Quelques anecdotes totalement subjectives et partiales. Tout est idyllique avant le départ, mais la réalité reprend vite le dessus ...
Du 18 au 28 janvier 2013
11 jours
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18/01/2013

Je quitte ma campagne sous la neige fondue/reglacée. Quelques flocons voltigent. Mais le train va vers le réchauffement : rien de glacé à Toulouse ! Quelques petits problèmes avec le train, annoncé en retard puis finalement à l’heure en gare ; mais ensuite il s’arrête une bonne demi-heure, en rase campagne… les collégiens jouent perso, enfermés dans leur mobile, les collégiennes chahutent en se moquant des premiers.

À la gare routière de Toulouse, quelqu’un a oublié un bagage et c’est le branle-bas de combat.

À l’aéroport de Blagnac, j’effectue l’enregistrement à la borne, mais je dois tout de même attendre, et passer par le seul guichet ouvert ! Embarquement par le tarmac alors qu’il pleut : le ponton articulé est en panne. Vol pour Francfort dans un tout petit avion.

" Neige au départ "  " L A380 vu par le trou de la serrure " 

Là, il pleut aussi : des bus nous font traverser les pistes sur cinq km. Mon transfert est très court : même pas une heure. Je suis un des derniers à embarquer pour Singapour. L’entrée dans l’A380 est impressionnante : c’est comme dans une salle de spectacle ! Et ça doit être pareil à l’étage au-dessus ! Ma place est plutôt confortable. Départ à l’heure (21h40). L’avion décolle lorsqu’il atteint 300km/h, pas de secousses, pas de tangages, un bruit raisonnable. Dîner d’un goulasch au-dessus de la Hongrie et « Age de glace III » au-dessus de l’Ukraine !

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19/01/2013

Réveil à 14h, heure locale (7 heures de décalage). Je suis en vrac. Déjeuner d’une omelette.

Dehors, on ne voit que de la brume : au-dessus tout est gris, au-dessous nuages sombres. Le plafond des nuages est à 600 m.

L’atterrissage se fait par une grande boucle au-dessus du détroit de Singapour et des iles indonésiennes. Sur celles-ci, il y a d’énormes travaux de terrassement : des engins y crèvent la forêt et font de grandes saignées rouges. Plusieurs centaines de gros navires ont jeté l’ancre dans l’eau boueuse du détroit.

24° sous l’équateur, et il pleut ; l’avion atterrit dans un nuage d’éclaboussures (16h40). Ce n’est pas trop la cohue pour sortir de l’avion. Peu d’attente pour les formalités : on offre même des bonbons ! Quant au décor, il est soigné : plantes, cascades, lumignons, etc… Tout est simple ici : bagages, douane, accès au métro. Je change 30 E, j’obtiens 46 SGD.

" Station de métro à Singapour "
" Station de métro à Singapour "

L’immense hall du métro est d’une architecture très audacieuse. Une vraie salle d’opéra ! Au guichet des billets de métro, l’employée m’envoie aux bornes automatiques ; là, la machine n’accepte pas les billets de 10 ; mais une autre employée qui se tient là, me les échange contre 5 billets de 2 !!

Le métro est en majeure partie aérien et traverse d’immenses quartiers de barres d’immeubles de vingt étages. Comme je suis déjà venu à Singapour, je ne compte pas m’y arrêter ; aussi je change deux fois pour aller directement à Woodlands, au nord de l’île. Là, sous la station de métro, attente du bus 950 pour traverser la frontière. Deux bus me passent sous le nez et la queue s’allonge ! La nuit est déjà tombée. Les effluves de plats chinois d’un stand de cuisine me font frémir les narines…

Pour payer dans le bus, il faut avoir l’appoint. On perd encore du temps dans l’embouteillage qui noie le Woodlands Check Point. C’est le poste frontière côté Singapour sur la Causeway, le pont qui relie l’ile à la Malaisie. Là, on doit quitter le bus pour se faire tamponner. Mais pour moi, cette fois-ci, cette formalité n’est pas simple : le policier ne trouve pas sur son ordinateur mon arrivée enregistrée à l’aéroport ! Un autre policier m’emmène dans les étages pour comprendre pourquoi. En fait je suis allé plus vite que le transfert des fichiers informatiques ! L’affaire est réglée ; ça dure tout de même un bon quart d’heure… Mais je note qu’il est parfois plus difficile de sortir d’un pays que d’y entrer !!

Reprendre un bus n’est pas la moindre des choses, le mien ne m’ayant pas attendu. Dans la cohue qui règne, je tombe heureusement sur un 950 sans avoir à attendre, et je franchis le bras de mer qui fait la frontière.

Du côté de la police malaise, pas de soucis particulier : on me souhaite une bonne visite !

Dans Johore Bahru, le vaste bâtiment City fait office de poste frontière, de centre commercial et de gares ferroviaire et routière ; il est 21h et je dois récupérer et payer ma réservation de train. Je vais à un DAB, mais il refuse mes deux cartes ! GGRR ! Je change en urgence 50 E à un « Money changer » (189 Ringgits ou MYR) et me précipite au guichet des trains : c’est l’heure limite ! Mais la guichetière ne trouve pas ma réservation !… Elle doit me prendre pour un dingue et me rassure : elle va me donner une autre couchette pour Kuala Lumpur, sans problème (45 MYR). Le train part à 22h55. J’ai encore le temps de voir dans le centre commercial s’il y a d’autres DAB. Même HSBC rejette mes cartes. Je suis bien embarrassé car je n’ai pas suffisamment de liquide pour passer les deux mois… Je trouve un endroit au calme pour un repas poulet nouilles sans trop m’énerver, mais…

Je rentre en contact avec la maison pour voir comment faire évoluer mon affaire de cartes bancaires.

Tant que le train n’est pas en gare, on fait attendre les passagers dans un hall commercial. Cette gare est monumentale et semble prête à recevoir un TGV. (Toilettes nickel, digne d’un palace ! )

Je papote avec un gars du même âge que moi, mais qui lui, travaille encore… On parle économie mondiale (du pétrole vient d’être trouvé en Malaisie et il est très fier), puis je le branche météo, car le temps pluvieux m’inquiète pour mes prochaines randonnées. Il m’affirme qu’à partir d’aujourd’hui il fera beau ! Optimiste !

Après un poinçonnage de ticket, on nous fait descendre au troisième sous-sol à l’heure dite ; on passe devant de multiples salles d’attente, mais on n’y a pas droit. Je finis par monter dans le train et trouver ma couchette. Le wagon est un peu vieillot mais chacun a de l’espace dans sa couchette, et l’intimité est respectée grâce à un rideau défraichi marron délavé. Les toilettes sont propres (mais de l’âge du train), et il y a même un mode d’emploi ! Ultime contrôle des billets.

" Beaucoup d'interdits "  " Couchettes "   " WC "  " Mode d'emploi "  

Difficile de dormir, tant on est secoué et tant la ferraille grince et claque.

