La traversée des Balkans commencée à Zagreb se poursuit autour du lac d'Ohrid, adieu à l'Albanie après la visite de Korçe, passage en Macédoine puis un séjour de presque deux mois en Grèce.
Du 23 octobre au 29 décembre 2021
68 jours
Partager ce carnet de voyage
1

Temps nuageux, et même quelques gouttes de pluie dans l'après-midi

Pas de vélo aujourd'hui, je prends le bus (un minibus) pour aller visiter la ville de Korçë, à 40km au sud de Pogradec. Dès les premiers kilomètres je me réjouis d'avoir eu cette bonne idée: longue côte sur une route très fréquentée. Mais après c'est tout plat: Korçë est sur un plateau. Entouré de montagnes comme partout dans ce pays. Des champs et un habitat dispersé.

Que vois-t-on dans cette ville? De grandes avenues aux larges trottoirs, certaines piétonnes. Des immeubles de l'époque communiste relookés avec des couleurs, des jardins publics, des petites boutiques de bric et de broc qui côtoient des magasins "modernes", des cafés de toutes les catégories, et beaucoup d'animation. <en s'écartant des vieilles avenues on parcours de charmantes petites rues pavées avec de belles maisons anciennes dans des états divers, en ruines ou luxueusement retapées.

Priorité: le "musée national d'art médiéval" où se trouve une collection d’icônes assez unique, car si j'ai bien compris, c'est l'état communiste qui, toute religion étant interdite, a rassemblé à Korçë les plus belles icônes des églises orthodoxes du pays. Le musée date de 1987 mais le bâtiment moderne actuel a été construit en 2016. Le moyen-âge des Balkans ne doit pas être le même que nous, car s'il y a quelques peintures du 14ème, un peu étranges et des plus intéressantes, la grande majorité datent du 16ème siècle et après. Elles sont splendides. ça valait le voyage.

Les monuments religieux de la ville sont la cathédrale orthodoxe, construction récente très pompeuse et sans grand intérêt, et la mosquée qui par contre est ancienne (15ème siècle) mais parait neuve car récemment restaurée. Les murs sont de beaux agencements de pierres et briques. à côté s'élève une "tour de l'horloge".

Non loin de là commence le bazar, un peu décevant par rapport à ceux de Sarajevo et Gjakovë, il est plus petit, et la majorité des boutiques sont fermées. La partie café et restaurants est un peu plus achalandée. J'en profite pour manger un morceau, une salade de légumes grillés, aubergines, courgettes... fameux.

Je ne vais pas rentrer tard, histoire de voir Pogradec encore un peu de jour. Le ciel est couvert, l'atmosphère autour du lac plus mélancolique.

Une rue de Korçë
2

Cette nuit, il a plu. Ce matin le vent souffle, il ne fait pas chaud. L'eau du lac, si lisse hier, est fort agitée et des vagues déferlent sur la plage. Cela ne gêne pas un petit groupe de flamands roses qui s'y promènent. Je longe le lac pour rejoindre la frontière. Cette fois on me demande les papiers et le certificat Covid aux deux postes.

Juste après, un premier arrêt s'impose , le monastère orthodoxe fondé au début du Xème siècle par Saint Naum, qui avec Cyrille et Méthode et Clément d'Ohrid, a évangélisé les slaves, et leur a apporté, avec les fastes de la religion orthodoxe, l'alphabet cyrillique et créé le slavon, langue liturgique. La belle église de briques et tuiles rouges, "dans le style byzantin" n'est pas d'origine mais du 16ème siècle, les fresques ont été réalisées au début du 19ème après un incendie. Elles sont néanmoins très belles. Aujourd'hui c'est calme, mais le lieu est visiblement très touristique.

Maintenant il va falloir pédaler fort pour se réchauffer. Cela ne va pas tarder: cette rive du lac est très différente de celle d'en face, elle est bien plus escarpée, il y a du relief et pas qu'un peu, notamment pour monter à Lubasnice, un premier village où se baladent des petits chiens, l'un d'eux va me suivre sur quelques kilomètres. Sur les hauteurs on a de belles vues sur le lac... mais très épisodiquement car on roule à travers des boisements. Le relief s'aplanit une douzaine de kilomètres avant Ohrid. Diverses localités de villégiature se succèdent sur la rive. Dans l'une d'elle je m'arrête pour manger et goûter la belvica, la truite du lac d'Ohrid.

C'est par un 4 voies qu'on entre dans la ville, et je suis étonnée encore une fois de trouver une grande ville moderne. Mon logement chez l'habitant se situe dans une espèce de banlieue, et ensuite le temps de rejoindre le centre à pied il est 16h30 passées, la gardienne de l'église Sainte Sophie ferme les portes sous mon nez, j'enrage, en outre le lieu me déçoit, trop touristique. Mais c'est quand même une belle ville, construite sur une colline surmontée d'une forteresse, dotée d'une grande quantité d'églises ou monastères de style byzantin, mais aussi de restes plus anciens, un théâtre, une basilique primitive, et puis, dans la partie basse, des mosquées. Bref après une petite promenade sur les hauteurs dans les rues anciennes et en vue du lac immense, je finis par apprécier les lieux.

en haut : le port de Saint Naum sur le lac d'Ohrid  - en bas: Ohrid 
3

Beau temps, mais un vent très froid

Adieu Ohrid, prochain objectif, Bitola. Pour y arriver une chaîne de montagnes est à franchir, 900m de dénivelé. Il y a deux routes, mais dans les deux cas , alors je choisis la plus petite, qui en plus passe par le lac Prespa. L'inconvénient c'est que je dois retourner sur 23km sur mes pas. Mais rien d'ennuyeux dans ce deuxième passage, le lac, on ne s'en lasse pas, d'ailleurs aujourd'hui la couleur a changé, il est plus bleu. J'admire les montagnes aux couleurs d'automne, surmontées de crêtes rocheuses et de nuages, même pas remarquées la veille! Et je sais à quoi m'en tenir pour les reliefs qui m'attendent... En effet, la côte la plus dure (10%) est avant la bifurcation à l'entrée du parc naturel de Galicia. La petite route qui suit, où ce matin il ne passe quasiment personne, a une pente plus régulière, 6% m'a-t-on dit hier, faisant de très longs lacets. Belle montée dans les couleurs d'automne avec des vues magnifiques. Après avoir cassé la croûte sur le bas-côté de la route je passe plusieurs aires de pique-nique. La deuxième, un belvédère à 1400m, donne l'occasion d'admirer le lac, mais il est déjà 15h, et je commence à trouver cela un peu long, je n'arrive en haut qu'à 16h30, à un point de vue nommé "Baba", 1580m. Une jeune touriste américaine, admirative, me prend en photo.

Après c'est TRÈS dur. Certes ça ne monte plus, mais le vent souffle d'en face, et en 5 minutes je suis complètement gelée, les mains glacées... et 700m à descendre comme ça! Sur une route complètement défoncée, en plus. Mais je vais m'arrêter pour me chauffer un peu aux derniers rayons du soleil, mettre la doudoune sous la veste et enfiler deux paires de gants superposées, ça ira mieux. D'autant plus que plus bas la route est refaite, et que devant moi j'ai au soleil couchant le lac de Prespa. C'est un "Trois-frontières", il se partage entre la Macédoine, l'Albanie et la Grèce. Entouré de montagnes aussi, et de forme moins régulière que le lac d’Ohrid.

17h30, la nuit tombe, j'arrive en bas. Je n'ai rien prévu pour ce soir. Je devrais arriver au village d'Otesevo, je ne vois pas le village, seulement un hôtel au bord du lac. 25 euros avec petit dej, ils prennent la carte Visa. C'est peut-être mieux que camper, par ce froid...

Lac d'Ohrid, Lac Prespa 
4

Beau temps, mais froid, surtout au vent

Réveil juste à temps pour voir le lever de soleil sur le lac. Il fait froid, il y a du givre.

Je ne vais pas voir le lac longtemps, la route s'en écarte assez vite, et traverse une plaine où l'on pratique l'arboriculture. La récolte des pommes est en cours. En face, des montagnes. Il va falloir encore les franchir, mais là seulement 300m à monter, par l'ancienne route de Bitola. L'autre est presque parallèle, pleine de voitures et camions. Sur ma route il n'y a personne, mais...

Dès le départ la chaussée n'est pas en bien bon état. Et puis, surprise... Des pavés ! Si c'est 25km sur pavés, ça va être dur. Je commence héroïquement l'ascension à 3-4km/h. C'est joli, c'est dans les bois... Mais finalement voilà de l'asphalte, avec des trous de temps en temps quand même c'est moins dur. En haut il y a une petite église et un coin pique nique, pas trop de vent, on pourrait presque y bivouaquer.

Par contre dans la descente il ne fait pas chaud. La route devient très étroite, envahie de chaque côté par des arbustes, et puis bientôt on retrouve... Des pavés ! Et puis finalement, après une fontaine, un goudron confortable. Petite remontée puis longue descente pas trop forte comme j'aime jusque l'entrée de Bitola. Un paysage de campagne. Des prés, des chênes, des peupliers, encore des vergers. Mais au-dessus il y a les montagnes. L'une d'elles a un peu de neige au sommet. Aucun village.

Bitola, ancienne Monastir, est la deuxième ville de Macédoine, environ 100 000 habitants. Allures de grande ville. Un petit tour, la tour avec l'horloge, les bords de la rivière Dragor, le bazar mais ce n'est pas la bonne heure, ça ferme, une église orthodoxe. À côté il y a un collègue religieux je suppose au nom de Cyrille et Méthode. Et Sirok Sokak, la grande avenue piétonne, avec la fréquentation citadine habituelle de ce genre d'endroit.

5

Très beau temps, mais froid en début et en fin de journée

Oui, frisquet. Je marche d'un bon pas vers le nord-ouest de la ville pour la tournée des cimetières, c'est vrai que l'on approche de la Toussaint! ( les fleuristes vendent d'ailleurs aussi des chrysanthèmes).

La première étape, c'est le cimetière juif, quelque chose de plutôt triste, voire sinistre, sur une colline nue, des caveaux et pierres sens dessus dessous, pas de stèles, pas d'inscriptions à part quelques croix juives. Une seule tombe, blanche, récente? porte des inscriptions en hébreu, et le portail d'entrée (fermé) a été restauré. Ce cimetière, c'est la seule trace de l'importante présence des juifs dans la ville.

Un peu plus loin je trouve une église orthodoxe peut-être pas ancienne mais jolie, blanche et rouge. Il y a du monde, pour un enterrement visiblement. En continuant je longe un cimetière immense... pour arriver à mon but, le cimetière français où sont enterrés une partie des soldats tombés à la première guerre mondiale dans la campagne d'Orient. Le front passait en effet par Bitola, qu'on appelait alors du nom turc de Monastir. Impressionnant cet alignements de croix (remaniées avec un croissant pour les supposés musulmans), la pensée de tous ces jeunes tués vous arrache des larmes. Très émouvant aussi le mémorial récemment construit (2018) qui montre quelques photos des frères Manakis, photographes géniaux du début du siècle, et des photos grandeur nature de poilus, Français de souche, Africains du Nord ou d'Afrique Noire, "Annamites", Malgaches. Avec quelques phrases et quelques objets. On apprécie aussi que tout soit écrit en français!

Retour en ville, passage par le bazar bien achalandé à cette heure. Les étalages sont alléchants, je fais mes emplettes et après une petite collation je repars dans la direction opposée.

cimetière juif 

Le musée historique est de conception un peu vieillotte, textes en macédonien en général traduits en anglais. J'ai aimé les costumes traditionnels et les photos des révoltés macédoniens de 1900-1903 avec leurs tenues pittoresques leurs barbes et leurs airs féroces. Ils fondèrent une éphémère république macédonienne à Krusevo, où je vais demain.

Pour finir cette journée bien remplie, visite des ruines de la cité antique fondée par Philippe de Macédoine (le père d'Alexandre le Grand). La ville a ensuite été conquise par les Romains, alors les ruines sont romaines avec les typiques lignes de briques, des thermes, un théâtre, mais le plus intéressant, ce sont deux basiliques byzantines dallées de splendides mosaïques. Malheureusement elles sont couvertes pour l'hiver, seulement quelques unes sont encore visibles.


6

Très beau temps, mais froid matin et soir

Au petit déjeuner je discute avec les deux cyclistes arrivés hier soir à l'hostel, un couple de Canadiens assez âgés, voyageurs de longue durée partis d'Amsterdam. Pour l'instant, 7 cyclovoyageurs rencontrés en tout. Départ fort tardif, 10h30. Au moins il ne fait plus froid. L'étape d'aujourd'hui c'est Krusevo, petite ville à 1200m d'altitude, ce serait la plus haute ville du pays voire des Balkans. Pour l'instant c'est tout plat, et fort agréable par ce beau temps. Un peu monotone peut-être au début, une route toute droite bordée d'acacias, parallèle à la grand-route Bitola - Prilep, à travers un plateau agricole. Mais les montagnes sont à tous les horizons. Elles sont plus brumeuses que les jours précédents.

Au bout de 25km changement de cap, vers le nord-est. La route, encore plus petite, va traverser toute une série de villages, elle est plus animée et plus intéressante. Les villages sont animés et plaisants même si les maisons typiques sont rares. Les églises sont blanches avec un clocher carré, les nids de cigognes attendent leurs locataires. Les treilles sont toujours là, des guirlandes de paprikas rouges sont accrochées aux murs et partout on observe des étendoirs, sous des bâches plastique, où sèchent des feuilles de tabac. Les deux cultures principales du coin à cette époque sont le tabac et les poivrons. Ces derniers sont en cours de récolte. Des petits tracteurs rouges vont et viennent, la benne pleine de ces légumes rouges et allongés, en vrac ou dans des sacs.

Quelques kilomètres après avoir rejoint une route plus fréquentée, j'aperçois un village devant tout en haut sur la crête de la montagne, c'est Krusevo, et bientôt commence une bonne grimpette. La route fait des lacets et domine la vaste plaine (ou plutôt le plateau). Une pente de 8% est indiquée, et en effet c'est parfois un peu dur mais ce n'est pas toujours aussi raide. Bref les 600 mètres se montent pas trop mal.

séchage de tabac                                                                    Krusevo

Quelques kilomètres après avoir rejoint une route plus fréquentée, j'aperçois un village devant tout en haut sur la crête de la montagne, c'est Krusevo, et bientôt commence une bonne grimpette. La route fait des lacets et domine la vaste plaine (ou plutôt le plateau). Une pente de 8% est indiquée, et en effet c'est parfois un peu dur mais ce n'est pas toujours aussi raide. Bref les 600 mètres se montent pas trop mal.

Le logement à Krusevo c'est (pour 10 euros) carrément une maison entière. Arrivée à 17h je me dépêche de sortir pour visiter la ville. Ce sera surtout by night ce qui n'est pas idéal pour dénicher les belles maisons anciennes. J'en vois quand même quelques unes, plus diverses églises, des rues pavées qui montent et des escaliers. Le musée historique sur le soulèvement de 1902-1903 est fermé, et bien fermé, apparemment en travaux. C'est bien là qu'à été proclamée la république macédonienne de Krusevo le 2 août 1903, après l'insurrection dite d'Ilinden contre les turcs. La répression est venue très vite, cette république n'a duré que 10 jours! Pour commémorer cette insurrection un monument a été construit en partie haute de la ville, dit le Makedonium, qui est parfaitement hideux.

