Nous voilà aux portes du désert australien ; Port Augusta, grand carrefour de l’Australie. Premier free camp et pas des moindres, nous sommes sur la propriété de Doug un australien bien atypique. Ce vieil homme répertorie sur un carnet chacun des voyageurs s’arrêtant de chez lui. Allemand, australien, français, italien… de tout âge et de tout horizon croise sa route. Doug aime aller à la rencontre des gens et partager avec eux son histoire. Ainsi, il nous raconte sa jeunesse, ses voyages mais surtout ses aventures avec les kangourous. Dès notre réveil, Doug vient nous chercher, une dizaine de kangourous sauvages sont là et attendent leur petit-déjeuner. Notre hôte a fait partis de ces australiens en quête de virilité aimant créer des combats de boxe avec les kangourous. Il nous montre des articles de journaux et des photographies parlant de ses exploits. Il nous raconte les mâles dominants, leur force et leur caractère de feu. Au-delà de ces rapports conflictuels avec les kangourous, Doug entretien un lien privilégié eux. Il a même été surnommé « l’homme qui dansait avec les kangourous ».
Kangourous rencontrés, Pricillia, queen of desert visionné (impératif avant une traversée du désert selon Grame et Daina), 140 L d’essence, 40 L d’eau et un paquet de Tim-Tam, nous somme parés pour les 550 km qui nous mèneront à notre première étape : Coober Pedy.
Sur la route, une sensation nouvelle. Celle d’avoir l’infini devant soi. Après les paysages vallonnés de la Mc Larenn Valey, nous voilà bien dépaysés. L’horizon est à perte de vue. Impossible de décrire cette sensation. Pendant des kilomètres et des kilomètres, aucune voiture et si jamais tu en croises une, chaque conducteur se salue, comme pour se souhaiter bonne chance. Petit stop avant Coober Pedy ; le lac Eyre. Mesurant 144km de long pour 77km de large, ce lac de sel est le plus grand d’Australie. Sa couche de sel est estimée à environ 400 millions de tonnes. Au milieu de ces plaines arides, la blancheur du lac Eyre surprend et mérite bien une pause photo.
Enfin nous voilà arrivés à Coober Pedy, « terrier de l’homme blanc » (kupa piti) en aborigène. Cette ville isolée doit son maintien aux opales dont elle fournit 70% de la production mondiale. C’est donc, muni de casque de chantier que nous nous aventurons dans une ancienne mine transformée en musée. Nous découvrons également les habitations troglodytes typiques de la ville pour se protéger des fortes chaleurs pouvant atteindre jusqu’à 50°. Eglises, restaurant… La plupart des bâtiments sont faits sous terre.
Tout droit venu de la côte et d’endroit peuplé, cette première ville surprend. Et cette première rencontre avec le peuple aborigène aussi. Nous connaissions les rapports plutôt conflictuels entre australiens et aborigènes, mais nous étions loin d’imaginer une telle situation. Un peu partout dans la ville, des groupes d’aborigènes installés au sol, attendant que la journée passe... Nous ne sommes pas à l’aise. Nous avons les réels sentiments que les aborigènes sont comme des pestiférés.
Coober Pedy, c’est également notre première rencontre avec les mouches. Ce n’est pas un mythe, le désert australien sans filet relève d’un réel miracle !
C’est avec deux petites opales, et deux pierres portent bonheur offertes par la vendeuse que nous reprenons la route. Prochaine étape, le Red Center. Ici, c’est une étendue de désert au sable, sols, rochers et montagnes rouges qui nous attendent. Ces lieux sont habités par le peuple aborigène depuis près de 30 000 ans, soit bien avant que le premier Européen prenne son bateau et décide d’aller s’y établir. Les lieux sont ancrés de traditions ancestrales, dont le symbole premier est sûrement Uluru.
750 km de plus au compteur et enfin Uluru en vision. Monolithe rouge de 348 m, 3,6 km de long et 2,4 km de large au milieu d’une plaine désertique. C’est le plus grand monolithe du monde.
En 1958, Uluru prend un nouveau nom, celui d’Ayer Rock. Nom donné par les australiens qui en font un parc national et se l’approprie. Le peuple aborigène perd alors tout droit sur ses terres sacrées. Il faut attendre 1985 pour qu’Ayer Rock reprenne son nom premier, qu’australien et aborigènes commencent à travailler ensemble et qu’une coopération nouvelle commence. Aujourd’hui, sur les 9,5 km de marche qui entourent Uluru, nombreux spots sont des lieux sacrés et donc fermé au public. D’autre ne peuvent ; quant à eux, être photographié afin de ne pas déplacer les esprits à travers le monde.
