En tête-à-tête avec le Monde - Chili et Argentine

Here we goooooo!!!
Février 2023
52 semaines
Dernière étape postée il y a 16 jours
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Publié le 27 février 2023

Pourquoi "débloquer" l’arrivée ?

Tout a commencé à l’aéroport d’Orly. Ayant fait le choix d’un voyage à travers le monde, sans vouloir anticiper de date de retour, je n’ai donc pris aucun billet… de retour. Mais cela peut potentiellement poser problème pour passer une frontière et entrer dans un pays nécessitant un visa… Et bien, j’ai déjà été bloqué dès l’aéroport de Paris, lors de l’enregistrement de mon bagage en soute. Ils n’ont pas voulu me faire passer l’enregistrement sans ce fameux billet de retour. Ça commence bien…

Petite astuce, il existe des sites spécialisés pour réserver des billets d’avion pendant 48 h et ne pas avoir à payer un billet complet, remboursable, et devoir surveiller le-dit remboursement qui peut parfois mettre plusieurs mois. C’est le cas d’OnwardTicket que j’ai utilisé.

Bon, tout ça réglé, il n’y a plus qu’à embarquer et profiter des paysages sud américains depuis le hublot de l’avion. Après une nuit entrecoupée dans l’avion, je me réveille avec une douleur sur l’arête du nez… Ouais, c’était une mauvaise idée de se la jouer "Indiana Jones" en utilisant ma casquette pour me cacher de la lumière ! Je comprends mieux l’utilité d’un chapeau… 🤠

J’arrive donc au Chili, dans la région de Magallanes, dans la ville de Punta Arenas.

Les premiers échanges entre anglais et espagnol me font un peu perdre pied et je baragouine un entre deux sans trop être à l’aise… Je sais qu’à chaque voyage, il me faut quelques discussions avant de me ré-habituer à communiquer dans une autre langue. J’opte d’abord pour l’anglais afin de faciliter les discussions et de bien comprendre tous les détails utiles à la création du planning des prochains jours.

Les échanges avec les autres voyageurs et les gérants de l’auberge de jeunesse sont très enrichissants. Je me laisse donc tenter par l’organisation du O-Trek dans le Parc de Torres del Paine, que je commencerai le 5 mars. Je rencontre des gens de toute nationalité, tout âge, aux parcours différents. Je profite d’un concert improvisé avec un jeune guitariste israélien qui compose lui-même ses chansons et nous en fait tous profiter.

Bref, toutes ces rencontres me délient la langue… anglaise. Maintenant, objectif : débloquer l’espagnol et sortir de la facilité de parler anglais.

Vous me direz, beaucoup d’écrit et peu de photos… Et bien oui, la ville de Punta Arenas ne m’invite pas trop à faire de la photo et je ne me sens pas inspiré. Je pense plutôt à aller faire des photos en pleine nature, de grands espaces, de la faune. Il faudra donc attendre, là aussi, un déblocage photo. Mais patience, je sens que ce n’est pas loin ! 😉

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Publié le 27 février 2023

Ça serait dommage de ne pas profiter d’être dans le sud de la Patagonie et de ne pas voir les pingouins de Magellan. Pour cela, excursion sur les îles de Magdalena et Marta au large de Punta Arenas. Bon, comme beaucoup d’activités, c’est très touristique. Créer des parcs naturels un peu partout au Chili, c’est une décision prise par le gouvernement afin de pouvoir financer la protection de l’environnement, de la faune et de la flore, en profitant de l’argent généré par le tourisme. Difficile de faire des activités en Patagonie sans « réserver » à l’avance, sans passer par des tours opérateurs, etc…

Du coup, je découvre ces familles de pingouins, de cormorans et autres oiseaux marins, perdus sur une île quasi désertique (île de Magdalena), en suivant un circuit balisé par deux cordelettes tendues sur un bon kilomètre.

Pour les lions de mer, c’est une autre façon de faire : on reste au large, sur le pont du bateau, pour observer les animaux et tenter quelques photos malgré le remous engendré par les vagues.

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Pour ces quelques jours sur Puerto Natales, je décide d’aller explorer un peu les environs et notamment faire un petit bivouac de 2 nuits al Lago Sofia. Situé à une trentaine de kilomètres de la ville, c’est un lac naturel, entouré de montagnes dont le Cerro Benitez, lieu d’habitat des fameux condors du Chili, charognards dont l’envergure peut atteindre 3,20 m.

Je prends donc la route pour faire une bonne partie du chemin à pied. Après 12 bornes avec une alternance de rayons d'un soleil timide et de pluie intense, bien loin d’un agat d’iau berrichon, je décide de m’essayer au stop.

Et c’est une réussite dès le premier essai, avec un couple danois-chilien et leur fille. Maintenant il ne reste que 7 kilomètres sur un sentier cabossable. Je n’ai même pas le temps de marcher 2 minutes qu’une voiture de 3 grimpeurs chiliens me propose de m’emmener jusqu’au lac ! Je profite de leur connaissance du coin pour avoir des infos : où bivouaquer, trouver les condors, etc…

Résultat des courses, arrivée facile au Lac Sofia, échanges sympas avec des locaux et une très bonne première expérience de stop. Tout s’annonce parfait pour ce petit séjour. Oui, mais… C’était sans compter sur le caractère de Sofia : un vent de malade et des averses à répétition, le tout entrecoupé de rafales de vent encore plus fort. On m’avait vanté maintes fois la météo patagonienne : je ne suis pas déçu !

« Il n’y a pas de mauvais temps, que de mauvais équipements. » Citation scandinave ou écossaise. Heureusement, il semble que mon équipement soit bon ! 😙

Après un sommeil quelque peu perturbé par le vent, je pars sur le Cerro afin d’observer les fameux condors. Voilà qu’il neige : les sommets en face, qui ne me semblaient pas enneigés hier soir, se recouvrent d’un manteau blanc. Malheureusement, je n’aurai pas la chance d’apercevoir de condors, censés être perchés sur la falaise. La météo est certainement fautive. Tant pis, le cadre est magnifique ! Après avoir atteint le sommet, stérilisé de toute végétation, j’entre dans une épaisse forêt, remplie d’arbres tortueux. Une mousse, aux teintes variant du jaune au vert clair, pend le long des branches. Les vestiges de branches et même de troncs, abattus sur le sol, montrent la puissance du vent dans la région. Seuls les arbres les plus résistants restent debout, dont l’orientation des feuillages est sculptée par les bourrasques. La terre est meuble et agréable au pas. Petit à petit, le soleil transperce les nuages, le vent se fait moins ressentir… C'est à cet instant que j’aperçois un premier condor.

Il est temps de trouver un coin pour planter la tente, se rassasier et profiter de la fin de journée pour observer la flore et la faune, dont les condors qui tournoient au-dessus de la forêt.

