Kalimera!
Tout début janvier, j'arrive en Grèce, à Igoumenitsa après une traversée d'environ 6 heures, depuis Brindisi dans les Pouilles.
Le ferry...et arrivée à Igoumenitsa. La Grèce, c'est toujours l'Europe, mais pour moi la sensations d'éloignement et surtout le dépaysement est cette fois tangible: l'écriture est différente, il faut s'habituer à ces nouveaux codes, la vie apparait d'emblée moins chères pour la plupart des achats du quotidien (sauf les cafés!).
Aujourd'hui, après 70 jours et 3640 km depuis le départ de Riunoguès, je suis à Kalamata, au sud du Péloponnèse, assez proche de Gythio, d'où je prendrai dans quelques jours le ferry pour la Crète,
Eh oui, mon, itinéraire prévu a bien changé...
je pensais traverser assez rapidement la Grèce en suivant l'Eurovélo 8 sur la côte sud du Golfe de Corinthe jusqu'à Athènes puis prendre un ferry pour Kios et Izmir... C'était sans compter sur les petits soucis matériels, les rencontres et aussi le gros coup de cœur ressenti d'emblée en arrivant dans ce pays, qui m'a donné envie d'y passer plus de temps pour en découvrir les richesses naturelles et culturelles et savourer la qualité de vie pour nous autres voyageurs: les routes sont souvent superbes et tranquilles , et les bivouacs faciles à trouver en tous lieux et plus spectaculaires les uns que les autres.
En faisant ce choix de rouler plus longtemps en Grèce, je sais que si je poursuis dans mon objectif d'aller vers le Pamir, il faudra réduire un peu le temps de route en Turquie...
Je peux diviser cette longue étape grecque en deux:
De Igoumenitsa à Patras, je roule seul, essentiellement en suivant la côte et sous un ciel bleu dominant et de douces températures.
Puis de Patras à Kalamata, je roule avec Nathalie et Jonathan, deux jeunes français rencontrés alors qu'ils pique-niquaient sur le bord de la route peu avant Patras.
Igoumenitsa est une porte d'entrée importante en Grèce, tout près de l'Albanie voisine. C'est une petite ville balnéaire dans laquelle je ne m'attarde pas plus de la nuit d'arrivée, et je prends la direction du sud en suivant l'itinéraire Eurovélo8, qui sur toute sa longueur en Grèce n'est vraiment indiquée et un peu matérialisée que durant quelques kilomètres!
Très vite ce qui m'apparait en Grèce, c'est la rareté de l'horizon tant ce pays est entourés d'une multitude d'îles plus ou moins importantes, touristiques et connues, certaines minuscules et très peu ou non desservies, d'autres beaucoup plus grandes accessibles selon les cas par bacs ou ferry, voir même par ponts.
Durant cette première semaine en Grèce, c'est le grand beau temps et des températures printanières, qui me permettent même de me baigner à deux reprises dans une eau fraiche mais pas glaciale! La deuxième fois, à Corinthe, c'est davantage l'ancienneté de la dernière douche que l'envie de nager dans l'eau fraiche qui me pousse à me jeter dans la mer!, après avoir vu que des douches en bord de plage étaient en fonctionnement malgré la saison hivernale.
Après les iles de la Méditerranée et le sud de l'Italie ou il était souvent compliqué de trouver un lieu pour passer la nuit, le bivouac en Grèce est des plus naturel, il n'y a pas besoin de se cacher (même s'il est plus agréable de ne pas trop attirer l'attention), et les espaces appropriés ne manquent pas, que ce soit en bord de mer ou plus en arrière pays. Il est également très facile de faire du feu, il y a du bois sec partout. En trois semaines, je n'ai vu que deux fois un panneau d'interdiction de camper!
Bivouac et vitamine C en open bar!Au bord des routes alternent les champs d'oliviers, d'orangers et autres agrumes, et même parfois...des mûres! Coté mer se succèdent des entreprises de piscicultures et criques inaccessibles par voie terrestre, du moins en voiture! En vélo, c'est parfois un peu acrobatique et la remontée au petit matin est bien "casse pattes", mais ça vaut la peine!
Eurovélo8 !!!Les nuits sont fraiches, froides parfois...et le matin, la sortie de la tente est un peu une épreuve, surtout pour les mains quand il faut plier la tente et ranger les affaires. Chaque soir j'essaie de repérer le meilleur endroit pour profiter des premiers rayons du soleil...mais ça ne marche pas à tous les coups!
