La parenthèse d'altitude

Cela faisait déjà quelques années que ça me trottait dans la tête...

L'idée d'une aventure en mode léger et rapide, dans les montagnes que j'aime. Inspirée des fameuses traversées des Alpes bien à la mode, j'ai préféré tracer un itinéraire à ma sauce, pas le plus court ni le plus logique, mais respectant la trilogie "plein les yeux, plein les jambes, plein le cœur".

un tracé alternant une divagation solitaire et quelques étapes avec amis, famille...et au départ de...chez moi. La dernière étape ? La mer bien sûr.

petit plaisir égoïste ?

Et histoire de quand même courir utile, je m'engage à ramasser les déchets rencontrés sur les sentiers, participant à l'action de http://www.trailrunnerfoundation.com...

Pour savoir où je me trouverai en temps réel , c'est facile, ce sera par ici :

-> https://maps.findmespot.com/s/X0HY <-

Rendez vous le 20 Août 2021 pour le démarrage de cette folle disgression altimétrique !

33km 2000D+ 1350D- 6h

Après un calin à mes deux ❤, c'est parti pour une

1ère journée en mode démarrage à froid , la fraîcheur des sous bois est très appréciable sous le soleil qui tape fort 🌞

Je m'arrête devant un arbre énorme de 170 ans , prénommé "le grand témoin"...Waow, il en aura vu passer des cinglés comme moi sautillant dans les bois 🤸‍♂️

J'arrive pour le goûter chez Marie Laure et Patrice, retrouvailles après 3 ans, mise à jour des news autour d'une bière...que le temps passe vite 😱

Le soir je teste le mode secours de ma balise GPS avec mes anges gardiens : même sans couverture réseau, un SMS avec ma position est transmis à 3 personnes ...on ne sait jamais hein !

39km 8h45 2950D+ 1500D-

Après un passage derrière le château de Vizille, montée dans les bois à l'ombre, heureusement car il fait chaud ! 😪

Les jambes sont lourdes des premières journées, je prends un rythme régulier car la montée est trèèès longue.

L'altitude rend l'air plus supportable, après la foule des lacs Achard les sentiers sont plus tranquilles... il y a quand même beaucoup de monde en montagne aujourd'hui 😱 !

Le grand spectacle commence : cascades, lacs, sommets rocailleux, le tout noyé dans le ballet des nuages qui montent.

J'arrive au refuge Jean Collet à temps pour savourer tarte aux myrtilles et bière de montagne.

Après l'effort, le réconfort !

42km 10h45 3550D+ 3700D-

Grosse journée avec toutefois un parcours modifié pour économiser les gambettes.

Bien m'en a pris...

Je commence tranquillement dans les alpages en croisant quelques pensionnaires bizarrement étonnées (un rien les étonne me direz vous)

Du col de Claran, la mer de nuages fait émerger la Chartreuse : quel spectacle !

J'aperçois alors une trentaine de randonneurs qui déboulent de Super Collet : au secours !

Vite, je me jette dans la descente, pour retrouver à nouveau le calme de l'air qui vrombit d'insectes et de cascades lointaines...

Les pierres sont tachées de fientes colorées à la myrtille : jamais un caca n'a paru aussi beau 😆

Du col d'Arpingon j'enquille 1850m de dénivelée négative, de quoi faire chauffer les cuissots 🍗 !

Après le Vercors et Belledonne, vient le moment de monter en Lauzière.

La suite est une sanglierie (nom commun qui désigne l'art de suivre un chemin qui n'existe que sur les cartes IGN, art dont je suis passé maître) qui m'emmène tardivement au refuge de la Grande Léchère , mais juste à temps pour éviter l'orage, déguster une bonne bière de Vanoise et bavarder avec Lucas et Fanny...et oui ce soir encore j'ai le refuge rien que pour moi !

36km 9h 2450D+ 2900D-

Le jour de repos a été consacré à la récupération bien sûr, mais aussi à partager des choses ensemble. En l'occurence, rafraîchir le jardin en équipe : saine occupation !

Ce matin dernier bisou aux chéris et c'est parti : temps superbe, Geneviève me fait le privilège de m'accompagner jusqu'au premier col. Bye les zamis & merciiii !

Ambiance alpages, on est tout de suite dans le bain : des dizaines de vaches à la robe élégante sont réparties uniformément dans un immense vallon, et me donnent un concert de cloches magique !

