Carnet de voyage par mails illustrés en Russie, Mongolie, Chine, Sibérie, en Transsibérien, Transmongolien et Transmandchourien avec séjour dans un monastère orthodoxe en Sibérie,
Du 9 août au 18 septembre 2016
41 jours
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Ma jolie famille, chers amis,

c'est reparti : Russie-Mongolie-Chine-Mandchourie-Sibérie

avec stops à Oulan Bator, à Pékin, dans un monastère près du lac Baïkal, et en Transsibérien, bien sûr, aller-retour environ 20 000 km, du 9 Août au 18 Septembre 2016;

chaque fois que j'aurai une connexion wifi je vous ferai parvenir mes impressions;

je pars mardi matin : Strasbourg, Francfort, Moscou, et, le soir même dans le train chinois n°4;

4 jours et 5 nuits = 100 h plus tard je serai en Mongolie, 1ère étape;

alors à bientôt pour ces nouvelles aventures

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3 h de vol, + 1h , beau, 32°, 1€=72 Rb;

Revoilà Moscou, Plus belle, plus propre, plus moderne; un papi russe..m' a conduit de l'aéroport Domodedovo à la Place des 3 gares, formidable ensemble de bâtiments russisants d' où l' on part vers l'Extrême Orient Russe; en dénigrant Eltsine, qui a vendu la Russie aux Americains, s'enthousiasmant pour Poutine, si patriote, il a bravė les bouchons, est passé par le Kremlin, le Manège, le Bolchoï..; impossible de s'arrêter, mais toujours aussi beau, splendide même, les coupoles d'or des cathédrales luisent dans le ciel bleu, la formidable forteresse du Kremlin se dresse au bord de la Moskova, les bulbes multicolores de la cathédrale St Basile rappellent qu' Ivan le Terrible l'a construite au xv° s après sa victoire sur les tatars à Kazan ;

Comme Paris, Moscou est un livre d'histoire , celle de la Russie d'avant Pierre le Grand; bien sûr il y a les bâtiments staliniens, les tours Gasprom, plein de limousines noires aux vitres obscures, mais je ne les vois pas; presque plus de babouchkis en jupe longue et foulard, pas encore vu de talons interminables…c'est comme chez nous, bermudas, trottinettes...

Mais rien à faire , Moscou, plus Russe que St Petersburg, me fascine; j'ai toujours la même impression :

La place Rouge et le Kremlin sont un condensé de la Russie, immense, vide, splendide, médiévale, orthodoxe et barbare;

Petit vent délicieux, j'achète chips, lait condensé, coca, avant de monter ce soir dans le train chinois n°4 à destination de Pékin ;

Prochain contact le 14/8 de Mongolie

St Basile, Place Rouge, Bolchoï, Kremlin 
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mardi 9/8 , 23h45 : Moscou, 55° Nord; départ de la Gare Iaroslavl

surprise : le train chinois n° 4 est à moitié vide ! seule dans ma cabine de 4 ! ravie mais étonnée; vitres sales, couchettes dures, pas de linge de toilette, pas de prises électriques, et le "provodnik" = steward ne parle et ne comprend que le Chinois ! déception : j'avais choisi ce train sur les conseils du "Petit Futé Sibérie"....beaucoup moins bien que ce que j'ai connu lors de mon premier Transsibérien en 2013; car le Transsibérien est une voie ferrée et non un train; sur le trajet vers Vladivostok ou vers Pékin circulent de nombreux trains, plus ou moins rapides et confortables, qui ne vont pas tous jusqu'au bout;

choix = erreur possible; et voilà ! pas futé le petit...

un groupe d'Italiens bruyants met de l'ambiance; pas un seul Russe dans ce wagon; je me mets en tenue de voyage : short et t-shirt en coton léger, claquettes, et mon éternel et indispensable gilet multipoche qui ne me quitte JAMAIS car il contient tout ce qui est INDISPENSABLE à mon voyage;

- mercredi 10/8 : nuit très fraîche, couchette si dure qu'il est impossible de dormir sur le côté; heureusement que j'ai de la fesse...il fait jour à 4 h, une boule d'or apparaît à 4h30;

5h30 : stop de 12 min à Nijni Novgorod ; je descends pour me dégourdir ;

12h18 : stop de 15 min à Kirov : on a fait 955 km; beau, chaud; glace; ma montre est à l'heure de Moscou, comme les trains, et le restera jusqu'à la frontière mongole; l'heure ne sert qu'à savoir quand viendra et combien durera le prochain arrêt ;

pour le reste, on a faim, on mange, on est fatigué, on se couche..mais surtout, je passe mes journées à la fenêtre...la vie en Transsibérien; toilette ? 2 WC et 2 robinets dans chaque wagon; alors lingettes...

nombreux convois chargés de bois, de benzine-neft, de minerai ?, de charbon, de gaz, de bois encore; de chars aussi; de matériel minier; les richesses naturelles sont immenses et très exploitées ; la Russie est riche, mais beaucoup de Russes sont très pauvres ; paradoxe...usines et bâtiments rencontrés sont le plus souvent en ruine, à l'abandon; la fin de l'URSS fut dure : de 340 , la Russie a encore 140 millions d'habitants; les autres ont choisi l'indépendance; alors les usines ont fermé...

les villages sont tristes : maisons de bois, grises, toujours une palissade tout autour, et un potager à l'intérieur ; vital ici; ordures partout; chemins boueux, pas de place ni d'église, sans charme; la nature est exubérante : fourrés, taillis, bosquets, forêts de bouleaux, parfois secs sur pied, d'épineux, beaucoup de zones marécageuses, c'est plat et immense : c'est la taïga verte; et quand la forêt s'ouvre, c'est la steppe, décrite à chaque page par Andrei Makine dans son merveilleux "Testament Français";

herbes blondes, épilobes, élégantes fleurs mauves , comme dans les Vosges; on a envie de s'y promener, de cueillir des fraises des bois, des myrtilles...je pense à Napoléon, vaincu par l'hiver et par cette immensité , toute plate, alors qu'il avait franchi les Alpes, et que d'autres y étaient arrivés avant lui : les Huns, les Tatares, les Mongoles...par contre, grande nouveauté : on voit des champs de blé, immenses, des moissonneuses en action; sans doute le bon côté de l'embargo...;

arrêt de 20 min à Perm ; région de goulags ...la nuit tombe;

- jeudi 11/8 : cette nuit on est passé à Ekaterinburg ; c'est là qu'ils ont exterminé le tsar Nicolas II en 1918 et toute la famille, dans la maison Ipatiev; rien vu, dormi;

