Le désert de las bardenas

V
Par
1 semaine de randonnée dans un petit Far West Espagnol
Mars 2022
7 jours
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C'est le grand jour. Rdv donné à la gare de Pau à 8h45 précise pour le regroupement des marcheurs et partir en direction de l'Espagne. J'ai dormi à l'hôtel Bourbon situé à 10 min à pied de la gare. Un hôtel classique simple et pas trop cher. Au petit-déjeuner, je croise un couple avec leur habit de randonné. Ces personnes ne seraient-elles pas dans mon groupe ?! A la sortie de l'hôtel, je les croise à nouveau..... Ah, cela attise ma curiosité! Ah, j'ai toute la descente vers la gare pour savoir... Ni une, ni deux, j'engage la conversation et je découvre qu'ils vont bien au même endroit, avec la même agence. Il me reste à découvrir les autres membres du groupe. Le camion arrive, nous sommes 8. Un petit groupe, c'est parfait pour moi!

C'est parti ! Au bout 1h30, nous atteignons Saint-Jean-de-pied-de-port, la dernière escale avant la frontière espagnole. Cette Commune est la dernière étape française pour les pèlerins du chemin de St Jean de Compostelle en direction de l'Espagne. Les vingt minutes d'arrêt ne suffisent pas pour visiter cette jolie commune basque entourée de remparts et jalonnée de petites ruelles pavées.

Saint-Jean-de-pied-de-port

Reprise de la route et nous passons la frontière espagnole sans grande difficulté, il n'y a personne!!!! Seuls les commerces tenus par une seule famille trônent en attendant le client. Ici on fait des affaires! Les prix espagnols sont plus intéressants qu'en France.

Nous nous arrêtons à Lumbier pour pique-niquer sur le parking de la foz. Il y a des tables et des barbecues. Les locaux viennent passer leur week-end ici. Foz, signifie gorges. La foz de Lumbier est une réserve naturelle par la présence des vautours. Les gorges sont accessibles par 2 chemins :

- Soit par le bas, facile et conquis par les promeneurs du dimanche.

- Soit par le haut pour faire une boucle de 5,5km à travers la végétation méditerranéenne pour voir le panorama.

Bien évidemment, comme tout randonneur qui se respecte, nous prenons la boucle. Après la montée sur la colline et j'admire la vue sur tout le paysage et les falaises. Mes yeux se fixent sur les oiseaux en vol... des vautours. Mais ils sont un peu loin. Nous continuons notre balade à travers la garrigue épineuse et redescendons sur la fin du parcours pour atteindre les gorges. Si aujourd'hui nous pouvons marcher ici, c'est grâce au premier train électrique entre Pampelune et Sanguesa. Un 1er tunnel creusé dans la roche calcaire nous emmène dans les gorges. Pas très long, il est faisable sans lampe mais mes sensations ont été décuplé car au milieu du tunnel c'est la nuit noire. Notamment, mon ouïe à l'écoute des gouttes et du bruit des pas. A la sortie, la couleur des falaises rougeoyantes me fait penser à celle des canyons américains. Et là, quel spectacle! Levez les yeux et vous verrez les vautours fauves planer au-dessus de vos têtes. Cet oiseau de plus de 2m d'envergure m'impressione (vous devez le savoir si vous avez lu mon carnet de voyage sur Remuzat). En cette période de l'année, c'est la nidification et les adultes vont et viennent sur leurs nids situés très haut dans les falaises pour surveiller leur rejeton. La femelle pond un seul oeuf qui éclôt au bout de 48 à 55 jours.

La foz de Lumier 

Nous finissons notre route pour arriver à Uncastillo, lieu où nous séjournerons toute la semaine. L'auberge la Posada est très mignonne. Je m'y suis sentie de suite à l'aise. Ma chambre est un havre de paix avec sa décoration et sa musique de fond. Oui oui, il y a la musique dans la chambre à volonté. En plus la playlist me convient tout à fait à mes goûts musicaux Le soleil brille encore et je profite des lueurs du soir pour aller à la découverte d'Uncastillo. Je grimpe vers le château en ruine, passe devant l'une des nombreuses églises d'Uncastillo et surplombe la ville. Ce village de 500 habitants environ à des allures de cité médiévale. Je sens que je vais aimer ce village et ce séjour, car il commence très bien.

