Alexandre:
Le site officiel du tourisme de Gran Canaria n’a pas peur des grands mots: la page d’accueil nous promet « un continent miniature » avec de « nombreux spots instagrammables » (sic). Voilà de quoi trépigner d’impatience! Blague à part, sur le ferry qui s’apprête à nous déposer à Las Palmas, informations enthousiastes du « Routard » (durement acquises au prix d’une nausée certainement évitable… mais quel trait de génie pour un naupathe de mon genre que de lire des caractères lilliputiens sur son téléphone sur un mer houleuse!) et préjugés s’entrechoquent: je ne sais plus très bien à quoi m’attendre. Ce qui est sûr, c’est que j’étais jusque-là plus ignorant qu’informé: 400’000 habitants pour Las Palmas (neuvième ville d’Espagne!), profusion de sentiers de randonnées entre ravins abrupts, vastes pinèdes et rochers colossaux, entre fruits exotiques, vin et café… Bien loin, donc, de se réduire à un hydre disgracieux fait de créatures anglo-germaniques ruisselantes empêtrées dans des alignements de chaises longues que je m’imaginais!
Dans notre auberge de Las Palmas, il y a de tout: cela va des surfeurs aux nomades digitaux et des randonneurs-grimpeurs-explorateurs à la génération EasyJet (une app permettant de chercher des voyages pour « anytime, anywhere » permettant d’aller à Gran Canaria ou en Israël pour 20 euros aller-retour est notamment qualifiée de « kind of really really awesome you know »). On musarde quelques jours entre la vieille ville et la plage de Las Canteras, un « petit Copacabana » qui fleure bon la crème solaire et les calamars frits. Les bus électriques filant dans leurs tunnels sous la ville nous font faire un grand écart entre bouillonnement métropolitain et paisibles ruelles assommées de chaleur. Les fruitiers du marché de La Vegueta colmatent efficacement nos « petits creux » et les musées de la vieille ville coloniale calfatent les lacunes de notre culture générale: les chiens gardant la cathédrale comme symbole des Canaries, les « îles aux chiens » (canis, canem, canum, canibus - paraît-il, je n’ai jamais fait de latin), les haltes lors des voyages de Chrisophe Colomb, les Guanche (« autochtones canaris ») et leurs villes et silos troglodytes qui nous rappellent ceux de Cappadoce en Turquie…
Hitze schon am Morgen Peu impressionnés par le nom des lieux, nous faisons une excursion à Teror. Heureux hasard, nous retrouvons le sympathique Mattia, un Italien de Vénétie rencontré à Las Palmas, avec qui nous randonnons au petit bonheur la chance dans les environs, entre arums et tapis de capucines (Norina est jalouse). Encore ruisselants (il fait 31°C), l’ombre des grands pins (et de la basilique de… Notre- Dame-du-Pin) nous rafraîchit, avec l’aide d’une caña méritée. L’heure du retour s’approchait, mais c’était sans compter sur le carnaval, qui nous suit décidément à la trace. Entre maisons colorées, danseurs travestis et tambours festifs plane le doux parfum de la déconnade et de l’outrance. Deux jeunes travestis pour l’occasion nous abordent: leur troisième larron a fait faux bond et ils ont besoin d’un remplaçant pour compléter leur équipe des « Félines du Serengeti » lors de la « Carretera de Tacones » (course des hauts talons), qui va durer « à peine una horita »… Plus hébété par l’atmosphère festive que par mon rafraîchissement malté, j’ai la fâcheuse idée de dire: « OK, vamos ». Et me voilà déguisé, pailleté, gonflé, talonné et équipé par Maria, et parti pour une course-relais au goût douteux aux côtés de Jésus et Ramsès (ça ne s’invente pas). Contaminé par l’enthousiasme de mes acolytes, je me prête au jeu, défilant devant la foule, courant sur les pavés autour de la basilique, soulevant des haltères (80% de mon poids quand même), visant (juste) au basket et au beer-pong pendant … deux heures et demie. Déconnade et outrance, disais-je… Quel bien ça fait!
La suite de nos aventures sera moins dévergondée: une traversée diagonale de l’île, d’Agüimes à Agaete, portés par nos pieds et abrités par notre tente. Les barrancos (vallons-ravins) se drapent du vert des cactus, du blanc des amandiers en fleurs, de l’ocre de la terre, du carmin des coquelicots, du mauve des fleurs de chardon avec lesquelles notre fromage est parfumé (queso de flor), et encore du noir charbon de l’écorce calcinée des pins des Canaries qui survivent aux incendies... La course et l’envol empotés des perdrix nous autorisent à délasser un peu nos muscles au supplice dans les abruptes pinèdes. Le rataplan des pics épeiches rythment notre avancée. Des souvenirs lointains jaillissent en tombant sur des restes d’amandes cassées « pierre contre pierre » ou en cherchant vainement des pignons qu’auraient délaissés nos amis ailés. La féerie des panoramas jusqu’à Tenerife et La Gomera, où les nuages badinent avec ravins, rochers et océan; l’odeur de la sève; la berceuse chantée par le vent dans les aiguilles des pins… Beaucoup aimeraient appeler ceci « déconnecter », mais c’est du contraire dont il s’agit: une toile abîmée qui se retisse. Notre rythme circadien se calque automatiquement sur celui du soleil (Norina s’endort à 19h30 à peine le soleil disparu derrière l’horizon!). Les sautes d’humeur du vent, la fraîcheur des combes et de la nuit, les débats entre pinsons et corneilles, l’odeur de la pluie: ces liens jaillissent et libèrent nos sens, bien loin de la désafférentation démentielle des publicités, des écrans et des réseaux.