7

Toujours le beau temps. J'avais quelques inquiétudes par rapport à la descente mais comme elle est au soleil et que je me suis bien couverte tout se passe bien. Beau paysage, brumeux. Le plus agréable c'est en bas, quand la pente est moins forte et qu'on peut foncer.Ensuite c'est plat. Toujours du tabac et des poivrons. Devant se rapprochent le sommet rocheux et pointu déjà repéré hier. . On dirait qu'il y a des bâtiments tout en haut. Aïe! Pourvu que ce ne soit pas le monastère que je veux aller voir près de Prilep!

Sur le pic de gauche se trouve le monastère 

Eh bien si, d'après la description pas de doute, c'est bien le monastère de Treskavec. Comme je suis exceptionnellement arrivée tôt, autant y aller. Encore un dénivelé de 600m, toutefois sans le chargement, que je laisse à ma chambre (pas de cuisine mais très confortable, pour 7 euros).

Une petite route en bon état y mène, elle ne monte pas tout de suite, traverse un beau paysage de friches un peu désertiques avec quelques boisements de pins noirs, surmontés de gros blocs rocheux, vue sur les pics rocheux dont celui qui porte le monastère, encore bien petit. En montant la vie va s'étendre sur la plaine et des monts plus lointains. En prime, un calme étonnant. Très beau.

Le problème, c'est que ça commence à grimper pour de bon 5km avant le but, mais que là, pour grimper, ça grimpe, ça doit faire du 10% de pente moyenne et par moments plus. L'avantage sans bagages, c'est que c'est moins dur de pousser, ce que je fais à quelques reprises. Mais j'arrive en haut.

J'étais prévenue, le monastère a brûlé, en 2015 je crois, et la restauration est en cours. Les bâtiments monastiques sont refaits à neuf, mais l'église est pleine d’échafaudages à l'extérieur et à l'intérieur. Les fresques sont mal éclairées (on les voit mieux en photo qu'en vrai) mais elles n'ont heureusement pas trop souffert et sont très belles. Et entre des blocs de gros rochers le site est magnifique.

Monastère de Treskavec 

Les freins grincent, descente néanmoins rapide au soleil couchant. Petit tour dans Prilep by night, la ville est très animée et pleine de jeunes. Un peu partout s'élèvent des statues de divers hommes célèbres locaux, la plus remarquable est la statue équestre massive d'un roi ancien dit Marko. On admire aussi une belle tour de l'horloge, à côté des restes d'une ancienne mosquée.

8

Encore du beau temps, un peu moins froid. Avant de partir je refais un tour dans le centre ville, c'est toujours plein de monde mais pas les mêmes, la moyenne d'âge a monté.

Prilep, grande place, la tour de l'horloge, le minaret de l'ancienne mosquée, le roi Marko

Aujourd'hui, pour la première fois en Macédoine, je vais emprunter des routes à grande circulation, et ce toute la journée. il existe une ancienne route, mais elle n'est pas du tout asphaltée. Celle-là a 3 voies, les voitures vont plus vite mais ont la place pour doubler...Il faut passer une zone montagneuse pour rejoindre la vallée du Vardar, grand axe de circulation jusque Thessaloniki. Mais à monter je n'ai que 300m, jusqu'au col de Pletvar, 998m.

Après c'est à peu près 30km de descente (sur 800m de dénivelé), raide seulement au début, et comme il ne fait pas trop froid ni trop venteux, c'est un régal! Zones forestières (pins), une autoroute en construction, plus bas nouveauté au niveau agricole, la vigne apparaît. J'ai quitté la route de Skopje et c'est un peu plus calme. Une petite remontée de 200m avant Kavadarci, une ville réputée pour son vin, comme Negotino où je vais faire étape. Entre les deux de longues portions de chaussée sont rainurées longitudinalement, c'est un peu dangereux pour les vélos.

Negotino est jolie au soleil couchant dans le quartier où je loge, pavillons et jardins. Mais le centre est moderne et sans intérêt.

9

Très beau temps

Aujourd'hui, l'heure a changé. J'ai une longue étape, demain encore plus, je décide de ne pas en tenir compte sinon je me ferai rattraper par la nuit. L'itinéraire est une eurovéloroute, la n°11, alors je suis aveuglément son tracé sur mon smartphone, il n'y a bien sûr aucun marquage sur place. Elle emprunte une route ancienne, doublée maintenant par une autre route et une autoroute, dans la large vallée du Vardar où stagne la brume, mais le fleuve, on ne le voit pas. .La plaine est cultivée, choux ou vigne.

Je prends un café au premier village traversé, Demir Kapiya, où l'espace social est la route dont un tronçon est transformé en rue piétonne, bordée de quelques cafés et de 3-4 énormes noyers noirs d'Amérique. C'est après que les surprises commencent. Une haute paroi rocheuse... la vallée qui était si large s'engouffre dans un étroit défilé, il y a même un tunnel. Impressionnant.

L'autre surprise c'est que bientôt (et ce sera pour une quinzaine de kilomètres) la chaussée n'est plus asphaltée. Dans des états variables entre la piste relativement lisse, le pavage un peu inégal, les cailloux qui roulent, le chemin de terre boueux plein d'ornières. Si encore c'était plat, mais non, il y a de bons raidillons, où parfois il faut pousser. La route longe une voie ferrée qui n'a pas l'air désaffectée, ce doit être la voie vers Thessaloniki. Il passe un train au moment où je ne peux pas le voir. Je ne vois pas non plus beaucoup le Vardar, qui pourtant est tout près, derrière des arbres. Entre les feuillages on aperçoit parfois une eau grise. Ceci dit c'est quand même un beau parcours, très direct, la route historique sans doute, sous les rochers ou dans les feuillages d'automne.

ça fait quand même du bien quand ça s'arrête. Traversée du Vardar, là on le voit bien et il est bien bleu. Une plaine agricole(choux) et arboricole (kakis, grenadiers, pêchers) et toujours de la vigne. Des charrettes passent chargées de kakis (récoltés jaunes, c'est à dire pas mûrs). Puis la route va monter sur un vaste plateau un peu aride. Parmi les monts environnements certains sont certainement en Grèce. Et l'étape se termine par la descente vers le lac de Dojran.

Il y a deux villages appelées Dojran, le nouveau (novi) et l'ancien (star). Le nouveau est au ras du lac où les pêcheurs s'amassent sur les pontons, au milieu des roseaux. Belles couleurs gris bleutées. Je loge dans Star Dojran 5km plus loin. Les restaurants et hôtels sont au bord du lac, mais les maisons s'étagent sur une pente, belle petite grimpette pour finir l'étape.

Et pour finir mes denars je vais au resto, et me régale d'une tranche de silure.

10

Eh oui aujourd'hui c'est la Grèce !

La frontière est toute proche, encore au bord du lac, et il y a un village côté grec qui s'appelle lui Doiran. Retour en Europe, UE. Eh bien c'est la seule frontière où on me fait une complication. On me demande un document supplémentaire que je n'ai pas... Il faudra que j'aille le chercher dans un bureau à côté de la douane et il faudra que je subisse un test covid.

La route qui suit n'a rien de passionnant, toute droite dans une plaine plate. Elle va à Thessaloniki donc est assez fréquentée. Première côte puis première ville, Kilkis, entourée de quelques collines.

Ensuite ce sont des petites routes dans une campagne vallonnée avec vue sur les monts pas très élevés (1200m, monts Vertiskos) vers lesquels je me dirige. J'aurai 600m à monter. Mais dans la réalité bien plus que ça car après chaque montée harassante suit une descente... C'est ce que les cyclistes disent de la Grèce. Ce qu'ils disent aussi, c'est qu'on s'y fait poursuivre par des bandes de chiens errants....

Eh bien je vais subir cette épreuve aujourd'hui par deux fois, la première fois, 3-4 chiens, la deuxième au moins une dizaine. Mais à vrai dire il ne s'agit pas vraiment des chiens errants, ils sont avec des troupeaux et des bergers finissent par les rappeler.

C'est après avoir parcouru 70km qu'il faut se payer cette fois une montée ininterrompue sur 4,5km.

Arrivée à la nuit à Vertiskos chez Yorgos et Maria chez qui je vais rester une huitaine de jours.

11

C’est une pause bien appréciée après 40 jours de voyage. Le wwoofing c’est du volontariat dans l'agriculture biologique, en échange de quoi on reçoit le gîte et le couvert. C'est au sens large, depuis les exploitations plus ou moins importantes qui vendent leurs produits, à des particuliers qui veulent vivre en autosuffisance ou simplement essayer de vivre plus écologiquement. C’est le cas de Maria et Yorgos, originaires de Thessaloniki et Athènes qui ont construit leur maison en matériaux naturels, paille et bois, se chauffent au bois qu’ils vont chercher dans la forêt (il en faut très peu puisque la maison est bien isolée), ont une basse-cour, poules, canards et oies, cultivent leurs légumes et récoltent leurs fruits. Comme animaux, il y a encore trois chiens et huit chats (seul un des chiens est autorisé à entrer dans la maison). Ils travaillent aussi à l’extérieur une partie du temps, mais une partie du travail de Maria se fait ici, c’est « l’école de la forêt », elle emmène les élèves en forêt (4 à 12 ans) et pratique avec eux diverses activités en fonction de leur âge, le but étant de leur donner cette connexion avec la nature qui se perd.

Verstikos et la maison de Yorgos, Maria, Magia et Koraleina



Ils ont deux filles, Maya, bientôt 12 ans, avec qui on peut communiquer car elle parle déjà très bien anglais, et Koraleina, 8 ans, on pourrait apprendre le grec avec elle mais il faudrait rester un peu plus longtemps.

Je ne logeais pas chez eux, mais dans la maison de la maman de Maria, dans le village, à 15 minutes de chez eux « par la montagne ». En redescendant j’étais régulièrement accompagnée par les chiens. Le premier jour il a plu, le deuxième jour, mais ce jour là seulement, j’ai vu une montagne enneigée au sud-ouest, c’était le mont Olympe, qui est à 110km d’ici à voir d’oiseau.

Vertiskos est le nom du village mais aussi celui de la montagne où il est situé, dont le plus haut sommet est à 1200m. Vertiskos est à 800m, c’est le plus haut des villages de la région. Le village est ancien mais a été entièrement reconstruit, un peu à la va-vite après un tremblement de terre dans les années 70. Il y reste deux ou trois agriculteurs, les autres habitants sont en majorité des retraités et des résidents secondaires, la majorité des maisons sont inhabitées en ce moment.

Pendant ces huit jours je dois dire que le travail que j’ai fait n’était pas trop harassant, à peine 3 heures par jour. J’ai nettoyé des parcelles de terre après la récolte, planté quelques salades et choux, charrié de l’argile et de la bouse, ramassé et rangé du bois.

Je suis tombée le bon week-end, j’ai participé à l’école de la forêt, disons que j’ai observé, même si j’ai quand même appris le nom de quelques arbres et oiseaux en grec. Le groupe des grands (6 ou 7) est très studieux et très intéressé, ils sont capables d’être totalement silencieux pendant 3 minutes pour écouter les bruits de la forêt. Avec les petits, qui sont presque 20, c’est plus mouvementé, ils se trouvent un tas de jeux, en tout cas ils prennent du bon temps.

J’ai mangé de bonnes choses comme toujours en wwoofing, Kora m’a appris les couleurs, nous avons joué tous à un jeu de société passionnant (Dixit).

J’étais triste de partir mais il ne faut pas trop attendre si je veux voyager un peu en Grèce.

12

ciel couvert, temps gris

Le soleil ne se montrera que très furtivement au moment du départ, passé midi. Triste ce temps. Il fait chaud dans les montées mais froid dans les descentes qui sont majoritaires, Thessaloniki est au bord de la mer, c'est 800m plus bas. Le terrain reste vallonné, on distingue au loin une nappe d'eau, est-ce la mer? Non, des lacs, avec derrière des monts dans la grisaille.

J'arrive à Lagadas, la ville la plus proche de Vertiskos, 25km environ. Ville animée, mais rien de remarquable. Il reste 15km, le problème c'est que Thessaloniki est derrière une hauteur qu'il faut franchir, 200m à monter. Heureusement qu'une petite route, l'ancienne route sans doute, double la grand route, c'est beaucoup plus calme.

L'entrée de Thessaloniki c'est d'abord des zones industrielles, puis de grandes avenues. On ne voit pas la mer. Comme pour toute grande ville non équipée pour la bicyclette, la traversée n'est pas très agréable. L'hostel "Stay Hybrid" est en plein centre, je n'aurai pas à sortir le vélo demain.

Petite promenade nocturne jusqu'à la mer...une étendue noire. Je reviendrai demain.

13

Beau temps.

L'agglomération de Thessalonique a près de 800 000 habitants, c'est la plus grande ville de Macédoine bien sûr, et la seconde de Grèce après Athènes. La ville a une longue histoire à partir du 3ème siècle av JC mais tout a été détruit par un incendie, en 1917. Sur les longues avenues qui se croisent au carré s'alignent des immeubles de 6 à 10 étages, tous avec balcons. La ville est entourée de fortifications que je n'ai pas vues, je suis restée dans le centre. Il subsiste malgré tout beaucoup de monuments des temps anciens. Des ruines romaines, restes du forum, du palais de l'empereur Galère, d'un arc de triomphe. Plusieurs églises de l'époque byzantine à l'origine, Panagia (Ste Vierge) Chalkeon, Acheiroplitos, Agia Sofia, Panteleimonas et j'en passe, difficile de s'y retrouver. Elles sont en pierres et briques mélangées, ont des coupoles et parfois des tours, à l'intérieur quelques fresques et mosaïques, et sont souvent entourées de parcs boisés. Elles sont passées par le stade mosquée à l'époque ottomane, on retrouve d'ailleurs quelques restes de minarets et mosquées. L'immense Rotunda a même été d'abord un temple à Zeus.

Au bord de la mer s'élèvent la Tour Blanche du 14ème siècle, et la statue équestre d'Alexandre le Grand empereur de Macédoine. Beau panorama sur la mer ou plutôt le golfe, sur le port et les monts voisins.

Tour Blanche                                                                          Alexandre le Grand                          ...

Souvenirs de l'époque ottomane, un bazar et un marché couvert, pas très grands. Une jetée d'où on voit le port et où se déroule en ce moment, dans d'anciens entrepôts portuaires, un festival de cinéma.

Bref une belle ville mais une grande ville aussi, pleine d'agitation, beaucoup de voitures, beaucoup de monde, des commerces partout, des restaurants, cafés, snacks en quantité. Trop de consommation, trop de bruit. Je serais plutôt pressée de retrouver la campagne...

14

La sortie de Thessalonique est fort pénible. J'ai suivi "l'Euroveloroute 11" pensant que ce serait un itinéraire adapté. Pas vraiment. 35km sur la route d'Edessa, très fréquentée notamment par des camions, beaucoup des pays des Balkans.

