14 étapes
30 commentaires
Et nous voilà arrivés au Mexique après la Transatlantique en voilier et le Guatemala. La 1è partie (AmériqueduSud) de ce projet de voyage Panaméricain est aussi à retrouver dans nos autres carnets.
Août 2022
160 jours
Partager ce carnet de voyage

Voici une ambiance sonore pour accompagner la lecture de cet article (avant, pendant ou après, à votre guise) : Ambiance sonore Bacalar [Soundcloud]

[ 7 - 10 juillet 2022 ]

Après quelques heures de négociations à la frontière sur le nombre de jours que voudra ou ne voudra pas nous donner la dame pour notre visa mexicain, on finit par entrer en territoire mexicain avec un tampon de 5 mois et quelque (au lieu de 6 !) sur notre passeport. À nous le Mexique (pays qui fait environ 4 fois la superficie de la France) ! On entame notre découverte par l'est du pays : la péninsule du Yucatán, bordée par la mer des Caraïbes.

On passe quelques heures à Chetumal, ville frontière pas désagréable pour une fois (le temps que Clément aille retrouver une voyageuse qui a récupéré son drap de soie oublié sur l'île de Caye Caulker au Belize...) avant de prendre la direction de Bacalar, notre première étape mexicaine. C'est une ville située dans la région du Quintana Roo, qui est connue pour sa lagune aux "7 nuances de bleu". C'est une véritable merveille, habitée par des stromatolithes (des quoi ??? ça ressemble à des blocs de pierre, c’est dur comme de la pierre, mais c’est vivant. Appartenant aux fossiles les plus anciens, ils recyclent des éléments, font de la photosynthèse. On peut considérer que les stromatolithes sont à l'origine de la vie sur Terre.) dont les abords sont presque tous privatisés (ça donne de jolies photos tous ces pontons mais c'est un peu dommage pour les habitants notamment).

On arrive de nuit mais la chaleur nous accompagne jusqu'à notre hostel où on plante la tente au milieu de leur grand jardin. On sait qu'on repassera par ici dans quelques semaines alors les prochains jours à Bacalar seront rythmés par les baignades, les balades dans les rues, nos premières découvertes culinaires mexicaines (ça piiiiiiiiiique !) et culturelles... C'est un rythme qui nous correspond parfaitement et on savoure ces jours de détente au soleil (malgré l'omniprésence des moustiques) !

On serait bien resté encore quelques temps au bord de cette merveille mais une nouvelle aventure nous attend alors c'est en tendant le pouce qu'on se rend vers notre prochaine destination, l'île de Cozumel. C'est Luis, qui s'arrête et qui nous dépose quelques heures plus tard aux pieds du ferry, nous faisant promettre de passer chez lui à notre retour.

Voici une ambiance sonore pour accompagner la lecture de cet article (avant, pendant ou après, à votre guise): Ambiance sonore Cozumel [SoundCloud]

[ 10 juillet - 17 juillet 2022 ]

Après avoir traversé la jungle pendant des heures en voiture, Luis notre chauffeur d'autostop, nous dépose dans le centre ville de Playa del Carmen, station balnéaire de la Riviera Maya (la partie la plus touristique du Mexique). On passe 1h dans les rues et on n'est pas mécontents de ne pas y rester car ça ressemble vraiment à Disneyland. On monte dans le ferry direction l'île de Cozumel, à une heure des côtes où on a rendez-vous dès le lendemain avec Jeff, Français installé depuis presque 2 ans sur l'île. On va passer une semaine studieuse car nous venons y préparer notre niveau 1 de plongée, avec formations théorique et pratique au programme.

Sans suspense, après 4 jours de formation, on a obtenu tous les deux notre niveau 1 de plongée :

Quand on n'est pas en train de regarder des vidéos théoriques sur la plongée ou sous l'eau à observer les merveilles du monde marin, on prend le temps de se balader sur l'île, à pied ou sur notre fidèle destrier (avec beaucoup de classe...).

On a bien profité de cette semaine insulaire, mais maintenant il est temps de quitter notre île car des retrouvailles arrivent... D'abord on se rend chez Luis, à Playa del Carmen où on est reçus comme des rois : plage, soirée pizzas, aprèm piscine et barbeuc... Le hasard fait bien les choses : on est super heureux d'être tombé sur Luis. On fait aussi un rapide passage dans la rue principale de Playa del Carmen le soir et on est complètement abasourdis de l'impact du tourisme : rue commerciale +++ avec tout ouvert et allumé jusque très tard, des femmes dans des boîtes qui dansent toute la nuit pour attirer les clients, des animaux sauvages drogués pour être pris en photo avec les touristes... et une file continue de milliers de visiteurs. On se demande si on est les seuls à ressentir ça mais on s'en va très vite.

C'est à bord de notre petite voiture de location qu'on prend la route vers Cancún, où on récupère une nouvelle partie de l'équipe qui nous rejoint pour les 3 prochaines semaines, à la découverte de la péninsule du Yucatán et d'un petit bout du Chiapas.

Voici une ambiance sonore pour accompagner la lecture de cet article (avant, pendant ou après, à votre guise) : Ambiance sonore Yucatán [SoundCloud]

[ 18 juillet - 1er août 2022 ]

Et nous voilà 4 membres d'équipage pour les prochaines semaines à venir : les parents d'Océane sont venus nous rejoindre. On change un peu de notre rythme de voyage habituel : programme chargé qui s'accorde au rythme effréné du tourisme dans la péninsule du Yucatán. Grâce à notre petit bolide, on réussit à sortir quelque peu des sentiers battus et à profiter de certains lieux magnifiques (mais touristiques !) avant l'arrivée de la horde de touristes.

Le Yucatán, c'est la destination privilégiée du tourisme au Mexique. La péninsule située sur la côte Caraïbes, regorge de merveilles naturelles, abrite de nombreuses cités mayas et offre un climat très agréable. Cependant, elle est devenue tellement attractive que tout y est cher et il est un peu difficile d'y trouver des lieux culturellement authentiques. Sachant cela, on a surtout profité d'être ensemble, réunis à l'autre bout du monde à la découverte des beautés de la péninsule. Pour la partie plus authentique, on se réserve pour le Chiapas.