Moscou 1818 km; +2 h; on a donc traversé la chaîne de l'Oural qui sépare l'Europe de l'Asie; ici commence la Sibérie ; temps gris, lourd; convois de gaz, pétrole, bois; encore; notre train se fraie un chemin entre eux; d'où un rythme très inégal: rapide, quand la voie est libre, très lent quand un convoi nous laisse passer; bouleaux, steppe, champs cultivés, ballots de foin...premier troupeau de vaches; au wagon restaurant, je recharge mon téléphone : poussif; mais j'ai une batterie solaire; prévue pour la Mongolie, elle m'est déjà bien utile;

14 h : arrêt de 16 min à Omsk, riche ville de Sibérie; Moscou 2716 km; personne ne monte, ni ne quitte...pas une babouchka vendant ses cornichons, ses poissons ou ses blinis sur le quai ? que sont elles devenues ? enrichies ? en vacances ? c'est par là que Dostoievski a passé ses années de bagne dans les années 1850, et qu'il a écrit ses terrifiants " Souvenirs de la Maison des Morts"; Staline n'a rien inventé; bagne = tradition russe; paysages splendides, steppe infinie, bosquets de bouleaux, somptueuse lumière du soir...a t elle pu adoucir le quotidien des bagnards ?...

20h : Barabinsk, vendeurs de chapkas, il fait nuit;

21h : Novosibirsk : 3380 km, + 3 h; 20 min d'arrêt ; belle grande ville, énormes complexes gaziers ou pétrolifères, belle gare verte; on traverse l'Ob, l'un des grands fleuves sibériens qui coulent du Sud vers l'Océan Glacial Arctique; dommage, il fait nuit...

- vendredi 12/8 : gris, humide, froid; vallonné, taillis et forêts mélangés ; vosgien...

9 h : Krasnoiarsk, au soleil et à la marche nuptiale de Mendelson ; mariage devant une vieille locomotive à vapeur; 20 min d'arrêt; 4104 km; + 4h; beaux immeubles modernes, environnement de montagnes douces; c'est beau; on traverse le grand Ienissei; superbes landes couvertes de fleurs roses ou jaunes; c'est beau comme sur les routes perdues du haut Colorado, comme un gigantesque Gazon du Faing; je me régale d'une délicieuse cacha d'avoine; plus sain que ces chips à l'oignon...quelques gigantesques champs d'avoine ou de blé; premiers convois de conteneurs chinois; dîner de blinis avec un couple de Norvégiens ; ils sont dans un wagon russe, propre ! si j'avais su...nuit froide;

- samedi 13/8 : Irkutsk : 2 h + 5 : 5185 km; beau et frais; on a traversé l'Angara, belle grosse rivière, "fille du Baïkal", qui lui échappe et se jette dans son bien-aimé Ienissei (légende du Baïkal); beau, mais il a beaucoup plu; on longe la rive sud du gigantesque Baïkal : 600 km de long, 1600 m de profondeur, plus grande réserve d'eau douce du monde...; il n'y a rien; montagnes couvertes de pins sombres = taïga noire + steppe rase; inondations;

10h10 : Oulan Oude : 5637 km, +5 h; capitale de la Bouriatie : stop 40 min, le train se vide; une autrichienne aux cheveux bleus monte dans mon wagon; peu après, le train chinois quitte la voie double, électrifiée du Transsibérien et vire plein sud vers la Mongolie, en remontant la rivière Selenga qui va se jeter dans le Baïkal; voie unique, non électrifiée, terminée dans les années 50; large vallée, montagnes sans arbres, steppe rase; premiers moutons, chèvres, chevaux, chameaux; premières yourtes;

15h à 19h : passage de la frontière Mongole : 5900 km

Dimanche 14/8 : 8 h +6 : Oulan Bator : 6300 km, 47° Nord (comme Sélestat), 17°, gris, capitale de la Mongolie, 1,3 millions d'habitants, 1350 m, 1000 Tougroug = 0,45€

demain 9 h commence mon tour "Mongolie Express" avec Horseback Mongolia

à suivre...

Gare de Iaroslavl, Samovar, cabine de 4 couchettes "Koupé", Sanitaires du train chinois n° 4, cerises et cornichons...
Steppe et bouleaux, Ob, Omsk, Isba Sibérienne, Ienissei, gare d'Irkutsk, Baïkal et Mongolie en vue... 
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- dimanche 14/8 : Oulan Bator : lessive, douche, repos dans un vrai lit...+ visite du Musée National ;

suis toujours impressionnée par le destin de Gengis Kahn , nomade mongole qui conquit au 13° siècle le plus grand empire de l'Humanité, du Pacifique à Moscou, à l'Europe, la Turquie, Jérusalem...son petit-fils Kubilai Kahn devint empereur de Chine et fonda la dynastie Yuan à Pékin ! il reçut longuement Marco Polo qui décrivit cette extraordinaire aventure dans son fabuleux "Livre des Merveilles" qu'il dicta en prison et en français à son voisin de cellule ! quelle histoire, au Moyen Âge...jamais lu, mais c'est prévu ;

- lundi 15/8 : on est à 5 pour faire le tour "Mongolie Express" + guide + chauffeur; tous dans une Ouaz, minibus 4x4 russe, moche , rudimentaire mais passe partout; visite du très beau monastère bouddhiste Gandan de Oulan Bator; puis en route;

beau et chaud : bouchons, trous dans la route, conditions épouvantables, ça saute, ça danse, ça repart..puis piste interminable vers le parc de Kustaï où, à partir des zoos européens , ont été réintroduits les chevaux de Prevalski, originaires de la région , et disparus depuis quelques années; paysages grandioses, montagnes et larges vallées couvertes de steppe rase, de temps à autre 2-3 yourtes, un cavalier rassemblant ses troupeaux de vaches ou chèvres cashmere, ses chevaux, ses moutons...

et au milieu coule une rivière....enchanteur, image idyllique de Mongolie; mais quelles pistes, quelles bosses ! vivement déconseillé aux lombalgiques ; après 3 h de Ouaz, découverte lointaine de ces petits chevaux sauvages à la courte crinière, tels que représentés dans nos grottes, mais aussi cerfs, marmottes, grues, aigles...

étape du soir dans un camp de yourtes d'une magnifique vallée, chèvres, moutons, chevaux, chameaux...beauté, calme, sérénité; en un mot : harmonie; dîner mongole arrosé d'un délicieux petit château bordelais à 30€ = 70000 tougrougs; nous sommes 3 nanas dans une charmante yourte à 4 lits, poêle au milieu, lumière, wifi, douche et WC attenants ; la classe quoi....