Changement de route à Chalkidonia. J'ai un peu plus le loisir de regarder le paysage mais ce n'est pas très varié: c'est tout plat, sans doute assez humide car il y a des roseaux, et des champs de coton. Des camions passent qui en transportent dans des bennes grillagées, en répandant sur les côtés de la route. On voit des montagnes, ce n'est pas l'Olympe, mais plus à l'ouest.

L'avantage c'est que depuis ce matin comme c'est plat, ça avance. Partie après 10h, j'ai déjà fait 50km quand je m'arrête pour casser la croûte, dans un bourg nommé Alexandria.

Après c'est cap vers le sud et là on voit l'Olympe, qui a un sommet plus accidenté qu'on se l'imagine. Et on dirait bien qu'il y a de la neige. La route commence aussi à être moins plate, surtout à la fin quand je me rapproche de la côte, il me faut à plusieurs reprises pousser le vélo, et je déraille à moins d'un kilomètre de l'arrivée.

L'arrivée c'est un camping à Makrigialos, au bord de la mer Egée, plus exactement du golfe de Thermaïque, (ou de Thessalonique). On dirait un lac. C'est plein d'oiseaux aquatiques. Quantité de flamands et un pélican.

Le camping ce n'est que des caravanes et cabanons. Je me trouve un petit coin sous un chêne, d'où on voit la mer, et me réfugie au restaurant car il ne fait pas bien chaud.




 l'Olympe peu avant le coucher du soleil
15

Je suis aux premières loges pour le lever du soleil sur la mer Egée. Autour de 7h30.

Pour continuer, je choisis la petite route qui longe la mer, il y a bien quelques affreux raidillons mais ça valait la peine. Petit café (1,50€) en bord de mer. Toujours des oiseaux, quelques bateaux. Plus loin Pydna autre petite station balnéaire à l'air abandonné, puis les ruines d'une église byzantine transformée en château-fort par les croisés (fermé le samedi), et un petit port bien abrité avec quelques vieux bateaux de pêche. Ensuite la route continue sur le plateau jusque Kallithea, là, changement de décor, grands immeubles, pas mal de circulation et une urbanisation continue jusqu'à la ville de Katherini que je rejoins à l'intérieur des terres.

Depuis ce matin, j'observe la silhouette grise un peu brumeuse du massif de l'Olympe, c'est vers lui que je me dirige, mais je vais quand même faire un arrêt au site archéologique de Dion, une ville importante des Grecs Macédoniens, un centre religieux dédié aux dieux de l'Olympe. Je visite un peu rapidement les fouilles et le musée, suis impressionnée par les rues aux larges dalles disjointes,et je regrette de ne pas voir les mosaïques ici aussi couvertes pour l'hiver. Bien trop rapide la visite du musée vu la variété des pièces exposées. Grecques ou... romaines. Car évidemment ceux-ci sont venus après. Du coup on a un peu du mal à s'y retrouver.

                                                pas terrible pour les cyclistes de l'époque                           mosaïque au ...

Avec tout ça le jour commence à décliner. Jusque Litohoro il n'y a plus que 10km, mais ça monte, c'est même fort pénible car c'est une route droite et large. Cela devient évident que ce n'est pas ce soir que je pourrai me renseigner sur les moyens d'aller à l'Olympe, et je suis également prise de court pour trouver un hébergement. J'ai un peu honte, ça sera l'hôtel. Il ne faudrait pas faire ça tous les jours. J'apprécie le confort malgré tout.

16

Il faut se dépêcher de regarder les montagnes ce matin, les nuages arrivent. La météo prévoit sur l'Olympe des températures négatives, je ne suis pas équipée montagne. Vélo+rando, pas évident...

Bref je renonce à tenter de monter là haut ne serait ce que jusqu'au refuge. Du coup je ne me presse pas, je prends le temps d'ingurgiter le copieux petit-déjeuner de l'hôtel. Au centre d'information sur l'Olympe, où j'aurais du arriver hier. J'apprends que ce n'est pas possible d'y monter en ce moment, que le refuge là haut est fermé. Par contre il y a une autre possibilité de balade dans les gorges d'Enipeas... j'aurais du me mettre en route plus tôt. Je prends le temps de regarder l'intéressante exposition sur cette montagne magnifique (très belles photos), et je fais l'effort de monter à l'autre bout de Litohoro pour faire un petit tour dans ces gorges. Ça valait quand même la peine.

Pour ce soir je vise un camping en bord de mer, c'est à un peu plus de 20km, je ne suis donc pas trop pressée. Mais comme souvent il y a de l'imprévu. Au début belle descente depuis Litohoro, vue sur la mer très brouillée malheureusement. Ensuite je perds un peu de temps à trouver la route la plus proche possible de la côte, je la trouve après la station balnéaire désertée de Leptokaria. La mer roule de petites vagues sur les galets à 3 mètres de la route. Là je flâne un peu...

Quand soudain je vois devant, un château, sur une hauteur...il va falloir la franchir. Et ce n'est pas rien. Horriblement raide, je dois pousser. La route passe en contrebas du château qui ressemble à un décor de films d'époque... Mais c'est qu'il date vraiment du 13ème siècle, et il est remarquablement bien conservé. Il est à la frontière entre la Macédoine et la Thessalie.

Je l'aurais bien visité si les jours étaient plus longs. Le camping est à peine 2km plus loin... Mais il est fermé. Je trouve une place sur un coin d'herbe en bordure de la plage. Il y a des bâtiments derrière mais ils sont tous vides. On voit les lumières des bateaux.

17

Pluie et nuages

Il a fait doux dans la nuit, le ciel est gris plombé, je sais à quoi m'attendre... J'ai le temps de déjeuner tranquillement en face de la mer et de ranger, et je suis à peine partie quand s'installe une petite bruine qui va s'intensifier. Ce n'est pas ça qui va égayer le paysage un peu tristounet. C'est plat, agricole mais pas varié, kiwis +kiwis, quelques peupliers et platanes. Au début, des petites routes, au moins c'est calme.

Ensuite je rejoins la route principale vers Larissa, Elle suit d'abord suit une vallée profonde sous des pentes rocheuses, c'est très joli. Dommage qu'il pleuve. Plus loin on quitte cette vallée, c'est encore assez vallonné, mais la fin du trajet vers Larissa est horrible, c'est le brouillard, la pluie, un trafic énorme (heureusement il y a une bande latérale), et des zones artisanales moches. Eh oui, je ne le savais pas, Larissa est une grande ville, la quatrième de Grèce après Thessaloniki et Patras. En plein centre ville, je longe les ruines d'un grand théâtre antique, et me restaure à côté dans un restaurant appelé Lucullus où avec le café j'ai droit à de succulents petits beignets dans une sauce au miel parfumé je crois à la cannelle.

Ce repas me réchauffe et me met en forme pour continuer, mais il ne me reste plus qu'une heure de jour. Une route fréquentée, puis une petite route. Je trouve de l'eau près de l'église du joli village de Kilada. Ensuite dans un paysage, vallonné mais dénudé, de champs labourés, je me demande bien où je vais trouver un bivouac. Une oliveraie? Le sol est sillonné... Voici une noyeraie, pourquoi pas? je trouve un endroit plat, un peu dur, d'où on ne me voit pas de la route. Je ne devrais pas être dérangée.

Oui, mais...J'ai entendu quelques chiens aboyer, le soir ils sont restés à distance. Et voilà qu'en pleine nuit, ils (les mêmes ou d'autres) se rapprochent, ils aboient et grognent en tournant autour de la tente. Ils sont deux semble-t'il. Je ne bouge pas, au bout d'un moment ils se calment, mais sont toujours là. et le matin, juste avant le jour, le concert reprend, un solo, il n'en reste qu'un. Je n'ai plus qu'à m'habiller et plier mes affaires, me demandant comment affronter le molosse quand j'aurai fini... Mais il s'en va avant, je vais même pouvoir déjeuner et plier la tente en toute tranquillité, je n'en reviens pas. Et à 8h20, départ...

Il ne pleut pas, mais le temps est couvert et terriblement gris, ce n'est pas la Grèce comme on se l'imagine! C'est moins brumeux qu'hier, on voit les monts à proximité. Ils sont bien pelés.

Je rejoins l'axe Larissa - Trikala. Une "route de service" double le quatre voies, qu'on entend plus ou moins. Sinon la chaussée n'est pas toujours en bon état mais il ne passe presque personne et ce n'est pas désagréable du tout. Comme hier la circulation s'intensifie en se rapprochant de la ville, aujourd'hui Trikala. Une assez jolie ville, avec une rivière dans la verdure, des parcs, et un quartier de belles maisons anciennes surmonté d'un château, byzantin toujours.

Il est 14h, plus que 30km jusque Kalambaka, la ville des "Météores" ces hauts rochers surmontés de monastères, je suis largement dans les temps, oui mais... Ce n'est pas si simple d'éviter la route principale fort inhospitalière. Au début, je suis une route de service parallèle, celle-ci se trouve brusquement barrée cause travaux de construction d'autoroute, heureusement les ouvriers me laissent passer sous la pelle. Ensuite une petite diversion dans la campagne est plutôt agréable. On se rapproche de ce site étonnant.

Une nouvelle fois je vais trouver ma route coupée par une pelle hydraulique en plein travail. Le conducteur du camion parle allemand et va m'aider. Un bon kilomètre sur le futur autoroute (pas encore asphaltée) avant de retrouver les routes asphaltées, et arriver encore presque à la nuit...C'est un peu le découragement, cet itinéraire pas très beau, ces routes pourries et toutes les difficultés, pour quoi? Quelques rochers qu'on peut voir en photo tant qu'on veut? Que suis je venue faire ici? ....Mais quand même, de plus près, c'est quelque chose, vraiment impressionnant, non, en photo ça ne fait pas cet effet... Je suis pour deux nuits dans un hostel, lit à baldaquin dans un dortoir, une cuisine assez bien équipée, je vais pouvoir me gaver de légumes.

Vieux quartiers de Trikala
18

temps couvert

Hier je m'étais dit que les Météores c'était pas un site à programmer pour un voyage en vélo, je change d'idée aujourd'hui, car pour le visiter c'est le véhicule idéal. Il y a bien un peu de relief, mais pas de pentes inhumaines, et pas de grandes distances, tout est très rapproché. J'ai le temps d'apprécier le paysage, de m'arrêter quand je veux pour admirer ou prendre des photos.

Première étape de la montée, le village de Kastraki est bien plus joli que Kalambaka avec son église et ses vieilles maisons, sous les rochers aux formes les plus étranges les unes que les autres. On commence à apercevoir des monastères, sur les sommets où au milieu d'une paroi verticale. ça serait plus beau avec un ciel bleu, mais les couleurs automnales égayent quelque peu le paysage. En approchant les parois rocheuses on constate qu'elles sont faites d'un conglomérat avec de gros galets, un poudingue.

Premier monastère où je pensais (à tort) retourner plus tard, Agios Nikolaos Anapafsas, sur un piton mais sous des rochers plus élevés. Le monastère de Roussanou, je le voyais déjà depuis Kastraki. Il est fermé aujourd'hui, la route fait un lacet autour. Le monastère de Varlaam est très haut sur un étroit rocher, il surplombe même le vide. Celui là je le visite, il me déçoit un peu, d'abord parce qu'on me fait acheter 3 euros un tissu censé tenir lieu de jupe car c'est incorrect paraît-il d'entrer dans un monastère en pantalon. Ensuite parce qu'il y a plein de touristes, avec des guides qui occupent l'église. C'est néanmoins une visite intéressante, avec une exposition, de manuscrits et livres anciens, et des explications sur la vie monastique où je passe vite. Je n'ai pas de sympathie particulière pour les popes. Un documentaire de 1924 est quand même intéressant, on y voit un moins se mettre dans un filet et se faire treuiller en haut. En fait il y avait déjà un escalier depuis 1921. Mais avant, pas d'autre moyen.

Le monastère suivant, le plus grand et le plus élevé de tous (613m), c'est "Le Grand Météore"... fermé aujourd'hui. Alors je rebrousse chemin mais je vois que ça ne remonte plus guère après alors je continue le circuit panoramique, d'où l'on voit aussi la plaine où je suis passée hier et (les jours où il fait beau) les monts du Pinde.

Il reste deux monastères, je vais les visiter tous les deux. Il circule des cars, des voitures, des touristes de nationalités diverses. Déjà trop pour moi, qu'est ce que ça doit être en été... Des Français, mais pas de voiture française, ils doivent tous venir en avion...dix secondes après avoir pensé ça, je vois un camping-car de la Creuse (une dame seule), et un autre des Pyrénées qui se gare à côté et ensuite encore un autre.

J'aime bien le monastère de Agia Triada, lui aussi en haut d'un piton étroit, de loin il paraît impossible d'y monter. Si, c'est possible, mais c'est quand même celui qui est d'accès plus difficile, descente par un chemin pavé, montée par un escalier raide taillé dans le roc. On est tranquille, pas de popes ni nonnes, je ne m'embête pas à mettre la jupette, et je peux prendre en cachette (car c'est interdit) des photos des belles fresques de l'église. Les bâtiments monastiques sont en travaux et partiellement restaurés, des murs fait d'un joli mélange de pierres et de briques. On peut voir une cellule de moine 2mx2m environ. Autour de l'église un cloître et des jardins.

Le monastère de Agio Stefano n'est pas loin, à peu près au même niveau et beaucoup plus grand. Il est habité par des nonnes qui ne me font pas mettre la jupette mais l'une d'elles me réprimandent en me voyant prendre une photo dans l'église. Les fresques sont belles aussi, mais mal éclairées. Elles couvrent tous les murs, saints à auréole en bas, scènes de la bible au-dessus, et le christ sous la coupole. Dans le petit musée on peut admirer de beaux livres anciens, certains enluminés, et même l'un avec une notation musicale.

Cela va aller très vite pour redescendre à Kalambaka, vite mais pas chaud. Le soleil avait fait une très très timide apparition derrière les nuages mais la brume est retombée.

19

Le 18... Un chiffre qui me porte malheur et un jour que j'appréhende. C'est le jour des catastrophes et des évènements tragiques ? Qu'est ce qui m'attend aujourd'hui ?

Déjà, je prends le train. Mais non, je ne le rate pas, je ne laisse pas mon téléphone portable ni une partie de mes bagages dans le compartiment. À la gare de Paleofarselos je dois payer 5 euros pour mettre le vélo dans l'intercity Thessaloniki-Athènes. Un employé tatillon me fait attendre pour servir d'autres passagers ... mais moi j'ai tout mon barda à faire passer dans les passages souterrains 😭😭. Un gars sympa m'aide... Bonne surprise, il y a des plans inclinés. Mais quand je reviens au guichet l'employé me fait retourner chercher le vélo et prends son temps pour mettre une étiquette et me faire un reçu...

En fait il y avait largement le temps avant le départ du train, ces tribulations ne peuvent même pas passer pour une difficulté. À l'arrivée à la gare de Lianokladi il faut descendre le vélo dans les escaliers, mais bon j'ai l'habitude, et pour remonter il y a même un ascenseur.