Uncastillo 
 https://www.visorando.com/randonnee-le-foz-de-lumbier/ 
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Petit-déjeuner à 8h. Dans cette auberge, j'ai compris la règle des 8 : 8 compagnons, petit-déjeuner à 8h, dîner à 8h 😅 Il y a tout ce qu'il faut pour prendre des forces pour la journée. Aussi bien du sucré que du salé. Miguel est au petit soin pour nous. Il a déjà appris les prénoms de tout le monde et changé même les tasses quand on lui redemande un café. Le grand luxe.

Aujourd'hui, direction la réserve naturelle de las bardenas. A mon grand étonnement, le désert est vert.... Oui oui, vert. Dans ce désert, il y a des cultures de céréales. Environ 23 000 hectares sont consacrés à la cultures : principalement orge et maïs qui demandent peu d'eau mais aussi asperge, quelques amandiers et des vignes.

Pour cette première randonnée, nous commençons au pied de l'emblème de ce désert, el Castiel du tierra. Une cheminée de fée, oeuvre de l'érosion de la région.

 el Castiel du tierra

Le désert des Bardenas Reales est une partie d'une vaste dépression appelée la dépression de l'Èbre. Cette région particulièrement aride et dépourvue de cours d'eau permanents, s'étend sur plus de 200 km et 42 500 ha de superficie, c'est une des plus vastes zones désertiques de la péninsule ibérique. Il n'y a pas d'habitants et les pistes à suivre sont limitées. La pluie et le vent ont dessiné les paysages de ce désert qui continue de changer.

Nous partons aujourd'hui pour une boucle d'environ 12km autour de cet emblème. Il n'y a pas de chemins de randonnées prédéfinis avec des panneaux indicatif. Nous contournons el cabezo de las cortinas puis une marre, création de l'homme pour abreuver les troupeau de brebis. Ce qui me frappe de suite, c'est l'odeur de thym et romarin qui se dégage à mon passage.

Nous continuons notre chemin pour atteindre El cabezo de las Cortinillas. Le sol est composé de marne d'aspect friable, compact ou meuble, le sédiment le plus commun, mais on trouve aussi du gypse, du calcaire ou du grès. Le gypse parfois brille le long des parois de ses œuvres naturelles. Au début, je pensai que c'était le sel qui remontait car la mer a recouvert ses terres dans un temps ancien.

Pour accéder au sommet Del Cabezo de las Cortinillas, des marches en béton ont été construites. Aujourd'hui, une partie des marches se sont effondrées à cause de l'érosion du sol. A vos risques et périls pour y monter, mais quelle vue!!!! Un 360 degrés sur tout le désert.

El Cabezo de las Cortinilla

Vous me direz mais pourquoi des marches en béton en plein désert ?! Il se trouve qu'une partie du désert est interdit car s'y trouve le polygone de tir depuis 1951. Beaucoup de controverses à son sujet. Il ne faut pas vous étonner de voir des rafales (des avions de chasse) passer au dessus de vos têtes, exercer des manœuvres et lâcher des tirs sur des cibles dans le champ de tir appelé polygone.

Nous continuons nos chemins pour rejoindre un barranco pour manger à l'abri du vent. Les barrancos, que l'on peut traduire par "ravins", recueillent les eaux de pluie et les déversent dans les fleuves les plus proches. Il fait beau et le soleil chauffe mon visage. Cela fait du bien car le vent est frais.

Barrancos 

Après un bon pique-nique, nous allons au sommet de la Cuesta de Lucas.

Je suis étonnée et ravie d'entendre tout au long de la journée le chant des oiseaux. Beaucoup de petits passereaux vivent ici. Cette première journée fut agréable, une première approche de ce désert. Le grand air m'a fatiguée. Une bonne douche bien méritée m'attend.

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C'est le 2nd jour à l'assaut de ce désert énigmatique. Après un bon petit déjeuner servi par Miguel, nous repartons en direction de las bardenas. Nous repassons par la ville de Pinsoro. Dans ce village, on aperçoit quelques nids de cigogne en haut des poteaux électriques en cette période de l'année.

Nous partons explorer la partie haute de las bardenas blancas. Las Bardenas sont composées de 3 parties : Bardenas Blancas, Bardenas Altas et Bardeans Negras.

Des traces de sangliers dans les barrancos 

Nous partons de Raso de la junte et descendons dans le barranco de la Estroza pour atteindre el castillo de Penaflor. Ce château a été construit par le roi Sancho El Fuerte au XIIIe siècle pour garder la frontière avec l'Aragon et mettre un terme au banditisme qui a dévasté las Bardenas. Sa construction avait une petite tour centrale qui servait à la fois de tour de guet et de logement pour une petite garnison et une enceinte fortifiée autour d'elle. Aujourd'hui, il ne reste que la ruine de sa tour médiévale. Et un jour, l'érosion fera qu'il ne restera plus rien.


