Données sur l'étape du jour : 15,34km - 901m D+
La nuit fut reposante. La 4e fondue ayant eu raison de nous, nous nous étions couchés assez tôt. Les 9h de sommeil nous permettent de reprendre les forces nécessaires a l'étape du jour.
Nous sommes rodés maintenant. Nous faisons nos sacs rapidement, nous assurons tout de suite du bon séchage des chaussures pendant la nuit, remplissons les gourdes et faisons chauffer l'eau pour le thermos qui nous fournira du thé ou café chaud pour les pauses.
Vers 10h, nous nous mettons en route. Nous avons abandonné le tracé de la GTJ pour aller grimper au sommet du mont de La Dole en Suisse qui culmine à près de 1700m.
Le début du tracé nous fait passer au pied du sautoir a ski ou la dernière épreuve des Jeux Olympiques de la jeunesse a lieu. Des jeunes de 15-18 ans s'élancent et parcours 70-80m dans les airs. Ils cherchent à voler le plus longtemps possible, à atteindre la marque rouge la plus basse dans la pente dans l'espoir de se hisser sur la plus haute marche du podium et de faire résonner l'hymne de son pays dans la vallée.
Nous regardons quelques sauteurs et sauteuses puis reprenons la route. Rapidement, nous atteignons le bas des pistes des Rousses et ses départs de télésiège. Le parcours va longer une piste verte dans un premier temps. Du bas le mont est très visible. Il n'est qu'à une heure et demie de marche environ, mais paraît tout de même assez loin. On doit tout d'abord passer un col pour ensuite faire son ascension par le côté nord à flanc de crête.
Le mont est surmonté d'une immense sphère blanche que l'on prend tout d'abord pour un observatoire astronomique. Il domine les alentours. C'est clairement le plus haut mont du coin et on a hâte d'être en haut déjà.
Ça grimpe bien dès le début. À découvert tout d'abord le chemin nous mène rapidement dans la forêt et le gradient fortement. Nous décidons de couper à travers la forêt pour s'affranchir des pistes. La neige est profonde et la pente est très forte. Nous peinons à nous hisser en haut de cette pente. Je n'avais pas enfilé mes guêtres dont l'élastique fatigue un peu (après 30 ans de bons et loyaux services), car je n'imaginais pas qu'on rencontrerait autant de neige. En mois de 5 min, j'ai de la neige dans les chaussures et elles resteront humides toute la journée. Un peu contrarié par cette situation je bougonne un poil dans ma barbe, mais ne peux en vouloir qu'à moi même.
D'ici, on voit le reste du chemin à parcourir. La voie est claire et dégagée, mais se révèle très pentue sur la fin. Chaque pas est une marche glissante sur laquelle il faut s'appliquer. La route est en devers et met nos chevilles a rude épreuve. Complètement gelée et soufflée la neige ne casse pas sous l'appui et contraint nos pieds a maintenir cette position délicate et un peu douloureuse.
Une fois en haut, nous faisons face à une dernière difficulté avant de pouvoir longer la crête menant au sommet. Un escarpement rocheux sur la crête nous sépare en effet de la phase finale. Marvin et moi déchaussons pour grimper sans trop de soucis. Martin lui y va en raquettes. Je ne sais pas trop comment il trouve l'espace suffisant pour poser ses grands patins, mais parvient au sommet avant nous. D'ici la Dole est à portée de main au bout du chemin longeant la crête.
Le vent est plus fort ici et nous ne nous arrêtons pas avant d'être au point culminant.
En haut, et comme vous pouvez vous l'imaginer, la vue est incroyable. Une table d'orientation nous permet de localiser les massifs et on se prend compte qu'on peut voir une bonne partie des Alpes. On aperçoit même le lac du Bourget du côté de Grenoble, le lac d'Annecy, tous les contreforts des Alpes Côté suisse, Genève, le lac Léman et bien sûr au milieu le mont Blanc.
Chose curieuse lorsqu'on est en bas ou proche du mont Blanc, il est difficile de le reconnaître. Tous les monts paraissent a peu près de la même taille lorsqu'on est proche. D'ici le doute n'est pas permis. Il est vraiment plus haut que tous le reste. C'est le patron.
Nous nous abritons derrière la station du sommet pour prendre le thé au soleil et redescendons par le flanc sud.
Ce que l'on prenait pour un observatoire au sommet est en réalité un radôme, une immense sphère blanche en fibre de verre imperméabilisée renfermant un radar surveillant de trafic aérien suisse. Sa forme le protège ainsi du climat hostile en haut du mont.
