Carnet de voyage

La transat

L'étape tant attendue du voyage...
Du 11 au 29 janvier 2020
19 jours
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Les derniers préparatifs en attendant la bonne fenêtre météo ... ou au moins des conditions pas trop désagréables pour partir !

Dernière inspection du bateau...

vue de Mindelo depuis le haut du mat 

Fin de l'avitaillement après au moins dix allers-retours aux différents supermarchés, histoire d'être sûr de n'avoir rien oublié, et bien évidemment les allers-retours pour les 140L d'eau potable en bidon de 5L... Les équipets sont pleins, Manu s'essaie à son nouveau fouet pour nous faire de la mousse au chocolat pendant le voyage ( ... ), installation et préparation du matériel de pêche avec fabrication de la gaffe et du support de canne à pêche avec de la récup (vieux bout de bois, fer à ciment et cartouche vide de sika...)

Et dernière soirée avec les bateaux-copains (Easter 2, Sena, Ty Flot, les 4 matelots, Pierre) avant de se retrouver de l'autre côté pour certains.

Le bateau et l'équipage sont prêts, dernière soirée avec les bateaux copains de ce côté de l'Atlantique!
l'équipage!!! 
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Samedi 11 janvier, 14H15, le vent se calme, ainsi que la houle (enfin normalement), nous larguons les amarres derrière Sena et Easter.

le départ , bye bye Mindelo

Les premières heures, nous essayons de rester en contact par VHF avec Easter parti 1h plus tôt que nous, dernier contact au coucher du soleil alors qu'ils viennent d'allumer le moteur sous le dévent de San Antao, donc route sud pour nous afin d'éviter cela, puis fini le contact VHF, et vive le téléphone satellite qui nous a permis de nous suivre les uns et les autres par textos !

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La transat vu par Tic, Tac et Toc .... un mois après l'arrivée (surnom rapidement donné par Manu : David, Claire et Manu !) Ce périple a vraiment été d'une grande richesse, une belle expérience.

La transat par Tic:

Plusieurs semaines après l’arrivée et après les échanges avec les autres bateaux qui ont traversé, on peut dire que le bilan navigation est plutôt positif : la météo globalement clémente, le bateau en bon état, les avaries peu nombreuses… les moments les plus stressants se cantonnant à la première nuit avec la réparation du palier de safran et surtout du pilote automatique… D’autres ont eu des moments bien plus compliqués.

Sur le plan personnel, cette transat reste un grand moment de stress. Même dans les moments de calme, chaque bruit est un facteur potentiel, mais surtout fantasmé, d’avaries, l’imprécision des fichiers météo et donc l’incertitude une angoisse latente, chaque contrariété de la vie à bord un moment d'agacement... Ce n’est qu’en revoyant les photos et vidéos que je me suis remémoré les bons moments de cette traversée. J’avais occulté tout cela, un stress latent et une envie d’arriver rapidement à destination primant sur le plaisir d’être et de vivre en mer.

Reste l’émotion et la fierté d’avoir transaté avec Claire (et Manu bien sûr) qui est finalement le but de notre voyage, tout ce chemin parcouru depuis la Bretagne, les nombreuses heures de travail sur bateau et les sacrifices que nous avons fait pour ce moment, l’arrivée aux Caraïbes.

Mon sentiment du moment est que je suis et reste un terrien qui aime les bateaux, qui aime naviguer mais qui n’est pas (encore !?) complétement dans son élément…


La transat par Tac :

Que de sentiments et émotions contradictoires pendant cette traversée, de la haine à l'amour (du bateau bien évidemment!), du sentiment d'échec à la fierté.

Pour ma part, la transat s'est passé en 2 parties. Les 10 premiers jours et le reste ... Ma problématique principale, le mal de mer...

La journée du départ était étrange, tous les 2 stressés de larguer les amarres pour l'inconnu pendant un peu plus de 2 semaines, nous avons pris notre temps, vu les copains partir, mais nous trainions un peu des pieds, un petit coup de vent est annoncé pour la nuit, dernière hésitation pour le départ... puis il faut y aller surtout si l'on veut rester proche des autres bateaux. Départ tranquille en début d’après midi,dans la baie de Mindelo, contact VHF avec Easter, ça fait toujours plaisir, on ajuste notre route en fonction des conditions qu'ils ont devant nous, la soirée et la nuit s'annonce plutôt pas mal ! Nous commençons les quarts, je suis un peu vaseuse, mais ça le fait quand même, 20-25 Nds de vent apparent, sous solent seul, la nuit tombe et les problèmes commencent, le vent monte, dans une mer déjà bien formée (3-4m de houle courte), je relaie Manu qui va se coucher, puis panne du pilote auto et de l'électronique, Kentan balloté dans tous les sens entre la houle et les rafales, David vide toute la cabine tribord (remplit jusqu'en haut...) pour accéder au pilote... pendant que je barre, une seule chose lui semble réparable, si pas possible, demi tour (l'angoisse d'affronter ses conditions de nuit et au pré monte, mais la perspective de 20 jours potentiellement dans les mêmes conditions en barrant ne me réjouit guère plus ...) il n'y a plus qu'à croiser les doigts, puis 30min plus tard, le tout refonctionne ! Ce n'était finalement que 30min-1h mais qui nous ont vidés... la nuit reprend son cours puis le vent se calme.