Suite à ces deux nuits en pleine nature, il est temps de rentrer. Un dernier coucou aux charognards dans un ciel plein de couleurs et un dernier stop qui me mènera directement à Puerto Natales, cette fois-ci en compagnie de 3 chinoises, en vacances.

PETIT JEU !!! Saurez-vous reconnaître les deux personnes qui ont dit ces phrases ?

« Toujours par deux ils vont. Ni plus, ni moins. Le maître et son apprenti. » Personne 1

« Toujours par trois ils vont. Ni plus, ni moins. Ceux qui prennent les autostoppeurs facilement. » Personne 2

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La Patagonie est une région d’Amérique du Sud reconnue pour sa nature sauvage, ses grands espaces et ses montagnes emblématiques, entre steppes arides, forêts sub-polaires et glaciers. Elle est partagée entre le Chili et l’Argentine par la Cordillère des Andes.

Afin de protéger au mieux les écosystèmes, la biodiversité mais aussi afin de maîtriser et développer le tourisme sur des zones bien ciblées, il existe de nombreux parcs nationaux, permettant de randonner à la journée où d’y faire des treks de plusieurs jours.

Parmi les plus connus, le Parc National de Torres del Paine (côté chilien) offre ces possibilités. Je vais y faire le O-Trek, correspondant à près de 140km de marche pour un dénivelé positif d’un peu plus de 4300m. Étant habitué à faire de la rando, des treks plus ou moins longs, sur le papier, rien de bien alarmant en terme de difficulté. Mais ne connaissant pas encore la Patagonie et la difficulté de ses chemins de randonnée, n’étant pas habitué à la gestion des conditions climatiques, et les prévisions de durée des différentes étapes référencées par les sites de réservation des refuges et de la CoNaF (Corporation Nacional Forestal), je préfère rester tranquille et ne pas brûler les étapes. Comme pour la plupart des treks réputés, du fait de l’affluence et de la protection des espaces naturels, nous sommes obligés de dormir dans des zones de camping délimitées. Certaines personnes peuvent opter pour dormir dans des refuges en « dur », louer tentes, sac de couchage et matelas déjà sur place. Il est possible d’acheter de la nourriture « de base » dans les refuges, voir de dormir dans des dortoirs en « dur ». Bien sûr tout ça a un coût non négligeable.

Personnellement, je serai en autonomie complète (nourriture et matériel de camping) et je prévois 8 jours de trek.

Pour infos, voici les étapes faites, leur durée et les données principales. Il est important de rappeler que le temps mis pour chacune d’entre elle et le ressenti de tout ce trek m’est propre. J’ai l’habitude de randonner en montagne, je suis plutôt en bonne forme physique et malgré un sac à dos de 20Kg environ (et dire qu’après la nourriture c’est le matériel photo qui pèse le plus lourd dans mon sac^^) au début du trajet, je marche assez vite.

Etape 0 : Rejoindre le point de départ

Je commence le trek en partant du Camping Central, au Sud-Est du parc. Pour cela, je prends un bus depuis Puerto Natales. Déjà, je remarque qu’il y a des départs de bus toutes les 10 minutes… Ça annonce beaucoup de monde alors qu’on est sur la fin de la période touristique. Puis, vient un second bus à l’entrée du Parc, surchargé : je fais partie des derniers à entrer dedans. Plus de place pour mon sac en soute, ni de place assise pour moi. C’est après 15 min de chemin cabossable, avec un chauffeur « pressé », que je peux enfin commencer mon périple…

J1 : Central -> Séron / 3h _ 13Km _ 263D+ _ 230D-

J2 : Séron -> Dickson / 4h10 _ 18Km _ 291D+ _ 273D-

J3 : Dickson -> Los Perros / 3h10 _ 12Km _ 419D+ _ 273D-

J4 : Los Perros -> Grey / 5h10 _ 15Km _ 822D+ _ 1320D-

J5 : Grey -> Paine Grande / 2h45 _ 10Km _ 284D+ _ 297D-

J6 : Paine Grande -> Mirador Britanico -> Paine Grande / 6h _ 27Km _ 830D+ _ 830D-

J7 : Paine Grande -> Central / 5h30 _ 24Km _ 511D+ _ 398 D-

J8 : Central -> Mirador Las Torres -> retour Puerto Natales / 4h15 _ 19Km _ 916D+ _ 940D-

Allez, maintenant, place aux photos et quelques récits ! 😉

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Les deux premières étapes sont de belles balades tranquilles. Il y a peu de dénivelé et je traverse de petites zones de forêt, aux arbres marqués par les années, de grandes steppes bordées d’un grand cours d’eau au loin. Ici, les herbes sauvages ont été jaunies par un soleil… qui fût très présent, durant l’été (oui… difficile à croire d’après les photos) ! En effet, pour l’instant la météo m’offre 2 jours de pluie continue, mais, heureusement, pas de vent. C’est l’occasion de tester l’étanchéité de ma veste, et de la tente… Il semble que j’ai opté pour de la bonne qualité. Malgré le temps, je croise quelques oiseaux, des chevaux en liberté et je garde la banane !!!

Dans ce genre de trek, il y a toujours une ambiance de groupe qui se crée. En effet, on évolue avec les mêmes personnes au cours des étapes, on se croise sur les points de vue, on se dépasse sur les chemins, et on se retrouve dans les salles communes des refuges où il est possible de cuisiner et de manger sur des grandes tablées. Ce que j’apprécie particulièrement, c’est l’évolution de ces relations. Cela débute par des petits «Bonjour», «Comment ça va ?», «Comment s’est passée votre étape ?»… Pour finalement en apprendre plus sur les conditions de vie dans chaque pays, sur la vie privée de chaque personne : vous vous prenez même à débattre de n’importe quel sujet et par refaire le monde.

C’est à la fin de cette deuxième étape qu’un « groupe » s’est formé. Nous venons tous d’endroits différents, avons des parcours de vie multiples, nos voyages n’en sont pas au même point, leurs parcours sont divers et variés et leurs buts ne sont pas les mêmes. Chacun respecte l'autre et personne n'impose de faire le trek ensemble. Naturellement, chacun part de son côté, mais nous prenons plaisir à échanger et nous retrouver chaque après-midi et à partager nos repas.

Il y a, Paul et Victoire (Français), Bas et Cait (Néerlandais), Patrick (Allemand) et Jack et Lisel (Australiens qui ne sont malheureusement pas sur la photo).

De gauche à droite : Victoire, Bas, Paul, Cait, Patrick et moi-même 

Le temps s’est amélioré. Après un magnifique lever de soleil, ce dernier me permet de faire sécher mes affaires sur mon sac pendant la marche. Le quatrième jour, je pars de nuit afin de contempler le lever de soleil depuis le col John Gardner où je resterai une heure à faire quelques photos et à contempler l’évolution de la lumière au travers des nuages… Tout ça sous une neige tombante. Puis, vient la vue du glacier Grey, immense, aux couleurs variant du blanc pur au bleu intense. Le chemin continue au sud tout au long du glacier, qui se jette dans le Lac du même nom.