Notre itinéraire en voiture 

Dans la péninsule du Yucatán on a... compté le nombre de "tope" (dos-d'âne dont sont très/trop friands les Mexicain.e.s) ; on s'est baladés dans les ruelles de Puerto Morelos et avons profité de sa plage ; on a conduit à travers la jungle en direction du port de Chiquila où on a pris le ferry pour l'île d'Holbox ; on a campé dans la mangrove d'Holbox, infestée de moustiques prêts à en découdre ; on s'est émerveillés de nuit en sautillant dans le plancton bioluminescent ; on s'est baladés à vélo dans les magnifiques ruines mayas de Coba et on y a aperçu des singes araignée ; on a dormi dans une cité fantôme à Tulum ; on a conduit des heures sur une piste dans la réserve Sian Ka'an pour camper sur la plage de Punta Allen (malheureusement infestée de sargasses); on a vu des familles de coatis (animal de la famille des ratons laveurs) ; on a assisté à l'arrivée des bateaux pour le concours de pêche de la région ; on s'est réveillés avec un cours de yoga sur un des pontons de la lagune de Bacalar ; on a navigué à la force du vent à bord d'un catamaran sur la lagune aux 7 nuances de bleu ; on s'est baignés dans notre premier cénote, le cénote Azul de Bacalar ; on a photographié les bords de route ; entre les gouttes, on s'est baladés dans les ruelles colorées de Valladolid ; Sylvie a soufflé 3 bougies dans 3 lieux différents le 28 juillet pour son anniversaire ; on a sauté à la corde dans le cénote d'Oxman ; on a vu la vie en jaune dans les rues d'Izamal ; on a découvert le pittoresque cimetière d'Hoctún ; on a dégusté un délicieux menu à la française au son d'un concert de musique et danse traditionnelles à Merida ; on a visité des musées ; on a goûté aux spécialités locales ; on a retracé l'Histoire maya dans les ruines de l'ancienne cité d'Uxmal ; on a barboté au milieu des Mexicain.e.s dans les cénotes d'Xbatun et Dambaka...

Puis on a troqué notre bolide pour un bus de nuit, en direction d'une nouvelle région, complètement différente : le Chiapas.

Voici une ambiance sonore pour accompagner la lecture de cet article (avant, pendant ou après, à votre guise) : Ambiance sonore Chiapas [SoundCloud]

[ 1er août – 11 septembre 2022 ]

Nous voilà partis à la découverte d’une nouvelle région mexicaine, le Chiapas. Celle-ci est située dans le sud du Mexique, à la frontière avec le Guatemala et est une zone montagneuse. Le Chiapas est une région où la culture indigène est encore très forte aujourd’hui (on y parle toujours en majorité les langues mayas, qui sont au nombre de douze) et où les populations luttent pour leurs droits et leur reconnaissance depuis toujours. Le mouvement Zapatiste qui a éclaté au grand jour en 1994 est né de toutes ces revendications liées aux maltraitances, persécutions, et frustrations accumulées au XXe siècle, et ce depuis des siècles de domination des classes paysannes et indigènes. Cette région a une histoire particulière de luttes sociales et environnementales, dont les enjeux sont palpables aujourd’hui encore.

Après une nuit de bus, on débarque dans la chaleur moite de la jungle chiapanèque de Palenque. On profite de notre petite cabane et on saute dans un colectivo (petit bus local) pour découvrir une nouvelle merveille de la nature : les cascades de Roberto Barrios, perdues dans la forêt.

La petite ville de Palenque est surtout connue pour ses ruines mayas, découvertes en 1690 et révélées au grand public en 1841. Elles sont particulièrement impressionnantes puisque ce sont les premières sur lesquelles on peut monter depuis notre arrivée au Mexique et ainsi, admirer la vue panoramique sur l’ensemble des constructions mayas qui forment la cité de Palenque. Ce qui est particulièrement incroyable sur ce site c'est qu'il est au cœur de la jungle et que sous cette jungle se cache encore 90 % de la ville antique non excavée. Comme plusieurs grandes cités mayas (Teotihuacan, Chichen Itza, Ux'mal, Kalakmul, Tik'al, Copán...), cette cité, fondée sous le nom Lakam Ha au IIe siècle av. J.C., a dominé une importante région maya (du Mexique jusqu'au Salvador !) lors de son apogée vers le VIIe siècle ap. J.C. sous le règne du grand roi Pakal.

Après cette parenthèse dans la jungle humide, on reprend la route à travers les montagnes habitées par des communautés pour rejoindre la ville de San Cristóbal de las Casas. Cette route a mauvaise presse car elle est très régulièrement bloquée par des groupes qui protestent contre l’État. C’est cependant sans encombre qu’on arrive dans cette petite ville haute perchée (2200 m d’altitude) et on sent tout de suite qu’on va beaucoup s’y plaire.

La météo change totalement : le soleil cogne fort mais l’air est frais et chaque jour, il pleut des cordes de l’après-midi jusqu’à la nuit. L’architecture de la ville est de type colonial, mais elle a ce petit quelque chose en plus. Les rues sont colorées et les murs parés de murales (graff) militants dénonçant les abus du pouvoir, l’emprise des multinationales sur les terres indigènes (#cocacola…), les disparitions politiques, les exécutions arbitraires… on trouve de nombreuses boutiques et lieux alternatifs, il y a de la musique à tous les coins de rues… On sent que c’est une ville qui vit et a beaucoup vécu.

On en profite aussi pour aller visiter les alentours : le vertigineux Canyon del Sumidero, les 6 cascades d’un bleu turquoise del Chiflón, les petits villages de Chiapa de Corzo et Comitán de Domínguez, le marché de la communauté de San Juan Chamula (où prendre les gens en photo est interdit)…

Et après 3 semaines de route partagée, il est temps pour la moitié de l’équipage de continuer vers le Nord quelques jours avant de rentrer en France. On est tristes mais heureusement pour nous, l’aventure continue. On améliore notre connaissance de la ville et ses alentours, on rencontre d’autres voyageurs, on savoure la présence de la gastronomie internationale… Mais on profite surtout de l’animation de San Cristóbal pour en apprendre davantage sur les enjeux de la région et l’histoire des communautés. Et après quelques temps et quelques formations, on part pour deux semaines apporter notre soutien à une communauté en tant que Bricos (observateurs des violations des droits humains). On vous en reparlera plus amplement dans quelques temps, mais d’ici là vous pouvez aller vous renseigner sur internet car cette cause a besoin de visibilité à l’internationale. On peut vous dire qu’on a vécu deux semaines très intenses, qu’on est sans voix face au courage et à la détermination de ces communautés qui luttent pour leurs droits et leur autonomie et qu’on rêve avec eux que l’impunité cesse. Le retour à San Cristóbal à une saveur quelque peu particulière, et on s'occupe l'esprit en vadrouillant dans les alentours (parc del Arcotete, visite du lieu alternatif et écologique AlterNatos...).

C’est le cœur lourd qu’après un mois à San Cristóbal, on décide d'enfiler de nouveaux nos sacs à dos en direction d’une nouvelle région, la voisine plus ensoleillée : Oaxaca et sa côte Pacifique.