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20/01/2013

Réveil à 6h. Arrivée à 6h30. Grignotage de deux ChocoBN fondus. Il fait déjà chaud.

La gare de Kuala Lumpur est tout aussi monumentale. C’est aussi la jonction de différentes de lignes de métro. Pas grand monde à cette heure-là. Je prends le LRT – qui ressemble au métro de Toulouse - pour une station. De là, traversée à pied du quartier chinois pour rallier la gare routière de Puduraya. Dans les ruelles, alors que le jour se lève, les premiers clients sont attablés dans les gargotes pour y déguster un bol de soupe aux nouilles. Je n’ai pas trop d’appétit pour ça ce matin…

À la gare routière, ticket pour Tanah Rata, dans les Cameron Highlands. Le bus (35 MYR) part à 8h30.

En attendant, j’essaie un DAB : pas de succès…

Dans le quartier il y a une course cycliste : des centaines de participants ! Les rues sont bloquées par la police. Il y a un beau soleil et la température monte.

Le car est sur le point de partir lorsqu’un couple d’un certain âge arrive, mais sans ticket. Le chauffeur leur demande d’aller aux comptoirs qui se trouvent au troisième étage de la gare. Le rabatteur prend leur valise pour la mettre dans le coffre ; au bout d’un quart d’heure sans les avoir vus revenir, le chauffeur décide de partir. Le couple doit encore chercher sa valise…

Autoroute sur 160 km à travers la conurbation de KL puis les interminables plantations de palmiers à huile. Puis route étroite et sinueuse vers l’intérieur des montagnes ; là, peu de villages. Arrivée vers 13h.

Tanah Rata fait station climatique, et il y fait bien plus frais qu’en plaine.

Recherche d’un logement : je trouve une chambre au BB Inn à 25 MYR (6,5 E) : 12 m² avec SdB, WC et WiFi.

Je passe l’après-midi à me promener : d’abord en ville, puis dans un petit sentier (N°4) qui mène à une cascade, et enfin une grande boucle à travers la forêt et les plantations de thé (combinaison des sentiers 10, 11 et 6). La station est réputée pour ses sentiers (plus ou moins) balisés, numérotés et entretenus ; alors, j’en profite. Le ciel se couvre un peu et lâche quelques gouttes.

" Bien balisé "  " Mal balisé " 

La jungle est vraiment impressionnante : arbres immenses, aux racines enchevêtrées, mousses, fougères géantes, quelques fleurs, beaucoup d’oiseaux aux cris qui vont du simple « gloup » au vacarme de la scie circulaire… La jungle commence là où le béton s’arrête : et il ne faut pas laisser un terrain à l’abandon, il en devient la proie !

" Des racines et de la boue "  " Obstacles " 

Au bout du sentier 4, il y a des élevages de fraises : mais attention, ici ce n’est pas dans le sol que les racines poussent, mais directement dans les sacs de terre végétale posés sur des étagères et alimentés en eau « dopée » par des tuyaux en goutte à goutte... Hors sol. On y vend le pot de 250 g de confiture pour 2 E…

" Hors sol "  " Chemin fleuri " 

Au bout du sentier 6 (assez sportif, car pas entretenu et assez pentu), des terrasses sont aménagées dans la montagne et on y cultive des choux, des aubergines, des poivrons, etc. Il y a aussi des chouchous qui font comme une immense tente perchée sur leurs piquets. Puis, lorsque les reliefs sont moins marqués, il y a les plantations de thé, étalées comme un puzzle végétal.

" Plantations de thé "  

Je traverse des petits villages de travailleurs agricoles : les murs des maisons sont en planches et les toits en taules. Ça ne respire pas l’opulence. Les mômes qui courent derrière un ballon n’interrompent pas leur jeu mais pousse des petits cris joyeux vers moi. Dans le village, je demande mon chemin à travers les plantations et papote un peu ; les gens sont aimables. En remontant vers la route nationale, je passe par la fabrique (fermée, car ce n’est pas la saison) et, plus haut, le salon de dégustation et de vente. Il est plein de touristes venus en voitures et cars, aussi je ne m’attarde pas, n’étant pas un grand amateur de thé. Le gardien du parking me signale qu’il n’y a plus de bus publique pour faire les cinq Km jusqu’à la ville, aussi je finis ma randonnée sur le goudron de la nationale où les automobilistes ne sont pas très prudents…

" Habitation des paysans "  " Cascade discrète " 

Pour visualiser cette rando, cliquer sur le lien :

https://fr.wikiloc.com/itineraires-randonnee/tanah-rata-1-4862484

" Un repas bien mérité "

Il est 6h30 quand j’arrive en ville. Je choisis un restau indien du sud où on me sert sur une feuille de banane une multitude de petits mets. Je mange de bon appétit car j’ai sauté le repas de midi !

Dans la piaule : lavage des fringues, et du bonhomme.

Mise à jour du blog.

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21/01/2013

Ce lundi matin, rasé de près, je vais à l'ouverture de la banque HSBC de Tanah Rata (après quatre heures de mauvais sommeil, dans cet hôtel bruyant). Comme prévu, le DAB rejette ma demande de 500 MYR. Je vais voir un employé, très aimable, et je lui explique que j'ai déjà contacté ma banque et que tout est ok de ce côté. Il m'accompagne au DAB, et (des fois que je ne sais pas m’en servir…) on refait trois fois la demande sur des comptes différents (les anglo-saxons ont des types de comptes différents de chez nous) : toutes sont rejetées ! Bien sûr, il regarde ma carte sous toutes ses coutures. Puis on va consulter un grand livre où on constate que le motif de rejet : A015 – 3018, signifie que mon compte est inconnu ! On va voir son chef qui, lui aussi, retourne ma carte dans tous les sens, et me demande mon passeport. Je lui confie en plus l’autre carte de crédit qui pose le même problème. Après des conciliabules sur mon arrivée précipitée dans les Cameron Highlands, il me dit que le problème ne vient pas de ma banque mais des contrôles très stricts opérés par la Malaisie. I am sorry ! finit-il par dire, sur un ton vraiment attristé. Il me dit aussitôt qu'on va essayer une transaction manuelle dans un lieu sécurisé, au premier étage de la banque. Arrivés là, un autre responsable me prend en charge et me fait entrer dans un local blindé et gardé par un vigile à la mine hostile et armé d'un énorme fusil... On refait une transaction sur une machine qui semble un peu plus sophistiquée et, miracle, au bout de quelques minutes pénibles, la demande est approuvée. Mon bruyant soulagement fait rire les personnes présentes, même le vigile ! Après quelques paperasses supplémentaires, je récupère mes sous, dont on a tout de même prélevé 20 MYR pour transaction manuelle. Hé ! sur ce coup-là, j'ai fait bosser trois chefs, et ils sont tout de même mieux payés que le DAB !! Je me dis que, au lieu de faire ch… les touristes, les banquiers seraient mieux avisés de contrôler de plus près leurs traders…

Après ce bol de dopamine, retour à l’hôtel pour informer par internet ma base arrière des derniers développements favorables. J’en profite pour demander au réceptionniste comment faire pour avoir de l’eau chaude au chauffe-eau (la douche froide est supportable, mais il y a des limites). Le gars se marre, se lève et se précipite vers des béquilles : il a un pied en moins. Dans ma chambre, il me montre en rigolant l’interrupteur réservé au chauffe-eau…

Le temps est gris et le ciel bas sans toutefois couvrir les sommets. Midi. Je décide de faire une nouvelle boucle à l’est de la ville. Le départ du sentier est du côté de la ferme des fraises visitée hier. Aussi je reprends le sentier N°4, mais le prolonge au lieu de bifurquer vers les fraises. Je rejoins ainsi le départ du sentier N°6 (je crois qu’il y a une confusion dans les numéros de sentiers avec le LP et ce qu’il y a ici).

