Matinée pluvieuse, je prends le bus 500 à 11h35 pour l’île de Vidoy. La distance pour atteindre l’un des deux seuls lieux habités sur l’île est de 19 kilomètres. Sur Bordoy deux tunnels successifs d’environ trois kilomètres, très étroits, la circulation se fait en alternance. Vidoy est reliée à Bordoy par un gué surélevé de quelques mètres de longueur. La route sur la gauche est délaissée au profit d’un tunnel récent qui permet de rejoindre Vidareidi. Le village est situé sur un plateau entre deux montagnes et est étonnamment étendu. Je m’installe et sors pour une première promenade aux alentours, le ciel est un peu couvert mais pas de pluie, les prévisions pour la suite de la journée sont plutôt bonnes.
L’église est au bout du village près de la rive ouest. Au nord de Bordoy en face le village abandonné de Muli. Du côté est de la baie on voit les îles de Fugloy et Svinoy. Le village où je vais passer la nuit est le plus septentrional des Féroé.
Vers 14 heures alors que le ciel commence à être bien dégagé même si les sommets sont dans les nuages je pars a l’assaut de la montagne pour aller vers les plus hautes falaises d’Europe à Enniberg. Il faut monter dans un premier temps jusqu’à 750 mètres d’altitude. Le début est assez tranquille et doux. Le vent est assez fort, des tubes rigides de plastique bleu balisent le sentier. C’est assez simple il faut grimper droit devant. D’abord d’herbe le chemin devient de pierre. C’est à partir d’environ 300 mètres que le dénivelé devient marqué, c’est sportif, les rafales déséquilibrent et la pente est raide. Derrière jolie vue sur le sud de l’île et une partie de Bordoy. Plus je monte plus les nuages s’approchent.
Je marche avec mes gants et à partir du point de bifurcation j’ajoute le bonnet et la doudoune. A ce point quelques instants les nuages se déchirent offrant un panorama vertigineux. C’est fugace, le brouillard nimbe tout en quelques secondes. Le chemin est à présent marqué par des cairns. Sur la gauche a priori les falaises et le précipice mais on ne voit rien. Le sentier est quasiment plat, c’est agréable, cela semble décrire une boucle. Rien à faire la visibilité est réduite il est appréciable que les cairns soient proches pour éviter de s’égarer. J’atteins le bout du chemin. Je vais patienter presque trente minutes a l’affût d’une éclaircie.
Et puis soudain une première trouée évanescente mais prometteuse. Encore quelques minutes, le brouillard va se disloquer, les nuages encore nombreux défilent à vive allure. Puis ce sont les éclaircies avec l’azur qui revient. Vue absolument splendide et imprenable. C’est magnifique et grandiose. En quelques instants le paysage change totalement, je distingue ce que je ne pouvais imaginer. C’est somptueux et vertigineux. Les couleurs sont admirables avec un vert intense de l’herbe. Autour de moi quelques oiseaux s’agitent dans le ciel. Je suis isolé avec de la musique dans les oreilles.
Vers 22h30 sortie nocturne (il fait plein jour le soleil descend à l’horizon et vient de passer derrière la montagne). Je vais vers l’église et la rive ouest. Le vent souffle en tempête, fortes bourrasques déstabilisantes. La lumière est belle, sur l’océan entre les deux îles des tourbillons d’eau sont soulevés par les rafales puissantes.