Comme d'habitude, un beau ciel bleu nous surplombe lorsqu'on sort de la tente, réchauffés par les premiers rayons du soleil. Il tape assez fort dès 8h, à ce moment ou bien il faut ouvrir la toile imperméable, ou bien se lever ! Le paysage au loin est montagneux et éclairé d'une belle lumière; par contre on se rend compte qu'on dort un peu au milieu d'une décharge, enfin de tas de gravats qui s'amoncellent par ci par là. C'est malgré tout super appréciable de pouvoir camper absolument où l'on veut, à titre gracieux, sans risquer d'être inquiété par qui que ce soit dès lors qu'on est pas sur une propriété privée. Oman fait 309 000km² (plus de la moitié de la France métropolitaine) et compte seulement 5,2 millions d'habitants : cela laisse de la place pour les campeurs comme nous !
Nous partons sur une route qui gravit une montagne, pour rejoindre le village de Hatt, que Mohammed nous à conseillé d'aller visiter. En chemin nous doublons plusieurs camions citernes qui livrent l'eau aux villages un peu perdus. Les routes sont souvent en travaux, ils semblent faire de leur mieux pour améliorer les infrastructures existantes, déjà très bonnes. On s'arrête au col admirer la vue sur les contrées reculées que nous partons explorer.
Malheureusement tout n'est pas goudronné à Oman, en particulier lorsqu'on commence à vouloir aller loin et profond dans la montagne ! Mohammed, ainsi qu'un marchant au souk de Nizwa, nous ont clairement dit "pas besoin de 4x4 pour aller à Hatt", j'ai pris le soin de leur montrer l'itinéraire concerné sur une carte afin qu'ils me le confirme... Ici termine la route goudronnée et commence l'aventure !
La descente est rapidement impressionnante car bien raide, Lorène n'est pas rassurée. On ne prend pas trop le temps de réfléchir On fait halte à Hatt en se garant a l'extérieur du village pour ne pas déranger , nous sommes vites repérés par des enfants du village. Une jeune fille qui nous a guetté depuis notre arrivée s'écarte de nous puis se cache derrière l'imposant portail de sa maison, le temps que l'on passe.
100m plus loin une petite fille nous observe, intriguée mais plutôt souriante : je lui montre mon appareil photo et mime de faire un cliché pour savoir si elle est OK, sa réaction est très étrange mais sans équivoque, c'est NON !Elle cache son visage derrière ses mains et son bâton de sorcière, et restera prostrée ainsi jusqu'à ce qu'on se soit éloignés d'une centaine de mètres... On entend des rires et bruits d'enfants un peu partout en avançant dans le village, mais globalement on ne les voit pas, ils sont dans les cours intérieures des maisons (entourées de murs de 2m de haut, pour éviter l'intrusion d'animaux d'après nous).
Nous rencontrons ensuite trois hommes qui viennent de finir de récolter des pois et les chargent dans leur pick-up. L'un d'eux parle quelques mots d'anglais, on leur explique un peu notre programme prévisionnel, et l'inquiétude liée au fait que nous soyons en berline. En descente ça l'a fait, il suffisait de freiner, mais arrivera t'ont à remonter dans l'autre sens ? D'après eux, "not possible !" OK, deux omanais rencontrés les jours précédents nous ont affirmé le contraire...
Fermiers à Hatt Nous acceptons avec plaisir leur invitation à boire le café. C'est l'occasion de croiser des femmes, fait rarissime depuis notre arrivée à Oman ! Elles sont assises dans la rue et séparent les pois de leurs feuilles et branchages, que ramènent les hommes. Elles non plus ne souhaitent pas être photographiées, dommage, mais on respecte et nous nous asseyons à part, avec les hommes, des ados et enfants du village, intrigués par notre présence, se joignent à nous. Nous essayons de discuter, les échanges restent assez basiques mais tout le onde est très souriant, avec l'aide d'une fille ado qui a quelques notions d'anglais, on passe un agréable moment et on apprend à se connaître, un tout petit peu...