Voici une ambiance sonore pour accompagner la lecture de cet article (avant, pendant ou après, à votre guise) : Ambiance sonore de la côte Pacifique à la vallée de Oaxaca [SoundCloud]

[ 11 septembre - 25 septembre 2022 ]

Depuis San Cristóbal, on se met en route avec aucune destination en tête, seulement une direction : celle de la côte Pacifique et du soleil. Ce qu'on ne sait pas c'est que la journée va être longue : nos plans de stop ne fonctionnent pas comme on le souhaiterait, la route est très longue et sinueuse, on se retrouve dans des petits villages perdus (et on réalise qu'on est sur une route migratoire vers les États-Unis puisqu'on voit de nombreux jeunes hommes avec leur petit sac à dos réunis dans ces villages... ou quand la réalité te rattrape !), la pluie s'invite et finalement on arrive en bus, de nuit, sous une pluie battante, sans hébergement dans la ville pétrolière de Salina Cruz. Mais on se concentre sur les points positifs : on a atteint la côte et on trouve une chambre toute simple chez un petit monsieur à côté du terminal de bus.

On est fatigués, on a un peu de mal à se remettre de notre expérience dans le Chiapas et on est réellement en manque d'un climat plus chaud alors on décide de s'écouter, de faire simple et de changer nos "non-plans" : on prend un billet de bus pour l'une des stations balnéaires touristiques de la côte Pacifique, Puerto Escondido.

Avant notre bus, on part se balader dans la ville de Salina Cruz et ses plages aux vagues gigantesques (la côte Pacifique de l'Amérique latine est connue pour être plus dangereuse car les courants et les vagues y sont beaucoup plus fortes !).

Pour continuer dans notre lancée quant à l'apprentissage de la patience, nous voilà à attendre de nouveau pendant plus de 3h notre bus. C'est donc de nuit que nous arrivons dans notre petite auberge du centre ville de Puerto Escondido et c'est après une grasse matinée qu'on part le lendemain, à la découverte de cette station balnéaire. Et notre objectif est atteint car à peine descendus dans la rue on peut dire (et sentir) : mode vacances activé ! On est agréablement surpris de réaliser que nous sommes dans une partie très authentique de la ville et que la masse touristique se concentre dans une nouvelle zone, à une petite dizaine de kilomètres de là. De notre côté, on file vers une plage où il est possible de se baigner, on achète une noix de coco sur la route, on se laisse bercer par les vagues, on observe longuement les surfeurs jouer dans les remous... et on se sent enfin plus légers. On passe le reste de la semaine avec un programme similaire : balade dans le centre et son marché, longues balades sur la plage qui longe toute la côte (comment ça 8kms sous le soleil = insolation ?), baignade, lecture, observation des surfeurs, pluie chaude, coucher de soleil...

Et après une semaine de crème solaire à gogo et sable dans le maillot, on décide de reprendre la route direction la vallée autour de la ville de Oaxaca. Et quelle route ! Encore une fois, on est un peu optimistes et on se lance dans une journée de stop dans laquelle on ne parcourra qu'une 60aine de kilomètres dans pas moins de 7 voitures et en un temps record de 6h... pas une réussite donc ! On se retrouve dans le village de San Gabriel Mixtepec à attendre un bus qui n'arrivera jamais car on nous apprend que la route qu'on souhaite emprunter passe à travers les montagnes et qu'avec la saison des pluies, elle est en très mauvais état. On passe la nuit dans ce petit village et on retente notre chance avec le bus de 5h30 (qui n'arrivera qu'à 7h... patience quand tu nous tiens !). Et une fois sur cette route, on est bien contents de ne pas avoir voyagé de nuit car avec une seule petite pierre comme avertissement, d'un coup d'un seul l'une des voies disparait dans le précipice, ou alors est recouverte d'une coulée de boue... Impressionnant ! Après 7h dans ce mini bus, les plans changent car un pont s'est écroulé et on continue donc pendant plus d'une heure sur une route en terre à peine assez large pour se croiser où se retrouvent obligés de passer tous les poids lourds et véhicules en tout genre... Et en plus de tout, ça change totalement l'itinéraire du bus qui devait nous laisser en chemin afin qu'on rejoigne notre hébergement pour les prochains jours... Il nous dépose donc au bord de la route avec nos gros sacs pour qu'on puisse rallier la route qui nous mènera à bon port. On saute dans un transport collectif, puis dans un deuxième, puis on traverse à pied un village, puis on reprend un bus, et enfin un dernier (et dans tout ça, on perd notre porte-monnaie, sinon ça n'est pas drôle !) et on arrive finalement à San Pablo Huixtepec, chez Sheila, Lukas et Leonel, nos hôtes Mexicano-Allemands. Ils nous accueillent pour les prochains jours dans le cadre de couchsurfing (une plateforme qui met en relation des voyageurs et des hôtes qui les accueillent gratuitement dans l'idée d'échange culturel, de passer du temps ensemble...). On reste 5 jours dans leur petite maison auto-construite écolo à débattre, à en apprendre davantage sur le Mexique, à aller acheter des spécialités locales aux différents marchés, à cuisiner, à jouer, à tresser une palissade en bambou, à se balader à vélo dans les villages du coin...

Après ces quelques jours dans une nouvelle famille du bout du monde, on reprend la route pour la ville colorée de Oaxaca de Juarez, en prévoyant déjà de revenir.

Voici une ambiance sonore pour accompagner la lecture de cet article (avant, pendant ou après, à votre guise) : Ambiance sonore Oaxaca [SoundCloud]

[ 25 septembre - 5 octobre 2022 ]

Nous voilà arrivés dans la ville de Oaxaca de Juarez (qui se prononce "OUARAKA") dont le centre historique a été déclaré Patrimoine de l’Humanité par l’Unesco. Capitale de l'état, lui même connu pour sa richesse gastronomique, artistique, historique et archéologique, Oaxaca est un véritable bijou. C'est, après le Chiapas, la deuxième région la plus indigène du Mexique et ça se ressent dans l'ambiance de celle-ci, l'omniprésence de la culture et des traditions. Oaxaca marque également l'Histoire moderne car deux des présidents qui ont le plus marqués l'histoire du Mexique en sont originaires : Benito Juarez (connu comme le héros national : s'oppose à l'aristocratie et à l'Eglise, met en place de nombreuses réformes libérales et résiste à l'invasion européenne... La ville est rebaptisée en son nom) et Porfirio Diaz (au pouvoir pendant 30ans et qualifié de dictateur. Si son mandat marque le début de la classe moyenne et du développement des investissements étrangers, une grande majorité de de la société mexicaine n'en voit pas la couleur et ses opposants sont très violemment réprimés). Au niveau culinaire, Oaxaca n'a pas de pareille et ses habitants en sont fiers : le cacao (qui se boit en chocolat chaud avec de l'eau, de la cannelle et d'autres épices), le mezcal (alcool d'Agave distillé et produit principalement dans cette région et quasiment uniquement de manière artisanale), les chapulines (sauterelles grillées et condimentées qui se mangent sur des tacos ou en apéritif), la sauce mole (prononcé "molé") (très épaisse et composée d'un certain nombre d'ingrédients : piments, feuilles d'avocatier grillées, cacahuètes, noix, oignons, graines d'anis, et du chocolat pour certaines recettes...), les différentes galettes de maïs garnies (tortillas, memelas, empanadas, tlayudas...).