En parlant de climat, on peut dire qu'on est verni. Pas un seul nuage depuis le début sauf le deuxième jour en arrivant à Mouthe, et encore ils annonceront les 20cm de neige fraîche ayant fait notre bonheur tout le reste de la semaine. On ne pouvait pas rêver mieux. De paroles de locaux, c'est très rare. On imagine mal faire nos randonnées dans le brouillard, le vent, la pluie ou la neige. Pour nous, la GTJ rime avec beau temps.
La descente est un vrai plaisir. Le sentier qui longe la crête plonge dans une forêt pour très rapidement déboucher dans une grande vallée parsemée de petite colline elle-même agrémentée de bosquets de sapin ou de bouleaux. Le balisage est peu visible, mais on connaît la direction globale à prendre. Du coup, tous les chemins sont possibles et chacun y va à son rythme et fait son itinéraire.
Nous nous retrouvons plus bas avant de remonter légèrement dans la forêt. On décide de s'arrêter manger au soleil sous quelques arbres qui ont les pieds au sec. On prend bien 45min de pause à profiter pleinement du moment. Si certaines pausent, midi se sont déroulées dans le silence et la contemplation, nous bavardons beaucoup aujourd'hui.
Nous nous essayerons aussi un peu à la gymnastique en tentant chacun notre tour au salto arrière. Sans succès bien sûr, sauf si l'objectif était le ridicule auquel cas on n’est franchement pas mauvais.
Nous reprenons la route. Il reste environ un tiers du parcours.
On arrive rapidement sur un parking permettant aux badauds de se garder pour faire l'ascension du mont d'où nous sommes descendus. On coupe à travers une forêt qui surplombe un cours d'eau en contrebas. On suit un goulet qui vient alimenter une plus grande vallée ou serpente la rivière en question. La neige est épaisse et forme encore une fois des coussins qui recouvrent les rochers autour du cours d'eau presque gelé. Un vrai bonheur, aucune trace. On se sent privilégié et seul au monde.
Le tracé remonte très très sec à flanc de la forêt du massacre sur laquelle est accroché notre refuge de l'autre côté. La face est exposée au sud et la neige change. Elle est beaucoup plus lourde et mouillée. Cela ne facilite pas l'ascension. Je remarque que les brindilles posées sur la neige se sont enfoncées de 5 bons centimètres. Leurs seuls poids à suffit à creuser ces mini crevasses. Imaginez le poids d'un homme, notre portance est très limitée.
Lorsque la neige fond comme ça, elle crée des sillons, des rigoles dans lesquels la neige s'écoule lentement vers le bas. Irrémédiablement attirer pas le bas les sillons se rejoignent pour en creuser de plus larges qui eux-mêmes se déversent dans d'autres. C'est rigolo d'imaginer ce circuit d'eau invisible en surface dont la présence est seulement trahie par l'apparence ridée qu'il donne à la neige. C'est comme si elle vieillissait en fondant. La neige fraîche c'est comme une peau de bébé toute douce, légère et brillante. Là, on est sur peau fripée et ridée qui disparaîtra bientôt.
Arrivée en haut de la forêt notre chemin est barré. La zone est interdite à tout promeneur pour protéger le biotope. Nous devons donc faire demi tour pour récupérer plus loin le tracé de la GTJ. Un détour d'un kilomètre qui nous fera prendre un GR temporaire qui empiète sur une piste de ski de fond. Cette portion ne sera pas très fun, mais on rattrapera rapidement un chemin plus adapté.
La dernière portion serpente dans les bois à la façon d'une piste de luge ou de bobsleigh. La trace découpe la neige épaisse en un ruban de la largeur de nos raquettes. Le pas est rapide, nous avons hâte d'arriver.
Le refuge est super. C'est une grande bâtisse toute en bas. Constituée d'une unique pièce haute de plafond avec une mezzanine où se trouve le dortoir. Au centre de la pièce du bas trône une immense cheminée en pierre surmontée d'une hotte en métal débouchant 4m plus haut dans le plafond.
Nous prenons une bière au soleil dehors avant de rentrer nous changer et mettre nos affaires à sécher. La soirée s'annonce plaisante. Nous lisons, jouons et buvons du vin chaud. Le tout bercé par une petite musique house distillée par notre hôte avec qui le courant passe déjà plutôt bien.
Je me mets pour ma part à la rédaction de cet article. J'ai pris mon habitude et s'il est toujours difficile de me lancer je le retrouve immédiatement plongé dedans et l'écris d'une traite. Je me rends compte par ailleurs que leur taille augmentée de jour en jour. Je pense que je suis de plus en plus à l'aise avec l'exercice qui mettait jusque là complètement inconnu. Je me prends presque à aimer ça.
Demain, on retrouve la GTJ, la vraie !