De la Serbie à l'Albanie, en passant par la Bosnie, la Croatie et le Monténégro
Octobre 2017
4 semaines
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Le temps des gitans 

Un jour j'ai visionné "Le temps des gitans", 1 fois puis 2. Emir K. est entré dans ma vie cinématographique de manière fracassante. Il y a en a eu ensuite d'autres, avec toujours des personnages improbables, des femmes adorables, des personnages ubuesques et cette musique ... formidable. Un jour je me suis promis d'aller sur les traces d'Émir K. ... ce jour est arrivé ....

Nantes, aéroport

On patiente depuis déjà plusieurs heures. 2h de retard au depart de Nantes. "On" c'est mon collègue sur lequel je suis tombé à l'aéroport et moi. Nous prenons le même avion mais lui file ensuite faire la diagonale des fous à la Réunion. 160km de trail, whaou!

Paris CDG, terminal 2D

Par je ne sais quelle opération, j'ai l'impression d'être déjà partit. D'être déjà à l'étranger. Autour de moi, j'entends différentes nationalités qui contribuent à cette surprenante sensation.

Nous tardons à embarquer quand j'aimerai être déjà arrivé, je n'apprécie guère cet espace temps où je pourrai encore renoncer et le moment où le vol AirSerbia quitte la piste de Roissy pour un territoire inconnu.

Dans la file d'attente qui nous mène dans la carlingue, je m'imerge dans un peu de Serbie en écoutant ceux et celles qui maccompagnent. Une langue âpre, ou l'on pense entendre des cailloux qui s'entrechoquent quand ils parlent.

Place 15F, alors que m'installe ma voisine me demande quel langue je parle. "Français and a Little english" "oh it's not so bad"

Une fois installé je l'observe à la dérobée, châtain foncée, les cheveux longs, mince et élancée, vêtue d'un jean noir, et d'une tunique bleu ciel, ses mains, fines, trahissent son âge.

Elle a sortit un roman, en Serbe semble t-il, J'arrive à apercevoir le titre "Zena na sepinatama"

Je lui prêterai bien mes lunettes quand je la vois le nez sur sa page pour déchiffrer ce qu'elle lit. Pencher sur son livre, sa chevelure me dissimule son visage.

Son allure frêle fait qu'il se dégage d'elle une grande douceur. Elle parle un peu le français si j'en juge aux quelques politesses que nous avons échangé quand nous nous sommes installés. J'hésite à l'aborder plus longuement pour savoir ce qu'elle est venue faire en France. Me voit-elle l'observer ainsi discrètement ?

Dans l'allée centrale, une élégante vieille femme passe et repasse. Dans sa chevellure blonde, se niche une petite pointe de coquetterie juvénile; une pince verte pistache sertie de paillettes a la forme d'un sac à main, qui lui maintient le chignon. Je l'ai croisée à la douane, elle semblait hésiter, chercher son chemin.

Aeroport Nikola Tesla

M'y voilà, la nuit est tombée depuis un moment déjà. Les douaniers ne sont pas suspicieux, et je passe rapidement le contrôle. Par contre l'attente est interminable pour récupérer mon bagage, Meda mon hôte m'a envoyé un chauffeur ... donc j'attends sereinement.

Dans la zone d'arrivée, aucune pancarte à mon nom.

Meda m'informe au téléphone que mon chauffeur ne m'a pas attendu, je suis quitte pour prendre un taxi. Celui-ci se réserve dans l'aéroport, au guichet taxi info ou une jeune femme et un homme plus âgé comptent les mouches. Le tarif est unique et indiqué sur le voucher que l'on me remet. 1800 dinars.

Les 20 km qui me séparent de ma destination me laissent le temps d'observer la périphérie belgradoise qui ne me laissera aucun souvenir. On passe à proximité de la cathédrale Saint Sava, mais plus le taxi file plus je mesure la distance qui sépare celle-ci de là où je me rends. La ville est très bigarrée, des immeubles récents et d'autres vétustes, gris, tristes. Comme celui on mon chauffeur me dépose. "It's here" me dit il en me montrant le n°4, il fait sombre, il n'y a pas âme qui vive. Bienvenue à Beograd.

Comme Meda me l'a indiqué je me connecte sur un wifi afin de l'informer de mon arrivée. "My girl friend Will be here in 5 minutes" et quand une jeune femme blonde surgit au coin de la rue, je n'ai toujours croisé personne.

Elle est venue avec son garde du corps, un énorme chien, qui répond au doux nom de "gorg", il lui arrive presqu'à la taille, .

L'appartement est au sous sol, on passe d'abord une grosse porte en plastique puis une seconde qui me donne l'impression de rentrer dans un container.

La pièce de vie est minuscule, je suis admiratif de l'ingéniosité du photographe qui en prenant chaque détail a permis de laisser penser que les 8m2 en faisait le double. La salle de bain est presqu'aussi grande.

En entrant, ma jeune hôtesse m'annonce que c'est tout petit mais cosy ... Je ne peux qu'approuver pour la taille, et la pointe d'humour devant ma surprise.

2

Ce matin je traîne, il ne faudrait pourtant pas car le temps m'est compté. Je dois organiser mon prochain trajet et trouver un bus pour Novi Sad au nord de Belgrade. Puis un autre pour Sarajevo avant d'y réserver un hébergement. Heureusement pour moi, rejoindre l'office de tourisme est un jeu d'enfant, le bulevar despota stefana m'emmène directement à Trg republike. En chemin je découvre l'architecture belgradoise. Des immeubles à l'abandon, dans lequel je découvrirai le lendemain que l'un d'eux est occupé au rez de chaussée, côtoient des façades colorées, le contraste est saisissant.

Sardaska, une rue pavée arborée et fleurie me fait tirer un bord. L'endroit est sûrement touristique et animé le soir mais à cette heure, la place est vide et la lumière du matin lui confère une atmosphère sereine.

Le boulevard est emprunté d'une multitude de bus. C'est un musée à ciel ouvert, tantôt rutilant, tantôt sortit de la guerre froide il y en a pour tous les goûts. Au fil des ans, Belgrade à absorbé des petits villages et le réseau de bus est l'équivalent de notre train de banlieue.

Après un bref passage à l'office de tourisme, je pars à la recherche de la station de bus longue distance. Sur le plan tout est simple, mais 2 rues sur 3 sont en cyrillique, je défini donc mon itinéraire en fonction des plaques que je peux lire quitte à me rallonger.

La gare est routière est immense, le réseau de bus, plus rapide, est beaucoup plus développé que le réseau ferroviaire.

Ma 1e guichetière n'est pas équipée de patience. Si j'ai pu obtenir les informations que je souhaitais pour aller à Novi Sad, j'ai face à moi un mur quant au trajet vers Sarajevo, or de celui-ci dépend mon hébergement ....

La guichetière des achats, une femme d'une bonne cinquantaine d'années me laisse à penser que la langue de Shakespeare n'est sans doute pas sa tasse de thé ... au bout de la 2e question elle m'envoie vers sa collègue. C'est le coeur plein d'espoir que j'espère tomber sur une jeune donzelle parfaitement bilingue .... hélas, on est plus proche des 70 ans que des 40 ! Mais je repars néanmoins avec mon billet.

Direction Zemun de l'autre côté de la Sava, un bras du Danube. Zemun est au pied de la colline de Gardoš qui domine le Danube et Belgrade.

Zemun à une histoire différente de Belgrade car elle fut en son temps annexée par Vienne. Elle a été de nouveau rattachée à Belgrade après la 1e guerre mondiale. Je m'y rends par le bus 84 et je descends au hasard, mon chauffeur ne sachant me renseigner .... je commence à douter du sens de l'hospitalité des Serbes.

Zemun est suprenante, pittoresque. Derrière les façades colorées, je découvre des quartiers d'un autre âge, la vieille Europe n'a jamais aussi bien portée son nom.

Ce midi, je ne mange pas très local, avant de me perdre à l'écart de l'axe principal. En chemin un marché, la rive apaisante du Danube, des églises orthodoxes.

C'est par une rue pavée dépeuplée mais pleine de charme et bordée de maisons basses typiques que je monte vers Gardoš et que je tombe sur la tour du millénium.

De là, perché sous la flèche on surplombe Zenum et le Danube, à l'horizon se dessine Belgrade.

Je tire des bords d'église orthodoxe en église orthodoxe, si après ça mon voyage n'est pas béni c'est à désespérer. De retour dans le coeur de Zenum, je tombe sur des vestiges de l'ère communiste dont on ne peut pas dire que leurs architectures n'ont pas marquées les esprits. La DS bleue rutilante que je croise est elle un vestige plus familier.

Je ne peux plus me passer des églises. Une fois de retour sur Belgrade, je décide de me diriger vers la cathédrale Sainte Sava. En chemin, je decouvres des vestiges de la guerre, des immeubles bombardés, éventrés que les Serbes laissent en l'état pour ne pas oublier.

Sainte-Sava, c'est la plus grande église orthodoxe d'Europe. De type Byzantine, blanche et verte, elle est monumentale. Commencée en 1935, Tito refusa de poursuivre les travaux après les bombardements de 1941. Ils reprirent en 1985 avec des fonds d'une souscription populaire.


Si l'extérieur est terminé, l'intérieur fait penser à la Sagrada Familia dont les travaux n'en finissent jamais. Seule partie terminée et visitable, la crypte à elle seule est éblouissante.

Du marbre, des arcades surplombées d'ors et de peinture et un lustre qui doit bien faire ses 2m. J'échangerai bien contre mon minuscule studio.

Une partie de l'église est ouverte néanmoins pour les fidèles, le rituel est immuable. On s'approche d'une icône, on se signe, s'incline en touchant le sol de sa main droite. Puis on embrasse l'icône, pose son front dessus. Puis le cérémonial recommence, en partant on laisse une petit obole. Dans une autre église j'aurai l'occasion d'assister à la "récolte " dans une vulgaire bassine, sous les yeux d'un prête, un homme la rempli de billet et il y en a!! La monnaie ici est surtout faite de billets, les plus petites coupures sont de 10 dinars, un peu moins de 10 cents.

La nuit tombe vite, à 19h 30 il fait nuit noire. Je termine au restaurant stara hercegovina, après avoir patienter près de 20 min, le serveur m'annonce que toutes les spécialités serbe à la carte ne sont pas disponibles. J'évite les tripes et je me rabats sur les saucisses, moutarde.

Le prix final est assez dérisoire, pinte, plat dessert me revient à moins de 8€.

La petite place à côté du restaurant est animée, on s'y retrouve en famille sur des bancs épars.Quelques commerces sont encore ouverts, d'autres ferment.

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Ce matin, je suis plus matinal. Je décide de rejoindre Trg republike à pied, distant de 2km de l'appartement.

Trg republike 

Le ciel est bleu, il fait frais. Je ne suis pas mécontent de m'être un peu éloigné hier pour aujourd'hui me balader dans le coeur de la ville. L'architecture ne manque pas de me surprendre, quel mélange, quel capharnaüm.

Bel exemple de l'inventivité architectural communiste  

Rapidement, je suis sur Kneza Mihaila, l'artère piétone qui mène à la forteresse de Kalemegdan. Dans cette avenue opulente, les façades n'ont rien à envier à celles des autres capitales de l'est. Il n'est pas 10h, la lumière est belle et les passants encore assez rare. L'ancien côtoie des façades plus modernes dans une jolie armonie.

De temps à autre, je prends à droite ou à gauche, tantôt l'oeil attiré par une façade, tantôt par hasard, heureux de tomber sur des places croquignolettes.

De retour sur Kneza, le communisme n'est jamais loin.

Les prémices de l'automne ne sont pas en reste pour agrémenter de quelques couleurs ce qui m'est donné d'admirer.

Je pense que je suis certainement en train de battre le record de lenteur pour remonter l'avenue, même un grabataire doit filer plus vite que moi.

L'endroit est certes touristique mais il s'en dégage une douce quiétude.

Me voici à la forterresse, le lieu est immense, on peut y passer la journée. La forteresse surplombe le Danube et la Sava.

Elle a été construite au XIV puis rebâtie en 1717 par les autrichiens d'après le système d'un certain Vauban. Dans une des allées, un vendeur de glace a poussé la coquetterie à être raccord avec les couleurs de son outil de travail.

Plus loin, un homme âgé semble perdu tristement dans ses pensées. Je m'arrange pour l'inclure discrètement dans ma prise de vue. Quand mon oeil quitte l'objectif, le voilà qu'il se rapproche de moi. Aie, me voilà grillé. A portée de voix, il m'interpelle "zoom-zoom", le sourire chaleureux qui accompagne ses paroles me rassure tout de suite sur ses intentions. La poignée de faim est ferme et conviviale. Il parle Serbe, je lui réponds en Anglais que je suis français, il parle aussi allemand, moi pas. Son plaisir "d'échanger" avec moi est d'une touchante sincérité. Il me cite quelques villes françaises, me parle du "wine" avec un oeil malicieux. Je lui explique que je viens de Nantes, utilisant ma main en guise de carte pour la situer vis à vis de Paris, Lyon, Bordeaux qu'il vient de me parler. Il m'apprend qu'en contrebas une passerelle va voir le jour pour rejoindre l'île à pied. On a du mal à communiquer mais c'est un chouette moment. La mémoire est surprenante parfois, la mienne est peuplée de ces personnes croisées ici ou là, quelques minutes seulement mais dont je n'ai rien oublié. Il me quitte comme il est arrivé, avec le sourire.

