Balade avec notre fourgon aménagé en suivant l'Allier et la Loire.
Septembre 2022
20 jours
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Publié le 14 septembre 2022

Vichy, ville hantée par les fantômes d’un passé sombre et pesant, est pourtant parvenue à sortir de l’ombre et du brouillard. La mémoire de l’histoire pourrait accabler les murs de la cité, l’abandonnant aux rives de l’Allier, comme une barque échouée de par son bois pourri. Pourtant, cette période troublée ne fût qu’une douloureuse étape. D’autres ont émaillé son chemin, laissant derrière elles, une douce harmonie faite d’eaux que l’on prend, de canotiers et d’ombrelles, d’opéras, de tables de jeux, de palaces et de villas magnifiques.

Lac d'Allier 

Le passé se promène dans Vichy, il habite les rues, les balcons, les parcs. Se promener sous la sublime galerie qui encercle le parc des sources, c’est prendre les pas des curistes fortunés, qui, une fois les eaux prises, aimaient à déambuler pour se rendre jusqu’à l’opéra, faire halte à la confiserie ou profiter des ombres des grands platanes.

Le casino 
L'opéra 

Vichy est élégante, paisible, bourgeoise. Il faut lever la tête quand on arpente les rues de la ville. C’est une enfilade de somptueuses demeures, de palaces et de villas, rivalisant de détails dans leurs façades datées et signées d’architectes. Napoléon III fût le découvreur de Vichy. Il décida que Vichy serait une des premières villes thermales d’Europe. Il y apporta une route digne de son projet, une gare, fit construire casino et opéra, et la dota de tout ce qui fait la splendeur d’une ville d’eaux. De sa présence insistante et répétée naquit une architecture éclectique, destinée à recevoir les curistes de plus en plus nombreux, et la haute bourgeoise parisienne, curieuse de connaître ce petit bout de France tant apprécié de l’empereur.

L’ombre de la marquise de Sévigné, la silhouette de Letizia Bonaparte (mère de Napoléon 1er), les tragédies de Sarah Bernhardt, glissent sur les boulevards, où calèches et cabriolets ont disparu.

L’héritage de cette belle époque est visible partout dans Vichy. Les parcs verdoyants accueillent familles, amoureux, musiciens et étudiants. Les étonnants chalets construits pour Napoléon III et la suite impériale. Les maisons de style anglais faites pour le bien être des officiers de l’empereur. Le charme, parfois désuet, toujours agréable de Vichy, se déroule devant nous, au fur et à mesure de la visite, en un tapis rouge souple et délicat.

Les chalets 
Les palaces 
Les villas 

A l’angle d’une rue, se dresse une façade insolite, presque surchargée. Une maison rehaussée de deux tourelles qui fût la maison natale du célèbre grand reporter, le journaliste Albert Londres. Une belle exposition est visible à l’intérieur, complétée à l’accueil, par les dires de charmantes dames, laissant planer le doute sur les circonstances de la mort du grand reporter lors de l’incendie du paquebot qui le ramenait en France, porteur de documents des plus secrets.

Maison Albert Londres 
Le kiosque à musique 
La galerie en fer forgé et bois 
Le hall des sources 
Le hall des sources 
Source des Célestins 
L'église Notre Dame des malades 

Les petites guinguettes des bords de l’Allier vous emportent au cœur d’un tableau d’Édouard Manet. C’est d’ailleurs dans l’une d’elles, après avoir parcouru à vélo la boucle des îles, que nous nous installons pour un peu de repos. Le calme y règne. D’autres cyclistes y font halte pour quelques minutes, profitant du soleil, du parfum de l’herbe foulée, et du silence.

La boucle des Isles à vélo 

Vichy aura été une très belle étape sur notre route. Deux jours entiers nous ont permis d’apprendre à connaître cette petite cité de quinze mille âmes, qui accole à son nom, des carottes, un tissu, une pastille, une marque de soin, et bien entendu, des eaux bienfaitrices.

