Aucun nouveau pays prévu au palmarès, seulement de nouvelles découvertes sur les pédales, et des amis à retrouver
Du 11 avril au 8 juin 2022
59 jours
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Voyage sans problème, le train au départ de Bourges est à ras de quai, à Paris on peut flâner par le beau temps au bord du canal Saint Martin, où à la gare de l'est où le soleil traverse les verrières.

Le TGV a un compartiment pour cyclistes. Un congénère m'aidera pour monter le vélo, et sur le quai de la gare de Metz m'attend Nicole, qui m'accueillera ce soir et sera aussi mon guide dans la ville.

Larges avenues, bordées de pistes cyclables, esplanades, parcs, monuments et grands immeubles monumentaux, établissements militaires et souvenirs de l'époque allemande, la gare par exemple.

Le beau jaune clair de la pierre locale agrémente bien les constructions. C'est la couleur de la cathédrale gothique. Beaucoup de promeneurs sont dehors par ce beau temps, sur la place et dans le centre ancien réservé aux piétons.

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Nicole pousse l'hospitalité jusqu'à m'accompagner pour rejoindre la piste cyclable qui suit la Moselle. Au début cette piste suit un canal en dérivation, large et rectiligne, et aussi de très nombreux étangs, anciennes gravières.

On rejoint le fleuve vers Hagondange Uckange où les anciennes usines sidérurgiques ont été démantelées, Heureusement à Uckange les splendides restes du haut fourneau U4 ont été préservés.

Environnement industriel aussi autour de Thionville, mais c'est une très jolie ville, toujours la pierre dorée, des belles maisons et une place à arcades.

La suite du trajet est rurale, verdure et arbres en fleurs ou en jeunes feuilles. Malheureusement la centrale nucléaire de Cattenom gâche le paysage.

Sierck sur Moselle est dominée par un château des ducs de Lorraine. Apach est dotée d'une tour Eiffel miniature où flotte un drapeau ukrainien. Tout près c'est un "3 frontières" France-Allemagne-Luxembourg. Le point exact est au milieu de la Moselle à côté du village de Schengen.

 Près de Berg sur Moselle, Sierck-Les-Bains

Et voilà l'Allemagne, qui ne reste pas sauvage longtemps, les extractions de graviers sont toujours en activité, les routes circulent de chaque côté de la rivière, les rives sont très urbanisées. Et il y a aussi du tourisme, et tout le long de la rivière des campings à bungalows et caravanes vraiment pas attirants. Et en dehors des panneaux interdisant le camping...

Il y aurait bien des emplacements libres, j’échange quelques mots avec une campeuse qui me dit qu’elle a payé pour sa place, que le propriétaire est dans le village...en haut au-dessus d’une falaise !


Finalement juste un peu plus loin je déniche un espace herbeux derrière un bosquet, non loin d’un barrage, en face d'une localité luxembourgeoise d'où on peut certes apercevoir ma tente, mais pas me déranger, il n'y a pas de pont. Les camions circulent sur la route en face mais ça ne m’empêchera pas de dormir.

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Réveil matinal, le passage des trains sur la voie au-dessus s'intensifie. Beaucoup de rosée, la tente est mouillée... Mais il ne fait pas froid.

Ça roule bien sur la piste, les cyclistes ne sont pas encore là. Le paysage est plus rural qu'hier, la principale culture étant la vigne, pas encore feuillée bien sûr. La Moselle fait de larges méandres, le niveau de l'eau est haut, on voit passer des péniches de fort gabarit. Des villages viticoles aux grands porches se succèdent. La rive luxembourgeoise est plus habitée.

Histoire de faire un tour au Luxembourg je traverse la rivière et fais une petite halte à Grevenmacher, une bourgade viticole où paraît il on fabrique un espèce de champagne. Ici tout est écrit en français mais on parle luxembourgeois, guère compréhensible même si parfois on reconnaît quelques mots d'allemand. Mais pas de problème pour s'exprimer en français. Ville proprette à la germanique, des maisons anciennes, une sculpture devant l'église représentant un musicien avec son chien.

La rivière se resserre entre des collines boisées ou plantées de vignes. Elle se rélargit à Konz, où se trouve le confluent avec la Sarre. La piste longe la route, d'un côté ou de l'autre, c’est mieux quand elle est du côté de la rivière. Des bancs et des aires de repos profitent aux promeneurs. Ceux ci deviennent nombreux à l'approche de Trier (Trêves). C'est toujours agréable d'entrer dans une ville par un cours d'eau. Je passe sous un pont moderne, puis un pont ancien d'une belle pierre rouge, j'apprendrai plus tard que c'est un pont romain.

Il n'est que 14h. J'entre dans le cœur de la ville et me dirige chez Yasutaka qui m'héberge ce soir. Au passage s'élève un monument romain bien célèbre celui là, la fameuse Porta Nigra.

Je repartirai pour visiter la ville en vélo, mais allégée. Je verrai entre autres d' immenses basiliques, et la cathédrale romane,non moins immense. Un parc avec un palais rococo. Un centre ville piéton dans le style allemand avec de hautes maisons très ornées et bien repeintes et des statues baroques.

Porta Nigra, palais et jardins, basilique, cathédrale, et abbaye bénédictine de Saint Matthias

Yasutaka vit avec Julia, mais celle ci est partie faire une balade en vélo avec sa mère, laissant pour la première fois la famille, Yasutaka et deux garçons sympathiques de 7 et 3 ans Taro et Kaito. Yasutaka est bien occupé mais très accueillant, et prépare un excellent dîner japonais, comme là-bas, soupe miso et raviolis.

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Temps un peu couvert le matin, puis beau

Un peu de grisaille ce matin donc. Sortie de Trier, zones pavillonnaires, zones industrielles, voie cyclable qui longe des routes, rien de passionnant...

Et la suite ce sont des vignes, villages viticoles, caves ("Weingut"), et encore vignes. Je n'apprécie guère les déserts viticoles, mais encore moins quand ils défigurent ce type de paysage, dénudent les versants de façon anarchique, envahissant jusqu'au moindre interstice entre les rochers. Les pentes sont impressionnantes, ça ne donne pas envie pour les vendanges.....

Dommage que les pentes de la vallée soient défigurées par la viticulture intensive 

Dans les villages, les églises sont à clocher pointu ou à bulbe, les maisons sont pittoresques et colorées, parfois à colombages, souvent très ornées, avec des inscriptions en lettres gothiques, des restaurants, des Gasthaus (chambres d'hôtes) ou des boutiques de vin. Le coin devient touristique...

Les romains n'ont pas laissé de traces qu'à Trier, on peut observer des bornes miliaires, disposées antan tous les milles romains, deux sont bien conservées. Dans des villages sont exposées des copies des sculptures antiques trouvées dans la région. Notamment dans la jolie localité de Neumagen. Un bas relief représentant le paiement de l'impôt, une pierre tombale en forme de bateau à rames.

Neumagen 

Je n'ai pas trop le temps de traîner car j'ai reçu une réponse pour un hébergement, à 85km de Trier. Je casse la croûte au bout d'un méandre à Piesport, et fait un petit tour dans Bernkastel Kues, encore une ville ancienne et baroque, trop grande, trop encombrée par la foule des touristes.

Le paysage me plaît davantage vers la fin du trajet, plus sauvage. La piste est isolée, ne longe pas la route comme souvent, sous des pentes couvertes de boisements où beaucoup d'arbres sont en fleurs. Les cyclistes en majorité sont rentrés chez eux.

Je ne verrai pas beaucoup mes hôtes Florian et Inga ce soir, ils partent manger au restaurant, je discute avec Virginia une jeune italienne qui a pris une année sabbatique pour voyager et qui reste un peu ici, au pair, pour garder la petite Fili une blondinette de 2 ans et demie. Celle-ci parle bien, mais en allemand et pas encore dans la langue de sa mère, le russe.

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Chambre très confortable, j'ai fort bien dormi.

Florian m'explique que Traben-Trarbach a été une ville très riche, car comme les habitants étaient protestants au milieu d'une région catholique le commerce c'est beaucoup développé : ce serait la deuxième ville d'Europe, après Bordeaux, pour le commerce du vin. L'architecture est du 19è 20è car la ville ancienne a été détruite par un incendie. Beaucoup de maisons sont en schiste et ont un aspect sévère. Ici c'est Traben, Trarbach s'étend sur l'autre rive, dominé par un château fort.

Et c'est parti. C'est bien agréable de pédaler le matin dans ce pays, les touristes ne sortent pas avant 11h, jusque là c'est le grand calme. Les pentes sont plus abruptes, ce qui n'empêche pas qu'il y ait des vignes. Pour court-circuiter une grande boucle je prends un raccourci indiqué par Florian. Il faut monter un peu mais c'est l'occasion de prendre de la hauteur et d'admirer un beau panorama sur la Moselle.

Après ce méandre très resserré suit une ligne droite, qui va buter sur le versant d'un nouveau méandre serré, au fond duquel se trouve le village ancien de Brem. Les pentes sont raides, rocheuses et grises, et toujours plantées de vignes. Les lignes de plantation suivent les courbes de niveau. Des glissières permettent de monter sur des petits chariots.

Un méandre de la moselle, un chateau, un chariot pour monter aux vignes 

Brem et les villages suivants ont conservé à côté des constructions de schiste sombre des maisons très anciennes mais toujours bien repeintes, les murs en blanc les fenêtres et colombages en rouge. On y voit des échelles de crues. L'eau peut monter très très haut. .

Maintenant le flot des cyclistes envahit la piste, vélos électriques pour la plupart, descendus des camping-cars parqués en masse dans ce qui est appelé camping. La Moselle méandre encore plusieurs fois, les voies cyclables la longent mais sont souvent attenantes aux routes malheureusement.

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Brem 

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Et voilà Cochem, localité plus importante mais tout aussi touristique, avec un château sur la hauteur. Je n'y vais même pas, c'est trop agité, je suis les panneaux qui indiquent un supermarché Aldi, car dans toutes ces localités où foisonnement hôtels restos et boutiques de vin, les épiceries sont désespérément absentes. Mais le Aldi est fermé, une seule explication, le vendredi saint doit être un jour férié... Si c'est le cas des trois jours qui suivent il va falloir se serrer la ceinture...

Cochem 

Un peu plus loin pour éviter une portion de chemin non revêtue et particulièrement cahotante je prends un petit bac pour passer sur l'autre rive. Et puis la piste suit la route malheureusement. Treis Karden est un bourg tout en schiste.

Les "campings" parkings, ne manquent pas mais je ne peux m'y résoudre. Où dormir dans cette vallée étroite où circulent deux routes et une voie ferrée ?

Je monte mais pas trop dans le village de Löf, assez étendu et pas trop touristique. De beaux gazons en bordure du cimetière ? C'est bien trop en vue.. plus haut est indiquée une place de pique nique, il faut monter mais ça conviendra, à côté un petit pré, et il y a même de l'eau, un tout petit ruisseau qui dévale la pente.

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C'était très calme, juste quelques trains de loin. Par contre, je n'ai pas eu chaud du tout. Du coup j'attends que le soleil soit un peu haut pour repartir, à 9h seulement. Mais un vent froid souffle d'en face. Les mains ne se réchauffent qu'au bout d'une heure. Les pieds, seulement quand je m'arrêterai vers 11h30 à Gülfs banlieue de Koblenz pour faire les courses dans un supermarché local, ouf aujourd'hui n'est pas férié, par contre les deux jours suivants, si. Il faut faire des réserves.

Avant ça, bords de la Moselle toujours, encore un ou deux châteaux, des villages typiques, des coteaux viticoles abrupts aménagés en terrasses.

À Koblenz je me dirige, avec une foule de piétons, vers le confluent de la Moselle et du Rhin. Cet endroit s'appelle "Deutsches Eck". C'est grandiose, sur le Rhin très large passent de nombreux bateaux, de l'autre côté la citadelle de Ehrenbreitstein domine le fleuve. Et de ce côté ci s'élève un énorme monument à la gloire de l'empereur Guillaume Ier.

Deutsches Eck 

Je ne fais pas une visite approfondie de la ville, je vais quand même voir la basilique Saint Castor, très ancienne mais remaniée à plusieurs époques. La façade est romane mais le plafond est gothique, en étoile et joliment peint.

Je casse la croûte et fais sécher la tente dans un square près d'une fontaine surmontée d'une colonne de bronze représentant l'histoire de la ville. De là une rue piétonne noire de monde mène à une belle place dont un côté est occupé par le monastère des Jésuites, et le centre par des terrasses de café très achalandées.

Pour rejoindre le Rhin les quartiers traversés comportent surtout des bâtiments récents, la guerre est passée par là. Mais l'immense Palais des Princes Électeurs (Kurfürstenschloss) a été reconstruit, bien sûr. Il est au bord du Rhin, et maintenant je vais suivre ce fleuve sur quelques kilomètres, sur cette rive, puis l'autre.

La vélo route de "l'unité allemande" va vers l'est donc ma destination. Je vais bientôt quitter les bords du Rhin pour ceux de la rivière Lahn, qui n'est pas si petite que ça mais beaucoup plus campagnarde. La navigation est limitée à la plaisance. L'itinéraire ne suit pas toujours la rivière de près, le relief est beaucoup plus heurté, et quand c'est plat un vent terrible me vient d'en face.

Une ville sur le chemin : Bad Ems, importante ville d'eau bien connue des cruciverbistes, et par sa dépêche fut le prétexte du déclenchement de la guerre de 1870. Établissements thermaux, hôtels, casino, tous bâtiments blancs ou couleurs claires rivalisant de luxe.

C'est Pâques, je n'ai pas trouvé d'hébergement mais c'est plus facile ici de trouver un coin de campagne. Je m'installe dans un pré à côté d'un ruisseau et d'une table de pique nique. Je bénéficie en outre de la visite du propriétaire, pas content du tout mais il ne me chasse pas, viendra demain vérifier que je n'ai pas laissé d'ordures.

Alors si jamais les cloches passent ???

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Toujours pas bien chaud sur le matin... Je plierai la tente encore gelée exactement au moment où le soleil sort de derrière la colline. Départ 8h30. Les cloches ne sont pas passées le propriétaire non plus.

Une toute petite route grimpe dans les bois, et même fort, je suis obligée de pousser. Mais ça change. Elle me mène à l'abbaye d'Oberndorf en haut sur un promontoire. Elle n'ouvre qu'à 11h.

Mauvaise surprise, après avoir suivi un peu la vallée la route va la quitter pour monter sur le plateau. Première vraie côte du voyage, à peine plus de 2km mais c'est dur après trois mois de sédentarité et pas loin de 10 kg de plus.

Un plateau agricole, encore des côtes et puis la véloroute replonge dans la vallée de la Lahn et va s'y tenir. Piste cyclable pas très large asphaltée ou gravillonnée le long de la rivière calme. Les cyclistes (ou promeneurs) reviennent, même ici.

Le premier gros village c'est Diez où les rues aux maisons anciennes forment un cercle autour d'un château. Vient ensuite Limburg, localité plus importante dominée par une grande cathédrale romane très colorées et en dessous un centre ancien pittoresque, ruelles pavés et escaliers, colombages toujours. Les touristes sont venus en masse aujourd'hui.

Limburg et sa cathédrale. Ce drôle de personnage grimpe sur un tombeau 


La statue de Jan Nepomuk (Népomucène) est toujours sur les ponts, parce qu'il a été jeté d'un pont par les Hussites

Plus loin le fond de la vallée est large et cultivé, vert en ce moment. Le chemin est plat aussi. D'autres villages touristiques, encore des châteaux, un vieux pont, et une piste bien agréable dans la nature.

En longeant la voie ferrée elle atteint une gare appelée Gräveneck. Le camping à côté semble agréable. En fait plus loin il est comme les autres, mais je peux m'installer dans un coin calme au bord de l'eau. Une famille de cyclistes a planté la tente. Le papa, Jens, est fort sympathique, il me donne un jeton pour une douche chaude dont j’ai bien besoin. Il me parle aussi de l’association de cyclistes ADFC_Dachgeber, un warmshowers allemand, et me donne les références pour m’inscrire, je garderai le bulletin d’inscription, mais en route ce n'est pas facile de s'occuper de ça.

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Gel le matin, très beau temps ensuite

Toujours froid, toujours le givre sur la tente. Le campeur voisin, en caravane lui, m'offre un café. Il aime bien la France, y va en vacances. Départ à 8h45 sans payer car l'accueil n'ouvre qu'à 10h, et ce sans aucun remords car tout est fermé à clef, même les toilettes.

Malgré le froid le chemin qui longe la Lahn est bien agréable et fort calme jusque Weilburg, village surmonté d'un grand château blanc.

Weilburg 

La localité suivante Löhnberg a aussi son château, médiéval et en ruines. Par contre au niveau itinéraire le bord de rivière n'est plus aménagé et la portion qui suit est tarabiscotée et pas toujours bien indiquée, je me trompe plusieurs fois, et subis quelques bons raidillons. L'occasion de monter un peu dans les campagnes vallonnées où coexistent l'habitat (groupé), l'agriculture (pas bio), et l'industrie.