Je déjeune rue Kraja Petra où je test les ćevapi, petits rouleaux de boeuf servis avec des oignons. J'ai eu des nouvelles de Meda, desolé de ma mésaventure de dimanche, il tient à m'organiser mon transfert à la station de bus. Quand à mon hôte de Novi Sad, elle m'a déniché un trajet en bus direct pour Sarajevo, ce qui me permet par la même occasion de louer l'appartement d'Amina, repéré quelques jours plus tôt.

A la table proche de la mienne s'est installé un jeune couple. Comme un nombre étonnant de jeunes (et moins jeune) femmes croisées ici, elle est particulièrement charmante mais une beauté un peu glacée. La séance du selfie qui va suivre mériterait d'être filmé. Le minoi de mon élégante se pare soudain du plus beau de ses sourires qui aussitôt le clic du miroir refermé se transforme à nouveau en un masque froid et glacé. Je me replonge dans mes recherches et note quelques rues intéressantes dans lesquelles je vais poursuivre ma quête architectural. Le cyrillique m'oblige toujours à tirer des bords, à défaut je sollicite de préférence ici ou là quelques demoiselles pour m'orienter et parfois me désorienter ! !

Après Jevrejska, je m'éloigne du centre et traverse des voies ferrées désaffectées pour aboutir dans une cité. Plus loin, je débouche sur le Danube, des couples, souvent âgés, sont assis ici et là sur des bancs. Un petit commerce de proximité, un chien bienheureux qui paresse au soleil, un wagon à l'abandon, des vieux qui promènent leur chien ... il est temps que je parte ailleurs. Je passe l'après midi à déambuler, les surprises photographiques sont fréquentes. Je remonte vers Kneza, en passant par Terazije, l'occasion de tomber sur la superbe façade de l'hôtel Moscou et de voir le soleil entamer son coucher sur la Sava. Plus loin sur les rives du Danube le soleil rougeoie. Belgrade m'a comblé et surpris, je rentre dans la nuit, m'arrête dîner dans un petit resto aux prix doux.

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Jour de départ vers Novi Sad, Meda m'a proposé qu'un chauffeur vienne me chercher, nous avons rendez-vous à 8h15. Je sors à 8h.

Un homme, grand, barbu, s'affaire autour de sa voiture. Nos regards se croisent et je pense qu'à cet instant nous pensons la même chose. La question à son importance, est-il mon chauffeur ? Il attend quelqu'un pour l'aéroport, ne connaît pas le nom de son client et celui de Meda lui semble étranger. Mes tentatives de joindre Meda restent vaines. A ma seconde question, les coïncidences de ses réponses sont troublantes, son rdv est à 8h15, et au n°4 ...

Il semble plus réticent que moi à croire à alignement des astres, bon lui n'a pas de bus à prendre. Ses tentatives pour joindre son boss sont aussi fructueuses que les miennes pour joindre Meda, dont les plans voiturage me laissent perplexe. Je laisse à mon cousin d'Émir, très lointain, 2 minutes pour se décider avant d'essayer de prendre un taxi au vol. Il faut croire que nous avons une connexion particulière car il m'invite à monter à bord.

Slobodan, un prénom charmant pour un Serbe surtout quand il s'agit d'un ancien sergent qui travaille aujourd'hui dans la sécurité. Chauffeur est son second métier. Il parle aussi bien l'anglais que moi ... c'est à dire mal !!

Il me raconte qu'il était plus à l'aise avec cette langue quand il devait aller à la commission européenne .... je trouve plus judicieux de changer de sujet. On discute avec nos quelques mots de vocabulaires, de choses et d'autres. Malgré son côté bourru et le fait que je doive souvent relancer la conversation, notre échange est agréable quand on se quitte à la station de bus sa poignée de main est chaleureuse.

Plateforme 37, je m'installe dans le bus qui vient d'arriver. 8h45 le bus décolle. Naïvement je me dis que pour un départ à 9h, j'ai bien fait d'être là de bonne heure .... Ma candeur est très vite douchée par le visage dépité du contrôleur de billet quand il s'arrête à ma hauteur pour contrôler mon billet. Si le bus va bien à Novi Sad, ce n'est pas celui pour lequel j'ai acheté un billet. On me dépose sur le bord de la route à Zemun, à l'endroit même ou j'étais descendu la veille. Dans l'incertitude de récupérer mon bus, je n'attends pas super serein.

On chemine désormais sur l'autoroute en direction de Novi Sad, de part et d'autre des champs agricoles, des étendues boisées, le Danube qu'on traverse. Le trajet dure 1h30, aux abords de Novi sad nous croisons une cariole tirée par un cheval. Je ne sais dire qui des 3, en comptant le cocher, semble le plus âgé. Un bref instant j'ai la sensation d'être au 19e siècle.

La station de bus me remémore l'aéroport de Kiev, la même vétusté, l'alphabet cyrillique, un autre monde.

Elizaveta ne m'attend que pour 12h30, je pense être à 15min de l'appartement. La grande avenue à 2x2 voies qui part de la station est jalonnée de toutes sortes de petits commerces, cafés, tous types de resto, pharmacie, épicerie et ainsi de suite. Je ne suis pourtant pas dans le centre mais c'est très animé.

Pour passer le temps, je teste un café puis une pizzeria pour me restaurer. La quête du n°19 où je dois retrouver Elizaveta nécessite de demander mon chemin 3 ou 4 fois alors que je suis à 50m du rdv! Elizaveta et une amie (?) m'attendent au pied d'une tour de 10 étages, le quartier n'est pas super glamour. Nous tenons tous juste à 3 dans l'ascenseur délicieusement rétro et c'est dans le silence que nous montons au 10e. L'appartement est aussi mignon que sur les photos, on m'emmène sur le toit dont le sol craquelé laisse passer les herbes folles. Le passage des infos est succinct, je n'ai pas affaire à des grandes bavardes.

Le coeur de Novi Sad est piéton et est totalement différent des rues que j'ai emprunté pour y aller. Il y a un beaucoup d'églises orthodoxe, ainsi que des façades là aussi colorées, semblables à celles que j'ai pu voir à Vienne ou Budapest.

Ce petit centre est adorable mais en 2-3h j'en ai arpenté les principales rues.

Je consacre la fin de l'après midi à flâner dans la forteresse qui est sur l'autre rive, je ne me lasse pas de la vue sur le Danube que je découvre sous les différentes lumières du jour déclinant. Je dîne tôt afin de profiter de mon home sweet home.

La journée suivante ressemble à la 1e, je flâne ici et là, je profite des terrasses, cherchant la bonne prise de vue.

En fin d'après midi, je me joue de la lumière déclinante et je prends de la distance pour "voler" quelques moments d'existence. A l'occasion d'un changement d'objectif, j'ai oublié sur un banc mon casque audio.

Je m'en aperçois près d'1h après. Alors que je rejoins à la hâte le banc de mon étourderie, j'aperçois une délicieuse femme âgée qui se régale d'une glace avec gourmandise.

C'est mon jour de chance, mon casque n'a pas bougé (incroyable) et au retour ma mamie savoure tellement sa glace que j'ai encore le temps de la croquer.

Si sur ma 1e prise, je suis dubitatif sur le fait qu'elle ne m'ait pas aperçue, la 2e ne laisse aucun doute.

Plus loin une charmante est en train de faire une séance photo, je m'invite pour faire le 3e larron façon Arsène Lupin, et je ne suis pas peu fière de ma prise.

La lumière du soir sur les façades et les toits des églises est magnifique. Novi Sad est la 2e ville de Serbie et je ne regrette pas d'avoir un peu perdu de temps ici.

Je termine dans le même resto qu'hier. Une jeune femme, autour des vingts ans, m'amuse avec son petit cigare qu'elle tente de fumer.

Au 2e, elle manque de s'étouffer, nos regards se croisent, le sien pour s'enquérir si son étouffement est passé inaperçu (sourire) le mien j'avoue franchement hilare et gentiment moqueur. Ses joues se colorent d'une jolie couleur lie de vin.

Demain direction Sarajevo et 7h de bus.

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Le corps humain est suprenant. Alors que j'ai programmé un réveil à 6h puis 6h15, mon horloge interne me tire de ma torpeur à 5h57. Aujourd'hui est un jour particulier, je suis ici et ailleurs.

Je découvre ce matin que le bracelet offert par Mo, un adorable petit bout de femme rencontrée à Sapa au Vietnam, a disparu. Petit clin d'oeil du destin puisque c'était à l'occasion du voyage pour mes 50 ans et qu'ils sont révolus ce jour.

La gare est proche de l'appartement, le soleil sera encore mon compagnon de route, c'est ainsi depuis mon arrivée.

J'ai appris hier que c'était exceptionnel car la Serbie à eu les mêmes températures que nous en septembre, et novembre est souvent pluvieux, j'espère que ma bonne étoile va continuer de m'accompagner.

Plateforme 6, cette fois - ci je suis dans le bon bus et le trajet va être long, 7h.

J'en profite pour me documenter sur la ville vers laquelle je vais. Le 1e souvenir qui me vient à l'esprit pour Sarajevo concerne la visite surprise de Mitterrand pendant la guerre des Balkans. Voyager à quelques bienfaits, moi qui était, plus jeune, nul en géographie, je suis aujourd'hui en mesure de placer un certain nombre de villes sur une carte.

J'en profite aussi pour réviser mon histoire, et ici je suis servi.

La Bosnie - Herzégovie à ceci d'étrange qu'elle est gouvernée par 3 personnes, Bosniaque( musulman), Serbe ( orthodoxe) et Croate ( catholique) .... quand on voit chez nous la difficulté à gouverner avec les membres d'un même parti, je n'ose imaginer la difficulté ici. Le président change tous les 8 mois et ceci pendant 5 ans.

Plongé dans ma lecture studieuse, je découvre pourquoi le trajet est si long; la BZH ne possède pas d'autoroute et le trajet qu'on emprunte se fait sur des départementales au point où parfois je me demande si je ne suis pas dans un bus qui dessert l'agglomération de Novi Sad ! !

Je suis le seul touriste à bord, les autres passagers sont composés d'hommes et femmes, jeune et moins jeune. La moitié au moins voyage seul. En observant le paysage qui défile devant mes yeux, je me dis que finalement c'est une période intéressante pour voyager en raison des couleurs automnales qui embellissent le paysage qui défile sous mes yeux . J'aperçois les maisons traditionnelles en bois, mais aussi des masures dont j'ai peine à croire que l'on puisse vivre dedans. Sur le bord de la route, des tracteurs sans cabine, ni clim, ni radio ... du style que l'on voit dans nos livres d'histoires ou dans un musée. Plus loin un groupe d'hommes s'est rassemblé pour manger un morceau, j'imagine que leur journée a commencé bien avant la mienne. Les routes qu'on empreinte grimpent de plus en plus, et tournent sans arrêt, j'ai arrêté ma lecture.

Je suis effaré par les habitudes routières, on double partout que la route soit droite ou sinueuse, sans aucune visibilité. Notre chauffeur y compris, à la vue du précipice sur ma gauche, je songe que je ne finirai peut être jamais ce journal .... mais la vue est belle.

Le 1e arrêt survient au bout de 2h, le chauffeur m'annonce 20 minutes de pause.

Sur le parking, un mouton est en train de rôtir dans un mixte de cheminée et barbecue. Un peu de wifi, quelques messages et on repart.

On passe de village en village, entre deux le flanc des monts qui nous entoure se reflète dans la rivière qu'on longe depuis déjà plusieurs kilomètres.

Sur la route 

Arrivé à la frontière, un douanier Serbe s'intéresse activement à mes 2 jeunes voisins, qui ne semblent pourtant pas bien méchant.

Quand il revient avec nos documents, l'interrogatoire continue. Il leurs fouille leurs poches, leurs sacs y compris celui qui contient leurs sandwichs ... on entend une mouche volée.

Le passage de la frontière de la Bosnie - Herzégovie sera beaucoup détendu.

Plus loin en contrebas un minuscule village est de l'autre côté du cours d'eau. Un pont en corde et en planche d'une 10zaine de mètre de long permet de l'atteindre.

Sarajevo, enfin.

Autour de moi les gens s'activent pour ramasser leurs affaires. La ville est située dans une cuvette, et s'étend sur tous les flans des collines qui la cernent. Cela donne l'impression qu'elle est très grande alors qu'elle est moins peuplée que Bordeaux.

Dino m'attend à la station de bus, jovial, sympathique, physiquement il est un mixte de Jacques Gamblin et quand il sourrit me fait penser à Harrison Ford. Le trajet dure une vingtaine de minutes, il est charpentier, il vit avec sa femme et sa fille, son fils vit à Valence, en Espagne. Il me parle de sa ville, de cette particularité que toutes les religions vivent ensemble harmonieusement, ce qui ne semble pas aussi simple qu'il le dise. La preuve en est leur système politique dont il est le 1e à reconnaitre que c'est la raison de l'immobilisme actuel. Il est partisan d'un pays unique, tel qu'il existait du temps de Tito. Il parle un anglais parfait et au vu de mes difficultés me demande si nos programmes étrangers sont sous - titrés ou traduit .... lui depuis tout petit, il entend parler en Anglais pour tout ce qui n'est pas local....