Traversée d’une forêt de conifères très hauts. Par endroit, il faut contourner des tourbières. Dans cinquante millions d’années, il y aura du charbon dans le coin ! Le sentier est bien visible, mais il est très dégradé par l’érosion. Et la pente devient plus raide et c’est à nouveau la jungle, sombre aux multiples plantes. Il faut parfois affronter un vrai labyrinthe : ne pas se tordre les pieds dans les racines glissantes, veiller à ne pas s’écorcher dans les lianes à épines, distinguer le chemin du ruisseau, ne pas glisser dans les parois ravinées et glaiseuses, faire attention de ne rien laisser tomber en se glissant sous les arbres abattus et pourrissants… Mais l’itinéraire reste bien balisé. Il y a même des panneaux indiquant sur certains arbres leur nom. Et voyons le côté confortable de cette rando : il n’y a pas de bêtes ! Ni moustiques virulents, ni moucherons harceleurs, ni tiques (tac), ni sangsues suceuses et enfin pas de serpents. Par contre, c’est le hammam : pas un gramme d’air et il fait lourd ; c’est la grande suée et je tords mon doudou (petit mouchoir coton éponge) à tous les instants. Et ce qui n’arrange rien : je bois de l’eau tout le temps. La dernière montée dans un terrain pentu et glaiseux est particulièrement pénible.

 " A nettoyer "  " Croche-pied "  
" Fantôme moussu "  " Montagne de glaise "  " Ici, il faut ramper "  " Sclérose de la plaque " 

Je parviens au sommet du Gurung Beremban (1840 m) vers 2h45. La vue est limitée tant la jungle est partout. Un signal en ferraille recouvert de graffitis indique l’endroit. Je poursuis le chemin qui devient N°7/8. Plus loin en contrebas, je manque de rater le départ du N°8 tant la trace est peu visible. Je rencontre un jeune randonneur ; puis un peu plus loin, j’en croise un autre, qui, accroupi et muni d’une grande pince, fouille le sol à la recherche d’insectes… Au bout d’une bonne heure de montées et descentes, parfois bien pentues, j’arrive enfin aux chutes de Robinson. Là, le sentier devient un calme chemin pavé de briques et est doublé par un gros tuyau (une conduite forcée vers une usine hydroélectrique). Dans le ravin, le torrent, au gros débit malgré le prélèvement pour l’usine, dévale sur de larges plaques de granite puis se faufile entre de gros blocs. La suite du sentier permet de longer la prise d’eau et la petite retenue dans laquelle de grosses pelles mécaniques viennent prélever le sable qui provient de l’arénisation du granite alentour.

" Le sommet "  " Tourbière "  " Plantes étranges "   

Fin de la boucle par le quartier de Mardi, celui des écoles et des cliniques. Un institut d’agronomie teste des fraises hors sol dans des serres en plastique. Le nouveau riche que je suis achète une bière bien fraîche (60 cl, 12 MYR). Retour à l’hôtel à 5h pour y arroser la fin de mes frayeurs financières.

" Vaut mieux le savoir "  " Dans les écoles, on ramène sa fraise "

J’envisage un repas dans le restau chinois qui est juste à côté.

Pour visualiser cette rando, cliquer sur le lien :

https://fr.wikiloc.com/itineraires-randonnee/tanah-rata-2-4862496

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22/01/2013

Réveil à 6h.

Je vais à la station des bus pour prendre celui de 8h pour Ipoh. Il pleut et le ciel est bas. Les montagnes où j’ai randonné, sont dans les nuées, et j’imagine dans quel état sont les sentiers…

La ville Brinchang, la voisine de Tanah Rata, est une cité de vacances pour groupes et n’a aucun charme avec ses immeubles de quinze étages et son golf chic. La route de montagne traverse des zones de maraîchage, de pépinières, de fraises, de plantes d’appartement. Le relief compliqué n’a pas l’air de gêner les agriculteurs : ce qu’ils recherchent c’est la fraicheur du climat ! Un peu plus bas quand la vallée s’élargit, les terrains sont carrément recouverts de serres sur des kilomètres. Les villages sont des entrepôts : on y décharge des sacs de terre horticole, des engrais, des cartons vides…

Le chauffeur du bus reçoit un coup de téléphone : on doit attendre un gars qui l’a raté. On patiente le temps qu’il nous rattrape. Bien que les chauffeurs soient prudents sur cette route de montagne glissante à cause de la pluie, on croise un camion dans le fossé ! Les secours arrivent…

À l’approche d’Ipoh, la montagne est rongée par d’énormes carrières de marbre. La brume qui s’accroche aux parois verticales des falaises, donne à la montagne des allures fantomatiques

Arrivé à Ipoh, je suis un peu perdu car je n’ai pas de repères : le plan du guide indique plusieurs gares routières ! La descente du bus (à air conditionné) est une épreuve : dehors, il fait une chaleur difficilement supportable, bien qu’il n’y ait pas de soleil.

Pas loin de là, un hôtel tout neuf affiche des chambres à 30 MYR ! À la réception, on m’annonce 65 ! À mon étonnement, la réceptionniste m’explique en rigolant que c’est le tarif pour … une heure !

Je fais un tour à l’office du tourisme qui m’indique très aimablement le quartier où je peux trouver des hôtels à petits prix. J’en trouve un, à l’est de la rivière, le Sakura hôtel, 45 MYR, toilettes etc sur le palier mais WiFi et air cond.

La jeune fille de la réception m’explique comment m’y prendre pour aller aux différents sites à visiter. Pendant qu’on discute, on est interrompu par une charmante demoiselle, grande, mince, à la poitrine avantageuse, mais à la voix plutôt grave, aussitôt rejointe par une autre fille élancée, très maniérée. … Heu, … à la réflexion, et en y regardant de plus près, elles doivent être plutôt des garçons ?! … Ce que me confirme en rigolant la réceptionniste : « elles viennent de Thaïlande où il y en a beaucoup comme elles là-bas »…

J’attrape le bus 66 pour rejoindre le site des grottes, la curiosité locale : Sam Poh Tong, dans les faubourgs sud-est de la ville. Ces grottes ont été formées par des rivières souterraines ayant creusé la montagne ; puis, vidées de leur eau, des concrétions se sont formées au fil du temps. Il y a deux siècles, des moines bouddhistes y ont élu domicile et y ont créé des temples.