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Publié le 20 septembre 2022


Se promener dans Moulins, c’est picorer à droite à gauche, dans des périodes de l’histoire datant du Moyen âge, de la Renaissance ou de la Belle époque.

Pour parvenir jusqu’à la ville, il faut traverser le pont Régemortes qui enjambe un Allier tout en largeur, dont les eaux capricieuses et translucides glissent joyeusement.

La place d’Allier ouvre le bal. Tout en longueur, commerçante, animée, elle est le cœur de la cité. Un petit kiosque jouxte un fragile carrousel aux chevaux de bois figés, tandis que plus loin, le marchand de crêpes régale les palais. Tout au bout de la place, une façade attire l’œil. C’est le Grand café, une institution depuis 1899. Cette brasserie de style art nouveau a conservé sa décoration, balcon où se tenait l’orchestre, jeu de miroirs, verrières, plafonds peints par Auguste Sauroy. René Fallet et son ami Brassens y partagèrent de bons verres et de bon mots. Gabrielle Chanel y vint souvent. Alors pensionnaire à l’institution Notre Dame, la jeune Gabrielle poussa la chansonnette dans un café concert de la ville, la Rotonde, interprétant une chanson intitulée «Qui qu’a vu coco dans le Trocadero». Une chanson qui fit son succès et son prénom ; C’est ainsi que naquit Coco Chanel. Plus tard, toujours à Moulins, elle fit ses premiers pas dans la couture, avec la suite que l’on connaît.

Le Grand café 

La montée vers la cathédrale Notre Dame se fait par des petites rues aux maisons basses. La cathédrale impose sa masse gothique. Des personnages étonnants encerclent le soubassement des pentes du toit, avec des gargouilles aux visages successivement angéliques et diaboliques. L’utilisation de la pierre de lave noire de Volvic, mélangée au calcaire blanc, surhausse le tout d’une touche quasiment avant-gardiste, courant pourtant, et bien entendu, inconnu à l’époque.

La cathédrale 

Un parc public la sépare d’une maison remarquable à l’histoire tout aussi remarquable : la maison Mantin. Louis Mantin a reçu fortune de ses parents et grands-parents, ébénistes de père en fils. Après avoir été successivement avocat, puis sous-préfet, il rentre à Moulins, sa ville natale, pour y vivre de ses rentes. Là, en 1851, adjacente au château des ducs de Bourbon, il se fait bâtir une maison d’architecte, haute de trois étages, d’une surface de près de trois cent mètres carrés. Sorte de villa balnéaire dotée d’une tour moyenâgeuse, la maison bénéficie de l’électricité, du téléphone, et recèle une impressionnante collection éclectique de mille objets rapportés de voyages. A sa mort, en 1905, il lègue la maison à la ville de Moulins. A certaines conditions cependant : cette maison devra être transformée en musée, afin que le public, cent ans après sa mort, puisse encore découvrir l’habitation d’un bourgeois du XIXème siècle, et que les travaux de transformation soient réalisés et achevés dans les cinq ans de sa mort, sous peine de voir la maison revenir à sa légataire universelle. La commune de Moulins accéda à ces deux requêtes, et le musée vit le jour dans les temps. Près de 117 ans plus tard, on visite toujours la maison de Louis Mantin, et l’on savoure toujours avec étonnement son décor intérieur aux milles influences.

La maison Mantin 

Collée à la maison Mantin, on découvre le pavillon Anne de Beaujeu, également connue sous le nom de Anne de France, pour avoir été à la tête des destinées du pays, en qualité de régente de Charles VIII. Sa destinée, sa lutte pour sauvegarder sa régence, son affirmation en tant que femme et femme d’état, lui ont valu une place importante dans l’Histoire de France, et donc dans celle de Moulins.

Le trésor de Moulins se lit sur trois panneaux de bois, c’est le triptyque de la vierge en gloire, peint par Jean Hey, plus connu sous le nom du «maître de Moulins». La particularité de ce tableau est de faire apparaître à la droite et à la gauche de la vierge, les donateurs de l’œuvre : Pierre et Anne de Bourbon et leur fille Suzanne (Anne de Bourbon est Anne de France). Pour admirer ce chef d’œuvre, il faut se rendre dans la sacristie de la cathédrale où il est exposé aux curieux et aux croyants.

