Pour développer un peu mieux la réponse à la question du capitaine en vidéo « qu'est-ce que tu fais là ? », il faut que je prenne le crayon. Voila qui va suivre, un long blabla mélodramatique pour te raconter ce que je fous là au milieu de Pacifique à 1500 miles des côtes, avec 4300 m de fond sous la surface de l'océan, pas un bateau à l'horizon depuis 10 jours, rien, sur un rafiot de 16 m et avec 3 bonhommes que je ne connais pas. Si tu penses avoir déjà tout compris et veux un résumé rapide, va directement à la dernière phrase de ce chapitre. Je ne t'en voudrais pas.
Tu es toujours là ? C'est gentil... Bon alors, c'est parti.
Tout d'abord, moi j'aime bien l'aventure, le voyage, la découverte. J'ai déjà pas mal voyagé, notamment à l'époque (je parle comme un vieille), où nous n'avions pas encore le voyage facile avec le smartphone. Après sa généralisation, moi qui aime le backpacking, je voulais un peu plus de challenge sportif ou d'engagement dans ma manière de voyager. Je suis allée dans des pays improbables, me suis déplacée à cheval, à dos d'âne, de chameau et même de renne, pris des tuk-tuks, partie en vélo, en van... Du coup, le bateau, c'était la suite logique. J'ai fais du bateau-stop en 2018 pour traverser l'Atlantique. Partie des Canaries, j'ai rejoints avec enthousiasme la Martinique sur un OVNI de 13 m (monocoque). Sache que cette traversée n'était pas ma première expérience. J'ai toujours le souvenir de la voile en Méditerranée avec mes parents lorsque que j'avais entre 7 et 12 ans environ... Nous avions un modeste voilier de 9 m qui nous emmenait aux Baléares tous les mois d'août. Les plus belles vacances de jeunesse pour ma sœur et moi. J'aimais tout, même les orages. Encore gamines, les manœuvres ce n'était pas pour nous, mais on regardait le paternel s’affairer assises sur le banc du cockpit à la sortie de la descente du carré, pour ne pas gêner. Je me suis rendue-compte sur l'Atlantique que je connaissais toutes les manœuvres principales sans pouvoir leur donner un nom. Je sais virer de bord, empanner, à plus ou moins régler les voiles, je sais barrer, mais mise à part tribord et bâbord, je n'avais pas le vocabulaire. Il a vite fallu que j'apprenne les mots associés aux actions . Pour le reste, c'est assez naturel. En navigation, il s'agit pour moi de sensation et de bon sens. On peut dire que ça me parle. Et pour ce qui est de la vie sur l'eau, je n'ai pas peur du roots et de la débrouille. Et bonne nouvelle, je n'ai pas le mal de mer. Voilà pour l'expérience.
Un jour très frais de journée forge en novembre 2021, un copain artisan me présente un proche ami à lui, apprenti du jour : Christian. Ils parlent de trans-pacifique. Je me suis direct tapé l'incruste. Il y a de la place pour moi ? Comment ne pas tenter sa chance ? Je n'avais pas forcement en tête de repartir naviguer car toutes les destinations m'excitent, mais saperlipopette ! Traverser un continent par le mythique canal de Panama, puis un océan plus grand que l'Atlantique, arriver par la voie maritime en Polynésie française et la visiter, et en prime reprendre ma route à la voile là où elle s'était arrêté en 2018 !? Le top du top, Cher Lecteur...enfin pour moi.
Parmi les raisons de ma présence dans ce coin paumé du monde, comment également ne pas évoquer mon papa qui a déjà fait le tour du monde et navigué en Polynésie lorsqu'il était dans la marine française, engagé à la fin de l'adolescence. Est-ce que c'est inné la voile ? Héréditaire ? En tout cas, je peux dire merci à mon papa, mon premier capitaine, qui m'a donné goût et ma ouvert les portes de la navigation. Pour cela, je compte bien faire du cheval aux Marquises.
Beaucoup me demande si l'on ne s'ennuie pas sur un bateau, si ce n'est pas trop long. Eh bien, cela me fait penser à la réparation du canot Le Presqu'Île du Léman (type baleinière en bois, 13 m de long ) sur lequel nous avons passé tout un hiver. C'était un peu stressant car il fallait bien faire, fastidieux, frustrant quelques fois, fatiguant, on y a passé beaucoup de temps et d'énergie, mais le bonheur le jour de sa mise à l'eau !! Une super expérience où l'on a appris, partagé, sué, donné de nous pour le bien commun. Ainsi, les émotions, ça se mérite. Elles sont d'autant plus belles quand on a donné de sa personne pour nous et pour les autres. La navigation, c'est ça aussi. On se challenge pour plus de plaisir. On vit pleinement dans une nature pas si pacifique que ça, tous nos sens sur le pont, pour un but et un arrivée incroyable. Tu sais bien, Lecteur, que ce n'est pas la destination qui compte, mais le chemin pour y arriver. Bon là, j'avoue, la destination est dingue...
Pour aller également dans le sens du challenge, le partage est une aspect très important de ce voyage. Vivre à 4, avec des personnes que l'on ne connaît pas, c'est une aventure humaine qui nous apprend beaucoup sur nous même et le vivre ensemble. Pour ma part, j'ai encore un peu de boulot à ce sujet... Je suis une Castel (avec les bras qui font des vagues).
Ainsi, je suis là, à voguer au milieu du Pacifique vers une destination de rêve. Enfin... je ne sais pas si c'est un rêve que je poursuis, le mien ou celui de mon père, ou même comment il a ressurgi un jour de caillante à la forge. Toujours est-il que j'y suis, et j'y reste (t'façon, je peux pas descendre). Et puis pour tous les flemmards qui n'ont pas lu toutes mes phrases précédentes, nous pouvons répondre maintenant en 3 mots à la question « qu'est-ce que je fais là ? » : plaisir, challenge, émotion. PAF.
Si tu veux connaître un peu mieux mes coéquipiers, rendez-vous sur Youtube, il y a des vidéos "blabla" : @francecastel4816
Ca avance !!