Le logement se situe en dessous du leur, c'est vieillot et c'est chauffé ! Car j'ai perdu quelques degrés en passant la frontière.

Le jour décline et j'ai l'estomac dans les talons. L'appartement est sur la rive gauche de la Miljacka, de l'autre côté se trouve Baščaršija. Pour passer d'une rive à l'autre j'emprunte le pont latin qui délimite la partie Ottoman de la partie austro-hongroise. C'est à quelques pas de là que François - Ferdinand s'est fait occir en 14. Baščaršija est le quartier (XVe) Ottoman de Sarajevo, il me rappelle celui de Skopje, en moins authentique. Un dédale de ruelles pavées dans lesquelles se succèdent quantités d'échoppes en bois. C'est tellement surprenant après Belgrade et Novi Sad, que je suis sous le charme. Des minarets pointent vers le ciel quelque soit l'endroit où mon regard porte. Mais les églises ne sont pas en reste, catholiques ou orthodoxe, je pourrai constater le lendemain qu'il y en a partout. Parfois l'une à côté de l'autre. La Bosnie est à majorité musulmane mais on ne retrouve pas ici ce harcèlement de rue des commerçants auquel on peut être confronté ailleurs. L'islam est modéré ici, je vais croiser autant de femmes voilées que de femmes en mini-jupes.

Ma soirée continue agréablement, je mange tôt et me contente en dessert d'un petit vignoble Monténégrin. Après ma pinte, c'est une douce euphorie qui m'envahit. L'établissement, tout en bois, se remplit. En face de moi ont pris place 4 couples Slovène ... la musique d'ambiance est locale et c'est en coeur qu'ils reprennent les refrains avec l'aide du patron, petit bonhomme rondouillard d'une soixantaine d'année. Voilà je l'ai mon ambiance Kusturikaine. J'avoue que je ne pouvais mieux choisir pour cette 1e soirée. Les clients arrivent et c'est à regret que je libère ma table.

Le vent glacial me rafraîchit la couenne quand il me faut remonter sur les hauteurs. Auparavant, je suis allé traîner encore une fois dans ce vieux quartier.

Baščaršija de nuit 
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C'est avec une certaine excitation que je démarre ma journée. J'ai hâte de découvrir la ville et je veux le faire quand il n'y a pas encore trop de touristes. Je déambule un peu au hasard dans le quartier Ottoman en attendant l'ouverture de l'office du tourisme. Il fait beau, les rues sont presque vide, quelques commerçants commencent à s'installer.

Place aux pigeons 

Les lieux de cultes sont eux fermés. Je tombe par hasard sur une des seule synagogue restant à Sarajevo.

Plus loin la cathédrale catholique sur laquelle veille la statue de Jean Paul 2.

Au sol, "une rose rouge", comme dans plusieurs endroits, ce sont des traces d'obus qui en explosant le bitume ont créés des cratères aux nombreux éclats qui évoquent les pétales d'une fleur. A la fin de la guerre des habitants remplirent ces impacts de résines rouge sang en mémoire de la guerre.

Les roses de Sarajevo 

Le plan désormais en main, tel un bon petit soldat je démarre ma déambulation en longeant Miljacka. Ici et là musée, mosquée, églises de différentes confessions. Certaines se reflètent dans la rivière.

De temps à autre je suis supris par le bruit assourdissant du tram. Certaines voitures sont d'époques. Bleu, verte ou d'une suprenant jaune, je me dis qu'un coup de poing suffirait pour traverser la tôle tant elle semble peu épaisse.

En fin de matinée, j'arrive du côté du pont Vrbanja tristement célèbre pour 2 raisons. Il a été rebaptisé le pont Suada et Olga en mémoire de 2 jeunes femmes pacifistes, l'une croate, l'autre bosniaque. Alors qu'elles participaient à une manifestation pour la paix en avril 1992, elles ont été abattues par des snipper. A quelques dizaines de mètres se trouve "snipper alley", une avenue longue de près de 3km qui va jusqu'au pont.

Le 19 mai 1993, un couple de jeunes amoureux, elle bosniaque, lui serbe avaient eu l'autorisation des 2 camps pour s'échapper de la ville afin de se marier. A proximité du pont ils furent eux aussi abattus par des snipper. Lui mourru sur le coup, elle décédera 10 minutes après, seule, personne n'allant leur porter secours. Ils restèrent ainsi enlacer 4 jours avant que leurs corps soient évacués. Je me souviens de cet épisode qui il y a 30 avait fait la une de tous les journaux internationaux. Cet événement qui m'avait beaucoup ému à l'époque avait été effacé de mon disque dur.

En face de ce pont, sur la façade du batiment mais aussi sur d'autres autour sont restés intacts les impacts multiples de balles ou autres projectiles. Des traces d'un passé douloureux qui survivent au milieu de buildings récents et modernes.

Après une longue pause dans un restaurant moderne, je repars requinqué. Sur les hauteurs de vielles villas magnifiques malgré leurs états de décrépitudes avancées.

Plus bas je suis au coeur du quartier Austro-hongrois, quel contraste, qu'elle ville étonnante. De retour vers le quartier Ottoman, je visite la plus vielle église orthodoxe de sarajevo, très différente de celles visitées jusqu'ici. Le coeur est délimité par des arcades de pierre, la partie extérieure au coeur formant un couloir circulaire d'1m. Je suis seul, l'endroit est magnifique.

Vieille synagogue 

De la place aux pigeons, au coeur de Baščaršija je grimpe à un promontoir où nous sommes plusieurs à être venus prendre de la hauteur pour apercevoir la ville.

Ce soir, j'ai changé de crémerie. Un restaurant local m'ouvre ses bras. Tout petit, le verbe est haut quand j'y mets les pieds. Une table ronde et haute à gauche en entrant, une seconde plus loin avant le bar, toutes deux occupées. A ma droite une table rectangulaire ou siège 2 hommes bientôt rejoint par un 3e. La table perpendiculaire à cette dernière est la seule disponible. Une autre identique dans la continuité avant le bar est aussi occupée par 3 solides gaillards. Du bois clair, des nappes en tissus rouge sang, un napperon, c'est bien les seules éléments lumineux dans l'établissement. Mes compagnons de soirées ont tous plus ou moins des tronches patibulaires. La seule femme de l'auditoire est la serveuse, ou plutôt la patronne. Blonde, les cheveux long et légèrement bouclés, la cinquantaine, l'accueil ne fait pas partie de son service. Quand je passe commande de ce qui me semble être des aubergines farcies, elle m'invite a plutôt tester un mixte. Oui, mon sergent ! ! Le repas est copieux et bon, l'ambiance pittoresque. Mon voisin de droite enfile les Heineken, tandis que l'autre termine son pichet de blanc qui ne doit pas être le 1e. Comme en Serbie, les lieux publics sont fumeurs et ici tout le monde fume. Alors que mon amateur de vins paye, la patronne se penche pour lui rouler une galoche. C'est un peu inquièt que moi même je demande l'addition.

7

Les groupes de tamalous du monde entiers se sont donnés rendez vous à Sarajevo. J'entends un peu de français, ce qui depuis le début du séjour est une rareté. Pour fuir la foule, je vais donc prendre de la hauteur. Dans Baščaršija, après la place au pigeon, par Kovači je monte à l'assaut de la forterresse. De l'esplanade j'ai une vue plongeante sur la vallée et sur Sarajevo que la lumière et la brume matinale couvrent d'une douce quiétude.

J'entreprends de contourner la belle endormie par ses flancs, projet ambitieux s'il en est. Je me faufile dans l'entrelacs des rues dont l'étroitesse ne permets pas toujours de laisser passer les voitures.

Au détour d'une interception, une petite place sur laquelle se trouve un attroupement de 6 ou 7 personnes. Installée derrière un véhicule rouge, entre le coffre ouvert et une table sur laquelle repose une vieille balance, une femme tient son micro marché de fruits et légumes. L'assemblée est bruyante.

Au fur et à mesure que je me faufile entre les habitations, le bitume laisse la place à un rue de pavées. Quand la pente s'accentue, ils forment des marches inégales et envahies par les herbes folles. Les rencontres sont rares. Un homme âgé, un chat, celui-ci étant de loin le plus agile de nous 3 sur ces pierres glissantes.

Ma petite escapade me donne à voir de jolie vue sur la ville que je rejoins .. pour ainsi dire à mon point de départ. Au final, j'aurai emprunté la 2e couronne du périphérique imaginaire qui coutournerait le cimetière.

Le tram n°1 sensé m'emmener à la station de bus se fait rare. A force de l'attendre d'arrêt en arrêt, je fais le chemin à pied. A proximité du terminal, l'ambassade des États unis occupe au moins 1000m2. Je la longe d'un bout à l'autre. Dans l'angle opposé du carrefour suivant, une tour moderne et torve se dresse fière et rutilante.

Le carrefour traversé, la sirène d'une voiture de police me sort de mes pensées. Elle fait demi-tour au carrefour pour prendre la même direction que moi. Alors que mon regard cherche d'éventuels contrevenants, je suis intrigué d'apercevoir qu'un homme en uniforme traverse dans ma direction. En quelques micros secondes j'ai comme l'impression que l'éventuel contrevenant pourrai être moi.

La voiture s'arrête à ma hauteur, un policier jeune en sort, rejoint par l'homme a pied.

- "Do you speak english ?" minterroge le plus jeune sans un gramme d'amabilité superflu.

Comme j'acquiese, après m'avoir demander mon passeport, il m'informe que j'ai été aperçu, sur les caméras de surveillance, prenant des photos de l'ambassade. Je lui montre mes 2 dernières prises : la tour et l'intérieur de la cathédrale.

Le plus jeune se détend et avec un sourire un peu contrit m'annonce "Welcome in Bosnia".

La detente est relative, car le policier resté dans le véhicule n'est pas disposé à me rendre illico mon passeport comme le plus jeune lui a demandé, de la main. Il relève différentes informations qu'il note sur un document, me voilà fiché.

L'industrie du tabac à des beaux jours devant elles ici. Je ne sais pas combien coûte un paquet de cigarettes mais je suis partout entouré de fumeurs.

Je finis par me trouver un petit salon de thé où je peux continuer de rédiger ces quelques lignes devant un thé turc. Le temps vire au gris, quand je ressors les rues ont commencées à se vider et les commerçants ferment boutiques. Les groupes de touristes sont répartis. Les sites sont aussi vides.

Intérieur de la cathédrale et la grande mosquée  

Quelque soit l'heure, des gens sont attablés en train de manger. Le plat qui remporte haut la main tous les suffrages est le ćevapi, ces petites saucisses de boeuf ou mouton servis à l'intérieur d'un demi pain rond. Accompagnés d'oignons blancs ou de crème. On trouve également des pâtisseries orientales dont la seule vue vous cale un coin. J'en ai testé une le 1e jour. Un rectangle de 2cm d'épaisseur, couleur chocolat. Plutôt bon mais un tantinet étouffe chrétien.

Ce soir je retourne au Narudzba, mon restaurant animé du 1e soir. Mon petit bonhomme est content de me voir revenir, gage pour lui que j'étais satisfait de ma soirée précédente. Il est encore tôt et je suis le seul client.

J'accompagne ma pinte d'une ćevapi.

Amiň, c'est le prénom de mon hôte, vient me voir à intervalle régulier pour savoir si tout va bien et discuter un peu.

C'est à cette occasion que j'apprends que les 2 tablées l'avant veille, étaient composés de Slovène, que la soirée est encore montée en température, la table de français ne s'est pas fait prié pour participer à l'ambiance car à défaut de chanter, ils ont danser entre les tables. Je retrouve dans ses yeux le plaisir évident que j'avais aperçu ce soir là quand il regardait sa salle animée, le visage lumineux et heureux.

On ne pouvait continuer de bavarder sans parler de l'ex - Yougoslavie, sujet qu'il aborde de lui même comme s'il y avait une forme de thérapie pour les uns et les autres à aborder ce sujet. . Lui aussi trouve regrettable cet éclatement, d'ailleurs la Bosnie avec sa composition multi-culturelle est en quelque sorte une mini Yougoslavie, me fait - il remarquer avec pertinence. La situation économique est difficile pour toutes ces anciennes républiques. La Slovénie s'en sortirait plutôt bien, la Croatie aussi à cause de l'importance de la manne touristique. Pour les autres, c'est plus dur, il me montre sa salle vide.

Amiň 

C'est comme ça le dimanche me dit - il, les touristes partis les restaurants sont vides. Ce ne sont pas les musulmans qui vont venir rajoute t-il. Et la saison touristique n'est pas très longue. Il est ouvert néanmoins tous les jours. Le restaurant ne lui appartient pas, il fait ça pour filer un coup de main à un ami dont l'activité reste très flou. Amiň à bien 60 ans. Il regrette l'époque de Tito, son pays était une démocratie plus prospère, libre.

Quand je lui réponds que je viens de France, il m'apprend qu'il a appris le français pendant 2 ans quand il était plus jeune mais qu'il a tout oublié. Il entretient son anglais avec les touristes.

