Le lendemain, nous décidons d'aller rendre visite aux peuples autochtones. La réserve des hurons wendakes nous tend les bras.
Le temps que la visite guidée commence, nous jetons un coup d'oeil dans la boutique où les souvenirs s'entassent : des masques de cérémonie aux attrapes rêves. L'utilité accordée à ces objets est assez poétique. Les attrapes rêves sont censés retenir dans leurs mailles vos cauchemars de la nuit afin qu'ils soient brûlés par les premiers rayons du soleil levant.
La visite commence par une danse de bienvenue. A notre étonnement, les hurons n'ont pas tellement les traits des amérindiens. Nous aurons l'explication plus tard. La population fut décimée pour ne se réduire qu'à quelques dizaines d'individus. Des 300 hurons restant, 70 furent tués dans un conflit avec les iroquois à la fin du XIXème siècle. Le groupe ne dut sa survie qu'au métissage.
Notre guide nous fait ensuite visiter une grande maison traditionnelle et commence à nous expliquer le mode de vie des amérindiens.
Nous passons ensuite dans une sorte de salle de cérémonie où on nous présente des danses traditionnelles qui sont une forme de mythologie chantée et dansée.
Certaines font intervenir des rites liés à la fertilité représentée notamment par ces épis de maïs.
D'autres ont une dimension quasi totémique. Bien que réalisée avec une peau d'ours, cette dernière raconte cependant l'histoire du serpent géant Karibe Kouba, qui mis fin à une guerre entre les hommes en frappant le sol avec sa queue, creusant ainsi une vallée au sein de laquelle coule depuis une rivière.
Les mélopées entêtantes, voire quasi hypnotiques des chants hurons resteront longtemps dans nos mémoires et en France, plusieurs années plus tard, nous nous souvenons toujours de ces derniers.
Quelques spectateurs sont ensuite invités à venir partager un calumet (de la paix sans aucun doute). Dans ce cas là, je ne reste pas sur ma réserve et accepte volontiers l'invitation, sans même tousser...
Nous déjeunons au restaurant installé au coeur de la réserve où nous goûtons les plats traditionnels : une soupe à base de céréale en entrée, un plat de gibier (du cerf) ensuite, le tout arrosé de bière d'épinette très rafraichissante, sans alcool, au goût légèrement boisé. J'ai depuis tenté de retrouver cette boisson en France, en vain...
En dessert, on nous sert un gâteau au sirop d'érable alors que la table est décorée d'une pleureuse : instrument funèbre qui était utilisé lors des cérémonies pour entrer en contact avec le monde des esprits. Le récipient était rempli d'eau des deux côtés : celui ouvert représentant le monde des vivants et celui fermé le monde des esprits et l'eau l'énergie de la personne décédée. Les indiens balançaient le récipient pour que l'eau circule d'un compartiment à l'autre et que l'énergie du mort puisse se réincarner dans le corps d'une autre personne. Le récipient produisait alors un bruit semblable à des pleurs qui aidaient la famille à extirper sa peine.
Après le repas, nous reprenons les visites avec une autre hutte dans laquelle sont exposés des objets du quotidien : vêtements notamment, dont bon nombre sont confectionnés à partir de peaux tannées. Le centre de la grande maison est occupé par un foyer.
Dehors sont installés séchoir et fumoir à poissons. Ces derniers permettaient de conserver la nourriture plus longtemps. De la même manière, les amérindiens déshydrataient de la viande de bisons dont ils emmenaient des boulettes lors de leurs déplacement. Ils réhydrataient cette dernière avant de la consommer.
Ils utilisaient également des huttes de sudation (sortes de saunas) à des fins hygiéniques, thérapeutiques et cérémonielles. Ils se frottaient avec des herbes qui faisaient office de savon. Lorsqu'un dilemme se posait, les protagonistes entraient dans la hutte de sudation et jeûnaient tout en méditant. La chaleur et la faim apportaient nous dit-on des visions de manière assurée.
Un peu plus loin se trouve un endroit tabou : la hutte où sont conservés les masques de cérémonie. Ces derniers étaient sculptés dans un arbre vivant. Si lors des opérations, l'arbre mourait, l'on considérait qu'il était habité par un esprit néfaste et le masque était détruit.
Nous nous installons ensuite dans deux grandes barques et notre guide nous montre, face à une nature parfois hostile, comment les hurons ont réussi à créer des moyens de transport à partir d'éléments naturels.
Ce peuple pratiquait aussi la pêche à la nasse ou la chasse aux petits et gros mammifères, pour lesquels les techniques de chasse pouvaient être très élaborées, passant notamment par le camouflage et le rabattage du gibier vers une zone enclose où les chasseurs n'avaient plus qu'à décocher quelques flèches.
Les hurons doivent leur nom à leur coiffure : sorte de banane au dessus de la tête qui a inspiré aux premiers français qui les ont rencontré la remarque : "quelle belle hure" en référence au groin des sangliers qui ont, il est vrai, une petite ressemblance avec la coiffure en question.
On le comprend au travers de cette visite, les hurons n'utilisaient pas de tepee, maison plus légère utilisée par les peuples nomades. Ils vivaient dans des huttes.
Ils ne sont pas non plus le seul peuple améridien que l'on peut croiser au Canada, comme en témoigne cette carte des implantations dans le pays.
J'aurais bien ramené un petit souvenir, mais n'étant pas certain de pouvoir passer la douane, mieux valait s'abstenir.