Si vous ne connaisez pas le Beaufortain, il faut aller le découvrir d'urgence ! C'est le massif "carte postale", la preuve en images :

Descente de la magnifique combe de la Neuva, puis le dernier col raide du Passeur de Pralognan me fait basculer vers Bourg St Maurice où m'attend une chambre cosy pour la nuitée.

A demain !

29km 9h15 3000D+ 2450D-

Encore une superbe journée, pas un nuage à l'horizon 😀

Je passe la frontière avec les premiers rayons du soleil, et le grand saute-mouton continue, comme en témoigne si bien ma montre altimètre :

Trois cols à passer, dont deux à plus de 3000m...Ambiance assurée !

Les photos parlent d'elles même : on est plongé dans un environnement rude, de rares végétaux y survivent, les glaciers dominent les vallons, c'est le règne du minéral, l'air y est plus sourd, je reprends mon souffle...

Une vache se charge de nettoyer mes excès de sel de sa langue rapeuse : merci copine !😆

On est dans le Gran Paradiso le bien nommé, les paysages sont juste....Magnifico !

Descente au refuge Savoia, il y a du monde : les autobus déposent les touristes pour une balade dans ce coin exceptionnel. Les italiens profitent de leur fin d'été avant la rentrée des classes le 13/09.

Ce soir c'est déjà la moitié de mon aventure 😯

Le temps passe vite malgré les longues journées. Les payages défilent tellement que mon espace temps est déformé : le lieu de départ du matin même me parait bizarrement très ancien...

41km 9h15 1800D+ 2250D-

Cette 2ème journée en Vanoise a été presque exclusivement parcourue sur le GR5, qui sera désormais mon chemin de prédilection jusqu'à Nice.

La descente du vallon de la Rocheure sous les premiers rayons du soleil me donnent l'impression d'être littérallement immergé dans une carte postale....Je ne sais plus où donner de la tête ! Ah oui faut regarder un peu le chemin quand même 🤪

Je rejoins donc le GR5 et commence une longue remontée en balcon, oscillant entre 2000 et 2500m d'altitude, sous les glaciers de la Vanoise, sorte de crême glacée géante posée sur l'arète sommitale.

Les larges vallons s'enchainent, les traversées de torrents sont légion. Des familles de Vautours patrouillent au dessus de ma tète, guettant quelque marmotte distraite. Planquez vous les filles !

Une succession de bosses m'emmène enfin autour des lacs d'Aussois, puis un dernier chemin, bordé de Myrtilles en robe d'automne, m'offre une vue surplombante sur la Maurienne ..

Ce matin j'accompagne Léon pour une petite crapahute hors sentier dans un endroit secret vers 2000m d'altitude, à la cueillette de groseilles.

Quel moment de calme ! A l'ombre des mélèzes, gestes répétés mais délicats, où les pensées vagabondent....

Cette récolte est excellente. Les 11 kg ramassés vont pouvoir faire une bonne production de gelée, miam 😋 !

Après ces super moments en leur compagnie, il va être temps de repartir demain pour la dernière section de mon aventure. Merci à mes hôtes !

Je profite de ce jour off pour faire un petit point sur ma démarche "courir utile" pendant mon périple, qui sous la bannière du Trail Runner Foundation, consiste à simplement ramasser les déchets rencontrés sur le chemin.

Chaque jour mon sac se remplit de nouvelles trouvailles, cela va du classique mégot, au bouchon de gourde à compote, en passant par les opercules de gels énergétiques ou autres emballages de barres de céréales....

Une mention spéciale toutefois pour le leader incontesté du déchet balancé à même le sentier : le mouchoir en papier.

La plupart du temps utilisé pour la pause pipi caca, en se disant certainement "on s'en tape la coquillette, c'est biodégradable "...

Certes, il faut quelques mois pour qu'un mouchoir se décompose, mais dans des conditions de température et d'hygrométrie optimales, autant dire qu'en montagne on en est assez éloigné. Bref...

Perso, quand je ne peux pas utiliser les feuillages alentours (sisi !) je prends soin de brûler le mouchoir et d'aplatir le tout sous une grosse pierre ... 💩

A ce propos, je ne peux que recommander ce bouquin au titre on ne peut plus explicite :

48km 10h30 3500D+ 2800D-

Grosse étape, je me lève à 5h15.