Il me demande si les morceaux musicaux qu'il me passe me plaisent. On enchaîne sur la musique Yougoslave que je connais en partie par les films d'Émir Kusturica. Le nom de ce dernier ne déclenche pas un enthousiasme débordant. Emir K. est né à Sarajevo mais vit depuis longtemps à Belgrade, les gens ici ne l'aiment pas beaucoup, et son cinéma n'y est pas populaire, en raison de propos tenus sur le conflit. On enchaîne sur Bregović lui aussi un enfant de Sarajevo, lui aussi partit vivre à Belgrade. Il me met quelques morceaux, se met à chantonner, bat la mesure tel un chef d'orchestre. Son plaisir est évident. Quand je quitte le restaurant, je suis toujours le seul... Merci Amiň pour cette chaleureuse soirée.

8


Quand je sors, il tombe encore quelques gouttes de l'averse qui a arrosé Sarajevo. Je dois insister un peu pour que Dino vienne m'ouvrir, il vient tout juste de de lever. Mais le sourire est toujours là.

Je monte dans le tram n°3, décidément le 1 ne veux pas de moi. J'observe une dernière fois le quartier de Baščaršija puis le quartier Austro-hongrois. Dans Marin dvor, au feu, le conducteur sort rapidement du tram, rentre d'un pas rapide dans une pâtisserie et revient tout aussi vite s'installer avant d'entamer sa dégustation tout en repartant. Le temps noir donne à ma tour torve encore plus de relief ce matin mais je m'abstiens de sortir mon appareil.

Plateforme 12, j'attends mon bus pour Mostar, j'ai bon espoir qu'il y fasse meilleur, c'est du moins ce que m'a prédit Dino ce matin. Je ne sais pas ce que me réserve Mostar. Si Belgrade et Novi Sad étaient sensiblement identique, Sarajevo était radicalement différente.

La route serpente dans la vallée, cette fois - ci pas de douane et c'est vers 12h que j'arrive à Mostar. Je ne sais pas trop ce que je vais trouver comme hébergement, le prix (11€) me laisse penser que je suis peut être dans un dortoir. Quand je me renseigne au café Istanbul, j'apprends que ma destination est à moins de 10m. On ne peut pas dire que l'accueil soit exceptionnel, mais je suis agréablement surpris de la taille de la chambre. Le vieux pont se trouve à 5 minutes, le temps est bas et le vent frais, mais le soleil essaie de se faire sa place. La vieille ville, toute en pierre recèle quelque chose de magique. Il suffirait d'infiniment peu de chose pour avoir la sensation d'être quelques siècles en arrière. Tous les ponts ont été détruits pendant la guerre. Le vieux pont est celui qui a été préservé le plus longtemps comme si, par respect pour cet ancêtre, on ne souhaitait pas y toucher. Sa reconstruction à l'identique à créé la polémique, car les fonds ont été consacré au rétablissement de ce symbole quand il y avait tant d'autres à faire pour les gens qui vivaient là.

Aussi magique que soit ce lieu, y consacrer une après midi est largement suffisant.

Je me risque à aller vers la nouvelle ville à l'ouest. Si Amiň me disait hier que Sarajevo était une petite Yougoslavie ou tout le monde cohabite, Mostar est, elle, le symbole de la division entre les communautés. La ville est séparée en 2 quartiers, est et ouest. A l'est la vieille ville, Bosniaque et donc Musulmane, à l'ouest le quartier Croate donc Catholique. Chaque quartier a ses institutions administratives, ses monuments.Le quartier ouest est plus residentiel mais je ne vois rien de cela, il n'a aucun charme. J'ai au final contourné le quartier est en prenant très large.

Trouver le restaurant conseillé par le petit futé met à l'épreuve mon sens de l'orientation. Il est situé sur la rive droite et sa terrasse possède une jolie vue sur le pont. L'établissement ferme a 20h, qu'elle idée ! !

Il y a 4 restos en terrasse, ma seule compagnie sont quelques chats qui lorgnent d'un oeil, qui ne laisse aucun doute sur leur intentions, ma truite grillée.

A l'heure de la prière, le muezzin lance son appel dans la nuit noire. La mosquée est dans mon dos, et je l'entends comme s'il était derrière moi. Je trouve qu'il y a dans ce rituel quelque chose de fascinant, d'envoûtant. A ce moment précis qui ne dure que quelques minutes, j'ai la sensation d'être à des années lumières de chez moi. Souvent quand j'entends le muezzin, je songe à Alger une ville que j'aimerai énormément visiter et à Peter O'tool dans Lawrence d'Arabie ... il y a parfois des associations d'idées très étranges. L'appel est repris un à un dans les autres minarets, au fur et a mesure le son se dilue pour disparaître dans la nuit. En attendant je reste inflexible pour les chats. Il fait nuit noire, bien qu'il ne soit pas 21h. Les rues les plus isolées se vident, ce n'est pas ce soir que les restaurants feront leur chiffre. La vue sur le pont est magique, je ne regrette nullement d'être venu ici.

9

4h, je sors du sommeil, j'ai mis mon réveil à 5h30 pour aller voir le jour se lever et entendre l'appel à la prière par la même occasion. Le restaurant m'a dit que l'appel était à 6h. Je suis le seul dans la rue, 6h passe sur le pont puis 6h10, à 15 je fais demi-tour car en plus le soleil ne se lève qu'à 7h. Une fois recouché, j'entends le muezzin. ... 8h, le ciel est gris, le vent a chassé le soleil. Mon bus part à 10h15 pour une arrivée vers 13h. A nouveau , il nous faut franchir la frontière mais l'attente qu'on me promet dans le guide n'a pas lieu. Nous longeons la côte via des virages interminables, le soleil joue à cache-cache avec nous.

Dubrovnik, 14h. Après les dinars serbe, les marks Bosniens, voici le kuna croate. Alors qu'à Mostar, je pouvais payer en euros, ici il en est hors de question.

Il me faut prendre un autre bus pour rejoindre Pile, le terminus au pied de la vieille ville. Je suis impatient, Dubrovnik est une ville où j'ai envie d'aller depuis un moment. Pile, tout le monde descend ... à 50m de moi des remparts, de 2,5m de haut et 6m d'épaisseur, annoncent la couleur. Je sors mon plan et me jette littéralement dans la porte qui passe sous le mur crénelé. Les pavés luisent d'un jaune passé, tout comme les 2 façades de Placa. C'est l'axe principal de la citadelle, elle fait la largeur d'une rue.

Placa 

A son extrémité à droite l'église St Blaise,

en face un campanile qui fait office de clocher.

Je poursuis a droite, passe devant le palais du recteur,

contourne la cathédrale puis m'engage à gauche sous des arches pour enfin rejoindre mon appartement. Nicolas, le frère de Tea m'attend. Je lui donne 16/17 ans, il parle français correctement tout en s'appliquant tranquillemebt pour ne pas faire de faute. Sa car 2e soeur vit à Rouen, ville où Il est déjà venu 2 fois.

Je ne prends pas la peine de m'installer, je reprends la petite ruelle, descends à droite un escalier, bifurque de nouveau à droite pour reprendre un escalier pour déboucher sur le port.

J'en ressort sous le campanile, remonte Placa. A droite des petites ruelles à intervalle régulier monte vers prijeko, perpendiculaire à Placa dans laquelle se succèdent des restaurants. On monte encore pour déboucher sur Peline, sous les remparts.

A gauche, tout est de plein pied, des ruelles, des impasses et là aussi, une quantité impressionnante de restos.

La ville a des airs d'Italie et de ses villages de Toscane, Montepulciano, St Geminiano mais en beaucoup plus grand. Je déambule dans tous les sens, avide et gourmand de ces vieilles pierres. Tea m'a envoyé quelques adresses de resto, l'un à proximité, un autre dans Prijeko, hors budget. Ce sera donc Kamenice sur une petite place à gauche de la cathédrale.

Pas de salle intérieur, je mange dehord avec la polaire, la doudoune et le bonnet sans chauffage ni wifi, un risotto qui n'a de risotto que la 1e syllabe. Quand je rentre à l'appartement, dans les petites ruelles seuls les chats et mon ombre me tiennent cie.

En 2, la fontaine d'onofrio. En 4, Placa l'artère principale. .  
10

Je suis bien aise de séjourner dans cette enceinte ancestrale (IX siècle pour les remparts, XIIe pour la ville). Il y a quelque chose de magique a s'endormir à l'intérieur de la citadelle. Ce matin le soleil est haut, le port est à 1min, je passe pour imprimer ma rétine du lathe et j'attaque les remparts. 2km en 2 heures, je suis champion de l'immobilisme mais quelles vues !

Je vais passer la journée à déambuler. Et à buller. Comme d'autres. ..

Des danseurs de rues, se font voler la vedette par un concurant en couche culotte.

En fin d'après midi, je prends le téléphérique pour le coucher de soleil et je redescend à pied en me faisant surprendre par la nuit.

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Dubrovnik, un dernier petit tour sur le port pour revenir vers Placa, les touristes sont encore absents. Mon bus est à 11h, le dernier avant un moment.

Nouveau passage de frontière avant de passer au Monténégro où je retrouve l'euro. On longe le littoral sous le soleil, je savoure la chance qui m'accompagne jusque là.

A Herceg Novi c'est Dragan qui me récupère pour m'emmener à l'appartement où plutôt la maison. Elle est à l'écart de la ville. Dragan, policier de son état, est une mine d'info pour mes prochains jours. Sa femme m'a préparé des toasts délicieux. Au Monténégro je decouvre qu'il faut s'enregistrer auprès des autorités à chaque endroit où l'on séjourne, le temps que Dragan me ramène mon passeport il est trop tard pour trouver à louer une voiture ce soir, tous les loueurs sont fermés mais cela va être urgent car le logement est situé à 30min, 45 à remonter du coeur de Herceg Novi.

Je me balade dans la ville sans réellement la visiter, le quartier piéton sent bon la douceur de vivre tout comme la promenade piétone le long de la baie.

Je me suis dégoté une petite production viticole locale qui accompagnera à merveilles mes prochains repas nocturnes.

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Herceg Novi,

Dragan m'avait proposé de passer par un loueur de voiture qu'il connaissait ... J'essaie de me débrouiller seul et je perds un temps fou. Je finis par trouver un véhicule bien plus cher que les offres aperçues en ligne, et au fur et à mesure de nos échanges ma confiance envers le loueur ne va pas en s'arrangeant. Le GPS fournit est en russe et on passe encore 20 minutes à trouver le moyen de le passer en français. Il est plus de 10h et enfin, je peux partir explorer cette partie du littoral.

Il y a quelque chose d'idyllique à longer la baie. Je suis presque les pieds dans l'eau et autour de moi, des pentes verdoyantes et rocheuses. Je ne dépasse jamais les 50km/h, il faudrait pouvoir s'arrêter à chaque coin. Ce que je fais de temps à autres, ce qui me donne l'occasion d'échanger avec un espagnol qui voyage seul également et avec le lequel je me retrouve sur les mêmes parkings.

Perast, petit coin de paradis.

En contrebas de la nationale, minuscule et répartie autour d'une seule rue, cette ancienne cité riche et puissante à un peu perdu de son lustre. Elle compte quand même 16 églises et 17 palais. Le charme de Perast réside en ses minuscules îles pittoresques. Gospa od škpjela et Sveti djordje. La 1e est artificielle, créé en 1452. Complètement plate, son église au Dôme bleu est un paysage de carte postale. La seconde, naturelle et encore plus petite héberge un monastère. J'arrive en fin de matinée, la lumière est exceptionnelle.

Comme je longe le port, un homme me propose de me joindre à la famille qu'il compte emmené sur la 1e des îles. Je m'installe à même le ponton du bateau, devant, pour une traversée de quelques minutes. Au cours de ma visite, je rencontre une bordelaise. Notre échange est bref, elle va reprendre son bateau. J'ai le temps d'apprendre ses déboires depuis qu'elle est ici. Elle loge sur Perast et cette idée va faire son chemin tant je suis sous le charme de ce village !

Je continue mon périple jusqu'à Kotor en continuant de longer les bouches de Kotor que sont ces successions de baies.

Le temps à changé, le bleu à laissé la place à un gris menaçant. L'effet sur Kotor est étonnant, quel spectacle.

Nichée dans un coin sombre de la baie, au pied de montagnes austères, la cité est cernée de rempart massifs dont une partie épouse les pentes.

Les fortifications tutoient le sommet du massif qui la protège. 1350 marches et plus d'1km permettent d'atteindre son point culminant. La montée est rude mais offre une jolie vue sur la ville en contrebas qui est un labyrinthe de petites rues médiévales où sont disséminées églises, places bordées de cafés.

Je suis très loin d'avoir vu tout ce que j'avais prévu mais la journée à été riche de découvertes.

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Aujourd'hui je vais à la recherche de Njegos, niché au sommet de la montagne noire.

Gardé par 2 géants de granit, repose ici le Vladika Pierre II Petrović Njegos.

A Lepetane je prends le ferry qui traverse la baie pour rejoindre Tivat et économiser ainsi 40km de littoral aussi beau soit - il. A Tivat, l'ancienne base navale a été réhabilitatée en marina luxueuse. Porto Monténégro, son nouveau nom, est un condensé d'appartements luxueux, de boutiques de marques et de restaurants et cafés chics dans lesquels le prix du café reste à un prix français. .. bien loin de ceux à 3€ aperçus sur Placa à Dubrovnik.

A cette époque de l'année le port qui peut accueillir plus de 400 yatchs en compte 4-5 monstrueux et quelques barques en comparaison mais dont je me contenterai bien.