Invités à boire le café à la cardamone et manger quelque dattes Dès que nos tasses de café sont vides, ils nous resservent, et nous sommes priés de ne pas nous retenir sur la dégustation de dattes non plus .Selim appelle un de ses amis qui parle assez bien anglais, pour que celui-ci nous explique qu'en cas de besoin, Selim et son pote pourront nous aider si nous nous retrouvons bloqués avec notre Nissan Sunny : bonne nouvelle, on a des dépanneurs à proximité ! On échange nos numéros, en tout nous passons au moins une bonne demi-heure avec eux, puis nous repartons explorer le village. Ils ont du se passer le mot, et à chaque coin de ruelle on voit des visages qui nous observent, dans l’entrebâillement d'un portail par exemple... Deux jeunes filles qui semblent réviser leur cours dans la rue s'adresse à nous en anglais, elles semblent contente de montrer leur bon accent ! Mais dès qu'on leur répond, elle semble gênées, effarouchées, se cachent même parfois le visage derrière une main ! C'est assez bizarre cette attitude de se réjouir de voir des inconnus, et dans la foulée, avoir peur de leur parler réellement et ne pas oser prendre 2min pour essayer de se rencontrer.
Villageois de Hatt Ce village n'est finalement pas touristique, et nous avons légèrement l'impression d'être des animaux de foire. Ce n'est pas facile pour Lorène d'assumer le regard des hommes, elle porte des tuniques amples qui descendent jusqu'à mi-mollet, ses bras sont couverts jusqu'aux coudes, mais le fait qu'elle ne soit pas voilée et qu'on puisse voir un peu sa peau, en émoustille plus d'un.
Nous reprenons la route, ou je devrais plutôt dire la piste, dont certains passages sont vraiment raides et poussiéreux, notre inquiétude va grandissante, mais bon, on a des gens prêts à venir nous aider si besoin.
Entre Hatt et Balad Sayt On visite Balad Sayt, une superbe oasis enclavée, les montagnes environnantes le domine de plusieurs centaines de mètres, quelqu'un qui aurait l'habitude de vivre au bord de mer se sentirai très oppressé !
Balad Sayt En fait l'intérêt de ce village est surtout dans sa vue d'ensemble, sur son petit promontoire, cerné par le canyon aux serpents, en dans un creux de montagne. On aperçoit que deux personnes lors de notre traversée en long en large et en travers du centre du bourg, ici entre midi et 16h, les gens ne sort pas de chez eux.
Nous reprenons la voiture pour nous diriger vers un restaurant censé se situer un peu moins de 3 km, sur la route de retour vers le village de Hatt. Il n'existe pas à l'emplacement indiqué sur notre GPS, nous laissons tomber l'idée de manger un vrai repas, on se rabat sur du pain avec du beurre de cacahuètes que nous gardons a la voiture en cas de coup dur. Et à la place de manger partons explorer le canyon qui s'ouvre sur notre droite !
Canyon aux serpents L'instant de vérité approche, nous sommes garés juste avant une montée en bas de laquelle il est indiqué de bien enclencher les quatre roues motrices, car la pente est raide... Elle passe sans difficulté ! Mais un peu plus loin, une autre pente hyper raide nous pose cette fois de sérieux problèmes, je m'y reprends à 2 ou 3 reprises, dont une fois en faisant descendre Lorène de la voiture pour s'alléger un peu, mais cela ne change rien. Avec beaucoup d'élan ça aurait peut-être pu passer, mais il y aurait eu un risque de racler sérieusement le châssis. Les gars rencontrés plus tôt qui nous ont proposé leur aide en cas de besoin ne sont pas bien loin, nous les appelons. La questions "how much money can you give ?" arrive un peu trop vite à mon goût dans nos échanges via WhatsApp. Mais comme ils ont été très sympas, on leur propose 10 Rial, soit l'équivalent de 26 € environ. Au regard du coût de la vie et de l'essence ici, ça nous semble être une somme plus qu'honnête. Juste avant de les appeler, un russe qui roulait en SUV avec sa femme et son fils a réussi à passer la côte, mais non sans avoir essayé au moins 5 fois. IL y allait comme un bourrin en prenant beaucoup d'élan, même avec deux roues motrices en étant un peu plus haut que nous, ça l'a fait pour lui, (très) difficilement. Nous dépanneurs arrivent, on les trouve plutôt marrants et sans stress on accroche leur corde au crochet que j'ai vissé à l'avant de la voiture.
