La santé à Madagascar pourrait faire l’objet d’un livre entier. Mais nous essayerons de nous contenter d’un article.
Lorsqu’on aborde le thème de la santé, tout est affligeant. Les conditions de vie (qui y sont pour beaucoup), le matériel médical, la formation du personnel qualifié, l’hygiène et le sérieux des établissements et enfin, les frais absolument fous de prise en charge, de soins ou d’hospitalisation.
1. Tout d’abord les conditions de vie : Entre la réalité sanitaire du pays, les coutumes, les croyances et les codes culturels, certaines règles de propreté, qui semblent pourtant être le b.a-ba pour nous, ne sont absolument pas respectées. Sur l'île, seulement un tiers de la population à accès à un point d'eau potable. Les autres, se lavent, font la vaisselle, la lessive, boivent et cuisinent avec de l’eau non potable. Ici, à Ampahantany, tout provient du canal. C’est donc très particulier de boire son thé le matin et de se dire que les gens se sont baigné, nettoyé et plus dans cette même eau…
2. Une pénurie de personnel qualifié : Avec 1 médecin pour 6250 habitants, certains endroits reclus de Madagascar n’ont aucun accès à la médecine. S’ils sont malades, pas de médicaments, s’ils se blessent, pas de quoi nettoyer ni cicatriser… Et lorsque les femmes de la brousse sont enceintes, elles accouchent bien souvent seules avec l’aide des femmes du village.
3. Des frais exorbitants : Peu de malgaches ont les moyens pour se soigner réellement. En effet, ici à l’hôpital, chaque « action » est payante. Le diagnostic par un médecin, puis le prix de la seringue, le produit à mettre dedans, l’injection, le pansement etc… Il arrive parfois, si la personne ou l’enfant a des complications en pleine opération, que la famille ne puisse pas suivre financièrement et alors pas besoin de vous faire un schéma…
Il y a quelques temps, une femme d’Ampahantany a eu besoin d’une césarienne et elle a donc du se rendre à l’hôpital de Tamatave. Lorsque les médecins lui ont annoncé le prix de l’opération, elle est repartie. Elle a perdue son bébé...Ici c’est comme ça...
4. La médecine est également traditionnelle et en brousse, il arrive encore que les villageois préfèrent se soigner entre eux au lieu d’aller au relais santé que l’association a mis en place gratuitement. Ainsi, une femme enceinte a refusée d’être accouchée par la sage-femme de l’association et elle s’est faite accoucher par les femmes du village. Elle a fait une hémorragie interne que personne n’a pu voir (évidemment) et elle est morte quelques jours plus tard.
5. J’aimerai aussi aborder la notion d’urgence qui n’est absolument pas connue ici. Les personnes en brousse comme ici, attendent beaucoup trop longtemps avant de guérir leurs blessures. Ils attendent l’infection pour s’en préoccuper. Ce n’est pas infecté, alors ce n’est pas grave… Un enfant en malnutrition, on attend la dernière minute (souvent déjà trop tard) pour consulter. Et c’est malheureusement comme ça pour tout.
Le handicap et les maladies psychiques ne sont également pas considérés. Lorsque Christophe a fait sa décompensation cérébrale, il a fallu le convaincre lui-même qu’il n’était pas fou. Isabelle a dû faire comprendre à sa famille également que c’était à prendre très aux sérieux.
L'espérance de vie à Madagascar est de 65 ans. Dans les villages comme Ampahantany, c'est plutôt 55 ans, et dans certains coins reculés de la brousse, cela tourne davantage autour de 40 ans.
Nous même avons fait l'expérience de petites et de grandes mésaventures :
- De nombreuses fois, nous avons eu des douleurs au ventre, et des problèmes intestinaux. Diarrhées et constipations partagent malheureusement l’expérience avec nous.
- Les moustiques sont un véritable fléau à Mada, particulièrement a cause du paludisme. Les médecins disent que « la moustiquaire est au paludisme ce que le préservatif est au sida », c’est pour vous dire ! Alors, dormez couverts !
Nous avons le luxe de pouvoir nous protéger grâce à nos médicaments et au traitement anti-paludisme. Mais, ici, le seul remède, est de se claquer la peau à chaque fois qu'un moustique se pose sur le corps. Résultat, de nombreux cas de paludisme sont avérés ici chaque jour. De manière générale, même pour nous, ce traitement n’est absolument pas bon. C’est en fait un médicament qui touche les hormones et qui est très puissant, il dérègle tout. Ce traitement provoque nausées, vertiges, plaques, allergies, troubles intestinaux etc… c’est pourquoi beaucoup de vazahas rejettent le traitement anti-paludisme ! Il ne s’agit donc pas d’une vraie solution.
