Il y a 3 ans, nous partions tous les quatre, Pascal, Clara, Thomas et MOAAA...3 semaines dans l'Est des États-Unis et au Canada. Boston, CAP CODE, Portland ont été trois étapes très inspirantes.
Août 2014
3 semaines
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Ce carnet est un voyage dans le voyage.....

Écrire à Megève sous les parasols rouges.

Au mois d'Août 2014, nous avons arpenté l'Est des États-Unis et le Canada en famille : la Nouvelle-Angleterre, le Maine, Québec.

En Juillet 2017, j'ai fait à Megève un atelier d'écriture et j'ai eu envie de revenir sur ce voyage pour écrire....

Que reste-t il du voyage 3 ans après ? J'avais rassemblé mes photos et mes souvenirs, quelques textes écrits au hasard des rencontres ...je ne savais pas exactement sur quoi j'allais écrire mais Je savais que Marie saurait nous guider. Marie, c'est elle qui animait notre atelier, elle est à la fois notre maître et notre amie...

Ce carnet est un double voyage. Une immersion dans l'écriture et un retour sur une aventure fabuleuse. Nous avons parcouru la côte Est et le CANADA, Boston, Newport, CAP CODE, PORTLAND, Québec, Baie Saint Paul, Montréal.... Au hasard des ateliers et des jeux d'écriture, CAP CODE, BOSTON et PORTLAND ont fait émerger mes souvenirs. Voyage au bord de l'introspection ......

Comment on passe de Megève à Boston  ? Réponse = Énergie créative !
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BOSTON : la sky line 

«Au nord Est des États-Unis, s'étend une région de forêts, de collines, de montagnes, de lacs, de plages sauvages... ». En prononçant ces mots pour débuter son émission sur les auteurs américains, François Busnel ne se doutait pas qu'il venait d'allumer l'étincelle. La Nouvelle Angleterre jusqu'alors était restée pour moi un patchwork de souvenirs un peu flous, mémoires de lectures, photos de magazines, tableaux de Hopper, landes blondes surplombées de phares qu'il faudrait un jour visiter.

A l'université, j'avais rêvé d'Harward, de son campus verdoyant, de ses écoles en briques rouges. J'avais lu les auteurs, Edith Wharton, Richard Ford, Philippe Roth, Douglas Kennedy, john Irwing, Edgar Poe. J'aime les romans américains, les histoires simples, la facilité avec laquelle on rentre dans la vie des personnages, les parties de pêche, les barbecues et les hot-dogs. Et puis, la Nouvelle Angleterre, c'est bien là que l'histoire de l'Amérique a commencé : Boston, Plymouth et les sorcières de Salem.

Ce soir-là, je les ai écoutés tous ces auteurs. Il y avait Philippe Roth et Douglas KENNEDY comme toujours. Je les ai regardés. On les interviewait sur fond de paysages paisibles, de maisons à bardeaux. Et au moment où j'enfournais l'interminable préparation de mes lasagnes saumon courgettes, j'ai su que j'étais prête. J'ai eu envie d'un grand road trip, d'un vrai rendez vous avec l'histoire, la littérature et les grands espaces.

CHATTAM, Maison de vacances et immense plage de sable de CAP CODE aux premières heures du jour.
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ENTRE PARIS 

L'avion commence à atterrir. Les hublots et les sièges se relèvent. J'émerge du cocon dans lequel le temps s'est arrêté pendant six heures. Bercée par le ronronnement du moteur, je me suis engloutie dans l'obscurité de la cabine. Je suis suspendue entre deux vies et mes souvenirs se mélangent aux promesses de la Nouvelle Angleterre. Dans cet avion qui nous emporte dans une autre vie, je sens que l'histoire est à inventer. J'aperçois Boston dans la lumière qui filtre à travers les nuages. Boston, ma première étape.