Le reste de la journée se poursuivra dans la plaine verte inondable où coule la Lahn, sur une large piste cyclable où c'est un défilé continu de vélos, électriques en grande majorité. Dans mes précédents voyages, les vélos étaient déjà nombreux, mais en majorité "musculaires". Un effet "Korona" (on ne dit pas covid en Allemagne), on a incité la population à faire du vélo, et tout le monde a acheté des vélos... électriques. Le plus désagréable c'est que les cyclistes ne vous saluent pas. Il n'y a qu'un petit garçon pédalant une glace à la main qui vient me dire que le "lièvre de Pâques" lui a donné 10 euros.

Mais bon, c'est plat, c'est vert, les cerisiers sont en fleurs, le soleil brille, ... la vie est belle! Les clochers et châteaux je ne les vois de loin, et la rivière que le chemin côtoie ou croise. à Giessen la plus grande ville je me mêle à la foule dans un "Bier Garten" où on boit de la bière ou on mange des glaces (glace pour moi), sur la rivière on fait du canoé ou du pédalo.

Dans la dernière partie du trajet le chemin traverse de jolis villages agricoles, aux belles maisons brunes avec des colombages. J'ai dépassé les 80km, ça commence à être dur, je n'avais pas trop bien évalué la distance pour aller à Marburg, mais la motivation était là: j'ai trouvé un hébergement chez Angela, qui m'accueille royalement dans sa maison très confortable au bord de la Lahn. C'est plutôt son fils qui est cycliste, même si elle pratique le vélo "normal" dans la vie courante. Elle préfère les longues randonnées pédestres. Elle me fait goûter au plat traditionnel de Frankfurt: pommes de terres rôties avec une sauce au yaourt et herbes et des œufs durs.

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Très beau temps, plus chaud, vent d'est

Marburg vu de chez Angela 

Étais ce une bonne idée? Je me décide à monter vers la vieille ville et au château. En fait mon erreur c'est de ne pas avoir laissé le vélo en bas, car peiner et pousser dans les ruelles, tombant parfois sur des escaliers, afin de le hisser là-haut, ce n'est pas vraiment une partie de plaisir.

La ville est pittoresque est animée, maisons à colombages, jolies fontaines, petites rues pittoresques, et beaucoup de bâtiments universitaires. Là haut une forêt de tilleuls et un parc entourent le château de grès rouge édifié au XIè mais avec beaucoup d'ajouts ensuite, la plus grande partie serait du 13è au 15è. De là beau panorama bien sûr.

la place, et Saint Georges au-dessus de la fontaine 
Le château 

Je repars par les bords de la Lahn, mais plus pour longtemps, ma route se sépare de cette belle rivière, elle va en suivre un affluent, bien plus petit, l'Ohm, mais là aucun chemin ne longe la rive, l'itinéraire suit des petites routes, ce n'est pas le plus intéressant du parcours. Après ça devient plus rural et c'est mieux, on traverse même des forêts de hêtres. Et les reliefs sont un peu plus accentués.

Dans la campagne de la Hesse 

Pour l'hébergement ce soir, le cycliste le plus proche sur ma route, Uli, n'est pas disponible mais m'indique une autre cycliste à Alsfeld, Mirjam, ce qui me fait changer d'itinéraire et c'est un peu plus loin, je vais donc arriver tard, 20h30 mais à vrai dire j'apprécie beaucoup cette fin de trajet au soleil du soir.

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Dans la campagne dans la Hesse

mercredi 20 avril Alsfeld - Ransbach 62km

Beau temps le matin, nuageux l'après midi vent de nord-est froid.

À la sortie de la ville commence un chemin de campagne, pas revêtu mais bon, bientôt Il va longuement monter dans la forêt. Dénivelé de plus de 200 mais je ne force pas, je profite de la compagnie des hêtres érables et épicéas et écoute le chant des oiseaux. Pas d'humains ou si peu.

À la descente c'est presque plus dur car un vent froid souffle d'en face. L'itinéraire cycliste traverse maintenant des villages et des campagnes, empruntant des routes peu fréquentées puis va rejoindre une vallée de prairies, comme celle de la Lahn. La rivière d'ici c'est la Fulda. Avec le vent en face l'absence de relief n'est pas un avantage.

Les villages et villes ne sont pas dans la vallée mais sur les versants. La plus grande localité est Bad Hersfeld, ville d'eau moins pompeuse que Bad Ems. Quelques beaux bâtiments quand même.

Place à Bad Hersfeld 
 Deux Konrad locaux célèbres, un physicien et un linguiste. Et un joli manoir dans la campagne

Après la sortie de la ville une étroite piste asphaltée monte et descend dans des bois au dessus de vallées humides, plus loin le chemin part droit vers l'est parallèlement à une petite rivière bordée d'aulnes et une route fréquentée. Je n'avance pas beaucoup... C'est que ça monte on dirait, lentement mais sûrement... Bon sang mais c'est bien sûr, c'est une ancienne voie ferrée. Bref la deuxième montée de la journée va être très tranquille, c'est après que ça se gâte, avec le vent. Par contre le soleil brille de nouveau.

J'avais un contact pour un hébergement mais c'est trop loin, il faut que je me trouve un bivouac. Ce n'était pas gagné, mais je dégote un endroit abrité du vent, un petit pré où sont déposés des réserves de bois enstéré et une remorque, j'espère que le propriétaire ne se montrera pas...

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temps couvert, vent de nord-est

Encore une dizaine de kilomètres dans le Land de Hesse, et je passe le "rideau de fer" absolument sans m'en apercevoir au niveau du bourg de Vacha, qui est en Thuringe.

Je suis exactement sur la frontière en prenant cette photo. Les pavés auraient du me mettre la puce à l'oreille 

Mes premiers coups de pédale en ex-RDA ne sont pas si faciles, je fais un détour par un village pour trouver une boulangerie, elle est fermée et il n'y a aucun commerce, par contre, une grande côte à la sortie. Plus loin des travaux barrent la route, impossible de passer, plutôt que de faire un énorme détour je prends les sentiers pédestres à travers la campagne, en poussant plus qu'en roulant, pour arriver à Bad Salzungen qui n'est pas une station balnéaire pittoresque mais un alignement de grand immeubles souvent très récents, grandes esplanades, grands magasins et je me retrouve à faire les courses dans un immense supermarché.

Les villages s'ils n'étaient vides seraient charmants, avec leurs églises au clocher d'ardoise, leurs trottoirs et parfois rues pavées, des maisons modestes, des décos kitsch.

Je vais maintenant suivre tranquillement la rivière qui s'appelle la Werra, le vent ne gêne pas, mais quand j'oblique vers l'est c'est affreux, je l'ai en pleine face, j'essaie de m'arrimer à un cycliste qui m'a doublé, mais il me sème... Et je finis par arriver à Schmalkalden, une ville ancienne, pas bien animée et un peu triste sous le ciel gris mais très pittoresque avec ses maisons anciennes colorées.

la Werra et Schmalkalden 

C'est ensuite que va commencer l'ascension vers la forêt de Thuringe (Thüringer Wald), je voudrais déjà en faire un petit bout, suivant le "Werra-Rennsteig Radweg", de la vallée vers la montagne, tout un programme. Petites routes asphaltées, puis une piste forestière qui entre dans une vallée étroite.

Sans avoir roulé beaucoup je passe devant une fontaine, au-dessus se trouve une petite cabane, sur un replat assez large pour installer la tente. J’hésite, et me décide finalement à rester là, il est passé 18h30 et trouverai je mieux ? La vallée est abritée, le ruisseau murmure en bas, les oiseaux chantent, et je m'installe confortablement dans la cabane pour mon dîner.

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Ce chemin non revêtu vers les hauteurs de la Thüringerwald ne va pas être de tout repos, à vrai dire la pente est si forte que je vais bientôt devoir descendre de vélo et pousser dur, le long de la petite rivière, puis monter au-dessus de la vallée à travers la forêt de hêtres et épicéas, pour enfin arriver sur un plateau plus ouvert, dans des ondulations de prés verts.

sortie des bois et Rotterode 

Quand je croise la route, pas d'hésitation, j'abandonne le chemin cycliste qui semble plus fait pour des VTT, électriques de préférence. Cette route va commencer par redescendre, vers le village de Rotterode, dominé par un château en ruines, d'autres villages vont lui succéder. Il semble que l'habitat se soit concentré ici, car ensuite il n'y a plus que les prés et les bois. La route est calme, et pour cause, des panneaux invitent à prendre une déviation. Je n'en ai cure, je traverserai le chantier, pas trop facilement mais personne ne m'en empêchera.

La montée est assez régulière, des taches de neige commencent à apparaître sur les bas-côtés... mais c'est long et j'en ai bien assez, quand j'arrive à Oberhof qui n'est plus du tout un village charmant mais un chantier d'installations de sports d'hiver, horrible. Un café et un peu de repos ne me feront pas de mal je m'arrête dans une cafétéria moderne et moche. Le café est à 3 euros, j'en aurai quand même pour mon argent car je pourrai charger mon téléphone et rester un moment me reposer.

Neige dans la Thüringer Wald 

L'ascension n'est pas encore tout à fait finie, il me reste un dénivelé de l'ordre de 140m mais sur 10km cela ne sera pas dur. C'est une route en crête, heureusement protégée du vent la plupart du temps par la forêt d'épicéas. Les taches de neige sont plus grandes, et l'herbe est jaune et couchée, signe d'une fonte récente. Des dames à qui je parle sur un belvédère à Schmücke me disent que la route était encore barrée il y a trois semaines. Nous sommes à 916m d'altitude.

J'avais rêvé d'un endroit chaud où je pourrais éventuellement déguster un "Thüringer Bratwurst" spécialité locale de saucisse grillée. C'est raté, il y a bien ici une "Gaststätte", resto, et un Biergarten, terrasse, mais tout est fermé. Je m'installe sur une table de bois pour casser la croûte, au début le soleil chauffe vaguement, mais quand j'ai fini je suis gelée. Heureusement que ça ne redescend pas trop vite.

Je retrouve les petites pancartes vertes signalant les chemins de randonnée et notamment le fameux "Rennsteig", le chemin de crête qui parcourt le massif, et que j'ai suivi en randonnée pédestre en 2011, avec un temps pire qu'aujourd'hui puisqu'il pleuvait à peu près tout le temps. Ce chemin est marqué de bornes très anciennes, j'en revois une ou deux.

La route ne descend pas uniformément, il faut encore avaler quelques côtes. Elle est hélas assez fréquentée. Mais rapide. Neustadt am Rennsteig, un bourg pas très ancien sans grand charme, puis Grossbreitenbach à côté d'une usine immense, au centre ville très beau: une avenue large est bordée d'espaces verts et de belles maisons toutes couvertes en ardoise, toits et murs.

Böhlen, le premier but de mon voyage, n'est plus qu'à 4km, mais là ça remonte. J'appuie donc sur les pédales. Un pick-up me double, le conducteur m'attend au bord de la route, étrange...Je finis pas le reconnaître malgré ses cheveux qui ont poussé, c'est Hans Günther, le plus jeune fils de la famille Schneider, chez qui je me rend. J'avais passé chez eux quelques jours avec mon amie pragoise Ludmila, il y a 11 ans.

Une dernière belle petite grimpette; entre les collines vertes apparaît le clocher d'ardoise de Böhlen. Dans le village je peine à me repérer, personne dans les rues, les commerces ne sont plus là... mais je trouve la maison où je suis chaleureusement accueillie. Je vais rester là jusque lundi matin.

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nuages et éclaircie le samedi, pluie le dimanche

Deux jours de repos à Böhlen qui n'est pas un si petit village, puisqu'il compte 500 habitants. À mon dernier passage une épicerie et un café occasionnaient un peu d'animation, maintenant tout est fermé, plus personne dehors. Mais dans la grande maison des Schneider mes amis il y a toujours du monde. Les générations antérieures et postérieures sont de Böhlen, et on voit passer enfants, conjoints, petits enfants, arrière petits enfants...

Comme Martina est partie travailler, Hansi et Marita, les parents, me font faire le tour du village, l'église, clocher d'ardoise toujours, l'école, très grande mais elle n'abrite plus que le "Kindergarten" ( l'école maternelle mais aussi la crèche), le champ où la famille cultive ses pommes de terre, le chalet en rondins qu'ils ont construit en haut d'une colline au milieu d'un petit bois.

Nous passons la soirée parents et enfants autour d'un grand feu au fond du jardin. Hans Günther, plus jeune frère de mon amie Martina, parle de son voyage au Brésil où il a retrouvé les descendants des villageois de Böhlen massivement déportés là bas pour insoumission au milieu du 19eme siècle. Ils parlaient encore le même patois.

Marita et Hansi devant leur chalet, feu de joie dans le jardin 

Le lendemain pas découragés par le mauvais temps, nous partons en balade avec Siggi, l'ami de Martina. Elle, elle est encore prise par son travail de guide au château de Rudolstadt. Promenade en forêt au-dessus de la Schwarza. La forêt, un pavillon de chasse entouré d'un long mur, un joli abri sur un belvédère, le village de Schwarzburg avec ses belles maisons de villégiature et le grand château au-dessus.

Pavillon de chasse ("la Faisanderie")
Partie restaurée du château à Schwarzburg 
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Adieux et photos souvenirs...

Certes la pluie n'a pas fini de tomber et il ne fait pas bien chaud, mais elle est bien jolie la piste cyclable au bord de la Schwarza. La rivière, qui n'est pas noire mais grise un peu bleutée, pas très profonde, fait des méandres dans la vallée encaissée, entre les arbres. C'est bien calme, pas de cyclistes aujourd'hui!

Je revois un instant depuis le bas le château de Schwarzburg, et continue jusqu'au premier bourg, Bad Blankenburg. Là tout change, une plaine (confluence avec la Saale), un bourg assez important, et surtout une immense zone industrielle, ateliers, cheminées, fumées, tuyaux et banlieues d'immeubles "DDR".

Ce n'est pourtant pas loin de Rudolstadt, une belle ville ancienne, où Schiller et Goethe se sont rencontrés. Sur une hauteur s'élève le grand château de Heidecksburg. C'est là que travaille Martina, mais aujourd'hui elle est en congé.

Je change de véloroute, maintenant c'est celle de la Saale beaucoup plus large pourtant le parcours s'avérera plus accidenté. L'itinéraire emprunte des voies de desserte agricole bordées de cerisiers en fleurs. Il suit assez souvent la voie de chemin de fer. On y rencontre des cyclistes mais surtout des locaux. Un monsieur bien jovial arrive à mon niveau avec son vélo"DDR", c'est lui qui le dit, un plateau un pignon, il me rend bien service en m'informant que ce n'est pas la peine de prendre la déviation indiquée (Umleitung), en effet, ça passe très bien.

Un peu plus loin vers Iena, vallée de la Saale 

Un peu plus loin ce sera un peu plus dur, il va falloir monter et descendre dans les coteaux sur un chemin non revêtu.

On observe quelques usines au long de la vallée mais en approchant d'Iéna l'industrialisation s'intensifie, et ce ne sont pas de petites entreprises. Mais l'entrée dans la ville se fera dans un environnement relativement naturel, des espaces verts le long de la Saale. Il n'empêche que par moments de grosses canalisations longent la voie.

La journée se termine par une terrible côte pour arriver chez mon hôte cycliste où je trouve encore un accueil fabuleux. Elisabeth voyage comme moi, en vélo ou à pied, mais toujours avec la tente. En 2020 elle a choisi la Suède.

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Près d'un étang avant Weissenfels

Mardi 26 avril Iéna - Weissenfels 61km

De couvert à ensoleillé

Le centre ville d'Iéna n'a peut-être rien de particulièrement remarquable mais il est joli et bien typique, et sur la place du marché c'est...le marché. Je n'ai rien à acheter mais l'ambiance est fort sympathique. Un commerçant me donne un petit livret sur l'itinéraire vélo que je suis (Saalradweg), un autre huile ma chaîne, un vendeur de pain et gâteaux a vécu en France et on discute, en français. Il me parle d'une communauté dont il fait partie près de Prague. J'irai peut être.

Marché à Iena                                                                                      Deux tours, deux époques 

Le chemin continue sur les bords de la Saale, d'abord industriels, puis agricoles, car la vallée est assez large, mais se resserrant par endroits. Elle est bordée de coteaux avec des falaises de calcaire. Et sur ces hauteurs ont été construits, bien sûr, des châteaux, des "Burg" aux hautes tours.

Les villages sont charmants, avec des rues où l'herbe pousse entre les pavés, des maisons à colombages, des maisons en briques aussi, dans des états variés, avec toujours un peu de patine. Un aspect sympathique, avec même des passants qui vous adressent la parole.

Des vignes réapparaissent sur les coteaux et on traverse une ville d'eaux, Bad Kösen.