- Les puces de sable. Nous en avions entendu parler quelques fois mais à aucun moment, nous n’avions imaginé l'ampleur des dégâts que peut provoquer cette minuscule bestiole. Nous l’avons vite compris lorsque nous avons observé les pieds des malgaches et particulièrement ceux des enfants. Leurs doigts de pieds sont détruits par ces "parasy". Pour la petite anecdote, Flavien en a attrapé une et ne s’est pas vraiment préoccupé de ce petit point noir sous son doigt de pied. Mais au bout de quelques semaines, en voyant le trou sous son pied, il a décidé de consulter l'infirmière du village. Elle lui a retiré, non sans douleur, mais il gardera un petit trou sous son orteil en souvenir de Mada !
Le départ d’Alizée :
Notre camarade a commencée à avoir des crampes intestinales très douloureuses et des nausées il y a trois semaines, en pleine nuit. L’infirmière Fara a tout d’abord crue à une gastro intestinale. Mais les médicaments n’ont rien changé. Après deux jours, Alizée souffrait de plus en plus. Ses crises de crampes devenaient presque incessantes. Sa fièvre est grimpée jusqu’à quasiment 40 et elle a perdue connaissance deux fois. De plus, après la deuxième nuit dans cet état, elle a eu une irruption cutanée impressionnante de plaques sur le ventre et le dos.
Nous avons donc décidé d’appeler son assurance en France pour savoir ce qu’il fallait faire, si elle pouvait voir un médecin très rapidement sur Tamatave. Un peu plus de 24h plus tard, soit déjà après 4 jours, Alizée a été conduite en bateau jusqu’à Tamatave et accueillie à l’espace médical de Tamatave (établissement noté 3/3 d’après l’assurance). Les 3 médecins qui l’ont ausculté ont décidé de la garder une nuit sous perfusion et de faire des examens. Nous l’avons tous les 3 accompagné pour rester près d’elle et être soudé (ALEFA jusqu’au bout !). Je dormais près d’elle à l’hôpital et les garçons étaient à l’hôtel.
Au final, après deux jours d’attente à l’hôpital, Alizée a reçu le diagnostic : typhoïde !
Impossible, puisque nous avons tous été obligatoirement vacciné contre la typhoïde avant notre départ !!! Et pourtant si, les médecins nous annoncent que ce vaccin ne fonctionne qu’à 60%... Le choc !
Après deux nuits encore, les médecins malgaches et ceux de l’assurance en France se mettent d’accord : Alizée doit se faire rapatrier sur La Réunion afin d’avoir des tests complémentaires mais également car il ne serait pas raisonnable qu’elle retourne en brousse dans ces conditions.
Voilà, fin de l’aventure pour Alizée ! BAM ! La décision est très dure à accepter pour tous les 4.
Puis tout va très vite, elle sort de l’hôpital, obtient l’autorisation de récupérer ses affaires à Ampahantany (ouf!) et de faire ses douloureux aurevoirs. C’est terrible de la voir partir et de se dire que dans trois semaines, c’est notre tour ! Deux jours plus tard, elle est dans l’avion…
Nous avons eu des nouvelles trois jours plus tard. Alizée s’est refaite hospitalisée en urgence à l’hôpital de Saint Denis et en plus de la typhoïde, les médecins lui ont annoncé qu’elle avait un parasite, l’Anguibulose, qui se promène dans tout son corps. Bref, un truc bien dégueulasse. Elle a donc été mise sous quarantaine et traité contre ce « vers ».
Nous ne sommes maintenant plus que trois et nous avons, collectivement, pris la décision de quitter Madagascar une semaine avant la date prévue, afin de rejoindre Alizée à La Réunion et de finir le voyage ensemble, en beauté !
Nous avons commencé l’aventure à 4, nous voulons la terminer à 4 !
L’association nous a apporté son soutien dans cette décision et nous ferons évidemment en sorte de terminer nos missions avant de partir ! C’est donc avec une immense tristesse que nous avons vu Alizée partir, mais nous savons aujourd’hui que nous allons la rejoindre et cela nous met du baume au cœur.
Quant à la santé, vous l’aurez compris, on ne rigole pas avec ça à Madagascar. Nous en avons malheureusement vécu l’expérience. Pour nous vazahas, la moindre infection, la moindre contamination et hop, retour à la case départ ! Tout peut s’arrêter du jour au lendemain. Les malgaches l’ont peut-être compris et c’est sûrement la raison pour laquelle ils vivent tout intensément.