J2, le vent se calme, la mer pas trop, nous sommes tous bien fatigués de cette première nuit, et je commence à être bien malade, pas le mal de mer, et non, une bonne petite virose hivernale qui va me coucher pendant près de 8j, bien évidemment associé ensuite au mal de mer. J'abandonne les gars pour les quarts et je passe donc mon temps couchée, dans le carré, j'essaie de temps de temps de sortir la tête, les garçons sont aux petits soins, même si j'ai vraiment l'impression d'être un boulet, je ne peux rien faire à bord, me déplace toujours avec mon sceau, je mange un peu mais je suis difficile car tout me dégoute, ce qui demande un peu d'effort aux garçons pour faire la cuisine..., je ne dors presque pas (je tousse...) et à l'affût de chaque bruit du bateau, les mouvements et le vent qui soufflent me donnent parfois l'impression que c'est le chaos, mais semble-t-il que non ! (et heureusement Manu a la bonne idée de mettre du WD40 sur les cloisons permettant de faire disparaitre tous les bruits de grincement "normaux" mais agaçant du bateau, ce qui me vaudra également de faire des pancakes à volonté quand j'en serai capable...!)

J5, le stress diminue un peu, les conditions sont plus stables, les gars un peu moins fatigués, ils sortent la canne à pêche ! C'est aussi le jour de la première vraie douche sur le pont (avant c'était lingettes...) De mon côté, je me sens à coté de la plaque, inutile, les garçons organisent leur petite vie, David plutôt autour du bateau et Manu à la cuisine. Je suis épuisée, je ne sais plus quoi faire, ni prendre, je n'ai qu'une envie, que tout ceci s'arrête, on arrive, on vend le bateau, on rentre en avion et finit la voile pour les 50 prochaines années... Et je retourne à mes premiers amours, j'achète un piano a queue !!!! Je suis déçue, pas à la hauteur de mes attentes, je me savais malade mais pas à ce point, surtout si longtemps. 2 ans et demi de préparation pour finir au fond du carré avec un sceau et laisser David se débrouiller, je le vois stresser, difficilement se reposer, gérer la bonne tenue du bateau et je ne peux rien faire.... heureusement que Manu est là... je n'avais pas du tout imaginé la transat comme cela. Alors j'écoute de la musique et des podcasts, merci Radio France !! Heureusement, tous les jours en fin de journée, on se retrouve tous les 3, pour écrire notre petit journal de bord, on rigole bien, et on dédramatise les petits aléas de la journée et moi je prends l'air !

J6, nouveau coup de vent, pas du tout prévu par les fichiers, 40 Nds, pendant que Manu cuisinait, ce qui lui vaut une bonne chute sur les fesses et de la sauce tomate sur les murs. Et pour finir la journée, on découvre de l'eau et du gasoil dans les fonds....

J8, je commence à aller mieux, je reprends le quart de début de nuit...les garçons continuent d'essayer plusieurs configurations de voilure, le vent bougeant pas mal... petit problème de tangon, David se fait fouetter par les écoutes de génois en allant réparer ! Les fichiers météo annoncent à nouveau une houle de 4m (mais nous n'avons pas la fréquence et craignons les conditions du départ...)

J9 : on passe la barrière des 1000mn!!

Ensuite, c'est top !!! Je suis en pleine forme, je reprends les quarts, on change de créneaux tous les jours, ainsi chacun peut profiter du lever, coucher du soleil ou de la lune et des superbes ciels étoilés et étoiles filantes. Les nuits sont calmes, on ne croise personne (peut être 5 cargos sur toute la transat ?!) alors on somnole pendant les quarts. J'arrive à cuisiner, pancakes obligés (contre le WD40...) pain, pizzas, etc... le vent se stabilise, la mer aussi, avec une très grande houle ample qu'on ne sent presque pas ! Le soleil et la chaleur s'installe, c'est bien agréable !

J11, journée des grains, et le poisson mord pendant le grain (pêche complètement improbable où le leurre de la canne à pêche repêche la ligne de traine qui venait de casser avec un poisson au bout !!!) Puis, nuit humide également avec prise, largage, et reprise de ris etc... J'arrive enfin à profiter des journées et des nuits, pas d'avarie majeure, mais David toujours en alerte...