Je me remets au poste de conduite et la côte est franchie au premier essai sans vraiment de difficulté. On s'arrête après ce passage délicat, on range la corde car jusqu'à Hatt c'est pas hyper raide on va s'en sortir. Je leur demande quand même si ils ont bien l'intention de nous aider à retourner jusqu'à la route goudronnée, pour nous c'est bien l'accord qu'on a passé au téléphone, pour 10 rials. Bon malheureusement il semblerait qu'on se soit mal compris, il rappelle son pote qui parle un peu anglais et il s'avère en fait que pour 10 rials ils veulent bien nous aider à retourner à leur village qui est seulement à 2 km d'ici, et pour lequel on sait pertinemment qu'on a pas besoin d'aide, mais par contre si on veut retourner en haut de la montagne avec leur aide, 9 km plus loin, il faut allonger en tout 50 rials ! Petite embrouille, à mon sens c'est pas du tout ce qui a été convenu, ça me semblait évident que si on sollicitait leur aide c'était pour retourner jusqu'à une route de goudronnée, et pas juste jusqu'à leur village. Nous étions à 2,5 km de Hatt, ils n'ont donc pas eu trop de route à faire pour nous rejoindre, et nous ont juste traités sur une grosse centaine de mètres... Je questionne un guide qui passe par là en 4x4 avec ses touristes, histoire de voir si par hasard ils auraient une corde pour nous aider... Z'ont pas, et il a pas l'air de très bien connaître les environs, même si selon lui, on ferait mieux de tenter par ailleurs que de là d'où l'on vient.
On utilise un traducteur en ligne, il rappelle son copain qui parle anglais, bref tout ça avance pas trop, mais on est vite d'accord sur une chose avec Lorène, c'est qu'on a pas du tout envie de mettre 120 € dans un service dont on n'est pas sûrs d'avoir besoin ! Et on est surtout très déçus de voir que l'appât du gain et l'argent ternissent ce qu'on a vécu jusque là comme une belle rencontre, pleine de sympathie et de bienveillance.
Arrivé au niveau de leur village on arrête les véhicules côtes à côtes, ils redemandent si on veut de leur aide, le prix est descendu à 40, puis 30 rials (en + des 10 qu'on leur doit déjà...) On décide de couper assez court à ces négociations qui nous agacent, de toute façon ici les gens sont sympas, si on galère à remonter au col, on trouvera bien d'autres personnes pour nous aider. Nous les quittons après que je leur ait fait lire un message traduit par Reverso sur mon téléphone, exprimant notre déception et le fait que nous pensions au départ avoir à faire à des personnes réellement bienveillantes. La séparation a un goût amer, ils nous regardent partir avec notre berline vers un chemin qu'ils pensent infranchissable avec ce type de véhicule, et on pense qu'ils se sont sentis un peu bêtes et trop intéressés par notre portefeuille à ce moment là. Bref, le chemin se pratique assez bien, les kilomètres défilent, on sait que ce sont les trois derniers qui seront les plus pentus...