Feuerfeste Kiefern mit neuem Leben nach einem Brand - La deuxième vie des pins des Canaries « ignifuges » après un incendieÉpuisés… Notre marche nous mène jusqu’au Parador de Cruz de Tejeda, pour un intermède luxueux reçu en cadeau, dans un lieu qui est une invitation à ralentir, à respirer. Après quelques cycles au rythme du soleil, le retour aux flux de messages et aux nuages de données désarçonne. Mais la vue qui s’offre à nous là-haut est de celles dont on ne fatigue sans doute jamais. Idéal pour s’ancrer ici et maintenant, sans trop laisser cabrioler ses pensées entre tracas passés et incertitudes à venir… Entre émerveillement et fragilité, une certitude: ce monde est grandiose, et ces instants-là sont sereins.
Notre chemin traverse l’île pour arriver jusqu’à Agaete, où se cultive mangues, papayes, avocats, vigne et même café (le seul d’ « Europe »!), au bord de l’Atlantique. Les immenses treilles permettent de ventiler le raisin, et doivent être vendangées de nuit (une histoire de taux de sucre). À côté de cette vigne inhabituelle, orangers et manguiers font de l’ombre aux caféiers, dont les baies sèchent au soleil un peu plus loin. La tête rassasiée de nouveauté, le ventre plein et les jambes fourbues, nous grimpons sur le ferry qui, après une escale à Tenerife, nous emmène jusqu’à l’isla bonita: La Palma!
Norina:
Las Palmas de Gran Canaria erstaunt uns. Ich hatte eine kleine, extrem touristische (und somit eher hässliche) Stadt erwartet. Stattdessen empfängt uns eine Grossstadt mit Metropolenflair voller Leben und einer extrem charmanten Altstadt. Sie erstreckt sich über mehrere Hügel, hat Meer zu zwei Seiten und schöne farbige Häuschen. Die kleinen Gässchen glühen in der zunehmenden Hitze als lägen sie im Fieber. Wir besichtigen das Museo de Canario, welche sich auf die Bewohner der Insel vor der Kolonialisierung konzentriert (migrierte Berber aus Nordafrika). Es ist etwas makaber (unzählige Knochen und Mumien), aber spannend. Auch wenn ich finde, dass man diese Körper ruhen lassen sollte nach erfolgter Erforschung, wurde doch so viel Aufwand betrieben, sie zu begraben. Der Name der kanarischen Inseln kommt von „cane“, also Hund auf lateinisch. Die Berber hatten zusammen mit Ziegen und Saatgut auch Hunde mitgebracht und als die Europäer am Anfang des 15. Jh. angekommen sind, hatte es auf der Insel extrem viele (wilde) Hunde. Somit sind die Kanaren also übersetzt die „Inseln der Hunde“. Zu römischer Zeit hiessen sie „Insulae Fortunatae“, also Inseln der Glücklichen oder Glückseligen. Gibt es ein besseres Omen für uns?
Wir machen Ausflüge mit dem Bus in die Umgebung, klettern durch „Barrancos“ (Schluchten), mal urwaldig feucht, mal aus rotem Stein und trocken. Insgesamt aber staunen wir, wie grün die Insel ist. Nach den kargen Felsen von Lanzarote und Fuerteventura sind diese bewaldeten Berge umso beeindruckender. Wir besichtigen eine Kaffee-, Frucht- und Weinplantage in einem Tal mit einem Mikroklima zwischen 20 und 40 Grad. Die Reben sind in hohen Bögen gezogen, damit sie bei 40 Grad durch den Wind abgekühlt werden können, die reifen Trauben werden nachts gelesen, damit sie alle gleich viel Zucker enthalten. Der Kaffee wird von Hand gepflückt, in der Sonne wochenlang getrocknet und schonend geröstet, was ihm ein fast schokoladiges und sehr mildes Aroma gibt. So vielseitige Orte sehen wir abseits des Massentourismus, welchen wir erfolgreich umgehen.
