Carnet de voyage

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1er janvier 2018, nouvelle année, nouveau départ. C'est Olivia qui part la première.
Janvier 2018
52 semaines
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Publié le 28 avril 2018

COMMENT , MAIS COMMENT CHOISIR ?

L'épreuve de la balance : compter les grammes

Préparer une aventure n'est pas de tout repos -

Voilà une estimation du poids (le plus grand ennemi du voyageur) qui avoisinne précisement les 6,98Kg sans tente, ni réchaud, ni appareil photo. L'équipement se rapproche de 11Kg lorsque s'additionne les affaires de voiles.

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Deux ouvrages de référence nous ayant relaté les petits secrets de nos confrères aventuriers
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Publié le 28 avril 2018

Nouvelle année qui commencera en beauté par un départ à Gibraltar -

Sac sur le dos, c'est donc le 1er Janvier que je m'apprête à m'envoler vers des horizons inconnus. L'équipage au grand complet (nous serons 4) sera à quai pour mettre le bateau à flots le 2 Janvier, et pour les derniers préparatifs avant la traversée d'un océan qui durera un mois, la transatlantique. Départ de la pointe la plus méridionale d'Espagne pour arriver en Guadeloupe. Arrêt aux îles Canaries pour 24h le temps de réapprovisionner en eau et essence. C'est une sacrée expérience qui commence !

Paradise, Diego Suarez  est le voilier qui nous emportera d'un continent à l'autre. Deux mâts, coque en acier et pont en teck.

Ci dessous, le lien de notre balise GPS qui indique en temps réel notre position.

https://share.findmespot.com/shared/faces/viewspots.jsp?glId=0yk9dYRlg2WtglxXBSKVdtjtdLjx9P2bj


Dorothée et Mathilde s'envolent le 25 Janvier pour Pointe à Pitre afin de se rejoindre aux Antilles et débuter notre périple ensemble .

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Équipage au complet, prêt pour la mise à l'eau, derrière nous le rocher de Gibraltar 

Grand soleil, une vingtaine de degrés et 14 noeuds de vent (force 4). Que du plaisir !

Départ prévu le 4 janvier à 10h pour passer le détroit avec un courant dans le dos, favorable, mais un vent de face. Nous faisons un point météo le plus souvent possible afin de tracer la meilleure route compte tenu de la grosse bourrasque qui soufflera vendredi et samedi.

C'est le sourire au lèvres que je termine ce paragraphe, dernier moment d'internet avant un mois de haute mer.

Olivia

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Publié le 6 janvier 2018
Le rocher, aussi appellé le caillou 

Trop de vent pour partir aujourd'hui. 25 noeuds bien établis avec au plus fort des rafales de 40 noeuds. Pas question de passer le détroit avec une houle de 3m qui risque de déferler et le vent dans le nez.

En attendant, on visite l'angleterre méridionale. C'était ''exotique'' car c'était en anglais, et en £ !

3 jours qu'il faut attendre que la mer se calme. Le vent siffle à nos oreilles, la nuit, les rafales font craquer le mat qui tangue... alors, on s'occupe avec de menus travaux. On a tous hâte de partir sur la Grande Bleue.

Olivia

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Publié le 9 janvier 2018
Tarifa, port de pêche, mal abrité des vagues et du vent , les côtes marocaines de l'autre côté.

Me voilà partie pour de bon !

Les prévisions nous promettaient un passage du détroit de Gibraltar sans encombres même si le vent était dans le nez. Faire de la voile c'est aussi être dans les bras des éléments imprévisibles... et c'est dans l'après midi que le vent s'est levé tout d'un coup : rafales à 55/60 km/h,Force 8, mer agitée et bien formée par des creux de 2m très serrés. C'était difficile d'avancer contre tant de précipitations.

Sans hésiter, nous avons trouvé un abri, le petit port de pêche de Tarifa.Nous voilà maintenant à la pointe la plus mériodionale de l'Europe, jonction entre la méditerranée et l'océan Atlantique. D'où nous sommes, nous voyons clairement les petits villages sur la côte marocaine en face à moins de 10km. On prévoit peut être d'aller au Maroc, le temps de visiter le souk et de manger une bonne tajine. Le vent qui souffle aujourd'hui vient du sud, c'est le Levante. Il est tiède, en provenance directe d'Afrique. C'est bien agréable.