Je m'écarte de l'itinéraire pour passer à Naumburg, dont l'imposante cathédrale est visible de loin. J'arrive trop tard pour la visiter, pas grave, dans tous les cas la ville valait le détour. Elle date du moyen âge mais les maisons notamment celles de la belle place du marché, sont pour la plupart de la renaissance.

On peut voir aussi une statue (moderne) de Nietzsche et la maison de sa mère où il a souvent séjourné.

Encore un bout de chemin au bord de la Saale, dans des prés et zones humides. Je vais m'installer près d'un abri, au bord d'un étang.

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J'ai bien dormi, la voie ferrée toute proche ne m'a pas gênée mais le réveil n'est pas trop agréable car de nombreuses petites limaces ont grimpé sur la toile de tente, c'est à l'extérieur mais c'est dégoûtant. Après la ville de Weissenfels j'abandonne le Saale Radweg (véloroute de la Saale) pour le Elster Saale Radweg, sur l'autre rive (droite). Après un bref passage en bord de rivière l'itinéraire va s'écarter de celle-ci, parcourir une campagne de grandes cultures agricoles et traverser l'autoroute, un autre monde.

Et pourtant... Un petit panneau en direction d'un village proche attire mon attention: "Nietzsche Denkmal". Encore lui!? les flèches me mènent à une jolie église de pierre au clocher rectangulaire, de l'autre côté une sculpture représente une tombe entourée de quatre personnages d'un blanc éclatant, un Nietzsche avec sa mère et deux Nietzsche tous nus. C'est une sculpture très récente qui fait référence à un texte du philosophe, la vraie tombe est sous l'église. Sa maison natale est juste à côté, elle abrite un musée fermé à cette heure, donne sur un jardin vert. Un endroit calme et un peu magique. Ce village s'appelle Röcken.

Monument commémoratif, la maison natale et l'église 
 avec Friedrich encore 

Je vais faire encore un petit détour pour voir la prochaine localité, Lützen. Un château un peu massif au milieu d'un parc, c'est aussi un musée où est apposée une banderole qui indique trois dates et trois noms dont Gustav Adolf et Napoléon. J'en déduis qu'il s'agit d'un lieu historique, et en effet il y a eu trois batailles de Lützen, la première (1632) pendant la guerre de trente ans où le roi Gustav Adolf de Suède fut tué, la deuxième (1757) pendant la guerre de sept ans, et la dernière (1813) où Napoléon se fait attaquer après la retraite de Russie. En tout cas maintenant c'est un petit bourg agréable.

Le parcours campagnard s'achève au bord d'un lac assez grand. Une cheminée sur le côté, une origine sans doute pas naturelle... En effet, ce sont d'anciennes mines de charbon qui ont été ennoyées. Maintenant un lieu de promenade pour les citadins.

Car à partir de là commence la banlieue de Leipzig, j'essaie de ne pas me perdre car il n'est plus question de véloroute, mais tout va bien se passer, c'est sur des pistes cyclables continues, longeant des rivières, traversant des parcs, que je vais rejoindre le centre ville.

J'ai devant moi une tour qui doit être celle du "nouvel hôtel de ville", je n'entre pas dans l'enceinte de la ville ancienne mais je suis les boulevards sur une large rue réservée aux vélos, et monte vers le nord sans difficultés pour aller sonner chez Heidrun, la femme de mon ami cycliste Wolfgang, actuellement en vadrouille mais il me laisse son appartement, quelque peu luxueux pour moi, mais on ne peut pas dire que ce soit désagréable!



arrivée à Leipzig 


Heidrun a son propre appartement, mais vient me voir le soir pour converser autour d'un verre de vin.

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Beau temps


C’est calme et confortable chez Wolfgang, je dors super bien. Départ sous le soleil.

rue Heinecke à Leipzig                                                                                     la gare 

Je descends du tramway à la gare, l’occasion de la visiter. C’est une des plus grandes gares d’Europe, hautes voûtes ornées et verrières. De là une rue étroite conduit au centre ville, on y observe les hauts et riches immeubles de l’époque dite « Gründerzeit », les premières années après la fondation de l’empire allemand, période de prospérité économique à la fin du 19ème siècle. Ils sont ornés de diverses sculptures, des animaux, des personnages, des motifs végétaux. Entre ces maisons, sous le « Speck Hof » notamment, circulent de nombreux passages commerciaux, avec des verrières élevées.

La Nikolaikirche, la plus ancienne de la ville mais fortement remaniée, avec deux tours en façade, est fermée ce matin. À côté se trouve la « Alte Nikolaischule, ancienne école Saint Nicolas, et une colonne moderne, qui célèbre la révolution pacifique de 1989. La balade se poursuit dans le même style architectural, Riquetin Haus avec deux éléphants noirs, le palais de la foire (Centralmessehaus).

Au Zeitgeschischtliches forum, sorte de maison de la culture, se déroule une exposition sur l’histoire de cette partie de l’Allemagne depuis la fin de la guerre jusqu’à nos jours. Elle est beaucoup plus importante que je n’imaginais mais cela valait la peine d’y passer quelque temps. Il en faudrait plus pour lire tous les documents et vraiment comprendre, surtout si on n'a pas beaucoup de connaissances historiques. C’est très documenté, beaucoup d’objets, parfois volumineux (objets militaires, voitures, meubles…), et beaucoup de photos et documents filmés. L’arrivée de l'armée soviétiques, la mise en place du régime socialo-communiste, les purges, la propagande, tout une partie très angoissante, et puis la vie en DDR, éducation, travail…., les manifestations de la « révolution pacifique » de 1989, (la première a eu lieu à Leipzig), l’ouverture à l’ouest. L’allégresse qui a suivi, qui est retombée quand les usines ont fermé ou changé de mains et que les ouvriers se sont retrouvés au chômage. Beaucoup de jeunes visitent cette exposition, et aussi de nombreux étrangers.

À la sortie je me trouve devant l'« Altes Rathaus », le vieil hôtel de ville, devant lequel s’élèvent la Bourse, une des premières d’Europe, et la statue de Goethe, qui a fréquenté l’université et vécu ici.Après avoir parcouru toutes ces rues plutôt étroites ont est surpris de trouver de l’autre côté de l’hôtel de ville une vaste place piétonne, c’est le « Markt » place du marché. Des passants y circulent mais ce n’est qu’à l’autre extrémité que se presse une foule bruyante. Les gens arborent tous les mêmes T-shirts, généralement bleus, avec sigles et logos, des écharpes qui visiblement portent les noms d’équipes de foot: il y a un match ce soir. Toute la journée les supporters circulent dans les rues ou boivent de la bière à la terrasse des cafés, dans l’après-midi on commence à voir apparaître des policiers.

Goethe devant le Rathaus et la Bourse                                                                 supporters de foot sur la pl...

Il est déjà 13h, je vais manger mon petit casse-croûte sur un banc en face de la Thomaskirche, non loin de la statue de Mendelssohn, un autre musicien qui a longtemps vécu ici.

Quand on parle de musique en ce qui concerne Leipzig, le musicien qui vient à l’esprit est bien sûr Jean Sébastien Bach, Kantor (maître de chapelle) de la Thomaskirche pendant presque 30 ans. C’est donc pour moi quasiment un pèlerinage. L'église date du 12ème, reconstruite à la fin du 15ème avec trois nefs et une tour, et depuis l’époque de Bach l'intérieur a été beaucoup remanié, en style néogothique. Il a été restauré il n’y a pas très longtemps, les murs sont blancs, les nervures du plafond sont peintes en rouge. L’orgue de l’époque de Bach n’existe plus, on en a reconstruit un nouveau. Les restes du compositeur ont été transférés ici, la tombe est au milieu de l’église.

La « Thomasschule » disons école de la maîtrise, où Bach professait et habitait avec sa famille, a été détruite, mais un beau bâtiment voisin a été préservé et c’est là que se trouve un centre d’études sur le compositeur et un musée que je ne manque pas de visiter. On y voit des portraits du compositeur, des partitions originales, une exposition visuelle et auditive des instruments de son époque, une salle où on dans le calme peut écouter ses œuvres (il n’y a pas affluence), c'est très reposant.

Jean Sébastien et la Thomaskirche 

L’après-midi est bien entamé, je n’aurai pas le temps de tout voir dans la ville, je passe encore devant le « Runde Ecke», l’immeuble qui était le siège de la Stasi, « ministère de la sécurité de l’état », le KGB Est- allemand, maintenant un musée . À l’entrée à l’intérieur est exposée la banderole qui avait été accrochée sur le bâtiment lors des manifestations de 1989.

Un peu plus loin se trouve en haut d’un escalier, dans un environnement pas trop esthétique, le monument à Wagner, qui est passé aussi par ici. Retour à la gare par le Brühl, un immeuble moderne et une rue commerçante plutôt moches, un crochet par la Nikolaikirche pour voir l’intérieur, élévation et décoration splendide avec des chapiteaux « à palmes ». Le tramway pour rentrer.

Monument à Wagner et intérieur de la Nikolaikirche 

Heidrun m’a invité au restaurant (c’est plutôt moi qui aurait du). Nous allons dans une « Gaststätte » bien typique avec boiseries et déco à l’ancienne qui a le nom de Luther, je prends un de ces repas allemands que j’affectionne, aujourd’hui un « Kasslerbraten » (espèce de petit-salé), accompagné de choucroute, Sauerkrau. Avec ça il faut boire de la bière bien sûr.

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temps beau et chaud

Deuxième jour à Leipzig. Je ne sors que l'après-midi. En tramway toujours je me dirige vers l' Augustusplatz. C'est une partie ancienne de la ville, mais avec les destructions qu'elle a subie, il ne s'y trouve presque que des bâtiments modernes. Seul un côté de la place a été préservé, on y trouve un mini gratte-ciel, Kroch Hochhaus, datant de 1928 avec en haut une cloche et deux sonneurs qui frappent tous les quarts d'heure. De la fin du 19è, style néo-baroque on peut admirer une belle fontaine avec chevaux, poissons et personnages mythologiques. Il reste aussi quelques fortifications de brique du 16ème siècle où s'assoient et conversent les étudiants.

Car c'est là que se trouve l'université, très ancienne, où ont étudié quantité d'hommes illustres, Leibniz, Goethe, Heisenberg physique quantique) , et comme femme... Angela Merkel. Le bâtiment actuel de l'université est moderne, de même que l'église St Pauli qui lui est annexée, car l'ancienne église de style gothique a été délibérément détruite en 1968. Le tout est en vitrage bleus.

Mendebrunnen. Derrière, le Gewandhaus et le reflet de l'opéra.   L'université et l'église Sankt Paoli


Juste à côté, LE gratte-ciel de Leipzig City-Hochhaus. Il y a un restaurant à l'intérieur.

C'est aussi sur cette place que se trouvent l'opéra, d'un style plus classique, et le fameux Gewandhaus, salle de concert et siège de l'orchestre du même nom. Le bâtiment actuel a une quarantaine d'années. Couleur beige, forme massive...

De là, quelques stations de tramway vont me conduire à un autre monument encore bien plus imposant, le Völkerschlachtdenmal, "monument de la bataille des nations", une énorme construction massive de 91m de haut. Il commémore la bataille d'octobre 1813 qui a conduit avec beaucoup de morts à la défaite définitive de Napoléon.

Volkerschlachtdenkmal, Méphisto et Faust devant la Auersbachs Keller 

Et puis en repassant au centre-ville je vais jeter un œil au Mädlerpassage où je n'étais pas entrée. C'est là que ce trouve l'Auersbach Keller, le restaurant que fréquentait Goethe, c'est pour cela que devant se trouvent deux sculptures représentant des scènes de Faust, dont une avec Méphisto.

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Beau temps

Après la sortie de la ville, la première moitié du trajet va se dérouler à travers d'anciennes régions minières en cours de réhabilitation. Les mines effondrées et remplies d'eau sont devenues des lacs, autour desquels tout a été reboisé. On circule sur des pistes cyclables à travers de jeunes boisements, c'est très calme et bien agréable par ce beau temps. Comme essences forestières on rencontre de tout, chênes, bouleaux, érables, saules, peupliers, robiniers, pins...

Aucune habitation sur ce trajet, seulement sur la traversée de la petite ville de Delitsch. Contraste à l'arrivée à la ville de Bitterfeld, où je me trouve soudain dans une région très urbanisée, et touristique également, autour d'un grand lac.

Et puis c'est la campagne, l'itinéraire suit la vallée de la Mulde, un affluent de l'Elbe. Une région qui subit vraisemblablement des inondations, une digue en témoigne, et la piste suit cette digue. Avant d'arriver à Dessau elle traverse de belles forêts de feuillus, des chênes surtout, et puis des prés parsemés d'arbres. D'une belle passerelle on voit les monuments de la ville ancienne. Après avoir traversé la ville par de grandes avenues rectilignes j'arrive chez Anne qui m'héberge ce soir avec son père. Comme au précédent samedi à Böhlen on fait un feu dans le jardin et des amis viennent en visite.

Arrivée à Dessau 
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La journée commence par une catastrophe: je laisse tomber mon portable et l'écran tactile ne fonctionne plus... Et pas possible de le faire réparer avant demain. Le papa d’Anna arrive quand je suis attablée pour le petit déjeuner. Il me montre les photos de tous les cyclistes warmshowers qui sont passés par là, et ils sont très nombreux, déjà en 2020 et 2021, ça devrait s’intensifier cette année. Et ma photo va s’y ajouter…



Les photos avec Reinhardt 

Le voyage continue. Mon smartphone de dépannage n'est pas vraiment performant, il n'a pas toutes les applications et notamment pas whatsapp, mais je peux me situer, et puis comme je suis maintenant le "Elbe Radweg", véloroute de l'Elbe, et en plus j'ai le guide "Bikeline", je n'ai pas de problèmes pour m'orienter.

Mais ce matin je visite Dessau, une ville intéressante car c'est là que s'est implanté en 1926 le Bauhaus qui avait été créé en 1919 à Weimar. C'est une école d'architecture et "d'arts appliqués" (menuiserie, peinture, sculpture, théâtre, cinéma...) dont le directeur était Walter Gropius, architecte, qui a conçu le bâtiment, un grand immeuble blanc et gris, avec des façades vitrées.

C'était un lieu d'intense création artistique, beaucoup d'artistes y ont séjourné, et un style bien particulier, aux lignes épurées, sans fioritures, et qui se veut moderne et fonctionnel. Ils ont inventé le design, les chaises pliantes, les tables gigognes, les lampes de bureau...

Je vais voir les maisons "des maîtres", les profs, alignées dans un parc planté de pins. Toujours un style et un ameublement qui se veut très fonctionnel. Et puis le musée où sont regroupées de nombreuses créations de toute sorte, des documents photographiques et cinématographiques. Évidemment le nazisme a mit fin à tout ça.

Ce n'est qu'en fin d'après-midi que je remonte en selle, je vais rejoindre l'Elbe à travers la même plaine qu'hier, forêts ou prés parsemés de gros arbres. Je passe une maison forestière, un Biergarten fort animé, des portes monumentales de pierre ou de brique, et rejoins l'Elbe à la localité de Volkeröde. Elle est bleue, coule paresseusement. Prochaine localité, Wörlitz, lieu de résidence de princes, un beau palais blanc à colonnes au bord d’un étang, grande église de brique, maisons de brique ou crépies certaines à colombages, jolie ville.

Une porte dans la forêt, château et église de Wörlitz 

La journée se termine par un trajet campagnard, sur une piste qui circule au pied d'une digue. Je me décide à m’arrêter, une entrée de chemin un peu cachée et suffisamment abritée, car il y a du vent. Dans les buissons les rossignols s'égosillent.

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Camping à Klöden à env 30km de Wittenberg

Lundi 2 mai Lütherstadt Wittenberg- Klöten 40km

Il ne me reste qu'une dizaine de km pour traverser l'Elbe, sur un pont bien organisé avec voie ferrée, voie automobile, voie cycliste, et pour arriver à Wittenberg, la ville de Lüther (=Lütherstadt), où ce personnage très illustre en Allemagne a vécu la plus grande partie de sa vie.

J'entre dans la ville ancienne par l'extrémité ouest où s'élève un imposant clocher. C'est l'église du château, attenante à celui-ci. L'entrée donne sur une cour où se trouve aussi l'auberge de jeunesse devant laquelle circule un groupe de gamins bruyants, cela n'aurait pas été une bonne idée de séjourner là!

Mais la première chose à faire est de trouver un réparateur de portable. Le gars est jeune et plutôt sympa, il a visité la France, en voiture, l'année dernière. Pas réparable me dit-il. Il me propose un appareil à 200€ je manque l'acheter jusqu'au moment où il s'avère que ma carte Sim n'y rentre pas, c'est possible de la découper mais ça présente des risques, tant pis je continue comme ça. On verra à Prague... Il me faudrait juste un wifi quelconque pour remplir le blog et envoyer quelques mails, seulement ici on n'est pas au Kosovo ou en Albanie nulle part on ne vous permet de vous connecter, et un soi-disant réseau public fonctionne si mal qu'il est inutilisable.

