Par Touiza
Nichée dans les chaînes montagneuses de l'Ouest prés de Madikeri, cette plantation protège une biodiversité exceptionnelle
Du 27 décembre 2018 au 5 janvier 2019
10 jours
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25 années ont passé depuis que les Drs Sujata et Anurag Goel, un couple de scientifiques de Delhi, décidèrent de quitter leur vie en laboratoire pour s'installer dans une plantation prés de Madikeri dans l'Etat du Karnataka.

Voici le lien de leur site internet : The rainforest retreat.

Leur objectif est simple : étudier la Nature et sa biodiversité naturelle de sorte à promouvoir une conscience écologique et développer des méthodes agricoles durables qui aident à préserver notre environnement.

Aujourd'hui, la plantation produit des épices, du café, de la vanille et invite tous ceux qui le souhaitent à découvrir la Nature.

Nous avons opté pour un hébergement en tente, histoire de partager nos nuits avec les grenouilles et les oiseaux.

Chaque matin, des promenades sont proposées et représentent de belles occasions pour observer un écosystème complexe et fascinant. Nous sommes restés une semaine dans ce lieu magique. Une rencontre inoubliable!

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Produire sans pesticide, est-ce possible? Oui

Comment? grâce à la biodiversité. La magie opère dés lors que nous accompagnons la Nature dans sa diversité originelle.

Aujourd'hui, nous utilisons des pesticides par peur d'attaques d'insectes et pertes de récoltes. Or, plutôt que de nourrir nos peurs et légitimer une agressivité environnementale, une réflexion fertile porte davantage sur l'équilibe naturel global et plus précisément sur celui entre les insectes dits "nuisibles" et leurs "prédateurs".

Les araignées, les serpents, les grenouilles, les fourmis jouent un rôle fondamental dans la protection des plantations  

Si nous savons que telle plante est dévorée par tel insecte. Il "suffit" de connaître le prédateur local de cet insecte et de recréer son environnement naturel qui a certainement été précédemment détruit par l'Homme.

Plus la faune et la flore sont diversifiées, plus les interactions de la chaine alimentaire sont équilibrées et permettent à la Nature de vivre en harmonie.

C'est finalement extrêmement simple!

L'art du mouvement bio consiste à se reconnecter à une créativité environnementale sans déchet, et à accompagner cet équilibre naturel, en fonction des désordres causés par l'homme et des facteurs limitants locaux. Par exemple, manque de phosphore, excés ou déficit d'eau etc... Il s'agit aussi et surtout de savoir s'arrêter d'intervenir une fois cet équilibre redevenu harmonieux.

Le temps peut dés lors se consacrer à :

. l'observation infinie des animaux, des insectes et des plantes.

. découvrir leur trésor source d'enseignements et de remèdes pour notre santé.

...Un noble programme divinement perceptible à Rainforest Retreat.

A gauche, les fleurs "strobilantes kunthianus" fleurissent tous les 8 et 12 ans selon la variété. Nous sommes chanceux! 

Voici quelques basiques :

. Regarder la Nature comme "modèle". Quand nous l'observons nous réalisons qu'elle est équilibrée, chacun se soutient mutuellement, pas d'égoïsme, tout est recyclé de la vie à la mort.

Pour apprendre d'elle, il est préalablement nécessaire de la laisser évoluer telle qu'elle est, même si parfois ce n'est pas aussi joli que notre esthétique sociale le recommande.

Traduction pratique : si des feuilles tombent, les laisser au sol de sorte à permettre le développement d'un éco-système riche en nutriments. Ainsi, les insectes pourront se nourrir dans ces espaces sans avoir besoin d'aller dans les plantations.

Bien sûr, l'effet sur le bitume est nul.

. Promouvoir des multi-cultures. Pourquoi?

La Nature a un instinct solidaire. Les acteurs de la faune et de la flore s'entraident et créent une multitude de partenariats.

Ainsi, le sol est un gigantesque réseau de racines interconnectées les unes aux autres. Le monde végétal communique et s'informe de leurs besoins et de la venue d'éventuels dangers.

L'alliance entre le poivre, les orchidées et l'arbre sur lequel ils poussent est un bel exemple de relation symbiotique.

A gauche, le poivre a besoin de l'arbe pour prendre de la hauteur et fleurir. A droite, les arbres elaeocarpus tuberculatus.