[Petite devinette]

En traversant ce pont fait de bois et de câbles, arrivé au milieu, je n’ai pas pu m’empêcher de penser à une scène de film… À votre avis, lequel ? (Réponse en commentaire dans quelques jours)

Malgré quelques petites pluies passagères, j’apprends à m’adapter et faire sécher mon linge fraîchement lavé. L’après-midi passé au camping Grey me permet de faire quelques photos aux alentours.

Les étapes s’enchaînent les unes après les autres sans grande difficulté… Et avoir les pieds de plus en plus secs est un doux confort. Viennent aussi les deux points de vue emblématiques du Parc Torres del Paine, à savoir le mirador Britanico et le mirador de las Torres. Je fais le choix d’arriver à chacun d’entre eux pour le lever du soleil.

Je passe d’abord par le mirador Britanico dont le cirque est complètement dégagé. Je croise quelques oiseaux pris sur le trajet du retour et j’admire l’immensité des lacs. Sur le second d’entre eux, vous pourrez apercevoir un bateau, tout petit vu d’ici… Alors qu’il s’agit d’un ferry pouvant transporter une bonne centaine de personnes.

Et rapidement la dernière étape de ce trek arrive. J’ai la chance d’avoir une vue assez dégagée pour apprécier la teinte rosée que les montagnes patagoniennes prennent à l’aube. Rose que je retrouve sur les nuages à l’heure bleue, ainsi que sur les fuschias du parc.

Au final, ce trek aura quand même un coût, malgré l’autonomie complète. Entre le transport aller/retour depuis Puerto Natales, le prix d’entrée du parc, le prix des réservations des différents campings, la nourriture achetée en amont, je m’en sors pour plus de 300€. Mais faire ce trek était un plaisir personnel, réservé au dernier moment (2 semaines avant le départ).

Avis sur le trek de Torres del Paine :

Les faits :

Concernant le fond : le parc est très beau, c’est un trek très accessible avec peu de dénivelé à chaque étape. Les chemins sont très bien entretenus et non accidentés. Il n’est jamais nécessaire de poser les mains pour grimper.

Sur la forme : Vous devez signer des registres à chaque étape pour stipuler que vous êtes bien arrivé. Les refuges sont propres et proposent de bons standings pour les moins aventureux (surtout sur le W-Trek). Il y a beaucoup de touristes peu habitués à la montagne qui font des randonnées à la journée ou se lancent sur un des deux treks. Les rangers n’hésitent pas à fermer les sentiers si les conditions climatiques sont mauvaises et certains sentiers sont fermés à partir de certaines heures de l’après-midi pour éviter l’arrivée durant la nuit de certains marcheurs en difficulté. Certains sentiers n’ouvrent qu’à partir d’une certaine heure le matin également pour plus de sécurité.

Mon avis personnel de randonneur expérimenté :

Malgré la beauté du paysage, je suis navré de voir l’infantilisation faite des randonneurs. Les chemins sont aseptisés de toute difficulté, ils sont trop “propres” et ne semblent plus si naturels. Les consignes d’horaires sur les sentiers appliquées à tout le monde fait perdre des attraits intéressants pour les bons randonneurs, habitués à partir de nuit où à doubler des étapes. Cela amène les moins expérimentés à ne pas comprendre, ni apprendre d’une expérience en montagne de plusieurs jours. Ce trek étant facile et trop facilité, j’ai peur qu’il éduque les plus novices d'une mauvaise manière. Pensant être capable de faire un trek de 8 jours (O-trek) ou de 5 jours (W-trek), je les vois mal faire un trek rien que 2-3 jours en pleine montagne avec plus de dénivelé, des chemins accidentés qui ralentissent leur progression et peu de balisages de sentiers. J’ai été atterré de voir des gens randonner à la journée sans eau, ou sur plusieurs jours sans équipement contre le froid ou le vent, des personnes qui ne savaient rien des distances à parcourir pour leur étape ni des dénivelés.

Une randonnée, même simple, en montagne, ça se prépare, ça s’anticipe pour rester en sécurité. Entre le climat, les aléas d’une blessure ou autre… les accidents vont vite, trop vite, et cela même en ayant des connaissances en montagne et en étant préparé. « À trop d’assistance, pas d’enseignements. »

Pour le coup, pour les initiés, il est facile. Je conseille de faire d’autres treks en Patagonie, avec moins, beaucoup moins de monde (Torres del Paine c’est près de 250 000 visiteurs pendant la période estivale), sans avoir à payer des sommes exorbitantes, dans des endroits tout aussi majestueux. À l’exemple de toute la zone d’El Chaltén, entre autre.

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Publié le 1er avril 2023

Il est temps de passer en Patagonie côté Argentine : direction El Chaltén, dite capitale nationale du trekking.

Pour cela, je prends un bus jusqu’à El Calafate, qui ne sera qu’une ville « étape » dans mon voyage, afin d’y récupérer quelques pesos argentins : la chose n'est pas aisée… Mais pour vous expliquer tout ça, j’ai un projet qui devrait voir le jour prochainement ! À suivre donc.

Revenons à El Chaltén ! C’est une petite ville argentine de 3000 habitants qui vit surtout d’une économie touristique orientée vers la montagne. L’ambiance y est chaleureuse et il y fait bon vivre. La plupart des voyageurs que j’y ai rencontrés, ou ceux qui y sont passés, en gardent un très bon souvenir. Il s’en dégage vraiment un sentiment de bien-être et de tranquillité. La ville est enclavée entre les montagnes, dont le fameux Fitz Roy.

Je commence par une première randonnée afin d’observer les environs et d'avoir une vue assez large sur la montagne du Fitz Roy, réputée pour toujours avoir un nuage qui masque son sommet. Les Tehuelches, derniers Indiens à peupler la zone, la nommaient « la montagne qui fume ». Ce qui m’a frappé, c’est l’immensité des environs avec notamment le Lago Viedma et son bleu azur qui fait face à l’aspect terreux de la Laguna Torre.

Afin d’explorer le coin, je prépare donc un petit trek en autonomie pendant 3 jours, en partant du Nord du Massif du Fitz Roy et en le contournant par l’Est. Je passe par les différents lacs qui attirent beaucoup de touristes sur des randonnées à la journée. Cette option me permet d’éviter l’afflux de monde sur les sentiers, et d’avoir accès facilement aux différents points de vues pour les levers et couchers de soleil. Pour conclure tout ça comme il se doit, je trouve un petit réconfort autour d’un brunch (il manque les œufs brouillés).

Par la suite, je prévois de faire un trek assez engagé d’El Chaltén : la Vuelta Huemul. Malheureusement, la météo joue en ma défaveur : beaucoup de pluie et des rafales de vents puissantes m’amènent à suivre ma raison et à ne pas y aller. Je décide quand même de faire la première étape jusqu’au Lago Toro, dans une bonne ambiance car accompagné d’Arianne, une québécoise avec qui je m’amuse à faire une joute d’expressions linguistiques. Nous observons à quel point l’été austral prend fin et laisse place aux couleurs automnales dans les Lengas (hêtres des terres de feu) peuplant les forêts du coin, les couleurs violacées qui ornent les rochers et les traces noires du passage éphémère des mousses sur les pierres.