Je fais la visite de ces temples absolument seul ! Il y a plusieurs galeries à parcourir, l’une grimpe dans la falaise sur plus de deux cents marches, une autre mène à un cirque de falaise fermé où on a construit un temple au milieu. Ce temple semble oublié, avec quelques tortues pour voisinage. Dedans, des autels dans chaque anfractuosité du rocher, dehors des jardins bien soignés aux bonzaïs bien taillés…

" Au pied des grottes "  " Dans la grotte " 
" Le chef "  " Les disciples " 
 " Le temple oublié "  " Le jardin secret " 

Marche de 4 km, le long d’une route bruyante pour rallier l’autre grotte de Kek Look Tong qui est tellement vaste qu’on peut y monter une salle de spectacle… Au fond, elle débouche sur un beau parc – dommage qu’une cimenterie barre l’horizon…

" Salle de spectacle "  " Sérieuse, la déesse "   

Ces temples – grottes sont surprenants : même si le décor est parfois kitch, ils prêtent à la méditation, sinon à une pause au frais bien méritée par cette chaleur.

La température grimpe, et il fait très lourd, et sur la route du retour, je suis littéralement écrasé par la chaleur, ruisselant de sueur ! Retour en bus au centre-ville.

Je finis l’après-midi en cherchant un loueur de mobylette, mais je n’en trouve pas, malgré l’empressement qu’on les gens pour essayer de me rendre ce service. Leur désappointement est presque égal au mien !

Retour à l’hôtel pour une douche à peine froide.

Pendant que je vaque dans mes appartements, un orage s’abat sur la ville avec force précipitations et éclair jusqu’à la nuit…

Je ressors vers 9h. L’air est beaucoup plus tenable. Les gens sont eux aussi sortis dans la rue. J’ai toutefois un problème : les bras sous les aisselles ont tellement frotté contre ma chemise en sueur, que j’ai comme des brulures sous les bras. Et je n’ai pas de Biafine … J’ai pris une chemise propre, mais je suis tout de même obligé de marcher comme un cormoran.

" L'odorant durian "

Ce n’est pas un problème pour trouver un restau : dans ce quartier, il y en a à tous les coins de rue, entre les coins, et des roulantes sur les trottoirs, et il y a des clients partout. À croire que les gens ne prennent pas le temps de faire la cuisine chez eux. Il faut dire que les plats ne sont pas chers. Le coin des hawkers (petites échoppes de nuit) me tente : une trentaine se succèdent proposant grillades, poissons, plats de riz ou de nouilles aux cent recettes, boissons, fruits… Je choisis une kway teow. C’est une soupe de larges nouilles de riz additionnée de boulettes de viande et de poisson, de chou chinois, de pâté de soja et une fois le tout bouilli dans une cassole, un œuf est cassé dessus. Le garçon attrape la cassole à l’aide d’une pince système D et dépose le plat encore bouillant. C’est un des rares plats qui met moins de temps à préparer qu’à déguster…

" Les hawkers "  " Chaud devant ! " 
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23/01/2013

Grasse mat. Hier soir, endormissement difficile à cause des brulures sous les bras : difficile de dormir les bras en l’air…

En route pour la gare en quête d’horaires de trains. Traversée d’un parc où des gens somnolent : mais attention ! ici, pas question de se bécoter !

" La condition humaine ...Heu... masculine... "  " Pas de bisous sur les bancs publiques ! " 

La gare est dans le quartier colonial à l’architecture monumentale et aux larges espaces. Demain, c’est jeudi : il y a moins de trains que les autres jours. La gare routière n’est pas éloignée : bus pour aller voir Perak Tong à 6 km au nord : encore des grottes !

Celles-ci ont peut-être le réseau de caves le plus important des environs d’Ipoh : plusieurs salles, richement décorées ! La rivière souterraine ayant creusé plein de petits espaces, les moines les ont occupés comme autant de chapelles : chacune ayant sa divinité. Statues dorées, fresques, lieux de prières… le plus étonnant est cette montée d’escalier : plus de cinq cents marches dans la grotte, puis en dehors, pour atteindre un magnifique point de vue sur les environs … mais, malheureusement : encore une cimenterie !

" Perak tong "   
" Dans le monde des dieux, on n'est pas grand-chose ! " " Belle vue sur les cimenteries " 

En sortant, promenade obligée vu le manque de transport vers le musée de géologie. Quelques km sous le soleil entrecoupés par des courses dans un supermarché.

" Quartier chinois "  " Officine chinoise "  " Cimetière chinois "  " Mais qui peut encore s'intéresser à la géologie ? " 

Supportable dans la matinée, la chaleur devient intenable l’après-midi. Je fais des pauses dans des endroits à air conditionné … Heureusement, c’est le cas pour le musée de géologie. Ce musée est tout neuf, très didactique, assez ramassé sur un petit étage et pas du tout rébarbatif. On y apprend beaucoup de choses sur les roches mais aussi sur leur exploitation dans la région. Ce musée fait partie d’une université et d’un laboratoire de recherche en minéralogie. Je suis agréablement étonné de trouver ici un investissement d’une telle qualité.

Retour à l’hôtel pour y prendre une douche salvatrice !

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24/01/2013

Hier soir, restau Onn Kee, dans la Jalan Dato Tahwil Azar. Alors que le jour, les rues sont à peu près vides, cette rue, devenue piétonnière le soir, connaît une grande animation : les restaus ont sorti tables et chaises sur la chaussée et une multitude de stands de marché s’y sont aussi installés, vendant fringues et autres babioles. Les nombreux passants déambulent profitant de l’air un peu moins étouffant. Je termine la journée en mangeant un ayam taugeh (poulet aux pousses de soja).

"Tauge ayam"   "Pas de bisou dans le train ! " 

Ce matin, debout tôt. En fait, je suis réveillé plus tôt que prévu par le vacarme que font des prostituées qui, sur le trottoir d’en face, chahutent en provoquant les éventuels derniers clients. L’une d’entre elles fait une danse plutôt lascive sur le capot d’un gros 4x4 dont l’alarme ne tarde pas à se déclencher ! Lorsque je sors de l’hôtel vers 6h15 avec ma valise roulante, il n’y a plus qu’une demi-douzaine de chiens affalés sur le goudron…

À la hauteur de la mosquée, c’est l’heure de la première prière, le jour n’est pas encore levé. Le muezzin chante agréablement, mais sa voix douce est recouverte par le bruit des mobylettes impies.

