boab, abres sacrés du Kimberley Comment trouver les mots pour décrire cette semaine incroyable que nous venons de passer.
En quelques jours nous en avons surement plus appris que les Australiens sur l’histoire de leur pays et la situation des aborigènes depuis la colonisation.
Très peu de personnes ont la chance de rentrer dans les communautés aborigènes et surtout d’y être si bien accueillit.
Anne et Ian était nos hôtes, ils nous ont ouvert les portes de leur maison qui appartenait à la mère d’Anna au beau milieu du bush (à 200 km de Broome) dans une communauté de trois maisons.
Nous avons campés dans leur jardin, on pouvait se faire un feu le soir pour éloigner les moustiques (ils nous ont donné un bois spécial pour les repousser). Cela ne les a tout de même pas empêché de nous dévorer… Nous avions aussi toilettes et douches où de jolies reinettes résidaient ^^
Anne Poelina : d’origine de Timor (archipel indonésien), descendante d’aborigènes et de colons anglais, elle fait partie des métisses de l’après colonisation. Elle a eu une éducation dans un milieu on l’imagine assez aisé. Cela lui a permis de faire des études, elle est docteur en Philosophie, un master d’éducation, santé public et médecine tropicale, arts indigènes politique et social. Un sacré bagage ! Mais il était nécessaire pour elle de se tenir informer et d’avoir les connaissances nécessaires pour affronter le gouvernement australien.
Elle est très engagée et haut placée. Elle travaille avec l’UNESCO mais aussi avec une multitude d’organisations luttant pour la préservation des cultures et de l’environnement. Elle participe à de nombreuses réunions internationales, elle est allée avec son mari de nombreuses fois en France. C’est une femme à multiples facettes, elle a plein de projet et ses 60 ans ne l’empêchent pas de vouloir changer l’avenir.
Ian : Ancien prof d’éducation physique, c’est l’homme le plus cultivé que j’ai rencontré. Il lutte aux côtés d’Anna pour la reconnaissance des droits aborigènes et pour que leurs terres leur soient rendus. Il a lui aussi de nombreux diplômes dans les mêmes domaines qu’Anne. Il était à la fois notre guide, notre historien et notre chef de travaux. Il nous cuisinait tous les matins un excellent porridge.
Genny : Cette femme terriblement forte de plus de 80 ans a grandi au cœur de la colonisation. Elle fut esclave chez une famille anglaise (Mister and Misses Rose). Nous sommes allés avec elle dans la maison où elle a travaillé dès l’âge de 10 ans. Elle était servante et se souvenait exactement de chaque geste qu’elle effectuait à répétition chaque jour jusqu’à l’abolition de l’esclavage en 1967 où elle devait avoir environ 30/40 ans. C’est une des rencontres des plus touchantes de ma vie. Elle aimé nous raconter son histoire avec ses propres mots et ses propres souvenirs.
Aujourd’hui se sont des américains qui louent cette maison entouré de 600 000 hectares qui vaut environ 30 milliards de dollars et où gambadent 20 000 bovins. (les chiffres aident à se rendre compte de l’immensité des lieux). La surface étant tellement importante qu’ils regroupent les bovins par hélicoptère.
Le billabong : endroit sacré aujourd’hui, où vivaient les grands-parents d’Anne. Au bord de la rivière, c’est un endroit en surplomb qui est sec durant l’hiver (saison sèche). Nous avons dut un par un nous présenter à la rivière en jetant un morceau de terre que nous avons d’abord passé sous une de nos aisselles pour faire part avec notre corps. Puis nous avons eu la chance de voir les ruines de la maison familiale. Ils aimeraient faire de cet endroit un « géo park ». Anne nous a aussi montré l’endroit en haut du billabong où les aborigènes allumaient un feu comme signal lorsqu’ils voyaient les policiers arriver pour les capturer.
Le gouvernement veut créer une station d’extraction de gaz de schiste au bord de cette rivière, ce qui évidemment détruirait l’écosystème et polluerai l’eau. Anne mène un combat sans fin contre cela, j’espère de tout cœur qu’elle réussira à défendre ses terres.
L’histoire de l’Australie :
Très loin de ce que peuvent raconter les musées et les livres touristiques. Anne et Ian nous ont donné la réelle version de l’histoire de l’Australie, celle-ci est différente de celle apprise à l’école…
Les italiens ont été les premiers à venir explorer l’Australie et l’ont baptisé « le pays de la paix » comme vous pouvez voir sur cette carte avec la représentation de l’éléphant, animal sacré.
Les afghans ont aussi fait un passage et ont apporté les dromadaires qui se mélangent aux bovins dans le bush et le désert. Ils sont aujourd’hui utilisés pour les touristes, des balades sont proposées sur la plage de Broome au coucher du soleil.
Les chinois sont aussi venus s’installer en Australie comme de nombreuses autres nationalités asiatiques. Même les français sont venus explorer le pays mais sont repartis (et ça Ian l’a bien souligné et c’est pour ça je pense qu’ils aiment bien les français).
Puis les anglais sont arrivés après avoir perdu l’Amérique. Ils ont littéralement massacrés 60% des aborigènes. Les ont chassés, emprisonnés, mis en esclavage et ils ont violés les femmes afin de « blanchir la race » comme ils disaient. Il faut savoir que les aborigènes est l’un des plus anciens peuples au monde. C'est un peuple qui vit essentiellement de deux choses: la terre et l'eau. Ils ont un respect profond pour la nature et vivent en fonction de ses lois sans essayer de la modifier. Ils ont été arrachés de leurs terres sans comprendre pourquoi, il n’y avait d’ailleurs pas de raison…
En 1950 ce fut l’abolition des camps pénitenciers dans la Nouvelle Galles du Sud et ce n’est qu’en 1953 que les aborigènes du territoire du nord pouvaient accéder à leurs droits de citoyenneté. Jusqu’ici ils étaient enregistrés sur les mêmes listes que les animaux. En 1967 ils ont obtenus le droit de vote.
Ce n'est qu'en 2008 que l'Australie reconnu officiellement les faits passés, le massacre des aborigènes et le vol de leurs terres. Reconnu surtout pour leur image dans le monde. Genny a reçu 2000$ de dédommagement par le gouvernement, une somme ridicule pour une vie gâchée…
Notre mission
Le premier jour nous avons plantés des arbres en cercle, ce qui représente le cercle de l’amour. Les aborigènes n’aiment pas tout ce qui est symétrique et droit.
Puis nous avons attaqué la peinture des toilettes et douches dans une sorte de préfabriqués. Nous avons redonné vie à ces lieux avec des couleurs et des formes qui pètent ! J’ai beaucoup pris goût à la peinture d’ailleurs, nouvelle révélation !
Projet : conférence, écotourisme, mettre en place un système d’éducation à l’environnement, à l’utilisation des plantes médicinales, en apprendre plus sur les animaux, leur mode de vie, le recyclage…
Bref je suis totalement dans mon thème 😀
Madjulla Community : ils ont construits plusieurs petite maison avec des matériaux de récupération qui seront les futurs logements de leurs touristes, de leurs invités mais aussi des professionnels qui viendront participer à des conférences
Comme en famille, journée pique-nique en compagnie des crocodiles Je remercie bien fort ces personnes formidables qui nous ont fait passer une semaine inoubliable. C'était un enrichissement humain et un échange culturel hors norme.
Moments hors du temps