- mardi 16/8 : soupe, thé au lait salé, puis 4 h de route épouvantable plein sud; peu à peu la steppe change de couleur, les montagnes sont moins vertes, plus minérales ; la steppe, plus sèche, se couvre de sauge et autres plantes "méditerranéennes " parfumées et argentées ; troupeaux de grues, yourtes, chameaux; camions chargés de laine ou de yourtes; je suis frappée par la beauté et la noblesse de la vie des nomades rencontrés dans ces vallées splendides, opposée à la laideur, la pauvreté, la misère des bâtiments en durs des bords de route et des faubourgs de OuBi;

arrivée au camp de tipis de Kongo Kahn , sorte d'oasis au bord d'une montagne de granite rose; rudimentaire; mais eau chaude solaire et douche délicieuse; le tipi est l'habitat des éleveurs de rennes du nord de la Mongolie et de l'Altaï; balade à dos de chameaux de Bactriane près d'une rivière paresseuse, cygnes; puis visite d'un temple bouddhiste dans la montagne; temps gris, doux; nuit au son du meuglement d'un taureau furieux...

- mercredi 17/8 : gris, doux; après 2 h d'une route qui disparaît soudain, après une panne moteur réparée par notre chauffeur Otro, qui ressemble tellement au portrait de Gengis Kahn qu'il doit sûrement être son descendant...arrivée à Karakoroum où nous déjeunons dans sa famille; c'est une petite maison en dur, mais comme une yourte : même petit poêle,même mini évier, 1 grand lit pour toute la famille (2 enfants), WC = trou dans le "jardin"; on nous sert de la marmotte bouillie et de l'alcool de yaourt au nom irretenable;

puis on remonte la célèbre vallée de l'Orkhon, inscrite au patrimoine mondial de l'Unesco, sur environ 200 km par une piste éprouvante; visite d'un temple au sommet d'une montagne après 1 h de montée en forêt; nombreux troupeaux, yaks, moutons à queue grasse, chèvres multicolores, chevaux...parsèment cette splendide vallée de taches de vie; tout est vert, large , immense, entouré de montagnes douces et magnifiques...et au milieu coule la langoureuse rivière Orkhon ; grandiose, idyllique; épuisés mais émerveillés, arrivée vers 21 h dans une famille nomade; nous occupons une yourte à 5; il y en a 4 autres; il fait frais, feu dans le poêle, soupe de légumes, thé au lait et au lit;

- jeudi 18/8 : froid; petit feu dans le poêle; on assiste à la traite des yaks, les pattes avant liées; puis relâchées, elles retrouvent leurs veaux qui tètent goulûment;

départ pour une grande balade à cheval de 25 km; splendide mais nuées de mouches; il fait chaud; moi je fais le reportage photo avec Otro, notre chauffeur; nombreux passages de gués; région volcanique aux roches très agressives pour notre pauvre Ouaz; déjeuner chez des nomades en cours de route; beurre de yak, pommes de mélèzes passées rapidement dans le feu : les écailles s'enlèvent alors facilement et on mange les pignons ...puis douche aux sources chaudes de la vallée; piste épouvantable; nomades à cheval, ou à moto, en famille, à 2, 3 ou 4...retour vers 20 h; superbe journée ensoleillée et chaude; orage la nuit;

- vendredi 19/8 : pluie ++ départ pour les chutes de l'Orkhon; malgré le temps, superbe fond de vallée, herbe rase, mélèzes, montagne douce...puis retour vers Karakoroum = 250 km de pistes cassantes et sautantes = 6 h; autre versant de la vallée de la rivière Orkhon, soleil revenu; vols de grues criardes, oies sauvages, troupeaux, falaise de Ours : encore plus beau que le premier côté, si c'est possible;

Karakoroum, capitale de Gengis Kahn au 13° siècle : au sortir de la montagne, dans la steppe, petite bourgade pauvre mais animée; superbe mur ponctué de stuppas blancs : ce sont les anciens murs de la ville; à l'intérieur, beaux temples bouddhistes reconstruits au 17° siècle; car Kubilai Kahn, petit fils de G K, quand il devint empereur de Chine, établit sa capitale à Pékin ; quand les Ming prirent le pouvoir, en 1380, ils détruisirent Karakoroum; ce que nous voyons aujourd'hui est donc reconstruit au 17° à partir des éléments du site; c'est beau, c'est grand, c'est très chinois; dernière nuit en yourtes = ger ; beaucoup de français sur tout ce circuit;

- samedi 20/8 : très beau; Karakoroum-Oulan Bator : 400 km, 8 h, steppe infinie, troupeaux divaguant , nomades, 2 vaches tuées par un camion,1 cheval mort dans le fossé, voitures arrêtées, chauffeur sous le moteur, réparations, pneus crevés....routes toxiques pour tous, construites sur du sable, pleines de bosses et de trous...bétail en totale liberté...le prix à payer...

OuBi : trafic intense, bouchons, grande ville; ici vit une majorité des Mongoles; spectacle traditionnel de très belle qualité, très chinois; à 23 h je n'ai toujours pas reçu mon billet de train pour Pékin, demain matin, payé en Avril dernier....on verra ....

Oulan Bator et monastere de Gandan, notre Ouaz, , steppe et chevaux, camp de yourtes, Chameaux de Bactriane , Yaks, Karakoroum
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- dimanche 21/8, 7h30 , Oulan Bator : je n'ai toujours pas mon billet pour Pékin; et le train part à 8h30...finalement on m'explique que les billets n'ont été mis en vente que ce matin...et tout s'arrange...le train part , plein sud, vers la Chine; il pleut; dans mon compartiment, un jeune Mongole et un Chinois qui entasse des cartons très lourds partout ; de quoi ? nous sommes sur une route majeure des caravanes, celles qui , chargées de thé ,partaient de Chine, traversaient la Mongolie pour se rendre en Asie Centrale, en Sibérie, en Russie...maintenant le trafic se fait dans les 2 sens, avec d'autres marchandises;

rapidement le paysage change : les montagnes s'estompent, la steppe , plus jaune, forme de grandes vagues; peu à peu il ne reste que de l'herbe sèche , rare et rase, quelques touffes plus vertes, et le sable grossier , brunâtre; plus de montagnes, plat à perte de vue : nous entrons dans le Désert de Gobi; sur 700 km le paysage change peu : très sec mais pas complètement désertique, qqs rares troupeaux de vaches, chevaux, moutons, chameaux; qqs gazelles aussi, grandes comme des chevreuils; pendant 12 h nous verrons 2-3 petites gares près de zones d'extraction de minerai; lequel ? stratégique, sûrement...un camion au loin...il y a donc une route aussi, et une ligne électrique ; il fait beau, chaud, mais sans excès;

20h : arrivée à la frontière : stop 2 h côté Mongolie, 22h - 1 = 21 h : Erlian, ville frontière de Chine, arrivée en fanfare, au son d'une musique militaire douce, policiers et policières en rangs serrés, impeccables; on nous prend la température avec un pistolet à infrarouges et les passeports...puis on peut descendre : 4 h d'arrêt pour modifier les essieux, on change de largeur de voie; dans la gare les voies sont à 4 rails pour permettre aux 2 types de trains de passer; nous descendons, enjambons les voies, comme tout le monde ici, et allons grignoter ce qu'on nous propose : pattes de poulets et autres douceurs...puis on attend sur le quai, dans la douce nuit de Chine...départ prévu à 1h20