Montée à l'aube, aïe déjà des 4X4 dans le vallon de l'Aye, la chasse aux chamois est ouverte depuis quelques jours ...j'espère qu'ils ne vont pas me confondre avec du gibier, à force j'ai des sabots qui commencent à pousser (et peut être bien des cornes aussi)

Au menu aujourd'hui, 3 cols à déguster. Passé le col des Ayes, je prends un bout de route pour éviter un 4ème col (il faut quand même arriver à l'heure pour la soupe !)

Au col de Bramousse j'accélère sur un sentier roulant, le coeur léger, foulée rasante, ...et un peu trop, car je trébuche sur un traitre cailloux affleurant, et m'étale comme une crêpe dans l'herbe sèche. Je me relève, pas de mal .

Quel boulet !

Il fait beau, mais les nuages commencent à accrocher les reliefs.

Les marmottes du Queyras ne semblent pas très paniquées à mon passage...

A Ceillac la pluie arrive et ne me quittera plus jusqu'au refuge de Maljasset.

Les touristes descendent trempés du lac St Anne, j'évite de trop m'arrèter pour ne pas me refroidir.

Au dernier col, belle récompense : à travers les brumes, j'aperçois une mère chamois et son petit qui passent tranquillement sur la crête. Les marmottes açompagnent ma dernière descente, je vais apprécier la douche chaude !

36km 8h 2400D+ 2500D-

J'apprends par hasard que le refuge dans lequel j'avais prévu de dormir ce soir est fermé pour travaux, je dois encore modifier mon parcours en trouvant un autre logement dans une vallée adjacente.

La Tinée ne me laisse pas un souvenir impérissable, avec la triste station d'Auron en mode estival déserté.

Heureusement l'entrée dans le parc du Mercantour me laisse comtempler les splendeurs automnales de la combe de Crousette ...

Je passe à proximité d'une bergerie, deux patous font la sieste, l'un deux grogne en me voyant arriver. "Ah non hein, j'ai déjà donné hier, mon toutou !"

Je passe rapidement sur le point haut du jour, car la pluie arrive et le risque d'orages est significatif dans la zone.

La descente sur le chouette village de Beuil est un vrai plaisir, des lacets sur une crête au dessus d'un vallon pelé.

Place au repos pour récupérer de la grosse étape d'hier !

42km 8h30 1550D+ 1950D-

Après une micro partie de ping pong avec le père de Sveta , je reprends tranquillement le GR5.

Rapidement je réalise qu'il s'agit de ma dernière étape, et que mon aventure se termine ce soir. Le vase déborde d'émotion pure, j'éclate en sanglots. Ce périple m'aura bien chamboulé...

Peu à peu je me rapproche de Nice, et bientôt la mer est là, à quelques foulées.

Je rejoins mon cousin Cédric et sa fille Naëlle qui m'accompagnent sur les derniers km, dernière descente....

Evidemment, un bon bain sur la promenade des Anglais s'impose !

Ce soir j'arrose la fin du chemin avec mes cousins Cédric et Fanny, je suis sur un nuage....

Je monte sur la balance : - 6 kg quand même !

Ce voyage m'aura laissé 3 certitudes :

qu'il ne faut pas trop attendre pour vivre ses rêves ,

que l'aventure commence sur son palier,

et la dernière, c'est un arbre qui me l'a rappellée :

Merci à vous tous qui lisez ces lignes,

Merci pour vos messages qui m'ont donné des ailes au dessus des cailloux

Merci à mes hôtes d'un soir ou plus : Marie Laure & Patrice, Colette & Michel, Chantal, Camille & Christian, Lucas, Genou & Pilou, Francette & Léon, Corinne & Michel & Vince, Sveta & Genna, Fanny & Cédric, et tous ceux que je n'ai pas cité.

Merci à R'Products Jonathan & Michel pour les goodies de la Parenthèse d'Altitude.

Merci à SebCheu pour ses initiatives à distance 😉

Merci à Abi et Christèle pour leurs conseils et soins

Merci à arno, pybé et Christelle mes anges gardiens du tracking GPS

Merci à ma famille, mes parents, Christelle & le ptit Niels, gérer une absence n'est jamais chose facile.

Merci la Vie enfin, j'ai eu la chance de pouvoir réaliser ce projet,

toutes les étoiles étaient alignées !

"Such a lonely day, and it's mine..." (System of a down)

"Et je cours, je me raccroche à la vie..." (D.Balavoine)

"Le bonheur ne vaut d'être vécu que s'il est partagé." (Jon Krakauer)