Puis pétole, on avance difficilement, mais on avance, alors on se prélasse, Manu pêche des sargasses, les dauphins viennent nous rendre visite, on cuisine, on essaie de régler les voiles au mieux pour éviter qu'elles ne claquent trop avec la houle (car c'est très très agaçant...), le vent remonte, mais nous avons la flemme de relâcher de la toile car on sait que ça ne va pas durer! Manu et moi trouvons notre rythme en pleine mer, plus difficile pour David qui compte les miles avant d'arriver, ce n'est pas pour tout de suite vu le vent... On fait un peu plus de sud pour échapper à la grosse pétole et heureusement du vent est annoncé 48h avant l'arrivée...que nous n'avons pas vu !

J16, c'est RTT, on ne fait rien à bord, sauf la pêche !

J17, colonie de vacances, on chante, on joue aux cartes, et on attend un peu de vent.

J18, dernière journée, presque déçue d'arriver, j'aurais voulu plus en profiter... finalement le vent remonte en fin de journée, nous obligeant à réduire la toile pour ne pas arriver de nuit sur Grenade. David et moi dormons guère cette nuit, on commence à rencontrer pas mal de bateaux et nous faisons un gros détour pour éviter les hauts fond au sud de l'île sur lesquels on pourrait croiser des casiers, ce qui ne serait vraiment pas drôle en pleine nuit.

Le 29 janvier, 10h30 (heure locale) , après 18J, 2266,1mn, 4905mn depuis Vannes, nous arrivons à Grenade sous un enchainement de grains ! Je ne réalise pas du tout ce que nous venons de faire... A côtoyer tous ces équipages avant le départ qui allaient transater, ou qui l'avaient déjà faite, elle en devenait presque banale malgré l'appréhension que nous avions. Puis une fois posée, à reprendre la carte de notre route, les messages reçus sur facebook pendant la traversée que nous n'avions pas vus, nous quittons ce microcosme des pontons des transateux et on se dit "bah merde, on la fait!!!". Les échanges avec les autres bateaux copains sont très riches, permettant de relativiser, il y a des avaries et des malades à bord sur pleins de bateaux et la transat aller ce n'est pas toujours le tapis roulant ! Finalement nous avons eu des petites frayeurs mais pas de gros problèmes. Et c'est surtout la vie dans un espace restreint pendant presque 3 semaines, sur un milieu potentiellement hostile, gérer les aléas techniques, les malades... son stress et parfois celui des autres, les sauts d'humeurs, et bien malgré les quelques problèmes rencontrés, la vie à bord a été vraiment agréable, aucune règle définie avant le départ et tout s'est organisé naturellement (seul règle : port du gilet et des chaussures obligatoire et on s'attache la nuit ! ce qui a valut à Toc son pin's sécurité!)

