La Patagonie est une région d’Amérique du Sud reconnue pour sa nature sauvage, ses grands espaces et ses montagnes emblématiques, entre steppes arides, forêts sub-polaires et glaciers. Elle est partagée entre le Chili et l’Argentine par la Cordillère des Andes.
Afin de protéger au mieux les écosystèmes, la biodiversité mais aussi afin de maîtriser et développer le tourisme sur des zones bien ciblées, il existe de nombreux parcs nationaux, permettant de randonner à la journée où d’y faire des treks de plusieurs jours.
Parmi les plus connus, le Parc National de Torres del Paine (côté chilien) offre ces possibilités. Je vais y faire le O-Trek, correspondant à près de 140km de marche pour un dénivelé positif d’un peu plus de 4300m. Étant habitué à faire de la rando, des treks plus ou moins longs, sur le papier, rien de bien alarmant en terme de difficulté. Mais ne connaissant pas encore la Patagonie et la difficulté de ses chemins de randonnée, n’étant pas habitué à la gestion des conditions climatiques, et les prévisions de durée des différentes étapes référencées par les sites de réservation des refuges et de la CoNaF (Corporation Nacional Forestal), je préfère rester tranquille et ne pas brûler les étapes. Comme pour la plupart des treks réputés, du fait de l’affluence et de la protection des espaces naturels, nous sommes obligés de dormir dans des zones de camping délimitées. Certaines personnes peuvent opter pour dormir dans des refuges en « dur », louer tentes, sac de couchage et matelas déjà sur place. Il est possible d’acheter de la nourriture « de base » dans les refuges, voir de dormir dans des dortoirs en « dur ». Bien sûr tout ça a un coût non négligeable.
Personnellement, je serai en autonomie complète (nourriture et matériel de camping) et je prévois 8 jours de trek.
Pour infos, voici les étapes faites, leur durée et les données principales. Il est important de rappeler que le temps mis pour chacune d’entre elle et le ressenti de tout ce trek m’est propre. J’ai l’habitude de randonner en montagne, je suis plutôt en bonne forme physique et malgré un sac à dos de 20Kg environ (et dire qu’après la nourriture c’est le matériel photo qui pèse le plus lourd dans mon sac^^) au début du trajet, je marche assez vite.
Etape 0 : Rejoindre le point de départ
Je commence le trek en partant du Camping Central, au Sud-Est du parc. Pour cela, je prends un bus depuis Puerto Natales. Déjà, je remarque qu’il y a des départs de bus toutes les 10 minutes… Ça annonce beaucoup de monde alors qu’on est sur la fin de la période touristique. Puis, vient un second bus à l’entrée du Parc, surchargé : je fais partie des derniers à entrer dedans. Plus de place pour mon sac en soute, ni de place assise pour moi. C’est après 15 min de chemin cabossable, avec un chauffeur « pressé », que je peux enfin commencer mon périple…
J1 : Central -> Séron / 3h _ 13Km _ 263D+ _ 230D-
J2 : Séron -> Dickson / 4h10 _ 18Km _ 291D+ _ 273D-
J3 : Dickson -> Los Perros / 3h10 _ 12Km _ 419D+ _ 273D-
J4 : Los Perros -> Grey / 5h10 _ 15Km _ 822D+ _ 1320D-
J5 : Grey -> Paine Grande / 2h45 _ 10Km _ 284D+ _ 297D-
J6 : Paine Grande -> Mirador Britanico -> Paine Grande / 6h _ 27Km _ 830D+ _ 830D-
J7 : Paine Grande -> Central / 5h30 _ 24Km _ 511D+ _ 398 D-
J8 : Central -> Mirador Las Torres -> retour Puerto Natales / 4h15 _ 19Km _ 916D+ _ 940D-
Allez, maintenant, place aux photos et quelques récits ! 😉
Les deux premières étapes sont de belles balades tranquilles. Il y a peu de dénivelé et je traverse de petites zones de forêt, aux arbres marqués par les années, de grandes steppes bordées d’un grand cours d’eau au loin. Ici, les herbes sauvages ont été jaunies par un soleil… qui fût très présent, durant l’été (oui… difficile à croire d’après les photos) ! En effet, pour l’instant la météo m’offre 2 jours de pluie continue, mais, heureusement, pas de vent. C’est l’occasion de tester l’étanchéité de ma veste, et de la tente… Il semble que j’ai opté pour de la bonne qualité. Malgré le temps, je croise quelques oiseaux, des chevaux en liberté et je garde la banane !!!
Dans ce genre de trek, il y a toujours une ambiance de groupe qui se crée. En effet, on évolue avec les mêmes personnes au cours des étapes, on se croise sur les points de vue, on se dépasse sur les chemins, et on se retrouve dans les salles communes des refuges où il est possible de cuisiner et de manger sur des grandes tablées. Ce que j’apprécie particulièrement, c’est l’évolution de ces relations. Cela débute par des petits «Bonjour», «Comment ça va ?», «Comment s’est passée votre étape ?»… Pour finalement en apprendre plus sur les conditions de vie dans chaque pays, sur la vie privée de chaque personne : vous vous prenez même à débattre de n’importe quel sujet et par refaire le monde.
C’est à la fin de cette deuxième étape qu’un « groupe » s’est formé. Nous venons tous d’endroits différents, avons des parcours de vie multiples, nos voyages n’en sont pas au même point, leurs parcours sont divers et variés et leurs buts ne sont pas les mêmes. Chacun respecte l'autre et personne n'impose de faire le trek ensemble. Naturellement, chacun part de son côté, mais nous prenons plaisir à échanger et nous retrouver chaque après-midi et à partager nos repas.
