Je voulais revenir ici. J’avais le souvenir d’un petit enclos de quiétude, un espace hors du temps, où il fait bon se poser un instant. J’en avais la sensation mais la représentation était imprécise.
Février 2017
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Je voulais revenir ici. J’avais le souvenir d’un petit enclos de quiétude, un espace hors du temps, où il fait bon se poser un instant. J’en avais gardé la sensation mais la représentation était imprécise.

Le cloître Saint-Salvi à Albi a la particularité d'être surélevé par rapport au niveau de la rue. On y accède par un escalier couvert, une quinzaine de marches. Sur les parois, des oiseaux blancs en vol, par dizaines, peints au pochoir, m’assaillent et paraissent incongrus en ce lieu.

J’entre alors par une grille entrouverte, sous l'unique galerie conservée. Je suis immédiatement saisie par la douceur du lieu. Une lumière de fin d’après-midi pénètre sous les arcs. C’est le génie des bâtisseurs qui se révèle : la perspective des colonnes qui s'étire, le sol soigneusement pavé, le plafond en bois, les couleurs chaudes de la brique. L’esthétique des lignes est harmonieuse et apaisante.

Sur les chapiteaux qui surmontent les colonnes géminées, les personnages au visage dépoli et les représentations végétales sans relief disent l'authenticité de la pierre. Celle posée là des siècles plus tôt pour laquelle on a préféré l’outrage du temps à celui de la restauration.

Au cœur de la vieille ville, on peut imaginer un écrin du XIIIe siècle, tenter naïvement de s'y projeter, y parvenir. Voir les moines, n’entendre que le frottement des étoffes, les carillons et le souffle du vent.

Entre la galerie et la collégiale Saint-Salvi, le jardin s’organise en un quadrilatère difforme. Dans un coin, trône un grand cyprès. A la limite de la ramure, un nichoir accueillera bientôt une mésange. Plus bas, une construction en bois qui ressemble fort à un abri pour insectes.

Adossé à la collégiale, l’enfeu où reposait la sépulture de Vidal de Malvesi qui fit bâtir ce cloître, est vide. Au fronton, les saints personnages, mains jointes, prient pour qui ?

Dans la cité épiscopale classée au patrimoine mondial de l'Unesco, le cloître attire nombre de visiteurs. On s'y promène avec les enfants. On fait des selfies entre copains. On se tient par la main. On s’embrasse pensant être seuls au monde. Ici, on prend le temps. Chacun déambule, sillonne le jardin aromatique en pointant quelques panonceaux : sauge officinale, sedum spurium, grenadier à fleurs. Les pas lourds des enfants malhabiles résonnent entre les murs. Ils courent après les pigeons qui en ont vu d'autres. Un merle fourrage dans le paillage du cyprès. Les cloches sonnent 17h30.

En repartant, je retrouve les oiseaux blancs qui de ce point de vue prennent tout leur sens : comme moi ils quittent les lieux et s’envolent par une lucarne au-dessus du passage couvert.

Un jour je reviendrai ici pour m’assurer que rien n’a changé.

Cloître Saint-Salvi