Tout au long du voyage on se demande "Tu te verrais vivre ici ?". Alors que sur notre liste étaient présentes Antigua au Guatemala, Bacalar, Mérida et San Cristóbal au Mexique, Oaxaca rejoint la liste en grande gagnante ! Des ruelles colorées, des marchés à chaque coin de rue, une véritable richesse culinaire, des murales plus artistiques les uns que les autres, des traditions passionnantes, des dizaines d'édifices historiques à visiter, des patios fleuris, des stands de produits artisanaux, des musées originaux et des alentours proposant des balades entre nature, culture et Histoire... bref de quoi être conquis !

Au fil de notre séjour au sein de la ville, les rencontres et les lectures qu'on réalise nous en apprennent davantage sur comment on vit, mais aussi comment on vivait à Oaxaca. La région est connue pour sa forte culture et tous les villages qui entourent la ville perpétuent les traditions : certains sont spécialisés dans des plats typiques, d'autres sont artisans, producteurs de Mezcal ou fabricants d'Alebrijes (ce sont de petites sculptures d'art populaire mexicain - en bois ou en papier mâché selon la région, aux couleurs vives et prenant la forme de créatures fantastiques, qui selon la légende accompagneraient les morts vers l'au-delà)... Vous l'aurez compris, il y a beaucoup à voir dans cette région riche de sa culture. Une tradition qu'il nous semble intéressant de partager avec vous est par exemple la Guelaguetza (qui signifie en Zapotèque l’action d’offrir, partager et donner). Aujourd'hui, la Guelaguetza est la fête la plus importante de Oaxaca et a lieu tous les ans à la mi juillet. Chacune des 7 régions de l'Etat est présente et danse tout au long de la fête dans sa tenue traditionnelle, tout en offrant au public des produits artisanaux locaux de leur région (café, cacao, fruits, mets traditionnels, artisanat...). Mais c'est également le nom d'un système d'échange et de soutien dans la communauté : lorsque je vais organiser un événement important (mariage, anniversaire...), je peux demander à un membre de ma famille/voisins/amis de m'offrir par exemple 300 tortillas de maïs pour le repas de la fête ; on va noter cet échange dans un carnet et lorsque le donneur organisera une fête (ça peut être dans la même année, mais aussi dans 2, 5, 10, 25 ans...), je devrai lui offrir à mon tour 300 tortillas de maïs. C'est le principe de la Guelaguetza.

Autant vous dire qu'on ne s'est pas ennuyés : on a passé beaucoup de temps à flâner dans les ruelles de la ville, à la découverte des différents quartiers dont plusieurs sont colorés grâce aux nombreux murales et aux guirlandes de "papel picado" ; on visite les quelques musées de la ville, tous plus originaux les uns que les autres ; on mange à tous les coins de rue les spécialités locales ; on en profite pour aller passer une soirée au cinéma ; on randonne dans la montagne pour aller visiter la splendide cité Zapotèque de MonteAlban ; on assiste à un atelier pour peindre nos propres alebrijes au village d'Arrazola ; on retourne chez nos amis Sheila et Lukas pour partager un après-midi ; on va visiter la petite distillerie artisanale de Mezcal de Tio René (et on repart avec une bonne bouteille sous le bras bien sûr !) ; on se dandine aux sons des différents groupes et orchestres qui peuplent les rues chaque jour... Et surtout on profite de tout cela sous un grand soleil qui participe à nous réchauffer le cœur dans cette ville qui l'a déjà gagné !

C'est donc à contre-coeur que l'on quitte cette région qu'on aime déjà tellement, mais de chouettes aventures nous attendent. On prend la route pour la capitale, la Ciudad de Mexico, où nous devons retrouver une copine (rencontrée 3 ans auparavant à Salta dans le Nord de l'Argentine) pour quelques jours dans cette ville tentaculaire.

Voici une ambiance sonore pour accompagner la lecture de cet article (avant, pendant ou après, à votre guise) : Ambiance sonore Ciudad de México [Soundcloud]

[ 5 octobre - 17 octobre 2022 ]

Nous traversons de tous nouveaux paysages pour arriver à la capitale du Mexique, México : de grandes montagnes forment des canyons arides, peuplés par des centaines de milliers de grands cactus. C'est magnifique et on est surpris de trouver ces paysages si différents de ceux qu'on vient de quitter. Et en arrivant à México c'est encore plus impressionnant : on arrive au milieu du quartier des affaires et ça fait des mois - depuis notre passage à Paris avant de partir en réalité - qu'on n'avait pas vu de gratte-ciels, et c'est complètement perturbant. On a l'impression d'avoir été téléportés très très loin ! Et puis après quelques jours d'acclimatation, on déambule sans souci dans cette ville tentaculaire.

La capitale nommée Ciudad de México (CDMX) est située à 2400m d'altitude, sur ce qui était un lac... Oui oui, vous avez bien lu ! L'une des capitales les plus peuplées au monde est située sur un ancien lac, ce qui a pour cause que celle-ci s'enfonce de plusieurs centimètres par an (et ça se voit beaucoup sur de nombreux bâtiments !). La ville aztèque Mexico-Tenochtitlan était à l'époque construite sur une île, et a été détruite à l'arrivée des Espagnols pour devenir la ville d'aujourd'hui, sur le lac qu'ils ont asséché. Il en reste un système de canaux dans le sud de la ville, à Xochimilco. En 2020, la ville était peuplée par 9 210 000 habitants, vivant dans des quartiers tous très différents les uns des autres. L'ancien se mélange au moderne, le décrépit au flambant-neuf. C'est également une ville très verte et on est agréablement surpris par l'omniprésence de la nature au sein de ses rues, dont le Bois de Chapultepec (gigantesque parc urbain de 700 ha). Toutes ces composantes font que México est une ville qui va a cent à l'heure, gigantesque, mais où il est assez simple de se déplacer, qui a beaucoup de charme quand on prend le temps de visiter ses différents quartiers aux mille attraits.