- lundi 22/8 : je me réveille à 6 h dans une gare d'une propreté impeccable; étonnant quand on voit les gens cracher partout, même dans le train; pti dèj : thé très parfumé, œuf très dur au blanc presque brun, tartines; le serveur se mouche dans la poubelle...succession de villes, villages, petits champs cultivés, autoroutes à 4 ou 6 voies, vides, viaducs, qqs ânes broutent de ci de là, dunes de sable...la steppe n'est pas loin...temps brumeux, frais; le train traverse une chaîne de montagnes, tunnels; champs de maïs; même qqs vignes ! arbres fruitiers; chantiers...déjeuner : riz, baguettes, légumes cuits, tofu ; je suis effarée de voir comme tous ces gens, asiatiques comme occidentaux, se tiennent mal à table, vautrés sur le coude; ça m'avait frappé en Russie, mais c'est partout pareil; j'ai honte pour eux; que leur a appris leur mère ? quid du savoir-vivre ? tout fout l'camp ! le train se faufile maintenant dans des montagnes escarpées, des gorges profondes; conduite inconfortable : quand le conducteur freine, les wagons se télescopent bruyamment et brutalement ; tunnels, falaises, viaducs, barrages...finalement chantiers, petites maisons de brique, eau chaude solaire sur les toits, immeubles, trafic.....on approche.....

Désert de Gobi, frontière à Erlian, arrivée en Chine... 
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- gare de Pékin, lundi 22/8, 11h40 : foule immense, guerre des taxis, ils en viennent aux mains ! les chauffeurs ne comprennent pas, même en montrant la réservation de l'hôtel...?? un caïd intervient, règle le problème...et me demande 5 ou 10 fois le prix indiqué dans mon guide.. mais qu'y faire...

l'hôtel Jade est très bien situé, le long de le Cité Interdite, dans une ruelle, en plein centre; je vais aussitôt explorer mon quartier; une Chinoise m'aborde en anglais et me fait la conversation, puis me propose d'aller boire un thé; quand la facture arrive, je tombe à la renverse, et prends la fuite...c'est la première fois que j'ai un sentiment d'hostilité dans une ville; impossible de communiquer, et les quelques uns qui parlent anglais nous repèrent et en profitent pour nous plumer; facile, il y a très peu d'occidentaux, la foule est asiatique ; on est vite repérés; maintenant je suis sur mes gardes et utilise le traducteur enregistré sur mon smartphone pour communiquer; et ça marche : grâce à lui j'ai trouvé du lait concentré pour mon café !

Jean Louis, ami de mon frère Pim, me donne RV pour un dîner avec ses neveux : parc Beihai, sur la terrasse du toit d'un Vietnamien, face au lac...charmants, délicieux, petit vent, douce nuit de Chine; terminons par le tour du lac, très animé, toutes sortes de cuisines, de musiques...belle soirée, merci Jlouis;

- mardi 23/8 : j'aimerais bien envoyer mon compte rendu sur le Désert de Gobi, mais je n'arrive pas à me connecter; wifi ok, mais rien...je vais dans un Mac Do : idem; chez KFC : idem..? Jojo m'apprend que Google est interdit en Chine...embêtant ; je n'ai qu'une adresse mail et c'est Gmail...donc pas de mail, pas de nouvelles...quelques SMS; visite de la Cité Interdite, palais des empereurs de Chine pendant des siècles ; plus j'approche de la place Tiananmen, plus la foule est dense : il fait très chaud, queue aux portiques de contrôle, queue aux guichets des tickets, queue à l'entrée de la Cité Interdite, chaleur, moiteur, et cette foule...j'en oublierais presque de dire que c'est grandiose, gigantesque, magnifique, mais je suis contente d'avoir tenu le coup dans ce labyrinthe et de trouver la sortie Nord...

j'en profite pour grimper sur la Colline du Charbon, très beau parc d'où on a une vue magnifique sur Pékin...dans la brume; soirée dans les hutongs et la rue piétonne animée Wangfujing;

- mercredi 24/8 : je tente le métro : à 9h30, peu de monde, parfait, facile, ultra propre, moderne; mais pour trouver une place assise, il faut bondir plus vite que le grand gaillard tout content de me l'avoir barbotée...

visite du Palais d'Eté, véritable Versailles chinois : palais, jardins, temples, gigantesque et superbe galerie couverte permettaient à la famille impériale de passer l'été dans la relative fraîcheur de sa colline et de son joli lac; c'est beau, mais il fait très chaud, brumeux, et il y a un monde....beaucoup d'enfants, de familles multigénérations ; un garçonnet, culotte fendue, rond comme un mini sumo, les petites filles comme des poupées ; il n'est pas rare de voir un jeune homme donner la main à une petite vieille toute rabougrie...tout ce monde est bien habillé, joyeux, mais "bonjour", "merci", "pardon"...n'existent sans doute pas en chinois; on pousse, crie, passe devant, rote, crache allègrement ....je les intrigue beaucoup; je suis souvent le seul visage occidental de la foule !

Pékin, Shangai, Hong Kong, Taïwan, Singapour, Seoul, Kuala Lumpur...ils donnent , et ont l'impression d'être le centre du monde, très confiants dans leur avenir...mes compagnons de voyage en Mongolie, vivant à Hong Kong , Singapour, Londres, m'avaient déjà donné cette impression ; l'Europe ? sourire...c'est ici que ça se passe !

en rentrant, je passe devant une enseigne "Network"; j'entre et leur demande s'ils peuvent m'aider à résoudre mon problème de Gmail; personne ne parle un mot d'anglais...mais une charmante jeune femme parlant français arrive avec toutes ses copines, me télécharge un VPN, et ça marche ! jusqu' à quand ? en tout cas j'en ai profité pour vous envoyer ma traversée du Désert de Gobi, et pour numéroter les mails, au cas où je serais à nouveau bloquée....je reçois des messages de certains d'entre vous; merci à tous, ça fait du bien de se sentir connecté avec le pays, la famille, les amis...

alerte canicule, séisme en Italie, Sarkozy candidat....comme je suis loin de tout ça...mais je compatis...