La transat par Toc : Bon, alors je vais tenter de faire un petit mémo sur ma transat à moi, même si elle s'est terminé il y a une quarantaine de jours (déja ?!) et qu'une saloperie de Dengue m'a un peu déglingué les neurones depuis (j'entends d'ici les mauvaises langues dire que c'est le rhum mais c'est faux).Arrivé début janvier à Mindelo (île de Sao Vicente, Cap Vert), j'ai rapidement été mis l'ambiance des transateux (c'est un voileux qui fait une transat) : ça cause météo, bateau à chiffons, préparation, vivres, menus, toussa. Je sens un certain stress chez tous ces équipages qui bien souvent font la (grande) traversée pour la première fois. Personnellement, je suis d'un zen olympien : j'ai une confiance totale envers David et Claire (j'aurais pu écrire Claire et David mais c'est venu dans cet ordre là). Je connais David depuis une dizaine d'année et on a déjà fait quelques navigations ensemble, je savais donc avec quel lascar je me lançais dans l'aventure. Je ne connaissais pas les talents de navigatrice de Claire mais ceux-ci se sont révélés tout à fait être à la hauteur de ceux de son compagnon (ca se sent que je suis un poil macho sur ce coup là ?) Bref, on glandouille à Mindelo pendant 4 ou 5 jours en attendant une fenêtre météo favorable. Chaque bateau a son propre jour de prédilection pour le départ, suivant leur expérience, leur routeur quand ils en ont un... Ca me fait assez marrer, ça me rappelle un peu le dessin animé "les fous du volant". Bon, officiellement y a pas de course entre les bateaux, mais bon si t'arrives prem's c'est bien quand même. D'ailleurs il me semble bien qu'on a gagné et large en plus encore.Bon, je me rends compte que je vais écrire un livre si je continue à digresser comme ça... faut que je me concentre.Donc on part un jour (je sais plus lequel) et on arrive dix neuf jours plus tard. Et voilà. Fin.On sait qu'on part avec pas mal d'houle (c'est moche de dire "de houle") et pas mal de vent aussi mais on est tout content de partir, les îles du Cap vert disparaissant lentement dans le sillage du bateau lorsque la nuit tombe. C'est chouette.Ouais, enfin bof, parce que j'ai du bouffer un truc pas super frais au bar-resto de la marina à midi. Je suis tout gerbouilleux, alors que bon j'ai quelques miles à mon actif, toujours bon pied bon oeil... Sauf que là, on est pas en train de faire les guignols dans la baie de Quiberon, et qu'il va falloir assurer les quarts de nuit... Bon, ça y est je me disperse encore, je vais tenter d'être plus synthétique. Ca doit être les effets de la Dengue... ben je vois que ça, j'ai arrêté le rhum. Enfin, quasiment.Je ne vais pas ré-écrire un certain journal de bord donc je vais plutôt balancer quelques sensations, souvenirs de cette transat.Cette transatlantique c'est d'abord et surtout des aventures humaines je crois (c'est beau hein, on dirait du Didier Mozart je trouve). C'est bien évidemment d'abord l'aventure de deux amoureux qui révaient de traverser l'atlantique sur leur bateau. Ce n'était pas prévu que je sois là mais le mal de mer de Claire en a décidé autrement... j'ai essayé de me faire le plus petit possible afin de leur laisser vivre cette aventure à deux... mais malheureusement c'est impossible : je prends quand même un peu de place. Alors j'ai été le témoin de leur vie d'amoureux (putain, non, je suis pas en train de parler de sexe ! vous êtes vraiment dégueulasses ma parole !) et c'était chouette. Parce que même au travers des moments pas faciles, des prises de becs, des engueulades (jamais bien méchantes) ben au final ce qu'on ressentait c'était surtout l'amour.C'est aussi l'aventure intérieure de chacun d'entre nous trois. Pour ma part, essayer de me connaitre un peu mieux. Comme le résultat est pas bien glorieux je vais pas m'étendre la dessus ! Au final, je connais bien mieux les deux loulous avec qui j'ai adoré faire cette traversée, leurs (grandes) qualités, leurs (petits) défauts... et donc je les aime en connaissance de cause !Au final je serais bien resté une semaine de plus en transat en fait... histoire de pêcher un peu plus, de rigoler un peu plus, de savourer des quarts de nuit sous la voie lactée, de papoter un peu plus avec les loulous de nos vies, et de ressentir cette liberté intense que l'on ne ressent qu'en Transat je crois...

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Quelques moments de vie à bord pendant ces 18 jours :

Activité pêche intense grâce à Manu : 3 daurades coryphènes, 4 carangues et attaques nocturnes de poissons volants de toute taille, un marlin mais malheureusement qui s'est libéré avant de pouvoir le gaffer, et du thon... enfin presque...! Et supers repas de poissons sous toutes ces formes : ceviche, à la tahitienne, poêlé, et de beaux moments de complicité entre les gars.

La pêche aux poissons a été écourtée dès la mi-transat remplacée par la pêche à la sargasse...


La pêche 
pêche au thon et au marlin... 
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La vie à bord...

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Baignade pour les gars par 4000m de fond, Tac avait trop peur parce qu'elle n'avait pas pied !

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La navigation... Les 4/5 premiers jours ont été un peu agités en raison d'une forte houle et d'un coup de vent la 1ère nuit, compliqué d'un petit problème technique...panne du pilote automatique et de l'électronique, heureusement réparés rapidement ! Puis les conditions s'améliorent permettant un vie à bord bien agréable et un peu moins stressante pour le capitaine, malgré quelques avaries (fuite d'eau et gazoil...) nous avons pas mal joué avec les voiles avec toutes les configurations possible pour pouvoir avancer en fonction du vent, de la houle... mais aussi parfois en fonction de notre flemme... Nous avons fini par 4 jours de pétole où nous avancions à 3-4 nds, et nous avons encore freiné la dernière nuit pour une arrivée de jour à Grenade. Distance mini : 80mn/24h et distance maxi : 158mn/24h.

Nous avons vu de superbes levers et couchers de soleil, nuits étoilées, étoiles filantes, lever et coucher de lune, et quelques dauphins et pailles en queue.

1000 mn!!! presque mi transat 
Les dauphins 
Couchers de soleil 
Levers de soleil 
Dernier soir en mer 
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L'arrivée, sur Belle île, ah non Grenade... mais en même temps, avec la météo on pouvait confondre....