ET BOSTON : la skyline vue depuis l'USS et l'Old State House, le bâtiment de Boston le plus ancien. 
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Premier matin à Boston, premier american breakfast ; la terrasse du Thorston café est un appel au voyage. Notre premier contact avec l'Amérique. Prendre un petit déjeuner américain, c'est partir loin. Il faut patienter sur le trottoir pendant qu'une table se libère ; mais en attendant, on aime observer le défilé des serveurs, leurs bras chargés de pancakes, de gaufres, d'assiettes débordant d'omelettes, saucisses, œufs brouillés, haricots rouges, patates frites, de salades de fruits géantes.

Hamburgers....boeuf ou homard...XXXXXL

Lorsque notre tour arrive de rejoindre une table, l'enthousiasme est palpable. On hésite, on cherche l'inspiration sur la table des voisins, on essaie de rester raisonnables. Autour de nous, c'est toute l'Amérique : bras tatoués, chapeaux de cow-boy, bandanas...On pourrait rester là simplement à observer.


Mais au Thorston café, il faut lever la tête de son assiette, remonter vers le ciel pour suivre la silhouette longiligne des gratte-ciels. Il faut savoir se remplir de l'espace. Car ici tout est démesuré. A force de regarder autour de soi, on finirait presque par l'oublier.



Au Thorston café, chaque matin, on fera une provision d'Amérique. La journée pourra bien commencer.

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FUN L'AMERIQUE 
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Partir en voyage, c'est emporter avec moi les souvenirs d'autres voyages. Lorsque je pars en voyage, mes souvenirs de rencontres, de lieux, de halls d’hôtel, de salles d'aéroport m'accompagnent. Autant d'images qui se superposent et donnent une dimension supplémentaire au voyage.

CHERCHEZ CHARLY  😀😀😀😀😀 DANS LA MOSAIQUE DE MES RENCONTRES

Lorsque je pars en voyage, j'ai besoin de me souvenir. Mon truc à moi, ce sont les images du passé ; je ne les transporte ni dans une trousse, ni dans un sac. Rien ne pourrait les contenir. Elles surgissent à l'improviste. Je ne les convoque pas, elles s'invitent, elles s'imposent.

Le voyage est un pointillé. Mes souvenirs forment des ponts entre ces pointillés. Je les emprunte comme on avance dans la vie. Un peu par hasard mais souvent avec ravissement. Ils font partie du voyage. Avec eux, mon présent se mélange au passé. Bientôt, ils ne feront plus qu'un.

A VISAGES DÉCOUVERTS....QUAND LES SOUVENIRS  DE VOYAGES  SE CONFONDENT 😀😀😀
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Ce matin, je me suis levée tôt. j'ai longé la ville endormie, je m'en suis éloignée sur les chemins ensablés. J'ai marché dans les futaies de chênes verts puis au milieu des pins maritimes. J'ai pris le temps d'enfoncer mes pas dans les sentiers.

Aux alentours de Chattam 

Je voulais rejoindre la plage et grimper jusqu'au promontoire. Depuis plusieurs jours, le phare m'appelle. En sortant de la forêt, le sentier longeait les marécages et je l'ai suivi. Je me suis remplie du silence des étangs. Même les canards semblaient s'être endormis. Alors j'ai avancé encore, longtemps. Au bout du chemin qui serpentait entre les roseaux, je savais qu'il y avait l'océan. Il suffisait de se laisser guider par le fracas du ressac, de simplement poser un pied devant l'autre, sans réfléchir.

Au milieu des herbes folles, le chemin montait vers la droite. Je l'ai emprunté .....quand soudain, dominant la crique endormie, il a surgit :

Le phare

Sentinelle dressée

Hopper s'est-il caché ?



Au loin, la plage était immobile. A perte de vue, la lande s’est éclairée. Les premiers rayons du soleil ont réchauffé le sable encore humide. Bientôt, les premiers touristes allaient arriver. En attendant, le peintre n'était pas loin.....

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Merci à Denis et à ses crayons magiques.
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Le hasard a voulu que je sois à Chattam le jour où j'ai terminé 'l'arrière saison' commencée à Paris pour me préparer au voyage. Pendant mon séjour à Chattam, je n'ai pu m'empêcher de rechercher ce bar nommé 'Le Phillies' et ne l'ai pas trouvé. Pour en avoir le cœur net, j'ai fini par regarder sur internet....'Le Phillies' n'existait que dans l'imagination de Philippe Besson.