- jeudi 25/8 : moins chaud, vent, ciel bleu...génial ! visites de la superbe maison du prince Gong, de la tour du Tambour, où j'assiste à la volée de 13h30, impressionnant, visite du temple des Lamas, merveilleux temple tibétain...tous ces palais et temples sont construits sur le même modèle : très belle porte d'entrée, en bois, très décorée, cours, palais et temples successifs, galeries couvertes, jardins...qui constituent un superbe labyrinthe entouré d'un grand mur; en fait, comme la Cité Interdite, en un peu plus modeste; à peine....

le tout, à pied, en passant par les nombreux parcs, par les " hutongs " où vivent bon nombre de Pékinois dans de minuscules ruelles avec échoppes, ateliers, boutiques très locales...aucun sentiment d'insécurité, on m'accorde des photos, on me sourit parfois...peu de vélos, beaucoup de mini motos, 2 roues, 3 roues, trottinettes....tous électriques, non polluants, silencieux, pas de lumière, ni casque....ça klaxonne beaucoup, se faufile, bouchonne, passe au rouge, en contre-sens, travaille, transporte ...sympa, efficace; pourquoi pas chez nous ? voitures nombreuses, qqs françaises, bien plus de belles allemandes, et surtout des modèles et des marques inconnus chez nous, asiatiques;

la ville est plutôt propre, on balaie, on ramasse les bouteilles en plastique, les cartons...WC publics partout, corrects, pratiques quand il faut absolument....balade du soir dans la belle avenue piétonne pas loin de chez moi : Hermès, Oméga, Hilfiger, Mac Do, H M, Lagerfeld, Swatch, Prada...ils y sont tous; il fait nuit, et délicieux; les Pékinois sont de sortie, en famille ou en amoureux; on danse dans la rue; je cherche une pizzeria, pour assurer mon lendemain; en vain; je m'achète donc une banane et m'offre une bière; ça ne devrait pas me poser de problème...car demain, c'est le grand jour...la Grande Muraille de Chine !

- vendredi 26/8 : très beau, pas un nuage, pas de brume; bien choisi...

départ 8 h; à 7 + guide + chauffeur en minibus Mercedes; passons par le tombeau des Mings , nécropole des empereurs de Chine, mais sans voir la fameuse allée des statues ; frustrée; route sinueuse de montagne, conduite kamikaze de notre chauffeur qui coupe les virages, double sans visibilité, à droite, se faufile, klaxonne...ici les routes sont bonnes mais la conduite....et sans ceinture ! arrivons à Manuyuli ou qq chose comme ça, où la route s'arrête; on monte sur un télésiège, mon voisin s'embrouille à l'arrivée, ne relève pas ses pieds, ni le garde-fou, je l'aide à la hâte, mon bermuda s'accroche, un solide chinois m'attrape, je m'agrippe...et tout s'arrange, indemne, papiers, argent, smartphone tout est là...mais bermuda complètement déchiré : j'ai une fesse à l'air ! rien de grave, c'est chinois d'avoir les culottes fendues...je m'enchinoise...

c'est très beau : grande muraille grise, de briques et de pierres, large de plusieurs mètres, bordée de créneaux et merlons, qui monte et descend fort en suivant la ligne de crête, ponctuée de tours de gué...dans une montagne très escarpée , couverte de végétation....et en plus il fait beau, bon, et il y a peu de monde; ça arrive ! notre guide nous laisse 2 h pour nous remplir les yeux de ce spectacle tant souhaité;

gigantesque muraille de plus de 8000 km, tronçonnée, commencée avant JC et continuée par les différents empereurs pour protéger la Chine de ses envahisseurs Mongoles et Mandchous...elle n'a finalement servi à rien puisque Gengis Kahn l'a franchie...sauf, au moins, à nous éblouir...on dit que de nombreux cadavres des ouvriers morts à la tâche y sont emmurés; et que, si le mortier utilisé à tellement bien résisté, c'est grâce au riz gluant qui y était ajouté...

retour par une dégustation de thés dans des tasses de la taille d'une dînette, et massage douloureux mais bienfaisant des pieds ! le retour est long, autoroutes très encombrées, mais nous traversons le Grand Pékin, neuf, propre, vert, jardiné, couvert de splendides bâtiments aux formes audacieuses, longeons le parc olympique...suis très impressionnée par cette immense et belle ville, propre, laborieuse, riche, inventive, tournée vers l'avenir...je n'y compris assurément rien : ça un pays communiste ??? faudra qu'on m'explique...

demain je repars, 23 h, train russe K19 "Vostok" vers Oulan Oude, Sibérie, en passant par Harbin, la Mandchourie et la Mongolie Intérieure....

j'espère entrevoir l'Amour, ce grand fleuve de l'Extrême Orient Russe qui le sépare de la Chine et coule vers le Pacifique...

Pékin et la Grande Muraille 
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- samedi 27/8 : dernier jour à Pékin; très beau; je laisse ma valise à l'hôtel et pars découvrir le Marché de la Soie, temple du shopping made in China; je passe par un marché très animé où on propose du petit scorpion encore frétillant, ou grillé en brochette, de l'étoile de mer, du serpent...ravie de trouver un gilet multipoche pour remplacer le mien qui rend l'âme ; je suis presque émue de l'abandonner, mon fidèle compagnon de tant de belles aventures...

je termine mon séjour à Pékin par le parc du Temple du Ciel : c'est merveilleux, magnifique, éblouissant : le grand Temple du Ciel, circulaire, couvert de tuiles vernissées bleues, la vue sur la ville, les jardins aux cyprès pluri centenaires, l'ombre bienfaisante, les gens qui chantent et dansent près d'une fontaine...et des familles, de très mignons petits chinois, des parents en adoration...moment délicieux dans cette journée torride...mais normal, le soleil tape fort ici, nous sommes à la latitude de Madrid...

gare de Pékin, je me suis à nouveau fait avoir par mon chauffeur qui m'a abandonnée au coin d'une rue, après avoir empoché mon billet, alors qu'il restait au moins 2 km à parcourir...ce côté arnaqueur me gêne beaucoup, pas habituée; comment font Jlouis ou Valentin pour traiter avec des gens si roublards ?....

- samedi 20 h à la gare de Pékin : belle expérience; mieux vaut être très en avance....contrôle des bagages, des passeports, portes d'embarquement, comme un aéroport...ça grouille, tout est illisible pour moi, sauf le numéro du train, K19, et l'heure; donc je m'en sors sans problème; après, on attend, comme tout le monde, assis où on peut, par terre, sur une marche...la plupart ont le nez sur leur smartphone, d'autres jouent aux cartes, ou mangent...ma jeune voisine veut entamer la conversation en anglais; mais impossible; leur niveau est encore bien pire que le nôtre....

les grands trains russes ont tous un nom : voici le Vostok = Orient , qui parcourt les 9000 km de Pékin à Moscou , par la Mandchourie, en 7 jours; seule dans mon compartiment, ultra confortable, une autre dame dans le wagon ! mazette, quelle différence avec le train chinois ! petit rideaux, nappe, vitres propres, couchette double épaisseur, linge de toilette, clim....la classe...1 moustique ! zut !