Il y a aussi beaucoup d'humidité, et ma tente me parait défectueuse car vraiment détrempée le matin, comme imbibée par l'humidité ambiante, m'obligeant chaque jour à passer un long moment à attendre qu'elle sèche lorsque je fais la pause de midi.
Chercher le bivouac...rencontrer les locaux...et le lendemain...faire sécher la tente! Ces conditions anticycloniques hivernales offrent des couleurs particulièrement intenses et une impression de grande pureté de l'air, de contrastes ultra photogéniques, mais parfois de bonne heure, il faut faire avec la brume, le brouillard avant de découvrir un paysage qui parait irréel!
c'était vraiment le cas à.....où j'arrive le jour de l'épiphanie et du Noël Orthodoxe. Tout est fermé ce jour férié...et je me retrouve à manger des chips et gâteaux secs, pas vraiment un repas de fête!
Cette brume qui ajoute de l'esthétique au tableau!C'est après cette petite ville et en suivant toujours la direction de Patras que je rencontre Nathalie et Jonathan. Après quelques phrases en anglais...nous découvrons que nous pouvons parler en français avec ce jeune couple!
Tous deux viennent de terminer leurs études, et bravant les conseils de leurs parents qui les incitent plutôt à ne pas trop traîner pour commencer à cotiser s'ils veulent un jour avoir une retraite (!), ils ont décidé de partir voyager, avec comme seule date limite pour le retour, l'épuisement de leur pécule économisé durant leurs études! On se doutera que côté conseils...je ne suis pas vraiment du même avis que leurs parents😂
Après un RV manqué pour un bivouac commun (dont je profite finalement seul donc, pour un somptueux coucher de soleil sur la terrasse d'un bâtiment abandonné)...nous nous retrouvons le lendemain sur la route...devant un LIDL! et continuons ensemble vers Patras.
L'idole des cyclo, l'Atelier mécanique...et arrivée sur PatrasL'arrivée sur Patras est vraiment impressionnante. On découvre peu à peu en s'approchant, ce viaduc splendide et aérien venu remplacer il y a quelques années le bac afin de traverser en cet endroit le golfe de Corinthe....enfin, pas tout à fait remplacer, car un service de bac continue en parallèle, probablement pour les poids lourds...et gratuitement pour les cyclistes, leur évitant un escalier particulièrement raide pour rejoindre le viaduc et le traverser en mode piéton...et leur offrant en prime une vue exceptionnelle, coucher de soleil en arrière plan.
Je reste deux jours à Patras, plus grande ville du Péloponnèse, sans intérêt majeur mais assez agréable pour se balader dans le centre dont les rues sont majoritairement piétonnes.
Dormir dans un lit, cuisiner debout, faire de la lessive, prendre des douches (chaudes), veiller, regarder un peu la TV etc...sont autant de petites choses bien agréables après (et avant) plusieurs jours nuits en itinérance et bivouac. Pour autant, je n'abandonne pas le vélo, bien utile (lais en mode allégé!) pour rejoindre le centre ville (un peu éloigné du Airbnb).
PatrasJe retrouve le temps d'une après-midi Jonathan et Nathalie, nous sympathisons et ils me proposent de faire un bout de route ensemble. Mon itinéraire change une fois de plus: alors que je pensais poursuivre vers le sud du Péloponnèse pour rejoindre la Crête, je vais finalement faire le tour du Golfe de Corinthe, en commençant par la rive Nord pour aller vers Delphes, puis Thèbes et enfin arriver à Corinthe.
Lorsqu'ils m'annoncent le nombre de km et le temps qu'ils prévoient pour cet itinéraire, je prends un peu peur...j'ai l'impression que ça va être vraiment très (trop?) long et lent...mais c'est sans compter sur les dénivelés, les temps pour visiter et surtout l'inertie inhérente au fait de voyager à plusieurs!
De nouveau nous prenons le bac et entamons cette partie de route, d'abord en suivant la côte, puis après une bonne journée, et nous orientons vers le nord Est, la montagne...le froid...Delphes!
J'apprécie beaucoup après ces premiers jours en Grèce à rouler seul, la compagnie de ces deux jeunes. Nos sujets de discussion sont des plus variés, la politique, la société, la lecture etc...mais surtout bien sûr, le voyage à vélo. Et puis, et surtout nous rions beaucoup!
