Je retrouve ce matin les deux messieurs qui font la traversée depuis Mandeure et découvre qu' un autre randonneur a dormi là. Un gars qui n'a pas l'air de considérer la randonnée comme quelque chose de distrayant.
J'ai fini mon pain au p'tit déj, il faut donc que je passe par la boulangerie. J'y prends aussi un café, alors aujourd'hui le départ sera un peu tardif, vers 9h.
Je commence déjà à suivre le Doubs, où ne coule qu'un peu d'eau au milieu du lit où la végétation a poussé.
Je m'en vais voir le port, normalement au bord d'un lac. Point de lac, une grande étendue herbeuse. Un promeneur de chien me dit que ça ne s'était pas vu depuis 1976 et que c'est même pire. Ces derniers temps il est revenu un peu d'eau.
De l'eau, il m'en faut. J'en demande dans un restaurant et remonte sur la route. Le goudron dure encore un moment, généralement en montée. On entrevoit à travers les arbres la rivière qui est presque à la verticale en dessous, et au-dessus d'un méandre on jouit d'une vue superbe.
Mais voilà que se rapproche le fameux "saut du Doubs" que l'on montre sur tous les dépliants touristiques. Une chose est sûre c'est que ce n'est pas l'affluence. Un resto est ouvert mais il n'y a personne, les boutiques sont fermées.
Je m'en doutais évidemment, en approchant du célèbre site on comprend pourquoi il n'y a personne: pas de chute d'eau, même pas un filet d'eau, rien!
Le chemin continue tranquillement le long du Doubs, c'est très beau, les rochers au dessus, la rivière en dessous.
Je n'ai pas particulièrement faim mais quand j'arrive devant une cabane avec table de pique nique abritée je me dis que j'aurai du mal à trouver un meilleur endroit pour ouvrir ma boîte de sardines.
Malheureusement ce n'est pas abrité du vent et je me mets à avoir froid. Alors je continue ma route.
Le barrage du Chatelot n'est plus bien loin. C'est en s'en approchant qu'on se rend compte combien il manque d'eau dans la retenue.
La direction pour continuer n'est pas très claire, et c'est le moment où survient une forte averse. Je m'abrite sous un rocher. Je suis un sentier étroit et accidenté qui n'est pas le bon, il va descendre tout au bord de l'eau sur des pierres glissantes. Je devrai ensuite remonter, ça me réchauffera et je retrouverai les marques GR.
Ces marques font sortir de la vallée et monter au dessus, dans la forêt, une forêt pas très belle avec des chablis, des arbres secs, certains écorcés par les scolytes, des exploitations qui ont abîmé le chemin.
Ça me déplaît de monter autant car je sais que tout à l'heure il faudra redescendre jusqu'au Doubs. Justement je rencontre une randonneuse, une femme aux cheveux gris dont l'âge se rapproche du mien ! Elle me dit que ce chemin n'est pas agréable.
Je suis impatiente de trouver l'abri indiqué sur la carte. C'est une"cabane de douaniers" dits aussi gabelous, comme j'ai déjà vu
Je me fais un café et repars d'autant plus vaillamment que ça ne monte plus et qu'on retrouve les beaux prés vallonnés jurassiens et leurs vaches tachetées.
Je demande de l'eau à un monsieur qui va nourrir de foin ses trois moutons. L'herbe est trop maigre à cause de la sécheresse dit-il, et il n'a pas beaucoup plu ici.
Et voilà la descente vers la rivière qui commence.
Après la traversée du pré je perds momentanément les marques, mais après je trouve que le sentier, appelé sentier du moulin, avec ses nombreux lacets, est plutôt bien.
Seulement, à un moment du parcours, une piste de débardage qu'on est obligé d'emprunter a détruit le vieux chemin.
En face une "rampe" descend de montagne, une conduite forcée peut être car en bas sont des équipements hydroélectriques.
On passe sous de hauts rochers.
Émerveillement en bas, c'est un endroit magique. La mousse couvre les pierres et les arbres, et la rivière bleue court et brille. Une cabane de pêcheurs est là. C'est possible de s'y abriter mais table et bancs manquent , et je voudrais avancer un peu.
Un étroit sentier circule à ras de la rivière. Caillouteux et peu confortable mais c'est beau
Ce sera parfois meilleur pour marcher, parfois pire dans des éboulis moyens ou gros. Je commence à être fatiguée quand j'arrive à " l'abri des pêcheurs". l'environnement est moins joli que pour l'autre mais la cabane est grande avec une belle table.
Je m'inquiétais car on est samedi ... mais il n'y a personne. Il fait bon, on a fait du feu aujourd'hui. Je m'installe... Mais quelqu'un vient. C'est un couple de jeunes qui veut passer la soirée et la nuit ici.
À trois ça peut se faire. Je dormirai sur la table et eux par terre. Ils rallumeront le feu, me feront partager leur vin et leur Mont d'or nouveau gratiné dans la cuisinière à bois.
Ils sont de Strasbourg et s'appellent Camille et Grégoire.