- dimanche 28/8 : 6 h, très beau ; ça fait 7 h qu'on est partis, et toujours des tours de 20-30 étages, neuves, belles, une autre ville, idem, des champs de maïs, des éoliennes...peu à peu les hautes montagnes qui entourent Pékin disparaissent; nous roulons plein nord, pas loin de la mer de Chine, longeons la Corée du Nord...redoutable voisin...ami ou ennemi ? nous traversons la Mandchourie, région de l'Extrême Orient chinois, redoutée d'abord, convoitée jadis par les Japonais...maïs à perte de vue, villes énormes, bouquets de tours neuves, quartiers pauvres, petites maisons, ordures...rien de bucolique...je vois passer un grand serpent blanc, un CRH = TGV chinois;

15 h : km 1300 : Harbin, grande ville du nord de la Chine, lieu d'un célèbre festival de sculpture sur glace, en hiver; qqs minutes d'arrêt, on descend, il fait bon; immense quai vide...nous ne sommes que 20 ou 30 voyageurs dans ce train ! superbe loco chinoise noire, rouge et or, avec faucille et marteau ! le chef de gare hurle ses ordres, une baguette à la main; ici on ne rigole pas...et tout autour, ces tours toutes neuves, parfois inachevées, semblent parfois vides...mais qui va habiter dans tout ça ? bien sûr, ils sont nombreux, mais ça construit tellement, et partout...le pays est plat comme une crêpe, maïs toujours, steppe aussi, marais, marécages, qqs animaux...et puis une raffinerie, et plein de derricks partout, qui s'inclinent et se relèvent, comme des poules qui picorent... du pétrole ! et de nouveau , marécages, steppe...

le train fonce plein ouest, vers le soleil rouge; dommage, il va faire nuit et je ne verrai rien de la Mongolie Intérieure = chinoise; petite faim ; je vais au wagon-restaurant ; on ne parle que chinois et ne prend que les Yuans...roubles ? euros ? carte ? bù = niet ! retour dépitée par tant de raideur dans un train international...et voilà notre provodnitsa = dame du wagon, russe, qui, me croyant affamée, m'apporte de la pastèque et du pain ! спасибо большое! merci beaucoup !

- lundi 29/8 : 4 h : km 2300 : Manzhouli : frontière chinoise : 3 h d'arrêt; gare grandiose, toute neuve, colonnes grecques, militaires en capote : il fait froid ! 7h30 = 2h30, heure de Moscou, km 2330 : Zabaïkalsk, frontière russe; on prend ma température, un chien me renifle....il fait beau et frais;

9 h d'attente : changement d'essieux; balade avec Oxana, en tenue léopard , dans cette petite ville misérable, minuscules magasins, bâtiments délabrés....retour en Russie ! Oxana, russe d'Irkoutsk, vend des chaussures à Pékin, où elle gagne bien mieux sa vie...le wagon se remplit un peu; on part; toujours seule dans mon compartiment et revoilà la steppe, infinie, rase, blond-roux, légèrement vallonnée; c'est beau, très doux; et notre pauvre train à beaucoup de mal à les gravir, ces collines : il tousse et crache tout noir comme un vieux tuberculeux; qqs vaches, mais pas de yourtes, pas de nomades libres, mais qqs rares paysans établis dans de pauvres petites maisons de bois, entourées d'une palissade...

Borzya : 30 min d'arrêt; changement de loco; un monsieur monte chez moi; qqs arbres, petits bouleaux, qqs pins, un lac, une jolie rivière, l'Argun peut être, qui va donner naissance à l'Amour...mon nouveau voisin m'offre un cornichon salé à l'aneth, une carotte de son jardin; et m'oblige à accepter une côtelette de mouton froide, bien odorante et bien grasse...c'est si gentil qu'il est impossible de dire non; et notre provodnitsa qui m'offre du borsch en passant l'aspirateur...

- mardi 30/8 : je me réveille, pleine nuit, train en gare de Tchita, région célèbre pour sa richesse en minerais, or, diamants...mais aussi pour ses lagers, ses bagnes, ses goulags;

"слава труду" = la gloire par le travail, c'est ce que j'ai lu sur un bâtiment en ruine...ça me rappelle malheureusement le "Arbeit macht Frei" de l'autre tyran...voilà de nouveau la steppe typiquement sibérienne : herbes, bouquets de bouleaux, qqs petits saules près d'une rivière paresseuse, douce montagne au fond...

j'arrive dans 3 h à Oulan Oude; convois de bois, minerai, charbon....

ces 3300 km de Chine en Sibérie sont très intéressants; j'ai vraiment eu l'impression de passer d'un pays conquérant et dynamique, à un pays ravagé et résigné ; mais peut être me trompé-je....qqs petits saules commencent à rougir, qqs feuilles jaunes sur les bouleaux; c'est la fin de l'été ;

maintenant, j'ai l'impression que l'aventure va vraiment commencer...

Pékin, le Temple du Ciel, la gare, les villes nouvelles; retour en Sibérie avec mes compagnons de voyage... 
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- mardi 30/8 : Oulan Oude, Bouriatie, Sibérie, à l'Est du lac Baïkal :

je prends un bus et arrive au monastère vers midi, à 80 km, sur la route d'Irkutsk : petit, presqu'en ruines, l'église, déjà rénovée, resplendit de ses coupoles d'or;

le reste misérable, des trous, des clous rouillés, des orties, des travaux en cours...de pauvres isbas, comme on en voit partout en Russie : c'est là !!!!

je rencontre Lioudmila et ses amies, puis l'Igoumen Alexii, moine vif et direct, qui me bénit et me fait baiser sa main, comme tout le monde...

on m'emmène dans ma chambre : petite maison en face du monastère où je loge avec 2 autres jeunes femmes : orties partout, eau à tirer du puits, trou au fond du "jardin"...

j'assiste à la sonnerie du carillon de midi, superbe;

déjeuner au réfectoire : soupe épaisse, "compote" de fruits bouillis,

puis je rencontre Anna et Lioubov qui me montrent le potager où je vais travailler, et me préparent un "bania" = dans une misérable petite isba faite de traverses de chemin de fer, on tire plein d'eau du puits, on en met dans le poêle et dans une grande cuve en plastique, on met le feu au poêle;

quand c'est chaud, on m'invite à y aller : dans l'entrée, je me déshabille, puis dans la bania je prends de l'eau chaude et de l'eau froide dans une bassine, et ainsi me lave et me douche;

on me propose des branches de bouleau pour me fouetter..;

elles vont rester là à suer et se fouetter; pas pour moi; ensuite je fais ma lessive dans une bassine, entre les orties du jardin;

dîner 20h30, pâtes, tvorog, thé

office : 21 h, puis procession de nuit autour du monastère, 1 km; immense ciel étoilé;