Laissons tomber, visite de la ville. La foule des touristes commence à affluer. Enfin essentiellement ils se restaurent ou mangent des glaces aux terrasses. Une rue sur toute la longueur, et au milieu la "Marktplatz" place du marché, qui correspondrait chez nous à la place de l'hôtel de ville. Devant le beau Rathaus blanc, hôtel de ville époque Renaissance, s'élèvent deux monuments (19ème) qui contiennent les statues de Luther et de son collègue Melanchton. Derrière la place émergent deux tours d'une église dont je ne trouve pas d'entrée ouverte, mais autour les petites places et ruelles sont tranquilles et charmantes. De l'autre côté de la place se trouve la cour de Cranach, où le peintre Lukas Cranach avait son atelier. C'était un ami de Luther et c'est lui qui a fait tous ses portraits de son vivant.

En suivant la rue vers l'extrémité est de la ville on peut admirer d'autres bâtiments de style Renaissance, notamment la maison de Melanchton et l'université, et puis la maison de Luther et l' Augusteum qui était une école, maintenant musée. On y entre par un porche, à l'intérieur au milieu d'une cour ou plutôt d'un jardin, s'élève une statue de la femme de Luther, Katharina von Bora, une maîtresse femme apparemment. C'était une religieuse qui avait fui du couvent convertie aux idées de Luther. Celui-ci était contre le célibat des prêtres et préconisait de marier les religieuses converties pour assurer leur protection, mais Katharina n'a pas voulu d'autre mari que Martin.

J'avais des craintes, mais non, le musée est ouvert aujourd'hui. Je ne suis pas bien en avance mais il ne faut pas manquer une occasion de s'instruire. En effet il y est décrit, documents à l'appui, toute la vie de Martin Luther et son œuvre. Pour résumer il est venu ici pour étudier, il s'est offusqué de la pratique des indulgences qui consistait à donner des sous pour obtenir de forts beaux documents à présenter à l'entrée du dit purgatoire et s'épargner ainsi quelques années d'épreuve. Il a écrit "95 thèses" contre cette pratique, qu'il a présentées à Wittemberg, et les a imprimées, évidemment il s'est fait mal voir, d'autant plus qu'il critiquait aussi l'Eglise et la papauté. Le pape a promulgué une "bulle" (déclaration écrite) où il l'enjoint de de renier ses dires dans les 60 jours, il fait brûler les écrits de Luther, Luther brûle la bulle, le pape l'excommunie. Il va au Reichstag de Worms s'expliquer, il se cache au château de la Wartburg grâce à un protecteur noble, revient deux ans après. Il commence à faire école et à trouver beaucoup d'appuis, il peut s'exprimer au grand jour et commencer à mettre en œuvre sa réforme. Il n'était pas trop tendre envers les dominants mais ce n'était pas un révolutionnaire, quand une révolte a éclaté sur la base de ses idées en Allemagne du sud (rapidement réprimée dans le sang), il était tout à fait contre. Et puis il a vécu, professé et écrit tranquillement à Wittenberg jusqu'à la fin de ses jours.


l'Augusteum, et Luther par Cranach 

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En même temps on visite les anciennes pièces de la maison, certaines presque dans leur état initial. La salle à manger est immense mais il y avait du monde à table, la famille de Luther et aussi des étudiants qui étaient logés là.

La deuxième partie de l'expo c'est l'influence et les représentations de Luther après sa mort. Étonnant comme tous ces portraits ressemblent peu à ceux de Cranach faits d'après nature. Mais là je passe vite, car il est tard et je dois continuer ma route.

Je vais parcourir une trentaine de kilomètres, par le beau temps à la lumière du soleil, sans vent et sans reliefs, tout va bien. Les plaines de l'Elbe et les prairies, toujours, le fleuve visible très épisodiquement, des digues encore.

Un camping "pour cyclistes" est indiqué à Klöder, allons y voir... C'est une maison d'hôtes avec un grand terrain sans aucune tente ni caravane ce soir. Des tables en bois par ci par là. Je me renseigne, c'est 9€50, il y a WC douche, la wifi et même une cuisine équipée. C'est vert et calme. Bref un endroit idéal!!

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Beau temps, plus chaud, le vent doit être du nord-est, il me pousse la plupart du temps !

J'aurais du aller plus loin aujourd'hui mais il y a toujours une raison de traîner, se perdre sur les pavés des petites villes, où ailleurs, prendre des photos, boire un café ici et là, faire la sieste.

Le paysage d'aujourd'hui, c'est la plaine, avec aujourd'hui davantage de cultures, terrains labourés, blé en herbe, champs de colza jaunes. ça ne sent pas toujours bon à cause des épandages de lisier. L'Elbe fait des méandres, parfois a laissé des bras morts. On ne l'aperçoit que deux ou trois fois, et encore, en montant sur une digue. Je traverse le fleuve deux fois, la première au début de la journée sur un bac, avant Pretzsch, la deuxième fois à la fin sur un très long pont avant Mühlberg.

On traverse les villages sur des chaussées pavées pittoresques mais inconfortables. Les trottoirs, en pavés autobloquants ou dalles de béton, sont un peu plus praticables. Les maisons sont colorées, à petites fenêtres sans volets, certaines en briques. Elles sont alignées à distance de la route, dont elles sont séparées par un espace herbeux parfois arboré.

La localité la plus importante est Torgau, aux pavés bien inégaux aussi, elle est riche d'une histoire que j'avoue n'avoir guère étudiée. Il reste de bien beaux bâtiments de style renaissance, le château de Hartenfels, des églises de brique, l'hôtel de ville. La place du marché est d'une animation très populaire.

la place du marché, le château

En avril 1945 les troupes américaines et soviétiques se sont rejointes ici, d'où un grand monument édifié en 1975 en cet honneur... d'ailleurs bien plus en l'honneur des Russes que des Américains. Pour finir je prends le temps de visiter l'exposition dans un ancien centre de rééducation de la jeunesse délinquante de la DDR, une maison de correction quoi, avec des méthodes beaucoup plus répressives qu'éducatives. Les témoignages sont assez terribles. Il a fonctionné jusque 1989.

Maintenant il faut appuyer un peu sur les pédales si je veux arriver demain soir à Dresde. On voit toujours aussi peu le fleuve, mais on longe de grands étangs qui ont été des gravières, certaines encore en exploitation. C'est au bord d'un de ces étangs que je vais planter ma tente juste après la petite ville de Mühlberg an der Elbe.

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Chez Marcus, Dresde côté ville nouvelle

mercredi 4 mai Mühlberg - Dresden 73km

Beau temps, un peu voilé

L'environnement va changer , la vallée devient plus étroite, l'Elbe fait de moins en moins de méandres et coule plus vite. La voie cyclable longe vraiment le fleuve. Elle est étroite et entrecoupée de tronçons pavés quelque peu cahotants. Je suis partie tôt et essaie de ne pas traîner. Sur l'autre rive j'aperçois des châteaux, des clochers, de loin. Je ne traverse pas pour voir la ville de Riesa. Mais je vais encore être retardée, d'abord j'oublie ma bouteille d'eau sur un banc, alors je m'arrête pour en racheter une et faire quelques courses, et en sortant du magasin je constate que mon téléphone qui s'était miraculeusement mis à remarcher hier soir est de nouveau inutilisable, il faut tout réinstaller dans le vieil engin, j'en profite quand même pour faire sécher ma tente, le tout sur un banc au bord du fleuve.

voie pavée et industries à Nünchritz 

L'habitat est beaucoup moins rural, les maisons sont plus récentes et plus banales, et l'industrie réapparaît, une immense usine pleine de cheminées se mire dans l'eau. La vallée devient plus étroite mais aussi plus profonde, sur les coteaux réapparaissent quelques vignes et parfois des falaises rocheuses couleur ocre. En approchant de Meissen la circulation se densifie déjà sur la voie, plus loin vers Dresden encore bien plus. Pas trop de vélos électriques et pas mal de cyclistes sportifs.

Meissen. Une ville historique connue pour la porcelaine, ce serait le premier endroit où elle a été fabriquée en Europe. Un clocher gothique tout noir entouré d'un château, en haut d'une colline, comme à Prague. J'avoue que je ne le verrai que d'en bas, je me contente d'un tour dans la ville basse et d'un pique-nique sur un banc près de la "Frauenkirche", que je vais quand même aller visiter.

Meissen, et l'arrivée à Dresde

Il y aurait certainement des choses à voir dans la dernière partie du trajet, ça et là des châteaux sont visibles sur les hauteurs... mais je n'ai plus le temps si je ne veux pas arriver trop tard à Dresden, je suis attendue chez un cycliste qui s'appelle Markus. Cela n'est pas si rapide que ça, la direction a changé, vers l'est, et le vent ne me pousse plus... En approchant de la ville on passe sur plus de ponts que je n'en ai vu depuis ce matin, et on voit apparaître quantité de dômes, tours ou clochers tout noirs.

Ce n'est pas facile de quitter les bords de l'Elbe, pour monter il n'y a que des escaliers. Je me débrouille finalement et j'arrive chez Markus, dans un quartier fort vivant, bohème et diversifié, avec plein de tags partout. Markus a un appartement dans une vieille maison comme j'aime, aux planchers de bois grossier. Il a voyagé jusqu'à la Norvège l'été dernier.

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Nuages et soleil

Direction le centre historique, à pied. L'Elbe sépare la ville en deux parties, l'"Altstadt", vieille ville, sur la rive gauche, et la "Neustadt", nouvelle ville, sur la rive droite. Depuis la "Neustadt extérieure", dans les quartiers populaires et artistes, fort bariolés, je me dirige vers la "Neustadt" intérieure plus chic.

Neustadt, quartier des artistes, et l'avenue qui mène au "cavalier d'or"

Au bout d'une large avenue piétonne, s'élève la statue équestre entièrement dorée d'un prince de Saxe qui fut roi de Pologne, il reste quelques pas pour arriver au pont Augustus et entrer dans l'"Altstadt": des palais, des églises, des coupoles, des clochers, des sculptures et des statues partout. La couleur noire domine.

Ce qu'on sait de Dresde chez nous, c'est que la ville a été entièrement détruite par les bombardements des alliés en février 1945. La reconstruction a duré très longtemps, c'est même toujours en travaux. On a mis de côté des pierres récupérées dans les ruines pour les réinstaller à la même place, intercalées avec les neuves, blanches: d'où l'aspect mosaïque du pont Augustus ou de la Frauenkirche, dont la restauration n'a été terminée qu'en 2005. C'est une très belle église baroque, immense.

Frauenkirche 

Devant l'église s'élève une statue, pas du tout ressemblante, de Martin Luther.Dans une autre église, la Kreuzkirche non moins immense mais plus sobre, j'ai beaucoup apprécié de pouvoir écouter une répétition de musique baroque, de Heinrich Schütz peut-être, le maître de chapelle d'ici.

L'énumération de tous les monuments palais musées serait lassante. Ce qui est étonnant c'est cette concentration de bâtiments historiques, de la renaissance au XIXè en passant par le baroque et le rococo. Le plus étonnant est l'immense palais Zwinger, composé de plusieurs pavillons plus somptueux et plus ornés les uns que les autres, encadrant une cour malheureusement en travaux et complètement défoncée en ce moment. On peut quand même circuler sur la galerie supérieure en compagnie d'une foule d'angelots et de charmants personnages mythologiques (et d'assez nombreux touristes, aussi!). Le bâtiment contient plusieurs musée notamment un musée de la porcelaine présentant les vases et objets divers de Chine et du Japon que collectionnait le roi "August der Starke", le cavalier doré de tout à l'heure. Il a fondé à Meissen la première manufacture de porcelaine en Europe.

Le Zwinger 
la nouvelle synagogue, l'académie des Beaux Arts, la "Stallhof", Molière sur l'Opéra, l'Elbe et le pont Augustus 
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Beau temps, nuageux parfois

Adieu Dresde, et bonjour l'Elbe qui sera ma compagne de la journée, elle changera de nom dans la journée et s'appellera Labe passée la frontière tchèque.

Car aujourd'hui, que ce soit sur l'une ou l'autre rive, l'itinéraire ne va pas quitter le bord de l'eau. Je suis d'abord la rive droite (j'ai donc le fleuve à ma droite puisque je le remonte), pour commencer sur une piste large et plane où se promènent les citadins, plus loin la direction change, il faut même emprunter une route assez passante, alors quand je vois qu'un bac peut m'emmener sur l'autre rive (la gauche, donc) je me décide à le prendre. C'est pas donné 2,50€ est ce parce qu'il s'appelle "Schlossfähre", bac du château? Mais où est le château? Il y en a bien un, je ne le verrai qu'après avoir un peu avancé. C'est le château de Pillnitz.

 Château de Pillnitz et constructions industrielles

Je suis contente d'avoir traversé, la piste circule en majeure partie sous des arbres, c'est très agréable. Quelques ouvrages industriels aussi au passage. Et j'arrive comme ça à Pirna, une petite ville historique, Parmi les maisons anciennes, celle de "Canaletto". Le peintre Vénitien? oui et non, ce n'est pas celui qui a tant peint Venise mais un autre qui a pris le même pseudonyme, Bernardo Bellotto, qui a surtout exercé en Saxe. L'église, l'hôtel de ville, et une ancienne borne, ou plutôt un poteau indicateur du royaume de Saxe où les distances sont indiqués en heures sans précision du moyen de transport. Le château de Sonnenstein s'élève au-dessus de la ville. Il est de sinistre mémoire, les nazis y ont pratiqué l'eugénisme en y exterminant environ 15000 personnes, malades mentaux et handicapés.

Pirna, maison de Canaletto, et le château au-dessus de la ville

Après Pirna commence la "Suisse Saxonne", un paysage montagneux assez particulier, parsemé de hauts rochers de grès aux formes tourmentées. On y pratique la randonnée et l'escalade. La vallée est plus encaissée et plus sauvage. Peu de villages, pas de ponts mais des bacs, et des embarcadères où s'arrêtent des bateaux de croisière ou de promenade. Sur l'autre rive on verra la dernière localité allemande, c'est Bad Schandau, et puis des lieux aux noms slaves, Smilka, Hrenko, là c'est déjà la Bohème. Pour la rive gauche où je suis, ce sera un peu plus loin, la frontière est annoncée par une colonne tricolore portant un blason: "République tchécoslovaque"!

la "Suisse saxonne" et la frontière "tchécoslovaque"

Grosse déception, les Tchèques ne saluent pas plus que les Allemands, il n'y a pourtant pas plus de fréquentation, c'est encore moins habité et la vallée est encore plus profonde. Quand apparaissent des installations industrielles et des grues, c'est que l'on arrive à Děčin. On y entre en passant le pont de l'Elbe, sous un grand château blanc.

Trop de voitures dans la ville, ça ne donne pas envie d'y rester. Après avoir pris de l'argent et fait un minimum de courses au supermarché "Billa", je me dirige vers le camping. Pas trop bien placé, en bordure de toutes les voies de circulation, mais pas trop encombré de camping-cars. Il faut payer sur son portable après avoir scanné un QR code, ce qui est totalement impossible pour moi, je m'installe quand même, on verra bien. Je bois ma première bière tchèque, celle de la brasserie de Děčin, très bonne.

Děčin  
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Une journée de beau temps au bord de l'Elbe, la piste suit le fleuve. La région est au début encore un peu montagneuse, mais à la sortie de Děčin la vallée est un plus large et plus habitée. Elle est parcourue par une route, sur l'autre rive, et de voies ferrées, de chaque côté.

À Techlovice s’élève un petite oratoire blanc, c’est une « chapelle de la peste », édifiée après un épisode de peste au 17è, si j’ai bien compris, à l’endroit où se trouvait la fosse commune.


l'Elbe à la sortie de Děčin, la chapelle de la peste 

Je passe sans m'arrêter devant Usti nad Labem, la grande ville industrielle. Peu après, mauvaise surprise à un barrage: pour le franchir en vélo, pas d'autre moyen que monter puis redescendre un escalier de fer, il me faut décharger tous les bagages.

Le vent me pousse. La piste cyclable s'anime, il fait beau, c'est samedi, les gens se promènent, ou pêchent. Le chemin est bordé d'arbres. Sur l'eau on voit passer quelques petits bateaux à moteur ou à rames.

l'Elbe citadine à Usti nad Labem, et l'Elbe pour la détente 

J'arrive tôt à Litoměrice où j'envisageais de m'installer au camping mais il n'est pas formidable. C'est une des villes les plus anciennes de Bohême, elle est donc située sur une hauteur, et les églises y sont nombreuses. Diverses religions avec plus ou moins de troubles sont passées par là, les hussites, la réforme luthériennes, la contre-réforme (où s'est déchaîné le style baroque). La place centrale est très grande, bordée de maisons à fronton orné et à arcades. Malheureusement les véhicules y stationnent. Au dessus de l'hôtel de ville une étrange cheminée représente le calice des hussites, réformateurs tchèques, dont c'est le symbole car ils communiaient sous les deux espèces ("utraquisme"). Au milieu de la place une colonne commémore la peste.