Nous contournons ce château, avant de gravir une montée courte mais bien pentue, mon souffle s'en souvient pour rejoindre le plateau où nous pique-niquerons au soleil avec une vue imprenable sur toute la Bardenas Blancas.

 El castillo de Penaflor

Bien repus, nous longeons la crête tant bien que mal en évitant les pouces de culture plantés pour atteindre la Punta de la Estroza. Je découvre l'immensité du désert, ses variantes tant de couleurs que de relief. C'est magique et énigmatique. Que peut-il se cacher en dessous ? Qui vit là ? Dans quelques années ce sera sans doute différents avec l'érosion qui continue.

Sur le chemin, nous nous arrêtons à l'entrée nord du désert connue sous le nom d'El Paso. C'est au même endroit qu'a été érigé le monument au Pastor, que la Cañada Real de los Roncaleses longe, lieu d'entrée des troupeaux venus des Pyrénées jusqu'aux rives de l'Èbre pour y passer l'hiver. La date d'entrée des troupeaux dans les Bardenas est fixée au jour de la San Miguel, le 18 septembre. Les bergers venaient jusqu'au mois de mai faire paître leurs troupeaux. La vie y était rude sans eau courante ni électricité et ni ravitaillement. La transhumance était une vraie tradition.

Après ses 17km, pleine de poussière, je suis ravie de retrouver une bonne douche chaude. Ce soir, nous dînons au bar du village. J'attends cette expérience avec impatience.

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3 ème départ pour las Bardenas sur une partie hors réserve à la limite entre l'Aragon et la Navarre. Nous avons beaucoup de chance avec le temps car il fait beau mais le vent souffle fort aujourd'hui. Ce vent, c'est le Sirrocco. Il est tellement fort que sur la crête reliant Nasa baja et la pointe de Tripa Azul, j'ai l'impression d'être bousculée, déstabiliser à chacun de mes pas. Il y a quelques endroits où mon vertige est augmenter par ses sensations d'instabilités.

A la point de Tripa Azul, nous avons une vue à quasi 360 degrés sur las Bardenas c'est juste exceptionnelle. Heureusement, sur le plateau, des arbres nous ont permis de manger à l'abri du vent. C'était une petite randonnée de 9km aujourd'hui et je n'ai fait que des vidéos et pas de pas de photos de la vue oups!

Uncastillo 

Pour finir la journée, nous découvrons l'histoire d'Uncastillo avec notre guide. Cette ville au allure médiévale, nous emmène d'église en église. Uncastillo s'est développé autour du château construit au XIIème siècle. Ce labyrinthe de ruelles en pierre est d'une beauté et richesse. On y ressent l'histoire.

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Dernier jour dans les dunes du désert de las bardenas. Nous avons eu vraiment de la chance cette semaine avec le temps. Ni trop chaud, ni trop froid. Pas de pluie non plus, car là, ça aurait été une semaine en enfer avec la terre collée aux chaussures et des glissades à gogo. Je recommande vraiment pas de le faire par temps humide.

Aujourd'hui direction, el cabezo de Chimorra, et le balcon de Pilatos. L'approche est longue. Quasi 10km à travers le barranco et un bout de piste. Dans la réserve, on ne peut pas laisser son véhicule n'importe où. Il faut le laisser obligatoirement le long de la route. Résultat, on est parfois loin des lieux d'intérêt. Mais bon, là ça valait le coup de marcher autant.

Nous avons même tenté une intrusion dans un barranco pour voir jusqu'où il nous menait... Et quel spectacle 😍

Avec une super place pour pique-niquer le midi.

Nous continuons le balcon avant de redescendre dans le barranco de valfondo pour revenir au point de départ. Une fois en bas, plus aucun repère. Juste suivre le cours du barranco et trouver une sortie pas loin du point de départ et ce n'est pas chose aisée... La preuve encore cette après midi où une fois sortie du barranco, l'antenne nous permettant de repérer approximativement notre véhicule se trouve au moins à 2km à vol d'oiseau en arrière 😅 Heureusement, qu il ne fait pas trop chaud. J'imagine la fournaise en été dans ses barrancos avec le soleil qui réfléchi sur la terre sans vent pour respirer.

Très belle semaine en Navarre, dans ce désert emblèmatique et plein de surprises.