En voyageant ainsi avec des gens différents, je m'enrichis de leurs choix et compétences. Le choix de Jonathan et Nathalie de visiter quelques sites archéologiques, leur compétence pour trouver des itinéraires en utilisant au mieux les applis là ou de mon côté j'aurais parfois tendance à suivre la route principale! A l'inverse, ils n'ont semble-t-il jamais eu vraiment d'occasion de "vrai beau bivouac choisi avec du feu etc etc...", et là, je pense leur avoir transmis le goût de ce temps pour moi incontournable et essentiel du voyage à vélo.
Pour eux, c'est une première, et ils se sont décidés peu avant le départ, ont donc dû acheter du matériel à commencer par des vélo d'occasion. Et si Jonathan semble avoir fait plutôt une bonne affaire...Nathalie galère pas mal avec un vélo peu adapté, et qui chaque jour ajoute un nouveau bruit...frottement, grincement et cliquetis inquiétants!. Mais "bonant malant", on avance doucement vers Delphes, profitant le premier soir d'un magnifique bivouac sur la plage, et le deuxième, dans un champ d'olivier, au pied de la longue montée vers le site archéologique.
Chaque soir, dés les tentes montées nous rassemblons du bois pour des feux de camp, c'est un vrai plaisir pour cuisiner et profiter de la lumière et de la chaleur pour un temps de veillée.
La route qui monte vers Delphes est splendide, chaque virage offre une vue différente alors que nous nous éloignons pour quelques jours de la mer pour trouver une atmosphère plus montagneuse, en découvrant au loin d'abord, les sommets enneigés.
On s'éloigne de la mer...on arrive à Delphes...on s'approche de la neige!Delphes, le village est vraiment un piège à touristes. Tout y est hors de prix!
Mais quelque centaines de mètres plus loin, c'est l'entrée dans le site.
Sur certains sites, la taille des parkings et des emplacements réservés aux bus laisse imaginer la foule en période estivale...et rien que d'imaginer la visite sous un soleil de plomb me donne mal à la tête!
Delphes.
Pour moi, ce qui rend le lieux si beau, c'est son implantation dans ce paysage montagneux, l'ensemble construction/nature donnant une impression de parfaite harmonie.
A cette saison, le prix d'entrée des sites nationaux en Grèce est divisé par 2,5 et gratuit pour les ressortissant européens de moins de 25 ans, ce qui réjouit mes amis qui pourront à ce rythme continuer à jouer les prolongations pour leur voyage!. .Et puis, il y a très peu de monde (essentiellement des grecs) ce qui est vraiment très agréable!
Après la visite, et après hésitation (il va faire froid!!!), nous continuons la montée vers Arachova, station de sports d'hiver proche du mont Parnasse .
Là, après un petit passage dans ce "Megève" grec, ù nous achetons quelques spécialités locales (petits chaussons au fromage absolument délicieux) , nous trouvons (comme chaque fois) très facilement un chouette lieux de bivouac surplombant le village. Ce sera une nuit glaciale et très ventée...et un réveil bien difficile le lendemain matin, comme en témoigne notre accoutrement alors qu'au moment du départ nous prenons la pose devant le village!
Bivouac tout près d'Arachova et départ...frisquet!
Nous peinons à nous réchauffer dans longue descente qui suit notre étape à Arachova, et c'est dans un café/magasin de location de ski que nous passons la deuxième partie de la matinée, au coin du feu, attendant alors que le ciel s'est nettement assombri que les températures deviennent plus douces...
Ensuite, nous rejoignons une régions beaucoup plus plate, plus basse aussi et sans grand intérêt, surtout par temps maussade et froid qui atteint un peu notre enthousiasme comparé aux jours précédents!
heureusement, une fois de plus et alors que rien dans le paysage ne le laissait présager, nous trouvons en début de soirée un lieu de bivouac des plus original. I s'agit d'un château (construction récente) qui semble plus ou moins abandonné, parfait pour nous offrir une belle soirée de chatelains, bien à l(abri du vent!
Sur le mur extérieur, il y a bien une petite pancarte qui dit que le lieu est surveillé par une société...mais "on ne l'a pas vu"😅
Seul un gros chien vient nous rendre visite à plusieurs reprises, visiblement plus à la recherche de compagnie qu'animé par de mauvaises intentions.
Et comme tous les soirs...un beau feu bien sûr. et en prime ce soir, un joli plan de travail pour les préparatifs du repas!A partir de là, on commence à avoir hâte de retrouver la côte et les températures plus douces annoncées. Les problèmes mécaniques du vélo de Nathalie commencent aussi à devenir préoccupants, et la perspective de trouver à Corinthe un atelier de vélo nous motive à avancer. Pour ma part, c'est aussi la hâte de découvrir le canal de Corinthe.