La cathédrale (Sv Stepan, Saint Étienne) est un peu à l'écart, très grande (malheureusement fermée). Une tour blanche séparée, un grand parc tranquille. Dans la ville on trouve encore un collège de jésuites, (un ordre très actif à la contre-réforme), d'autres belles maisons de styles divers, et celle de Karel Hynek Macha, grand poète romantique tchèque.

Je pars pour Terezin, alias Theresienstadt, encore un lieu tristement célèbre depuis la dernière guerre. Les nazis y mirent en place après en avoir vidé les habitants un ghetto juif , un camp de transit et un camp de concentration où ont été enfermés de nombreux artistes qui ont continué à créer, les nazis ont voulu faire passer le lieu pour un camp modèle. Les atrocités ne manquaient pourtant pas. Une pensée pour le poète Robert Desnos qui y est mort.

Une impression de déjà vu en arrivant....Cette ville est une ancienne place forte construite au 18ème, remparts à la Vauban, construite sur le modèle de Brouage. Les casernes et bâtiments militaires ont servi à de sinistres desseins. Aujourd'hui la ville est vide, et je regrette de ne pas pouvoir visiter le musée et les divers mémoriels, tout est fermé.

Le camping n'existe plus et je n'ai pas tellement envie de passer la nuit dans ces parages, je retourne donc à Litoměrice et sur une rive où des pêcheurs ont installé leurs tentes je plante la mienne au milieu d'un bouquet d'énormes peupliers noirs.

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Beau le matin, orageux l'après-midi

Un trajet qui suit un peu moins la rivière de près, traversant parfois des zones agricoles. Au dessus de la plaine apparaissent deux monts arrondis, l’un d’eux est le Řip, célèbre dans l’histoire de Bohême.

Pour aller à Roudnice nad Labem, ça monte évidemment. La statue de le reine Ludmila s'élève à la sortie du pont, plus loin la très grande place est pavée et en pente. Château, vieilles maisons, statue de Jan Hus.

Une belle portion de piste neuve et confortable suit continûment le fleuve qui est de plus en plus large, sans doute à cause des barrages, on peine à comprendre qu'on le remonte. Après une zone naturelle avec boisements, rangées de peupliers et mouettes, on voit apparaître le château et l’église de Melnik en haut d’une butte plantée de vignes. De nouveau il faudra monter!

Les touristes, des locaux, se pressent autour du château, de l'église Saint Ludmila dotée d'un orgue original, des rues bordées de maisons à arcades. Sur le belvédère on jouit d'une vue étendue, sur le Řip, sur l’Elbe, sur le confluent avec la Vltava et une écluse.


Melnik 


Et puis au revoir l'Elbe, et bonjour la Vltava, c'est la rivière qui passe à Prague, plus connue sans doute, sous le nom de Moldau. Connue grâce à Smetana qui évidemment n'avait pas utilisé cette dénomination germanique. Au début je suis déçu, elle n'est pas jolie et pas très large, sans doute parce qu'un canal la double, ce sera plus beau un peu plus loin.

Les nuages couvrent le ciel que s'en est un peu inquiétant, quelques gouttes tombent parfois. Je passe devant deux châteaux, Veltrusy plutôt baroque et dont le parc est (c'est dimanche) apprécié par les promeneurs, puis de l'autre côté de la rivière celui de Nelahovezes, plutôt renaissance. Ce n'est pas le château qui m'intéresse mais la maison natale de Dvorak juste à côté, c'est aussi un musée... qui n'ouvre que sur demande préalable. Plus loin surprise, la piste se rétrécit et suit au ras de l'eau des falaises rocheuses.

Châteaux de Veltrusy, de Nelahovezes, maison natale de Dvorak et falaises rocheuses

Je passe la ville de Kralupy nad Vltavou, vais-je continuer ce soir jusque Prague? J'hésite, encore 30km, c'est beaucoup, et puis le ciel devient très très noir... Tiens, un coin herbeux devant des maisons, les propriétaires sortant de l'une d'elles n'ont rien contre à ce que je me mette là.... Catastrophe, c'était dix minutes trop tard!!! C'est sous la tourmente que je monte la tente, ensuite je peux m'y abriter mais dedans c'est complètement trempé. Ni éclairs ni tonnerre, mais une belle pluie. Qui va heureusement cesser, ensuite je vais écoper avec ce que je peux, torchons, écharpes, ligne sale... dans le duvet je me réchauffe et je dormirai très bien! Mais heureusement que je serai à Prague demain...

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Chez Ludmila Prague quartier Prosek

Lundi 9 mai Kralupy nad Vltavou-Praha Prosek 34km

Courte étape, mais pas si facile. Au début, tout va bien, il n'y a qu'à suivre la Vltava. C'est calme ce matin, quelques pêcheurs tout de même. Mais après quelques kilomètres on ne peut plus suivre le fleuve, il faut monter, mais dans la forêt, traverser un morceau de campagne, puis un village, Klecany, ensuite retour sur la berge. Je pourrai continuer jusqu'au centre de Prague mais Ludmila mon amie à Prague m'a conseillé un autre itinéraire. Je ne sais pas à quoi j'ai échappé mais celui-ci n'est pas si facile que ça... dans la forêt d'abord, puis dans les banlieues, le centre de ce qui fut un village, Bohnice, et puis ce sont soit des cités de grands immeubles soit des parcs boisés mais dans tous les cas, ça monte longtemps.

Encore un Jean Népomucène, à Krestany, et des maisons de village anciennes à Bohnice.  

Quand j'arrive chez Ludmila dans le quartier de Prosek il est presque midi, elle doit partir bosser dans l'après midi, avant ça elle cuisine un excellent minestrone. Après ça c'est pour moi l'occasion de faire une bonne sieste.

Le soir nous irons avec Mouchka sa chienne et Jedi le chien de son fils qu'elle a en pension, faire une balade dans les environs. La campagne est proche, avec des champs et des jardins où elle récupère en automne des noix et des pommes. Aujourd'hui c'est de l'ail des ours que nous allons ramasser.

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Ludmila travaille toute la journée, pour moi c'est une journée d'errance dans la ville. Un trajet que j'ai souvent parcouru, du centre ville commerçant jusqu'aux hauteurs historiques de l'autre côté de la Vltava. Sortant du métro à la station "Muzeum" je me trouve sous la statue équestre du roi Vaclav, devant le musée national et en haut du "Vaclavak" comme disent les Tchèques, Vaclavské Namesti, place Saint Venceslas. C'est un peu les Champs-Elysées de Prague, en moins prétentieux. Les grandes maisons 19è-20è sont souvent repeintes à neuf, en couleurs vives. La partie inférieure est maintenant piétonne.

Vaclavské namesti 

Dans cette partie de la ville la population tchèque est majoritaire mais en approchant de la place de la vieille ville dans des petites rues de plus en plus mercantiles les touristes commencent à s'agglutiner, et se retrouvent en masse devant l'horloge de l'hôtel de ville attendant que sortent les petits personnages.

La place de la vieille ville, qui porte au milieu le monument à Jan Hus et ses disciples, a également été beaucoup nettoyée et relookée mais l'église du Tyn a toujours ses flèches noires.

Vaclavské Namesti et Starometské Namesti 

En direction du Pont Charles (Karluv most) et sur le pont, c'est la cohue, j'essaie de m'en abstraire mais difficile d'apprécier l'endroit. Les belles statues baroques, représentant principalement des saints, ont été en partie nettoyées. Elles sont donc de couleurs différentes et cela nuit à l'unité de l'ensemble. Sous le soleil, les vues sur la Vltava et sur les deux rives (notamment sur le château), sont magnifiques.


Vue depuis Karluv most, Kampa 

De l'autre côté c'est le quartier de "Mala Strana". Un peu de calme sous le pont, sous l'ancienne île de Kampa et les belles rues autour, même si elles sont moins tranquilles que par le passé. Le mercantilisme continue dans la rue qui part en direction du château, mais en montant les boutiques deviennent un peu plus chic, et la foule se raréfie. Je constate que les maisons anciennes sont souvent repeintes, et plutôt remises en valeur, mais heureusement qu'il reste quelques murs lépreux. Le quartier n'a pas encore perdu son charme.

En haut on admire les vues sur la ville, sur la colline de Petrin (la petite tour Eiffel de Prague), le monastère de Strahov, le monastère de Loretka, et d'énormes palais dont certains sont des bâtiments administratifs, d'autres ont été transformés en musées. Arrivée devant le château où je n'entre pas, et puis les grands escaliers descendent vers la ville.

Encore des beaux quartiers en bas, le parlement, des ambassades encore, une concentration de voitures noires et forces de police dont je ne décèle pas la raison. Je cherche sans le trouver le parc Valdstejn, mais à l'entrée des jardins qui montent en terrasses en contrebas des murs du château un orchestre de jazz joue. Sur le côté un buste orné de couronnes de fleurs et de banderoles bleu blanc rouge, qu'elle n'est pas ma surprise quand je me rends compte que c'est... François Mitterand! Et on est le 10 mai, il n'y a plus que les Tchèques (plus précisément un groupe de jazz) pour fêter cette date anniversaire!

Retraversée de ces rues où circulent les tramways et beaucoup de voitures, et la "Malostranské Namesti" place de Mala Strana, toujours autant encombrée, où maintenant il faut payer pour entrer dans l'église de Saint Nikolas (Mikulas) et admirer son magnifique intérieur baroque et ces évêques qui brandissent leurs crosses de tout les côtés. J'en serai donc frustrée, pas question de payer pour entrer dans les églises.

Retour par le chemin de l'aller, la journée ne finit pas très bien car soudain dans le métro mon portable se décharge soudain (le vieux en remplacement auquel j'avais fini par m'habituer). Et il se voudra plus se recharger. Je n'ai pas de plan papier et crains de partir dans la mauvaise direction à la sortie du métro à Prosek, mais je m'y retrouve, en questionnant les passants par sécurité.

Mala Strana, les quartiers sous le château, le club de jazz et Mitterand, retour par Karluv most 
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Beau temps

Pas de visite touristique, seulement des retrouvailles amicales.

L'achat d'un nouveau portable. Il n'y avait qu'un modèle avec carte micro sim. Au moins je n'ai pas eu l'embarras du choix.

Et puis des promenades avec chien près de chez Ludmila. Elle habite dans une cité d'immeubles mais à proximité se trouvent des bois, des champs, et le vieux village de Prosek et ses maisons pittoresques.

Et un peu de jardinage sur balcon

à Prosek, dégustation d'ovocné knedliky avec Iva et jardinage  sous la surveillance de Mouchka
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Beau, vent d’ouest assez fort

Cela ne va pas être facile pour me guider dans Prague. Et une bonne moitié de cette étape sera la traversée de Prague. Les distances y sont longues en effet.

De cette façon on se rend bien compte comment cette ville est vaste et diversifiée. On y trouve juxtaposés des quartiers historiques, des villages, des alignements de belles villas, des cités d'immeubles...et entre tout ça des parcs, des champs, des bois, des champs et des vignes, voire des montagnes.

Je me rends compte que je suis venue souvent mais que je ne connais pas vraiment la ville. Aujourd'hui j'aurai vu les bords de la Vltava et les parcours de kayaks, les vignes de Troja, l'immense parc de Stromovska, le campus universitaire, divers quartiers, et me trouverai toute étonnée à la "Montagne Blanche" (Bila Hora) que j'imaginais dans des contrées lointaines.

les bords de la Vltava et le campus universitaire 

Car cette "Bila Hora" c'est un site célèbre, celui d'une bataille perdue en 1620, qui a entraîné la fin de l'indépendance de la Bohème pour 300 ans, l'interdiction de la langue tchèque et de la religion réformée issue du hussitisme, ainsi que la liquidation de la noblesse tchèque. L'église baroque qui porte le nom de "Notre Dame de la Victoire" a été construite juste après, par les vainqueurs évidemment, c'est à dire l'empire austro-hongrois et l'église catholique. Le baroque et ses lustres ne manqueraient pas d'éblouir le peuple pour récupérer les brebis perdues.

Peu après c'est la campagne. La piste cyclable tranquille que je suis (itinéraire 201) est un chemin de pèlerinage bordé de chapelles qui mène à un autre monastère, Hajek, en beaucoup moins bon état. Sur le plateau le vent souffle d'en face. J'irai beaucoup moins loin que prévu, m'arrête dans un bois de bouleaux et pins.

une chapelle sur le chemin de pèlerinage, ancien jardin au monastère de Hajek 
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Beau temps, mais vent de face

Il fait beau, la campagne est belle, les cyclistes sont de sortie. Je ne vais pas vite ça monte plus que ça descend et le vent me freine. J'arrive à midi à Rakovnik qui était d'après mes plans ma destination de la veille. Jolie petite ville tchèque avec des portes monumentales, la place, l'hôtel de ville, maisons anciennes, la colonne avec statues de saints.


Rakovnik 

Là je rejoins une véloroute européenne, EV4 (indiquée comme telle seulement sur le papier). Je me réjouis ça devrait être plus simple. Ça commence bien, piste cyclable en dur... Assez vite elle se prolonge par un sentier étroit, mais qui roule bien et longe un ruisseau, c'est joli...

Et bientôt rien ne va plus, l'itinéraire m'envoie sans prévenir sur des chemins de campagne empierrés de pierres aiguës et cahotantes. Et bien sûr, ça monte. Là je n'avance plus du tout, suis obligée de pousser... C'est beau la nature, mais bon..... J'ai compris. Désormais je tracerai ma route sur l'asphalte. Je suis bien contente d'avoir acheté des cartes papier.

La fin du trajet sera agréable, lumière du soir, routes pas trop fréquentées... Des étangs de temps en temps. Il y en a beaucoup en Bohème pour la pisciculture.


Mais les côtes ne manquent pas. La dernière, dans les bois après le village de Žihle est assez terrible. Ouf pas besoin d'aller jusqu'en haut, je me trouve un coin de bivouac sous des pins près d'une clairière. Ça ne plaira pas trop aux chevreuils du coin, ils vont protester un peu, tant pis.

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Beau temps, très agréable

Des aboiements m'ont réveillée, chiens, chevreuils, voire cerf. On dirait qu'il y a une maison un peu plus haut.

La journée commence dans les hêtraies, avec du relief, surtout pour traverser le village de Rabstejn, qui est dans un trou c'est le moins qu'on puisse dire. Mais le site est unique, vieux pont, maisons de bois, église baroque jaune et blanche tout en haut et restes d'un château fort.

Rabštejn nad Střelou

Je vais m'arrêter plus longtemps dans un village bien plus modeste situé à quelques tours de roue, Mocidlec, où habitent dans l'ancien presbytère Mišel-Miloš neveu de Ludmila, qui est musicien, sa femme Biela et actuellement 5 de leurs 7 enfants. On parle de voyages, et d'un tas de choses. Michel me dissuade de passer par Karlovy Vary et me concocte un itinéraire tranquille dans une jolie région.

l'ancien presbytère de Mocidlec, et la campagne de Bohême 

C'est d'après Mišel la région la moins peuplée de Bohême, avant la dernière guerre les Allemands y étaient majoritaires, on s'en rend bien compte car les inscriptions sur les monuments anciens sont toujours en allemand. La cohabitation n'était pas conflictuelle mais a été le prétexte de l'invasion pour Hitler.

C'est un plateau ondulé où les grandes cultures alternent avec des bois de résineux ou de hêtres. Les petites routes sont bordées d'arbres fruitiers, encore fleuris, les villages sont désertiques et plutôt pauvres. Les grandes fermes construite à l'époque du socialisme sont en ruines. C'est calme, très calme, et il fait beau.

Quelques sites remarquables en chemin, un village appelé Utery, le monastère de Tepla.

Utery                                           monastère de Tepla 
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Beau le matin, nuageux et lourd l'après-midi

La route longe une petite voie de chemin de fer et la traverse à plusieurs reprises. Pas de passage à niveau et pourtant un petit train rouge circule régulièrement, en sifflant pour avertir de son approche.

Au cimetière de Ovesné Kladruby les tombes anciennes sont allemandes, les récentes tchèques, et l'eau bien fraîche. Le presbytère (toujours la plus grande maison du village) est refait à neuf, pas l'église.

Après avoir bien monté, la route descend vers Marianské Lazne, alias Marienbad. J'y trouve bien moins de charme qu'il y a quelques dizaines d'années, maintenant que tous les bâtiments, colonnades, casino, immenses villas et hôtels sont retapés, repeints de blanc et couleurs claires, c'est un étalage de luxe, ce n'est plus l’atmosphère désuète que j'avais aimée. Mais le parc est très beau, encore une fois je passe trop vite.


Et la route continue vers l'ouest et en montée presque continue, un dénivelé de 400m m'attend. Le seul village traversé s'appelle Vysoka (="haute") en tchèque et Maiersgrün en allemand, aucun rapport donc. L'église a été détruite pendant la guerre, seul le clocher a été restauré. Les anciens habitants en sont toujours nostalgiques, leurs faire-part de décès sont accrochés sur de grands panneaux.