El Chaltén a été, aussi, un lieu d’échanges avec d’autres voyageurs, croisés sur les sentiers, rencontrés dans des auberges, et même des retrouvailles imprévues ! Je pense à Blandine et Thibault, Marion, Arianne, Kaï, Morgan, Chloé et Mathias. D’ailleurs, j’en croiserai certains à la prochaine étape, El Bolsón, et sûrement d’autres un peu plus loin.

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El Bolsón… Ville à part entière, marquée par l’héritage de l’histoire Tehuelche, l’immigration des Européens de l’Est dans les années 30, et des cultures bohémienne et hippie dans les années 60. Ce mélange culturel se retrouve aujourd’hui dans l’artisanat, l’art, le mode de vie, l’architecture, l’autosuffisance, et l’état d’esprit général de la ville. Tout y semble simple, les rapports sont amicaux… Et bien que vivant d’une économie tournée vers le tourisme, El Bolsón paraît loin des standards d’autres villes tournées vers le commerce de biens impersonnels et sans âme.

Pour arriver jusqu’à ce lieu de quiétude hors du temps, il faut faire un trajet en bus de plus de 21 h… Mais entre les films téléchargés, la lecture et la rencontre d’Emma et de Marine (mes voisines de voyage), le temps file à tel vitesse que je rate presque mon arrêt !

Je passe mes deux premières nuits à El Bolsón, dans un petit camping situé aux abords de la ville, dans une zone populaire. Je me retrouve seul dans ce lieu, la ville n’étant pas une des destinations les plus prisées – comparée à El Chaltén où San Carlos de Bariloche – et ce, malgré le cadre convivial du logis, avec un grand four extérieur en briques et un beau brasero. Toutefois, ce sera une belle introduction à la suite de mon séjour ici… Un début d’histoire solitaire et puis… et puis je vous invite à poursuivre cette aventure petit à petit, comme je l’ai vécue !

Après une journée à errer au travers des rues de la ville, à entrevoir l’esprit qui règne ici, je prends les dernières informations qu’il me faut et fais les derniers achats pour partir – encore une fois – en trek. L’idée est d’atteindre le refuge le plus reculé dans la vallée du Rio Azul, de dormir en tente, toujours en autonomie de nourriture, et de profiter de la chaleur du refuge et d’une bonne douche seulement à la fin de chaque randonnée.

La première étape est d’atteindre le refuge de Hielo Azul : ça promet de grimper ! Au départ d’El Bolsón, le sentier n’est pas bien indiqué et, rapidement, le chemin ressemble à une large route de déforestation, où un bulldozer semble avoir tranché la forêt sans difficulté, arrachant tout sur son passage. Je me dis – étant en fin de saison touristique – qu'ils doivent profiter de la période avant l’arrivée de l’hiver pour entamer la création de nouveaux sentiers de randonnée… Mais au bout de 30 minutes de marche, je comprends que j’étais bien loin de la vérité : cette route n’est au final qu’un moyen d’accéder à une zone forestière bien précise… Un endroit où les oiseaux ne chantent plus, où je ne vois ni traces d’insectes, ni d’autres formes de vie. La couleur verte semble avoir abandonné les arbres. Qu’ils soient tombés au sol ou non, ces symboles de vie revêtent une teinte sombre, un noir profond qui laisse comprendre la violence de l’histoire qui vient de se dérouler. Au sol, la terre s’est mêlée à la cendre et un nuage grisâtre se lève à chaque pas. J’apprendrai par la suite que tout s’est passé il y a un mois… Et pourtant, une odeur puissante de fumée reste toujours présente, donnant le sentiment que le foyer n’est pas éteint.

Je n’ai pas eu le cœur de prendre en photo la zone la plus touchée, mais mon texte vous reflète vraiment ce que j’ai traversé.

La route devient difficile à suivre, entre le passage des camions de pompiers qui ont effacé le sentier et les nombreux arbres déracinés qui l’obstruent. Puis, des couleurs automnales réapparaissent dans les arbres, mais je vois bien qu’elles ne sont pas naturelles, contraintes par la chaleur du brasier… Mais petit à petit, la couleur de l’espoir renaît. Sûrement un peu perturbé par ce passage, je m'éloigne du sentier principal et me vois contraint de traverser une propriété privée. Un lieu magnifique où plusieurs habitations en bois se partagent un même terrain et un potager en permaculture. Un jeune homme très sympathique m’accueille et m’oriente pour retrouver ma route.

Je rencontre enfin un bras du Rio Azul. L’eau reflète le bleu du ciel et s’écoule sur un fond de galets. Un panneau entrave mon chemin : le pont n’est pas praticable. Vu son état, je finirais certainement au fond du lit avant la fin de la journée s’il me venait l’idée de forcer le passage. Je traverse donc la large rivière à pied, et prends contact avec l’eau fraîche qui descend des différentes montagnes alentours. Une fois séché et rechaussé, il me faut maintenant entamer l’ascension jusqu’au refuge.

La montée se fait à travers une grande forêt de conifères où quelques feuillus essaient de se frayer un passage, espérant atteindre les rayons du soleil. Je remarque que la flore est très différente de de ce que j’avais vu jusqu’à présent en Patagonie. Les arbres sont immenses et droits et se dressent dans un sol beaucoup plus terreux. Je retrouve des images connues des forêts tempérées dans nos alpages français.

À l’arrivée sur le col, les arbres changent subitement et redeviennent ces pauvres êtres maltraités par les vents. Ils sont brisés, tordus et arborent des barbes de lychen leur donnant un air de grands sages. Le sentier devient plus rocailleux et serpente à travers de denses bosquets à taille de demi-homme.

Par la suite, la forêt de sapins revient de plus belle et les cimes semblent s’affronter dans un concours de hauteur. Malgré ces hauts parasols, une pluie mêlée de neige arrive à se frayer un chemin jusqu’au sol. Heureusement, le refuge se dessine au loin, au milieu de ces géants qui l’entourent. Vu l’évolution de la météo, la nuit promet d’être froide, mais les rêves doux et féeriques…

Effectivement, la nuit a tenu ses promesses et je l’ai malheureusement un peu plus subie à cause de mon nouveau matelas gonflable, moins performant que le précédent, rongé par la voracité des rats sauvages d’El Chaltén. Au réveil, il fait un peu moins de 0°C dans la tente et, en sortant, je découvre un fin manteau neigeux qui recouvre le sol. Tout est blanc, il n’y a pas un bruit : la forêt est silencieuse. Les conditions météo ayant changé, il m’est dorénavant impossible de rejoindre le glacier en amont du refuge de Hielo Azul.