Train pour KL (Kuala Lumpur) : 35 MYR, place numérotée. Vu mon avance, la gare est déserte. Un très long train de marchandise attend à quai : des citernes ciments Lafarge… Les gens arrivent petit à petit, imbibés de parfums capiteux et en tenue du « dimanche », vu qu’on est jeudi… Moi, je suis plutôt froissé, et surtout, comme dans une soupe, tant il fait déjà chaud. Le train est tout neuf, l’air conditionné à fond – je vais crever ! Derrière moi, il y a deux mômes qui hurlent, leur mère essaie de les calmer en les faisant chanter jingle bells et happy birthday. Les cultures locales se perdent…

Il pleut à KL. À l’office de tourisme, on me donne les renseignements qui me manquent. Je prends un train de banlieue pour Port Klang, sur la côte dans le détroit de Malacca. Puis traversée d’un bras de mer pour rallier un village de pêcheurs, sur une île perdue dans la mangrove : Pulau Ketam. Le départ du ferry est juste à côté du terminus du train. L’intérieur du bateau (pas tout neuf, sauf la peinture) ressemble à une cabine de Caravelle. En une demi-heure on est rendu. Le soleil est revenu, et me prépare de bons coups…

Le village est sans véhicule à moteur. Que des piétons et quelques cyclistes. Les maisons sont sur pilotis et reliées entre elles par une passerelle en béton existant depuis à peine trente ans. La rue principale, en prolongement de la jetée est bordée de restaurants et de quelques hôtels. Je choisis des nouilles sautées aux coques (5 MYR), ce qui me rappelle les tagliatelles con le vongole, dégustée à Capoue. Le serveur est d’accord pour garder ma valise le temps que je promène dans le village. La passerelle principale fait deux kilomètres. Elle est bordée de maisons d’habitation simples mais spacieuses. Tout le monde est aux abris, vu la chaleur !

" Le ferry pour Ketam " " Les commères de Ketam "  " A réhabiliter "  " Besoin d'un radoub " 
" Promenade dans l'île de Ketam "  " Chaud devant " 

Pour visualiser cette promenade, cliquer sur le lien :

https://fr.wikiloc.com/itineraires-randonnee/ketam-4862453

Retour au ferry, puis à Port Klang. Là, j’opte pour des bus afin de rallier Kuala Selangor, à 45 km plus au nord sur la côte. J’y arrive vers 18h et trouve un hôtel (Malawati Ria) qui fait une promo sur le prix des chambres : 40 MYR, air cond, sdb, wifi, mais pas de fenêtre. J’ai du mal à me connecter, et la gérante de l’hôtel, un peu mutique, n’y connait rien. Un voisin, tenant boutique en informatique, vient à mon aide et débloque le problème !

Je suis venu dans ce bled un peu perdu pour voir les fameuses lucioles : ces insectes se nichent dans la mangrove au bord de l’eau. Interprétant les rares paroles énigmatiques de la gérante, j’entreprends une marche de nuit, le long d’une route à grande circulation, puis après avoir interrogés les autochtones et fait près de trois km, j’arrive dans un quartier illuminé … par des restaurants surplombant un bras de mer. Il y a bien un petit ponton et je dois prendre mon billet (18 MYR) à l’un des restaurants ; j’ai le temps de manger des nouilles nonya aux fruits de mer, avant le prochain départ.

La visite du bras de mer se fait en speed boat, au moteur gonflé à l’EPO. Il y a une douzaine de touristes. Ça tangue, mais ça fait de l’air. Arrivés sur le site des lucioles, le bateau ralentit et frôle la mangrove. Chaque arbre héberge une dizaine de ces insectes, et ce, sur des centaines de mètres. L’enfant du groupe dit à sa mère « on dirait un arbre de noël ! ». Tout le monde veut en attraper. Quelques-uns y parviennent : ces bêtes sont toutes petites – une grosse fourmi. Mon voisin en héberge une dans ses cheveux, provoquant l’hilarité des passagers.

" Elle en a bien attrapé une "    " Air frais du soir "  

De retour au ponton, je retourne au restau pour demander à la serveuse s’il n’y a pas un chemin plus direct pour retourner en ville. Elle se marre, chuchote dans l’oreille de sa copine, laquelle va parler à un garçon. M’a-t-on bien compris ? Le garçon vient me voir et me propose de me ramener à l’hôtel ! et, effectivement, en 10 mn, je suis rendu ! Voilà ce qui s’appelle un service client !

8

25/01/2013

Ce matin, grasse mat. J’ai plein de bricoles à ranger, etc… Et je dois contacter le gars qui doit m’héberger deux jours à KL (réservation Airbnb). Par un échange de mails, il m’informe que la cérémonie de Thaipusam ne démarre pas le vendredi à minuit mais le lendemain ! L’office du tourisme m’aurait-il donné une info bidon ?

" Un peu d'ombre "

Cette histoire m’énerve un peu et je dois changer mes plans…

Petite promenade dans Kuala Selangor sur une élévation granitique : il y avait jadis un fort, puis un immense phare – à présent un beau point de vue jusqu’à la mer au loin, derrière la mangrove omniprésente. Soleil et chaleur ! Et singes qui trottent autour de moi en quête de nourriture à chiper.

Bus pour KL. Embouteillages et pluie. L’arrivée dans KL est impressionnante tant les échangeurs s’enchevêtrent avec les monorails et les trains aériens, au milieu des gratte-ciels ! J’en perds mes repères, les cartes d’ici sont trop imprécises.

Le bus finit sa course dans le quartier chinois alors qu’il se met à déferler un puissant orage : je reste coincé sous un porche une bonne demi-heure ! Même les gens qui ont de larges parapluies se réfugient sous les arcades des immeubles. Dur de chercher un logement dans ces conditions. Une tentative entre deux typhons : j’arrive trempé sur le trottoir d’en face ! Je trotte entre les stands qui eux sont à l’abri… je repère une guesthouse aux allures louches : je tente ma chance. L'établissement est tenu par des Tamouls de l'Inde du sud. La place est réellement crapoteuse. Mais je ne me vois pas errer sous le déluge en trainant ma valise… j’opte donc pour une chambre qui mériterait plus qu’un rafraichissement (30 MYR). Je dépose ma valise et ressors aussitôt. L’établissement est juste au-dessus d’un bar au style reggae assumé. C’est là que je m’installe quelques temps, histoire d’attendre que la pluie cesse, mais…

" Mon refuge pendant l'orage... "  " Vue de ma fenêtre sur KL " 

La journée est déjà bien entamée et difficile d’entreprendre une grande sortie … Je tournicote dans le quartier chinois entre les averses. Il y a quelques allées piétonnes, heureusement, mais ça se bouscule ! Le temple hindou d’où doit partir la cérémonie est à deux pas. Renseignements pris, il y a bien une cérémonie dès minuit ce soir : c’est là où on déplace le chariot sacré vers la Batu cave. Samedi, journée de prières, et méditation, et dimanche, c’est la grande journée… Bon, j’y vois un peu plus clair et comprends la raison des différentes informations : chacun donnait une pièce du puzzle !

