En quittant Koh Samui notre objectif est de rejoindre le plus rapidement possible Krabi, sur la côte Ouest. La région que nous nous apprêtons à traverser n'a rien d’intéressant. A vrai dire nous appréhendons pas mal de retourner dans des régions moins touristiques et plus isolées car nous sommes certains de recroiser des chiens hostiles ! Nous espérons y arriver en 3 jours. C'est assez ambitieux, d'autant plus que nous passons la matinée de la première journée sur le bateau.
Cette après-midi là, nous réalisons une petite cinquantaine de kilomètres avant de nous arrêter dans un village à une quinzaine de kilomètres à l'Est de Surat Thani.
Sur le continent, nous reprenons nos habitudes et nous nous dirigeons vers un temple bouddhiste pour la nuit.
Il faut savoir que les temples bouddhistes sont très souvent de grands espaces avec une multitude de bâtiments: le temple principal avec la salle des prières et ses éventuelles extensions, les habitations des moines, d'autres bâtiments annexes pour les grands événements avec des préaux et de nombreux espaces extérieurs où les habitants viennent faire du basket ou leur gym collective. La plupart du temps lorsque nous arrivons dans l'enceinte d'un temple nous ne voyons personne et nous devons chercher quelqu'un avec une tunique orange, parfois en nous avançant jusqu'aux habitations.
Ici, nous trouvons rapidement un jeune homme mais il n'est pas habillé en moine, nous apprendrons par la suite qu'il est sur le point de le devenir. Génial, il parle un peu anglais ! Il comprend assez vite que nous voulons dormir là. Il nous dit que c'est OK. Cependant, pour être certains que ce soit possible nous essayons de lui faire comprendre que nous voulons voir le chef des moines.
Au bout d'un moment il nous dit : "You want to see Big Bouddha?"
Nous nous regardons un bref instant et réciproquement, nous lisons dans nos yeux notre interrogation: "Big Bouddha? Mais qu'est-ce qu'il nous raconte?" Nous faisons rapidement le lien : Big Bouddha = chef des moines!
"Yes, yes, let's see Big Bouddha!".
Et nous partons nous présenter à Big Bouddha. Tout va bien, nous pouvons dormir ici, le jeune homme nous montre où nous pouvons nous installer.
Nous partons tôt le lendemain et vers 10h il fait déjà chaud, la journée s'annonce difficile. Dans un premier temps, afin de rejoindre Krabi au plus vite, nous privilégions les grands axes, plus directs. Notre stratégie fonctionne, le long des grandes routes nous avançons bien mais sous un soleil de plomb ! Pas la moindre ombre à l'horizon, la végétation est trop éloignée du bas côté pour nous protéger et pour couronner le tout les stations services qui sont devenues nos oasis de fraîcheur se font rares... Nous avons l’impression de pédaler dans un désert, mais dans un désert vert. Pendant cette traversée d'Est en Ouest, nous commençons à rouler le long de très grandes étendues de monocultures, soit de palmiers à huile soit d'hévéas pour le caoutchouc.
Nous roulons encore une bonne trentaine de kilomètres avant qu'une station se pointe enfin à l'horizon. "Station, station!" m'exclamais-je, tel le matelot au sommet du mât. "Zut, elle est de l'autre côté!" Heureusement, nous pouvons faire un U-TURN un petit kilomètre plus loin.
Les pays d'Asie du Sud-Est sont très friands du concept du U-TURN, en particulier la Thaïlande! Lorsque l'on doit traverser un grand axe dont les voies sont séparées par un terre-plein central, on doit prier pour que cela soit possible sinon on doit continuer jusqu'à la prochaine intersection où il est possible de faire un U-Turn, un demi-tour en français, et rebrousser chemin. Cette petite blague peut "coûter" jusqu'à des dizaines de kilomètres supplémentaires si vous êtes malchanceux ou si vous n'avez pas bien préparé votre itinéraire! Sachant cela, nous comprenons mieux pourquoi nous croisons souvent des scooters à contre-sens!
Petite pique au passage, cette tolérance ne s'applique pas quand il n'y a PAS de terre-plein central, quand la route n'est pas large, quand il n'y a pas beaucoup de circulation et qu'il n'y a donc AUCUNE raison de nous faire ch.... de rouler à contre-sens !! Surtout en klaxonnant comme au Vietnam ;) A préciser qu'en Thaïlande la plupart des deux-roues font attention à nous et ralentissent ou s'arrêtent carrément sur le côté pour nous laisser passer, plutôt sympa !
Aujourd'hui, nous ne ferons pas autant de kilomètres que l'on aurait voulu. Après la pause, nous faisons une petite dizaine de kilomètres seulement avant de se mettre en quête d'un endroit pour dormir. Nous débusquons un petit temple où poser nos hamacs.
Le lendemain plus de 100 kilomètres sont au programme pour atteindre Krabi. Nous quittons les grands axes pour des routes plus tranquilles. Fidèles à notre stratégie anti-chaleur, nous partons à l'aube pour rouler au maximum le matin mais la journée s'annonce encore plus chaude que la veille! Nous sommes obligés de stopper à midi dans une ville-rue sans charme. Nous cherchons du regard le 7-eleven, vu ! Nous nous installons devant, impossible de rester à l'intérieur : il fait trop froid !! Nous trouvons tout ce dont nous avons besoin, il y a une très bonne cantine à deux pas et même une prise électrique à l 'extérieur de la supérette ! Nous rechargeons nos batteries et celles de nos appareils par la même occasion.
Nous repartons une fois que la chaleur est un peu plus supportable mais il est déjà tard… Nous donnons tout pour pouvoir atteindre les faubourgs de Krabi avant la nuit et pouvoir profiter de l'éclairage public. Car il est inenvisageable de rouler de nuit dans la campagne, la route n'est pas large et nous craignons les attaques de chiens...
Il est 18h15 et il nous reste encore 10 bornes pour arriver sur le grand axe menant à Krabi et Lise arrive au bout de ses réserves. Nous ne pouvons plus continuer longtemps, nous devons prendre une décision. Soit nous cherchons un endroit pour dormir aux alentours et finissons les 25 bornes jusqu'à Krabi le lendemain, soit nous faisons du stop. Nous ne sommes pas des acharnés du vélo et prenons l'option stop. Le premier pick-up que je hèle s'arrête ! Sauvés ! Une adorable famille nous aide à charger nos vélos et les sacoches dans la benne et nous dépose à 100m de notre hôtel. Nous arrivons en début de soirée lessivés mais soulagés !