Après un bon petit déjeuner, je file directement vers la vallée. Il faut d’abord dépasser la crête de la montagne. La pente est raide et le sol, si tendre hier, est devenu dur à cause du gel. Par endroit, la neige s’étant frayé un chemin parmi les arbres, a recouvert le sentier d’un blanc immaculé qui contraste bien avec la teinte brune de la terre. Progressivement, les petites parcelles de neige se font plus grandes, jusqu’à recouvrir entièrement le sol et les buissons. Lorsque j’atteins le plateau au sommet, il n’y a pas de vent, et le seul bruit perceptible est celui de mes pas dans la neige fraîche. Le chemin ne semble avoir été emprunté que par une seule personne, dont les pas ont été suivis avec justesse par un lièvre ou un lapin. Les couleurs automnales montrent toute leur intensité grâce au blanc qui les recouvre.

Une fois le lac Natación dépassé, il me faut descendre par une pente très raide où il est nécessaire de poser les mains sur les rochers par endroit, afin de désescalader sereinement. Les mètres dégringolants, la neige devient rapidement un vieux souvenir, tout comme le froid. La température se fait beaucoup plus douce et les couches se retirent, tant pour le sol que sur moi. J’arrive au refuge de Cajón del Azul pour le déjeuner où je vais pouvoir profiter de l’après-midi pour rédiger quelques lignes, me reposer et continuer à voyager entre les récits fictifs de Tolkien et les espaces réels qui m’entourent.

La troisième journée de randonnée commence sous la pluie. Je vais suivre le lit de la rivière jusqu’à atteindre le lac qui borde le refuge de los Laguitos. Je progresse dans une forêt dense, d’arbres immenses. Le temps m’empêche d’apprécier comme il se devrait le lieu, mais malgré tout, je prends le temps d'admirer le lychen qui recouvre les arbres et les couleurs intenses des fleurs de la vallée, alors que l’hiver arrive.

Sur les derniers kilomètres, la forêt montre tout à coup des signes de sagesse. Les arbres semblent beaucoup plus vieux et présentent des troncs dont la circonférence est impressionnante. Le diamètre dépasse les deux mètres. Je reprends alors bien conscience de ma place d‘humain, petit être au passage éphémère, comparé à l’immensité et à l’âge vénérable de cette forêt.

J’arrive enfin au but de ce périple : le refuge de los Laguitos, où je ne compte pas le temps passé à contempler la brume danser au-dessus du lac aussi bien au crépuscule qu’à l’aube. La lune illumine un peu trop le ciel pour pouvoir capturer le passage de la voie lactée mais j'ai pris un réel plaisir à la contempler.

Ce trek aura bien été, littéralement, un passage par le feu puis la glace. Quant à mon séjour à El Bolsón, il aura commencé, à l’inverse, par une ambiance froide, seul dans un camping et en montagne, avant de retrouver la chaleur humaine et le partage dans un endroit plein de vie et de bienveillance.

Mais ça, vous l’aurez compris, ce sera le sujet d'un prochain post.

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Au cours de toutes mes randonnées, j’ai pu croiser la route de plusieurs animaux qui peuplent les paysages de Patagonie, ainsi que différentes espèces de plantes qui les couvrent de couleurs variées. Je vais vous faire un petit post en vous présentant celles et ceux qui ont retenu mon attention – et surtout que j’ai réussis à prendre en photo dernièrement.

Commençons par un petit jeu : vous trouverez une des réponses possible un peu plus bas (en tout cas, ma réponse).

À quoi vous fait penser cette souche d’arbre?








Quelques oiseaux…

Le Caracara Huppé arbore un bec tricolore : rouge, orange et bleu. Il fait partie des rapaces et est du genre "pique-assiette". Mais ce comportement est très certainement dû aux touristes qui leur jettent des miettes de pain à tout bout de champ… Pratique néfaste pour leur survie !



Ici, il s’agit d’un jeune Caracara Chipango, un autre rapace. Celui-ci se pavanait sur le bord du sentier sans montrer la moindre peur à l’approche des randonneurs.




Le Phrygile de Patagonie est un oiseau très courant dans le sud du Chili et de l’Argentine. Généralement observable en zone urbaine, il traîne aussi autour des sentiers et des zones de bivouacs, à l’affût de toute miette de pain égarée. Cet énergumène n’a même pas voulu attendre que je finisse mon repas!

Le Bruant Chingolo est très courant en Amérique du Sud. Il est de l’espèce des passereaux et sa petite huppe fait tout son charme.

Quelques mammifères…

Ici, les vaches ont la belle vie et peuvent paître dans la montagne, sans avoir de réelles limites. Certaines sont sauvages et d’autres domestiques, mais dans ces montagnes elles sont toutes logées à la même enseigne !





Le Huemul est le cerf des Andes. En raison de la chasse et des maladies transmises par les animaux domestiques, l’espèce est en voie d’extinction : des mesures récentes veillent à la protéger. En moyenne, les individus font 1,60m pour 70kg. Je suis tombé sur ce spécimen au hasard en arrivant sur un haut plateau près d’El Chaltén. Je n’ai pas souhaité changer d’objectif pour l’avoir en plus gros plan : j’ai préféré le contempler, lent et serein, à la lisière de la forêt.

¡ Réponse à la question ! 

Cette souche, rencontrée dans le parc de Torres del Paine, est pour moi, le tout premier Guanaco que j’ai vu (même s’il ne s’agit que d’une souche d’arbre, je sais…). Mais j’ai eu la chance d'en croiser tout un troupeau à la sortie du parc. C’est un lama qui mesure entre 1m et 1,20m pour 90kg. Vrai montagnard, il peut se retrouver à plus de 4000m d’altitude ! On en voit beaucoup sur les routes de Patagonie et dans les immenses champs qui les bordent. Vous constaterez que j’en ai pris un en flagrant délit de crachat !

Et cette souche-là, c’est quoi pour vous ?

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Sur le chemin du retour de mes péripéties rafraîchissantes autour de la vallée du Rio Azul, je décide de m’arrêter dans un petit refuge pour le déjeuner et de prendre un bon repas au coin d’un feu. Et là, surprise… ! Je retrouve Marion, une voyageuse française rencontrée à El Chaltén. Voulant quitter la solitude du précédent camping, elle me recommande fortement un hostel proche du centre-ville où bienveillance et chaleur humaine semblent au rendez-vous…

Le retour en ville est agréable, les gens profitent de quelques rayons de soleil et de la chaleur pour flâner dans le parc du centre-ville et je m’oriente lentement vers ce fameux lieu, qu’il me tarde de découvrir.

