Une semaine en train à sillonner villes et villages en direction du soleil levant.
Mai 2016
2 semaines
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Ce séjour est emprunt de plusieurs records avant de même de commencer : première fois en Asie, première fois aussi loin de l'Europe, et aussi l'une des rares fois où la langue nous est complètement étrangère. N'y voyez pas des occasions de préparer notre voyage pour autant. Comme toujours, ce voyage est placé sous le signe de l'arra..... l'aventure !

Première étape, la douane. Frais après 12 heures de voyages et une escale à Shangaï, le triple contrôle douane-santé-immigration nous réveille en sursaut. Nous réalisons au guichet que nous ne connaissons pas notre adresse de destination, bien que pour une fois nous soyons attendus. C'est même une des raisons de notre venue ici, rendre visite à Jean-Claude et Nouma (les noms ont été modifiés pour préserver leur sécurité). Du coup on a beau dire qu'on connaît Jean-Claude, il faut redoubler d'inventivité et de faciès de "on-est-des-honnêtes-gens" pour entrer sur le territoire.

Chose faite, nous arpentons nos premiers kilomètres, reliant Incheon (une île au large de Séoul qui accueille l'aéroport principal) à Séoul. Dépaysement garanti, surtout par l'écriture sur les panneaux, mais très ressemblant aux villes d'Amérique du Nord dans la logique de circulation : les feux sont en face du carrefour, on peut tourner à droite au feu rouge, la signalisation routière... Le trafic est dense, et bizarrement toutes les voitures sont noires, blanches ou grises. Le voyage nous a-t-il ôté la couleur ?

Impossible, les vastes montagnes nous encerclent et touchent même la ville de Séoul, traversée par la très large rivière Han. Au sud, c'est Gangnam, la rive gauche version Séoul.

Dans Séoul. Gangnam et la rivière Han. Les montagnes, jamais très loin.

En bons européens, nous sommes surpris de voir ces gadgets électroniques qui équipent les appartements (dont les toilettes). Partout où l'on rentre, on se déchausse. La rue voisine de l'appartement est commerçante, les restaurants ne manquent pas (quand est-ce qu'on mange ?). Il y a une douce ambiance de week-end avec les vendeurs à la sauvette près du métro, et une température très douce qui nous immerge directement dans une atmosphère de vacances.

Le programme est maigre pour finir la journée : manger, rester éveillé... des trucs comme ça.

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Notre première journée complète (notre organisme croit que c'est la nuit par contre, ce blaireau) nous emmène au cœur de Séoul : le métro. Pas de problème, aguerris à celui de Paris (et de quelques autres villes du monde), le sous terrain est notre territoire. A Séoul, pas de "lost in translation". Tout est indiqué. En coréen, certes, mais aussi en translitération anglaise ce qui nous permet de comprendre quelque chose. Et tout est numéroté (en numérotation arabe). La rame, la station, les sorties de métro, les portes pour rentrer dans la rame... Un petit écran nous indique que notre métro arrive bientôt, et qu'il s'agit du numéro 4577. Le suivant est le 4083. Des télés balancent de la pub (pour de la liposuccion) sur le quai et dans la rame. Les coréens, absorbés par leur smartphone, n'y prêtent pas attention.

On mange en repas d'affaire avec Jean-Claude. Un moyen idéal, et rare, d'échanger avec des locaux. D'ailleurs certains sont expatriés et parlent même français. Le luxe. Surtout assis par terre en chaussette à manger un délicieux bibimbap. Autant vous le dire direct, la nourriture est un sujet récurrent de ce voyage ! On a adoré, même s'il faut être ouvert aux nouvelles saveurs. On n'a pratiquement pas mangé deux fois la même chose tellement c'est varié. J'aurais l'occasion d'y revenir. Voici quelques vues de Séoul.

La fête de Bouddha se singularise par des myriades de lanternes suspendues partout dans la ville. En particulier vers le temple de Bongeun, en plein coeur de la ville, où nous nous rendons ensuite.