Sur le pont d'un de ces mastodontes, une petite main lustre et astique inlassablement tout ce qui peut l'être. Je pense qu'un mois de mon salaire ne suffit sans doute pas à couvrir les frais journaliers pour l'entretien de ces yatchs. Dans les allées, le personnel affecté à la propreté du site est véhiculé en voiturette électrique pour ne point déranger tous ces nantis.

Je quitte Tivat pour rejoindre Kotor, puis commence l'ascension de la serpentine, une petite route étroite et vertigineuse qui remonte à la présence autrichienne. Elle est longue de 17 km et 25 virages, le chiffre ma été donné par un Monténégrin à qui je me faisais confirmer que j'étais dans la bonne direction. Et il ajoute que la route n'est pas facile. Effectivement, quand on croise un autre véhicule, l'un des 2 est à l'arrêt garé comme il peut pour laisser passer celui qui vient dans l'autre sens.

Mes visites précédentes des différents lieux de culte (orthodoxes, catholique, musulman) me donne l'occasion d'invoquer tous les saints pour ne pas croiser un bus. La vue est saisissante, du moins quand je m'arrête ou risque un oeil de côté. En contrebas les bouches de Kotor, plus loin l'adriatique c'est définitivement sublime mais aussi terriblement impressionnant.

On m'a mentit, arrivé au 25e virage, j'ai certes une vue panoramique de 1e plan mais pas trace de Njegos. Il me faut poursuivre et entrer dans le parc de Lovcren (montagne noire) et monter encore. Au sommet, un cul de sac, puis un escalier de plus de 400 marches qui permet d'accéder enfin au Mausolée.

En montant, je croise 2 des 3 françaises que j'ai rencontré la veille en montant à la citadelle de Kotor puis que j'avais revu le soir a Pérast où je m'étais arrêté prendre un verre. On prend le temps d'échanger quelques mots car si être motorisé offre une grande liberté, en contrepartie cela me coupe des rencontres que je peux faire ici ou là.

Plus haut 2 gardiens imposant garde l'entrée du Mausolée où repose un héros national, drapé dans les ailes d'un aigle. : Njegos.

Derrière ce Mausolée on rejoint, via un chemin aménagé sur la crête, une esplanade de laquelle on aperçoit tout le Monténégro. Je retrouve là un allemand en circuit privé, et je profite des quelques explications pour situer la France en déduction des autres pays localisés, le panorama me permet de constater à quelques points le Monténégro est montagneux. Là aussi la vue est époustouflante malgré le vent et le froid glacial qui y règne.

Comme je ne tiens pas plus que ça à reprendre mes 17 km de virages, je m'engage dans le parc de Lovćen. Par une route sinueuse et minuscule, je serpente à travers la végétation, les couleurs automnales sont une merveille, les bas côtés sont tapissés de feuille orangées qui laissent à penser que le cantonier vient de passer. Ailleurs mon déplacement créé un effet virevoltant .....

Alors que la route ressemble enfin à une nationale, voilà que celle-ci devient chemin de terre et pierre à tel point que je me demande parfois si c'est circulable. Plus loin, je me retrouve au pied d'un tunnel en chantier, un ouvrier le sourire narquois me fait signe que non je ne suis pas sur la route, j'ai loupé la bifurcation 50m avant. Quand après quelques kilomètres je sors enfin de cette alternance de bitume et de terre, je me retrouve à mon point de départ avec d'autres choix que redescendre par la redoutable serpentine.

Budva, la mini-dubrovnik dont je peine à trouver l'accès à Stari Grad, la vieille ville. Encore une cité médiévale nichée dans des remparts intacts au bord de l'eau. Bien que dévastée par un tremblement de terre en 1979, elle a été entièrement reconstruire depuis.

La nuit est tombée quand je rejoins Tivat pour reprendre le ferry. Demain je quitte le sud pour monter au nord à Zabljak.

12

Aujourd'hui on change d'heure mais quand je décolle d'Herceg Novi, je suis loin d'imaginer ce qui m'attend.

Quand on avait discuté avec Dragan des coins que je pouvais faire et ceux qui ne méritaient pas que je m'y arrête, étant donné le temps dont je disposais, il avait évoqué 3 villages, Zlijebi, Ckusevice et Vrbanj. Seul le 2e est localisé sur ma carte. Mon GPS hormis les grandes villes, ne m'est pas très utile. De plus Dragan comme mon loueur m'ont mis en garde contre les propositions farfelues que l'outil pouvait faire.

Ces 3 villages semblaient avoir une portée symbolique importante pour Dragan, en m'en parlant il me montrait ses avants bras et la chair de poule naissante à l'évocation de ses montagnes dans lesquelles s'était retranchés des villageois quand 1500 turcs avaient envahis la ville. Me voilà donc partit à l'assaut de l'histoire. La direction est à l'opposé de ma destination mais pour rejoindre le nord, j'ai à parcourir 272 kilomètres. De nouveau me voilà sur des petites routes qui grimpent inlassablement. C'est encore plus étroit et moins bien entretenu que sur la serpentine mais à 7h30 nouvelle heure un dimanche matin, je ne pense pas croiser grand monde. Je ne me lasse pas de ce que j'ai devant les yeux.

Je monte déjà depuis un bon moment et je n'ai pas l'impression d'avoir fait beaucoup de kilomètres, or plus je m'éloigne et plus c'est du temps qu'il me faudra rajouter à mon étape. J'ai compris depuis quelques jours que le nombre de kilomètres ne veut pas dire grand chose tant on passe de temps à n'en faire ne serait ce que 10.

Alors que je suis arrêté à un col, tergiversant pour faire demi tour, un camion benne me dépasse. 50m plus loin, le voilà qu'il croise un camion de chantier ... l'exercice est délicat et chaque centimètre compte pour que les 2 arrivent à se croiser. Au final cette rencontre me décide à rebrousser chemin et à me mettre en route vers ma destination finale.

En descendant, dans un virage, un panier de basket .. sans doute victime d'une fugue.

Voilà 1h que je suis partit quand je suis de retour à Herceg Novi. Je retrouve mon littoral, subjugué je vois le panneau à ma gauche indiquant Nikšić sans que cela ne génère une quelconque réaction. Arrivé un peu avant Perast, je suis néanmoins surpris que mon GPS augmente le temps plutôt que le réduire. 1e mauvaise décision, je poursuis ma route. Quelques kilomètres plus loin, je finis par faire demi tour. A Risan, entre Herceg Novi et Perast le GPS me propose de prendre un sens interdit!! Un oeil sur la carte me permet de constater que je pars vraiment sur de la petite route avec des pourcentages indiqués à 13%. Un peu vacciné des routes vertigineuse je décide de rebrousser chemin, de me rallonger certes mais de récupérer la nationale qui vient de Podgorica. A Kotor, la direction me rappelle vaguement quelque chose ... En effet me voilà répartit sur la serpentine, cette fois-ci j'arrête de jouer avec mon GPS et je repars pour 25 virages avec vue imprenable à chaque épingle à cheveux mais la vue est aussi vertigineuse que la fois précédente. Puis j'enchaîne par le parc Lovćen, une fois la section en travaux passé je constate une nouvelle fois que mon GPS additionne au lieu de soustraire les kilomètres. Il me faut à nouveau rebrousser chemin pour trouver la bifurcation dans la zone en travaux. Je m'engage alors dans une zone parfois semblable aux agriates. Parfois au maquis, la route est en mauvais état, n'a jamais un tronçon droit qui fasse plus de 50m. Il est désormais 13h, mon GPS annonçait au départ une arrivée à 11h30, je n'ai pas fait la moitié du chemin et à Nikšić je dois redescendre vers Podgorica pour aller visiter le monastère d'Ostrog que je peux ni ne veux louper. L'attention que me demande la route depuis ce matin m'exténue, je ne prends plus aucun plaisir à parcourir cette petite route pittoresque. Je pense toucher le fond quand à l'occasion d'une rencontre, je serre au maximum sur ma droite. En même temps que j'aperçois le conducteur faire la grimace et me faire signe que non, je me suis engagé dans la ravine, elle est plus haute que je ne l'avais imaginé et quand j'en sors c'est accompagné du bruit désagréable de la carrosserie qui effleure allègrement le bitume, j'imagine déjà le pire et un pare choc en partie décroché. Il n'en est rien mais il est temps de s'arrêter.

J'accueille Nikšić avec soulagement, j'ai fait 60 km dans ce no mans Land en plus de 2h. Ostrog est proche. Encastré dans une paroie de 900m de hauteur, le monastère d'un blanc immaculé domine la vallée. C'est le site le plus important du Monténégro pour les orthodoxes. Le monastère n'est pas très grand. Des chapelles troglodytes de tailles modestes et dont les murs sont couverts de fresques séculaires contribuent à rendre ce site extraordinaire.

La route qui mène ensuite à Zabljak est une belle nationale, c'est par celle-ci que j'entre dans le parc du Durmitor. Sauvage, spectaculaire, c'est un grand domaine skiable cernés de 50 sommets dont les plus haut culminent à plus de 2000m. Le parc héberge une quantité d'animaux dont des ours et des loups que j'espère ne pas croiser. Ma surprise est de constater que ses sommets sont enneigés mais plus je monte, encore!!, plus je constate que la neige est bien plus basse. A Zabljak, c'est le dépaysement total. La configuration du village me fait plutôt penser au nord de l'Europe vers les pays scandinaves, la nuit tombe, les gens qui traînent dehors sont emmitouflés comme en plein hiver, des paquets de neige sont entassés ici et là.

Ce matin à Herceg Novi j'ai changé d'heure, à Zabljak j'ai changé de saison. Marijana mon hôte parle français, la chambre est simple, modeste, le chauffage est à fond. Les sanitaires sont sur le palier, ils ne sont pas chauffés, dehors la température est négative, il est 17h, je suis partit il y a 10h, je n'ai parcouru que 400km mais je suis rincé. Je trouve un resto, commande un steak Njegulsi en hommage à Njegos, que j'accompagne de 2 pintes, je dors comme un bébé.

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Aujourd'hui sera une journée sans voiture, quand j'ouvre les volets, les toits sont recouverts d'une mince pellicule de neige, tombée dans la nuit. Il fait beau mais toujours aussi froid, 0°. J'ai perdu 25° en 1 journée. A l'office de tourisme on m'annonce 5 à 6h de marche pour faire le tour du Crno Jezero (lac noir), c'est le plus grand des 18 lacs glaciaires du parc, et enchaîné par un second. Le lac noir est à 3km de Zabljak et sa circonférence est de 3,6km. Le gardien du parc m'annonce des chiffres plus réalistes, 1h pour faire le tour et 1h pour se rendre à l'autre.

Le tour du lac noir se fait tranquillement, il represente presque symboliquement un 8 car il sagit de 2 lacs qui communique l'un à l'autre. Je croise 2 personnes. Me rendre au second lac nécessite de m'engager dans la forêt, ne connaissant ni le coin, ni la qualité du balisage, jespère qu'il n'y aura pas trop d'alternatives n'ayant que moyennement envie de passer la nuit dans les sous bois. Alors que je marche depuis presque 30 minutes, je croise une jeune femme qui vient du lac où je vais, elle me donne quelques indications pour le dénicher.

Le retour est plus rapide, les badauds un peu plus nombreux.

Je suis vraiment dans un petit village, tout le monde se salue. Les voitures s'arrêtent au milieu de la voie pour bavarder avec un passant de connaissance ou le conducteur installé dans le véhicule allant dans le sens opposé. Pas de feu, ni de stop. Sur le bord de la rue, on s'active, ici un homme qui habille de pierre la partie basse de sa maison, là une femme une hache à la main débite son bois. Je n'apercois pas d'églises, 2 rued perpendiculaire forment les 2 axes principaux de la ville dont j'ai vite fait le tour.

13

Je quitte ce matin Durmitor et son parc pour celui de Biogradska Gora plus à l'est afin de rejoindre Kolašin.

Les plateaux du Durmitor sont de vastes plaines désolées, quelques maisons éparses, des chevaux en liberté et au loin des sommets enneigés.

Hormis les activités sportives, je suis bien obligé d'admettre qu'il n'y a pas grand chose à faire dans ce lieu. Mais, à cette époque, il y règne une ambiance hors du temps, déconnecté de la frénésie du monde. On vit au rythme de la nature, doucement, cela sent bon la ruralité dans ce qu'elle peut avoir d'apaisant mais je dois reconnaître que 2 jours me suffisent amplement mais je n'oublierai pas ce petit bout du monde. Le Durmitor laisse la place au parc Biogradska Gora aux paysages plus boisés.

Kolašin est une bourgade assez grosse car c'est la principale station de ski du Monténégro. L'adresse de mon logement est inconnu de mon GPS, je m'arrête à l'office de tourisme, une immense bâtisse de bois ouverte mais vide !! Je patiente bien 5 minutes avant de voir arriver celle qui tient l'accueil. Plus de plan à cette époque, et elle ne sait pas m'expliquer où le logement se trouve. Je récupère son partage de connexion, son mot de passe "dracula555" me laisse aller à une petite réflexion, "it's my name' me dit-elle ... bon si je voulais lui proposer de prendre un verre plus tard, je pense que c'est cuit. Elle me conseille de prendre un taxi que je n'ai qu'à suivre et elle coupe son partage. La chambre est à l'écart de Kolašin, dans un quartier qui fait penser à un regroupent de fermes. Je suis accueilli par la mère de Djuro, en robe de chambre, elle ne parle pas un mot d'anglais. La chambre est sobre et récente.