Quand l'écrivain rejoint le peintre....Le tableau de Hopper était à Chicago et moi j'étais à Chattam à la recherche de Louise COOPER et de BEN et il me semble bien que je les ai croisés !

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Promenade dans Chattam encore endormi . 
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Provincetown ; ce que nous avons vu.

Sur le bateau qui nous emmène observer les baleines, je somnole.

Une heure déjà que nous avons quitté la jetée et pas un seul cétacé. Alors, je me laisse bercer par le balancement de la houle sous le soleil de plomb. Pour un peu, je m'endormirais.

Sur ce bateau, il fait trop chaud et l'air est saturé par l'odeur des crèmes solaires, noix de coco, monoi, huiles parfumées. Le bateau longe la côte et on entend par moments le bruit provenant de la plage. Pourtant le calme est revenu. Au début, les enfants se sont impatientés et puis finalement tout le monde semble avoir renoncé. Maintenant, on n'entend plus que le ronronnement du moteur. C'est comme si le temps s'était figé.

Lorsque je ferme les yeux, je flotte dans un halo bleu mordoré. Je me sens bien. Dans la lumière vive de l'après midi, le bleu de l'océan et le doré du soleil continuent de s’infiltrer à travers mes paupières. Leurs taches multicolores s'échappent au dessus du bateau et virevoltent juste avant de plonger dans l'Océan. Elles entament une danse folle autour de moi. Elles ondulent et se confondent aux arabesques des baleines. Les baleines, je les sens tout autour de nous. Je sais qu'elles sont là. J'imagine leur tourbillon pataud dans la profondeur des eaux. Nous leur avions donné rendez-vous aujourd'hui mais elles ne viendront pas. Ce jour là, on ne les rencontrera pas les baleines. La bonne blague !

Et voilà ce que nous avions imaginé ! 
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Chatham

Housekeepers

Misère  et opulence : en voyant cette photo posée en vitrine dans une boutique de Chattam, j'ai pensé aux photos de Walker EVANS.

Dès que les lueurs du jour ont traversé les persiennes, je les ai entendues….Je pouvais suivre leurs allers et venues dans la chambre d'à côté. Quelques sons étouffés traversaient les parois du motel. De l'espagnol, elles étaient déjà arrivées…

C'est notre quatrième nuit à Cap Code et je les ai remarquées dès le premier jour. Souriantes, gracieuses, légères. Comme si les brassées de draps qu'elles transportent à longueur de journée n'avaient aucune prise sur leur joie. Ces filles-là SONT la joie.

Ce matin, je ne trouve pas de café au motel et c'est comme si toute la misère du monde venait de se poser sur mes épaules. Autour de moi, je les vois : elles s'activent, elles débordent d'énergie. Elles n'ont pas arrêté depuis des heures. Pantalon blanc, chemisier assorti, cheveux tressés sous un bandeau. Impeccables. Elles ont apporté une petite radio ; elles fredonnent en travaillant.


Je les observe, elles me fascinent. Hier, je les ai entendues expliquer à mon voisin qu'elles sont arrivées d’Haïti il y a trois ans. Depuis, j'ai tout reconstitué. Le tremblement de terre, une vie en ruine, la mort des proches peut-être, la faim, un départ vers une autre vie, le bateau, la côte américaine…...housekeeper à Cap Code.

- Do you want some coffee ? Elle brandit devant moi quatre sachets de café en poudre en souriant. Elle me les tend avec sérieux. comme si, à ce moment précis, satisfaire le plaisir des clients européens était devenu ce qu'il y a de plus important au monde.

En la regardant s'éloigner en virevoltant, j'en ai la certitude ; le monde peut bien chavirer, housekeeper ou non, quand on a vingt ans, la vie c'est maintenant !


Garde tes songes, les sages n'en n'ont pas d'aussi beaux que les fous (Baudelaire )
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Casco Bay

Casco Bay

Voyager c'est aussi partir à la recherche de ses héros, ceux qui nous ont fait voyager bien avant le voyage, un soir d'hiver. ..