Je suis l'itinéraire cycliste n°361 vers Cheb, ce n'est pas indiqué sur les panneaux, c'est aussi l'eurovélo 13, déjà croisée en Allemagne entre la Hesse et la Thuringe, la véloroute qui suit le rideau de fer de la Scandinavie aux Balkans. Je n'y rencontrerai pas de cyclistes aujourd'hui, et même personne à part une petite famille en balade. La petite route circule sur des hauteurs boisées entrecoupées de quelques champs. La carte l'indique comme goudronnée... mais ça fait longtemps, ce n'est pas tellement mieux qu'un chemin de campagne. Elle passe près de la frontière, et près du centre de l'Europe (laquelle?). Les miradors aux alentours n'ont rien à voir avec le rideau de fer, l'usage en est plus pacifique... sauf du point de vue de certaines espèces animales.

Et enfin, la récompense... la descente! Sauf qu'on ne peut pas trop foncer tant que la route est mauvaise. ça va s'arranger à l'approche de Cheb (qui s'appelle Eger en allemand, rien à voir non plus). Ce soir tentée par la douche et la lessive, et avertie de pluies par la météo, je me suis réservée une pension. Je ne verrai la ville que demain.

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Chaud

La place centrale de Cheb, qui porte le nom du roi hussite Jiri z Podebrad, est pavée, de forme allongée, entourée de maisons du moyen âge au baroque. La cathédrale est de style gothique, ça change

J'ai quelques achats à faire dans un magasin de vélos, j'ai en effet perdu l'étui de mon porte - téléphone et cassé mon rétroviseur, je trouve tout ce qu'il me faut et me fait gonfler les pneus, il n'est pas tôt, le magasin n'ouvrait qu'à 11h mais je ne suis pas trop pressée de quitter, déjà, ce beau pays.

Sans le faire exprès, c'est pile à la frontière que je m'arrête pour le déjeuner.

Mais la Bavière a aussi son charme, villages propres, collines vertes, belles voies cyclables bien signalées. Comble du confort, une ancienne voie ferrée. Elle monte, car il va falloir passer le massif montagneux du Fichtelgebirge, mais régulièrement et dans la nature. Par contre quand je quitte cette voie pour une route forestière bien plus pentue et non asphaltée ça devient très dur. D'autant plus que les moustiques en profitent pour me piquer.

Un cycliste qui roule dans mon sens arrive à mon niveau et entame la conversation. Il s'appelle Johannes, revient du boulot (20km matin et soir avec +250m de dénivelé), il me propose de camper près de chez lui. J'avais pensé m'arrêter au Fichtelsee qui est un endroit assez joli mais on ne refuse pas une rencontre. Sa copine Franziska (!) a vécu en France elle parle couramment français. J'ai droit à la douche et à une bonne soupe et plante la tente en bas de chez eux.


Fichtelsee
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Temps chaud, lourd

Avant de partir je monte voir Franziska, restée à la maison avec le petit Paul, 2 ans, qui dormait hier soir et dont le mot préféré est Zug (train).

Des vallées boisées et fraîches et 24 km en descente jusque Bayreuth. Descente.. sauf plusieurs côtes courtes mais bien raides quand il faut quitter l'ancienne voie ferrée. Je ne rencontre pratiquement personne.

À Bayreuth par contre il y a du monde. Une population diversifiée. Tout le centre ville est piéton, mais je me dirige vers le "Hofgarten", le parc du château, très agréable surtout qu'il commence à faire chaud. C'est là que se trouve la maison que le roi Louis II de Bavière a fait construire à Richard Wagner, c'est maintenant un musée.

C'est plutôt un mini château qu'une maison avec ses grandes pièces hautes de plafond et ses grandes fenêtres, seuls quelques meubles sont exposés, dont le piano.

Wagner est né à Leipzig (1813) a vécu à Dresde, à Zurich entre autres car il voyageait beaucoup, il est d'ailleurs mort d'un infarctus à Venise. Il était ami avec Liszt et a eu le coup de foudre avec sa fille Cosima qui était déjà mariée. Après 3 enfants illégitimes ils ont fini par se marier, et ne plus se quitter. Cosima avait 24 ans de moins que lui et lui a survécu 47 ans qu'elle a employés à perpétuer l'œuvre de son mari principalement le festival pour lequel Wagner avait fait construire (toujours grâce à Louis Il) une salle de spectacle pour représenter ses opéras.

Elle a perpétué aussi ses idées nationalistes et antisémites, était bien copine avec Hitler, elle est décédée en 1930 mais ses enfants ont repris le flambeau, ont soutenu les nazis et viré tous les musiciens qui n'étaient pas conformes à l'idéal germaniste, en premier lieu les juifs évidemment.

Bref on éprouve quand même un certain malaise en sortant de là...

La maison, Richard et Cosima, leur tombe et l'arrière de la maison, Festspielhaus et le parc à côté

La salle du festival c'est à quelques kilomètres du centre près d'un grand parc. Je trouve que de l'extérieur ça ressemble plutôt à une usine. Dans le parc autour du buste de Wagner sont installés des panneaux évoquant les musiciens éliminés par les nazis.

Je repars passé 17h, rejoignant le Main "rouge" qui est rectiligne et étroit, mais ce n'est qu'une des branches de la rivière. Les deux "Main" vont se rejoindre à une trentaine de km de là, tout près de l'endroit où je vais bivouaquer.

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Chaud, orageux...et orage

Mon pré est à quelques tours de roue de la confluence des deux ruisseaux qui vont former le Main, le Main rouge et le Main Blanc. Je vais maintenant suivre la rivière jusque Mainz (Mayence). C'est parti. Je ne verrai que de loin le château de Kulmbach, fief des Hohenzollern, puissants seigneurs germaniques.

Confluence des deux Main, et vue lointaine du château de Kulmbach

Une route tranquille, soleil et vent dans le dos, jusqu'à Lichtenfels, petite ville ancienne avec quelques monuments, église, porte. Du château je ne verrai que le parc où je me réfugie à l'ombre pour déjeuner. Même là il fait très chaud et très lourd.

Le trajet qui suit n'est pas formidable. Une plaine assez urbanisée, des routes... On aperçoit des abbayes sur les hauteurs. Cela devient plus rural un peu plus loin

J'hésite à aller jusque Bamberg mais je perds du temps en me trompant plusieurs fois de route. Il y a un camping une vingtaine de kilomètres avant. Allons voir.

Il est assez grand, camping-cars et caravanes ne manquent pas mais les espaces herbeux au bord du lac non plus. Personne à l'accueil, je téléphone mais ça ne sert à rien. Regard sur le ciel.... Un cumulonimbus s'approche... Pas d'hésitation !

L'orage veut bien aujourd'hui attendre que je sois bien installée ! Génial !

sculpture moderne, sculpture baroque (Népomucène toujours), le Main et le camping au bord du lac 
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Toujours chaud mais un peu de vent

Le ciel est voilé et une légère brume s'élève au dessus du lac. Il me reste une petite vingtaine de km jusque Bamberg. L'itinéraire suit des routes ou traverse des villages de banlieue. Plusieurs déviations ne sont pas toujours bien fléchées. Une dame en voiture m'indique spontanément comment passer.

Bamberg ne semble pas avoir connu trop de destructions, c'est une grande ville ancienne. Évidemment le plus remarquable c'est le centre historique, et je ne suis pas arrivée assez tôt pour éviter la foule touristique. Des rivières ou bras de rivière (Main, Regnitz et autres) traversent le centre. Des barrages et quantité de ponts agrémentent le tout. L'ancien hôtel de ville aux murs couverts de fresques est construit au milieu.

En montant par des rues bordées de maisons anciennes et de sculptures baroques on arrive à la grandiose place de la cathédrale. Les flèches de celles ci sont quelque peu défigurées par des échafaudages. Plusieurs styles cohabitent du roman au baroque. À l'intérieur se trouve le célèbre cavalier de Bamberg belle statue du 13e. Et de belles sculptures, sur les porches également.

Autour de cette immense place se trouvent également un bâtiment médiéval où se trouve un musée, et un immense palais du 17è.


Je termine la matinée sur la place du marché où j'achète des fraises locales "de Franconie" c'est ainsi que s'appelle cette partie cette partie de la Bavière. Elles sont excellentes.


le vieil hôtel de ville, et la place du marché 

Sortie de ville au bord du Main, ensuite la piste suit la route. Ce n'est pas complètement déplaisant en ce jour de quasi canicule, car on roule à l'ombre sous un vent léger. Collines boisées de chaque côté de la rivière. Odeurs des colzas qui terminent leur floraison et des blés qui grainent.

Au passage on peut admirer une immense chapelle de pèlerinage (Wallfahrtkirche), très rococo à l'intérieur.

À Sand am Main un pépère en vélo avec une bouille incroyable m'adresse la parole en patois bavarois. J'ai un peu de mal. Il me vante je crois Zell am Main, le bourg qui est de l'autre côté du Main.

En effet, très beau village, et assez animé. L'église est en haut d'une place triangulaire. Plus loin se trouve la "Hexenturm", tour des sorcières, fermée mais la dame du petit office de tourisme, très gentille, me parle de la chasse aux sorcières pendant la guerre de 30 ans (17e siècle). Les supposées telles étaient enfermées dans la tour. Sous la torture elles avouaient tout ce qu'on voulait et finissaient brûlées vives. 400 femmes y ont passé dans ces lieux.

Zell am Main, avec la tour où on détenait les supposées sorcières 

Je passe plus rapidement à Hassfurt. Le ciel est très très noir. Après hésitation je continue et en effet le danger d'orage s'éloigne. Mais je perds du temps trouvant le chemin barré par des travaux. Un joli emplacement m'attend tout au bord de la rivière, un peu venté, comme ça pas de moustiques. Le problème c'est que ça se met à souffler très très fort. Mais la pluie ne tombera pas.

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Nuages, moins chaud, vent d'ouest

Jusque Schweinfurt la piste suit la rivière, on baigne dans la nature, et pourtant la voie ferrée et la route sont juste à côté. Et il n'y a personne.

Petite animation à Schweinfurt pour le marché, en face de l'hôtel de ville. La boulangerie pâtisserie cafétéria où je me suis installée se remplit peu à peu. L'église à l'autre bout de la place est ouverte, elle est jolie à l'intérieur, grise et blanche, une chaire très dorée et des tombeaux de chevaliers.


Après quelques tournicotages pour contourner routes et autoroutes la piste va rejoindre les bords du Main, de là vue imprenable sur ce qui de toute évidence est une centrale nucléaire (Grafenrheinfeld). Elle ne fume pas, arrêtée depuis 2015.

Revenons à des paysages plus champêtres, arboriculture (je mange trois cerises presque mûres), cultures maraîchères. Dont les fraises. Et puis des vignes sur les coteaux. Est ce à cause de ça ? Fahr, Volkach, Nordheim, le coin s'avère très touristique. Tous charmants villages, avec beaucoup de caves viticoles et des restos bondés mais aussi des hôtels de ville, des portes fortifiées, des églises et des maisons à colombages.

Le temps s'est dégagé et l'air se réchauffe. Il souffle un fort vent d'ouest qui ne va me gêner que sur une portion, cet après midi je me dirige vers le sud.

Kitzingen me plaît bien, jolie petite ville vivante, des gens normaux (pas des touristes), en ville et au bord de la rivière. En repartant je suis intriguée par un étrange bâtiment à deux clochetons. Une architecture pourtant caractéristique: c'est une synagogue.

Comme j'aime rouler le soir je continue jusque Ochsenfurt où j'ai repéré un camping. Je quitte le Mainradweg pour suivre l'autre rive, très tranquille.

Personne à la réception du camping, mais ici on peut s'installer et tout est ouvert. La vaste pelouse pour les tentes est plus ou moins en pente mais il y a peu de campeurs alors c'est possible de trouver un replat.

Et dans la Gasttstätte au-dessus ils ont la bière locale, Öchsner, à la pression. Très bonne. Quel plaisir de pouvoir enfin goûter la bière bavaroise !

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Beau temps

Ça aurait été très facile de partir sans payer, mais pour une fois qu'on peut arriver tard et profiter des services.. Et puis pour avoir une idée du prix..

Ben... 18,90 euros ça fait beaucoup quand même...

Les bords du Main, tranquilles encore. La rive est boisée, les coteaux plantés de vigne, ça et là pointent des tours ou des clochers. L'inconvénient du chemin de bordure c'est qu'il ne traverse pas les villages, où il y a toujours des bâtiments anciens à voir, et je ne fais pas toujours le détour.

Randersacker, le dernier village (viticole) avant Würzburg, est jumelé avec Vouvray. La terrasse de café où je m'installe s'appelle Place de Vouvray. La fontaine en son centre n'a rien à voir avec cette localité tourangelle, c'est une œuvre récente qui représente la baignoire de Balthazar Neumann un architecte du baroque.

Randersacker, les remparts avec les marques des crues, et la place de Vouvray 

En repartant on passe sous l'autoroute puis la voie ferrée, et on ressent nettement l'approche de la ville. La voie est plus large, très fréquentée, traverse des parcs très achalandés

Et puis apparaît Würzburg, un château au-dessus de vignes sur l'autre rive et des clochers en face.

Après m'être installée dans un hostel c'est parti, à 16h seulement. Je me dirige vers la Residenz château baroque, au patrimoine mondial de l'Unesco, construit selon les plans du Balthazar Neumann dont on a vu la baignoire. Tout restauré après les destructions de la guerre. Dorures miroirs stucs fresques tapisseries lustres etc etc. C'est le luxe à l'état pur. Un peu écœurant.


Dans le parc, des sculptures et de beaux arbres dont un hêtre splendide aux feuilles laciniées


Dans le reste de la ville restent à voir quantité d'églises romanes, gothiques, baroques, l'hôtel de ville, et puis le pont du Main qui avec ses statues de saints en rappelle un autre....On y stationne un verre à la main. Vin ou apéro. Mais moi ce que je veux c'est une bière, que je trouverai un peu plus loin. Distelhauser.

sculptures gothiques sur la cathédrale, sculptures baroques sur le Mainbrücke 
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Temps orageux

La pluie est attendue pour ce soir. Surprise, elle se met à tomber juste au moment où je pars. Il n'y a plus qu'à sortir l'équipement. Ça s'arrête vite et après il règne une bonne odeur d'herbe mouillée. La piste passe entre des arbres. La rivière s'est encore élargie, parcourue par des péniches qui doivent périodiquement franchir des écluses. En bas on cultive des céréales (le maïs commence à pousser), et sur les pentes des vignes encore.

Les villages se ressemblent un peu tous avec leurs portes, leur place du marché leur Rathaus (hôtel de ville) leurs tours, leur église gothique ou baroque et leurs maisons à colombages. Le grès rose régional est souvent utilisé. En haut de l'hôtel de ville de Karlstad sur le Main un petit bonhomme sonne les heures avec sa trompette.

La rivière tourne entre des versants boisés. À Gemünden je casse la croûte sur une aire de pique-nique très ventée, ensuite le fléchage me mène sur l'autre rive. La gauche donc.

Je me demande si c'est une bonne idée d'aller prendre un café à Lohr am Main car c'est de l'autre côté et la traversée des ponts est compliquée. C'est une jolie petite ville, s'il y a des touristes ils sont noyés dans la population locale, très diversifiée.

Mon hésitation à venir ici était parfaitement justifiée, je suis complètement désorientée pour sortir de la ville. Finalement je reste ce côté de la rivière, sur un autre itinéraire cyclable. Il emprunte une ancienne voie ferrée, très joli. Forêts et beaucoup de pommiers.

À Neustadt on remarque une grande église en grès rose avec deux tours carrées, c'est une abbaye. Ensuite je retraverse le Main sur une grande passerelle. L'optimisme revient, le ciel s'est dégagé, je pédale avec ardeur au bord de l'eau, passe Marktheidenfeld, un village qui semble bien joli, j'en admire les quais.

Lohr am Main/ pont de Neustadt et les tours de l'abbatiale 


À la sortie la piste longe une route... Où vais je trouver une place ? Un camping est indiqué..Mais je ne trouve qu'une grande étendue verte. Un espace bien tondu près de l'embarcadère " est réservé aux usagers du camping". Ça tombe bien, je campe... Très bon emplacement. Les péniches me réveillent parfois mais il n'y en a pas beaucoup.

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Soleil le matin, mais les nuages arrivent vite. Quant au vent d'ouest qui souffle dès le matin, il va bien me gêner..Pas trop au début, je me dirige vers le sud et les méandres sont serrés. Sur les hauteurs boisées avoisinantes on aperçoit des abbayes (Triefenstein) plusieurs châteaux. Les "Burg" châteaux forts (Wertheim, Collenburg), sont en grès rose et en ruines.

Dans les fonds de vallée l'agriculture n'est pas très intensive, mais l'activité économique est loin d'être absente, en plein paysage bucolique on se trouve soudain en face d'une énorme carrière, de cheminées, de silos et de cuves, d'une usine gigantesque. Sur la route voisine ça roule beaucoup. Mais les centres des villages sont toujours aussi pittoresques. Et, j'ai oublié, il y a encore des vignes.