Lioudmila m'a donné le "parol" = mot de passe du wifi; je viens de recevoir vos messages; un très grand merci : si loin, dans un endroit aussi primitif, ils sont très bienvenus;

- mercredi 31/8 : office de 6 h à 7h20, debout, foulard sur la tête;

ptit dej = kacha d'avoine, thé

8h : il fait très beau, Anna m'emmène au potager : on cueille du persil, des feuilles d'oignon, de l'aneth, puis on cherche les cornichons cachés sous leurs grandes feuilles; environ 15 kg et on apporte le tout à la cuisine ; superbe sonnerie de carillon à 11h30

midi : soupe, pâtes

13 h : on traverse la Selenga, belle rivière qui nait en Mongolie et se jette dans le Baïkal; en barque de métal, à la rame : Serioja , futur moine, est notre capitaine;

puis on va aux champignons, dans la forêt, à 4 : qqs ceps, bolets, russules, lactaires;

elles ramassent presque tout, même des vieux...il fait chaud; moustiques; pas de chemin, on se perd...on arrive à rentrer, Serioja nous fait traverser;

contente d'avoir emporté ma tenue des Solovkis : pantalon sous la jupe, chaussettes Labonal anti-tiques, chemise à manches longues, gants de vaisselle, chapeau et voilette anti-moustiques : indispensables pour moi, les autres n'ont rien...toilette à l'eau froide dans la bania, dîner, messe et procession;

notre Igoumen Alexii a beaucoup d'allure : grand, mince, le visage émacié, avec sa grande houpelande, sa coiffe et son voile noirs, il en jette...mais ses yeux..юродивый ?

- jeudi 1/9 : très beau, frais,

pas de messe, ai dormi jusqu'à 7 h : je me ménage, il faut tenir 2 semaines à ce rythme ;

on part cueillir des fruits au "jardin" : le nom qui convient le mieux est "foutoir", mais , pour être correcte, je vais dire "jachère" : herbes folles, orties, vieux banc, tonneau rouillé, c'est là qu'on remplit des sceaux de minuscules prunelles noires, de petites prunes jaunes, de cassis ; je suis couverte comme hier, elles crapahutent les jambes nues sous leurs jupes longues....mais ne se moquent pas de mes gants et de mon voile anti-moustique si utile...merci Françoise qui me l'a prêté ;

ici on prend tout ce que donne la nature; c'est quasiment une économie de survie, comme nous racontaient nos parents, quand ils étaient réfugiés à St Gautier, pendant la guerre; c'est comme ça pour la plupart des Russes de la campagne, pas seulement ici; je vis la réalité russe d'aujourd'hui ;

je me demande parfois ce que j'ai à expier pour me fourrer dans un tel purgatoire...

retour 1 h, soupe, haricots secs,

puis départ avec Serioja et les 3 dames : aux champignons, derrière la voie ferrée; car j'ai oublié de dire que la voie du Transsibérien passe à 250 m de notre monastère ; je l'avais d'ailleurs aperçu en venant en Mongolie;

forêt éparse de bouleaux, champignons, moustiques; il fait chaud, on transpire...au retour, bania délicieuse et bienvenue;

voilà ma vie au monastère;

les Russes qui m'entourent sont des gens simples, rustiques, rudes; certains ont des visages taillés à la hache; je me dis qu'ils sont sûrement des descendants de bagnards qui ont survécu aux camps et sont restés dans la région, une fois libérés...

à table, affalés, ils lapent bruyamment leur soupe, croquent de l'ail cru, dévorent leur kacha, sucrent leur thé de 2 cuillères à soupe...mais se signent avant et après le repas;

tous travaillent : les hommes aux réparations, à la construction, hier ils ont coulé une dalle..les femmes au nettoyage des champignons, préparation des cornichons, potager.. on dit les Russes paresseux, ici ce sont des bêtes de travail...

Monastère de la Selenga, notre datcha, la bania, mes amis 
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- vendredi 2/9 : grand vent d'Ouest, brume, grand frais

matin : on trie les tomates vertes sur des claies : pour les vaches...mûres....pourries...

aprèm' : champignons ou potager : je choisis le potager; je vais couper les têtes d'aneth sèches pour récupérer les graines à planter; je tombe sur 1 os, puis 2, puis 3...je reconnais un humérus, un col du f'...ah oui, Anna m'avait dit qu'avant, il y avait là le cimetière du couvent datant des années 1650, et que les os remontent de temps en temps...c'est peut être pour ça que ce potager est si prolifique, choux énormes, carottes comme des betteraves...Anna, Lioubov et Natacha rentrent avec des sceaux de ceps; nettoyage;

- samedi 3/9 : même temps; + petite pluie, 12°on vit au ralenti, feu dans le poêle; je pense à vous qui avez toujours si chaud...

aujourd'hui pas le choix : aux champignons ! tenue de trappeur sibérien, et en route : on grimpe dans la montagne, taïga, bouleaux, herbes hautes, fougères mouillées, troncs tombés, ça glisse, ça mouille...on rapporte 15 kg de bolets, quiches = lépiotes, halimaches...mais ces forêts primaires me sont hostiles : pas de chemin, aucune signalisation, aucune trace de vie, pas le moindre petit oiseau, on cueille, on marche ...et on se perd; c'est comme dans le conte russe "Macha et l'ours", où Macha va chercher des champignons, se perd, trouve une petite isba, s'y endort, l'ours rentre.............pour retrouver notre chemin, seules solutions : la direction du vent, et le bruit des trains; et, quand on a de la vue, les coupoles d'or du monastère...heureusement qu'il y a du vent d'Ouest et des trains !

messe du soir : de 17 à 21 h, debout...repas de fête avec beurre, fromage frais, natte délicieuse; je m'empiffre....

- dimanche 4/9 : repos

repos ? de 9 h à 13h45 messe, debout, à jeun : interminables litanies, signes de croix, inclinaisons, aplatissements, "Gospodi pomiloui "..., et encore, et encore...finalement l'iconostase, mur d'icônes au fond de l'église, s'ouvre, apparaît Igoumen Alexii en toge d'or, superbe, on aperçoit l'autel, il passe dans la foule avec un encensoir à grelots, re-litanies, ferme l'iconostase, je reconnais un Credo, "Viero...", "Kirie"...puis il disparaît une bonne heure, on attend, litanies....il se confesse ...? il revient, communion au vin rouge, tous avec la même cuillère, litanies...il nous rassemble devant lui, debout, bien sûr : sermon..baisement de main...fini ? non, litanies.... Serioja lui apporte un récipient et un gros pinceau, chacun de nous est abondamment aspergé d'eau bénite; je mets mon capuchon, il m'asperge 3x, pleine figure, trempée ...litanies, sermon..........baisement ...épuisée !

ferveur, humilité, servilité même, font sûrement partie de l'âme russe; culte de la personnalité aussi ...

et moi ? pourquoi ? pour qui, ces cérémonies d'un autre temps, ces épreuves ...?

peut être, ou même sûrement, comme disait grand mère, parce que quelqu'un, dans ma famille, parmi mes amis, a besoin de tout ça...