Gare très calme, du soleil, je ne me presse pas trop puis prends la direction donnée par le GPS. Petite route tranquille sur le plat au tout début, les montagnes devant entourées d'une bande nuageuse, et puis la montée commence dans la campagne. Ne serais je pas allée un peu trop loin avec ce train? J'ai l'impression d'avoir raté une transition, c'est devenu complètement différent, méridional, enfin. Côté cultures, en bas des pentes, des oliviers et des oliviers. Pas comme en Andalousie, en dessous c'est de l'herbe verte. Côté forêt, ce sont les chênes verts et les lentisques.

Quelques villages, redescente dans la plaine après avoir monté, après une pause casse croûte près d'une fontaine la montée commence. Mon GPS m'annonce maintenant une dénivelée de 1000m, c'est beaucoup mais j'ai deux jours, j'en ai marre des voitures et suis contente d'être en montagne. Par contre mon chargeur de vélo (sur la dynamo) ne va pas fonctionner, alors que le remplissage de la batterie sur le téléphone diminue...et soudain je réalise que j'ai complétement oublié de charger mes batteries de secours... Peut-être ça la catastrophe? Panne de smartphone ?

Des voitures il y en a peu, des humains pas du tout, des chiens beaucoup plus. Voilà toute une bande, j'essaie d'accélérer je déraille... Mais ils restent à distance. Plus loin un gros chien blanc tout seul. En général seuls ils sont moins hardis. Tu parles... Il pousse carrément le vélo, j'aime pas, et soudain... aïe ! Il m'a mordu le mollet. Là je m'arrête et l'engueule vertement, il ne s'approche plus. Le sang ne jaillit pas, ça fait un peu mal. Je continue à monter vers le village là haut (+200m en 2km = pente moyenne 10%). J'entends le comité d'accueil canin qui se prépare à mon arrivée. Mais ceux là ne sont pas méchants.

Le village est un peu sinistre, à moitié dans les nuages. Il y a quand même quelqu'un, des ouvriers qui travaillent et sur le haut une jolie place avec point de vue, un beau platane, un clocher. L'état de mon mollet ? 4 belles marques quand même, un peu sanguinolentes. Un des ouvriers, Ilias, me soigne avec du gel covid et attache le pansement avec du scotch de chantier.

Mais le jour va tomber, que faire maintenant ? Je me renseigne sur la suite du trajet. C'est bien ce que je craignais, sur 10km la route n'est pas asphaltée. Puis je passer avec mon vélo ? Pas sûr me dit on. En poussant mon vélo ? Pas sûr non plus. Un des deux habitants du village, Achille, finit par m'expliquer que les dernières pluies l'ont considérablement endommagée. Et en plus il y a des chiens là haut.

Seule solution, rebrousser chemin, 800m de montée pour rien. Car rebrousser chemin c'est aller jusque Lamia, à 3km de mon point de départ de ce matin...Mais Ilias est super sympa. Il va mettre le vélo dans la remorque de son pickup et m'emmener à Lamia, jusqu'à un hôtel.

J'entre dans une clinique en ville, un médecin examine les morsures. Pas de risques c'est superficiel et il n'y a pas de rage dans la région. Un beau pansement et c'est reparti...

20

Pluie et nuages

La route que je prends est simplement l'ancienne route, remplacée par une voie rapide. Passé la sortie de Lamia il n'y a pas plus de monde que sur la route d'hier, et passé la portion toute droite ça monte presque autant, le premier col sera aux alentours de 600m. Même vue qu'hier sur la plaine mais encore plus brouillée, belles montagnes rocheuses. Chênes verts lentisques mais aussi figuiers platanes arbres de Judée. Belles couleurs d'automne.

J'ai sué dans la montée, je gèle dans la descente. Je finis par rejoindre la voie rapide et me garde bien de suivre mon GPS qui me propose des variantes tarabiscotées. Ça circule mais la bande latérale est large. La route traverse une petite plaine, mais de l'autre côté ça remonte, très progressivement mais très longuement. Le deuxième col sera à plus de 800m, et dans les nuages, vraiment dommage car le paysage est très beau, et beau aussi de l'autre côté, où s'alignent sur plusieurs plans des montagnes grises et bleues sous un beau ciel où apparaît un peu de bleu. Mais le soleil est maintenant trop bas pour sortir des nuages.

Déjà qu'il ne fait pas chaud, le vent souffle, avec de temps en temps des rafales assez fortes qui me déséquilibrent un peu. Le soir tombe, je me demande bien où je vais dormir.

Un type m'appele depuis un café resto un peu avant un village appelé Eleonas. Il ne me propose pas de chambre mais une place pour ma tente sur le ciment. Pourquoi pas ? Je vais la tester en mode autoportant.

21

Cette nuit le vent a soufflé (j'étais abritée), et ce matin, ciel bleu! Les monts sont noirs (la forêt) et gris (les rochers). Je descends vers le sud, en bas s'étend une plaine côtière plantée d'oliviers, plus loin la ville d'Itea, et la mer, ou plus exactement du Golfe de Corinthe. On voit même les monts de l'autre côté du golfe.

Mais je bifurque, direction Delphes, "accrochée aux flancs méridionaux du massif du Parnasse" à 583m d'altitude, j'ai encore un peu plus de 500m à monter. Le vent me pousse, mais quand dans les lacets je me retrouve dans l'autre sens, il ne daigne pas changer et là c'est dur de résister dans les fortes rafales.

Le paysage, il est splendide sous le ciel bleu. Les montagnes de toutes parts, le golfe, une vallée juste en dessous, les fameux flancs du Parnasse (un massif montagneux qui culmine à presque 2500m). La route tournicote, on coupe aussi un canal, étonnant à cette altitude.

De ce côté on ne voit de Delphes que la ville récente. Ses maisons sont alignées le long d'étroites rues parallèles communicant par des escaliers. Les deux rues principales sont en sens unique, trottoirs étroits et très mercantiles, hôtels, restaurants, magasins de souvenirs.

Le temps de m'installer à l'hôtel et prendre une douche, il est déjà 13h quand je pars visiter les ruines et le musée qui sont à la sortie de la ville mais côté est. En hiver c'est tarif réduit, 6 euros au lieu de 12, mais tout ferme à 15h30, je n'ai donc pas vraiment le temps de flâner. Ni même l'envie, trop de monde. C'est un peu mieux organisé que les autres sites que j'ai visités, on vous donne un plan, un sens de visite. C'est très canalisé, on ne peut pas aller partout (c'est normal d'ailleurs).

Je ne vais pas décrire le site au risque de dire des bêtises, je ne suis pas très ferrée en histoire grecque, ça date de la 6ème et je n'ai pas révisé. Delphes c'est la Mecque de l'antiquité, on y vénérait Apollon, on allait consulter l'oracle, Sphinx, Sibylle, Pythie, je ne sais pas trop, dans le temple d’Apollon, on y pratiquait diverses cérémonies religieuses. On y trouve le nombril du monde (une pierre conico-ovoïde) et des monuments érigés comme ex-voto, ressemblant à des petits temples qu'on appelle trésors. On trouve aussi un théâtre et un gymnase. Tout cela s'étale sur la pente, entre quelques cyprés. Ce n'est pas si grand que ça en fait.

Les murs sont faits de grosses pierres, octogonales pour le mur de soutènement du temple d’Apollon, c'est fascinant. De nombreuses pierres, sur ce mur là et d'autres, sont couvertes d'inscriptions. Surprenant d'ailleurs qu'elles soient encore lisibles depuis le temps... Ce qui m'a frappée aussi, c'est les dimensions des colonnes du temple, elles sont énormes.

Mais dans ce qu'on peut voir in situ il manque beaucoup de choses, les statues, les bas-reliefs qui ornaient les frontons ou les murs de bâtiments, les objets, ils sont dans le musée, qui est juste à côté, où il y a aussi des pièces provenant d'ailleurs, et même du Louvre, car l'exposition en cours a été réalisée en collaboration avec le dit musée. Il semble que les Français aient toujours été associés à la préservation du site, c'est bien appréciable pour le visiteur francophone, enfin un endroit où on n'est pas obligé de se coltiner les explications en anglais!

Temple d'Apollon 
22

Très beau temps

Ce matin encore, ciel bleu ! Le petit déjeuner est encore plus riche que dans les hôtels précédents. Même moi je n'arrive pas à prendre de tout.

La journée commence facile, 15km de descente jusque Itea au bord de la mer. Et il ne fait même pas froid. La mer (le golfe) d'un bleu splendide. Les montagnes et les rochers. De vieux oliviers.

Descente de Delphes vers Itea 



Itea est très calme, atmosphère de dimanche peut-être. On pêche au bout de la jetée. L'eau est étale et brillante. Quel plaisir de loger la mer sur la promenade!

La route continue à suivre la mer, mais c'est moins plaisant, ça monte. Le soleil en face me gêne un peu, ça va mieux au gré des lacets, quand je roule dans l'autre sens. La montagne est aride, la végétation buissonnante ne couvre même pas le sol. Mais ce n'est pas désert, j'entends des clochettes. Ce sont des moutons, heureusement pas accompagnés de chiens.

La route est en très bon état, sans doute refaite récemment, taillée dans la roche de couleur orangée. La circulation s'intensifie dans le courant de la journée, avec pas mal de motos.Plus on monte et plus on voit loin dans le golfe et ses alentours. Magnifique vraiment. Après la route part dans l'intérieur des terres.

Trois villages, Desphina où la route n'entre pas, Distomo et Stiri. Un petit plateau agricole, oliveraies, vignes, le plus souvent des friches, utilisées maintenant pour les "énergies renouvelables", éoliennes et centrales solaires.

Il y a toujours un peu de relief, et une dernière grande côte juste avant d'arriver au monastère d'Ossias Loukas où je compte sur l'hospitalité des moines pour planter ma tente.

L'ennui c'est que les moines on ne les voit pas, ils sont tous dans l'église me disent des visiteurs. C'est un escalier qui mène au monastère (pas bon pour le vélo), je fais le tour à pied, et, revenant au parking, je remarque un chemin menant à une chapelle. Il y a de la place à côté. C'est exactement ce qu'il me faut, il y a même une grille qui ferme, les chiens ne viendront pas.

23

La pleine lune a brillé toute la nuit mais à l'aube le ciel se couvre. Je plie bagage et suis tout juste prête pour l'ouverture du monastère. Il n'y a que des chats. Est ce bien ouvert ? Mais oui ! Je suis la seule visiteuse... C'est comme ça que j'apprécie le tourisme ! D'autant plus que ce monastère ça n'est pas rien, il date des 10eme-11eme siècles et est encore en état. Les mosaïques et peintures sont d'origine. Le Saint Luc (Stiriote) en question est un ermite et prophète du coin.

Deux églises qui communiquent, des galeries à arcades, une crypte, un réfectoire, des caves, un pressoir à olives. Le style byzantin encore, murs de pierre et briques, tuiles rondes, coupoles, fenêtres avec des petits ronds.

La décoration est superbe ça et tellement riche que c'est impossible d'arriver à tout voir comme il faut. Des Christ et des Vierges, des scènes d'évangile, et partout des beaux visages de saint(e)s aux grands yeux dans des positions hiératiques.

Départ 10h. J'aurai du mal à réaliser l'étape prévue pour aujourd'hui, quelque 70km. Au début ça n'est pas rapide, montée et redescente avant de rejoindre la route où il y aura 680m à monter sur 18km.

On voit le monastère derrière sa colline et la plaine plantée d'oliviers autour. Ensuite c'est plus sauvage. Arrêt café à Kiriaki, une petite ville relativement animée. Mais bientôt il se met à pleuvoir. Dommage, c'est un beau paysage. À un moment j'aperçois la mer, elle est toute grise. Les montagnes sont tristounettes. Mais à l'arrivée et la descente du col (900-1000m) on traverse une magnifique forêt de sapins sous de blanches pentes rocheuses. Hélas c'est à un moment où il pleut beaucoup. Et où la descente est forte.

Le prochain village est Agia Anna (ste Anne), il pleut trop pour manger dehors. Plein de restos mais un seul ouvert, une dame qui ne parle que grec, ça me fait un peu d'exercice, je prends ce qu'il y a, une espèce de ragoût avec frites et une très bonne salade de pissenlits. Ô merveille, un poêle à bois chauffe la pièce. Première fois que je trouve ça en Grèce où on caille toujours dans les restos.

Il faut repartir, ça descend presque tout le temps jusque Domvraina, situé dans une plaine. Arrêt pour un café (1 euro toujours, dans les campagnes), pour faire le point et de renseigner sur la petite route que je veux prendre...oui elle est bien asphaltée.

Après, il pleut moins, ça roule bien, j'aurais pu les faire les 70km. Mais la nuit tombe. Un terrain près d'une église dans le prochain village ça serait pas mal...

Eh bien voilà, derrière une des églises, et à côté de la mairie, un petit parc planté de pins. Chiens aboyant et lumières autour... On finit par s'habituer.

24
24
Au bord du golfe de Corinthe

Mardi 23 novembre Xiromoni-Alepoxori 65km

Pluie dans la nuit, pas le matin, la tente n'est pas trop mouillée mais ça risque d'être difficile de la faire sécher dans la journée. Le ciel est couvert et va le rester.

Ce matin je traverse la Béotie. Eh oui, ça existe et c'est ici, au nord du golfe de Corinthe à l'est de Delphes. Je parcours des grandes plaines agricoles, d'abord des oliveraies puis des champs labourés, les récoltes sont finies, je pense qu'il s'agit de productions maraîchères. Au passage, quelques restes antiques, qui manquent de panneaux explicatifs.

C'est aujourd'hui que je ressens les efforts de la veille, et ce trajet est plus dur que je l'imaginais. Les reliefs sont de peu d'amplitude mais raides, ces successions de fortes côtes et descentes, c'est vraiment ce que je déteste.

Une pause à Erythres, sur la route d'Athènes qui est à moins de 60km. Je suis cette route sur quelques km, une montée régulière dans des pins, et puis changement de direction, cap à l'est. Aux alentours de Vilia spectacle de désolation, la forêt a brûlé. Il brille un vague soleil très brièvement mais pas de pluie. J'arrive à faire à peu près sécher la tente.

Après une dernière côte très très raide apparaît le golfe de Corinthe. Moins bien que sous le ciel bleu, beau quand même au milieu de tous ces monts dans les nuages. Descente vertigineuse je suis au bord de l'eau. Rive étroite et caillouteuse. Urbanisation hétéroclite mais près du port de Alepochoris il reste quelques petites maisons de pêcheurs blanches.

Alepochori

Mes jambes me permettraient d'attendre le camping que j'avais pour objectif. Mais il va faire nuit. Je plante ma tente sur un terrain un peu au dessus de la route mais pas trop visible. Dans la soirée il se met à pleuvoir.