À Wertheim dans le bistrot où je me suis arrêtée il n'y a que des femmes. Plus étonnant encore, je vais finir par m'en apercevoir, ce sont toutes des Turques.

Au milieu de la journée j'en bave à cause du vent. Et la traversée de Miltenberg n'a rien d'agréable c'est une grosse agglomération assez industrielle, où la circulation automobile bouchonne. Ensuite c'est joli en bord de rivière mais on suit souvent des routes, c'est bruyant. Je me demande bien où je vais pouvoir planter la tente.

Ce sera dans le village de Grosswallstadt où la route s'écarte de la rivière. J'explore de grandes étendues herbeuses sur la rive mais c'est trop en vue. Je me mets dans un enclos près de l'église. Ça faisait longtemps.

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Hostel dans les quartiers populaires du côté de la gare

Mercredi 25 mai Grosswallstadt - Frankfurt 84km

Beau temps mais vent d'ouest, de beaux cumulus

Au départ la couleur du ciel c'est...bleu. Dans la traversée du village deux itinéraires sont possibles, une dame me propose de passer par la forêt, ça me convient. Et puis bord de rivière jusque Aschaffenburg. Une ville animée, les bâtiments anciens sont isolés dans un habitat moderne. Le château avec ses quatre tours. La basilique, son beau porche à arcades et ses tombeaux de grès rose. L'hôtel de ville est en grès rose aussi... Mais tout à fait moderne.

Aschaffenburg 

Piste le long du Main dans des prés. Prochaine localité, Seligenstadt. Encore un bel endroit. Le monastère fondé par les bénédictins a un très beau jardin avec des plates-bandes de salades fort décoratives.

Dans les kilomètres qui vont suivre ce qui attire le regard c'est une énorme centrale, un ensemble de cheminées hautes et cheminées larges, dont aucune ne fume. Ce n'est (n'était?) pas une centrale nucléaire, mais une centrale thermique.

Comme je n'ai pas envie de casser la croûte avec ça sous le nez, je continue et c'est bien plus loin que je m'arrêterai, à Steinheim, dans le jardin du château, un endroit abrité du vent, enfin ! Une dame âgée qui revient des courses (elle a 3km à pied jusqu'au supermarché) vient s'asseoir à côté de moi. Elle fait une pause parce qu'elle a eu un infarctus... et en profite pour me raconter sa vie. Elle a 81 ans, a habité après la guerre une grande maison un peu plus haut avec ses 6 frères et sœurs, ils étaient pauvres mais c'était le bon temps, ils jouaient tout le temps dehors, pas comme les enfants de maintenant...

Ce village est en effet une merveille, un peu boboïsé mais néanmoins retapé avec goût, belles maisons à colombages, belles portes. Le château a une tour étrange, couverte d'ardoise avec des clochetons.

Steinheim, la maison du gardien, la tour du château, une porte

Sur la piste au bord du Main il y a du vent, et beaucoup plus de cyclistes. En vue de Frankfurt c'est un autre monde. La grande ville, des chantiers, des immeubles et même des grattes-ciels. Et une foule où les blonds aux yeux bleus sont loin d'être majoritaires.

En tout cas, aucun problème pour traverser la ville sur cette voie préservée en bordure du Main. Je vais bientôt le traverser sur une passerelle et c'est tout droit jusqu'à l'hostel, situé dans le quartier de la gare, où on se croirait à Barbès.

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Nuageux, s'éclaircit dans la journée

C'est une grande ville, mais il n'y en a pas tant que ça à visiter. Comme toutes les grandes villes allemandes elle a été bombardée et seul le centre historique a été reconstruit, et encore, les monuments les plus importants. Curieusement la cathédrale gothique était restée debout.

La plupart de ces monuments sont...en grès rose. Beaucoup de maisons sont à colombages quand même, autour de la place ancienne qu'on appelle je crois Romerberg. C'est calme à cette heure, voire vide. L'église Saint Paul, massive et à coupole, est fermée. La cathédrale et l'église Saint Nicolas, au fin clocher, sont ouvertes mais des offices (protestants) sont en cours.


Saint Paul, maisons médiévales

Je pousse un peu plus loin vers le cimetière juif, à côté se trouve un musée du judaïsme. Le mur du cimetière est orné d'une frise de petits rectangles, en y regardant bien ce sont des plaques au nom des juifs locaux exterminés. La porte du cimetière est ouverte, étonnant. Je vais pouvoir le visiter, il est très beau, les stèles de grès rose sont un peu dans tous les sens mais c'est entretenu, et les inscriptions en hébreu sont bien visibles.

Mais plus moyen de sortir, c'est refermé... apparemment c'est l'erreur d'une visiteuse qui a eu la clé, elle m'ouvre la porte, ouf..


J'aurais peut être du le visiter ce musée. Mais j'avais jeté mon dévolu sur la maison où est né Goethe (le 28 août 1749), dans la rue "Grosser Hirschgraben" . Elle est complète et bien meublée, avec beaucoup de marqueterie comme j'aime, mais elle a été entièrement reconstituée. Et sans doute ne suis je pas assez fan de Goethe pour que ça me passionne. Il a vécu ici son enfance et sa jeunesse avant de partir à Weimar.

Maison natale de Goethe 

Au retour vers mon quartier mal famé j'admire au passage tous ces gratte-ciel de verre. Ça fait de l'effet quand même.

L'après midi je me dirige vers Mainz. Plein ouest et le vent dans le nez. Chemin pas toujours bon. Plus de villages pittoresques mais des banlieues industrielles et des usines. Mais les bords du Main sont verts, la population locale en profite et s'y presse nombreuse, car c'est fête aujourd’hui (l’Ascension). Les Biergarten sont bien achalandés, des groupes de jeunes fort gais se baladent avec des remorques à vélo remplies de bouteilles de bière.


Biergarten, le confluent du Main et du Rhin, vue lointaine de Mannheim

Mon intention est de séjourner au camping pour pouvoir aller visiter la ville. Mais celui-ci est bondé et particulièrement bruyant, c'est impensable d'y rester. Dans le coin le bivouac ne paraît guère possible. Il y a un deuxième camping plus loin au bord du Rhin, dans la direction que je dois prendre demain, alors Je renonce à visiter la ville. Cet autre camping est sur une île après une bourgade industrielle. Un portail barre le pont, je m'y engouffre. C'est assez plein aussi mais sur la "Zeltplatz" campent surtout des cyclistes.

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Ciel couvert puis dégagé, vent d'ouest (comme hier)

Première traversée du Rhin et première épreuve de la journée: un pont autoroutier, très long. Certes les vélos circulent sur une voie séparée mais c'est épouvantablement bruyant, avec en plus un fort vent contraire.

Au-dessus et au bord du Rhin 


Dans la section qui suit, jusqu'à un angle du fleuve près de Gernsheim, la direction est sud voire sud-est, le vent ne me gêne pas, j'avance. Jusqu'à Nierstein (joli village viticole), la piste suit une route, c'est pas terrible.

Ensuite c'est un environnement de grand fleuve, me fait penser à la Loire ou au Danube, on roule sous des digues, entre des prés et des boisements, et l'eau on ne la voit pas souvent. Mais quand on la voit, il y en a large...

Après cet angle du fleuve, direction sud ouest, et là ça souffle bien dans le nez, en plus sur une route, pénible. Et quand la direction va repartir plus vers le sud c'est la banlieue industrielle de Worms.

Mais à Worms je suis attendue... J'ai reçu un appel de Wolfgang, qui est rentré de voyage et est venu ici avec Heidrun pour un anniversaire chez des amis, ils sont à Worms cet après-midi ! Coïncidence fort bien venue ! Nous allons donc passer 2-3 heures ensemble, prendre un café, et visiter un peu la ville. L'immense cathédrale romane, mieux à l'extérieur qu'à l'intérieur, je trouve que la déco baroque détonne avec le roman...

Ici aussi se trouve un cimetière juif, le plus ancien d'Allemagne, mais c'est trop tard, nous ne pourrons que jeter un coup d’œil de l'entrée. Il ressemble à celui de Francfort.

Nous allons voir aussi le très imposant monument à la gloire de Luther. Celui-ci, toujours pas du tout ressemblant, est entouré de quatre "hérétiques" notoires, Hus, Savonarole, Wycliff, Valdes, et de ses amis et protecteurs.

Mais on se quitte, je retraverse le Rhin passant sous la porte des Nibelungen, je parcours des digues, rejoins le Neckar dans un infernal paysage industriel, attrape avec justesse un dernier bac sur un bras de rivière, ce qui me permet de continuer, traverser des villes industrielles et m'installer près d'une aire de jeux aux abords d'un village.

Avec Heidrun et Wolfgang / Nibelungentor
le dernier bac / le peu poétique confluent du Rhin et du Neckar 
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Nuageux, quelques gouttes

Première étape Heidelberg après une quinzaine de kilomètres. Je suis étonnée de trouver une grande ville, et même une ville Industrielle. Mais la ville ancienne est aussi très importante et a bien gardé son unité et son caractère.

Les rues sont serrées. Deux places, pas immenses. Près de celle de l'Université (Heidelberg était la première université d'Allemagne) se trouve l'église des jésuites, baroque forcément.

La Marktplatz place du marché est encore calme quand j'arrive mais ça ne dure pas. Les boutiques de souvenirs ouvrent, les touristes arrivent... l'église du Saint Esprit (Heiliggeistkirche) gothique est pratiquement au milieu de la place.

Sortie par le vieux pont et vue (de loin) sur le château au-dessus de la ville.


Et maintenant il n'y a plus qu'à suivre le Neckar. En bordure de la route jusque Neckargemünd, une localité assez encombrée, avec deux châteaux sur les hauteurs. Ensuite traversée par un barrage écluse, de l'autre côté la piste, non revêtue mais majoritairement bien roulable, circule en forêt. Surtout des hêtres. Très agréable, en plus ça roule bien, le vent doit me pousser...

Il y défile quantité de cyclistes, curieusement jusqu'au village de Hirschhorn, très pittoresque en effet avec son château sur la hauteur et ses rues anciennes. Ils (les cyclistes) doivent être tous arrêtés là car ensuite ce sera très calme.

Arrêt pour un café à Zwingenberg, là aussi un château surveille la vallée.

Hirschhorn et Zwingenberg 

En fin de journée le ciel se dégage. Je pédale en direction de Mosbach, le premier endroit d'Allemagne où j'ai séjourné, à l'âge de 15 ans. Je ne reconnais rien évidemment. Je suis même étonnée de trouver une aussi belle ville. Passant devant l'auberge de jeunesse, un ancien moulin, très joli, je me décide à dormir là.

Mosbach, le centre ancien et l'auberge de jeunesse 
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Pleuviotant le matin, soleil l'après-midi

Je dois revenir en arrière pour rejoindre le Neckar et continuer à le remonter. Il faut froid et il pleuviote, la piste suit rarement la rivière, fait des incursions dans la campagne, jolies mais fatigantes, les pentes sont courtes mais raides. Bref c'est plutôt moins intéressant qu'hier. Toutefois, les châteaux forts sont toujours aussi nombreux sur les hauteurs.

Passage sous une route à la sortie de Mosbach, château à Neckarzimmern 

Je ne dédaigne pas les paysages industriels mais là à l'approche d'Heilbronn c'en est trop, c'est usine sur usine, on commence à passer sous ou au-dessus de bruyantes autoroutes... Alors quand je me trompe et perds la direction d'Heilbronn-centre, c'est assez. Des panneaux cyclables indiquent Leinsdorf, un petit bled vers l'ouest, dans la direction de Karlsruhe... eh bien allons-y. Et me voilà partie dans la campagne.

Au début ce sont des parcs, puis des jardins familiaux, des banlieues, et puis c'est vraiment la campagne, la campagne agricole, avec des grands champs de blé, de betteraves, de pommes de terre, de maïs qui commencent à lever, et ça fait bien plaisir ma foi.

Ce paysage de grands champs légèrement vallonné, avec des talus au bord des routes, me fait penser à la Picardie. Plutôt à celle de mon enfance, quand on pédalait en toute quiétude sur des petites routes. Eh oui, ici, même si ce ne sont pas toujours des pistes cyclables, les itinéraires sont étudiés pour qu'on se trouve le moins possible sur des routes où ça circule. Ils empruntent très souvent des voies où la circulation est interdite excepté pour les vélos et l'exploitation agricole. Donc c'est vraiment tranquille. Les cyclistes sont relativement nombreux, c'est dimanche. Ce sont des promeneurs locaux.

paysage de campagne 

Les villages ou petites villes traversées sont assez animées, une ambiance plutôt populaire, une population toujours mélangée, beaucoup de gens d'origine turque apparemment. Je passe d'ailleurs devant une ou deux mosquées avec minaret. Sur la fin du trajet cela ne ressemble plus à la Picardie car les reliefs s'accentuent et le paysage est plus boisé. Les côtes s'allongent, les ombres aussi... Le bivouac n'est pas si facile à trouver mais sur la carte est indiqué un abri en bordure d'une forêt, ce peut être une possibilité... Bien joué, à côté de ce grand abri de bois s'étend un espace herbeux bien plat, en-dessous de la forêt. Des enfants jouent dans le terrain de sport voisin, mais ils ne resteront pas toute la nuit...

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Beau temps

Si hier j'avais bien réussi pour le choix de mon itinéraire, ce n'est pas le cas aujourd'hui.

Au début c'est plutôt joli dans la campagne, le problème c'est les reliefs qui sont abrupts, et que comme le soleil chauffe mais que le vent est froid on crève de chaud dans les côtes mais si on se découvre on a froid après..

Des cultures encore, et beaucoup d'arbres fruitiers le long des routes, pommiers poiriers et cerisiers. Les cerises rougissent mais c'est un peu juste pour la dégustation.

Un trajet non sans reliefs dans la campagne         /                      Durlach 

À partir de Bretten les villages et petites villes vont se succéder, sans beaucoup de campagne entre les localités. Je fais une pause à Durlach, charmante bourgade, près d'une fontaine et d'un jardin public.

Je décide de ne pas aller à Karlsruhe et de me raccourcir en coupant vers le sud. C'était l'erreur. L'itinéraire s'appelle"route des vins de Bade" on se demande de quel droit. Quand il ne traverse pas des zones urbaines, il suit des routes bruyantes. Les villages sont néanmoins pittoresques avec leurs belles maisons à grands porches, et leurs portes fortifiées.

Ettlingen, et la Forêt Noire

La route continue parallèllement au Rhin sous les hauteurs boisées de la Forêt Noire. À Rastatt après m'être coltinée encore des routes à voitures et camions je me décide à rejoindre le fleuve au plus court... Et quand j'arrive sur la digue et ça va beaucoup mieux, même si on ne voit pas tout de suite le fleuve. C'est la campagne, des étendues herbeuses (la digue et ses abords sont fauchés), des forêts alluviales, et des étendues d'eau plus ou moins stagnantes. Le Rhin n'est visible qu'au niveau des ponts, le fleuve est large, les écluses énormes.

Je plante ma tente au niveau de la digue, sur un replat qui pourrait être une place de dépôt. Je préfère être en haut, pour éviter l'humidité.

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Chaud, un peu lourd

Réveil avec le soleil, vers 6h. Les oiseaux gazouillent et batifolent dans les peupliers.

Je continue à suivre ma digue et puis rejoins le Rhin, toujours aussi large.


Une quinzaine de kilomètres sur cette digue le long du fleuve immense, c'est beau. Quelques oiseaux nagent ou volent, des cygnes, des canards, un cormoran, un sterne. Après ça devient un peu monotone, mais voilà l'embarcadère du bac. Je n'attends pas longtemps, la traversée est gratuite, ce doit être un bac français.

Retour au pays...

Donc je me réjouis déjà du petit café que je vais prendre dans le prochain bistrot... Mais pas de bistrot dans les villages alsaciens... Je me résous à en prendre un dans une boulangerie... C'est exactement comme en Allemagne !

La première partie du trajet vers Strasbourg n'est pas terrible, la plaine, des routes. Des villages avec des maisons à colombages et des églises généralement modernes. La deuxième partie est bien plus jolie, à travers la forêt humide, sur une digue bordée de hauts platanes. Les autres arbres sont hauts aussi, chênes, peupliers noirs, noyers, érables.

Je commence la visite de Strasbourg par le quartier des institutions européennes. Conseil de l'Europe, cour européenne de justice, parlement européen. Bâtiments impressionnants, bien barricadés.


Cour européenne des droits de l'homme et parlement européen

J'ai une course peu agréable mais indispensable : il me faut pénétrer dans un gros centre commercial pour récupérer chez Décathlon une cartouche de gaz. Je n'ai pas trop eu à chercher, c'est déjà ça.