Coincés ici, pour quelques jours, en attendant que ça se calme.

Demain, départ pour les Canaries avant l'aube.

Olivia

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Publié le 24 janvier 2018

Saine et sauve.

Départ pour 7 jours de traversée


Après un départ mercredi 10 janvier corsé del Estrecho de Gibraltar, nous avions mis le Cap sur l'archipel des Canaries, sous le tropique du cancer , au 29 ème paralèlle, à même des côtes du Sahara Occidental . Vent de face pendant trois jours, le bateau n'avançait pas, alors que la large houle caractéristique de l'océan atlantique nous poussait.

Tout est bleu maintenant. Juste du bleu et des remous. Le bateau devient un univers à part entière, on y instaure nos propres règles et j'habitues mon corps à cet infini roulis qui me demande constamment de rester dans un équilibre très précaire.

Dès qu'il pleut, on sort le linge pour une lessive naturelle

Dans la nuit du troisième jour en mer, je me réveille avant de prendre mon quart de nuit. Le mât produit des grincements bruyants, les affaires se renversent et l'eau devient de plus en plus agressive sur la Carène. Les vagues devenues énormes se croisent et se chevauchent. La mer agitée est blanche d'écume et les moutons se sont transformés en grosses lames déferlantes. Nous sommes toute la nuit sur le qui- vive, pensant que ce gros grain passera avec la lumière de l'aube. Sur l'échelle de Beaufort c'est Fort coup de vent, (90km/h) force 8-9 installée, et le restera pour les prochains 72h. Proche d'une tempête, cette mer difficile n'avait pas été prévue.

Quand on levait les yeux au ciel c'était pour voir les vagues au dessus du mât s'abbattre sous la coque. Creux de 12 mètres. C'est dur à dire mais tout l'équipage était prêt à devoir abandonner le bateau s'il chavirait. Ce contexte arrive à un marin une fois dans sa vie. Et pour moi, ce fût mon baptème de haute mer. Tous nos papiers, de l'eau (et des spéculoos) étaient dans un bidon étanche à portée de main. J'étais accrochée à mon harnais. Chaque seconde pouvait être la dernière. Les mouvements du barreur avaient un impact sur la vie de tout l'équipage.

72h de gros temps. On se met en fuite, le bateau surfe sur les vagues, à une folle vitesse, toutes voiles abbatues sauf le génois, aussi petit qu'un mouchoir, stabilisant l'avant pour ne pas enfourcher dans le creux immense de la houle.

Mouillés jusque dans les bottes, on arrive de nuit dans le premier port des Canaries.

La Isla de la Graciosa 

Ile de la Graciosa, paysage lunaire et hostile, les routes ne sont enfait que des pistes de poussière et de sable, les seuls véhicules de l'île sont des 4x4, et le village est désert. Pas un chat, à part un autre bateau arrivé juste avant nous cherchant un abri, ayant sa bôme de cassée et sa voile d'avant déchirée par le gros temps.

On choisit d'avancer jusqu'à Arrecife, port principal de Lanzarote : là, un coéquipier, Alessandro nous laisse pour trouver un autre bateau. On prend Martin à bord. Voyageur de long cours parti de Lyon il y a deux mois, il a fait du stop jusqu'au Portugal puis du bateau stop au Maroc pour arriver aux Canaries.

Dernier ravitallement, l'île la plus occidentale des Canaries : Santa Cruz de La Palma, poste de départ avant la transat' .

Malheureusement, notre pilote automatique ne marche plus, et la grande voile s'est décrochée du mât. Impossible de gérer la situation en haute mer. Nous passons plus de 2 nuits et 2 jours à barrer constamment, n'ayant plus qu'une voile d'avant et celle d'artimon. Avaries réglées au port, le départ est imminent.