México, ça a été 3 semaines intenses mais qu'on a adoré. Changer de rythme et d'environnement c'est le propre de notre voyage et, autant nous adorons être perdus dans la nature, autant la ville et ses centaines de propositions culturelles/sociales/culinaires nous fait de l’œil. A México, on a dormi dans 3 quartiers différents : le Centre Historique, le quartier Roma et la Colonia Napoles ; retrouvé des copaines du précédent voyage : Clémence, Yann et Welane - et rencontrés de nouveaux : Christian, Felipe, Camille et Isra ; on a admiré l'art des cireurs de chaussures ; on a mangé du fromage ramené de France pour la première fois depuis 8 mois ; on est descendu à la station de métro Bellas Artes (qui est une copie de la station de métro Beaux Arts parisienne) ; on a visité une dizaine de musées (dont les plus connus sont : la maison de l'artiste Frida Khalo dans le magnifique quartier de Coyoacán et à 2 reprises, le gigantesque et incroyable Musée d'Anthropologie retraçant l'Histoire des civilisations Mésoaméricaines ; le Soumaya ; le Musée d'Art Populaire...) ; on a assisté à la cérémonie des voladores ou des danseurs de Papantla (4 hommes effectuent 52 rotations autour d’un poteau grâce à une corde attachée à leur taille et enroulée autour du mât. La corde se déroule au fur et à mesure des rotations donc les voladores descendent peu à peu, effectuant 13 rotations chacun, la tête en bas. Le nombre 13 correspond au nombre de mois dans le calendrier maya et le nombre 52 est le nombre de semaines dans une année. Une 5ème personne, le musicien est assis au sommet du poteau et joue du tambour et de la flûte. Le but de la cérémonie originelle est d'envoyer un message au dieu de la fertilité pour éviter les sécheresses en attirant son attention) ; on a glissé sur le tapis roulant permettant de voir l'impression de la Vierge de Guadalupe dans le sous-sol de la basilique Notre-Dame-de-Guadalupe, véritable lieu de pèlerinage dans cette église qui est la plus grande d'Amérique Latine ; on lèche les vitrines des robes de "quinceañera" (c'est une célébration très répandue, destinée à symboliser le passage de l’adolescence au statut de femme d’une jeune fille à ses 15ans... C'est sa présentation à la société et ça se fait en grandes pompes : robe de princesse, de très larges invitations, séance photo... De nombreuses familles s'endettent pour ne pas faillir à cette tradition...) ...

... Christian nous a emmené à la découverte de la "bouffe de rue" mexicaine (les stands de "bouffe de rue" sont omniprésents à Mexico - ainsi que partout au Mexique - et les gens viennent manger debout dans la rue, face au stand) ; on est montés au 42ème étage de la Torre Latinoaméricana pour avoir une vue à 360° sur la ville ; on a observé les grandes peintures murales de Diego Rivera ; on a posté du courrier depuis la magnifique poste du centre historique ; on s'est baladés à vélo dans le bois de Chapultepec ; on est allés écouter nos copains Chiliens du duo Apie en concert ; on a mangé pleeeeein de churros ; on a visité différents marchés ; on a assisté au magnifique ballet folklorique au Palais des Beaux Arts ; on a gouté nos premiers "pan de muerto" (c'est une brioche saupoudrée de sucre, parfois parfumée à la fleur d'oranger. C'est une recette que l'on retrouve uniquement dans le courant du mois d'Octobre et début Novembre, car c'est le pain typique de la fête des morts, utilisé pour décorer les autels des défunts, en guise d'offrande) ; on a fait réparer notre chargeur d'ordinateur dans un tout petit bouiboui ; on a pris le métro en long, en large et en travers México, chaque train comporte 2 rames uniquement réservées aux femmes et aux enfants afin de lutter contre les violences sexuelles - et Océane y est montée pour l'expérience aux heures de pointe et peut vous assurer de la tranquillité que ça apporte - même si ça n'est pas une solution en soit mais un début de moyen pour une prise de conscience/responsabilités...) ; on a assisté aux "purifications" proposées aux passants sur la place centrale ; Clément s'est fait couper les cheveux gratuitement dans une école de coiffure ; on a regardé un entrainement de "jeu de balle" (c'est un sport rituel qui a été pratiqué pendant plus de 3 000 ans par les peuples précolombiens de la Mésoamérique. On retrouve des terrains sur chacune des ruines découvertes au Mexique. La pratique reste aujourd’hui assez mystérieuse mais on sait que cette pratique s’inscrivait au cœur de l’exercice des rites mayas notamment par rapport aux sacrifices) ; on a marché, beaucoup marché à la découvertes des rues de la ville de México...

Après ces semaines citadines, on décide de faire un petit détour et de retourner au sud de la ville de México pour aller rendre visite à nos copaines Chilien.e.s qui travaillent dans un "Pueblo magico" (même appellation que nos plus beaux villages de France). On se met en route pour Puebla et Atlixco de las flores.

Voici une ambiance sonore pour accompagner la lecture de cet article (avant, pendant ou après, à votre guise) : Ambiance sonore Puebla et Atlixco [Soundcloud]

[17 octobre - 25 octobre 2022 ]

On se lance dans un nouveau petit périple en direction de la ville de Puebla, au sud est de la Ciudad de México : on marche, puis on prend un métro-bus, puis on prend un covoiturage, puis on prend un bus, puis on remarche et nous voilà enfin arrivés à Puebla. C'est un passage éclair que l'on fait puisque dès le lendemain midi on se remettra en route en direction d'Atlixco de las Flores, le petit village où vivent nos copaines Chilien.e.s.

On dépose nos sacs et on se lance à la découverte du centre historique de Puebla. On est très rapidement conquis par l'architecture de style colonial, les maisons de toutes les couleurs, les grandes ruelles piétonnes, la cathédrale qui est l'une des plus belles qu'on ait eu la chance de voir jusqu'à présent, le petit centre culturel... Et puis comme rien ne vaut des photos pour vous illustrer, on vous montre à quel point il était difficile de résister à ne pas s'arrêter pour prendre chaque façade en photo :

Après ce passage éclair dans Puebla, on prend le chemin de Atlixco où nous attendent Giani et Esteban. On passe la semaine dans leur petite maison au milieu des champs de Cempasuchil (ou Rose d'Inde, qui est le symbole de l'importante Fête des morts/Dia de muertos qui a lieu fin octobre au Mexique. Cette fleur représente le soleil et guide les âmes des défunts jusqu'aux autels érigés en leur souvenir.). On profite du temps où ils ne travaillent pas pour cuisiner, jouer, papoter, se raconter nos voyages...

Et puis quand ils partent travailler, on se balade dans les alentours, on va visiter le "pueblo magico" qu'est Atlixco et encore une fois, c'est sublime ! On a énormément de chance car la petite ville est décorée aux couleurs del Día de Muertos et est très animée : les familles viennent se balader pour admirer les décorations, les gens font la queue pour prendre des photos... On se croirait dans l'ambiance de fin décembre par chez nous !