Les personnages sont aussi des lanternes. Ils sont en papier et s'allument la nuit

En face, un centre commercial géant nous occupe quelques heures, avant de tenter un local "Paris Baguette" pour un snack. Les associations françaises et occidentales se télescopent un peu, mais on apprécie le geste. Dans le métro, on se plante de tourniquets (après s'être fait dragué par un jeune gay plein de ferveur). On doit revenir en arrière et demander à un agent de nous assister. On se comprend malgré tout et il met un point d'honneur à nous aider au maximum et nous accompagner, accolé avec une voyageuse qui passait par là. Il nous accompagne au bon tourniquet et nous fait passer pour pas qu'on repaye, et comble : il nous remercie. En fait, c'est plutôt le contraire ! La politesse est appliquée rigoureusement, ce qui rend notre voyage d'autant plus agréable. En parcourant 4 petites stations sur la carte en 20 minutes, on prend conscience du gigantisme de cette ville. C'est une région tout entière !

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Il y a une piscine dans la résidence. Ni une ni deux, je chausse ma claquettes. Un personnel très nombreux (un agent d'accueil, de nettoyage, d'accompagnement dans les vestiaire et de sécurité dans la piscine) m'accueille chaleureusement. Dans les vestiaires, pas de cabines (...ah ?) donc faut pas avoir peur de voir la lune. Des bains de température variables, non mixtes, précèdent le bassin (mixte), qui offre une décontraction bienvenue deux jours après notre arrivée.

Le métro nous emmène au centre ville. La pluie incessante nous pousse à nous réfugier dans la grande bibliothèque centrale. Une pause lecture s'impose. Aux toilettes, un stérilisateur à UV attire mon attention. Les lecteurs y déposent soigneusement leurs brosses à dent. Les toilettes électroniques n'attirent plus mon attention. D'ailleurs je ne les ai jamais utilisés !

Dans les rues étroites du vieux Séoul nous chinons et évitons les gouttes. Un restaurant au hasard nous substante. D'ailleurs on choisit des plats un peu au hasard à partir de photos : du poulpe et du poulet. Quand le poulpe arrive, nous constatons qu'il baigne joyeusement dans une sauce ultra piquante. La bière est notre remède (ça tombe bien, on est dans un pub). Ca passe, mais quand le second plat arrive, nous constatons qu'il s'agit de poulpe, sans équivoque. Le premier plat serait du poulet ? Mais en forme de poulpe ? Étonnant. Ah, mais... ce sont des PIEDS de poulet !! OK. Bon, on va manger du poulpe maintenant.

Nous flânons ainsi le reste du jour, pataugeant dans les flaques et prétextant le mauvais temps pour se réfugier dans des salons de thé ou des petits magasins. Le thé n'est pas en force ici. L'Américano fait fureur : un grand café dilué, servi parfois glacé, dont le nom confirme son influence. Le soir, un BBQ coréen, dans des rues insoupçonnées proches de la station de métro, nous convainc de la grande qualité de la cuisine. Nous sommes bien accompagnés comme toujours, et les commandes se font sous le patronage de notre hôtesse bilingue. Sitôt commandés, une constellation de plats se déversent sur notre table. Des petits récipients, très variés, présentent d'appétissants accompagnements aux grillades qui cuisent sur du charbon ardent, lui-même apporté au bout d'une tige et placé au centre de la table, dans un trou tout prévu. Le bœuf grille avec de l'ail, pour finir trempé ici, enroulé dans une feuille de salade par là, mélangé de petits oignons crus finement tranchés... On en fini pas de tester, de goûter, de mélanger des saveurs. Nous sommes assis à même le sol et dans le restaurant règne une bonne ambiance manifeste. Une soupe est servie à la fin. La diversité foisonnante ne pousse cependant pas à l'excès : les quantités sont raisonnables et les petites bouchées soigneusement préparées évitent l’écœurement. Il est rare de consommer un dessert à la suite du repas. Si on a encore faim, une pâtisserie ou une supérette voisine saura tenter les plus gros mangeurs.

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Juste au sud de la rivière Han, le quartier Seorean est le quartier français. Les expatriés y vivent, il y a une école française et quelques panneaux sont en français également. Il y a plus de pâtisseries "françaises" qu'ailleurs et on y trouve même la chaîne "Brioche Dorée", qu'on n'a pas vu ailleurs. C'est surtout un quartier très joli et plutôt paisible en journée.

Après une pause dans une hotdoguerie à l'américaine et de l'improbable magasin de figurines au sous-sol, nous allons profiter du parc du quartier : le parc Montmartre. Des installations d'exercice physique sont disséminées un peu partout, et des lapins en liberté se cachent dans les fourrés. C'est aussi un parc où l'on peut croiser des français ! à l'image de cette dame qui nous adresse la parole (car elle a perdu ses enfants qui étaient en vélo).