" Quartier chinois sous la pluie "  " Food court " 

La nuit tombée, petit repas dans un food court chinois, système sympa de restauration : des petits étals sont disposés côte à côte, chacun sa spécialité ; les gens emportent le plat qu’ils souhaitent puis vont s’assoir à une des tables disposées au milieu des étals. C’est bon et pas cher !

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26/01/2013

(Hier soir, tard)

Je retourne à l’hôtel pour faire une sieste. Je suis réveillé par un vacarme de ferraille qui dégringole : c’est un employé de l’hôtel qui essaye de monter un lit constitué de gros tubes, dans la chambre voisine. Il est onze heures. Je râle un peu pour la forme ; de toute façon, je comptais me relever pour aller voir le départ de la procession.

Mon « hôtel » est a à peine deux cent mètres du temple, dans la même rue. Alors que je descends, une foule est déjà rassemblée pour les prémisses de la cérémonie de Thaipusam. Il s’agit de la fête la plus importante concernant la communauté hindoue (représentant 10% de la population).

D’autres gens arrivent encore, se frayant un chemin dans la foule pour aller au plus près du temple et du grand chariot installé devant. Les hommes sont rasés tout neuf et fortement parfumés ; les femmes, au maquillage travaillé, portent leurs plus beaux habits, et leurs bijoux scintillent. Les jeunes filles ont laissé leur jean ou leur short à la maison : elles portent saree de princesse et colliers de fleurs. Les jeunes garçons sont plus rebelles : ils chahutent en soufflant dans des trompettes de stade, couvrant les chants sacrés qui émanent du temple. À part ces ados, la foule est calme, attendant en papotant. Des gens distribuent de l’eau, d’autres de la nourriture : riz en sauce, boulettes. Je goute l’une d’elles offerte par une dame au large sourire: c’est bon, mais très épicé !

"Dieu est descendu sur terre " 

Le chariot de procession est sorti du temple. C’est un mini temple en forme de gopuram fabriqué en métal argenté, abritant une idole en son sein. Il brille de ses mille feux, autant d’ampoules alimentées par un énorme générateur attaché au chariot. La foule devient de plus en plus dense dans cette rue étroite, certains essayent de se frayer un chemin pour être au plus près de la cérémonie qui se déroule dans le temple. Une dame m’explique que dieu va arriver à minuit. Ah ? Cet événement se déroulera dans une ambiance qui relève plus de la fête dans la bonne humeur que de la dévotion religieuse !

Dans les rues adjacentes du quartier chinois, les commerçants ont plié leurs étals : certains balayent les ordures en tas car la benne arrive, d’autres comptent les billets de la recette… Les rares policiers (certains à moto) sont plutôt placides et n’ont pas besoin d’intervenir.

Minuit, il se met à pleuvoir ! Je n’aurai pas deviné que dieu viendrait sous cette forme ! Cette pluie ne décourage pas la foule d’où poussent quelques parapluies, tels des champignons à croissance rapide. Un court et modeste feu d’artifice est déclenché au-dessus du temple. Puis le chariot commence lentement la procession à travers la ville ; les gens suivent en papotant, entrainant les quelques ados bruyants avec leur trompettes. À chaque commerce hindou, dévotions et bénédictions, Je n’ai pas le courage de les suivre sous la pluie.

Retour à l’hôtel où l’employé a terminé de monter le lit.

(Ce matin)

Grasse matinée. À la lumière du jour, et après une nuit réparatrice, la chambre me semble moins glauque : ce que je craignais le plus étaient les bêtes et la chaleur, et finalement je suis indemne, à part quelques piqures de moustiques. Les douches au fond du couloir sont à la limite de la crise. Les jeunes routards de tous pays qui fréquentent le lieu (surtout des filles des US + Oz !) semblent s’en accommoder. Pour moi, une nuit suffit (cas d’urgence) et je suis pressé de rallier en métro mon nouveau logement dans la banlieue NE de KL, à Jelatek St (chambre d’hôte trouvée sur airbnb).

Avec le proprio, on s’est donné RV à 12h, et il est là, pile à l’heure ! Il me conduit à sa maison, à un km, avec une vieille Mercedes collector. C’est un pavillon (se déchausser avant d’entrer) entouré d’un petit jardin; après avoir traversé le salon, mon hôte me montre ma chambre : large 25m², avec une petite salle de bain attenante. C’est un peu désordonné et vieillot, mais comme chez beaucoup de gens. Le Monsieur (60 ?) est très aimable : il est très surpris en me voyant, car pour lui (et les anglophones), Jean est un prénom féminin et il s’attendait à accueillir une fille ! Apparemment, il vit avec sa mère qui fourbit dans la cuisine.

Il y a beaucoup de livres, et il doit être musulman-croyant étant donné certains décors et livres. Un coin bureau ? il doit avoir la WiFi : Yes !

Aussitôt pris mes aises, retour au centre-ville. Derrière KL Sentral, il y a un petit temple chinois (Sam Kow Tong) qui ne paye pas de mine, mais une exubérante femme dévote m’entreprend, me racontant sa vie et celle de ses enfants qui sont éparpillés dans le monde.

" La mallette et les sandales "  " Le sommeil du juste (au point de vue budget...) " 

Ensuite, j’attaque successivement le National Museum et l’Islamic Art Museum. Mais l’affaire n’est pas simple : entre la gare centrale et ces musées, pourtant tout proche à vol d’oiseau, il y a un réseau d’autoroutes et de voie de chemin de fer, sans parler des parkings, qui imposent aux piétons de dangereuses acrobaties : c’est évident, les urbanistes, outre qu’ils ont massacrés le centre-ville, n’ont pas daigné accorder une existence aux piétons !

Le Natinal Museum (5 MYR) est très intéressant : moderne, didactique, au top des outils visuels et dont le contenu retrace l’histoire de la Malaisie avec un certain recul. Sans nationalisme exacerbé, exposant le positif de chaque apport extérieur à ce pays (les Arabes, les Chinois, les colons entrainant la main-d’œuvre hindoue), bref, tout ce qui fait la nation malaise d’aujourd’hui.

Juste à côté, un petit musée (gratuit) met en scène les arts et traditions des tribus natives du pays : intéressant.

" Difficile de s'intéresser à la cueillette des noix de coco "  " Un homme préhistorique au musée " 

Un peu plus loin, au-delà de la très moderne Mosquée Nationale ( !), se tient le beau musée des Arts islamiques (12 MYR). Beau par l’architecture, et beau pour les objets qu’il propose. Ceux-ci viennent des quatre coins du monde islamique : du Maroc à Java, de Mongolie à Tombouctou. Céramique, poignards, tissus, meubles, maquettes des mosquées célèbres dans le monde, etc. Il y a beaucoup d’antiques livres : le Coran, mais aussi d'ouvrages scientifiques, enluminés et de belle calligraphie.