Route vers Corinthe...coucher et lever de soleil.
En approchant Corinthe, nous traversons d'abord une immense zone industrielle et pétro chimique! Je ne sais pas si la Grèce a l'équivalent de nos zone "sevezo", une chose est sûre, sur ce site les fumées et odeurs étaient peu engageantes...et nous n'étions cette fois pas mécontent qu'un petit vent, même de face, aide à disperser tout ça!
Corinthe fait partie de ces lieux dont j'avais un imaginaire enrichi par des images vues dans divers magazines...je n'ai pas été déçu.De plus nous avons suivi le canal au plus près avant d'en être éloignés très autoritairement...nous n'avions pas vu que nous étions dans une zone rendue dangereuse par les travaux en cours et donc strictement interdit au passage!
Canal de Corinthe A Corinthe nous passons un long moment sur la plage en attendant que le vélo de Nathalie confié à un mécano ne retrouve un peu de santé (un peu...), puis à Decathlon, le seul de Grèce se situant ici.
Le lendemain, nous visitons l'ancienne Corinthe, moins impressionnant que Delphes, mais là encore trouvant une esthétique dans son emplacement.
Ancienne Corinthe.Puis nous poursuivons la route en direction d'Epidaure. De nouveau, ce sont de longues montées, et bien que jamais très loin de la mer, une impression de montagne. C'set le seul jour où nous avons du mal à trouver un lieu pour bivouaquer, tout espace étant soit trop pentu soit clôturé. Nous finissons par trouver, de nuit et après une montée que je ne suis pas prêt d'oublier! (30% à certains moments). Impossible bien sûr de pédaler, et pousser le vélo nous demande un énorme effort , rendu encore plus intense avec le fou rire qui nous gagne lorsqu'une bouteille tombe de mon vélo et commence à rouler dans la pente!
Et la nuit qui suit, heureusement après une fois de plus une agréable soirée auprès du feu, c'est l'ORAGE, le vrai, avec ses éclairs et le tonnerre qui, résonne dans les parois des falaises qui nous entourent!
C'est dur....et ça sèche le lendemain matin!
Le lendemain, nous prenons la direction du site d'Epidaure, connu pour son théâtre pouvant accueillir 12 000 spectateurs. Mais ce jour, au petit matin et après avoir dormi à quelques mètres de là, nous sommes quasiment seuls au début de la visite.
L'acoustique du lieu est étonnante. Une personne au centre qui fait claquer ses doigt s'entend dans l'ensemble du théâtre.
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Epidaure C'est ensuite à Nauplie, première capitale de la Grèce que nous terminons cette séquence de voyage et que nous nous séparons. Jonathan et Nathalie retournent vers Corinthe puis Patras avant de rejoindre l'Ile de Képhalonia où ils doivent récupérer chez un Warmshower un panneau solaire commandé.
Dernier bivouac à trois sur la plage...rue de Nauplie et toujours des orangers!De mon côté, les prévisions météo n'étant pas très engageantes en montagne...je prends un bus pour les 130 km qui mènent à Kalamata...où je devais moi aussi récupérer chez un Warmshower une tente achetée en urgence suite aux défaillance de la mienne...
Je m'y pose pour quelques jours, pour bricoler un peu le vélo, réparer le matelas qui a crevé, farnienter, bouquiner, me balader (à pieds!), regarder la TV, faire de la lessive etc......
A première vue, Kalamata n'a rien d'extraordinaire, ses olives peut-être!🤣
Enfin, deux brèves anecdotes sur ces derniers jours:
- Dans une boulangerie, après que nous ayons acheté du pain et autres gourmandises, le propriétaire voyant nos vélos dans la rue nous rappelle pour nous offrir de remplir nos bouteilles d'eau. Je lui dis que c'est vraiment une super idée, il me répond "non ça c'est une super idée!" en sortant une énorme bouteille de gnole hyper forte que nous buvons bien sûr cul sec ave c lui! ça réchauffe!
- Le lendemain, alors que nous roulons à la sortie d'une ville, quelqu'un nous interpelle de loin, nous fait signe de l'attendre. Il arrive alors les bras chargés de bouteilles de jus de fruits et d'eau, nous demande d'où nous venons...puis nous dit que lui vient de Palestine...et nous découvrons alors que c'est dans un camp qu'il vit en ce bord de route...
Nous ne vivons pas tous dans le même monde...Le notre est fait de tous petits soucis qui paraissent bien futiles...
A bientôt!
Des bises.