Il s’agit d’un Hostel en éco-construction. Ici, les murs sont en terre-paille, avec des incrustations de matériaux recyclés : pneus pour épaissir et rigidifier la base des murs, culs de bouteilles en verre pour faire des puits de lumière colorée, bois de récupération pour les meubles et les habillages… Le jardin est arborée et présente quelques mini terrasses surélevées, afin de s’étendre à l’ombre, ou de s’adonner à quelques passe-temps tout en profitant de l’extérieur. Il y a un beau potager en permaculture dont les récoltes servent en cuisine, cette dernière étant d’orientation vegan et préparée avec soin. Il s’agit d’ailleurs d’une cuisine ouverte, qui donne sur l’espace principal, lieu de partage et de rencontres. Tout le monde prend son repas ici, avec un mur en demi-cercle qui permet à chacun de s’ouvrir aux autres. Cependant, il est tout à fait possible de se trouver un petit coin plus isolé si besoin : le respect du rythme et des besoins de chacun étant évidemment l’essence même du lieu. L’espace douche ressemble à une serre, où l’humidité crée sert aux plantes.

Hostel Earthship Patagonia 

Et pour faire vivre ce lieu, il y a toute une équipe qui s’y prête bien. Entre la gérante, les volontaires du moment, les anciens volontaires qui reviennent régulièrement et les voyageurs qui restent plus longtemps que prévu, tellement cet endroit est ressourçant, reposant et bienveillant. Au final, je ferai partie de ces derniers et resterai cinq nuits au lieu des deux prévues. À force de se connaître, on prend le temps de se prendre dans les bras pour se dire bonjour. C’est bête, mais cette pratique met du baume au cœur : d’autant plus dans un voyage solitaire comme le mien. Et je pense que cela fait du bien et réconforte n’importe qui. C’est une pratique que je fais déjà avec certains proches. Je vous propose de vous prêter au jeu 😉.

Rien ne vous y oblige, bien sûr : certains trouveront ça… bête, inutile, sans plus, surprenant, agréable, réconfortant ou emplissant un besoin enfoui depuis longtemps. Plus qu’un simple câlin, une accolade, il s’agit de partager ses émotions, son ressenti, etc… avec l’autre, sans mots, juste avec la simplicité d’une étreinte, le rythme et la profondeur de la respiration. Appelons-le « câlin empathique ». Pas besoin d’être amoureux, ou très proche de la personne en face : je sais que ça peut paraître perturbant dans notre société, qui présente, entre autre, une énorme ambivalence. Celle d’être plus connectés que jamais les uns aux autres… mais à distance. Les réseaux, les moyens de communication, tout nous éloigne au final du contact humain, social et du toucher. Les mesures barrières du Covid ont d’autant plus accentué cela : les poignées de mains, accolades, sont moins présentes. Et puis même, au final, ça fait combien de temps avec vos proches que vous ne vous êtes pas fait un vrai câlin profond, simple, sans ambiguïté ?

En pratique – Le « câlin empathique » : prenez dans vos bras qui vous voulez, et laissez-vous aller. Fermez les yeux, pensez à comment vous vous sentez tout d’abord puis respirez profondément, soupirez lentement, laissez vous porter par votre rythme respiratoire. Pensez à ce que vous ressentez pour l’autre ou ce que voulez lui transmettre… Et lâchez prise !!! Étreignez-vous sans penser au temps pour répondre à votre besoin : acceptez la durée nécessaire pour la personne en face et, enfin, remerciez-vous l’un l’autre en vous lâchant.

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Je sais j’ai pris du retard et j’écris ce texte quasiment 3 semaines après… Aujourd’hui, je suis au début d’une nouvelle étape du voyage que je continue à vélo. Et tout cela fait d’autant plus sens depuis que j’ai changé de façon de voyager. À vélo, je ne suis plus le « touriste qui débarque du bus », j’arrive en ville avec mon vélo chargé de sacoches dans tous les sens. Tout de suite, ça interroge et interpelle un peu plus les gens. J’ai beaucoup plus de contacts avec les locaux, même si, parfois, ce n’est que pour quelques minutes. Mais en fait, même après une journée entière à pédaler seul, sur une route nationale, rien qu’un petit échange basique, simple vous amène tout de suite à un jour meilleur.

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Une rencontre fortuite lors d’un trajet en bus… C’était entre El Chaltén et El Bolsón : plus de 21h de bus, à errer entre films téléchargés, imaginaire de Tolkien (toujours), et… et papotage avec mes deux voisines, Emma et Marine, deux amies d’enfance en voyage à travers l’Amérique du Sud pour quelques semaines. L’entente est bonne, les discussions vont rapidement vers des sujets profonds et intéressants… Quand soudain, il me faut vite sortir du bus, à moins de rater mon arrêt pour El Bolsón !

En Patagonie, l’itinéraire des voyageurs étant très similaire, on se croise et se recroise assez facilement. Ce n’est pas pour autant que des liens se créent réellement : parfois, il s’agit juste d’un salut amical, ça peut aller jusqu’à partager un verre, un repas ou une rando. Et puis… On ne sait pas pourquoi, avec certaines personnes, il y a un petit : « Je sens que je vais les revoir et que ce sera plus qu’une rencontre éphémère. » Je vous le donne en mille : c'est ce qui m'est arrivé avec les filles ! Ayant repris un max d’énergie sur la fin de mon séjour El Bolsonien, j’envisage de partir pour San Carlos de Bariloche et de parcourir la route des 7 lacs qui mène jusqu’à San Martin de Los Andes. La pratique courante est de louer une voiture et de faire l’aller-retour sur 2 jours afin de profiter des différents points de vue et des villes sans précipitation.

Et c’est pile au moment où je recherche sur les réseaux quelqu’un qui proposerait un partage de voiture, qu’une certaine Emma recherche avec sa copine Marine au moins une troisième personne afin d’explorer la route des 7 lacs. Vous l’aurez donc compris, nous serons compagnons de route pour les 2 jours suivants.

Je rejoins Emma et Marine à la Villa Angostura et nous passons par la Villa Traful. C’est le Lago Traful qui retiendra le plus notre attention, grâce au calme et à la beauté du lieu. Globalement, j’ai beaucoup pensé aux paysages des fjords et des lacs norvégiens en faisant ce périple. Et puis, c’est le seul road-trip que je fais depuis que je suis parti : alors, forcément, il y a un léger clin d’œil à mon précédent voyage 😀 !


Bon… Assez de parlotte, place aux images !!!

Nous avons aussi eu droit à une belle présentation d’un Cormoran Viga. Il ne lésine pas sur le style et tient à montrer tous ses profils !

Et puis, avec les lacs, on profite forcément d'un jeu de reflets.

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Publié le 12 mai 2023

Me voilà au nord de la Patagonie argentine : mais il est temps de quitter cette zone merveilleuse, dont les paysages m’ont enivré lors de balades toutes plus fantastiques les unes que les autres.

Je m’oriente maintenant vers Pucon, une ville chilienne dominée par le volcan Villarica et bordée par le lac du même nom. La ville est calme et tranquille, il y a de nombreuses balades à faire et notamment l’ascension du volcan. Malheureusement, il est impossible actuellement d’aller jusqu’au sommet… Depuis le mois de novembre, le volcan est en état d’alerte et sous haute surveillance : le magma serait tout prêt du sommet du cratère. D'ailleurs, la nuit, on peut voir une lueur rouge au sommet de la montagne. Mais la couverture nuageuse ne me permettra pas d’apprécier l’ambiance. Bref, je décide malgré tout d’aller crapahuter sur ce magnifique volcan, posé là, surplombant les alentours.