" Le coran "
" Une carte "
" Autopsie d'une femme enceinte "
" Le musée des Arts islamiques " 

A la sortie, je rencontre une famille de Français de la région de St Malo, rayonnante et dynamique qui fait le tour du monde. On échange des impressions et des tuyaux tout en faisant un bout de chemin ensemble. Les parents ont pris un congé sabbatique, et leurs deux jolies filles et leur jeune garçon ont mis une parenthèse à leur scolarité pour s’accorder le temps de parcourir l’Asie et les Amériques.

Je mange une assiette de riz, bœuf, légumes curry dans un resto qu’ils m’ont recommandé et je trace mon chemin vers le nord alors que la nuit tombe pour errer dans les rues de Little India. Bien nommée ! Musique et bousculade comme là-bas, mais c’est moins le bordel, tout de même. Je déguste une soupe de nouille tellement son fumet m’attire…

Je remonte jusqu’à Chow Kit, mais là, tout est fermé. Bon, j’irai dans ce marché dans une autre vie…

Après quelques pérégrinations entre les réseaux de voies rapides, j’attrape le métro (hyper moderne) à Putra (KTM) et vais voir ce qui se passe à Batu Cave, haut lieu hindouiste où doit se dérouler la cérémonie de Thaipusam. Et là … ! …Boudu…

Le terminus du métro est juste au pied d’une immense falaise. Tout de suite on est pris par un vacarme assourdissant s’élevant d’une vaste fête foraine. Des stands vendant de tout : nourriture, CD, fringues, jouets, chacun beuglant sa musique dans des haut-parleurs mal réglés, et une foule joyeuse se bousculant, attirée par une grande roue ( !), des attractions à vous faire tournoyer en l’air, des plateaux de spectacles de musique live tonitruante, une épaisse odeur d’huile de friture mélangée aux effluves d’encens, bref, Luna park !

Au-dessus de cette vision moderne des marchands du temple, les statues géantes d’Hanuman et du dieu Muruga (46m de haut !) regardant avec quelque indifférence le vaste monde. Et derrière la grande roue (mais pourquoi une grande roue ici ?), la foule qui se presse, qui s’agite, qui élève la voix : c’est le défilé des processionnaires ! Ils doivent gravir un immense escalier ( 300 marches ?) qui mène à une immense cave tant par sa hauteur (50 m ?) que par sa profondeur (200 m ?) et dans laquelle se tiennent les ultimes sanctuaires. L’escalier est à trois larges voies : deux pour la montée dont une réservée aux processionnaires, l’autre étant destinée aux visiteurs (dont très peu de touristes occidentaux) et la troisième pour la descente.

" Hanuman, psycho " " Lord Muruga veille " 

Les processionnaires, soit apportent des offrandes dans des pots en laiton, soit font un genre de chemin de croix où le thème est la douleur et la contrition. Des hommes portent sur leurs épaules de lourds panneaux richement décorés car bénéficiant de la dernière technologie en matière de lumières (LED) ; ces panneaux représentent leurs dieux entourés de plumes de paon, ou des symboles dont je ne comprends pas le sens. Ils sont parfois accompagnés de tambours et avancent par à coup, grimpant d’une traite une volée de marches. D’autres hommes se sont fait crocheter des objets (des clochettes, des pommes, des plumes…) dans le dos, à l’aide d’hameçons enfoncés dans la peau (pas une goutte de sang !), ajoutant à la pénitence d’énormes chaines (cadenas compris) et autres objets d’auto flagellation… Des hommes ont la joue, ou la langue transpercée par de grandes aiguilles… Ces hommes sont quasiment sous hypnose, les yeux parfois révulsés, suant à grosses gouttes, au bord de l’évanouissement. Parfois un collègue disposant d’un tabouret suit son « héros » au cas où il aurait une faiblesse. À noter qu’aucune femme n’est embringuée dans une telle démonstration de masochisme exhibitionniste : elles se contentent de porter des offrandes vers les sanctuaires, de gémir des cris d’encouragements aux « héros », ou d’aider les vieux qui n’en peuvent plus à grimper les marches.

" Et qui c'est qui l'a dans l'dos, hein ? "  " Dites-le avec des fleurs "   
" Motus et bouche cousue "   " La cave est pleine " 

Je me faufile au milieu de la foule dans les escaliers du milieu et parviens à l’entrée de la cave : ça se bouscule un peu ; mais arrivé là, quel spectacle : une foule immense dans cette grotte fraiche, résonnant des chants lancinants diffusés par haut-parleurs et des gémissements de la foule, le tout dans une brume d’encens et de feu de poubelles… Au fond de la cave, encore des marches, des sanctuaires disposés dans les anfractuosités et chacun doit s’y prosterner, déposer ses offrandes, se faire bénir par des prêtres, le tout dans une profonde dévotion.

Une fois chose faite, on dépose les panneaux, on enlève les chaines, on dégrafe les hameçons… L’opération s’effectue alors que le dévot est encore sous l’effet de la transe ; aucune goutte de sang n’apparait et c’est dû à la magie des prêtres qui massent les endroits percés avec une poudre blanche. Chaque famille entoure son « héros » en lui prodiguant des encouragements et surtout obtenir de lui une bénédiction : il est devenu le saint d’un jour et appose sur le front de ses supporters une poudre colorée, les accompagne d’une accolade et d’un vœu chuchoté dans l’oreille de chacun.

Et enfin, il peut s’assoir ! … ou s’évanouir …

La sortie de la cave est une autre épreuve : on doit descendre tout le matos, et ça bouchonne ! De là-haut, la vue sur la foule qui regarde le défilé des processionnaires et qui cherche à s’engager derrière eux est impressionnante.

Pendant ce temps, dans les voies réservées à la montée, la foule continue à grimper. Des gens du croissant rouge et de la protection civile montent des brancards et du matériel d’urgence… Chacun sa croix...

En bas une autre cérémonie se met en place : dans un bâtiment ultra luxueux, des officiels (entourés d’énormes gardes du corps) se sont installés à une terrasse pour faire des discours que personne n’écoute !

Parvenu au bas des escaliers, c’est la déroute ! les gens qui ont laissé leurs tongs, sandales, baskets, en sont pour leurs frais : des gens de la sécurité les ramassent à la pelle et en font un beau tas pyramidal …

Retour au métro où la foule est encadrée par des agents de sécurité. Dans le wagon, je suis installé à côté d’une famille : un couple avec quatre enfants. On papote. Le gars, un énorme ballon en guise de ventre, me fait le détail de cette fête qui concerne sa communauté des Hindous (de l’Inde du Sud). Il me montre un petit pansement au bras : il s’est fait piquer pour donner son sang !... Décidément…

Retour à la chambre d’hôte vers minuit…

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27/01/2013

Courte nuit !

Je retourne à Batu Cave. Là-bas, c’est trop ! Comme disent les jeunes …

Bon, on passe sur le vacarme de la fête foraine. Mais voir le monde qui afflue à cette fête, et voir le nombre de pèlerins qui se trouent la peau à cette occasion, c’est pour moi du jamais vu. Donc pour bien m’en imprégner, j’y retourne !