Casco Bay de William G Tapply


Sept ans après le mystérieux accident qui a effacé sa mémoire, Stoney Calhoun a repris sa paisible existence de guide de pêche, partagée entre la boutique de la belle Kate Balaban et sa cabane isolée dans les bois du Maine. Jusqu'au jour où, sur une île inhabitée de Casco Bay, il découvre un cadavre entièrement carbonisé. Peu de temps après, le client qui l'accompagnait est assassiné. Malgré ses réticences, Calhoun est entraîné dans l'enquête du shérif Dickman et ses vieux réflexes reviennent. Casco Bay, la deuxième aventure de Stoney Calhoun, nous emmène une nouvelle fois dans les paysages marins du Maine qui laissent peu à peu resurgir les fantômes d'un passé menaçant.

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Le Maine sous les trombes d'eau.... 
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S'il n'avait pas plu aussi fort aujourd'hui, sur son île, j'aurais pu le retrouver. S'il n'avait pas plu aussi fort aujourd'hui, sur cette île, j'aurais pu nous retrouver. S'il n'avait pas plu aussi fort, j'aurais embarqué sur un voilier, j'aurais suivi la côte, je me serais ensuite éloignée dans Casco Bay. J'aurais pu louvoyer entre les îles Calendar. Les îles Calendar, trois cent soixante cinq îlots minuscules parsemés au milieu de la baie de Portland.

S'il n'avait pas plus aussi fort aujourd'hui, je serais partie à la recherche de Stoney Calhoun. Stoney Calhoun, c'est toi qui me l'as fait rencontrer dans ce livre de William Tapply. Ce livre, je l'ai aimé autant que toi. A lui seul, il aurait pu justifier le voyage.

Mais aujourd'hui, il pleut des cordes sur Portland et sur le Maine. Il pleut si fort que les îles Calendar restent invisibles. Lorsque l'on avance jusqu'à la pointe du phare, on ne voit ni les îles, ni Portland. Impossible de partir à la recherche de Stoney Calhoun ! J'avais prévu de t'envoyer des photos de son île, de sa cabane coupée du monde, de sa petite boutique de pêche. Ces photos, je te les avais promises…mais aujourd'hui la baie a disparu sous les trombes d'eau. On ne peut pas toujours tout prévoir, d'ailleurs c'est toi qui me l'a appris.

Si j'avais eu le temps de rester plus longtemps, j'aurais attendu qu'il cesse de pleuvoir. Si j'avais eu le temps de rester plus longtemps, j'aurais pu marcher sous la pluie en attendant. Sur les sentiers côtiers, dans les dunes, dans le vent et le bruit des bateaux, je l'aurais peut-être retrouvé, Stoney Calhoun.

Si j'avais eu le temps de rester plus longtemps….mais ma route ce jour-là devait me conduire vers le Canada. Le lendemain, il faisait beau et j'ai imaginé les iles émergeant du chaos.


Si j'avais eu le temps de rester plus longtemps….Car le voyage, c'est aussi cela : prendre le temps.


Jackson : sur la route du Canada.... j'adore le dessin.
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MAISONS A BARDEAUX 

Le voyage s'achève et pendant une semaine les maisons à bardeaux de Chattam se sont fondues au milieu des chalets en bois de Megève. Hallucinations ? Rêve d'ubiquité ? Exaltation ? L'écriture nous emporte et nous envoute....Et puisque tous les voyages n'en font qu'un, je ne résiste pas, je ferme cette page avec nos haïkus de Megève...

LE RÊVE AMERICAIN 
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 MEGEVE 
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Merci à Marie, Josette, Martine et Patricia . Avec vous, j'ai aimé écrire, rire, marcher ...et j'ai même aimé la page blanche 😀

Merci à Denis, Maïté, Colette, Brigitte , Jean-Michel, et à tous les peintres randonneurs du groupe pour les couleurs dont vous avez saupoudré notre semaine et pour votre écoute enthousiaste et joyeuse.

Merci à Pascal, à Clara et à Thomas. Je partage ce carnet avec vous ; qu'il prolonge notre voyage !

HOTEL TERMINUS