Par ailleurs, si un insecte a l'habitude de se nourrir d'une plante et qu'il ne la trouve pas sur sa deuxième étape, il mourra probablement de faim avant d'avoir trouvé une plante comestible. Les multi-plantations sont donc aussi un moyen de protection des cultures produites.

Plantations de café (Robusta et Arabica), cardamome au milieu d'arbres sauvages

. Créer auprès des plantations des espaces naturels source de nourriture pour les insectes

Il s'agit par exemple de laisser les chemins le plus naturel possible ou de laisser une marre pour que les insectes trouvent leur nourriture sans avoir à aller dans les plantations.

Autrement dit, si les thermites ou les moustiques sont considérés en ville comme des insectes nuisibles, il faut comprendre qu'ils endosent ce statut du fait des conséquences de nos interventions. Ainsi, en désequilibrant la biodiversité naturelle d'un lieu (urbanisation, destruction de certaines espèces car nous ne les "aimons" pas comme les serpents ou les araignées...), nous donnons à certains acteurs (hommes, insectes, végétaux...) une position dominante alors que naturellement nous avons tous notre rôle et notre place dans cette biosphère.

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Nous pouvons constater les dégâts de la mousson 2018. Des pans entiers de terre ont été emportés par l'eau. Dans certains endroits des villages ont disparu.

Pendant plusieurs jours, la faune et la flore sont restées sous l'eau. Aujourd'hui, une diminution drastique de la biodiversité est constatée. Ce phénomène va devoir être suivi.

L'enjeu désormais repose sur une refertilisation et une prévention de l'érosion des sols. Des plantes sont choisies pour recréer un réseau de racines rapidement avant les premières pluies de mars et la mousson de juin. Les racines stabilisent les sols et absorbent l'eau dans la terre.

Ces pousses seront replantées un peu partout dans les plantations.

Ici, le changement climatique est perceptible à l'oeil nu. La mousson 2018 a, selon certains, un lien avec les incendies en Californie de l'année dernière et de 2017.

Plus concrètement, en mars 2018, les premières pluies ne sont pas arrivées dans les temps. Voici un exemple des conséquences de ce retard:

. Le café a besoin de ces pluies pour fleurir. Il n'a donc pas fleuri.

. Les abeilles ont besoin des fleurs pour se nourrir et procéder à la pollinnisation du café. Donc, sans pluie, sans fleur, les abeilles meurent de faim et il n'y a pas de production de café.

Un membre de l'équipe de Rainforest retreat témoignait avec émotion d'avoir vu les abeilles attendre au dessus des plantations de café.

Finalement, connaissant le cycle naturel de chaque acteur, l'équipe a fini par arroser telle la pluie, les plantations de café et compenser le retard climatique. La récolte et les abeilles ont été sauvées!

Nous avons constaté à Rishikesh que nous sommes un. Nous réalisons ici que nous sommes tous interconnectés les uns les autres.

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Des études scientifiques ont mis en évidence que les plantes ont leur propre mode de défense et de communication. Encore faut-il leur donner la chance d'apprendre à les activer car les pesticides rendent les plantes dépendantes et les éloignent de leur autonomie naturelle.

Quand une plante est attaquée, elle envoie un message par ses racines au monde végétal. Les autres plantes une fois informées, augmentent leur immunité, ce que l'insecte n'apprécie pas.

Autre moyen de défense, la plante envoie une substance dans les airs aux prédateurs de l'insecte, un oiseau par exemple. Ce "message" informe l'oiseau qu'il peut venir se nourrir sur elle et la protéger par la même occasion. N'est-ce pas passionnant!

Quand nous sommes arrivés ici avec Nayati, il nous a fallu un temps d'adaptation. Notre première réaction était la peur de certains animaux et insectes. Nous avons vite compris que la faune et la flore de cette région étaient particulièrement paisibles.

A gauche ci-dessous, vous découvrirez l'araignée géante jaune dite Nephila. Le mâle, petit et rouge, une fois sa mission effectuée est dévoré par sa gourmande compagne. A droite, ces araignées quêtent leur proie devant leur tunnel. La même espèce en Australie est venimeuse. Nous avons également croisé d'énormes araignées dans les toilettes, marron, poilues, de la taille d'une paume de main...saisissant!