Scène amusante en revenant, deux enfants (apparemment d'un acteur très connu...en Corée) se font suivre et mitrailler par une horde de photographes et caméraman. Les deux, bien jeunes, reviennent de courses en "autonomie". Cela anime tout le quartier !

Au cours de la soirée, on déguste des mets en tout genre, dans un grand "food court" d'un centre commercial. En particulier ces desserts à base de glace pilée recouverte de coulis de haricot rouge ou de fraise avec des mochis. Ou encore, des fruits enrobés de pâte de riz, saupoudrés de poudre de thé. Rafraîchissant !

Dans le genre original, nous découvrons et prenons goût au Bubble Tea, un thé glacé fruité sucré, parfois mélangé à du lait, et avec au fond des boules de tapioca, caoutchouteuses à la consistance, qui s'aspirent par une large paille. Ca se dit Gong Cha.

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Ce jeudi 5 mai est férié. C'est le jour des enfants. Un Noël avant l'heure. Il est de tradition de leur offrir des cadeaux. Si on peut se demander s'il n'y a pas là une opération nationale d'invitation à la consommation, la décision du gouvernement cette année n'en laisse plus le doute : le vendredi, qui fait le pont avec le week-end, est offert ! Sauf pour les entreprises qui font de la résistance, mais apparemment ce n'est pas la majorité. Sortir et consommer, tel est le message ? On nous le dira pas deux fois.

Nous suivons nos guides Jean-Claude et Nouma pour une visite touristique du palais de Changgyeonggung. Construit initialement sous le roi Sejung (1418-1450), il est devenu par la suite un zoo et un parc botanique sous la colonisation japonaise. En 1983 le palais a été relocalisé et entièrement restauré. On y trouve notamment un grand bassin. Parmi les bâtiments éparses, on tombe sur le délicat Tongmyeongjeon, construit pour la reine, et qui abrite maintenant des aquarelles et des poèmes créés par le roi. On peut s'essayer à la calligraphie avec un petit atelier. Le temps est absolument merveilleux, et si nous sommes loin d'être les seuls à profiter du jour férié, la visite n'en est pas moins agréable, au contraire.

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Aujourd'hui, nous quittons Séoul pour partir vers l'est. Le choix de la destination se fait un peu au hasard à vrai dire. Nous souhaitons nous rapprocher de la nature, et la carte indique des montagnes de plus en plus nombreuses et hautes en allant vers l'est. Nous avons choisi la ville de Yeongwol, au confluent de deux grandes rivières, et plus précisément une maison (qui s'appelle "la maison" en français) un peu isolée. Notre hôtesse réserve pour nous, car c'est un peu compliqué sinon par téléphone. Pour le train, on réserve par Internet et on imprime la feuille de notre itinéraire.

Le pays semble très bien desservi par les transport. Korail assure les liaisons en train et un réseau de bus relie également les villes, plus rapidement que le train d'ailleurs dans certaines destinations. Le KTX, le TGV coréen (avec les rames TGV d'ailleurs) relie en majorité Busan à Séoul. Mais nous n'allons pas dans cette direction. D'autres lignes, plus touristiques, effectuent des tronçons dans des régions naturelles (montagne, mer) avec des train aménagés pour le confort et la vue à l'extérieur. Nous n'avons pas été tenté par cette expérience, le train normal nous paraissant largement suffisant.

A droite, la gare de Yeongwol

Au départ de Séoul, alors que nous mangeons des tok brûlants (rouleaux de pâte de riz) et particulièrement épicés, une dame âgée nous aborde et s'extasie devant nos visages d'européens. Evidemment, on ne comprend rien, mais la dame est très souriante. Elle brandit une photo de ce qui nous semble être son petit-fils qui est aussi occidental et nous offre des yaourts après avoir caressé ma barbe ! Ambiance garantie. Il faut dire que les visages européens ne courent pas les rues, et c'est fréquent qu'on nous observe. Vers l'est, c'est d'autant plus le cas.

