Nos visites du jour se concentrent sur la capitale de la province, Nan : petite bourgade d’environ 20 000 habitants, elle est encore très agricole même si les infrastructures touristiques s’y développent rapidement, comme dans tout le Lan-Na, depuis 10 ans. On trouve aujourd’hui de bons hôtels et resorts ainsi que des maisons d’hôtes.
Notre première visite est pour le plus célèbre temple de Nan, Wat Phumin. Fondé en 1596, le wat fut détruit avec le reste de la ville par les Birmans en 1704. En a1857/58 le roi Chao Ananta Vora Ritthi Det monta sur le trône du royaume de Nan : un de ses premiers actes officiels fut de décider de reconstruire à nouveau les temples de Nan, parmi lesquels le Wat Phumin, restauré entre 1867 et 1875. Il est célèbre pour sa forme de croix grecque. C’est aussi le seul temple construit comme s’il se trouvait sur les dos de deux immenses serpents (ou Nâgas) : leurs queues sont visibles à l’entrée ouest et leurs têtes côté est. Chacune des quatre entrées est précédée par un petit couloir surmonté par une structure en pointe étagée et finement décoré (soulignant l'origine royale du temple), et dotée de portes sculptées avec finesse, de gardes-démons chinois à l’Est, de fleurs au Nord et de motifs de la vie forestière de style Lanna à l’Ouest et au Sud.
L'intérieur est impressionnant. C'est aussi un bon exemple de l'architecture Thai Lüe.
La structure du toit est soutenue par douze piliers de teck décorés de motifs floraux et d’éléphants sur de la laque noire et rouge. Le plafond est également finement décoré.
L’autel fleuri, reposant au centre, soutient quatre Bouddhas de style Sukhothaï, dans la posture de l’appel de la Terre à témoin. Cette disposition quadripartite rappelle celle que l’on rencontre dans les temples des royaumes Môn en Birmanie ou même dans les premiers temples thaïs. Ces statues sont de style Lan-Na avec une influence lao (oreilles).
Sur les parois du temple se trouvent des peintures murales de la fin du xixe siècle réalisées par Thit Buaphan, aussi appelé Noi Buaphan- également l’auteur des peintures du Wat Nong Bua - venu du Laos central, à la demande du gouverneur de l’époque. Ces peintures s’organisent en deux parties, séparées par une ligne en vague bleue. Le registre supérieur décrit les vies antérieures du Bouddha tandis que le registre inférieur concerne plus des scènes de vie quotidienne où apparaissent aussi des européens. Le style est particulier, s’éloignant de la tradition classique. Ces scènes de vie montrent avec réalisme, humour, charme et poésie de nombreux détails savoureux : jolies femmes et galants ; habits, parures et bijoux ; sarong, drapé, broderies, plis et ourlets ; coiffes, chignons et mantilles ; tatouages des hommes et cigarettes etc. On peut aussi distinguer des étrangers qui arrivent en bateau à vapeur.
Le deuxième temple que nous visitons est en face du précédent, Wat Phra That Chang Kham, c’est un temple royal de style Lanna. Fondé au début du XVe siècle, il fut restauré à plusieurs reprises. Le style architectural est celui du Lanna avec une influence Sukhothai. Le grand chedi est de style cinghalais avec une base sur laquelle sont sculptés des avant-corps d’éléphants.
La statue principale de Bouddha est une grande statue de stuc doré de style Lanna avec influence Sukhothai.
Quelques peintures abîmées, ne permettant pas d’identifier les scènes, couvrent les murs.
Un deuxième bâtiment beaucoup plus récent (XXe siècle) abrite dans un prasat une belle statue en bronze du XVe siècle, de style Sukhothai et une représentation dans de petites vitrines de tous les styles de chedi qu’on rencontre dans le pays.
Tout prés de ces deux temples se trouve l’ancienne résidence royale des souverains de Nan: belle bâtisse typique du XIXe siècle.
Elle abrite aujourd’hui un musée très intéressant sur les spécificités de l’art bouddhique dans cette province. Outre l’influence laotienne évidente, on découvre la créativité des artisans de la région.
Un excellent déjeuner dans le jardin d’une belle maison ancienne transformée en petit musée nous attend en musique !
Cette maison, Hong Chao Fong Kham, a toutes les caractéristiques des maisons nobles du nord : construite en teck sur pilotis, on accède aux pièces d’habitation par un escalier qui débouche dur une terrasse. Deux bâtiments se font face, l’un la résidence de la famille avec une pièce ouverte sur la terrasse où sont accueillis les invités. Cette pièce comporte un petit autel avec une statue de Bouddha. La ou les pièce(s), suivant la fortune de la famille, où vit la famille est (sont) fermée(s) et strictement privée(s). Elle est (sont) protégée(s) par une sculpture de bois au pouvoir protecteur insérée au-dessus de la porte d’entrée. Dans cette maison, qui appartenait à une famille noble, la partie privée comporte un salon et trois chambres à coucher. De l’autre côté de la terrasse un deuxième bâtiment est réservé au service : destiné au personnel, il comporte un garde-manger, ici transformé en salle d’exposition, et la cuisine. Aucune pièce ne comporte de plafond, les tuiles de bois sont visibles de l’intérieur : ceci permet de favoriser l’évacuation de l’air chaud par le toit.
Au rez-de-chaussée, sous la maison sont rangés les objets utilitaires dont le métier à tisser de la famille. Dans cette maison une petite boutique vendant des articles tissés sur place occupe une partie du rez-de-chaussée.
Une dernière visite est réservée au Wat Phra That Chae Haeng. C’est le temple le plus sacré de la province de Nan. Il est situé sur une colline, sur la rive orientale de la rivière Nan, à un kilomètre environ de l’agglomération. C’est un temple emblématique du pays. Ce quartier fut le premier centre-ville de Nan quand la capitale s’y établit après avoir quitté Pua, au nord de la province. Ce temple fut fondé en 1355 pour enchâsser 7 reliques du Bouddha. Les structures de ce temple sont complexes avec différentes influences stylistiques, Lanna, Tai Lue et birmane. Le grand chedi, en position centrale, est en briques couvert de stuc, de cuivre et de feuilles d’or. Le bâtiment principal, le viharn, est de style Lanna avec deux lions de style birman à l’entrée et une décoration unique au-dessus de la porte d’entrée montrant deux nâgas entrelacés.
L’authenticité de la culture de cette région séduit. On est loin des pompes de la royauté de Bangkok. Les paysages de montagne sont un écrin magnifique et on peut y trouver un peu de fraîcheur bienvenue.