Je repars vers Podgorica, m'arrête au monastère orthodoxe de Morača. Un joli édifice de 1252 niché dans un écrin de verdure au pied d'un petit ruisseau dans lequel repose le stock de boisson de la petite buvette. Je n'ai aucun doute quant à leur fraîcheur. Sur le côté une petite chapelle, l'église Crkva Sv Nikol, couvertes de fresques un peu fannées. Derrière se trouve des ruches.

Une autre église toute blanche, Crkva Uspenja Borogodice. L'intérieur est séparé en 2 pièces, dans la 1e un peu de commerce et des bougies qui finissent de se consumer. Le tout sous les yeux d'une femme dont je sais pertinemment que je n'arriverai pas à soutirer l'accord de prendre quelques photos. La porte qui sépare les 2 pièces est magnifique, tout comme le lieu de prière dont elle condamne l'entrée. Ma gardienne ne me perd jamais des yeux. Derrière l'église, un petit potager. Sur le côté le monastère qui héberge encore 4 moines. Sous les arcades, un viel homme que je n'avais pas remarqué mange en silence.

Dans la buvette qui tient compagnie au petit ruisseau, je commande un café a une une dame d'un âge indéfinissable vêtue d'une blouse blanche sous son manteau épais.

Elle ne parle pas anglais mais allemand, où es tu mon Yoyo !? Elle me montre un petit récipient puis soulève une énorme gamelle et m'invite à m'installer sous la tonnelle. Le café qu'elle me sert est un café turc, qui lorsqu'elle le verse dans ma tasse ressemble par son côté onctueux à un chocolat bien épais. Épais, il l'est, pâteux, turc !! Elle commercialise aussi des pots de miel local. Elle me montre dans le pot le plus grand, une bulle qui selon elle est un gage de qualité. Comme je repars avec quelques pots, elle m'offre des petits gâteaux et par les gestes qu'elle utilise, je comprends qu'elle me souhaite toutes les bénédictions du lieu.

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Un réveil en fanfare, une belle balade aux portes de l'Albanie et du Kosovo et une prune. Le mauvais oeil est sur moi aujourd'hui, je me suis peut être trompé sur les bénédictions de ma petite vieille.

Dans la chambre, je n'ai qu'un mini frigo. Je me débrouille avec les moyens du bord et utilise le manche de ma brosse à dent en guise de touillette pour le café, mais j'analyse mal la distance pour la redéposer dans la salle de bain. J'ai à cette occasion, la confirmation que le bois Monténégrin est plus solide que mon arcade qui a un peu explosée au passage. La journée commence bien.

Il est vrai que je file vers le parc des Prokletije, dans les montagnes maudites. Comme un symbole.

Ce coin est un appendice inséré entre l'Albanie et le Kosovo et à la particularité d'être à presque 100% musulmans. Je commence par Plav, pour ça j'emprunte 40km de route défoncée, le passage du col se fait sur une route fraîchement déneigée. Si le monastère Orthodoxe de Brezojevica tient routes ses promesses.

La ville et sa perle de lac me laissent dubitatif.

Qu'à cela ne tienne, je file à Gusinje, une bourgade de 2000 âmes. 2 mosquées cohabitent avec une église catholique et une église orthodoxe. Le plus intéressant est la mosquée Vezirova Džamija dont le minaret effilé est tout de bois sculpté dans un parfait état malgré son grand âge, 1626.

Je profite pour déambuler dans le centre sous les yeux des curieux peu habitué à voir des têtes inconnues. Un mot retient mon attention "burek", j'ai complètement oublié que je devais tester cette spécialité culinaire mais je n'ai aucune idée de ce que c'est. Je penche pour du sucré.

Ils sont 3 pour me servir, "one burek, please" "spinach, meat, ???". Mon vendeur a utilisé les seuls mot d'anglais qu'il connaissait. Pendant qu'il va chercher un burek afin d'élucider ma question, le second me demande d'où je viens.

- "French"

- "ah Parisss" me dit il avec le sourire, "ah French" sans que je sache ce que signifie ce "ah french" dans lequel il semble mettre beaucoup d'enthousiasme.

Le burek est une pâte feuilletée garni ici d'épinard et de fromage. J'ai mon repas du midi pour 1€.

Je le déguste sur les hauteurs, il est 13h quand retentit l'appel à la prière. Bien que je sois assez éloigné du bourg, la voix du muezzin s'entend sans doute dans toute la vallée.

Pour le café, je décide de filer Rožaje quand même distante de 60 km! Cette dernière est la ville la plus orientale du Monténégro, elle se trouve presqu'à la frontière Kosovar. Rožaje est surprenante car elle est beaucoup plus animée, moderne. Comme Plav et Gusinje, hormis les minarets et la présence exclusivement d'hommes aux terrasses des cafés, il est difficile de savoir que plus de 90% de la population est musulmane.

Quelques vieilles maisons en bois tiennent encore debout.

Une architecture assez hétéroclite  

Comme je veux rentrer avant la nuit, je reprends la route. La circulation s'affranchie de beaucoup de règle au Monténégro, 2 conducteurs sur 3 ont le portable à l'oreille, le clignotant est je pense une option que personne, absolument personne ne prend. Quand à la vitesse, on oscille entre le 40 et le 80 mais la visibilité des panneaux n'est pas très clair. Dans la côte que j'emprunte à la sortie, je double 2 véhicules qui se traînent laborieusement. Au sommet, il est trop tard quand j'aperçois la voiture de police et le policier avec sa jumelle, lui m'a bien vu et m'invite à me garer. 69 pour 50, je ne cherche même pas à parlementer. On m'annonce 30€ d'amende et 30% de remise !! Une idée à suggérer en France. Cette remise est valable si je retourne à Rožaje pour payer à la poste, mais je crois comprendre que c'est mon seul choix, pendant ce temps il conserve mon permis. Trouver la poste me prend un temps fou A mon retour, j'ai la chance qu'on se croise alors qu'ils ont levés le camp. Il me reste 1h30 de trajet et je termine les 40 derniers km sur ma route défoncée de nuit.

Pour me requinquer je finis dans le même restaurant qu'hier, les mots de la patronne sont donnés avec parcimonie, le sourire accueillant beaucoup moins. Elle est heureuse de me revoir, 30 minutes après le couple de français présent aussi la veille est aussi de retour, la table est bonne et pas onéreuse.

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Ce soir je suis un peu pompette, il faut dire que la grappa locale attaque dur. Un peu plus qu'ailleurs dans les balkans, la plupart des gens ici ont un réel sens de l'accueil.

Je me demande encore pourquoi je mets mon réveil puisque c'est bien avant lui que je suis réveillé. La nuit à encore été froide et ma voiture est de nouveau recouverte de glace. Djuro s'apprête à partir travailler à l'hôpital, il est en retard mais prend 2 minutes pour s'enquérir de mon séjour, des raisons de mon magnifique oeil qui vire au violine et me laisse son grattoir pour ma voiture. A 7h30 je suis partit, le LP annonce une route périlleuse le long du canyon et des jolis points de vues et j'ai envie de profiter de ma journée autrement que sur la route. Je traverse le canyon de Morača, les gorges du Verdon locales, impressionnant.

Marija m'a donné rendez vous à la station de bus. Je traverse la capitale où je ferais étape dans 2 jours, du peu que j'en aperçois, ça n'envoie pas du rêve. Plus je descend, plus la température remonte. J'arrive à Ulcinj 1h après l'heure estimée. C'est au Merlin café que j'attends la Mercedes de Marija.

Je suis à peine arrivé chez eux, que je rencontre le père, qui ne parle pas anglais mais qui distille une petite grappa locale. C'est partit pour un verre de grappa et un café turc, Marija parle anglais sans trop d'accent, c'est un peu plus compliqué avec Tony, son frère, qui nous a rejoint. On papote pendant que je termine café et alcool. J'ai tout juste le temps de poser mon sac qu'on repart, Marija nous dépose avec Tony sur les hauteurs d'Ulcinj. Pendant la descente Tony m'indique ce que je peux visiter, où je peux aller manger puis me laisse pour rejoindre ses amis. Quel accueil!!

Ulcinj est presqu'à la frontière Albanaise. Sa vielle ville domine la plage.

Un peu délabrée, elle fait tout simplement son âge. Je me perds dans ses petites ruelles, monte et descends à la recherche d'une place pour avoir une vue sur l'adriatique.

Au pied de la forteresse, la cathédrale orthodoxe St Nicolas qui se trouve dans un joli champ d'oliviers.

J'apprendrai d'ailleurs ce soir qu'Ulcinj compte 80.000 oliviers.

2 hommes muni d'un outil qui ressemble à un rateau à 5 ou 6 dents sont en train de faire tomber les olives d'un arbre. On me répond par l'affirmative quand je demande si je peux en goûter une. L'olive à un goût amer et n'est pas du tout mûr, j'aurai du me mefier de ce sourire. Je raconte l'anecdote le soir a Marija qu'elle traduit en se marrant à sa maman, il faut 10 jours pour qu'une olive soit consommable, en la laissant reposer dans de l'eau qu'on change matin et soir.

Je reprends ma voiture pour visiter Velika plaža qui est une page de 14 km qui rejoint l'Albanie. Le temps passe et je n'aurai sans doute pas l'opportunité de me mettre à l'eau.

La nuit tombe sur Ulcinj, la citadelle est vide de touristes, seuls les chats m'honnorent de leur présence. Je mange tôt sur les hauteurs de la citadelle, seul client, avec vue sur la playa.

Alors que j'ai informé Marija de mon souhait de partir tôt, elle propose de passer pour me dire au revoir. On s'installe dans le couloir, bientôt rejoint par sa maman qui ne parle que Serbo-croate. Je lui fait part de ma surprise que le Monténégro soit si peu touristique, en souriant elle me dit que personne ne les connais, qu'ils sont petit mais que depuis 3 ans cela change. Le pays fait tout pour ça au niveau de ses infrastructures, il y a des travaux partout depuis que l'été est fini. Marija que confirme que la météo que je rencontre est exceptionnelle, qu'elle n'a pas souvenir d'avoir eu une arrière saison comme cela, habituellement il pleut à cette période. Cela doit être tout relatif qu'à Tony m'annonçait 300 jours de soleil par an au Monténégro ...

La maman de Marija n'est pas venue les mains vides, j'ai le droit à ma petite grappa et une seconde pour la nuit !! Elles insistent pour m'offrir le petit déjeuner pour le lendemain, me propose un café bientôt accompagné d'oeuf et une grappa si je veux. Je leur narre ma mésaventure avec mon excès de vitesse et ma volonté d'en resté là dans mes relations avec les hommes en bleus.

La soirée est délicieuse, si Ulcinj ne méritait pas d'y passer la nuit, cette étape aura été l'occasion de faire ma plus belle rencontre de mon périple.

16

7h30, la maman de Marija m'installe mon petit déjeuner.

Café turc, auquel je finis par m'habituer, omelette, fromage, olives, pain et un pot de confiture d'olives à ramener, ma mésaventure d'hier n'est pas tombée aux oubliettes. La maman ne parle aucun mot d'anglais, elle s'est assise en face de moi et s'assure que tout me convient. Me montre le fromage, à mi chemin entre une mozzarella et une chèvre, pour me signifier qu'il faut le manger avec l'omelette, l'association est effectivement délicieuse. Je suis accueilli comme un prince.

Perast sera ma dernière étape au Monténégro, Podgorica demain étant juste un point de chute pour dormir faute de trouver un trajet direct pour l'Albanie.

Le ciel est un peu chargé, je veux partir tôt pour m'arrêter à Sveti Stefan, une presqu'île confetti, à l'allure d'une carte postale. Proche du rivage, attachée par un petit bout de route comme un navire amarré à quai. Cette partie de la côte est décidément extraordinaire. Mais aujourd'hui les dieux m'ont oubliés, l'eau turquoise et le sable rose ont besoin pour jouer leur symphonie du soleil, celui-ci à laisser la place à sa soeur pleurnicheuse. Même si ce sont de petits sanglots, ils sont de trop.

Chemin faisant, j'ai fait halte à Petrovac sur les conseils de Marija, cette ancienne résidence d'été des Romains est devenu la proie des promoteurs. Alors, après un petit tour à la plage, c'est comme le plus fervent des orthodoxes que je retourne à ma voiture, sans jamais tourner le dos à cette jolie plage, menacée d'un ciel grisâtre.

A quoi tient une jolie rencontre, le fil de notre destin est-il déjà tout tracé ? Puisque Petrovac et surtout Sveti jouent les rebelles, je rentre dans les terres pour aller à la rencontre de Cetinj, l'ancienne capitale du Monténégro. Aux confins du parc de Lovćen, aux pieds de ses montagnes grises et belles se trouvent une ville surprenante, d'anciens palaces art nouveau, côtoient des petites maisons à un seul étage. Mon GPS dont je soupçonne d'anticiper mes besoins me dépose à la station de lavage.

Plus d'une personne aurait refuser ma coupure de 50€, le patron lui m'offre le lavage gratis. A l'office de tourisme, je tombe sur 2 charmantes demoiselles dont le vert va à ravir.