Nous sommes 8 à faire l’ascension et il y a 4 guides avec nous. Comme sur la plupart des volcans actifs, la végétation s’arrête bien vite et laisse place à un paysage aride et lunaire, où la terre prend différentes teintes, de l’orangé au noir profond. La rando m’est facile, et le groupe profite d’une balade sur un petit bout de glacier à quelques centaines de mètres du sommet. La vue est superbe avec au fond le volcan Llaima qui nous fait face. Mais, j’avoue, la frustration est grande de devoir s’arrêter si prêt du sommet : moi qui adore les volcans et contempler la fenêtre qu’ils ouvrent sur les entrailles de notre planète ! Tant pis, j’aurais l’occasion d’en voir beaucoup d’autres en continuant le voyage le long de la cordillère des Andes ! 😉


Le groupe est sympa et les guides me donnent beaucoup de conseils et de lieux à visiter pour la suite du périple. Ils me font découvrir aussi les baies de chaura. Il s’agit des fruits de la gaulthérie mucronée : leur goût est doux et sucré.



Le temps ne me permettra pas de profiter pleinement du coin mais ce n’est pas bien grave. J’en profite pour faire une pause et bosser sur les photos. La prochaine étape, c’est la capitale du Chili, Santiago, où le voyage va prendre un nouveau tournant.

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Après avoir traversé les paysages patagoniens backpacking, j’ai envie de continuer différemment… L’idée me trottait déjà dans la tête avant de partir, suites aux expériences de connaissances qui ont voyagé comme cela et après avoir rencontré Paul et Victoire dans Torres del Paine, qui parcourent l’Amérique du Sud avec cet autre moyen de transport… le vélo !

Car si le sac à dos est un mode de voyage assez libre, il faut malgré tout faire du stop ou prendre des bus pour parcourir certaines zones. D'autant plus sur un contient aussi vaste que l’Amérique du Sud !!! Cela ne permet pas d’aller facilement où bon vous semble et d’avoir ce sentiment de liberté totale qui me plaît en roadtrip. Pour le coup, le vélo sera un moyen de transport parfait pour ce sentiment de liberté et me permettra quand même de prendre un bus, si besoin, lorsqu'il faudra traverser une zone de vide désertique qui s’étale sur plusieurs centaines de kilomètres… Mais je tenterai quand même l’expérience en pédalant ! 😙

C’est à Santiago du Chili que je vais faire ma transition du back au bikepacking, en achetant un vélo type Gravel avec deux sacoches à l’arrière et de quoi ranger mon sac de couchage et ma tente sur le guidon. Il ne reste plus qu’à changer de sac à dos pour en prendre un plus petit et beaucoup plus light afin de tenir sur le porte-bagages et me permettre de partir en trek pour quelques jours.



Je prends donc un bus depuis Pucon afin de rejoindre la capitale chilienne : j’y resterai juste quelques jours, le temps de récupérer le vélo. Après avoir été pendant plusieurs semaines à vadrouiller dans la nature, en montagne et sans avoir à penser sécurité ou quoi que ce soit, mon séjour là-bas est un petit « choc »… Tout à coup, je me retrouve dans une grande capitale. Je me balade pas mal dans la ville, dans différents quartiers mais à chaque fois on me conseille de « faire attention », « de ne pas trop traîner par là »… Quand je m’arrête dans un resto ou un café en terrasse, les serveurs me proposent de garder mon sac à l’intérieur de l’établissement et de ne pas laisser mon téléphone sur la table même si je suis assis juste là… Les maisons de quartiers sont cerclées par des barrières de près de 2m de haut et tout le temps c’est « attention, attention, attention »…

Pourtant, mon expérience – certes très courte, de 3 jours – aura été sympa, sans aucun acte de malveillance ou de sensation réelle d’insécurité. Mais cet état d’esprit de méfiance et d'extrême vigilance me lasse et me laisse un souvenir déplaisant de la ville. Tout cela ne me donne pas envie de faire de photos, je mets l’appareil de côté pour quelques temps. Heureusement, les rencontres sur place auront été chouettes avec, notamment, un cours de salsa en pleine rue.

Je me décide donc à quitter le coin en prenant un bus pour traverser la frontière une nouvelle fois et filer à Mendoza, en Argentine, qui sera le point de départ de ce nouveau voyage, à bicyclette.

Mendoza est une ville très sympa, suffisamment grande pour y trouver de tout mais à taille humaine : il est agréable de s’y déplacer à pied, les habitants et commerçants sont chaleureux et accueillant. Le passage dans cette ville est l’occasion de faire le tour de quelques bodegas, pour déguster les vins du coin dont le cépage prédominant est le Malbec. Bref, ces quelques jours à Mendoza seront agréables et pleins de belles rencontres, une nouvelle fois.

Comme vous l'avez remarqué, il n’y a pas de photos dans ce post. Je pense que j’avais besoin de faire une pause et qu’inconsciemment je voulais marquer la transition.

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Publié le 22 mai 2023

Dans la plupart des représentations du voyage dans le temps, il y a souvent un « tunnel » à traverser, une zone de vide et de solitude, avant d’atteindre un lieu nouveau, une nouvelle aventure… C’est ce que je j’ai vécu sur cette première étape de vélo.

Me voilà prêt au départ. Je suis dans un hostel en plein centre-ville de Mendoza : le vélo est chargé et l’idée est d’atteindre Córdoba dans les semaines à venir. Pour cela, je dois traverser ce fameux « tunnel », cette zone désertique où il n’y a rien, quasiment aucun village, juste de longues lignes droites au milieu d’étendues de sable et de buissons aux épines aiguisées. Le choix des fins d’étapes journalières est simple…. S’arrêter là où il y a un point d’eau ! 😅