On choisit le taxi pour rejoindre pour la première fois notre maison, après avoir acheté quelques victuailles, par sécurité. Et une fois logés, on comprend qu'on a bien fait. Il n'y a pas de supermarché ni de restaurant à moins de 20 minutes par bus. Un peu désolés les propriétaires nous proposent un trajet en ville, mais nous nous contentons de nos boîtes de conserve (du porridge réchauffé à la poêle... pas bon) pour le soir et le lendemain. Rationnement obligé car nous comptons bien randonner le lendemain matin. A défaut d'être loin de la civilisation, nous sommes proche des chemins de randonnées. Un tour à l'office de tourisme nous permet de connaître les horaires de bus. La dame comprend l'anglais, sans le parler, et le post-it listant les horaires nous semble suspect. D'ailleurs on n'est pas très sûr de quelle colonne concerne le départ et celle qui concerne l'arrivée. A l'arrêt de bus, des centaines d'horaires sont affichés, sans qu'un seul ne semble correspondre au nôtre. Très bizarre ! Mais on verra demain. Pour l'heure on contemple le paysage : une rivière peu profonde qui lisse les galets, dans un décor grandiose de montagnes verdoyantes. Les bruits d'oiseaux sont incessants, et le temps estival nous permet de sortir légèrement couvert, les épaules sous le vent chaud.

Nous avons trouvé quelque chose qui nous convient.

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Comme nous ne voulons pas rater le rare bus du midi, nous commençons notre randonnée à 7h30. Au programme, une sinuosité du fleuve Dongang qui se trouve sur toutes les photos de guides touristiques. C'est clairement la chose à voir ici, et de plus les randonnées ne se dénombrent qu'à deux, et celle-ci est une boucle. D'après ce qu'on a compris, la randonnée dure 3 heures (à moins que ça ne soit l'autre tracé !). Nous croisons quelques randonneurs coréens, très équipés. La tendance est aux couleurs et surtout à la couverture intégrale. La peau n'est jamais au contact du soleil, ce qui fait de nous soit des kamikazes, soit des touristes canadiens. Le chemin est bien balisé et parfois aménagé par des escaliers et des cordages. C'est assez difficile car parfois très raide pendant plusieurs centaines de mètres, mais au bout d'une heure, nous voilà sur une crête, et la forêt de pins dévoile des vues imprenables sur les montagnes d'en face, que la brume matinale estompe progressivement, ainsi que la rivière en contrebas qu'on entendait depuis peu par ses quelques rapides.

La boucle nous rapproche ensuite de la rivière, et nous descendons jusqu'à sa rive. Nous croisons de plus en plus de randonneurs au fil du temps, pendant que le soleil commence à monter haut. Nous nous rafraîchissons à la rivière. Il nous est arrivé de voir quelques lézard et d'élégants oiseaux (ressemblant vaguement à des hérons) mais surtout un serpent de couleur cuivre qui à notre passage a fuit rapidement sous une pierre. Loin de nous rassurer, nous faisons volontairement du bruit en marchant dans les herbes hautes ou sur des pierres plates.

Il nous aura fallu quatre heures pour venir à bout de la randonnée, ce qui ne compromet pas notre timing pour prendre le bus qui descend en ville. Nous nous pressons pour prendre le 12h30, mais en fait il ne passe qu'à 13h20... On s'est trompé de colonne, et on réalise qu'il faut rajouter 10 minutes à l'horaire de la bonne colonne.

Nous découvrons Yeongwol, ville modeste, d'autant que nous avons sauté du bus à l'entrée de la ville (en croyant apercevoir un marché qui n'en était pas un). On ne retrouve pas ici la propreté impeccable et l'organisation irréprochable de Séoul, et encore moins de diversité ethnique. Nous sommes les seuls occidentaux en ville. La ville est très vivante, malgré un soleil qui devient accablant. L'ombre portée des arbres de la rue commerçante est salutaire. Elle abrite un café qui nous attire par ses desserts picturaux. On arrive à comprendre avec peine que la serveuse nous prévient que ce sera long (c'est à dire un temps normal pour un français), occasion idéale pour piquer un somme dans le petit jardin où l'on sert les clients. Les enfants les plus courageux tentent un aventureux "Hello" de loin pour capter notre attention. Notre dessert arrive !

BAM

Nous passons le reste de la journée à déambuler dans les rues, en découvrant cette fois le vrai marché ce qui nous permet de faire des provisions avant de rejoindre notre maison d'ermite. Il faut dire qu'on a du temps, le prochain bus est dans 3 heures !

Bien que nous passons surtout du temps à lire et observer la maman oiseau donner à manger à ses oisillons tout mignons, la nuit tombée nous succombons devant Armageddon ou Captain America... en anglais !