Il y a, Paul et Victoire (Français), Bas et Cait (Néerlandais), Patrick (Allemand) et Jack et Lisel (Australiens qui ne sont malheureusement pas sur la photo).
De gauche à droite : Victoire, Bas, Paul, Cait, Patrick et moi-même Le temps s’est amélioré. Après un magnifique lever de soleil, ce dernier me permet de faire sécher mes affaires sur mon sac pendant la marche. Le quatrième jour, je pars de nuit afin de contempler le lever de soleil depuis le col John Gardner où je resterai une heure à faire quelques photos et à contempler l’évolution de la lumière au travers des nuages… Tout ça sous une neige tombante. Puis, vient la vue du glacier Grey, immense, aux couleurs variant du blanc pur au bleu intense. Le chemin continue au sud tout au long du glacier, qui se jette dans le Lac du même nom.
Malgré quelques petites pluies passagères, j’apprends à m’adapter et faire sécher mon linge fraîchement lavé. L’après-midi passé au camping Grey me permet de faire quelques photos aux alentours.
Les étapes s’enchaînent les unes après les autres sans grande difficulté… Et avoir les pieds de plus en plus secs est un doux confort. Viennent aussi les deux points de vue emblématiques du Parc Torres del Paine, à savoir le mirador Britanico et le mirador de las Torres. Je fais le choix d’arriver à chacun d’entre eux pour le lever du soleil.
Je passe d’abord par le mirador Britanico dont le cirque est complètement dégagé. Je croise quelques oiseaux pris sur le trajet du retour et j’admire l’immensité des lacs. Sur le second d’entre eux, vous pourrez apercevoir un bateau, tout petit vu d’ici… Alors qu’il s’agit d’un ferry pouvant transporter une bonne centaine de personnes.
Et rapidement la dernière étape de ce trek arrive. J’ai la chance d’avoir une vue assez dégagée pour apprécier la teinte rosée que les montagnes patagoniennes prennent à l’aube. Rose que je retrouve sur les nuages à l’heure bleue, ainsi que sur les fuschias du parc.
Au final, ce trek aura quand même un coût, malgré l’autonomie complète. Entre le transport aller/retour depuis Puerto Natales, le prix d’entrée du parc, le prix des réservations des différents campings, la nourriture achetée en amont, je m’en sors pour plus de 300€. Mais faire ce trek était un plaisir personnel, réservé au dernier moment (2 semaines avant le départ).
Avis sur le trek de Torres del Paine :
Les faits :
Concernant le fond : le parc est très beau, c’est un trek très accessible avec peu de dénivelé à chaque étape. Les chemins sont très bien entretenus et non accidentés. Il n’est jamais nécessaire de poser les mains pour grimper.
Sur la forme : Vous devez signer des registres à chaque étape pour stipuler que vous êtes bien arrivé. Les refuges sont propres et proposent de bons standings pour les moins aventureux (surtout sur le W-Trek). Il y a beaucoup de touristes peu habitués à la montagne qui font des randonnées à la journée ou se lancent sur un des deux treks. Les rangers n’hésitent pas à fermer les sentiers si les conditions climatiques sont mauvaises et certains sentiers sont fermés à partir de certaines heures de l’après-midi pour éviter l’arrivée durant la nuit de certains marcheurs en difficulté. Certains sentiers n’ouvrent qu’à partir d’une certaine heure le matin également pour plus de sécurité.
Mon avis personnel de randonneur expérimenté :
Malgré la beauté du paysage, je suis navré de voir l’infantilisation faite des randonneurs. Les chemins sont aseptisés de toute difficulté, ils sont trop “propres” et ne semblent plus si naturels. Les consignes d’horaires sur les sentiers appliquées à tout le monde fait perdre des attraits intéressants pour les bons randonneurs, habitués à partir de nuit où à doubler des étapes. Cela amène les moins expérimentés à ne pas comprendre, ni apprendre d’une expérience en montagne de plusieurs jours. Ce trek étant facile et trop facilité, j’ai peur qu’il éduque les plus novices d'une mauvaise manière. Pensant être capable de faire un trek de 8 jours (O-trek) ou de 5 jours (W-trek), je les vois mal faire un trek rien que 2-3 jours en pleine montagne avec plus de dénivelé, des chemins accidentés qui ralentissent leur progression et peu de balisages de sentiers. J’ai été atterré de voir des gens randonner à la journée sans eau, ou sur plusieurs jours sans équipement contre le froid ou le vent, des personnes qui ne savaient rien des distances à parcourir pour leur étape ni des dénivelés.
Une randonnée, même simple, en montagne, ça se prépare, ça s’anticipe pour rester en sécurité. Entre le climat, les aléas d’une blessure ou autre… les accidents vont vite, trop vite, et cela même en ayant des connaissances en montagne et en étant préparé. « À trop d’assistance, pas d’enseignements. »
Pour le coup, pour les initiés, il est facile. Je conseille de faire d’autres treks en Patagonie, avec moins, beaucoup moins de monde (Torres del Paine c’est près de 250 000 visiteurs pendant la période estivale), sans avoir à payer des sommes exorbitantes, dans des endroits tout aussi majestueux. À l’exemple de toute la zone d’El Chaltén, entre autre.