Le lendemain, nous avons rendez-vous à 9 heures avec Victor, notre guide qui est archéologue. Il nous emmène à la Huaca de la luna et à la Huaca del Sol. Nous avons de la chance : Il a été l'un de ceux qui ont participé aux campagnes de fouilles sur ces sites. Cela donne de la profondeur à la visite.
On retrouve des pyramides en adobes. Le site a été choisi par les Mochicas ou les Moches parce qu'il est proche du Mont Blanc cette montagne au sommet dans les nuages sur la photo en haut à gauche et qui est pour eux un lieu sacré.
Nous passons devant la zone des sacrifices. Les personnes sacrifiées étaient placées dans la pièce de la photo du bas à gauche, pour un temps de purification. Elles y étaient droguées avant d'être sacrifiées sur l'éperon rocheux à l'intérieur de la zone sacrée, symbolisant la présence de la montagne à l'intérieur du temple.
Le nom de Huaca de la Luna est celui donné par les espagnols à cette pyramide qui ne fut en fait jamais dédiée à la lune. Il s'agit d'un lieu sacerdotal dédié au Dieu de la montagne : Ai Apaiec : le Dieu à crocs de félins que l'on voit sur les fresques et dont la chevelure rappelle le poulpe marin. D'autres animaux aquatiques comme des poissons chats (photo du haut à droite) sont représentés sur les fresques. La Huaca de la Luna est une pyramide à 6 terrasses superposées, avec des salles reliées entre elles, des cours intérieures et des frises polychromes.
Les constructions en adobes demandaient une main d'oeuvre considérable. Chaque famille devait produire un certain nombre de briques et devait y apposer sa marque. C'est ainsi que la production pouvait être contrôlées par les fonctionnaires.
Ce travail forcé a dû conduire à des mouvements de protestation, comme tend à le prouver ce graffiti d'un pélican pêchant un poisson. Ce dernier a été fait par un ouvrier du site juste avant de poser l'adobe devant lors d'un réembellissement. C'est de cette manière que le dessin est parvenu jusqu'à nous. Les mochicas ne détruisaient pas les anciennes décorations qui disparaissaient sous les nouvelles constructions.
Ai-Apaiec est présent partout dans la décoration de la Huaca de la Luna.
La Huaca del sol : le quartier administratif est en cours de fouille et n'est doc pas ouvert au public.
Entre les deux, s'étale le quartier des artisans dont nous voyons les fondations.
Le site a évolué au cours des siècles : la pyramide de la lune date des années 100 à 600, alors qu'un nouveau temple a été bâti sur ce site entre 600 et 800, en même temps que la pyramide du soleil. Ces constructions ont peut être été réalisées en parallèle de mouvements sociaux marqués par un déclassement de la classe sacerdotale et de leurs sacrifices humains qui étaient réalisés depuis l'autel central que l'on a retrouvé au sein de la Huaca de la Luna. Ce dernier était le lieu central du culte, visible depuis la place processionnelle.
Le sang des sacrifiés était présenté au prêtre. Celui-ci constituait une offrande aux Dieux et était projeté sur la fresque de la photo du haut à droite. On a en effet trouvé des traces d'ADN humain sur cette dernière qui provient du sang des sacrifiés.
L'autel a connu lui aussi des évolutions dans le temps, retracées sur le panneau en haut.
Les personnes sacrifiées étaient des Mochicas qui s'affrontaient dans un combat rituel, dont le seul but était de déterminer un perdant à sacrifier. Le combat n'aboutissait donc pas à la mort. La perte du casque suffisait en général à désigner le perdant. Le vainqueur attachait les armes du vaincu aux siennes. Ce dernier était ensuite placé dans la salle des sacrifiés pour y être purifié. Ces rites n'ont cependant pas empêché les catastrophes naturelles qu'ils étaient censés prévenir, d'où certainement une lassitude du peuple qui a dû engendrer des changements profonds.
Victor nous mène ensuite devant la façade Nord de la pyramide.
Les frises superposées représentent tout en bas une procession de guerriers avec des vainqueurs qui portent les armes des vaincus, ces derniers étant attachés et nus. Au dessus sont représentés des prêtres se donnant la main comme lors des danses processionnelles. Au dessus sont représentées des araignées à deux têtes, insectes sacrés chez les Mochicas, puis le Dieu Pêcheur. Vient ensuite un animal hybride, mi -reptile, mi-félin. La frise du dessus représente une alternance de guerriers, de lézards, de serpents et du dieu de la montagne avec ses crocs de félins. Enfin, la frise la plus haute représente ce même Dieu tenant dans une main une tête coupée et dans l'autre un Tumi : un couteau de sacrifice à bout arrondi. De ses hanches et de ses épaules sortent des cous terminés par des têtes de condors.
La fresque ci-dessus appelée le mur du mythe contient des éléments essentiels du culte des Mochés.
Après cette visite, notre guide et notre chauffeur nous dépose dans un restaurant plutôt chic de Trujillo pour que nous y déjeunions. La cuisine est bonne mais plutôt copieuse.