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Le programme est nettement moins défini aujourd'hui. Paresseusement, nous quittons la maison vers 12h pour explorer les environs. Nous décidons de suivre la route, que notre GPS indique en impasse à quelques centaines de mètres. Nous espérons dénicher un petit chemin vers les sommets.

Il devient clair que notre plan n'est pas à jour dès que nous arrivons à un tunnel de 400m... Notre randonnée ressemble plus à un vagabondage. Par ailleurs beaucoup des terres voisines sont des champs cultivés. Nous nous contentons d'un bas côté pour pique-niquer, infesté d'araignées et autre bestioles pas très touristiques. On a surtout peur des serpents depuis qu'on en a vu un en randonnée. On écourte notre pique-nique et rentrons profiter de notre dernière soirée dans les montagnes. Nous avons prolongé d'une nuit notre location, et nous savons bien que dans les villes suivantes, sans le confort d'une réservation en coréen ou d'une voiture pour nous déplacer, nous nous contenterons de logements en ville.

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C'était notre dernière nuit à "la maison". Nous profitons lentement de cette matinée, et tentons de ne pas nous planter de bus cette fois ! A la gare de Yeongwol nous prenons deux tickets pour la ville de Taebaek. Une rapide recherche a fait de cette destination notre choix suivant. Elle est à environ une heure de train, et la ville est nichée dans les montagnes. Il ne nous en faut guère plus. En attendant notre train, un coréen nous interpelle en anglais.

Nous sommes agréablement surpris et échangeons en anglais. La discussion tourne un peu court quand il essaye de nous vendre une église dont les détails nous échappent. En moins de deux nous nous retrouvons dans un petit supermarché pour faire des provisions bien sûr ! D'ailleurs des tables au fond semblent n'attendre que nous. On prend des canettes et des friandises au hasard et on attend notre train.

Le train ne nous déçoit jamais. La large allée centrale dans le wagon permet de faire rouler les valises aisément, et on peut les caler en haut sans problème. Un contrôle passe à coup sûr. Il inspecte tout sauf nos tickets et se place face à nous pour nous faire un salut courtois. Quel accueil ! Le train monte doucement dans les montagnes, et des centaines de sommets défilent sous nos yeux.

A la gare de Taebaek (prononcer Tèbèk pour passer pour un coréen), une mission nous attends : se loger. A l'office on baragouine en anglais. On en profite pour poser quelques questions, et nous voici en direction du Donga Motel, avec des horaires de bus pour aller randonner en montagne.


Le motel est très... sexy ! Après notre petite maison dans le village en montagne, on se retrouve sur un Queen bed, un écran plat géant, un ordinateur, la climatisation et des néons sous le lit et au plafond (qui changent de couleur). On en demandait pas tant !

L'après-midi allant, nous sillonnons les rues et les commerces de Taebaek. C'est une ville résolument plus touristique et plus vivante que Yeongwol. On nous aborde pour la deuxième fois en anglais ! Cette fois il s'agit de deux jeunes femmes dont une américaine. Ca fait du bien de parler en anglais d'autre chose que d'une église à rejoindre. Mais un panonceau noir sur leur gilet annonce leur intention. Une église à rejoindre ! Bon. C'est quand même insolite de s’interpeller dans la rue sur le simple critère du "physique" occidental !

A gauche, un magasin d'horloges en tout genre, qu'on trouve invariablement, en deux ou trois exemplaires, dans les villes modestes...
La rue des night clubs (où se trouve aussi notre motel...)
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Notre première journée à Taebaek se déroule sous la pluie. Nous sommes limités à quelques excursions dans la ville, à la dégustation de mets locaux, des pauses dans des cafés ou des courses au supermarché, notamment pour ramener quelques produits en France. En bref, nous attendons un temps plus clément.

Le lendemain, notre vœu est exaucé. Le soleil est déjà très lumineux lorsque nous émergeons, bien après que notre réveil sonne. Au programme : une randonnée dans les montagnes de Taebaek, délimitées par un parc provincial.

Les sentiers sont bien balisés, et des plans aux intersections nous donne notre position. Le début de la randonnée est assez raide. Parfois un escalier et des cordages sont aménagés. Une longue ascension permet d'atteindre un premier sommet fait de grosses pierres et de quelques constructions en forme de cheminées rondes. La vue à 360° est magnifique.