Un Burek plus loin, me voilà dans Ulica Njegoševa où trône anciens palais et maisons plus modestes. Un superbe bâtiment art nouveau est indiqué ambassade de France. Mais la dite ambassade est aujourd'hui une bibliothèque. J'entre et comme j'hésite à aller plus avant du vestibule, je rencontre Sacha. Il faut prononcer "chacha" car l'homosapien serbo-croate à du mal avec notre "S". J'ai eu l'occasion de m'en apercevoir à Rozaje quand je cherchais la "post office", pour m'acquitter de mon amende.

Le piéton que j'avais interpellé restait perplexe, ne comprenant pas ce que je cherchais, comment ne peut - on pas connaître la poste, me disais-je alors. Dans sa volonté de m'aider, il était neanmoins en train d'appeler un ami sur son mobile, je l'entendais répéter "post office - post office" quand j'eu l'idée lumineuse d'utiliser mon guide de langue international du routard. Quand il aperçu le pictogramme que je pointais du doigt, son visage eut ce mélange de dépit et de frustration mêlé pendant qu'il me disait "ah pochte offiche". A un pictogramme près, je dormai à Rozaje.

Sacha est bien embêter, la 2e langue qu'il parle est l'italien. J'ai compris que je ne peux aller plus loin que ce vestibule. Mais je vois bien, qu'il est tout aussi contrarié que moi de ne pouvoir satisfaire ma curiosité. Par dessus son épaule, il jette des regards furtifs sur la porte entre-ouverte par laquelle il est arrivé et d'où s'élèvent des voix féminines que j'imagine être ses collègues. Maladroitement, en cherchant ses mots il m'explique que l'ambassadeur de France à vécu ici avec sa famille à l'étage. Étage qu'il semble hésité à me montrer ... il ouvre la porte de l'escalier .... je lui fais signe, comme on chuchoterait presque "on peut monter ?" Il a de nouveau cette expression d'un enfant peur d'être pris en faute. Puis il me sourit et c'est tels 2 chenapans conscients d'entravés le règlement que nous montons en silence dans les étages. Nous n'irons, hélas, pas plus loin que le palier. Il me montre les meubles d'époque qui y trônent. Toujours avec cette parcimonie de vocabulaire, il m'explique que les cuisines étaient ailleurs, que le personnel ne logeait pas là non plus. Alors on rescend et on se retrouve dehors. Derrière le bâtiment se trouvent les anciennes cuisines. Dans le parc, il me montre un arbre "platane" en hésitant et m'nterrogeant du regard sur l'utilisation du mot français puis "mille novecento e uno" ça j'ai compris!! L'ambassade à été bâtie par un architecte français Paul Guadet. Il me regarde un peu effaré quand je lui fais signe que je ne le connaissais pas avant de découvrir son nom sur la plaque. Notre conversation n'a sans doute pas dépassé les 50 mots, je lui témoigne toute ma gratitude pour ce qu'il vient de m'offrir. Lui est est sincèrement heureux d'avoir contribué à entretenir ce sens de l'hospitalité de la plupart des monténégrins que j'ai rencontré jusqu'ici.

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De Cetinj, pour rejoindre Kotor puis Perast je dois à nouveau traverser le parc Lovćen et prendre la serpentine, 2 routes que je commence à bien connaître ! !

Perast, je suis déçu que le soleil me fasse défaut, décu que la chambre soit au RDC sans la vue sur mes 2 îles que j'ai décidé de m'approprier.

Je suis reçu par Ljubica, la maman de Branko qui gère l'appartement. Ljubica parle français, souvenir de ses études à Strasbourg. Son fils lui vit à Prague où il est marié avec une Tchèque avec qui il a une petite fille de 14 mois, Annita. Ljubica a aussi vécu 22 ans en Italie mais son mari se languissait de Perast. La maison, toute en pierre, est dans sa famille depuis 400 ans.

Perast est un petit village de 200 âmes l'hiver et 16 églises dont une seule orthodoxe, la pluie fine qui vient à ma rencontre me fait renoncer au projet de toutes les dénicher.

La nuit est tombée, la vue est tout aussi belle. Bien qu'il soit encore tôt, il n'y a plus âme qui vive dans les rues. La vision de gospa od škpjela suffit à elle seule pour justifier ma nuit ici.

17

Le soleil est de retour. J'ai beau être levé tôt, je suis un peu à la bourre. Alors, les adieux entre Perast et moi seront sans effusion. Pour la dernière fois je longe ce merveilleux littoral qui me ramène à Herceg Novi.

Les astres sont alignés ce matin, une station de lavage est sur la route, mon loueur est en avance, il accepte de me rembourser 1 journée comptée en trop et me dépose à l'autobuska, ce qui me permet de partir 1h plus tôt. Dans quelques heures, je penserai que c'était 1h de plus que j'aurai pu passer à Perast.

Un couple de français est assis à ma droite, chacun son appareil photo dans la main, ils mitraillent à tout va chacun de leur côté.

- oh regarde chéri c'est magnifique

- ah loupé, oh encore loupé, pff je ne vais pas y'arriver

- dis chéri, tu crois que le caillou là -bas c'est Stefan ?

L'usage du casque et du Mp3 est parfois salutaire.

Podgorica, tout le monde descend. La station de bus est à pleurer de laideur.

Alors que je pense avoir commander 3 rouleaux surprises, on m'amène du choux farci et purée pour un tarif dérisoire.

A Podgorica, j'ai loué une chambre chez Milan. Elle a l'avantage d'être à 4min à pied de la station de bus. Je longe la Posta, hideux bâtiment rouge de l'époque soviétique. Milan ma indiqué ma maison est le grand bâtiment juste après avec le grand jardin. Il y a bien un espace vert qui tient plus du terrain vague non entretenu dans lequel des charmantes donzelles, descendantes directes de Woodstock prennent l'ombre.

-I'M looking for the milan house ?

J'y suis !!

Je suis au 1e, dans une chambre riquiqui, avec des draps d'une autre époque, une couverture année 1970. Mais c'est propre et me conviendra parfaitement pour la nuit.

Podgorica ne ressemble pas à grand chose. Le LP annonce un ancien quartier Ottoman pittoresque dans Stari varoš, faut-il déjà le trouver. Une citadelle ? Je tourne 3 fois autour avant de voir que ce sont les ruines envahies par les herbes folles. Un vieux pont qui enjambe la Ribnica. La tour de l'horloge.

Le magnifique parc avec l'immense jardin pour enfant doit faire ... 200m2.

Reste 2,3 rues un peu plus animées et le plus vieux pub irlandais du Monténégro où je pose mes pénates un couple d'heures.

La nuit tombée, je reprends un petit tour de l'hyper centre. Je commence par les rues Slobode et Boleška, le coin le plus branchés. Les bars et restaurants se succèdent, laissant échapper quelques notes de musique bruyantes. Des jeunes branchés entrent, sortent d'un établissement à l'autre. C'est dynamique.

C'est une toute autre ambiance sur la place Trg Republika. La place est carré, une partie piétonne, une fontaine. Des bâtiments de 2, 3 étages sans charme qui font le tour. Sur un côté, un galerie marchande dont le mur au dessus de l'entrée est recouvert d'un immense écran géant qui distille de la pub.

Le contraste est frappant avec les 2 rues branchées. Ici on ne consomme pas, la population est aussi majoritairement jeune, voir très jeune. On discute par petit groupe, on fait péter des pétards, on joue avec un ballon. Ici et là des idyles vivent leurs vies, naissent ou meurs. On attend que le temps passe. Il y a clairement 2 classes sociales distinctes.

Podgorica est la ville la plus laide que j'ai visité au Monténégro, je doute y remettre les pieds un jour.

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Annoncer que l'on va à Tirana succite au mieux la surprise. Mais qu'est ce qu'on peut bien aller voir en Albanie ? D'un autre côté, il y en a qui passe bien leurs vacances à Ibiza ... moi je me demande bien ce quI peut motiver pour aller à Ibiza.

Pogdorica, je retrouve mes petits bidochons qui visiblement filent vers Cetinj.

Je quitte pogdorica sans regret et m'installe dans le bus vers ma dernière destination, pas la moins glamour je l'avoue mais là où je vais rester le plus longtemps, mais quelle idée !!

Qu'évoque aujourd'hui l'Albanie ? La pauvreté sûrement puisque c'est l'un des pays les moins riches d'Europe, la mafia ? Oui visiblement mais nombre de cités en France ne sont pas mieux loties. Initialement j'avais prévu d'arpenter un peu le sud, de louer une voiture et de partir à la découverte puis de passer par le lac d'Ohrid qui est frontalier avec la Macédoine, région par laquelle j'étais passé un jour ou le brouilard m'avait interdit de décoller de Skopje. J'avais alors traversé une partie de la Macédoine au petit matin pour découvrir la région d'Ohrid au lever du jour. Splendide. A l'occasion d'un arrêt, alors que j'avais pris de la hauteur pour quelques photos, j'avais échangé quelques mots avec un autre passager, Kosovar. Lui arrivait d'Albanie où il avait rejoint sa belle famille.

Mes plans ont un peu changé, envie de rentrer un peu plus tôt, de me poser 2/3 jours avant de reprendre le train-train quotidien. Finalement, une fois le billet d'avion du retour acheté, j'ai un peu regretté ... mais je reviendrai pour terminer ce que j'ai commencé et peut être filer sur le Kosovo.

Nous sommes 5 dans le mini-bus qui s'éloigne du Monténégro, un couple et 2 jeunes femmes seules. Le trajet est prévu durer 4h.

Poste fontière, côté Monténégrin chaque voiture fait l'objet d'une fouille en règle. Comme un symbole, la route qui sépare les 2 postes frontières n'est pas bitumée et les bâtiments côté albanais sont au diapason.

Dans ce no man's Land où tout se passe au ralenti, je suis surpris des véhicules dont la plaque est indiquée AL. La plupart sont des vieilles Mercedes 500SL, semblable à celles que j'avais vues à Casablanca. L'autre suprise est le nombre important de véhicule dont le volant est à droite.

Le passage de douane ne nous donne droit à aucun tampon, je suis déçu ! Nous avons à peine franchit la frontière que nous changeons de bus, alors que nous sommes à une station essence, le chauffeur du 1e bus ravitaille le second à l'aide d'un bidon.

Dans les 1e kilomètres, je croise plus de carrioles que lors des 20 jours précédents.

Les règles de circulation sont les mêmes qu'en Serbie et Bosnie, on double sur les lignes blanches et dans les virages. Mon chauffeur ne peut se passer de son téléphone, soit il l'a collé à l'oreille soit il textote à bout de doigts. Le voyage me semble interminable.

Tirana, enfin. A peine poser le pied au sol que l'autochtone à la gentillesse de me rappeler l'Inde

- taxi, taxi !!

Gledis, mon hôte m'a proposer les 3 alternatives que j'avais à ma disposition pour rejoindre le centre. Vu le prix dérisoire du taxi, je choisi ce dernier. La gare routière est une succession de petites échoppes, agences, café, et restaurants bien que j'hésite à employer ce mot à la vue des échoppes. Mais à aucun moment, je n'apercois de lieu où faire du change.

Après le dinar, le mark, l'euro voilà le lek, 1€ = 132 lek. Prix de la course 500L.

J'ai rendez-vous au café Europa dont le nom me sied à merveille pour cette dernière étape. Gledis à choisit cette adresse car l'appartement n'est pas facile à trouver.

-Gledis, i'm arrived

-Jm, I'm Just front of the café, have you à barman t.shirt ?

Gledis à + ou - 30 ans, barbu, il parle anglais un peu vite pour moi. Pour accéder à l'appartement, il faut entrer dans une cour, monter quelques marches pour déboucher sur une esplanade. Gledis me montre mon environnement, des goutieres qui fuient de partout, des câbles électriques qui pendouillent et me remémorent l'Inde, là encore.

- it's albania me dit-il

L'appartement est grand, est superbement bien situé mais les photos l'embellissent beaucoup. Gledis est venu 2 fois en France car il est réalisateur de film et avait un film à commercialiser au marché du film en 2016. Je lui parle de 1e plans, le festival d'Angers consacré aux 1e oeuvres, lui rêve d'aller à Clermont Ferrand. Savoir que ce type de festival sûrement inconnu de la plupart en France est aussi reconnu internationalement si loin de chez moi, me pousserait presque à chanter la marseillaise !

On se donne rendez-vous dans 1h, il doit revenir changer le flexible de double. Je trouve un petit resto au grand marché, "art and city café", le monsieur d'un certain âge faisant le service parle français. Il y a 4 tables à l'intérieur, un piano qui sera bientôt utilisé par ce que j'imagine être le fils ou le gendre de la patronne pour le plus grand plaisir de sa petite fille. J'aime la découverte d'une ville qui commence par ce genre de petits détails.

Gledis n'est pas revenu les mains vides, il m'à ramené quelques provisions, oeufs, charcuterie, brioche et eau minérale. Je suis gâté par mes hôtes en cette fin de parcours.

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Oh soleil, soleil ... pour un peu j'allumerai des cierges pour remercier les cieux. .. bon d'un autre côté, dire qu'il y en a qui sont encore septique sur le réchauffement climatique me laisse songeur.

1e jour, Bunk'art or not bunk'art

Je file au grand marché, ce que j'en ai aperçu hier doit être assez sympa sous le soleil. Des façades colorées, des halles flambants neuves, on semble loin du pays le plus pauvre d'Europe.... Jusqu'au coin de rue suivante.

