’au sommet. On est 5 sur les 8 de notre groupe à être parvenu au sommet. Puis on se retrouve tous les trois, les trois compères, pour profiter de ce moment. Et dire que 5 jours auparavant, on savait à peine que ce sommet existait.
Lever de soleil sur l’an mer de nuage depuis le sommet C’est parti pour la descente, cala fait déjà 30 minutes que nous étions là haut. Le froid était de moins en moins supportable. Je ne sentais plus mes mains ni mes pieds. Le soleil commence à peine à pointer son nez mais éclaire d’un orange intense la Cordillère Royale qui nous fait face.
Redescente vers le High camp entre 6h et 8h Hugo arrive rincé !On passe par le chemin que les autres groupes avaient pris à la monter, une crête séparant d’un côté le vide et de l’autre un pierrier de 100m de haut. C’est un peu périlleux mais ça va, le guide nous assure. On inverse les rôles, Vincent passe premier de cordée et David dernier. Au milieu, fatigué, j’ai juste l’impression de me faire traîner par Vincent qui descend trop vite pour moi. On commence à en avoir un peu marre et la faiblesse des jambes commence à se faire sentir. On courre même parfois pour arriver plus vite. Le soleil est de plus en plus haut, il fait de plus en plus chaud.
Vincent en profite pour faire la sieste et regarde l’Ilimani, son prochain objectif Arrivés au High camp, on en peut plus. On retrouve les trois malheureux qui ne sont pas parvenus au sommet. Je me déshabille et au lit directement il est 8h. Pendant ce temps Vincent attend Hugo dehors qui avait amorcé sa descente plus tard. N’arrivant pas réellement à dormir, on discute tous ensemble autour d’une soupe. Nous sommes tous KO. Rien que l’idée de devoir remettre les crampons pour la fin de la descente nous horrifie.
Redescente vers le camp de base Après 2-3 bols engloutis, une sieste sur un rocher et la vue pour Vincent, nous voilà reparti pour nous équiper et pour refaire nos sacs. Il est 9h30. Nous avons tous les trois un mal de tête atroce mais pas le choix il faut descendre. Plus on descend, plus on fatigue, mais mieux on se porte. Notre mal de tête disparaît peu à peu avec l’altitude. Cette heure de descente est encore l’occasion d’échanger de tout et de rien avec notre groupe d’alpinistes en herbe. Oui on parle beaucoup, tout le temps, de tout : on se rattrape, au sommet on avait pas assez de souffle pour ça.
Retour vers la Paz Nous voilà au camp de base le temps de se changer et nettoyer notre équipement. On attend ensuite le bus quelques minutes avant de repartir sur la Paz. Il est midi, impossible de dormir sur ce chemin de terre. La fatigue nous pousse à une excitation inexplicable, on rigole pour rien, on parle fort, un peu de gaieté dans ce bus tout endormi.
Retour dans la brume de pollution de la Paz. On dépose notre équipement, un au revoir au guide et à nos compagnons de ces trois derniers jours puis on file ensuite à l’agence de la death Road pour récupérer nos photos et profiter du wifi pour réserver l’auberge du soir à Copacabana. Miracle, je trouve alors l’auberge la moins cher qu’on ai jamais vu 83 bolivianos (10€) pour trois avec une chambre privée, on y croit pas mais on book. On doit maintenant encore marcher jusqu’au téléphérique. On est fatigué, on en a marre ! Arrivés en haut du téléphérique, on va, avec Vincent, voir les bus pour Copacabana laissant Hugo avec les trois sacs à la station tel un mendiant (mais bon depuis Caldera on a l’habitude). Le bus est dans à 17h dans 2h juste le temps de retourner voir Yvan et son auberge le temps de refaire nos sacs et prendre une douche (un bien pour la communauté je pense). Cela nous permettra de dire au revoir à Valérie aussi.
Bus direction Copacabana et le Lac Titicaca On remet encore une fois le sac sur le dos pour aller chercher le bus. Un dernier plaisir avec nos gâteaux à la crème et coco, empanadas plus un paquet d’oréo (notre conscience nous dit qu’on s’est bien dépensé les trois derniers jours). C’est que notre deuxième repas aujourd’hui, ça change. On sort de la Paz, une deuxième fois avec la chance de ne pas avoir de voisin. Mais la voisine de devant couverte pour aller au pôle nord tient à garder à sa fenêtre ouverte tout le début du trajet. On s’endort très vite !
Traversée pour arriver sur la presque île de Copacabana et arrivée dans la villeHugo me réveille quand on arrive aux abords du lac Titicaca pour observer un énorme orage au loin, on espère qu’il pleuvra pas en arrivant à Copacabana.
Après plusieurs heures de bus, on doit descendre car la route s’arrête pour laisser place à une benne où le bus doit monter pour traverser le bras d’eau qui nous sépare de la presqu’il de Copacabana. Il fait froid dehors, seul un anglais, en short reste dans le bus alors que celui si embarque sur cette grosse barque en bois. Pour nous, ce sera une embarcation à peine plus grosse... on remonte dans le bus pour l’heure de route restante, le tonnerre et les éclaires illuminent la montagne au loin.
Copacabana est une petite ville très vivante et touristique, on y arrive a 21h. On s’engage dans une rue pleine de vie pour retrouver l’auberge. On s’est trompé c’est de l’autre côté, et c’est beaucoup moins vivant. Vu les prix de l’auberge et la rue où on s’engage, on commence à douter de l’existence de cette dernière. On trouve finalement assez facilement. Elle est tenue par deux personnes plutôt âgées qui sont très rigoureux sur les formalités mais qui pratiquent des prix encore plus bas que prévu. Ça sera seulement 20 bolivianos la nuit par personne, un paradis. En plus on se retrouve dans une petite chambre pour trois, c’était inespéré !!
On n’a pas la motivation de ressortir pour manger. Ça sera un kilo de pâtes à l’huile (les pâtes en Amérique du Sud c’est vraiment pas ça ...) et au lit. La journée a été longue, trop longue. On ne s’arrête jamais... 🤷🏽♂️