La vue nous permet de voir facilement la suite de notre chemin et les deux sommets suivants. Notre chemin reprend dans des broussailles sèches. Parfois, un grand arbre à l'écorce creuse trône, toujours en vie. Le lieu est paisible ici, mais des assourdissants avions de chasse sillonnent toute la région. Lorsqu'on lève la tête justement, on en voit un manœuvrer et lâcher quatre leurres à un passage, puis deux à son retour.

Le sentier continue vers des très vieux autels en pierre, dont le plus grand se situe à un sommet. La vue y est encore pus vaste et impressionnante que précédemment. Au retour, un large chemin nous ramène au point de départ. C'est sans doute le chemin principal, qui relie un temple situé en altitude. Il est d'ailleurs en cette saison parsemé de lanternes.

Cette randonnée de cinq heures nous donne un grand bol d'air frais. Le lieu est parfaitement préservé et très facilement accessible pour les étrangers. Dans le bus du retour, les écoliers et écolières en uniforme entrent et sortent à divers endroits de la ville qui s'étire le long de la rivière. Il fait encore chaud. Demain nous quittons cette ville, toujours en direction de l'est.

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Nous rejoignons par le train la dernière étape de notre périple : la ville de Donghae, située sur la côte est. L'appel de la mer nous y attire. En arrivant, comme toujours, nous nous préoccupons de savoir où passer la nuit. Sur une carte touristique, des hôtels sont indiqués au centre ville, qui pour une fois n'est pas proche de la gare. Nous prenons un taxi à qui nous faisons comprendre avec la carte où nous souhaitons aller. On se promène dans les rues et élisons un hôtel à partir de photos affichées dehors (comme pour les restaurants, tiens). Les néons rouges et bleus ne nous surprennent plus, et il faut même dire que c'est les chambres les moins chères de notre séjour (40000 won, soient 30 euros environ).

Cela étant fait, nous cherchons maintenant un restaurant. Les poissons et fruits de mer sont logiquement à l'honneur, et nous arrêtons dans un espèce de restaurant japonais - coréen fusion. Les plats en plastique de l'extérieur nous garantissent au moins l'aspect de la nourriture servie, ce qui est une facilité non négligeable ici !

Bien sûr, nous cherchons rapidement à voir la mer, et même repérer un emplacement duquel nous chercherons à voir le lever du soleil le lendemain. Une petite plage est à deux pas. A notre surprise, une grande famille occidentale occupe un bout de la plage. Il sont seuls d'ailleurs. Et des petits garçons courent nus dans les vagues. Leur nudité ne leur empêche pas de s'approcher de nous et tenter de nouer contact, comme le font souvent les enfants avec les étrangers ! On tente de deviner leur langue malgré les vagues, et nous nous trompons en les croyants néérlandais. Ils sont en fait finlandais ! La famille est ici pour une durée d'un an suite à une mutation du père.

L'après-midi est marquée par la rencontre avec un habitant local que nous avons contacté sur Couchsurfing. Même si le réseau de voyageurs a pour but connu de s'héberger mutuellement, c'est aussi un excellent moyen de simplement rencontrer des personnes et discuter.

A la sortie du e-mart, un grand supermarché, Kim nous rejoint donc et nous passons toute la soirée ensemble. Il nous amène a un café et nous aide à commander. Kim est coréen mais vit à l'étranger depuis longtemps maintenant. Après la Malaisie et l'Inde, il habite maintenant en République Tchèque. Il a du revenir pour son service militaire obligatoire de 21 mois, qu'il a dû convertir pour cause de maladie en service civique. En tout est pour tout il gagne 120$ par mois, et donc il est contraint de rester chez ses parents. Cette dépendance soudaine, qui plus est dans une ville modeste qu'est Donghae, n'est pas tout à fait de son goût. Son temps libre lui permet de lire et de sortir mais concrètement il perd beaucoup de son indépendance. Il est encore étudiant, en ingéniérie mécanique qu'il a suivi pour satisfaire ses parents, mais a pour but prochain de se reconvertir dans l'enseignement. Il donne d'ailleurs des cours d'anglais en République Tchèque.

En discutant on comprend bien qu'il ne reviendra pas vivre en Corée, dans un système qui ne valorise que l'excellence. Alors que nous échangeons sur nos parcours respectifs, la serveuse nous offre des petits pains. Il la connaît bien, ce qui nous vaut cette petite faveur.