Barrancos Der Karneval ist auch in Gran Canaria noch voll im Gange und in dem malerischen Kolonialstädtchen Teror erleben wir das abschliessende Highlight, die „Carrera de Tacones“, ein Staffettenlauf auf hohen Hacken für als Frauen verkleidete Männer. Kurz vor Beginn des Laufs sprechen zwei gutaussehende Männer in hohen Hacken und Minirock Alex und Mattia (einen Italiener, den wir im Hostel kennengelernt und in Teror per Zufall wieder angetroffen haben) an, ob einer von ihnen mitmachen würde, denn ihr Teamkollege habe kurzfristig abgesagt und sie dürfen nur zu dritt starten. Vielleicht ist es das Bier nach der anstrengenden Wanderung, vielleicht ist es die neu gewonnene „nicht-überdenken“-Einstellung, Alex sagt jedenfalls Ja. Ein bisschen bereut er es wahrscheinlich, als er kurz darauf in Stöckelschuhen, bauchfrei und geschminkt während 2 Stunden Pflastersteinstrassen hochsprintet, Gewichte hebt, auf Gymnastikbällen hüpft, usw. Mattia und ich amüsieren uns köstlich.
Wir wagen unsere erste mehrtägige Wanderung mit dem gesamten Gepäck, Essen für die Tage und zu Beginn auch noch 5l Wasser, da der erste Campingplatz über kein Wasser verfügt. Als wir frühmorgens zum Krähen eines Hahns und dessen Echos unsere 16kg schweren Rucksäcke den Berg hochschleppen sind wir alleine mit einer traumhaften Aussicht den Barranco de Guadayeque hinunter. Abschnittsweise ist das rascheln der Eidechsen neben uns so regelmässig, dass man fast paranoid werden könnte. Etwas weiter oben wird es immer blumiger, Mandelbäume in voller Blüte, Disteln, Margeriten, Mohn, wilder Salbei und viele mehr, die ich nicht benennen kann. Umso frappierender mit riesigen Sukkuklenten und stolzen kanarischen Kiefern (die übrigens feuerfest sind!) als unmittelbare Nachbarn. Es wimmelt von Vögeln und Insekten, insbesondere Bienen, und es summt und surrt und kreucht und fleucht und zwitschert und tschilpt. Idylle.
Wir treffen niemanden auf unserem Weg zum Pico de las Nieves und die Welt scheint hier noch in Ordnung. Das Hochschleppen wird durch unglaubliche Aussichten belohnt, wenn auch die zahlreichen Autos auf der Aussichtsplattform des Picos die abschliessende Belohnung etwas mindern. Die erste Nacht campen wir wie gesagt ohne Wasser oder Toiletten oder sonst etwas, (quasi also wild, aber doch mit Bewilligung des „Cabildo de Gran Canaria“) und bei Temperaturen von etwa 5 Grad (wir sind auf fast 2000m Höhe, auch wenn es die üppige Flora und die knapp 30 Grad tagsüber nicht vermuten lassen..). In diesen Momenten frage ich mich manchmal, warum genau ich das toll finde.. Die Wanderungen der nächsten Tage geben mir eine mehr als ausreichend Antwort. Gran Canaria ist mit seinen Bergen und Schluchten, roten Felsen und tiefgrünen Kiefernwäldern einfach unglaublich schön. An einem Tag begleitet uns der mit dem Bus zugereiste Mattia auf einer Wanderung zum Roque Nublo, ansonsten sind wir grösstenteils alleine unterwegs, mit klopfenden Buntspechten, singenden Kanarienvögeln und summenden Bienen und co. als einzige Begleiter. Nachts zirpen die Grillen und ab und zu fällt einer der riesigen Kiefernzapfen krachend zu Boden. Es ist friedlich hier in den Bergen. Ich denke immer wieder an die Worte, die einer meiner Lieblingsmenschen so schön sagt: „Wir haben so ein Glück!“
Nach 3 Tagen Campen gönnen wir uns eine wohlverdiente Pause im Parador Cruz de Tejeda, ein grosszügiges Geschenk, das wir bekommen haben. Kein Tag zu früh, denn es gibt Nieselregen und Nebel am nächsten Morgen. Wir geniessen das luxuriöse Hotel und den Spa umso mehr und die Aussicht von unserem Zimmer an den klaren Tagen ist so unglaublich schön, dass wir uns nicht satt sehen können. Ruhe und Zufriedenheit überkommt mich. In der Ferne schimmern weitere Inseln der Glücklichen verheissungsvoll und locken uns, ihre einzigartige Schönheit zu entdecken.
Und so machen wir uns an den langen und steilen (teilweise halsbrecherischen, weil wir den „kürzeren, aussichtsreichen“ Weg nehmen wollten) Abstieg nach Agaete, wo ein Schiff uns nach Santa Cruz de La Palma, alias „La Isla Bonita“ bringen wird.
Da haben wir noch gelacht - Bilder vom noch steileren Teil gibts aus offensichtlichen Gründen nicht..