Potager, champignons, messes... 
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- la semaine s'est bien passée, par beau temps plutôt chaud, à la cueillette des tomates vertes, aux champignons, à la confection de conserves de tomates, de concombres...mais aussi à la préparation de la grande procession du dimanche 11 Septembre : remplissage et vissage de 1000 bouteilles d'eau bénite, confection de 1000 petits gâteaux et petits pains (j'en ai des tendinites aux poignets..), gonflage de centaines de ballons pour décorer l'immense réfectoire...mais aussi un journaliste de la presse locale est venu m'interviewer, et la chaîne de télé ТИВИКОМ venue spécialement voir ce que donne une française dans un monastère sibérien..(www.tvcom-tv.ru)suis devenue une curiosité !

- dimanche : énorme procession, plus de 1000 personnes venues en bus, en voitures d'Irkutsk, Ulan Ude...toutes les femmes, les petites filles, foulard sur la tête, jupes jusqu'au sol...je pense au beau film "Witness"; c'est l'ambiance de cette foule...

en tête, voiture de police pour couper la route Moscou-Vladivostok, camion-carillon, bannières, icônes, cosaques en grande tenue, igoumens arrosant abondamment la foule, camion rempli de bidons d'eau bénite...au bout de 10 km, montée équivalente au sommet du Donon pour adorer une icône sainte ; même les toutes vieilles avec béquilles sont arrivées au sommet..

pas de doute, les Russes sont faits d'un autre bois que nous...ils en ont vu d'autres...

- dernière récolte des carottes ce matin avant de partir ; adieux émouvants, gens touchants, attachants, si simples, si fervents, si soumis à leur charismatique igoumen qui décide de tout, que tous vénèrent...on se jette à ses genoux, on baise sa main, on laisse tomber son travail pour s'aplatir devant lui....je ne peux m'empêcher de penser à Raspoutine, ce moine qui eut une telle influence sur la dernière tsarine, et sur l'histoire de la Russie; en voyant ça, je comprends comment c'est possible...

ce monastère est un petit monde de gens très croyants, de gens perdus, sans famille, et Piotr à la merveilleuse tête de Russe, si respectueux, qui me fait la révérence, aurait fait 18 ans de prison avant d'entrer au monastère ??? et Igor, ce beau garçon, toujours prêt à rendre service, souriant, serait gravement malade ? et quand j'ai laissé tous mes médicaments il m'a baisé les mains et m'a serrée contre lui...et Serioja, futur moine, qui ne cache pas sa gêne devant le délabrement de son pays et le rêve qu'évoque la France, et Anna, mon capitaine du potager et des champignons, Liouba qui me prenait par la main pour me montrer comment s'y prendre dans ces interminables cérémonies, qui m'appelait sa princesse...elles ont un mari, des enfants, mais il boit, ou est parti, les enfants sont grands...le monastère est leur refuge, leur famille, elles se rendent utiles, vivent leur foi servile, semblent heureuses...et Irina qui partageait ma pauvre maisonnette et qui a mis sa vie entre les mains de l'igoumen...Veronika qui confectionnait de si bons petits gâteaux et m'a offert un bel œuf décoré de perles...tous furent très accueillants, très attachants dans ce petit monde si simple, si pauvre, si loin de tout et des soucis du monde, si abandonné de Moscou...

je pense à l'émission " Rendez vous en terre inconnue" où une personnalité part vivre qqs jours en Mongolie, ou chez les Nenets...pour moi ce fut un peu la même découverte, la même émotion finale et imprévue devant tant de chaleur et d'authenticité, malgré mon incompréhension devant tant de servilité, d'obscurantisme...mais je pense sincèrement que les Russes, très désorganisés, peu logiques, ont besoin de se soumettre à un pouvoir fort, et qu'ils le savent;

- suis à présent à Ulan Ude, capitale de la Bouriatie; agréable ville entourée de steppe, forêts, et de belles montagnes, comptoir important sur la route du thé, créée par les cosaques vers 1650, et développée depuis l'arrivée du Transsibérien au début du 20° siècle; centre du bouddhisme en Russie; confortable hôtel Bouriatia à 4200 roubles = 60€ les 2 nuits; une douche, un bon lit....population très mélangée de Russes et de Bouriates, très "mongoloïdes" ou même "esquimaux", petits, surtout leurs enfants, sont minuscules; belle soirée sur la place du théâtre, piétonne, dont la fontaine jaillit au son de belles musiques classiques...et puis l'énorme tête de Lénine qui persiste sur la place des Soviets...

demain j'irai encore voir le plus beau musée ethnographique en plein air de Russie, puis je prendrai Le Grand Train Russe, le Rossia N°1, le plus célèbre, celui qui fait le trajet Vladivostok-Moscou, 9400 km, en 7 jours; après 4 jours, j'arriverai dimanche matin à Moscou, d'où je rejoindrai Francfort et Strasbourg en soirée;

fin d'une aventure exceptionnelle en tout point;

merci à ceux qui l'ont suivie, qui m'ont soutenu; je vais revenir sur terre, retrouver notre réalité dont j'étais si loin...je me réjouis de vous revoir, tous, et en bonne santé

bons baisers de Russie...

Martine

Préparation et Grande procession du 11 Septembre, cosaques , Oulan Oude, isbas sibériennes et tigre de l'Amour
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- 7° Voyage de Martine en Russie, préparé sur internet

- Recherches commencées vers Noel

- 3 visas : Russe (3mois, 2 entrées) et Chinois à Strasbourg, Mongole à Paris

- billets de trains en 2° classe = "koupé" = 4 couchettes par compartiment; ils s'achètent en général 45 jours à l'avance

- vol Lufthansa acheté en Février


DEPENSES PRINCIPALES :

Lufthansa Strasbourg-Moscou AR, bus Francfort + vol direct : 254 €

Train chinois n° 4, Moscou-OuBi : 367 € par Real Russia

Circuit Horseback Mongolia : 750 €

Train chinois OuBi-Pékin : 140 € par Horseback Mongolia

Hotel Jade, Pékin, 5 nuits sans PD : 222 € par Booking

Train russe Vostok n°19 Pékin-Oulan Oude : 318 € par Travel China (livré à l'hotel)

Train Rossia n°1 Oulan Oude-Moscou : 283 € par tutu.ru

soit 2334 € +....


Automne en Sibérie