On ne peut quitter Moulins sans se rendre au centre national des costumes de scènes (CNCS). Une exposition permanente a pour sujet Rudolf Noureev. On fait connaissance avec ce sublime danseur, adulé, parfois controversé, ayant fuit sa Russie natale, pour exercer son art en Europe, où il imposa très vite, à tous, sa vision personnelle de la danse. Le centre s’est vu doté d’une partie de la collection Noureev, don du danseur lui-même, de costumes de scène, collections, meubles et instruments de musique.

Dans l’autre partie du bâtiment, l’exposition «Molière en scène», nous transporte dans les pas de Jean-Baptiste Poquelin. C’est éblouissant. De par les nombreux costumes présentés. Sganarelle, Harpagon, Scapin, le bourgeois gentilhomme, le malade imaginaire... tous se succèdent en une joyeuse mise en scène de son et lumière, rehaussée par les images des innombrables adaptations théâtrales et télévisuelles (Michel Bouquet, Louis Seignier, Claude Brasseur, Jérôme Deschamps …). Un vrai régal pour les yeux.

A la sortie, nous sommes surpris par une averse en rien théâtrale.



Sur la route, nous faisons une halte à Souvigny, pour arpenter les jardins fleuris du prieuré clunisien, ainsi que l’église Saint Pierre et Saint Paul, nécropole des ducs de Bourbon, abritant, chose rare, une exposition de peintures et de sculptures, aux influences diverses et colorées.

Prieuré de Souvigny 

Deux heures plus tard, nous apercevons la cathédrale de Bourges, brillant sous un beau soleil.

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Publié le 25 septembre 2022
Jacques Cœur 

«A vaillants cœurs, rien impossible», telle est la devise de celui, grand argentier du roi, superintendant de la cour de Charles VII, qui a laissé ici, une empreinte historique. Cour Jacques Cœur, rue Jacques Cœur, lycée Jacques Cœur, et bien entendu, le palais Jacques Cœur, se retrouvent dans la ville autour d’une magnifique et imposante cathédrale gothique.

Quelques marches d’escalier permettent de gravir la butte qui mène tout droit au pied du palais Jacques Cœur. Nous sommes devant un bâtiment qui se veut la représentation de la richesse de son propriétaire. Les architectes, répondant à la volonté de leur commanditaire, au travers de cet édifice, affichent résolument le luxe et la réussite. La façade est travaillée, ciselée, ornée de frises en dentelles de pierre, de personnages énigmatiques, de rosaces. La puissance économique de Jacques Cœur est ici étalée au grand jour. Il en est de même, dès que l’on pénètre les lieux. De grandes pièces étudiées pour recevoir, festoyer, prier, étudier, se succèdent sur trois étages en un labyrinthe de couloirs, alcôves, et autres corridors. Le décor y est soyeux, délicat, agréable. Un palais, véritable miroir de la richesse «adroitement» accumulée, et qui vaudra à Jacques Cœur, sa disgrâce, son emprisonnement, et sa fuite sous les cieux italiens.

Le palais Jacques Cœur 

A la sortie du Palais, nous remontons la rue commerçante, dite rue moyenne, pour parvenir à une large place qui s’ouvre en perspective, sur la Cathédrale Saint-Étienne, éclairée par la lumière d’un généreux soleil. Un véritable vaisseau de pierre, gothique à souhait, qui repose, solidement ancrée à la place Dolet.

La cathédrale Saint-Étienne  

A quelques pas s’ouvre un jardin, méthodiquement et minutieusement encombré de mille fleurs et massifs, rivalisant de couleurs, terminé en un sous-bois apaisant. C’est le jardin de l’archevêché. Il vient mourir au pied de l’enclos de l’ancien archevêché.