L'appartement est idéalement placé, en plein coeur de la ville, à 2 minutes du grand marché et à 2 minutes de la place Scanderberg. Scanderberg est le grand héros albanais, pour toutes les batailles qu'il a mené contre les Ottoman au XVe siècle. La place est immense, et cerné par une multitude de bâtiments, culturels, religieux ou administratifs

A une de ses extrémités des bâtiments aux couleurs de l'l'Albanie, construits en 1930, abritent différents ministères. Je réfléchis à 2 fois avant de les prendre en photo, prenant tout mon temps pour sortir mon appareil tout en surveillant d'un oeil les plantons et policiers qui en surveillent l'accès ici et là.


Je tourne un peu en rond pour dénicher l'office du tourisme, les rues sont indiquées une fois sur 2.

Des itinéraires y sont proposés par thématique, musées, galeries, lieux de cultes et façades peintes à la manière de ce qui peut être fait ailleurs en Europe. Je décide de commencer par cette dernière théma, j'aurai ainsi l'opportunité de faire le tour de la ville et d'essayer d'avoir une vue d'ensemble. Néanmoins au regard de la boucle que je dois parcourir, je redoute un peu d'y laisser mes semelles.

Les 1e façades sont effectivement étonnantes mais l'usure du temps à abîmées nombre des suivantes. La circulation ne s'arrête jamais, l'occupation des trottoirs n'est pas en reste.

Les 2 roues sont plutôt absents dans cette effervescence, ce qui peut sembler étrange. Le nombre de voiture n'excédait pas les 2000 en 1990, elles seraient plus de 2 millions aujourd'hui. Quand aux auto-écoles, les officielles sont apparues à partir de 2010, ceci explique sans doute l'impression anarchique et animée des rues.

Tirana accueillant à elle seule 1 million d'habitants soit 25% de la population. Dans les plus grands carrefours, un agent de la circulation essaie tant bien que mal de fluidifier le trafic. Celui que je croise à sans doute des chromosomes de Louis de Funès ou Mr Hulot dans "Trafic". Les coups de sifflet s'enchaînent, je redoute qu'il s'étouffe. A moins que ce ne soit sa manière de respirer car les gestes ne sont pas en reste. J'assise à un ballet.

Les commerces sont en nombre et les cafés, lieu incontournable des Albanais, présent à tous les coins de rues. Le temps d'une pause, à peine installer, que le patron m'amène sans un mot le cendrier.

Où que j'aille, il est rare de faire 1 km sans rencontrer des travaux. A revenir vers Scanderberg, je tombe sur la cathédrale orthodoxe de la résurrection du christ. Inaugurée dans les années 2000, son architecture est surprenante et de nuit elle se pare de lumière bleu, rouge ... un peu grotesque.

La fin d'après midi va être les prémices de mon aventure avec Bunk'art.

Bunk'art, épisode 1

J'ai décidé dans un 1e temps de m'y rendre à pied mais le site est hors de mon plan. L'usage de l'anglais par les plus anciens n'est pas courant, la jeune albanaise à qui je demande ma route me renvoie à Scanderberg .... alors que j'en suit partit il y a peu près 1h.

Le bus va partir,

- bunk'art, bunk'art crie un homme muni d'un gilet jaune.

Je monte, m'installe. L'homme remonte l'allée du bus pour vendre le ticket au prix de 40 lek (132lek=1€). Je l'observe, les mains pleines de billets, de pièces, à chaque arrêt, l'oeil à l'affût, perspicace il identifie rapidement celui ou celle qui vient de monter. Quand le bus est bondé il se fraie un chemin avec autorité et bonhomie. Dans cette langue dont je ne comprends aucun mot, je l'imagine demander qui vient de monter. Il m'arrivera 1 ou 2 fois, de tomber sur une personne qui ne peut sans doute pas payer, malgré la modicité de la somme demandée. Mon homme en jaune ne dit rien, passe au suivant.

Alors que "Paradise Papers" vient de sortir dans l'Europe riche, je pense qu'on pourrait envoyer Bernard Arnault et ses petits copains venir prendre des leçons de civisme ici.

Les rues par lesquelles nous passons sont l'occasion pour moi d'apercevoir plus fréquemment un autre aspect de la ville, plus pauvre. Des baraques en bois en guise de commerce, au pied des tours des détritus ça et là.

La nuit est tombée, nous sommes partis depuis 15 min ou plus quand j'ai l'idée de regarder dans le petit futé, les horaires d'ouvertures ..... le site est fermé, j'avise un arrêt descend, recherche un bus allant dans l'autre sens et me revoilà reparti. Les choses ne se passent pas tout à fait comme je l'attendais. Je repasse à nouveau devant cette entrée de parking ... voyons tout à l'heure, elle était à ma droite ou à ma gauche ? Le temps de réfléchir, ce sont d'autres "repères" qui me sont familiers! La fatigue aidant, je me surprends à avoir des doutes sur mes facultés mentales et d'orientation. L'affaire se précise, nous ne sommes plus que quelques uns quand J'aborde le conducteur

- do you go to the center ?

Je ne comprends pas ce qu'il me dit mais perçoit qu'eux non plus ne m'ont pas compris ! Je lui montre la carte

- gender !

J'apprends mon 1e mot Albanais mais la mimique qui accompagne ce gender est éloquente, il semble dépité.

Oh les gars, vous n'allez pas me laisser à plusieurs kilomètres du gender ?

Voit-il le désappointement naître sur mon visage ? Le sien se fait d'un seul coup plus rassurant. Il me fait signe de m'asseoir et à son expression je crois comprendre que c'est mieux ainsi vu le temps que ça va prendre.

2 arrêts plus loin, le moteur est à l'arrêt ... quand il me fait signe de me lever prestement pour monter dans le bus derrière lequel nous sommes stationnés. Une brève poignée de main et je suis repartit. Ca y est, j'ai compris, le bus fait une boucle. Comme il emprunte des sens unique, lors de mon 1e arrêt j'ai repris un bus qui allait dans la direction dont je venais!! Je n'ai pas vu Bunk'art, j'ai passé près d'1h30 dans le bus et je suis mûr pour remplacer au pied levé le vendeur de ticket.

Fin de l'épisode 1

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Jour 2, vous n'auriez pas une paire de lunettes ?

Direction le musée national d'histoire, j'y suis à 9h pour l'ouverture mais les portes sont closes. Un gardien d'un certain âge, assis sur sa chaise m'observe du coin de l'oeil. J'oublie l'usage de l'anglais mais je comprends néanmoins que le musée ouvre à dhjztë. Soit 10h. Allez savoir pourquoi je lui demande la direction pour aller voir les mozaiques de Tirana quand il me suffit de regarder Google maps pou savoir qu'elle direction prendre. Bien entendu, il ne comprend pas. Je lui montre ma carte, lui me montre ma tête ... !!??

Un éclair ... mes lunettes!! Le pauvre homme ne voit rien, moi non plus, elles passent de nez en nez suivant la non conversation que nous avons. .. en vain. Désireux de me renseigner, il demande au groupe de jeunes qui attendent à côté. Ils ne voient pas non plus, mais mes lunettes ne peuvent pas les aider. A l'allure ou vont les choses, je me dis que le musée ne va pas tarder à ouvrir.

J'ai enfin une direction .... qui me laisse septique ... je pars, fait 100M, sors mon smart phone et bifurque de 45°.

La pluie s'est invitée, j'investis dans un parapluie que j'achète à un petit vieux au coin de la rue. Les 500 demandés se sont transformés en 1000lek, le prix touristique probablement mais quand on prend l'eau de toute part, la négociation est à l'avantage du vendeur ! !

Retour au musée, il m'aura fallu plus de temps pour trouver les mosaïques que les voir. Le musée relate l'histoire, compliquée, de l'albanie de l'antiquité au génocide communiste et se trouve être assez intéressant. J'ai loupé la pièce la plus importante de l'antiquité, la déesse de Butrint, à Butrint se trouve un des plus beaux site archéologique des balkans.

Dans la partie consacrée au moyen âge, c'est cette fois-ci l'épitaphe de Gllavenica, un drap de soie de lin et d'or brodé du 14e représentant le saint suaire que je ne trouve pas.

Là encore je vais prêter mes lunettes à la femme à qui je demande de l'aide. Pendant qu'elle m'accompagne devant ce magnifique drap, j'apprends que sa soeur a étudié en France le français afin de revenir l'enseigner ici.

Bunk'art, épisode 2

Le bus m'arrête juste devant Bunk'art, bien qu'il n'y ait aucun arrêt.

Une masse de terre de 3, 4m de haut, sur la droite un début de tunnel obstrué par une double porte métallique fermée. Une flèche "Bunk'art " et rien d'autre. Je fais les 100 pas, tergiverse, ne sachant trop que faire. Un jeune venant à ma rencontre "attaque" la masse de terre pour monter dessus et disparaît de ma vue. Je lui emboîte le pas, à mi-pente j'aperçois le ventre de la bête, pas loin de 100M de terre avant de tomber sur un mur derrière lequel se trouve une cité. Je redescend.

Alors que je m'apprête à repartir, j'entends la porte métallique se refermer. 2 soldats viennent à ma rencontre.

-Dites donc messieurs vous ne sauriez pas me dire si l'entrée de bunk'art est bien ici et quand il sera ouvert ? En anglais c'est presque la même chose.

- c'est tout à fait ici mais c'est fermé ce jour, revenez demain.

Fin de l'épisode 2!

De retour en ville, je tombe sur bunk'art 2, on y accède via l'entrée d'un bunker dans le quartier des ministères. Un couloir étroit, froid, condamné par plusieurs portes et qui abritent des pièces qui retracent le temps béni de l'état communiste en Albanie, le plus dur d'Europe.

Il est assez cocasse aujourd'hui de voir le matériel utilisé pour que la population puisse s'adonner à l'espionnage de ses voisins et ainsi les dénoncer aux autorités. Le système mis en place permettait une surveillance constante, il en était de même pour tous les étrangers qui venaient visiter le pays. Bunk'art 2 n'est pas inintéressant mais petit.

Le soir venu, je passe rive gauche. Tirana est séparée en 2 par la Lana.

La rive gauche, Blloku ou l'ex - bloc est une partie de la ville, qui du temps du communiste pur et dur d'Enver Hoxha, était réservé à l'élite et interdite au peuple. A la mort de Hoxha et à la chute du communisme qui s'en est suivi en 1991, les albanais se sont rués dans ce quartier pensant y découvrir monts et merveilles.

Aujourd'hui, ce pâté de rue est devenu le quartier chic de Tirana, des restaurants, cafés branchés, des boutiques chics, des boîtes de nuit.

Les rues sont arborées, les trottoirs pavés. J'y croise de ravissantes élégantes, messieurs en costard et voitures chics.

Le quartier est assez restreint, un carré de 1km2 environ au delà duquel on retrouve l'autre Tirana avec tous ses petits commerces, ses maisons pas terminées ou dans un état proche de l'insalubrité et ses pauvres. Cette une ville étonnante, vibrante, bruyante et décidément très séduisante.

Jour 3, Bunk'art inside

Enfin j'y suis. Je connais le chemin par coeur et pour cause. A l'entrée un garde me fait un salut militaire faute de pouvoir échanger en anglais. Je franchis la porte métallique et entre dans la bête.

Pas loin de 100M de tunnel sous la terre. Ce site isolé dans la banlieue nord de Tirana est toujours sous contrôle de l'armée. Ce bunker à été transformé en musée en 2014. Construit en secret entre 1972 et 1978 il était conçu pour accueillir l'élite du pays en cas de conflit nucléaire ou d'invasion. Le bunker compte 106 pièces, la moitié est ouverte au public. J'y suis seul pendant la plupart de ma visite. Les pièces retracent l'histoire entre la 2nd guerre mondiale et la fin du communisme.

Sous le règne d'Enver Hoxha, l'albanie à construit 700.000 bunkers dans tout le pays.

La visite est la plus intéressante de mon court séjour.

Je rentre à pied parcourant toute la banlieue nord et l'entrée de Tirana.

Je poursuis par la galerie nationale d'art puis me balade dans Blloku.

Jour 4, this is the end

Gledis à récupéré deux voyageuses aux derniers moments, il avait accepté que je parte plus tard, il me faun libérer lapart qun pied levé.

Je retourne manger au restaurant dans lequel je m'étais arrêté le 1e jour. Après l'averse matinale, le soleil est de retour, le marché central est un lieu piéton à l'écart de la circulation. On y croise la mixité que je me suis faite de Tirana ces derniers jours. Des jeunes femmes chics et séduisantes et une population beaucoup plus aux abois. Sur le rond point quelques échoppes populaires dans lesquelles les gens attablés mangent une nourriture copieuse accompagnée de quelques choppes de bières, quel contraste avec les restos plus chics qui encerclent les halles.

Gledis à toujours le même sourire bienveillant, je lui reparle de 1e plans et j'espère qu'il sera sélectionné s'il y présente un film.

Le soleil est de retour comme pour me faire regretter de partir, même sous la pluie je serais partit avec regret. Je suis arrivé avec des idées préconçues sur beaucoup de chose. Tous les Albanais ne ressemblent sans doute pas à Gledis mais beaucoup de ceux rencontrés sont aux antipodes de l'image qu'on nous donne de ce pays.