Le premier jour, je pars pour la Réserve naturelle Bosques Telteca, un désert de sable jaune, où je pourrai faire étape au centre d’accueil des visiteurs. Avant ça, il faut partir et s’habituer à pédaler avec un vélo chargé. Entre mes affaires, la nourriture pour plusieurs jours et les litres d’eau, il doit y avoir facilement 30 kg en plus de mon poids sur le vélo, tout ça dans les deux sacoches latérales et dans mon sac à dos, lui-même posé sur le porte-bagages arrière. Les premiers mètres sont compliqués : je sens l’arrière du vélo qui vacille de gauche à droite, la bécane est difficile à maîtriser et la circulation du centre-ville ne m’aide pas vraiment… En fait, dans la précipitation et l’impatience de cette nouvelle aventure, j’ai mis mon sac à dos à l’envers, la partie la plus lourde du package, pendante au bout du porte bagage. Forcément chaque petit déplacement latéral est accentué tel un boulet au bout d’une corde. Bref, j’ai le cul qui ballotte… Mon erreur est rapidement rectifiée. Je repars sans plus tarder. La ville disparaît rapidement et laisse place à quelques hectares de vignes, puis très vite… plus rien. C’est une nouvelle rencontre, un nouveau décor, qui sera mon seul compagnon de route pendant plusieurs jours. Au moins, l’itinéraire est assez simple : suivre la route, droite, mais sans fin ! L’horizon ne me propose pas même un virage. Mais déjà, quelle sensation de liberté, seul sur mon vélo, au milieu de ce « rien ». Les idées fusent, je chantonne, je sifflote et j’ai le temps de penser à tout ce que j’ai vécu jusqu’à présent, d’apprécier ce que je vis et déjà de m’impatienter à découvrir ce que sera demain. Le temps est bon… le ciel est bleu… et le soleil tape fort ! J'arrive sans encombre à la réserve : j’y rencontre Alejandro, un des gardiens du site, très sympa, qui s’amuse de voir un voyageur à vélo passer par ici… Il y en a très peu. J’ai accès à de l’eau, des toilettes et un lavage au gant de toilette à l’eau froide.

J1 : 120 Km / 227D+

Le deuxième jour m’offre le même paysage que la veille. De grandes lignes droites au milieu d’étendues désertiques, parsemées de buissons piquants. Tous les bords de route sont fermés par des clôtures qui délimitent de vastes plaines. De temps à autre, il y a quelques chèvres, vaches ou chevaux qui traversent la route. Les chauffeurs routiers me font toujours un signe amical et laissent entendre un coup de klaxon qui se répercute tel un cor de guerre, empli de courage et de vigueur ; les motards me font signe… Ces petites choses me donnent le sourire : ça ne semble rien, mais quand on est au milieu de rien, sans rien, on se contente de rien, non ? Rien n’est rien qui ne sert à rien, pas vrai ?

Ce soir là, je trouve refuge à côté d’un poste de contrôle policier qui délimite le passage entre les régions de San Juan et de San Luis. Là encore, mes hôtes sont surpris mais très accueillants. J’ai droit à de l’eau chaude et un brin de discussion. Avant de filer au lit, j’aiderai un policier à faire rentrer dans leur enclos les chevaux fuyards d’une communauté voisine.

J2 : 92 Km / 63D+

Le troisième jour est plus court. Je file vers une nouvelle réserve, le Parque Nacional Sierra de las Quijadas. Le décor est le même, jusqu’à ce que le sable change soudainement de couleur. Fini le jaune et bonjour les teintes rouge-orangé du sol. Le paysage prend un peu de hauteur et la visite du parc m’enchante. Les différences de teintes entre les montagnes rouges, les plantes vertes et le ciel bleu sont merveilleuses. Étant parti tôt ce matin là et l’étape étant rapide, j’ai le temps de découvrir les paysages de ce parc naturel et la vue est à couper le souffle. Je profite du restaurant du lieu avant de planter la tente à l’entrée du parc, dans un petit coin tranquille, loin du bruit de la route.

J3 : 49 Km / 225D+

Le jour suivant s’annonçait comme une étape moyenne de 70km. L’objectif était un petit hameau avec une épicerie où je devais pouvoir trouver de l’eau… Mais après un trajet encore et toujours en ligne droite, j’arrive à la- dite, petite épicerie. Finalement, il s’agit de la maison d’un agriculteur qui vend quelques denrées alimentaires pour dépanner. La seule chose qui m’intéresse vraiment c’est l’eau. Mais ici, dans les zones reculées, il n’y a pas d’accès à l’eau courante. Les habitants de ces régions ont des réservoirs extérieurs, tel un gros tonneau placé en haut d’une tour attenante à la maison. Ne voulant pas abuser de cette eau-là, je lui achète sa seule et unique bouteille d’eau d’un litre…

Sachant que j’ai déjà consommé la moitié de mes réserves d’eau en ce milieu de journée, que l’endroit n’est pas idéal pour camper, et que je ne veux pas abuser de leur réserve, quitte à être à court d’eau demain matin, je prends la décision de doubler mon étape et d’aller jusqu’à l’objectif suivant, Luján, un petit village où je devrais trouver de tout. Pour cela, il faudra encore parcourir une cinquantaine de bornes avant de quitter cette zone désertique. L’arrivée à Luján est un soulagement. Je retrouve enfin une vie de village, des gens dans la rue, quelques commerces et surtout une chambre d’hôte (hospedaje) où dormir. C’est Berta qui m’accueille, une mamie de 74 ans qui est adorable et qui, avec son mari, continue de voyager en van aménagé en Argentine. Le soir, j’opte pour un petit restaurant où la nourriture est locale et bien travaillée. Qu’il est bon de retrouver un peu de monde après cette longue route à travers le désert.

J4 : 114 Km / 338D+

La suite de ce premier tronçon de vélo est plus agréable. Les routes sont plus fréquentées, je traverse quelques zones habitées et les étapes sont plus courtes. Après Luján, je m’arrêterai à Quines, un petit village où le gérant du camping est une vraie pipelette. Mais ses empanadas sont délicieuses et l’ambiance chaleureuse. Des habitants du coin qui se baladent à vélo viennent me saluer pour en savoir un peu plus sur mon voyage et ma destination.

J5 : 26 Km / 120D+

Le lendemain, je file vers ma dernière étape de ce premier périple : Villa Dolorès. C’est une petite ville qui semble fort sympathique. Je décide de filer sur la place en plein centre, et de débusquer un petit resto sympa pour ce midi (enfin 14h… Oui, je me suis mis au rythme argentin). J’ai à peine le temps de descendre du vélo qu’un homme d’une soixantaine d’année s’approche et à nouveau cherche à en savoir plus sur mon voyage. Il est passionné de vélo et me conseille un atelier de réparation si besoin, et un restaurant pour ce midi. Au resto, les serveurs sont tous curieux et amusés de voir un voyageur venir de Mendoza à vélo, et tout le monde se met à m’aider à trouver une chambre d’hôte pour quelques jours (n’étant pas une ville touristique, il n’y a aucune auberge ici et la chambre d’hôte sera une bonne option pour bien récupérer). Bref, en à peine 1h après avoir débarqué dans cette petite ville, je n’ai rencontré que des personnes sympas, j’ai un logement, je mange une superbe pièce de bœuf cuite à l’asado avec des légumes frais et plus tard j’irai dans le magasin de vélo de Tuti (le fameux recommandé) qui sera d’excellents conseils, et me rendra un autre grand service… Mais ça, vous le saurez plus tard ! 😉

J6 : 69 Km / 100D+


Suite à ce voyage à travers l’espace et le temps, j’imagine comment va être cette nouvelle aventure à vélo… Pleine de rencontres imprévues et de bienveillance encore plus marquée qu’en voyageant en sac à dos. Et le futur me confirmera largement tout cela.