25

Temps nuageux et venteux

Toute la nuit il a plu, tonné (de loin) et vers le matin beaucoup venté. On entend les vagues. Mais ça se calme quand il faut, je démonte sans pluie une tente sèche et pars quasiment à l'heure habituelle. Encore une fois je m'en tire bien !

 réveil venteux 

Je dois parcourir une quinzaine de kilomètres en longeant la côte. Ce sera moins plaisant que prévu. L'eau est houleuse et grise, les montagnes aussi sont grises et le ciel noir, c'est beau quand même. C'est loin d'être tout plat, il faut encore subir une belle série de raidillons. La pluie de la nuit a provoqué des éboulements, pourvu que la route ne soit pas barrée...Et puis un peu plus loin la forêt est brûlée, c'est sinistre mais en plus, comme la végétation n'est plus là pour retenir la terre, avalanches et coulées de boues se succèdent, heureusement on peut toujours passer.

Le camping où je voulais aller est annoncé par des panneaux mais rien ne dit qu'il est ouvert. Dans le même village un petit café est m'accueille avec un feu de bois qui chauffe bien la terrasse. Dernière pause avant l'effort, j'ai encore 550m à monter. Sur cette péninsule à l'extrémité rocheuse et sauvage, pour aller de l'autre côté il faut franchir les hauteurs. Points positifs, la forêt est maintenant bien verte (pins pignons, pins d'Alep), il ne passe quasiment personne, et on a de belles vues sur la mer. Points négatif, c'est souvent horriblement raide, surtout au début, du plus de 10% sûr, et puis la vue on n'en profite pas trop, elle est cachée par les arbres. Mais virages après lacets on arrive en haut!

Le vent souffle fort, et il n'est pas chaud. Descente vers le village de Pisia, puis celui de Perachora, beaucoup plus étendu. Là changement de versant, dévalage de la pente dans les rafales, j'entrevois la pointe de la péninsule puis la côte sud du golfe et la ville de Corinthe. On rejoint le niveau de l'eau à Loutraki, déjà une ville et apparemment balnéaire. Les avenues sont bordées de palmiers dattiers.

Je suis très déçue par la traversée du canal de Corinthe. J'imaginais une profonde tranchée, mais non, on le traverse au niveau de la mer, sur un pont levant de bois qui n'a pas l'air d'avoir servi depuis longtemps et où on imagine vraiment pas de gros navires. À côté on restaure une voie pavée : dans l'antiquité on y traînait les bateaux, impressionnant ça.

Corinthe est une ville au bord de l'eau, avec un port et une plage, urbanisation "moderne", un réseau de rues au carré. À l'hostel je trouve un autre cycliste, un Barcelonais qui a suivi la côte depuis la Croatie et se dirige vers Athènes.

26

nuageux toujours

Je suis là pour deux nuits, pas besoin de se presser... et je sors à 11h passées. Première chose à faire, trouver un vélociste, pour vérifier mes freins avant, qui ballotent bizarrement, et remettre en place les fils électriques qui se sont décrochés sur ma dynamo, je n'ai plus d'éclairage et plus de chargeur. Quelques centaines de mètres, c'est trouvé et réglé en une heure, en attendant je vais dans un bistrot chic en bord de mer, le café grec est à 2,80 euros, mais il est excellent et accompagné de petites sucreries.

La ville moderne de Corinthe n'a pas grand intérêt touristique, mais à proximité je vais devoir choisir car les sites ferment à 15h30 comme partout. Je décide d'aller à Isthmia. C'est, comme son nom l'indique, là où il y a l'isthme. Quittant la route d'Athènes, infernale, je suis une petite route qui me fait passer devant le site du temple de Poseïdon et le musée archéologique, eh bien allons y voir. Elles n'ont rien d'extraordinaire ces ruines, on a beau voir des panneaux explicatifs, avec des dessins figurant le temple à diverses époques, ce qu'on voit concrètement c'est que des grosses pierres plus ou moins alignées. Mais comme souvent, c'est le site qu'on apprécie, ici sur une hauteur, dans le prolongement de ces pierres on voit la mer Égée, des rives industrielles, de gros cargos à l'ancre et des monts derrière, des îles sans doute.

Sur ce site, on trouve aussi des bains grecs et romains, un théâtre, et un stade, où se pratiquaient des jeux comme les jeux olympiques. Dans le musée sont exposées les objets trouvés ici et dans les environs. On remarque de jolies poteries de l'époque mycénienne, et des espèce de mosaïques en verre coloré.


Cette visite terminée, c'est sous un ciel toujours gris que je me dirige vers la ville moderne d'Isthmia, plage au bord de mer, très vide aujourd'hui, petit port. Et le débouché du canal de Corinthe sur la mer Egée. On traverse le canal exactement sur le même type de pont levant que de l'autre côté, sauf qu'ici il n'y a qu'une voie. Évidemment, entre les deux il y a un passage plus rapide, un pont, et même deux, au point élevé où le canal coule sous de hautes parois verticales.

Je prends la route d'Epidaure (fréquentée) pour aller voir les ruines du port de Kekhriès. Encore une fois, seulement quelques pierres mais une promenade vespérale poétique dans un bel environnement.

Pour rentrer mon GPS me guide sans problème majeur sur de toutes petites routes campagnardes, asphaltées. Oliviers mais aussi agrumes, vignes, et moins agréable, des élevages de cochons. Autour, des monts très minéraux.

27

Pluie et orage, beau le soir

Pluie sur Corinthe ce matin. Départ en fin de matinée pour le Vieux Corinthe, la ville antique, avec l'espoir de passer entre les averses, mais je me trouve dans l'orage, aux premières maisons je m'arrête sous un auvent, c'est le déluge, des torrents d'eau dévalent de partout, il va falloir que j'attende que ça se calme alors que je suis à même pas 500m du musée.

Il pleut encore, je visiterai les ruines après. Beaucoup de pièces intéressantes dans ce musée, figurines, statues, vaisselle décorée, hélas les photos sont interdites, celles que j'arrive à prendre sont de travers, et pour les deux magnifiques kouros jumeaux la surveillance est trop serrée. Corinthe, c'était toute une civilisation, qui a débuté à une époque reculée jusqu'à ce que la ville soit mise à sac par les romains puis remaniée à leur goût. A été roi notamment un dénommé Sisyphe.

à la sortie, soleil et ciel bleu! Les ruines témoignent de l'importance de la ville. Beaucoup de pierres et de colonnes plus souvent couchées que debout. Celles du temple d'Apollon, au point le plus haut, sont les plus spectaculaires. On a d'un côté la mer (le golfe) et la côte découpée eau haut de la colline, de l'autre une citadelle au sommet d'un mont dénudé.

Le chemin qui me reste à parcourir ne sera pas difficile. Il suffit de descendre jusqu'à la côte et la suivre. Il vaut mieux regarder du côté du golfe, l'eau très bleue, la pointe d'Iraion (extrémité de la péninsule où j'étais il y a deux jours) est très nette, et on aperçoit derrière les monts de la Béotie et du Parnasse. Les plages sont étroites et rocheuses, l'eau un peu agitée. De l'autre côté, c'est moins bien, urbanisation de bord de mer tout du long, d'autant plus moche que pas mal d'immeubles ne sont même pas finis, c'est un peu sinistre.

Ce n'est que tout à la fin du trajet que l'environnement devient sauvage, parce que marécageux, dans les roseaux. Plusieurs propriétés clôturées, dont celle dite Neighmarsh, hameau de Nérantza, où je vais cueillir les olives en wwoofing pour une semaine. La commune s'appelle... Vélo. Mais la localité un peu importante la plus proche c'est Kiato. Je suis accueillie par trois chiens déchaînés puis par Anathasia, Thia pour les intimes, "l'hôte" wwoofing. Je loge dans la maison de sa sœur avec un couple de jeunes voyageurs-woofer allemands en camionnette VW, Svenja et Jakob.

Les chiens sont gentils en fait.

28

La plantation n'est pas immense (90 oliviers environ), et la récolte ne doit pas traîner, il faut tenir compte de la possibilité de prêt du matériel (les peignes mécaniques) et des disponibilités du pressoir. Et puis de la météo. Anathasia (Thia pour les intimes) a recruté pour l'occasion quatre wwoofers, les deux Allemands Svenja et Jakob, Isaac, un Anglais qui n'arrivera que dimanche, et moi. Aident aussi son compagnon Nikolas et un ou deux amis à elle. Sa maman est réquisitionnée aussi... pour nourrir tout ce monde.

Dès le lendemain de mon arrivée, la météo se montrera plutôt favorable, la pluie n'intervenant qu'en milieu d'après-midi, et en trois jours nous aurons fini.

Le premier jour nous n'avons pas les peignes mécaniques, nous utiliserons donc les peignes manuels, en forme de petits râteaux, et pour récolter en hauteur, les échelles, et puis la scie, pour couper les branches inaccessibles, on fait la taille en même temps! C'est ce jour là que nous travaillerons le plus longtemps, matin et après-midi, mais la pluie va nous arrêter vers 16h30, c'est encore un déluge qui va durer toute la soirée et une bonne partie de la nuit.

Le deuxième jour (dimanche) vient Ilias avec ses peignes mécaniques. Leurs longues dents métalliques, en vibrant, font voler les olives. Nous continuons à peigner mais uniquement les branches basses. Il faut aussi étaler les bâches sous les arbres, récupérer les olives, les verser dans le tamis, enlever le maximum de feuilles et rameaux et les mettre dans des sacs. 37 sacs seront récoltés et envoyés au pressoir. La production est de 100l d'huile, nous goûtons celle-ci le soir même sur du pain, excellente.

Le lendemain lundi, même système, matinée non stop, nous finissons vers 14h30. 25 nouveaux sacs. Les olives ne seront pressées que demain mardi.

Nous finissons de manger vers 16h, j'ai encore le temps d'aller faire un tour à l'extérieur pendant qu'il fait encore jour. La propriété est en faite très proche de la mer, celle-ci est très haute, bleue et agitée, les vagues sont près de déferler sur la route. De l'autre côté du golfe les montagnes sont éclairées par le soleil du soir, sous de beaux nuages, et décorées d'un morceau d'arc en ciel.

La petite ville de Kiato (10 000 habitants environ) est traversée par une route trop droite, trop de circulation, trop rapide, et, comme Corinthe, c'est un quadrillage régulier de rues. Il vaut mieux rejoindre le bord de mer et le port, calme agréable et un peu mélancolique. Des bateaux de taille moyenne, pêche et plaisance, toujours sur fond de montagnes. Sur le côté l'écume des vagues jaillit au-dessus des quais.

Le centre de la ville est la Place de la Liberté, plantée de palmiers et arbres divers, dont le tronc est décoré de guirlandes lumineuses...c'est bientôt Noël. De là part parallèlement à la route des voitures une rue piétonne bien déserte ce soir.

29

Nous avons terminé la récolte, et maintenant il n'y a plus beaucoup de travail. Mardi après avoir nourri les animaux et changé les abreuvoirs nous n'avons plus rien à faire.

Nous allons voir la mer, qui est à la porte de la propriété, elle est bleu foncé et plus agitée qu'hier, les vagues atteignent la route.

Au-dessus de Kiato se trouve un site archéologique, Sykonia. Il est fermé le mardi, je l'apprendrai arrivée en haut. Tant pis, cela aura été l'occasion d'une balade à travers les vergers d'agrumes et d'abricots, de monter une belle côte pour ne pas perdre l'entraînement, et de de prendre une averse imprévue. On voit les ruines de l'extérieur, notamment un théâtre, mais cela n'apprend pas grand chose. La vue porte jusque Corinthe.

Le soir, vous allons au pressoir observer le devenir des olives que nous avons récoltées. En fait les olives ne sont pas réellement pressées mais hachées et malaxées dans des cuves cylindriques, à chaud. Après filtrage, l'huile coule dans la cuve, il n'y a plus qu'à remplir les jarres.

La récolte est plutôt bonne : 1,650 tonnes d'olives, 295 litres d'huile.

Le lendemain mercredi, un soleil magnifique mais toujours du vent. Aujourd'hui nous reprenons le boulot, mais c'est le dernier jour, Thia nous dit qu'elle souhaite libérer la maison que nous occupons, qui est celle de sa sœur . De toute façon il n'y a plus grand chose à faire. Ce matin néanmoins nous avons de l'occupation, nous récupérons, dans les tas de branches d'olivier coupées, les morceaux de plus grosses dimension pour en faire du bois de feu, sécateurs et scies s'activent, en trois heures nous avons fini. Un travail plaisant, surtout sous ce beau soleil.

Les montagnes sont bien visibles aujourd'hui, et... couvertes de neige. La mer est encore plus agitée qu'hier, elle a inondé la route et déversé quantité de galets, avec le vélo ou à pied on ne peut pas passer. Il faut faire un détour par les vergers pour rejoindre la grand route.

Je vais retrouver le bord de mer, même en ville c'est plus ou moins inondé, les vagues forment des colonnes d'écume en se cognant le long des quais. En arrière-plan le soleil se couche sur les montagnes et notamment le Parnasse enneigé.

30

Jour de départ. C'est rapide à plusieurs pour ranger et nettoyer la maison. Adieu à nos hôtes et départ à 10 heures. Il fait toujours beau, il y a des nuages mais moins de vent. Les vagues ne roulent plus sur la route mais il y reste des bancs de galets et encore beaucoup d'eau.

Je reprends le trajet de l'aller le long de la côte ne vers le sud, puis tourne à angle droit vers l'intérieur des terres. D'abord à travers la banlieue de Corinthe, puis dans une campagne où l'on cultive les agrumes. La route monte constamment, assez régulièrement. Elle passe au-dessus de la voie de chemin de fer et au-dessous de l'autoroute, puis s'engage dans la vallée d'une rivière qui est à sec, entre des collines boisées où pointent des cyprès très effilés. Derrière ces collines apparait un beau sommet couvert de neige, ce doit être le mont Kyllini (2374m). Cette route est très agréable, très peu fréquentée, très calme, et dans un beau paysage et sous le soleil, que rêver de mieux ?

En prenant de l'altitude, même modérée (autour de 300m) on voit disparaître les agrumes, on cultive l'olivier, et aussi la vigne, il semblerait même qu'il s'agisse d'une région viticole assez réputée, autour de Nemea, située une large plaine.

Nemea c'est Némée, encore une ville antique, là où Hercule a vaincu le lion. Et encore un site archéologique que je ne visiterai pas. On aperçoit des colonnes blanches au milieu de la verdure. Un autre site antique est tout proche, Kleonai. Je ne peux pas m'arrêter si je veux arriver à temps pour visiter Mycènes, ce n'est ouvert que jusque 15h30.

La route se met à monter très fort... mais pour mieux descendre ensuite, vers une vallée beaucoup plus large empruntée par les axes de grande circulation qu'il n'est pas possible d'éviter totalement. Mais le paysage est toujours beau, beaucoup moins bucolique, mais grandiose, montagnes de tous côtés, devant une plaine et la mer, c'est le golfe Argolique ou de Nauplie. Je remarque deux monts pyramidaux gris très dénudés, dont je me rapproche... c'est en effet sous un de ces monts que se trouve Mycènes.

J'ai gagné du temps avec la descente, le problème c'est qu'une côte bien raide m'attend pour traverser le bourg moderne de Mycènes et pour parvenir jusqu'aux ruines antiques. De loin on dirait un grand cairn. Finalement j'ai un peu plus d'une heure pour visiter.