Et puis le centre ville oh combien touristique. Mais la cathédrale est une des plus belles de toutes les cathédrales gothiques. Gothique... si on veut, car le chœur et la coupole sont du plus pur style roman. Elle est grandiose à l'intérieur, et extraordinairement sculptée à l'extérieur, décorations et gargouilles, et les trois porches sont bourrés de sculptures. Les personnages debout de chaque côté des portes me plaisent particulièrement. Ils sont entiers (pas comme à Bourges), très expressifs et plutôt souriants.

Je passe sur les (très belles) maisons anciennes, colombages bien sûr, les rues pittoresques notamment celles de la"petite France" traversée par des rivières.


Je ne reste pas à Strasbourg où il fait chaud et lourd. Je décide d'aller à Molsheim. Bonne surprise, ce parcours est très agréable, il suit un canal étroit et campagnard, le canal de la Bruche. Les moucherons sont juste un peu importuns par moments.

Je m'installe au camping municipal. 7,42€, et un lampadaire au-dessus de la tente... Un camping français...

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Chaud,un peu lourd


Du groupe de cyclistes au camping, personne n’a l’air d’avoir envie d’engager la conversation avec moi. Je pars vers 8h30, commençant par un tour de Molsheim, une petite cité alsacienne bien typique.

Dans le vignoble alsacien sous les hauteurs boisées des Vosges truffées de châteaux forts, c’est une matinée difficile avec quelques côtes bien raides et le vent de face, la route sera plus facile l'après midi.

Molsheim 


Les villages pittoresques aux noms impossibles à se rappeler se succèdent, maisons à colombages et couleurs vives, maisons de pierre à grands porches, fontaines, églises d'époques diverses, grès rose.

Mentionnons quand même la splendide église romane de Rosheim, ses personnages perchés sur le toit et son chapiteau entouré de visages moyenâgeux.

Rosheim 


Et bientôt Obernai, bien animée. La plus grande ville est Sélestat, mais je passe à distance.


La véloroute des vins est un itinéraire tranquille et agréable à flanc de coteaux. La route des vins pour les automobilistes, c'est un infernal défilé de voitures, je suis obligée de la prendre pour monter de Ribeauvillers vers Zellenberg le village élevé où je retrouve Nicolas un ancien collègue forestier et sa famille.


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Chaud et lourd, un peu de pluie

Christelle est partie très tôt au travail, on ne fera la photo qu'avec Nicolas, Élise et Sylvain.

Une belle descente depuis Zellenberg, village perché, et encore quelques tours de pédale à travers les vignes pour rejoindre la gare de Colmar où je prends le train pour Basel. En Suisse, je vais rendre visite à des cyclistes qui étaient passés chez moi en 2019 et avec qui j'ai gardé le contact. Je me rends d'abord chez Peter, qui est agriculteur retraité mais vit toujours dans sa ferme de Fellihof, située à une quarantaine de kilomètres de Bâle.

J'appréhendais la traversée de l'agglomération de Bâle, par chance je ne me perds qu'une fois, et j'arrive à retrouver les itinéraires cyclables. J'arrive ainsi à Liestal, une petite ville bien suisse. Le ciel est devenu bien nuageux... et des gouttes de pluie commencent à tomber. Je me réfugie sous le porche de l'église située au milieu d'une place circulaire très calme.


Liestal, la place et l'intérieur de l'église

Après Liestal la vallée est encore pour un moment urbanisée et industrielle, et puis c'est enfin la campagne, les collines, les forêts, des fermes en bois... Et pour les derniers kilomètres, les reliefs.

À la sortie de la vallée, la côte est impossible à monter, il faut pousser. Ensuite le GPS me propose un itinéraire qui quitte la route principale décidément trop fréquentée, je m'y engage. Le problème, c'est que non seulement cette petite route est épouvantablement raide, mais en plus, elle s'arrête à la première ferme. C'est donc par un chemin de terre que j'arriverai chez Peter et Marliese. La ferme est très belle avec une vue splendide. Peter y est né.

Marliese me propose spontanément une lessive, j'en avais bien besoin. Avec le vent tout va sécher très vite. On mange et boit de bonnes choses, on parle de famille et de voyage, une belle soirée.

Fellihof 
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Très chaud le matin, pluie, mieux après

À vrai dire je ne pars pas de Fellihof sur mon vélo, car pour m'épargner une forte descente suivie d'une forte montée et quelque 400m de dénivelée Peter met mon engin et mon barda dans sa Kangoo et me conduit au point le plus haut. Je n'ai plus qu'à me laisser descendre vers la vallée de l'Aar(e), que je vais suivre jusque Bienne/Biel.

Je suis étonnée de trouver une rivière aussi large... Et aussi belle. L' eau coule vite, bleue et claire, c'est la première rivière depuis le départ où j'aurais quelque envie de me baigner. Mais la distance est grande et je ne veux pas arriver trop tard.

En fin de matinée il fait très chaud et lourd, et les raidillons surprise ne sont pas du tout appréciés. Ensuite il vient quelques nuages, quelques gouttes de pluie même. Et ça va mieux.

Agriculture, belles fermes suisses tout en bois, industrie, villes avec châteaux et églises, de nombreux ponts couverts, petits ports de plaisance. La ville la plus importante sur la route est Solothurn/Soleure, ancienne avec une énorme cathédrale, mais aussi très industrielle.


Aarburg et l'Aar(e)



Soleure (Solothurn) 

J'ai l'itinéraire tracé mais trouve moyen de me tromper plus d'une fois. À Bienne qui est une ville importante j'ai un peu de mal à trouver le départ du funiculaire. Car Évilard est juste à côté, mais 400m plus haut. Heureusement qu'on peut monter avec le vélo dans ce moyen de transport...

Il est plus de 19h30 quand j'arrive chez Martina et Christian, fils de Peter. Le petit Ruben, un an et demi, est déjà au lit, il faudra attendre demain pour le rencontrer.

Eux aussi habitent dans une grande et belle maison de famille, celle des parents de Martina qui demeurent là aussi, les deux autres appartements sont occupés par des locataires.

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Temps chaud, assez lourd

Ruben ne fait pas longtemps le timide, il m'appelle Mami comme il appelle tout le monde et est très inventif dans ses jeux.

Nous descendons en funiculaire à Bienne, aujourd'hui c'est marché et brocante. Tours et clochers carrés au-dessus des barnums.


Départ après déjeuner, Belle descente, traversée de la ville encore pas très simple, et je rejoins la véloroute suisse n°5, qui longe les lacs de Bienne et de Neuchâtel par le sud.

Ce n'est malheureusement pas une piste panoramique, les rives sont squattées par des propriétés privées, et les zones naturelles sont des marécages. Bref on ne voit les lacs que très épisodiquement, quand il y a un port ou une plage. D'ailleurs très fréquentées aujourd'hui, les plages, par cette chaleur.


À l'extrémité sud du lac de Bienne

Entre les deux lacs, un pont est coupé, la route déviée, du coup je change d'itinéraire, passant au dessus d'un autre lac, celui de Morat. Et c'est pas plus mal. Jolie route régulière, à travers des vignes et de beaux villages aux maisons à grandes portes cochères, où on déguste du vin. Avec la vue sur les sommets des Alpes Valaisannes.

Du coup je vais rejoindre les abords lac de Neuchâtel assez tard, et ça ne s'avère pas facile, ce ne sont que des pavillons et campings... ou bien des zones humides protégées ("grande cariçaie"), trop humides en effet. Mais je trouve un coin de pelouse près d'un poste d'observation des oiseaux. Il passe bien un peu de monde, mais personne ne me fait de remarque.

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Orageux, se dégage, vent d'ouest

Il a bien plu et les limaces se promènent sur la tente. Ça n'avancera pas très vite ce matin, à cause de deux belles averses orageuses que je n'essuierai pas, à chaque fois je m'abrite.

La piste suit la rive, mais même à faible distance on ne voit pratiquement jamais le lac, soit parce qu'on traverse des zones humides et qu'on en est séparé par des roselières, soit parce que c'est privé, de l'habitat de loisirs dispersé. La seule localité importante est Estavayer-le-Lac, une ville ancienne avec des fortifications, une église massive avec une tour carrée, des rues à arcades. Et beaucoup de cafés et restaurants, qui accueillent de nombreux touristes en ce jour de Pentecôte.

rue d'Estavayer, et l'église 

Le chemin redescend ensuite à travers la « Grande Cariçaie », on observe au passage la « pierre des mariages », un bloc erratique déposé par les glaciers. Il paraît qu’avant le 19è la pierre était dans l’eau. Elle était appelée ainsi car on lui prêtait des vertus en matière de fécondité.

La piste est pourtant proche du lac, mais depuis ces roseaux et ces bois humides on ne voit jamais celui-ci. Le ciel recommence à prendre des couleurs bien noires, j’appuie sur les pédales, et à l’entrée de Yvonand au moment où ça commence bien à tomber, je me précipite sous l'auvent d'un grand bâtiment, c’est le club nautique. J’aurai échappé aussi à la deuxième averse.

La dernière ligne droite jusque Yverdon est carrément désagréable, la piste suit la route. Enfin, à Yverdon, à l'extrémité sud du lac, on peut voir celui ci presque dans son entier. Et au dessus de lui, les hauteurs du Jura...des rochers mais aussi des pâturages verts parsemés de petites maisons.Est ce vraiment si haut que ça ? Et finalement après avoir étudié la possibilité de passage, j'en trouve un avec un dénivelé de 800m, faisable...

Alors changement de cap j'abandonne la route vers Lausanne et Genève, et oblique à 90°. Le problème c'est que la direction c'est l'ouest et qu'un vent fort souffle... de l'ouest. C'est donc finalement le début, encore dans la plaine, qui sera le plus dur. Sur la pente dans les lacets le vent se fera moins sentir. Pente moyenne 5%. Il suffit d'un peu de patience.

Ce qui est pénible c'est la circulation, la route est trop bonne et ils vont trop vite, ils se font leur rallye de Monte Carlo. Il faut bien qu'ils testent un peu leurs Porsches (il y en a plein en Suisse). Et beaucoup, notamment les Suisses locaux immatriculés VD (canton de Vaud), ne prennent pas trop la peine de s'écarter des 1,50m réglementaires. Et ils n'entendent même pas mes injures...

Il faut passer la station de Sainte Croix, et le voilà, ce col, de Sainte Croix ou des Étroits, 1153m


Arrivée sur les hauteurs du Jura! 

Maintenant c'est le plateau du Jura, un peu de relief encore mais pas de descente vertigineuse, j'apprécie. Les près verts, les bois de résineux, le bon air. Encore quelques kilomètres pour arriver à la frontière, ensuite je dépasse le village des Fourgs et me trouve un beau pré vallonné, hélas pas fauché.

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Nuageux

L'herbe haute et humide mouille bien les pieds. Heureusement il ne fait pas froid. Beau paysage de plateau. Des nuées qui montent des vallées. Le château de la Joux apparaît en hauteur au milieu des rochers mais moi je vais suivre une vallée. Celle du Doubs d'ailleurs. Puis celle du Drugeon qui a quelques contreforts rocheux.

Oye-et-Pallet, Malpas, Vaux-et-Chantegrue, Bonnevaux. Après ça se remet à monter, une côte longue mais régulière, c'est un plaisir !

À Bonnevaux le clocher a déjà un aspect franc-comtois. On observe aussi ces très grandes maisons qui sont des fermes, la grange à l'étage.

J'aurais bien aimé prendre un café, mais le seul resto sur la route, à Cerneau, est fermé "exceptionnellement".

Heureusement j'ai assez à manger, et j'arrive à un endroit idéal pour la pause, la célèbre Forêt de la Joux. Bien connue pour ses sapins et sa forte productivité. Dans les sapinières du Jura les forestiers pratiquent traditionnellement le traitement en "futaie jardinée". Pas de coupe rase. On prélève aux passages en coupe seulement une partie des arbres en respectant la "norme" qui définit la répartition en dimension des arbres sur la parcelle, disons pour qu'il y ait un peu de tout. Donc pas d'espaces "à blanc" par contre on exploite un peu partout et ce n'est pas toujours très joli, les exploitations. Bref la grande route droite qui traverse la forêt n'a rien de plaisant.

Mais j'oblique vite sur la " route des sapins" qui est beaucoup plus paysagère, elle va tournicoter, monter et descendre. Je vais même pénétrer dans la réserve biologique "intégrale" de la Glacière. Où on laisse la forêt pousser naturellement. Mais il y a des arbres coupés, alors je doute... C'est peut-être seulement pour qu'on puisse passer sur le sentier ???

Mais on se sent bien au milieu de ces grands et beaux arbres. Sur l'un d'eux on trouve un petit tableau représentant Saint Vaclav (Wenceslas), le même que celui de la place du même nom à Prague, le patron de la nation tchèque ! Des forestiers tchèques l'avaient apposé sur leur sapin préféré... en 1929... Le sapin Saint Vaclav existe donc toujours, mais ce n'est plus le même arbre.


Avant de sortir de la forêt survient une très forte descente puis un épisode de montées et descentes un peu épuisant. Ai-je descendu un des "plateaux du Jura"? L'environnement va changer en tout cas, avec des bois de feuillus et plus de cultures. Et des reliefs plus heurtés... Surtout quand il me faut prendre en travers entre Aresches et Chaux Champagny la profonde vallée d'une rivière qui s'appelle la Furieuse. La furieuse c'est moi...

Mais de l'autre côté le plateau est très beau, et puis c'est une très belle et longue descente à travers des bois. Cette descente arrive directement à Arbois, connue pour ses vins et pour Pasteur qui y est né. Il est partout dans la ville...

Je n'irai pas beaucoup plus loin, le temps est très très menaçant et quand il se met à pleuvoir je me précipite vers le premier pré, fauché heureusement celui là...

Arbois 
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Couvert puis éclaircies

Ce matin il ne pleut plus mais les limaces sont toujours fidèles au poste, beurk. Du coup je ne traîne pas. ça roule bien ce matin, il faut dire qu'il y a peu de relief, et surtout pas encore de vent. Petites routes calmes, la campagne, des prés, quelques vaches, petites cultures, pas mal de boisements, quelques étangs. Au croisement avec une route plus fréquentée je trouve un bistrot , un petit café (et même deux) ne feront pas de mal.

Je perçois un changement dans l'environnement par rapport à la veille. La brique apparaît dans les constructions, l'église d'Anthume, en briques et au clocher carré, n'a plus rien à voir avec les églises comtoises. Et la prochaine localité s'appelle Pierre-de-Bresse. Bref me voilà dans cette Bresse que je ne connaissais pas. Les étangs ne sont pas si nombreux que ça, mais ce qui frappe c'est l'architecture. Les fermes sont très particulières, un seul gros bâtiment également, mais avec un toit qui déborde largement pour former à l'avant un grand auvent soutenu par des poutres, qui abrite de grandes portes de bois; à l'arrière l'auvent est plus bas. Les murs sont souvent à colombages, avec torchis ou briques.

Anthume et Pierre-de-Bresse 

Le Doubs, la rivière, est vraisemblablement la limite de la Bresse. En le traversant à Sermesse ça sent la Bourgogne, on est d'ailleurs dans le département de Saône et Loire. On observe des petits panonceaux "Eurovélo 6", je suis passée par là il y a 5 ans (dans l'autre sens) en allant à la Mer Noire...En effet, je me souviens du bourg de Verdun-sur-le-Doubs. Pas si bien que ça, je n'avais pas la mémoire de son petit port de plaisance, et du fait que c'est ici la confluence du Doubs et de la Saône.

Verdun-sur-le-Doubs, le Doubs et le confluent avec la Saône

Je ne suis plus très loin de Beaune. Mes espoirs de trouver là-bas un hébergement en dur se sont envolés. Il y a plusieurs campings par contre, mais l'arrivée sera tardive. Je roule au soleil, sur un plateau de grandes cultures, où maïs et tournesol sont déjà hauts et les céréales mûrissent. Pas de boisements et espoirs de bivouac très faibles, j'hésite vers quel camping me diriger... et puis à l'entrée du village de Challanges, le dernier avant Beaune, se trouve une aire de sport et jeux à la pelouse bien tondue. Dans un coin au fond une table de pique-nique semble me fait signe. Eh bien voilà! Je vais planter la tente sous les branches d'un bouleau pleureur, je serai moins visible, et à l'abri de la rosée. En face le soleil se couche.

le dernier bivouac 
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Averses orageuses

La météo n'est pas très engageante, elle prévoit des orages et un fort vent d'ouest pendant deux jours. La tente est sèche, j'emballe tout, direction la gare de Beaune. Je prends mon billet, mais le train n'est que dans une heure. En direction du centre ville toutes les rues sont pavées, je renonce vite à aller plus loin, j'ai déjà vu par le passé les toits colorés des Hospices de Beaune...

Les ascenseurs fonctionnent et l'entrée dans les wagons est à ras de quai. D'autres voyageurs cyclistes prennent ce train, un couple de Suisses en vélo électrique, et une femme dans mes âges voire plus âgée qui a voyagé bien plus loin que moi, entre autres en Laponie et jusqu'à l'est de la Sibérie. Tous vont pédaler au bord de la Loire.