Beaj approche des côtes Majorquines Soudain, la mer se met à bouillir à quelques encablures !
Les Sternes, Puffins et autres oiseaux de mers plongent allègrement dans ce banc d'Anchois, sans doute rejoints également par des maquereaux.
Porto Colom est un paisible port de pêche. Nous y faisons escale 3 jours, le temps de se ré-approvisionner et d'attendre les vents favorables.
Beaj met le cap vers Siddi Ferruch (Algérie), non loin d'Alger. C'est là que les premiers colons français debarquèrent dans les années 1830.
Nous n'imaginons pas encore les difficultés qui nous attendent.
Le bateau talonne un banc de sable en plein milieu chenal à l'entrée du port ! Le tirant d'eau de Beaj n'est pourtant pas énorme! Un coup de marche arrière et nous nous dégageons. Les infrastructures ne sont pas entretetenues.
Les douanes montent à bord, contrôlent les passeports et font remplir toutes sortes de documents. Ils tiquent sur le téléphone satellite, les GPS, et mon appareil photo Nous prennent ils pour des espions, des journalistes? Savez vous que l'on prend de très bonne photos avec simplement un téléphone portable? Et que celui-ci a un récepteur GPS?
Ensuite les informations contradictoires se succèdent. "Vous aurez un laissez passer pour visiter la casba Alger", "Vous ne pouvez pas débarquer". En fait les garde côtes, police des frontières etc ne savent pas quoi faire de nous et palabrent longuement. Nous finissons par comprendre que nous sommes cantonnés au quai avec interdiction d'en sortir! Ils gardent de plus les passeports!
Il faut d'âpres négociations pour pouvoir aller au restaurant. Nos déplacements sont entravés même dans l'enceinte portuaire, ce qui est contraire au droit maritime, qui garantit l'approvisionnement des bateaux de passage.
Tout est compliqué.
- Nous partons demain matin, je veux refaire le plein de gasoil.
- msieur, fais le plein demain alors inchallalh
- espèce de bougre de .... je veux le faire tout de suite.
1h pour négocier l'accès à la pompe. Inutile de dire que le quai attenant est ensablé et que les bateaux ne peuvent y accoster.
Il est frappant de constater que les douaniers et police des frontières se ressemblent partout dans le monde: (parfois) corrompu, (souvent) l'air bête et sûr de soi.
Vient ensuite le temps de faire le plein d'eau.
Je vais chercher 40l à un tuyau et y revient pour continuer. Mais le policier m'arrête :
- Msieur c'est tout pour aujourd'hui
Cette fois je me mets vraiment en colère:
- C 'est le droit maritime, vous devez nous laisser l'accès à l'enceinte portuaire!
Je lui montre l'extrait du texte sur le site du ministère des affaires étrangères "cas particuliers des plaisanciers arrivant par la mer" Cet imbécile me regarde incrédule mais ne change pas d'avis.
Je me fâche tout rouge et leur montre que j'appelle l'ambassade sur le champ. La menace porte et je vais pouvoir remplir les outres d'eau. Ce qui ne m'empêche pas d'être outré.
A Tipaza, une autre tentative d'accostage n'est pas plus fructueuse. Après 2h d'intenses palabres:
- bienvenue messieurs, mais vous ne pouvez pas débarquer.
Par deux fois, des vedettes des garde côtes nous rejoignent et fouillent le bateau.
Les îles Habibas (près d'Oran) sont un refuge, un sanctuaire exploré par Cousteau en 1977. Nous sommes malheureusement a nouveau talonnés par une vedette des garde côtes, qui entreprennent une manoeuvre plus qu'hasardeuse pour aborder Beaj. Réveiller des marins pendant la sieste ne se fait pas, le ton monte.
Voilà désormais l'aviation qui débarque! Des avions de chasse font plusieurs passages à basse altitude !
Nous comptions jeter l'ancre aux îles pour la nuit, mais vu les ennuis avec les autorités nous mettons le cap vers Melilla (enclave espagnole au Maroc).
Il faut plus encore plus de 2 jours et 2 nuits de navigation pour y parvenir
Le timing pour aborder l'Algérie n'était sans doute pas le bon. Les manifestations se succèdent à Alger pour maintenir la pression sur la clique des généraux au pouvoir. Ils accaparent la grande majorité des (immenses) ressources du pays et n'ont pas du tout l'air décidé à abandonner leurs privilèges.
La tension dans l'air est palpable.
Nous profitons d'un nième contrôle pour acheter des poissons à des pècheurs (qui s'excusent platement pour les tracasseries causées par leurs autorités).