Rien à voir avec les villes de la Grèce classique. Ces ruines datent de l'âge de bronze, 14ème-13ème siècle av JC. De plus près, c'est plutôt le Machu Pichu que ça évoque, situation en altitude, gros murs avec des pierres énormes, la légende veut qu'ils aient été construits par les cyclopes. On entre dans l'enceinte par la fameuse porte des lions, à l'intérieur on peut voir des tombes circulaires, des palais, des quadrillages de boutiques ou ateliers, et le départ de souterrains qui permettaient d'accéder aux réserves d'eau en profondeur.

 porte du nord 

Bien entendu on a trouvé sur ce site une grande quantité d'objets, et quelques fresques et sculptures. On peut les voir au musée, où malheureusement j'arrive 10 minutes avant la fermeture... alors qu'il faudrait une heure au minimum, pour observer les décorations des vases, jarres et vaisselles diverses, détailler les petites figurines, les bijoux et autres.

Je n'ai aucune envie de rester au bourg de Mycènes qui pue le mercantilisme touristique, j'ai le temps de faire une douzaine de kilomètres supplémentaires pour aller à Argos, qui d'ailleurs était aussi une cité antique d'importance avec encore des restes et des musées. Elle est dominée par un immense château. Et c'est aussi une ville de plus de 20000 habitants bien animée.

31

Temps nuageux, venteux l'après midi

Normalement je devrais arriver tôt au théâtre d'Epidaure, moins de 40km et un dénivelé pas énorme, dans les 300m. Oui, mais...

Au début, tout va bien, des petites routes de campagne au milieu des arbres fruitiers, orangers et clémentines, il n'y a qu'à tendre la main pour se servir. Mais je n'avance pas vite, peut être que ça monte. Et de temps en temps j'oublie de tourner.

Mais bientôt surviennent des reliefs plus tourmentés, et c'est tout ce que je n'aime pas : si seulement ça montait franchement, mais non, côtes hyper-raides et descentes à pic se succèdent. Des églises longent la route, je fais une petite pause près d'un monastère au nom de Karakala, malgré tout je suis obligée de pousser le vélo dans la côte qui va suivre.

Une belle descente, un nouveau terrible raidillon, et puis surprise... La route n'est plus asphaltée ! Ça faisait un moment que mon GPS ne m'avait pas fait ce coup là ! Au demeurant je ne lui en veut pas trop, c'est un coin magnifique, à travers des plantations de vieux oliviers, des agaves à l'occasion, des montagnes rocheuses et même une vue sur la mer. Je vais finir par rejoindre le goudron et arriver à Epidaure vers 15h (5h pour faire 40km!), heureusement le site ne ferme qu'à 17h.

Il faut être au pied du théâtre pour se rendre compte de son immensité. L'hémicycle est complet au-dessus de la scène ronde, les gradins sont d'origine à plus de 90%, et même les marches on dirait. Les Romains ne l'ont pas réaménagé à leur sauce, il est quasiment tel que 23 siècles en arrière, on s'y croirait. D'autant plus facilement qu'il n'y a pas beaucoup de visiteurs à cette heure.

Sur le reste du site il y a un musée vite vu, des restes de temples, des sculptures, des stèles avec des inscriptions, remerciements au dieu médecin Asclépios qui a ici un sanctuaire. Son temple doit être quelque part dans les ruines, mais il y en a un aussi à Athena, difficile de s'y retrouver, je ne m'attarde pas.

Car il est déjà 16h30 et je n'ai aucune idée de où je vais atterrir pour la nuit. Je rencontre un couple de jeunes venus de Hollande avec leurs vélos, qui vont essayer de camper dans le coin, moi je continue encore un peu. Les plantations d'oliviers seraient accueillantes sans le risque de visites de chiens. Je vise une église, l'idée était bonne car il pleut toute la nuit et je trouve un auvent pour m'abriter.

32

Nuages et averses

Il a plu la majeure partie de la nuit, c'est bien d'être à l'abri. La pluie s'est calmé le matin, mais elle reprend quand je pars, heureusement je n'ai qu'une vingtaine de kilomètres à parcourir, en majorité en descente.

On ne voit pas grand chose du paysage, par contre la route passe à côté d'un monument du plus grand intérêt, un pont antique, de l'époque mycenienne, c'est à dire qu'il a environ 3500ans, et pourtant il a du en subir des catastrophes, inondations tremblements de terre et autres. Ils construisaient pour durer à l'époque.

Justement un peu plus loin c'est moi qui subis l'intempérie, une sacrée averse, la route, fréquentée en plus qui commence à ressembler à un ruisseau. Je finis par trouver à m'abriter, sous l'auvent d'un gars qui vend des snacks.

Ça se calme, je repars et suis vite à Nauplie, encore une ville bien encombrée. Je trouve l'hôtel Artémis où j'ai réservé. Le gérant parle français. Je trouve une boulangerie et un réparateur de vélos, hier j'ai cassé un rayon. Un peu de repos et vers 16h je vais voir le port et la vieille ville. Il a encore plu, le ciel est encombré de gros nuages gris, d'un bel effet au-dessus du port, un peu contradictoire avec les avenues bord de mer bordées de palmiers dattiers. On ne voit pas l'ouverture vers la mer, la ville est sous un promontoire bardé de fortifications. Il y a également un fort au milieu du golfe.

Entre le port et les citadelles là haut s'étend la vieille ville. En partie basse autour de la place Syntagma ce ne sont que boutiques de souvenirs, cafés et restos, on aperçoit quelques bâtiments anciens, un grand bâtiment à arcades sur la place qui est maintenant un musée, des vieux murs et des constructions à coupoles qui ont tout l'air d'avoir été des mosquées, maintenant églises, ou hôtels, une église orthodoxe à l'iconostase très doré, et en levant les yeux de jolies maisons crépies aux volets peints.


C'est plein de monde, mais dans les lieux les plus touristiques il y a toujours un endroit tranquille, que je trouve évidemment fort tard, c'est tout simplement la partie haute de la ville, des escaliers y montent entre des ruelles parallèles. C'est la ville méditerranéenne typique, vieilles maisons, des murs de pierre, d'autres crépis ou décrépis, des volets à persiennes, c'est magnifique. Avec ça, vue sur le golfe en bas, la citadelle en haut, je finis par aller jusque là, et de l'autre côté on voit le golfe en direction du large.

33

Très beau temps!

J'ai prévu de faire 80km mais vu que je ne décolle qu'à 10h il y a peu d'espoir.

La route longe la baie, eau bleue étincelante de soleil. Des aigrettes blanches et des hérons marchent au bord, des cormorans sèchent leurs ailes.

Baie de Nauplie. Les points noirs ce sont des cormorans. 

Une côte assez urbanisée jusque Myloi, après direction sud de l'autre côté de la baie, c'est plus sauvage et moins plat. Et parfaitement splendide, la mer bleu foncée, la côte et les montagnes, très nettes, de l'autre côté, et la garrigue sur les pentes calcaires.

Un cycliste arrive derrière moi, de nouveau un voyageur, et je dirai même un baroudeur, sacoches Ortlieb ayant déjà bien servi et un vélo de forme étrange. C'est un Allemand de Frankfurt, vient de Turquie par la Pologne et la Roumanie. Nous ferons route ensemble jusqu'à la fin de la journée. Nous rencontrerons aussi un sympathique couple de jeunes cyclistes suisses qui vont en sens inverse vers Nauplie.

La route quitte un instant le bord de mer mais il y a toujours les montagnes... (Et des côtes, aussi) et plus loin quand on rejoint la côte c'est très découpé, encore plus beau. Quelques villages sur les pentes ou des presqu'îles, des plages en contrebas. Le golfe s'élargit, des îles apparaissent et la pleine mer (mer de Myrto) est plus proche.

Nous avons prévu avec Mathias le cycliste allemand de bivouaquer ensemble mais quand le soir tombe nous nous trouvons en hauteur ce n'est pas évident. Nous hissons nos engins sur des terrasses plantées d'oliviers, finalement c'est pas mal du tout.

34

Le bivouac dernière minute était tout à fait bien. Ce matin Matthias s'est levé bien trop tôt à mon goût, m'envoyant la lumière de sa lampe sur ma tente... mais il a préparé des crêpes chaudes et fait bouillir l'eau pour le thé.

Les tentes ne sont pas mouillées, et les nuages arrivent à l'horizon, tout cela n'est pas bon signe mais pour l'instant le soleil brille et la mer est bleue. La route monte et descend au-dessus d'une côte découpée, une dénivelée de +200m puis redescente équivalente jusqu'à la petite ville de Leonidio au bout d'une vallée à fond plat où l'on pratique des cultures maraîchères. Nous y prenons un café en compagnie de Belges qui viennent ici faire de l'escalade, en effet tout autour s'élèvent de hautes parois rocheuses aux teintes ocrées.

Une belle ascension nous attend aussi, un 600m de dénivelée sur 9km environ, 7% de moyenne mais ce n'est pas régulier, au début notamment c'est le pire, ça monte tout droit dans une zone encore habitée et agricole, avant que ne commencent les lacets où ça va un peu mieux, mais c'est toujours désespérant de voir au-dessus, très haut, les autres lacets qui semblent inaccessibles. Je monte lentement mais sûrement, Matthias s'arrête au milieu de la montée pour casser la croûte, quelle idée. Dans la partie haute c'est plus joli car on voit mieux la mer qui maintenant est loin en bas.

En haut de la côte se trouve Pyrgoudi, un hameau qui ne semble habité que par trois chiens, et où souffle un vent terrible, un vent du sud-ouest que nous allons avoir en face le reste du trajet. Gare aux rafales, heureusement les voitures sont rares. Le ciel se couvre de nuages noirs fort inquiétants. Nous atteignons le village de Peleta qui est relativement grand, mais nous n'y trouvons que deux êtres humains dans un bistrot sympathique où brûle un feu de bois.

Il doit rester encore 200m à monter. Matthias n'a pas l'air très décidé, je ne comprends pas trop ce qu'il dit, à un moment il s'arrête et je continue sur ma lancée. Sur ces entrefaites survient l'averse, je m'abrite tant bien que mal au bord de la route mais ne vois toujours pas arriver Matthias, je suis finalement réduite à me trouver un bivouac dans le village de Kounoupia où se termine à peu de chose près l'ascension, et qui est relativement abrité. Je m'installe sur un espace herbeux plat près d'une maison inhabitée, et puis c'est la tempête toute la nuit.

35

Nuageux, averses l'après-midi

Tout va bien, une dernière averse survient pendant mon petit-déjeuner, ensuite il ne pleut plus! L'ascension continue encore un peu, dans des sapins, ensuite c'est un parcours presque à plat sur un plateau, puis on arrive au village de Mari avec son église perchée, la route plonge dans une vallée avec quelques lacets puis suit longuement cette vallée. Une fois n'est pas coutume, il y a de l'eau dans la rivière, une eau boueuse, c'est la pluie de cette nuit. Entre deux rangées de montagnes couvertes de garrigues l'environnement est sauvage et très beau.

Un peu plus en aval la vallée s'élargit et son fond se couvre de plantations d'oliviers. La route remonte de temps en temps, et c'est quand je suis en train de monter une côte que j'entends quelqu'un qui arrive derrière moi, un cycliste... c'est Matthias! Hier il est revenu en arrière jusqu'au bistrot où nous nous étions arrêtés et il a dormi là-bas, je n'ai pas trop compris où (il parle de façon très indistincte et je ne comprends pas la moitié de ce qu'il dit). Vu que je ne me suis pas pressée, il n'a pas eu de mal à me rejoindre.

Nous n'irons plus très loin ensemble car il va retourner à sa place de camping où il est resté 3 mois confiné au printemps 2019, puis il prendra le bateau pour la Crête à Gytheio. Cet emplacement se trouve sur une plage en bordure de la plaine côtière qui s'étend devant nous, où on cultive les agrumes et l'olivier. Moi je vais suivre cette plaine dans sa longueur, avec parfois des passages non asphaltés. C'est un trajet agréable, étonnamment il fait toujours beau, c'est plat, c'est calme.

Je rejoins une route de corniche, un peu plus fréquentée, qui m'évoque curieusement la Bretagne, peut-être à cause de quelques genêts ? Pourtant la vue sur la mer est bien différente, avec toutes ces îles et presqu'îles montagneuses.

Encore la même impression d'être en France en arrivant à Gythio, ces maisons colorées alignées le long du port... Je roule sur des flaques d'eau, visiblement j'ai échappé à une belle averse, moi je n'ai eu que quatre gouttes.

Je continue jusqu'au prochain village, Mavrovouni, vers un hôtel avec superbe vue sur la mer (30 euros). Il m'a été recommandé par un couple de cyclistes allemands croisés en route Susane et Klaus. Et j'ai oublié de mentionner une autre rencontre, une famille française, Aude Jérôme et Pépin, un petit garçon de 4-5 ans qui roulent depuis la Géorgie et vont à Corinthe puis en Italie par Patras.

36

Soleil nuages et vent

Belle vue ce matin depuis mon balcon. Ciel bleu, soleil, météo favorable.

Hm je vais déchanter un peu, quand le vent commence à souffler, et je vois aussi de gros nuages qui s'accumulent en haut des monts sur l'arête de la péninsule de Mani dont je prévois de faire le tour.

Pour commencer, un parcours le plus souvent à l'intérieur des terres, des collines couvertes de plantations d'oliviers avec des tours ça et là. Encore une zone incendiée.


Je contourne une péninsule sur une route qui monte mais abritée mais quand je change de pour rejoindre le village de Kotronas ça descend mais je peine à pédaler contre le vent. En bas se trouve une plage de sable, deux restaurants, fermés, aucun commerce et aucun humain. Un petit coin abrité m'accueille sur la place de la mairie devant l'église, le casse croûte se limite à pain fromage une clémentine.

Pour sortir de ce bled ça va être terrible, là il faut monter avec vent en face, le plus souvent en poussant avec difficulté. Enfin je me retrouve dans le bon sens et les reliefs, des pentes arides un peu sinistres, m'abritent.

J'ai parlé de tours tout a l'heure. Mais là j'en vois partout, force est de constater que ce sont les maisons qui sont faites comme ça. Des villages de tours. Chacun d'eux ressemble à un château fort. Il a du y avoir de la bagarre dans le coin. Et des villages il y en a plein, partout, en majorité abandonnés bien sûr. Comment tant de monde pouvait il vivre dans ces cailloux ? Je dois dire que je trouve l'ensemble parfaitement sinistre, le vent n'arrange rien bien sûr.

Sinistre encore le village de Kokkala où j'avais repéré un supermarché... Fermés aussi tous les bistrots... Et un vent épouvantable.

J'espère une église pour m'abriter. Mais finalement je vais hisser mon vélo sur des terrasses au bord de la route, c'est tranquille et abrité. Des vaches viennent paître et ruminer autour de moi pendant la nuit. C'est moi qui suis sur leur domaine..

37

Et toute la journée pour faire ces 37km, un record à l'envers !

Mais à l'extrémité de cette péninsule de Mani, on se croirait au bout du monde, comment se presser dans un tel endroit ?

La journée commence par une belle côte jusqu'au village de Lagia. Tout de pierre bien sûr, les maisons-tour et une jolie église, une terrasse pavée..et un bistrot fermé.