À 2 passages Lorène descend de la voiture car c'est très raide, pendant ce temps j'avance puis en l'attendant j'ouvre le capot pour que le moteur refroidisse un peu. Alors qu'il reste environ 2 kms avant l'arrivée au col, nous faisons une petite pause pour boire un coup manger un petit goûter et essayer de se détendre avant l'ascension finale ! Un 4x4 avec un touriste dedans passe, nous l'observons et voyons que même lui à un moment il a un peu de mal à grimper... ça s'annonce costaud ! Mais bon au pire il y a une ferme pas loin et on aperçoit des gens et leur 4x4, si il faut on ira les solliciter.
On se lance, arrivé au passage super pentu, forcément à un moment la voiture patine. Lorène descend, je ré-essaye, sans succès. J'entreprends une petite marche arrière pour me positionner plus sur la gauche de la piste, j'essaie de redémarrer et de faire que la Nissan avance, ça semble vouloir accrocher, aller on donne tout !!
Ça paaaasse ! Lorène randonne pendant que j'avance jusqu'à un endroit moins raide (= pente inférieure à 15%), elle remonte, il ne reste plus que 2km, on y croit plus que jamais !.. La fin de la piste, bien que méga raide dans nos souvenirs du trajet aller, ne sera qu'une formalité, on s'en sort comme des chefs. Grande joie lorsqu'on rejoint l'asphalte, nous prenons 5min au col pour respirer un grand coup et laisser retomber la pression, on a réussi, sans abîmer la voiture de surcroît ! On célèbre cette journée assez angoissante qui fini bien en écoutant fort dès musiques entraînantes sur l'autoradio. La vue en redescendant vers Al Hamra est belle, légèrement dans la brume avec le soleil qui décline.
Descente vers Al Hamra Cela fait 5 nuits et 6 jours que nous sommes au sultanat, nous n'avons passé qu'une seule nuit à l'hôtel, alors là nous décidons de nous faire plaisir, entre les 1250m de dénivelé positif d'hier à pied, et l'incertitude qui a plané aujourd'hui sur nous, on l'a bien mérité ! Nos demandes de couchsurfing restent très souvent sans réponse, beaucoup d'omanais ont un compte sur le site, mais ne s'en servent pas et ne consultent pas leurs boîte de réception. Par ailleurs nous commençons à comprendre que vu comme les femmes vivent cachées et recluses, ça paraît compliqué qu'une famille omanaise puisse nous accueillir chez eux... Nous dormons à Jabrin, dans un hôtel flambant neuf, nous sommes les deuxièmes clients à utiliser la chambre !
Selim, tel qu'on s'en doutait, culpabilise beaucoup de ne pas nous avoir aidé jusqu'au bout, il m’envoie un message dans lequel il s'excuse plusieurs fois, qu'en tant que fermier il ne gagne pas d'argent, que son 4x4 consomme beaucoup, a une grosse famille à nourrir, que sa fille handicapée lui coûte 500$ par mois... Tout cela est vrai, et clairement il s'en veut beaucoup de nous avoir laissé nous débrouiller. Comme je ne répond pas de suite, dans les 20 min qui suivent il essaye de m'appeler deux fois, en plus de s'en vouloir il semble s'inquiéter. Il nous souhaite un bon séjour à Oman aussi. Je lui répond gentiment qu'on est des aventuriers, et qu'on s'en est très bien sortis tous les deux, jusqu'au sommet. Il répond par un smiley bouquet de roses et des cœurs.
Comme nous dormons à l'hôtel, on en profite pour laver des vêtements à la main, la vue depuis notre grande baie vitrée donne sur une bout de désert et de belles petites collines (vous verrez ça dans le prochain article qui sera rédigé par Lorène !)
Nous terminons en beauté au restaurant Wahat Al Tabiha, un bon gros thali indien vient nous remplir la panse, à part un peu de pain avec beurre de cacahuètes et tartines, on a rien ingurgité de la journée. S'ensuit un repos bien mérité...
Thali à Wahat Al Tabiha