Dès 10h, je sors du métro encore plus bondé que la veille. Je prends un autre chemin et remonte jusqu’à l’autoroute proche, à l’endroit où les pénitents et leur famille, amis et accessoires descendent des voitures– ce qui provoque un sérieux embouteillage ! Curieux départ pour une procession !

" Embouteillage sur l'autoroute pour cause de procession "  " Sur la bretelle d'autoroute "   

De jour, on parvient à mieux distinguer les choses. Tout d’abord l’environnement des caves se révèle : on est dans la banlieue, au milieu d’habitations et d’un réseau autoroutier assez dense. Ensuite je comprends mieux la démarche des acteurs de cette procession. C’est quelqu’un de la famille qui doit faire un acte de contrition pour se purifier, et la famille vient à son aide et le soutient dans sa démarche.

Une scène : un pénitent, percé de toutes parts, portant une charge importante, suant et trébuchant sous un soleil de plomb, avance péniblement. Sa femme, marchant à reculons face à son mari, lui prodigue des litanies hypnotiques, les yeux dans les yeux, et faisant de grands gestes, comme pour lui dire : « viens, viens, viens »… Autour, les accompagnants scandent des « vel, vel, vel … », prêts à intervenir à toute défaillance ou abandon. Je suppose que cette éventualité serait mal ressentie par tous.

" Une taf de beuh, ça aide "   " Rare femme pénitente " 

À chaque arrêt, tout le monde se met à danser, le pénitent avec sa monture tourne alors sur lui-même et se secoue pour faire sonner les cloches attachées aux pieds. Si la pause se prolonge, on fait assoir le pénitent sur un tabouret : les proches massent les pieds et les arrosent d’eau, on éponge le visage, on supporte son fardeau un instant. Des gens plus riches que d’autres se sont attaché les services de batteurs de tambour lesquels aident, par leurs rythmes lancinant à rester dans la transe. Car, le pénitent est complètement shooté : il avance tel un automate ! Et vers la fin du parcours, il faut le guider pour qu’il n’aille pas dans les décors !

" Du bon usage du citron vert "   " Du bon usage des petits pots de confiture " 

La montée vers la cave est exténuante : pour moi déjà, mais pour eux… À cette heure-là, le soleil plombe, on est serrés comme des harengs, on attend pendant de longs moments – pas un gramme d’air. Quand je passe le portique symbolique du site, au loin je vois le grand escalier : une voie pour monter, deux voies pour descendre : il s’agit de vider la grotte ! Mais bientôt, les organisateurs font vider l’escalier du milieu, et il y a à présent deux voies pour monter.

" Lord Muruga garde l'entrée de la caverne "  " Les offrandes ne sont pas perdues pour tout le monde "   

Les organisateurs ont du mérite : la procession dure depuis vendredi minuit, départ du chariot du centre-ville pour se terminer, mardi vers trois heures du matin, heure à laquelle l’idole rentre au bercail. C’est pendant cette période de plus de trois jours pendant laquelle des milliers de gens viennent se prosterner pour la plupart, et, pour un nombre limité, faire pénitence. Et ils doivent gérer les allers et venues, ou plutôt la montée et la descente de cette foule continuellement en mouvement, sans qu’il y ait de bousculades, sans que la grotte soit surpeuplée tandis que des gens arrivent, et sans que, dans la foule, se déclenche une panique incontrôlable. Ensuite, il faut gérer les gens qui tombent dans les pommes, ceux dont la transe se transforme en crise d’hystérie (d’épilepsie ?), ceux qui égarent leurs enfants, etc. Oui, les organisateurs ont du mérite.

" Pas d'accord de passer à la tondeuse "   " Repas à Little India " 

Je retourne baguenauder en ville : casse-croute d’un poisson cuit dans une feuille de bananier à Little India - je me promène dans le monorail qui zigzague entre les gratte-ciel, c’est cool – je me promène dans un parc coincé par trois autoroutes …là, c’est moins drôle car un orage éclate et je suis obligé de rester une demi-heure sous un abri de piquenique avec le déluge autour de moi !

" Dans le métro, retour de procession "   " De jeunes mariés " 

Retour plus tôt que prévu à la maison, mais la nuit déjà tombée !

Le propriétaire m’attend derrière la porte et s’étonne que je sois tout mouillé. Il n’est pas très bavard : il me demande juste ce que je fais demain et à quelle heure je pars… Cela dit, sa piaule est très correcte, pour 10 EUR la nuit, c’est le luxe !

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28/01/2013

Récupération ce matin des dernières nuits plutôt courtes…

Le propriétaire me propose aimablement de m’accompagner à la station de métro. Agréable et inattendu, car il fait lourd et chaud, et car je n’ai pas eu de véritables échanges avec ce Monsieur plutôt discret.

Je vais faire un tour au Pudu market où il y a des poissons d’aquarium à vendre ! Puis, je liquide mes derniers MYR dans de petits objets. Enfin, je fais un petit repas indien dans le quartier de KL Sentral : formule « on se sert sur des étals, et on paye après ».

" Accroche-toi au parapluie ! "    " Canards gras " 

Puis bus (8 MYR) pour LCCT, l’aéroport des compagnies low coast. J’ai un avion pour Phnom Penh (AirAsia : 33EUR), à 15h30. Pas d’embouteillages ! À l’aéroport, moi qui croyais être juste, question temps, tout se déroule avec une facilité incroyable : check in en 3mn, police en 5mn, et une minute pour l’épluchage des bagages ! C’est à peine si la fille consulte son écran RX.

Je suis assez satisfait de mon passage en Malaisie. C’est un pays facile à voyager, avec des gens de toutes communautés aimables et prévenants. C’est un pays où on se sent en sécurité et où tout est réglé au carré. Les transports sont confortables, modernes, rapides et pas chers. Les hébergements tout à fait confortables pour mon budget. La nourriture n’est pas chère du tout et très variée du fait des nombreuses communautés. Si ce n’était cette question d’argent aux distributeurs automatiques... Je ne me suis pas du tout ennuyé, et surtout, j’ai eu de la chance avec ce festival hindou, si étonnant. Malgré tout il faut supporter la chaleur, l’air pesant et parfois de gros orages. Mais comment les gens d’ici font-ils pour rester sec ?

" Low Cost Companies Terminal "

Ceux qui souhaitent en savoir plus sur la Malaisie :

http://www.easy-malaisie.com/

La salle d’attente de LCCT est un peu bruyante. Mais tout y est très efficace (WiFi, etc).

Avion pour Phnom Penh. Dans l’aéroport LCCT, point de pont transbordeur, ni de bus navette vers les avions. On va à pied à l’escalier de l’avion ; ce n’est pas loin, mais il pleut une belle averse. La compagnie prête d’énormes parapluies rouges.

(à suivre dans le carnet https://www.myatlas.com/ctrlclic/carnet-de-jean-paul-c-en-2013-cambodge)