 Lagia

Suit une belle route qui domine la côte. En face de moi arrive un cycliste. C'est un jeune Français, Joan, qui est de Tours mais habite à Lyon. Parti depuis 3 mois il veut partir sur la route de la soie. On discute un moment et on échange des infos.

Et je repars dans une descente bien raide jusqu'à l'isthme après lequel commence l'extrême bout de la péninsule. Je commence à m'y engager et j'admire de haut le joli port de Porto Kalo, et puis me décourage de continuer, à cause du vent et parce que je n'ai plus rien à manger ni à boire. De toute façon la route ne va pas jusqu'au bout.

Une pointe sur la presqu'île finale, port de Porto Kalo 

D'ailleurs ça remonte encore bien, pour contourner le cap, et c'est toujours venté. Encore des montagnes sévères et des villages de tours de tous les côtés. Il s'agissait de se défendre contre les pirates, plus tard contre les Turcs. Il n'y avait qu'une porte en bas. Quand l'ennemi, qu'on avait vu venir de loin, se hasardait à entrer, il se faisait recevoir comme il faut.

Une route de plateau. Je passe Vathia et descends vers Gerolimenas en bord de mer en contrebas de la route principale.

J'ai bien fait, joli petit port, où se trouvent par ailleurs un restaurant et une supérette, je profite des deux.

 Gerolimenas

Un peu trop d'ailleurs. Mes ambitions pour la journée n'étaient pas élevées, mais je vais faire encore moins. Le soir va tomber. Comme hier j'espère une église, et aujourd'hui avec auvent car il va pleuvoir. Mais n'en trouve pas. Ce sera un pré entouré de murets, fermé par un barriau avec fil de fer, que je referme soigneusement... Beaucoup de chiens dans le coin en effet...

38

La chance, pas de pluie au départ. Une route à l'intérieur des terres sur le plateau, puis descente dans une baie profonde va (Limeni) pour remonter d'autant, par vent contraire, de l'autre côté, jusqu'à Oityli d'où on voit le château fort de Kelefa.

Mais c'est beau. Et beau aussi le trajet qui suit. Champs entourés de murets, plantés d'oliviers, la mer en contrebas.

Le temps n'est pas si abominable que prévu, il y a même quelques éclaircies.

Un peu plus loin je vais obliquer pour monter dans la montagne, où habite la famille de Jérémy, des cyclistes belges qui ont accepté de m'héberger ce soir.

C'est une très belle route, pas trop raide, mais le ciel est sombre. Je passe deux villages, déserts bien sûr, qui ont des églises aux hauts clochers de pierre, jamais vu encore en Grèce.

Il est déjà 17h mais Je suis presque en haut. La dernière côte est raide, et soudain... L'averse...Et puis le tonnerre, les éclairs, juste à côté, la grêle....

Je trouve un abri de bois près d'un belvédère, inespéré.... Je repars quand ça se calme un peu, et là vient une voiture, elle s'arrête, c'est Jérémy qui vient à ma rencontre! Je n'ai plus qu'à le suivre mais ce n'est pas si simple, la pluie, le vent, le grésil dans la figure à la descente, et puis d'interminables chemins boueux pierreux et plein de flaques, et ce à la nuit tombée.

Un bon raidillon encore et ah! Nous y sommes... Non pas tout à fait, on laisse les véhicules et on monte à pied... au campement. Jérémy et sa famille logent dans une tente sans eau courante ni électricité. Ils ont atterri là au cours d'un grand voyage à vélo au premier confinement... et y sont restés.

Pas de douche ce soir, mais un bon feu pour se sécher, et surtout beaucoup de chaleur humaine.

39

Chaleur animale aussi...la nuit je sens un poids sur le côté, et découvre avec horreur que la petite chienne Zohra est carrément... dans mon duvet. Les chats aussi viennent me rendre visite...

Nous allons déjeuner à la cuisine, qui est sur une terrasse un peu plus élevée, juste sous une bâche. Jérémy m'accompagnera jusque Pyrgos, avec la chienne dans une remorque, histoire de lui apprendre à voyager.

Première descente, pas trop tranquille dans cette humidité. La mer est grise et agitée, la côte soulignée d'une ligne d'écume.

La météo a envoyé des messages d'alertes, orages, vents, pour l'instant quelques gouttes tombent mais rien de catastrophique. J'ai le vent dans le dos, ça va vite. Mais les averses vont survenir. à Kardamyli, je m'abrite dans un café, plus loin dans un abribus. La route s'éloigne du bord de mer pour grimper dans la montagne, dénivelée de 400m. La montée est régulière mais dans les virages et les lacets je me trouve parfois face au vent. Merci, la pluie, de me laisser un peu de répit pour l'ascension... Mais sur le plateau au village de Kambos, nouveau déluge et encore un café.

Ensuite la route descend puis remonte une vallée, dans un paysage montagneux très différent de ceux que je viens de parcourir: les pentes sont boisées, avec de vrais arbres, verts, car ce sont des pins principalement..

Dans la redescente vers la mer et vers les villes, plus de répit, il pleut de plus en plus, et à l'entrée dans Kalamata ce sont des trombes d'eau qui se déversent sur la vlle.

40

Je commence la journée en déménageant de mon hostel miteux du centre ville vers un agréable appartement chez l'habitant plus près de la mer.

Et puis Je pars pour une balade à pied à travers la ville, en commençant par le port. Il est très étendu, c'est essentiellement un port de plaisance, où la plupart des bateaux (pas des petits) sont en cale sèche derrière une digue. Mais la mer a du passer par dessus car le sol est jonché de débris végétaux.

Un port jonché de débris, et la vue au-delà de la digue 

Un énorme ferry italien, des vieux bateaux échoués près desquels se baladent des chats, et quand même, quelques fort rares petits bateaux de pêche. La promenade sur la jetée n'a pas grand intérêt car la vue est bouchée du côté de la mer.

La plage est dans le prolongement du port, étroite en sable gris. Quelques tamaris y poussent. Les vagues roulent. ça ne donne vraiment pas envie de se baigner. La partie supérieure est occupée par des terrasses de café actuellement désertées et bien endommagées par les assauts de la mer.

De là pour rejoindre le centre ville il y a plus de trois kilomètres, je ferai entre temps une pause orage obligée. Je cherche l'église dite des Saints Apôtres, une très ancienne église dans le style byzantin, qui est par ailleurs un symbole historique, c'est là qu'à débuté la révolte contre les Turcs le 23 mars 1821 qui a conduit à l'indépendance. Ses héros moustachus sont partout dans la ville, en statues ou en peinture.

L'église est fermée. Je suis passée devant ce matin et elle était ouverte pour un office. Ce n'est pas la première fois, en plus, que je commets ce genre d'erreur. Par contre le musée archéologique est encore ouvert. Un peu toujours les mêmes poteries et sculptures. J'apprends ce qu'est une pyxide, une petite boîte avec un couvercle.

Retour par les longues avenues, le marché de Noël, le parc avec le musée du train où sont exposés wagons et locomotives anciennes.

Ce soir cuisine. Je ne varie pas beaucoup, je fais une ratatouille.

41

Petite distance... Je suis partie tard, 10h. les averses dont il faut s'abriter, va des côtes (dénivelé un peu plus de 400m) .

J'ai commencé à longer un peu la mer et à rouler dans la plaine (cultures maraîchères).

Après la plaine et des routes fréquentées, des les collines plantées d'oliviers. Une culture relativement intensive, les entreprises oleicoles sont nombreuses et assez grosses. La récolte est en cours, on entend les moteurs des peignes mecaniques, on voit passer les pick-up chargés de sacs d'olives. Le soleil daigne envoyer quelques rayons.

Mais les averses reviennent... Comme je me suis arrêtée pour m'abriter, et qu'en plus ça grimpe bien, je ne vais pas vite. Je n'atteindrai pas Chora, qui était mon objectif, mais qu'importe, je me trouve une petite église à peu près parfaite. Un auvent bien large, une petite annexe, ouverte, avec table et chaises, et des toilettes. Il ne manque que l'électricité, et le chauffage, car ça a bien rafraîchi.

Je suis à +420m environ, un secteur plus montagneux et boisé, chênes verts et pubescents, érables de Montpellier, quelques pins.

42

Beau temps!

Un peu plus froid, mais quel plaisir de voir le ciel bleu!

Encore une petite ascension dans la montagne. Après Chora je me dirige vers le palais de Nestor, un site mycénien paraît-il remarquable, mais fermé le mardi. Mais il est possible d'aller voir une tombe dite "à Tholos", circulaire surmontée d'un cône de pierre. J'ai peut-être vu à Kalamata des objets qui s'y trouvaient.

Et puis ça descend, et on aperçoit la mer, très bleue aujourd'hui, des îles ou presqu'îles montagneuses. En bas une mauvaise surprise, j'ai le vent en face. La route qui suit la côte ne sera donc pas si facile.

Une pause à Marathopoli, située sur un cap, une île en face, très beau site, je profite du soleil, de la mer bleue foncé, et des vagues qui moussent, tout au bord de l'eau.

Je ne retrouverai le bord de l'eau qu'un peu plus loin, à Agios Kiriaki, où je m'arrêterai pour un café et d'où j'admirerai encore les vagues.

Entre temps la route traverse des zones de cultures maraîchères et des oliveraies. En face des montagnes, certaines couvertes de neige.

En fin d'après midi circulent sur la route, assez anarchiquement, quantité de tracteurs et pick-up chargés de sacs d'olives, de matériel de cueillette, et de travailleurs.

Mon hôte de ce soir, Thodoris, rentre précisément de la récolte avec ses aides, mais il repart à Kalamata en cours, il prépare un master d'oleiculture. Je fais la connaissance de Sotoris, Yorgos, et Ariane, une Française en voyage arrêtée ici depuis une dizaine de jours.

43

Aujourd'hui la récolte reprend ! Il se trouve que mon hébergeur cycliste Thodoris est un oléiculteur en pleine récolte. Donc je saute sur l'occasion, d'autant plus volontiers que je peine toujours autant à recevoir des réponses pour le wwoofing.

C'est moins artisanal que chez Thia, pas de petit peigne manuel, seuls des engins mécaniques, deux roues qui tournent, moteurs thermiques qui fonctionnent avec un compresseur, c'est donc beaucoup plus bruyant. Je ne m'y essaie pas, c'est Thodoris, Sotoris et Stojan- Stefan (qui est bulgare) qui les manient. Moi j'aide à tirer les filets, je ratisse pour enlever les feuilles, et j'aide à remplir les sacs. Ça me fait assez souvent des temps morts, je n'aime pas trop mais au moins il fait beau. Mais plus froid, 4° ce matin !

La plantation où nous travaillons n'est pas à Thodoris, il récolte pour un propriétaire qui en échange lui donne 35% du produit de la récolte.

Nous repartons au soleil couchant, entassant tout le matériel dans le pickup. La mer est belle, le ciel est rouge, on voit au loin l'île de Zakynthos.

44

Encore deux jours de récolte, toujours par beau temps, mais toujours froid le matin.

Le jeudi nous changeons de plantation, un propriétaire pressé vraisemblablement. C'est une plantation pas très grande à côté d'une basse cour, nous avons la compagnie des poules coqs dindons et chèvres, et aussi des propriétaires qui s’assoient pour nous regarder comme au spectacle. Le monsieur nous amènera quand même des canettes de coca.

Au début je ne sais pas trop ce que je dois faire, mais ensuite comme il y a plus de travailleurs qu'hier, j'ai de quoi m'occuper, ratisser les branches, débarrasser les branches coupées, éventuellement taper dessus pour faire tomber les olives, remplir les sacs.

Le râteau pour ramasser les branches et le remplissage des sacs 
Les sacs remplis, on charge le camion et on les emmène à l'usine 

à la fin de la journée, on remplit les sacs au maximum, on les ferme et on les charge dans le camion pour les emmener à l'usine. Il y en a 23 et demie, à raison de 50kg environ par sac, au total quelque chose comme 1,2 tonnes.

Pour moi retour au coin du feu, mais un peu plus tard dans la soirée Thodoris va récupérer les bidons d'huile et propose de m'emmener.

première étape: réception des olives, enlèvement des feuilles et divers

Phase suivante, deux broyages successifs, on peut chauffer un peu pour faciliter l'opération, mais la température du broyat réglementairement ne doit pas dépasser 26°.

Et maintenant, il faut extraire l'huile, la séparer des particules solides et de l'eau, passage dans une centrifugeuse à deux cylindres.

Dans la dernière phase, on ajoute de l'eau pour éliminer les 5% d'eau qui restent. Ceci afin de pouvoir conserver l'huile pendant des années. Mais cette eau excédentaire est déversée dans les rivières et est source de pollution. Thodoris préconise de garder les 5% d'eau mais de conserver l'huile au frigo.

il n'y a plus qu'à remplir les bidons! On obtiendra 150 litres, la moitié revient au propriétaire, l'autre moitié au récoltant.

Le lendemain, nous retournons où nous étions mercredi, mais je vais travailler beaucoup plus car avec Fontaine (?), un Congolais, je déplace et tends les filets avec lui, quand je ne le faisais pas ça me semblait très amusant... mais en le faisant... ce n'est pas de tout repos!!

C'est plus calme chez Thodoris, Yorgos est reparti chez lui à Athènes, Ariane avec lui pour prendre l'avion.

Samedi, pluie le matin. Thodoris m'emmène à l'hôpital pour une tentative vaccination. Impossible: la carte européenne d'assurance maladie ils ne connaissent pas, il faut demander un numéro grec, ce qui prend un temps indéterminé. Bref je n'ai plus le pass sanitaire.

Le reste de la journée le travail reprend... sans moi. ça fait du bien de s'arrêter un peu!

45

Ce dimanche, pur ciel bleu, mer d'un bleu intense... mais il fait froid et il y a du vent.

La plage 

Après un petit arrêt au bord de la mer, je pars à Kyparissia, à 5km environ. Le port, la plage sont déserts mais la petite ville est bien animée. Le même quadrillage de rues que partout, divers commerces, une place centrale avec des cafés et un arbre de Noël électrique. Le but de mon passage est principalement de faire le test de la validité de mon passeport sanitaire en Grèce. J'entre dans un café , il faut que je réclame pour que le serveur me scanne le QR code, et le résultat est sans appel, je suis hors la loi, ce qui compromets fortement la suite de mon voyage, ça va poser problème pour les cafés (à l'intérieur), les restos, les hôtels et les musées sans compter les moyens de transport si contrôle, pas évident pour le tourisme en hiver. Bref je suis un peu démoralisée, et je me résous à prendre le bateau pour l'Italie dès Patras.

Pour profiter malgré tout de ce ciel bleu, une petite balade dans la montagne, en vélo jusqu'à une petite église blanche, puis à pied sur une piste pierreuse , hélas elle ne mène pas en haut, seulement à un enclos estival de berger. Je monte quand même jusque 800m environ, et de là-haut admire la vue sur la mer, le port et la ville de Kyparissia et les villages environnants les îles en face (Zakynthos et Kephalonia, monts enneigés à l'intérieur des terres. Il fait très froid, l'eau sur la piste est gelée.