Il nous emmène ensuite dans un restaurant de poisson frais, où nous dégustons un grand plat de morceaux de poisson cru, ainsi qu'un poisson frit (très difficile à manger avec les baguette) ainsi qu'une soupe avec les morceaux de poissons qu'on ne mange pas et une multitude de petits plats satellites, cela va de soit. Comme sur toutes les tables coréennes ou presque, un petit bouton permet d'appeler la serveuse, ce qui est très pratique ! Tout cela est délicieux, et c'est bien grâce à Kim qu'on peut manger un truc pareil, car sans images et sans plats en plastique en vitrine, ce genre d'expérience n'est pas facilement accessible. (par ailleurs, nous n'avons pas d'autre guide qu'un guide de survie en langue coréenne)

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Pour notre dernière journée de voyage, nous nous offrons le spectacle grandiose du lever de soleil sur la mer de l'est. Si on croyait être les premiers à avoir l'idée, c'est sans compter sur le logo de la ville est déjà un soleil qui se lève, et que le nom de la ville veut aussi dire soleil qui se lève (ou un truc comme ça...).

Nos repérages de la veille ont fonctionné. A 4h45 du matin (et oui...) la petite plage est calme, et libre de tous finlandais tous nus qui courent dans les vagues (lire l'article précédent sinon ça ne veut vraiment rien dire), à nous le sable fin de toute la plage. Mais c'était ignorer une porte fermée sur le pont de bois qui passe le ruisseau permettant d'y accéder. Le ruisseau étant ridiculement maigre, nous le traversons à pied sans peine.

Le ciel est déjà bien lumineux. Un rose pâle imbibe les traînées de nuages sur nos têtes. Une myriade de bateaux de pêche en tout gens ratissent l'horizon. Trois gros cargos, déjà amarrés ici la veille, semble imperturbables au spectacle. Il fait très doux, c'est très agréable. A cause d'une brume à mi-hauteur sur l'horizon, nous craignons de ne pas voir le soleil se lever. Mais nos craintes s'estompent lorsque naît, sur la surface de l'eau, timide, l'astre intense qui éclaire les terres d'ici avant les nôtres.

Il ne faut guère attendre que quelques minutes pour que le soleil, comme habitué à la manœuvre, adopte sa rondeur parfaite et s'élance dans une course d'un jour dans le ciel tout entier.

Soudain, interrompant notre rêverie, des voix s'exclament loin derrière nous. Est-ce pour nous ? Nous nous retournons et voyons quatre jeunes militaires nous interpeller. On a beau rien comprendre, on a très bien compris ! Fissa on ramène nos fesses au bord, sans avoir besoin de leur adresser la parole. Le temps de retraverser le ruisseau, on aperçoit quatre autres militaires, venant de l'autre côté de la plage, traverser la plage à la manière d'une fouille pour contrôler que tout va bien, pour finalement déverrouiller la porte en bois.

Après tout, nous sommes proche de l'autre Corée, qui de temps en temps envoie des missiles dont certains sont tombés non loin d'ici, et ces plages ont été il y a dix ans un lieu de débarquement. Donghae est par ailleurs un port de commerce important.

Nous retournons au motel pour trois heures de sommeil qu'on compte bien rattraper. Nous avons un train en fin de matinée, qui en une fois va nous ramener à Séoul.

Dans le hall de la gare, une nuée de lycéennes nous encercle peu à peu. Elles occuperont deux wagons entiers. Il faut dire que nous avons choisi pour ce grand retour la première classe. Elle nous déçoit cependant. Elle diffère très peu de la seconde classe (pas beaucoup de différence de prix aussi cela dit), avec des sièges certes plus large. Nous retraversons les dizaines de tunnels et les montagnes à l'infini, toujours belles, à une vitesse plaisante. Nous retraversons ces villes qui nous semblent maintenant un peu familières. La nostalgie nous gagne, mais n'est-ce pas l'objet même de prendre un train ?

Pour notre dernière soirée en Corée, à Séoul, nous profitons une dernière fois de nos amis. Sans le dire nous savons qu'on ne se reverra pas de sitôt. Quoi de mieux pour accompagner ces moments que des mochis, une tarte au bleuets et un cidre aromatisé Loïc Raison ? Le bus qui relie ce quartier de Séoul à l'aéroport est d'un grand luxe (à un prix raisonnable). Dans les grands fauteuils en cuir de ce "bus-limousine" nous nous endormons, peu pressés de nous engouffrer dans un tunnel spatio-temporel de plus de dix heures. L'aéroport de Séoul est élu le meilleur au monde. C'est déjà ça.