Et puis on est invités à rendre visite à nos amis sur leur lieu de travail qui n'est autre....qu'un gigantesque parc de Noël (oui oui, au mois d'octobre ! Mais comme nos plans ont changé et que nous passerons Noël aux USA, on prend notre dose de Noël à la mexicaine...). Et on vous avoue qu'on ne s'attendait pas du tout à ça ! C'est plein d'illuminations de Noël, il y a des petites cabanes de produits artisanaux et de nourriture, il y a des animations (même que Clément a été invité à participer...), et le clou du spectacle : le show de Noël, dans lequel Giani et Esteban font partie des acteurs/chanteurs principaux. Autant vous dire que c'était vraiment très drôle de les voir jouer dans ce spectacle et de voir à quel point adultes comme enfants sont fans de ce style d'événement. C'était vraiment une expérience inédite ! Bienvenue à Brilla :

On quitte ce petit havre fleuri et les copaines pour une nouvelle aventure qu'on a attendu avec impatience : la fête des morts. On repart donc pour quelques jours en direction de CDMX, puis d'un nouvel état, le Michocán où la fête est très traditionnelle. Préparez-vous à avoir des paillettes dans les yeux !

Voici une ambiance sonore pour accompagner la lecture de cet article (avant, pendant ou après, à votre guise) : Ambiance sonore Día de muertos [Soundcloud]

[25 octobre - 5 novembre 2022 ]

Nous voilà de retour dans la ville de Mexico (CDMX) et ce, pour de bonnes raisons : les festivités del Día de Muertos / le jour des morts sont sur le point de commencer et on ne raterait ça pour rien au monde ! Au Mexique, cette fête est l'une des plus importantes de l'année pour les familles : elle est célébrée pour accueillir les âmes qui rendent visite à leurs proches et reviennent sur Terre durant cette période. Les familles érigent des autels décorés et parés d’offrandes pour la visite de leur proche défunt. Comme dans les traditions indigènes, les enfants sont d’abord célébrés le premier jour du mois de novembre et les adultes, le jour suivant. Les festivités incluent les chants et danses, ainsi que la visite et la décoration des tombes des défunts dans les cimetières mêmes. Cette fête est classée au Patrimoine Mondial Immatériel de l'UNESCO depuis 2003, pour son rapport à la culture mexicaine, aux traditions et événements communautaires.

On s'est prévu toute une épopée pour pouvoir vivre différentes facettes de ces festivités qu'on connait en contes et en images mais qu'on est impatients de vivre en vrai. On commence donc par quelques jours dans la ville de Mexico dont les rues ont été décorées pour l'occasion et qui s'apprête à recevoir plusieurs milliers de visiteurs. Plusieurs événements sont organisés : une exposition gigantesque d'Alebrijes magnifiques (regardez les de près, ce sont de véritables œuvres d'art !), des illuminations et la tant attendue parade (qui n'a lieu que depuis quelques années suite au dernier film de James Bond). On retrouve des copaines par ci par là pour assister à ces différents événements si importants pour les Mexicain.e.s qui sont tous, enfants comme adultes, déguisé.e.s/maquillé.e.s. On s'est beaucoup renseignés, on a lu, on a visité des sections de musées dédiées uniquement à ça, on a reregardé le film animé "Coco" (et on vous le conseille pour illustrer encore davantage cet article - pour petits et grands !) on en a parlé avec tous ceux qu'on croisait et petit à petit on a saisi l'importance de cette fête pour les familles, sa spiritualité... Et on a même fini par se dire qu'on trouvait ça chouette comme idée : décorer et fleurir villes et villages, maisons et autels, préparer de bons petits plats à partager et d'autres à offrir, et ce pour guider nos chers défunts en famille, une fois par an, à la lueur scintillante des bougies, à revenir partager une nuit ensemble, en leur souvenir. S'il y a un aspect de la culture qu'on a appris c'est leur façon de fêter la mort, la rendre belle et solennelle, respectueuse et aimée.

Après ces quelques jours festifs à CDMX, on prend la route de l'état du Michoacán, reconnu pour être l'un des plus traditionnels pour ces festivités. On est reçus en couchsurfing dans la ville de Morelia par Luz et ses deux petits garçons. On papote, on cuisine, et pendant qu'ils sont au travail et à l'école, on en profite pour visiter la ville qui a elle aussi revêtu ses plus belle décorations pour l'occasion. Morelia est une ville sublime en pierres blanches, et reconnue au patrimoine mondial de l'Unesco notamment pour son architecture baroque, en particulier celle de son impressionnante cathédrale (qui elle aussi a le droit à son tapis de fleurs et sciure). On observe de près et de loin les différents symboles et rituels mis en place, et on se sent vraiment chanceux de pouvoir être au cœur des festivités. Comme c'est une ville universitaire, les étudiants ont toute une partie de la ville pour s'adonner à un concours annuel de tapis de fleurs et sciure colorée... et c'est magnifique ! De nombreux autels sont installés et on peut décortiquer leur composition. Ils ont plusieurs niveaux (faisant référence à la Terre, au ciel et à l’inframonde) et comportent tous des éléments communs : des fleurs et des bougies qui permettent de montrer le chemin aux défunts jusqu'à l'autel où leurs familles ont rassemblé toute sorte d'offrandes comme des objets familiers qui représentent la personne, fruits, plats et boissons préférés du défunt ; des têtes de mort en sucre multicolores ou en chocolat ; du papel picado, (guirlandes en papier coloré perforé en forme de squelettes, crânes, scènes ou formes géométriques) ; le pan de muerto (pain brioché préparé uniquement à cette époque de l'année, symbolisant le crâne, la croix les os et l'esprit du défunt). La nourriture préparée et déposée en offrande sur les autels n'est pas consommée car il paraît que les aliments perdraient leur saveur puisque les défunts se nourrissent de leurs arômes. Et sur la partie supérieure de l'offrande sont disposés les portraits encadrés des défunts auxquels on vient rendre hommage. Ces autels sont présents dans chaque maison. Une bougie pour chacune des personnes commémorées et elles ne seront allumées que la nuit du 1er novembre. Et à la nuit tombée, on sent petit à petit l'effervescence due à la fête s'installer. L'ambiance dans les rues est à la fête : jeunes, parents, grands-parents, enfants... tout le monde est de sortie et on se laisse porter avec plaisir par cette ambiance familiale. On finit même par sonner aux portes pour demander des bonbons avec les fils de Luz.