Le lendemain je retourne au boulot, un champ qui n'est pas loin de cette chapelle. Il fait un peu nuageux mais moins froid qu'hier. C'est le dernier jour, demain je reprends le vélo.

46

Un matin moins froid que les précédents, tant mieux. Les potes partent au boulot, les chats, intéressés par mon chargement, montent sur les sacoches et le vélo. Départ vers 9h. Un trajet facile et fort agréable, presque pas de côtes, presque pas de vent, temps beau et frais.

Il n'y a pas de sites touristiques majeurs sur le parcours, j'ai renoncé à aller à Olympie puisque je risque très fort de ne pas pouvoir visiter. Je me contente des oliveraies et des bois de pins, des villages et petites villes animées (Zacharo, Pyrgos...) des vues sur la mer et les îles ioniennes de Zakynthos et Kephalonia, cette dernière bien reconnaissable avec le mont Ainos (1600m) qui ressemble à un volcan. À l'est, autre magnifique spectacle, de lointaines montagnes entièrement blanches de neige. Ce pourrait être le mont Chelmos, ou le mont Kyllini, ou les deux (dans les 2300m).

à l'ouest,  le  mont Ainos sur l'ïle de Kephalonia, à l'est le mont Chelmos

J'ai réussi à faire 96km, je me suis bien avancée. Je m'installe à la nuit tombante sur une aire de pique-nique près d'un monastère. La nuit la température fraîchit bien, il faut être le plus possible dans le duvet. Petit déjeuner au lit...

Il y a du givre dans les champs et dans les premiers kilomètres il faut pédaler vigoureusement pour réchauffer les mains et les pieds. Le soleil est un peu faible, et hélas bientôt il va disparaître derrière une couche de nuages. C'est sans doute en partie à cause de ça que le trajet est beaucoup moins agréable que celui de la veille. Il y a aussi le fait que je suis souvent obligée, faute de routes secondaires, de rouler sur la nationale où la circulation est dense, et rapide.

Les îles sont dans la grisaille puis sortent du champ de vision. Les monts enneigés sont toujours au fond de l'horizon, et d'autres sommets enneigés apparaissent, plus vers le nord (le Parnasse?) et plus près. Au niveau agricole rien de bien pittoresque, ce sont des cultures maraîchères intensives, fraises, salades, en majorité sous tunnel.

La fin du trajet c'est l'ancienne route nationale, encore bien fréquentée. Elle longe le golfe de Patras, bordé de montagnes surmontées d'éoliennes et parfois enneigées. Sur l'eau flottent quelques bateaux, et au loin on distingue le pont suspendu blanc que je préfère ne pas avoir à traverser. C'est une zone urbanisée, les ouvertures sur le golfe sont peu nombreuses.

à l'hôtel El Greco, on ne me demande pas mon pass sanitaire et on me laisse mettre le vélo dans le hall. Je trouve un labo où je prends rendez vouz pour un test antigénique demain, je marche un peu sur la jetée du port, et je traverse les rues piétonnes aux restos très achalandés pour trouver un supermarché.

47

Derniers instants en Grèce dans une ville en effervescence avant les fêtes, mais du côté du port c'est calme. Après mon test (négatif) et ma dernière tiropita (feuilleté à la feta) je pars l'esprit tranquille et avec beaucoup d'avance au terminal de ferry.

Le Superfast 2 est grand sans être monstrueux, il est loin d'être plein, on peut dormir en travers sur les sièges, et la mer est calme, bref un voyage tranquille. à Bari il faut faire 3km pour sortir du port puis refaire le chemin en arrière pour rejoindre le centre ville. Je trouve sur le trajet un cycliste local mais travaillant à Toulouse qui m'explique que ce détour absurde est un héritage de la période mussolinienne où l'on a voulu construire quantité de pompeux bâtiments administratifs ou militaires sur le front de mer à l'écart de la ville.

Il m'indique une pâtisserie dans la vieille ville où on peut acheter de bonnes foccacie. Ce doit être le cas en effet, il y a une queue terrible, j'y renonce. Entre temps je suis allée à la gare où j'ai pris un billet pour demain pour Rimini, et je me suis coltinée les rues particulièrement encombrées, piétonnes ou pas, de la ville commerciale. Ce n'est qu'après m'être installée dans mon logement que je pars visiter la vieille ville, sans vélo et sans bagages, c'est mieux.

Je suis déjà venue à Bari, il y a 10 ans. Je me souviens avoir beaucoup aimé la vieille ville encore très populaire, mais il ne m'en reste aucune image. Je ne me souvenais plus qu'il y avait un château. féodal au-dessus du port, très grand, avec des tours carrées.

En entrant dans la ville ancienne, je vois des plateaux devant des maisons, dedans il y a des pâtes fabrication maison, et là un souvenir me revient: le matin, assises derrière ces plateaux, des femmes fabriquaient, à la main, des petites pâtes en forme de coquillages. Et la ville m'émerveille toujours autant. Rues étroites, belles maisons de pierre, des porches sculptés, des voûtes, du linge qui pend, qui semble faire partie des décorations de Noël. Les rues sont peut-être un peu plus propres qu'il y a 10 ans, de nombreuses habitations sont retapées et font bed&breakfast, néanmoins l'aspect populaire est toujours là. On déambule beaucoup dans la rue, on s'attroupe, on s'interpelle en criant, et les vespas vous rasent sans ménagement. Comme c'est la fête on fait péter des pétards, ça j'aime pas trop.

À Bari on fabrique les pâtes dans la rue 

Et puis je n'avais pas souvenir de la splendeur de8s églises, celle de Saint Nicolas notamment, où l'on peut entrer. Devant les portes monumentales veillent des lions, l'intérieur est immense mais le plus beau est la crypte, construite pour y mettre le tombeau de Saint Nicolas. On peut y admirer de beaux chapiteaux byzantins et romans. Le saint est appelé Saint Nicolas de Bari, je crois au début que c'est un autre, mais non que c'est bien le Saint Nicolas que l'on connait, qui est même père Noël dans certains pays. Il ne vivait d'ailleurs pas ici, c'est qu'on y a ramené ses reliques, vraies ou fausses.

Basilique Saint Nicolas de l'extérieur 
48

Départ de Bari avec le beau temps, arrivée à Rimini avec la pluie, après un voyage en train où il n'y a rien à redire: ascenseurs dans les deux gares, un train avec des marches mais les contrôleurs m'aident à monter puis descendre le vélo, un espace pour 5 vélos où il n'y a que le mien. Peu de monde dans le train. J'ai un petit moment d'angoisse quand le contrôleur, en même temps que mon billet, me demande mon pass sanitaire. Je sors le résultat du test, il a deux jours, ça ne lui va pas, en désespoir de cause je montre le certificat de vaccination, il scanne, et miracle, c'est bon!! Si c'est le cadeau de Noël, c'était une bonne idée. Je vais pouvoir voyager l'esprit tranquille, et dormir au sec... car le soir à l'hôtel ils me le réclament encore.

Avant qu'il ne fasse tout à fait nuit je vais faire un tour en bord de mer. Sur l'avenue, lumières de Noël, restaurants chics, hôtels pompeux. La plage est très large, ce qui explique vraisemblablement le succès de cette station balnéaire. En ce moment elle est débarrassée de ses chaises longues et parasols.



Pour le lendemain la météo est tout à fait exécrable, il y a un dénivelé de 400m, mais je veux absolument aller à San Marino, Saint Marin. La raison de cette obstination est à peine avouable... c'est ajouter un pays à la liste de ceux où j'ai mis les pieds.

Dès le début de la matinée il tombe des gouttes, mais ça va se calmer un peu. Le GPS me fait prendre des pistes cyclables, le long de la rivière, bétonnée et à sec, puis dans un parc où je croise quelques promeneurs courageux à pied ou en vélo. à la sortie de la ville une petite route parcourt une campagne vallonnée, qui sent le retour en Europe occidentale avec ses arbres à feuilles caduques, dénudés ou au feuillage roux. Quelques cyclistes sportifs me doublent. Je vois au loin dans la grisaille un mont couronné d'un château et une ville en dessous, ce doit être San Marino. Cette grisaille se densifie et bientôt... c'est la pluie pour de bon, et c'est là que ça se met à monter.

La frontière est passée, je suis arrivée plus ou moins à mon cinquantième pays. Encore une belle côte à l'arrivée dans la ville, sous la pluie toujours, Et le "Centro storico" est au-dessus, tout là haut. Il faut quand même y aller. Ouf, heureusement, il y a un funiculaire!

Là haut c'est une ville fortifiée, des rues qui se serrent sur un étroit rocher, des remparts et des tours crênelées, avec une vue sans doute très étendue par beau temps. Elle est fort ennuagée aujourd'hui, mais c'est quand même très beau, ce tapis de collines couvertes de petites maisons entourées de nuages. Pour m'abriter de la pluie je visite longuement la basilique de Saint Marin, bien qu'elle soit du 19ème siècle. Mais elle est toute blanche, plutôt sobre, et contient quelques jolies peintures dont l'une d'une femme peintre du 17ème siècle. Par contre je ne monte pas aux tours.

La place du palais du gouvernement est belle, les petites rues sont défigurées par le mercantilisme touristique. Il y en a d'ailleurs, des touristes, même un jour comme aujourd'hui!

FLa République de San Marino est de 61km² et compte 34000 habitants. C'est une république italienne ancienne comme il y en avait beaucoup au moyen-âge et à la renaissance, qui a réussi à garder son indépendance envers et contre tous.

Il pleut beaucoup moins sur le chemin du retour, par contre il y a du brouillard. Mon GPS s'obstine à vouloir me faire prendre des pistes non goudronnées, je résiste et trouve une route qui suit une vallée, en légère descente, c'est tout à fait ce qu'il me faut. Je passe cette fois par le centre ville de Rimini, qui est aussi une belle ville italienne, palais et maisons anciennes autour de la place où sont installées les baraques du marché de Noël.

49

Un lundi encore gris et pluvieux, mais je serai à l'abri dans le train.

Il y a beaucoup plus à voir que je ne pensais à Rimini, un château, des ruines romaines, des palais. Je n'y jetterai qu'un coup d’œil rapide, il ne faut pas rater le train... Il passe par Bologna et il est bien rempli. Mais pas de marches à monter, et l'emplacement vélo est idéal, il case parfaitement les roues, debout, et pas besoin enlever les bagages. Je change à Piacenza, terminus du train. Une heure d'attente, et malgré la pluie un tour du centre-ville en vélo me permet d'apercevoir des églises et des palais, une colonne baroque au milieu de la place.

L'emplacement vélo est le même dans le train pour Genova. À l'arrivée c'est compliqué de s'orienter dans la gare et je ne trouve pas d'ascenseur pour sortir. Je m'installe dans l'ostello le plus proche de la gare, à même pas 5 minutes.[un ostello c'est une auberge de jeunesse, comme hostel, ne pas confondre avec albergo, hôtel].

Et puis je sors pour faire quelques courses, et soudain c'est un choc, je me retrouve dans une rue étroite et très fréquentée, quasiment uniquement par des gens de couleur. Il y a quantité de boutiques, mais petites, pas la supérette classique que je recherche, Magasins asiatiques, africains, coiffeurs de tresses, vendeurs de kebab.... ll est vrai que Gênes est une grande ville portuaire, pas une station balnéaire. Et très contrastée, cette rue est à deux pas de la rue Baldi où je loge, et où s'alignent de riches palais, et la vieille université.

L'exploration en bonne et due forme, si on veut, est pour le lendemain, par un temps toujours gris et pluvieux. Le cœur de la ville ancienne est un dense réseau labyrinthique de ruelles qui sont non seulement très étroites mais aussi très sombres à cause de la hauteur des maisons, et des échafaudages qui bouchent encore plus le ciel.

À la sortie on tombe sur une grande place bordée d'immenses immeubles du début du 20ème siècle, dont un grand théâtre et la Bourse. Place Ferrari. Au milieu se trouvent une statue de Garibaldi, une fontaine circulaire et un grand (vrai) arbre de Noël.

Je vais visiter quelques églises perdues dans cet environnement moderne, elles se trouvaient à côté de l'hôpital, au cœur de l'ancien quartier de Portorial, qui a subi des transformations et des bombardements.

La première San Stefano est la plus ancienne et la seule à l'aspect sobre, voire sombre. Les autres sont discrètes à l'extérieur, mais à l'intérieur c'est très décoré, je dirais même surchargé, et toutes les églises de Gênes sont comme ça. Peintures et fresques, ors, marbres. Ça impressionne mais n'émeut guère, à l'exception de quelques beaux visages sur un ou deux tableaux.

De ces églises il y en a partout, les grandes familles de la ville se faisaient tous faire leur église privée.

Mais ils avaient aussi leurs palais, comme ceux des Rolli le long de la rue Garibaldi, étroite comme les autres rues de la ville ancienne. Les porches sont monumentaux, sculptés de colosses. J'aime mieux les cours à arcades et escaliers qui sont derrière.

Je rentre me reposer, transie de froid. L'après midi je me couvre mieux...et le soleil apparaît enfin ! Il est bienvenu pour la visite du port. Il est séparé de la ville par une large avenue au dessus de laquelle passe... l'autoroute.

Mais on peut passer à travers les anciens bâtiments portuaires ou le long des bassins. Les promeneurs sont nombreux, il flotte un air de dimanche ou de vacances. Les familles vont visiter l'aquarium, le musée maritime ou le l'énorme galion Neptune qui est une reconstitution d'un galion espagnol.

Retour dans la ville ancienne, une partie plus touristique que ce matin. Via San Luca, Via San Lorenzo, piazza Matteotti. Encore des églises d'or et de marbre, entre autres Santa Maria delle Vigne, la cathédrale San Lorenzo rayée de blanc et gris, immense, et des palais notamment le Palazzo Ducale. C'est un centre culturel et lieu d'expositions ne Je vais voir celle dédiée à Pasolini, principalement des photos qui vous replongent dans les années 50-70 en Italie.

Une journée un peu fatigante, contente d'avoir parcouru une partie de cette ville intéressante et fort animée. Un peu trop pour moi peut-être.

50

Direction Avignon, durée du voyage de voyage, 12h, due aux incohérences de correspondance entre les trains régionaux.

Arrêts à Vintimille, Nice, Marseille. à Nice je me fais refuser l'accès à un café car mon pass sanitaire n'est plus valable, mais heureusement les trains ne sont pas contrôlés comme en Italie.

Vintimille, et la promenade des Anglais à Nice 


À Avignon, visites festives chez des amis, et une belle balade sur le Petit Lubéron, par un temps quasi printanier.


Ménerbes et le Ventoux 

Et puis le jour du premier janvier, entre brouillard et soleil, le train me mène à Bourges.


C'est la fin du voyage, qui a duré exactement 100 jours, dans 12 pays différents.

(France, Suisse, Slovénie, Croatie, Bosnie, Monténégro, Kosovo, Albanie, Macédoine, Grèce, Italie, Saint-Marin)

La distance parcourue en vélo: 3640km.

Cela m'a fait plaisir de partager avec vous, courageux lecteurs qui m'avez accompagnée.


MERCI

Très bonne année 2022, sur les chemins, les routes et dans vos foyers