Nous partons à la découverte de deux temples perdus dans la montagne. Perdus n’est peut-être pas le vocable le plus adapté, car ces lieux sont présentés en début de liste dans les sites qui recensent les curiosités à visiter dans la région, mais ils n’en restent pas moins à l’écart des circuits touristiques habituels.
Le temple Fudoin Iwayado
Wakasa est une petite ville, dans la montagne, à environ 30 km de Tottori. On continue la route jusqu’au bourg de Iwayado. Près de la rivière se dresse le temple de Fudoin Iwayado, perché sur ses pilotis, dans une grotte. Sa première construction date du début du IXe siècle. Il a été endommagé puis reconstruit.
On peut aller jusqu’au bas de l’escalier du temple, qui est fermé au public. Il n’est ouvert pour des cérémonies que les 4e dimanches des mois de mars et de juillet.
Le temple Wakasabenten Eshima
Nous revenons vers Wakasa pour aller visiter un autre temple, cette fois perdu dans la forêt, le temple Wakasabenten Eshima. Ce temple figure aussi dans la liste des lieux remarquables de la région, non pas tant pour le temple lui-même, petit bâtiment en bois sans prétention, que par sa situation en pleine forêt et surtout le chemin qui y mène, un sentier recouvert de mousse, serpentant dans une forêt de cèdres.
Si les photos que nous avons facilement pu trouver en ligne laissaient présager une jolie promenade, il était difficile d’estimer avec exactitude la durée de la balade. Sur les cartes, le sentier n’est pas indiqué, et sur la vue satellite, il n’est pas visible, car il se trouve dans la forêt. C’est donc très approximativement que j’avais estimé la durée de la promenade à environ deux heures aller-retour. Difficile aussi de savoir où l’on peut laisser la voiture, aussi, par prudence, nous la laissons à proximité des dernières maisons du bourg.
Une fois par an, le premier dimanche de septembre, le temple accueille un festival, et une foule de visiteurs venus de toute la région s’empresse sur le chemin, aujourd’hui désert.
Nous commençons par suivre la route, qui, après les dernières maisons, continue dans la forêt, en suivant la rivière qui coule en contrebas. La route continue de grimper dans la forêt, sur environ 2 km, jusqu’à un petit parking de quelques places, puis laisse la place à un sentier recouvert de mousse. Il est donc possible de venir en voiture jusqu’ici, mais nous ne regrettons pas d’avoir marché, car la route est étroite, assez pentue, bordée de fossés et même s’il n’y a quasiment personne, nous préférons ne pas risquer le croisement avec un autre véhicule. En effet, même si le lieu est désert, une voiture est garée ici, et les traces de pneu dans les chemins et les piles de troncs abattus indiquent la présence d’une exploitation forestière.
Le sentier commence sous le torii. Le sentier est un tapis vert, qui serpente tranquillement au milieu des cèdres, laisse parfois la place à quelques marches retenues par des traverses de bois, traverse des ponts moussus. Recouvert de mousse, il est tout à fait conforme à ce que nous avions vu sur les photos lors de nos préparatifs. On croise quelques statues de pierre qui se fondent dans le paysage. Seul le bruit du petit torrent vient perturber le calme du lieu.
Après quinze minutes de marche, nous arrivons au pied du temple, dont l’entrée est gardée par deux komainu de pierre, ces créatures ressemblant à des lions, ou peut-être des chiens. Encore une vingtaine de marches et nous voici devant l’entrée du temple.
Nous montons encore quelques marches, nous passons la porte du temple et nous arrivons devant le bâtiment principal, tout en bois.
Un autre visiteur se tient devant le bâtiment – ou peut-être un voisin ? ou un gardien ? ou un pèlerin ? – un Japonais entre deux âges, qui nous salue et à qui nous rendons la pareille.
– こんにちは!
– こんにちは!
S’ensuit l’inévitable question : de quel pays venez-vous ? Peut-être en anglais, mais plus probablement en japonais. Notre réponse ne manque pas d’étonner notre interlocuteur, qui met quelques minutes à réaliser qu’il a devant lui deux visiteurs venus de France et qui ont pris la peine de venir jusqu’à ce temple perdu dans la forêt. Il répète un nombre incalculable de fois すごい !
Nous essayons de lui expliquer que non, nous ne sommes pas perdus, et que si nous ne sommes pas en train de visiter d’autres sites plus prestigieux, c’est parce que nous en sommes à notre 7e voyage au Japon, et que nous préférons découvrir de nouveaux lieux. Il finit par prendre congé, non sans avoir répété encore une fois すごい ! et nous avoir souhaité une bonne continuation. Nul doute qu’il aura son quart d'heure de gloire, quand, revenu chez lui, il dira à ses proches : «Vous ne devinerez jamais qui j’ai rencontré dans la forêt !»
Nous redescendons par le même sentier qu’à l’aller (il n’y a pas d’autre choix). Nous revenons à la voiture par la même route qu’à l’aller (ici aussi, pas d’alternative).
Nos estimations étaient justes : nous avons mis deux heures en tout pour faire cette petite visite en forêt. Il est maintenant treize heures et il est temps de penser au pique-nique. Nous reprenons la voiture et repartons vers le centre-ville de Wakasa.
Les abords de la gare semblent animés, et le parking que nous pensions nous garer est occupé par les stands d’une brocante ou d’un quelconque événement local. Malheureusement, quand nous arrivons, les participants replient boutique, et avec eux nos espoirs de trouver quelques stands de produits locaux. Un peu plus loin, nous trouvons quand même des onigiris artisanaux, qui viendront compléter les kakis et les nashis que nous avions emportés.
Le nashi est une espèce de poire en forme de pomme, dont la chair juteuse et sucrée est en même temps un peu granuleuse comme celle de la poire et croquante comme celle de la pomme. C’est un fruit délicieux qu’il aurait été dommage de ne pas goûter car c’est l’une des spécialités de la région de Tottori.
Petite halte près du hameau de Neyasu, à Wakasa, pour contempler les rizières. Au bord de la route, une «boîte à sable», telle que celles que nous avons souvent vues au bord des routes à Hokkaido. Dans ces boîtes se trouvent des sacs de sable ou de gravier fin que l’on peut étaler sur la route lorsque, en hiver, elle devient glissante en raison de la neige ou du verglas.