Puis le 1er novembre on saute dans un bus direction la petite ville de Pátzcuaro, bordée par le lac du même nom. Celui-ci abrite plusieurs petites îles, dont celle de Janitzio qui est très connue pour el Día de muertos, et reçoit donc chaque année des milliers et des milliers de visiteurs lors de la nuit du 1er au 2 novembre (qui est la date où les familles apportent les offrandes sur les tombes de leurs défunts et passent toute la nuit à les veiller au cimetière). On pose notre tente dans un petit camping au bord du lac (il faut savoir que c'est une toute petite ville qui reçoit tellement de visiteurs pour ces dates que les logements se réservent d'une année sur l'autre et que ceux encore disponibles à cette date pour les personnes aussi désorganisées que nous, sont complètement hors budget !) puis on se balade dans les ruelles de Janitzio, elles aussi très décorées. On attend que la nuit commence à tomber pour se diriger vers un cimetière afin d'assister au début de la veillée des morts par les familles. On se met en route pour un petit village voisin, Tzintzuntzan. Et on n'est pas les seuls à avoir eu cette idée puisque des milliers de personnes sont déjà sur place, touristes Mexicains et familles locales. Le village est en effervescence : musique, rires, stands de rue... on est bien loin de notre vision française de la mort. On se fraie un chemin jusqu'au cimetière et on réalise que la musique qu'on entend depuis la rue principale en provient : de nombreuses fanfares sont dispersées dans la cimetière et on apprendra qu'elles sont là pour accompagner les familles pour le début de la veillée. On réussi à zigzaguer parmi la foule et à entrer dans le cimetière... et même si on s'y était préparés, on était loin du compte : à peine entrés dans le cimetière et la magie opère ! Les milliers de bougies font scintiller l'atmosphère aux couleurs orange et violet des Cempasuchils ; la musique berce les flammes qui illuminent les visages des familles veillant leurs défunts ; le palo santo (bois sacré brûlé pour éloigner les mauvais esprits) nous fait tourner la tête. On se sent tout petit au milieu de ce spectacle grandiose et solennel. On se sent presque de trop, touristes au milieu de ces traditions familiales et ancestrales. Et puis on découvre les sourires autour du partage de ce moment, la fierté devant la beauté des tombes, la coquetterie des tenues traditionnelles rapidement recouvertes par de grandes couvertures pour affronter le froid de la nuit. Et on se laisse porter, des heures durant dans cette atmosphère si particulière, avant de tirer notre révérence et laisser un peu d'espace et d'intimité aux familles. On repart avec l'idée d'aller découvrir l'ambiance dans le cimetière de la si prisée île de Janitzio, mais quand on arrive à l'embarcadère il y a une queue de plusieurs heures alors on décide d'aller se coucher, des images scintillantes/chaleureuses/spirituelles/familiales plein la tête.

Le lendemain on décide de sortir de la foule et de partir à la découverte d'une petite île du lac méconnue : l'île de Yunuen. On plie la tente et on embarque pour cette nouvelle île, petit havre de paix après tant de fourmillement. Et en quelques minutes de bateau, on arrive sur ce petit ilot. Y vit une petite communauté de 150 habitants : pêche, transport en bateau, agriculture vivrière, tourisme communautaire sont leurs principales sources de revenu. On y vit de génération en génération et on l'observe après avoir posé notre tente dans le grand jardin, en partageant un repas autour de la table familiale d'Alicia. Grands parents, enfants, petits enfants, arrière petits enfants se racontent au coin du feu les histoires du jour. Avant la tombée de la nuit, on se balade dans les petites ruelles tapissées d'herbes, on longe le minuscule cimetière fleuri où sont toujours visibles les restes des bougies et offrandes de la veille. Au coucher du soleil, l'ambiance sur le lac si vibrant quelques heures auparavant encore, est totalement apaisée.

Après une nuit au milieu des étoiles, on reprend le bateau en direction de la fameuse île de Janitzio qui, malgré son monument permettant une vue à 360° sur le lac et son petit cimetière fleuri, l'île est victime de son succès et ressemble un peu trop au Mont Saint Michel pour nous. On reprend le bateau, puis le bus et enfin le colectivo pour retourner à Morelia, retrouver Luz et ses fils pour une dernière soirée crêpes bretonnes.

Comme dans nos rêves, on s'est retrouvés plongés dans l'ambiance de cette fête si particulière. El Día de Muerto, on en avait entendu parler, ça semblait être spectaculaire. Mexico, Morelia, Pátzcuaro, Tzintzuntzan, Janitzio. C'était spectaculaire, et tellement plus ! On a passé 6 jours à fêter aux côtés des Mexicain.e.s cette fête si importante dans leur culture. Comme vous l'aurez compris, ça va beaucoup plus loin que de simple costumes et maquillages. C'est des lumières, des fleurs, des offrandes, de l'encens, des familles, des pensées émues pour les défunts. C'est une joie solennelle de se remémorer la vie partagée, les souvenirs en commun. C'est une spiritualité qui prend vie. Et dans ce cimetière, au milieu de tout ça, au milieu d'eux, on se sent enveloppés par la magie de cette fête, par les messages transmis d'un monde à l'autre. On a été très émus et émerveillés à la fois d'avoir eu ce privilège. Muchas gracias !

Voici une ambiance sonore pour accompagner la lecture de cet article (avant, pendant ou après, à votre guise) : Ambiance sonore Guanajuato et San Miguel de Allende [Soundcloud]

[ 5 novembre - 12 novembre 2022 ]

Après quelques derniers jours à CDMX et les festivités, on reprend la route en direction d'un nouvel état, davantage au nord ouest. On arrive de nuit dans la ville de Guanajuato et on ne sait pas trop à quoi s'attendre, surtout qu'on prévoit de passer la nuit dans un lieu insolite : on nous attend dans un hôtel*** pour poser notre tente dans le jardin. Et même de nuit, on sent qu'on va beaucoup aimer cette étape, et qu'on n'est pas prêts à voir la vue époustouflante qui nous attend dès le lendemain matin !

Et pour cause : à 2 080m d’altitude, nichée au creux d’une vallée verdoyante, Guanajuato est sûrement la ville la plus surprenante des villes coloniales mexicaines : son centre historique piéton est un dédale de ruelles étroites où les balcons se frôlent, de places arborées, de maisons colorées et d’opulents édifices coloniaux... et autant vous dire que ça ne ressemble à rien de ce qu'on a pu voir jusqu'ici ! La ville est une ancienne cité minière qui a permis son développement rapide et prospère. Aujourd'hui, son centre historique est classé au patrimoine mondial de l'Unesco, et on comprend vite pourquoi. On prend le temps de se balader dans les ruelles, de chercher les meilleurs points de vue pour les couchers de soleil (en téléphérique ou à pied), de visiter les musées... Tout en profitant de notre incroyable lieu de villégiature.

La ville a encore quelques décorations du Dia de muertos en place, et un de ses nombreux tunnels souterrains est rendu piéton et animé par les bars et producteurs locaux. C'est impressionnant de pouvoir circuler dans ce dédale qui couvre une bonne partie de la ville en souterrain. Au cours de notre déambulation nocturne, on a la chance d'y apercevoir un match de "lucha libre"/"catch mexicain" qui fait partie intégrante de la culture populaire mexicaine : c'est un spectacle où les lutteurs, cachés derrière leur masque, incarnent un personnage et se lancent dans des échanges acrobatiques, et où le public s'implique en encourageant/huant les combattants. Quel spectacle !