Lanzarote, île la plus à l'Est des Canaries 

Nous attendons les bons vents pour partir, la préparation est bientôt finie. La prochaine étape sera dans 2 500 miles nautiques soit plus de 4 000 kilomètres. Traverser un océan.

Prévision : Arriver sur un autre continent après un bonne vingtaine de jours de navigation à 4 personnes sur un bateau de 11 mètres.

Ca c'est ce qu'on appelle s'aventurer sur LA GRANDE BLEUE !

Olivia

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Publié le 3 mars 2018

《All ships, all ships, all ships ; From Sailing Vessel ''Paradise'', do you read me ? Over. 》

C'est mi-amusée, mi-désespérée que j'émétais chaque jour ou presque l'appel radio en mer, demandant sur les ondes internationales du Canal 16 s'il y avait des navires aux environs. Pas de réponse pendant un mois. Nous étions seuls au monde.

29 jours en mer, 2 600 miles nautiques, 4 800 kilomètres de navigation

Départ 28 Janvier, La Palma, Arrivée 25 Février, Guadeloupe.

Appréhension du départ, on se demande si on va être capables de le faire. Joie de toucher enfin la terre promise !

Ça a commencé fort, avec une surprise la veille du départ : le pilote automatique ne fonctionnait plus. Nous avons tout de même décidés de partir, n'ayant pas d'autre solution, sachant pertinemment que nous nous relayerons à la barre pour toute la traversée. Radical. Chacun barrait 6h par jour, sur des quarts de 1h le jour et de 2h la nuit. Il en a fallut du muscle, des courbatures, de la rigueur dans les horaires et des tensions pour garder le bon cap, malgré la houle, les coups de vents et les voiles qui faseyent !

Vents instables et orages à répétitions 

Lorsque je barrais il m'arrivait parfois de ressentir une savant mélange entre le fait de flotter et voler. Se sentir poussée par les vagues et tirée par les voiles, surfant sur une belle houle était très agréable, comparé à l'éternel roulis de nous avons subi pendant toute notre vie en mer. Je m'y suis faite à la gîte constante du bateau. Durant les premiers jours, nous étions tous incapables de cuisiner, de fermer un oeil, de lire ou de s'assoir ne serait-ce que confortablement. Les affaires bringballaient et glissaient, s'entrechoquant dans un concert permanent, mais on s'y est habitué à la longue. Je roulais de ma couchette, et je me retrouvais par terre chaque nuit, ballotée de gauche à droite dans mon sommeil. Et puis, quand mon corps commençait à atteindre ses limites de fatigue, j'ai pu enfin apprendre à m'endormir même si dehors, le vent sifflait aux oreilles du barreur.


Le lendemain de notre départ, la girouette, nous indiquant la direction du vent, ne répond plus. Le surlendemain, l'anémomètre ne fonctionne plus. Le jour suivant notre GPS indiquant le tracé nous lâche. Puis le 4ème jour, c'est au tour de la grand voile qui s'affale. Il aura été impossible pour nous de la raccrocher en haut du mât pour les deux semaines qui suivirent, dû au mauvais temps et à la houle énorme que nous avons courageusement essuyé. Cette avarie majeure nous a retardé car sans cette voile principale, le navire ne marchait qu'à un régime de moitié et perdait sa stabilité originelle. Il a fallut grimper en tête de mât après de nombreux essais. Et jusqu'à la fin, nous n'avons pas pu naviguer toutes voiles dehors car un hauban soutenant le mât a cassé, pouvant arracher le toit du bateau à n'importe quel moment si nous mettions trop de voiles !

Chaque jour a été synonyme d'un nouveau disfonctionnement, je n'en sers pas ici la liste exhaustive - La traversée idéalisée par le monde de la croisière s'est révélée pour nous, une véritable épreuve océane. Chaque jour le capitaine constatait un problème nouveau sur son navire qui tombait en ruines, et ça n'aidait pas à amener la bonne humeur à bord. Le climat entre nous n'a cessé de se tendre car la navigation difficile était source de fatigue et frustrations. Nous étions tous bien contents d'arriver sur terre, et moi d'autant plus que j'ai pu expérimenter le fait d'être la seule femme à bord !