Les serpents sont aussi communs dans la région. Difficile de les prendre en photo. Voici un vine snake (Ahaetulla nastua), rencontré sur le chemin. Il mesure entre 50cm et 1 mètre. Il est très fin, d'une élégance remarquable. Il se fond dans le vert des plantes.

Les papillons sont de tailles et de couleurs très variées, souvent accompagnés des libellules.

Il existe plus de 200 variétés de grenouilles. Il est assez facile de les voir, surtout à la tombée du jour. Avec Nayati, nous avons particulièrement aimé leurs chants, parfois très amusants.

La reproduction des grenouilles est passionnante. Certaines choisissent une feuille, juste au dessus d'un petit point d'eau. La femelle referme la feuille une fois les oeufs et le sperme déposés. Au moment des pluies, le poids de la pluie amènera la feuille jusqu'au point d'eau, aidant les têtars à trouver leur chemin.

Les oiseaux se cachent... La population a dû diminuer du fait de la diminution des insectes avec la mousson. Voici quelques plumes qui peuvent donner une idée de leur beauté.

La plante "Ne me touche pas" est définitivement notre préférée. Elle se referme quand nous la caressons.

Une grande variété d'orchidées vivent dans la région.

Voici du tabac sauvage (à gauche) et du coriande sauvage (à droite).

Des bananes et des annanas

Un tulipier d'Afrique et des fishtail trees.

Cette plante a la particularité le soir, si nous la respirons, de nous rendre nauséeux. Une variété voisine est utilisé pour empoisonner les gens. Attention aux jolies plantes!

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Le café est la plantation principale. L'Arabica a des feuilles plus petite et des graines plus grosses que le Robusta.

Dans la mesure où les plantations sont bio, les récoltes se font au rythme des plantes parfois en 6 fois selon les endroits de la propriété. Il reste ensuite au soleil jusqu'à être prêt pour une torréfaction.

La cardamome est une épice locale.

La vanille n'est pas originaire d'Inde et reste très fragile. La majeure partie de la plantation a été détruite par la mousson.

Elle est cultivée à l'horizontale. Les abeilles qui pollinisent la vanille n'existent pas dans la région. Quand la fleur éclot, l'équipe a à peine quelques heures pour le faire à la main! Ensuite, il faudra attendre plus d'un an pour pouvoir la consommer.

Le poivre a besoin d'un arbre pour s'élever le plus haut possible. Il est cueilli, puis séché et passe de la couleur verte à la couleur noire.

Toutes ces plantations vivent dans un environnement riche. Il nous aurait fallu une semaine de plus pour mieux comprendre le rôle des champignons et des "bonnes bactéries".

Dans tous les cas, le compost est un acteur déterminant à toutes les étapes du processus de vie et de mort du cycle végétal.

Il y a le compost pour les plantations et le compost pour la production de biogaz. Ce dernier est composé notamment des herbes qui ont servi à l'étable mélangées aux excréments des animaux. Une fois que le "dôme" enterré est plein, en 8 semaines, le surplus s'évapore en gaz et sert à cuisiner.

Un produit inventé par une entreprise japonnaise est ajouté à tous les composts. Il s'agit de l' "effective microorganisms" (EM), de bonnes bactéries créées à partir de composants locaux. Chaque pays a une composition spécifique.

Voici le lien de EM-france : ICI

Ce produit peut aussi être utilisé pour nettoyer à l'intérieur et l'extérieur de la maison.

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Bylakuppe est le 2ème plus grand territoire tibetain hors du Tibet après Dharmashala. Nous avons pu visiter le temple bouddhiste dit le le Temple d'or. Une merveille!

A l'intérieur et sur le côté...

Il est partout écrit de garder le silence...Je vous laisse imaginer l'ambiance avec les visiteurs indiens!

A l'intérieur...

Voici une partie du plafond...

A proximité de Bylakuppe, nous avons eu la chance de rendre visite au Père Joy, responsable d'une école catholique qui accueille 2300 enfants de la maternelle à l'université. Les classes sont en moyenne composées de 70 enfants! L'ambiance y était exceptionnellement studieuse...même en maternelle !!!

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Nayati a participé à la préparation du nouvel an.

Nous avons attendu minuit autour du feu, un beau moment de partage universel.

Avant de quitter Rainforest retreat, nous souhaitions faire la connaissance du magnolia âgé de 800 ans. Nous vous laissons deviner l'émotion...

Nous partons plein de gratitude!