Et on décide de prendre un peu de hauteur, et on randonne au Cerro de la Bufa, qui nous offre d'un côté une vue spectaculaire sur la ville très colorée et de l'autre, une vue imprenable sur les montagnes alentours :

Après cette belle semaine reposante à Guanajuato, étape coup de cœur dans notre voyage, on prend un covoiturage en direction de l'est, vers la petite ville de San Miguel de Allende. Et sur la route on a la chance de voir passer un pèlerinage à cheval. C'est super impressionnant et grâce à nos covoitureurs, on en apprend davantage sur les pratiques religieuses du coin.

La ville de San Miguel de Allende est elle aussi classée au patrimoine de l'Unesco... et c'est pas très difficile de comprendre pourquoi : avec tous ses bâtiments de style baroque, San Miguel de Allende est un véritable bijou ! On comprend très vite que le charme de la ville en fait le lieu de villégiature de nombreux Américains du nord et on n'a jamais autant entendu parler anglais et vu de gens si bien habillés depuis longtemps. Les boutiques et restaurants sont tellement jolis et classes qu'on n'ose à peine y entrer. Et pour vous illustrer un peu : un commerce sur trois est une galerie d'art. On a envie de prendre toutes les façades en photo tellement chaque détail semble être parfaitement à sa place.

On prend le temps de se balader dans les petites rues, on rencontre un couple de voyageurs allemands avec qui on partage une journée dans des bains thermaux, on va visiter le jardin botanique...

On regarde la carte du Mexique et on réalise à quel point on est loin du Nord et qu'il nous reste beaucoup de kilomètres avant d'atteindre la frontière avec les États-Unis... C'est pas dans nos habitudes mais on accélère un peu le rythme pour pouvoir profiter d'encore quelques endroits avant que notre visa mexicain n'arrive à son terme. Alors on reprend la route vers le nord pour notre prochaine étape dans un nouvel état : San Luis Potosí.

Voici une ambiance sonore pour accompagner la lecture de cet article (avant, pendant ou après, à votre guise) : Ambiance sonore San Luis Potosí et Zacatecas

[ 12 novembre - 19 novembre 2022 ]

On s'est tracés un itinéraire approximatif pour les quelques semaines qui nous restent à la découverte du nord du Mexique. On traverse de tout nouveaux paysages et on avale les kilomètres.

Après une longue journée de bus, on arrive de nuit à San Luis Potosí, capitale de l’État portant le même nom. Elle tient son nom du Roi de France Saint Louis, saint patron de la ville, et fait également référence aux riches mines de la région bolivienne de Potosí (qu'on a eu l'occasion de visiter en mai 2019 lors de notre découverte de la Bolivie). La ville a toujours eu une place importante : pendant longtemps elle était considérée comme l'un des principaux centres miniers, agricoles, commerciaux, culturels, religieux, administratifs et politiques du pays. Aujourd'hui, c'est une ville industrielle très importante (minerai, bétail), mais peu touristique. C'est avant tout une porte d'entrée pour visiter sa région connue sous le nom de Huasteca Potosina : région verdoyante où la nature est abondante, et qui regorge de joyaux naturels (cascades, piscines naturelles...).

On a la chance d'être reçus par Leticia et son papa avec qui on partage les 3 prochains jours : on visite le centre ville, Leticia nous fait découvrir les spécialités locales, on leur cuisine des crêpes... Et puis on part à la découverte d'un petit bout de la Huasteca Potosina tous ensemble : la magnifique cascade de Tamul et ses abords féériques.

Puis après ces quelques jours riches en partage, Leticia part en vacances chez une copine en Équateur, et on décide de rester encore 2 nuits pour découvrir mieux le centre ville. On se balade au grée des rues, on visite le musée du masque (élément très important dans les fêtes mexicaines !), on découvre l'incroyable Centre des Arts (ancienne prison jusqu'en 1990. Elle a été construite en suivant le modèle architectural carcéral d'une structure panoptique : son objectif est de permettre à un gardien, logé dans une tour centrale, d'observer tous les prisonniers, enfermés dans des cellules individuelles autour de la tour, sans que ceux-ci puissent savoir s'ils sont observés. Aujourd'hui c'est un espace incroyable qui propose de très nombreuses disciplines artistiques, du soutien scolaire et abrite un espace musée dédié à l'histoire du lieu et un musée en hommage à l'artiste Leonora Carrington. Ou comment l'art a le pouvoir de libérer...).

On n'est pas complètement charmés par la ville de San Luis Potosí et on est un peu déçus de ne pas avoir plus de temps pour découvrir sa région mais si le voyage nous a appris quelque chose, c'est bien qu'on ne peut pas tout voir ni tout faire. Alors on trouve un covoiturage en direction d'une petite ville un peu plus au nord, pour faire étape avant notre grande traversée du nord du Mexique.

On arrive à Zacatecas. Elle est située à 2450m d'altitude (et ça y est, on commence à ressentir qu'on se rapproche du Nord et donc du froid de l'hiver !). La ville s'est développée comme celle de Guanajuato : elle devient un important centre minier pendant le XVIe siècle et le XVIIe siècle, jouant un rôle central dans l'histoire des mines d'argent au Mexique. Après la fermeture des mines, la ville devient un centre touristique important et son centre ville est rapidement classé au patrimoine mondial de l'Unesco. Et quand on se perd dans ses rues, on comprend très vite pourquoi. On sent à quel point cette ville est chargée d'Histoire et a une forte culture.

Au cours de notre visite du centre ville, on décide de prendre un peu de hauteur et on prend un téléphérique pour le Cerro de la Bufa. Sur celui-ci se trouve un monument de commémoration à la prise de Zacatecas, événement important de la Révolution Mexicaine de 1914.

Magnifique n'est-ce pas ? Cependant on ne vous a pas tout dit et c'est révélateur d'une réalité à côté de laquelle on peut complètement passer quand on visite le Mexique. Si on ne prend pas le temps d'échanger avec les Mexicain.e.s, cette réalité n'est pas tangible et donc on peut n'avoir aucune idée de ce que vivent les gens. En effet, depuis plusieurs décennies, cette région est menacée par la haute présence du crime organisé. Deux cartels se disputent cette région clé sur la route du marché américain de la drogue. Violence, barrages sur les routes, déplacement forcés des habitants... c'est ce que vivent les Mexicain.e.s originaires de la région de Zacatecas. Le tourisme international a déserté, mais les Mexicain.e.s continuent de venir s'y promener les weekends, et leurs habitants de nous dire "Si tu ne te mets pas dans leurs histoires, tu ne risques pas grand chose. Malgré le doute, on continue à vivre !". Et en effet, en se baladant dans les rues de cette petite ville (en suivant les recommandations de sécurité bien entendu), il est complètement impossible de s'imaginer les tensions sous-jacentes dans cette ville historique et au potentiel touristique incroyable.

Après cette brève visite de Zacatecas, on se met en route pour la grande traversée : 16h de bus en direction de Chihuahua. Vámonos !