Martin, co-équipier, Laurent, capitaine, et Gaël au Yukulele 

Je comparerai volontiers à un ermitage ce voyage long et isolé en terrain inconnu et hostile, dangeureux à chaque seconde mais époustouflant de puissance.

Une des expériences les plus étonnantes de cette transat' fut celle du temps et de l'espace. Je dépendais totallement de ma montre et du compas. La monotonie des jours et de l'horizon rendait toutes les journées comparables et l'on aurait pu tourner en rond, personne ne s'en saurait aperçu. À part l'écume sur la crête des vagues, quelques dauphins nous rendant visite, deux baleines, des poissons volants à foison et rarement un oiseau, nous n'avons pas vu signe de vie autour de nous.

Frankenstein, notre bonzaï, qui a vaillament vécut deux semaines de haute mer 

La guerre des couchettes fût déclarée à bord : il n'y en avait que trois pour quatre personnes sachant qu'elles n'avaient pas de protections contre le roulis. Celui qui finissait son quart, prenait le lit de celui qui venait le relayer. Mais selon l'inclinaison du bateau et le cap tenu, certaines couchettes étaient plus agréables, donc prises d'assault et certains se levaient la nuit pour prendre la meilleure.

Le choix se faisait entre la chambre des Milles Saveurs, La vertigineuse ou la Tropicale.

J'aurai dormi un peu partout ces dernières semaines : dans la cuisine, Les Milles Saveurs du frigo et des ingrédients qui se renversaient, pimentaient notre nuit, sur le carré du salon, coincée sur le pont ou encore dans la cabine arrière, Tropicale, tellement humide que les murs moissisaient dû à la condensation. La plus trépidante était la Vertigineuse, c'était une couchette à deux étages, et seuls les plus aguéris tentaient d'y dormir.

En haute mer, notre bien le plus précieux était évidement l'eau douce. Tout se lavait à l'eau salée et notre consommation quotidienne était à respecter rigoureusement. Comme la navigation a pris plus de temps que prévu, nous étions prêts à nous rationner pour les derniers jours. Le nerf de cette traversée fut cependant la cuisine.

Une dorade coryphène 

Pour ce qui est de la pitance, notre cocotte minute, achetée au dernier moment avant de partir, nous a grandement aidée lorsque la houle rendait dangeureuse toute manoeuvre dans la cuisine. J'ai réussi à convaincre les trois hommes à bord que cette cocotte nous faciliterai la tâche en mer. Mais cuisiner n'était tout de même pas simple : on tombait, se bousculait et renversait plus de choses que ce qui finalement arrivait dans nos assiettes.

Pendant les deux derniers mois, nous avions constemment la traine à l'arrière du bateau, et nous n'avons pêché que deux poissons, et le même jour en plus ! C'était des dorades mais à la vue de notre ignorance sur la toxicité du poisson, personne n'en a mangé. La rareté de la vie sous marine m'a profondément marquée.

La temperature de l'océan se réchauffait chaque jour, c'était la preuve que nous avançions dans le bon sens !

Notre météo a été mauvaise dès le début : vagues déferlantes, murs d'eau silencieux et vents forts du Nord-Est. De manière générale, les Alizés, vents constants dans l'Atlantique, soufflent d'Est en Ouest. Ce sont des vents froids attirés par la dépression équatoriale, ils créent donc une grande tendance océanique. Mais depuis quelques années, ces vents se perturbent, les courants marins s'affaiblissent et le dérèglement climatique se fait grandement ressentir au détriment des voileuxet des croisières !

Par gros temps l'equipement était fastidieux, je mettais presque 10mn à me préparer pour affronter l'écume. En relisant mon carnet de bord, je vois qu'au sixième jour de mer j'écris 《Maintenant je vis quasiment qu'en bottes; le pont est trempé en permanence et tout est humide...que c'est long!》

Arrivée en Guadeloupe 

Un bout de chanson qui nous a accompagné tout du long : "Ils viennent du bout du monde, apportant avec eux, Des idées vagabondes et un bout de ciel bleu..." Emmenez moi d'Aznavour.