Cette marche nous impression par la force qui se dégage de ce monolithe, par sa beauté et son harmonie. Pour la première fois, nous découvrons l’art rupestre ; pratiquer sur des parois ou du bois, il met en avant le caractère sacré de la terre. Nouveau spectacle, celui du coucher de soleil. Majestueux. Uluru prend vie et passe de rouge feu à rouge vif en quelques instants.
Après ce spectacle, retour à notre free camp. Le même que la veille (le dernier avant l’entrée du Parc National). Là-bas, nous avons une jolie petite vue sur le désert avec tout au loin encore ce monolithe si impressionnant. Mais surtout la présence de notre premier dingo. Un petit boiteux qui viendra nous rendre visite plusieurs fois.
À quelques kilomètres de là (46km c’est riiiiiien du tout), le Kata Tjuta signifiant « beaucoup de têtes » en aborigène est un lieu fascinant. Alors qu’Uluru ne forme qu’un seul et unique bloque Kata Tjuta présente 36 dômes irréguliers. Entourés de ces grès rouges nous arpentons la vallée des vents, la gorge d’olga… C’est un paysage tellement différent de ce que nous avons l’habitude de voir.
Et nous ne sommes pas au bout de nos peines : direction Kings Canyon !
Après une soirée désertique un peu trop arrosée, une petite négociation pour que Léa sorte du lit… C’est parti pour 4h de marche !
Le Watarrka National Parc est parsemé de point d’eau naturel permettant la survie de plantes, oiseaux et reptiles. Avec ses parois de 100 m de haut, le Kings Canyon nous coupe le souffle. Nous découvrons de nouvelles plantes, des traces de créatures marines disparues… Nous sommes ailleurs. Entre les crêtes, la gorge, le jardin d’Eden et son lac… Le Kings Canyon est certainement la plus belle des rando que nous avons faits, et que nous ferons en Australie.
Mine de rien, et des litres et des litres d’essences plus tard, nous nous rapprochons d’Alice Spring, l’unique véritable ville du Red Center. Mais avant ça, 150 km de gravel road (route de terre). Pendant 150 km concentration intense, ça secoue, ça tourne. Et puis nouveau paysage, après les plaines désertiques, les MacDonnell Ranges. Une chaîne de montagne qui fut jadis aussi imposante que l’Himalaya. Nous continuons d’en prendre pleins les yeux.
Alice Springs est une toute petite ville, une rue centrale plutôt chaleureuse, du street art et surtout un camping pas cher avec le luxe : toilettes et douche chaude. Le bonheur après 10 jours de route sans aucune salle de bain à l’horizon. Petite recherche rapide aux alentours de la ville pour trouver un travail, mais sans succès. Nous continuons donc la route vers le Territoire du Nord.
Le centre rouge prend bientôt fin pour nous, il ne nous reste plus qu’une étape ; Devil’s Marbles Conservation Reserve, « les billes du diable ». À l’abord de ces gros rochers sphériques en granite rouge, même les stations-services deviennent mystérieuses à l’image d'une d'entre elle remplie d’ovni et d’extraterrestre. C’est au coucher du soleil que nous vadrouillions au milieu de ces billes au rouge vif, leur forme est si parfaite et leur position réfléchie que toute sorte de scénario s’offre à nos esprits sur leur provenance. Alors que la science donne pour origine à ce phénomène la compression de lave fluide à l’intérieur de l’écorce terrestre, pour le peuple aborigène, il s’agit du mise en scène du serpent arc-en-ciel, être mythologique mi serpent mi dragon, il est considéré comme un habitant permanent contrôlant l’eau, la source de la vie la plus précieuse.
Tenant Creek – deuxième ville la plus importante du Red Center et porte du désert – des paysages plus vert et plus peuplé s’offrent à nous. Les voitures d’en face répondent de moins en moins à nos saluts… Nous approchons de la civilisation. Le désert a été pour nous une nouvelle facette de l’Australie, et nous l’attendions. Nous avions hâte de découvrir ces paysages nouveaux et nous n’avons pas été déçus du voyage. Premier mirage, premiers chevaux et vaches sauvages (et chameaux aussi, mais écrasé au bord de la route) premier paysage lunaire, premier ciel étoilé à couper le souffle, première voie lactée, premiers pleins d’essence à 2$ le litre, premier contact avec une nouvelle culture… Premier désert. Un road trip hors du commun.