Le jardin de l'archevêché 

La visite de Bourges s’organise comme la coquille d’un escargot, pour se poursuive un peu plus loin, tout au long de la rue Bourbonnoux. Cette rue commerçante propose un saut dans le passé, avec sa succession de maison à colombages, véritable palette de couleurs, ses devantures de bois, ses pavés inégaux, ses enseignes d’un autre âge.

Au bout de la rue, nous attend un chemin, et au bout du chemin, un petit pont qui enjambe un canal tranquille où s’ébat une famille de canard à col vert. C’est le marais de Bourges. Lieu remarquable et étonnant de par sa position à l’orée du centre ville. Le sentier serpente, jouant avec les rives d’un canal aux eaux vertes, à la tranquillité presque enivrante. Là des jardins maraîchers joyeusement décorées, aux diverses inspirations, ici, le mur des poètes, plus loin, un personnage de contes pour enfants se lèche les babines, encore plus loin, quelques barques à fond plat abandonnées à l’eau montante. Une promenade pleine de rebondissements, accompagnée par la musique et le chant des palmipèdes.

Le marais de Bourges 

Revenus en centre ville entre chien et loup, nous faisons étape, au café branché «l’incontournable», pour déguster un petit Sancerre, vin de région, avant de retrouver le fourgon, pour une nuit douce et déjà fraîche.

Café L'incontournable 
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Publié le 26 septembre 2022

Nous voici arrivés à Vouzon, chez nos amis Marie-Hélène et Frédéric, qui seront nos hôtes, pour quelques jours. A partir de leur maison, qui sera notre point d’encrage, nous allons pouvoir, avec eux, rayonner dans la région. Sur notre carnet de route, villages, châteaux, sites classés, forêts domaniales...

Orléans

A tout seigneur tout honneur, c’est Jeanne d’Arc, qui nous ouvre la route à Orléans, avec sa statue trônant sur la place du Martroi, son étendard flottant dans le vent de ses conquêtes et victoires.

Jeanne d'Arc 

A deux pas se dresse le joyaux de la ville, la cathédrale Sainte Croix. Avec son style des plus gothique, elle véhicule une histoire dont les héros se nomment Clovis, Robert le pieux, fils de Hugues Capet, Louis VI le gros, Henri IV, Charles X, Louis XIV, Louis XVI… Elle fût témoin de mille faits historiques et peu de cathédrale peut s’enorgueillir d’un passé tel que le sien. On reste sans voix devant cette merveille architecturale. Les tours, hautes de quatre vingt huit mètres, sont couronnées de dentelles sculptées, et encadrent la flèche centrale de cent quatorze mètres de haut. La tête tourne à fixer le ciel que vient lécher ce vaisseau de pierre. A ses pieds, la vaste et longue rue Jeanne d’Arc s’enfonce dans le cœur de ville.

La cathédrale Sainte Croix 

Lorsque l’on pénètre dans la cathédrale, le spectacle est partout. Boiseries, frises, sculptures, vitraux, tout rivalise de finesse et de pureté. La vie de Jeanne d’Arc est contée sur une série de dix vitraux, en véritables planches de bande dessinée. La nef élancée, de style flamboyant, offre une perspective sur laquelle le regard se pose avec admiration. Lorsque, enfin nous sortons sur le parvis, le soleil éclaire les façades des belles demeures qui encerclent l’édifice religieux, en une ronde respectueuse.

Les armoiries de la ville et du Duché d'Orléans 

En cette fin de matinée, les Orléanais se pressent sur les trottoirs et dans les nombreux commerce du centre ville. Au détour d’une petite place, la maison Jeanne d’Arc, nous fait face, avec sa façade sombre, lézardée par d’épais colombages.

Maison de Jeanne d'Arc 

La Ferté-Saint-Aubin

Quelques minutes plus tard, nous voici installés à la table d’une auberge, baignant dans une atmosphère de guinguette de bord de Marne. Les saules pleureurs prodiguent une ombre épaisse, un petit canal s’écoule en silence, bordé par un sentier où des couples de promeneurs déambulent insouciants. Ris de veau aux girolles, jarret et patates au four, accompagnés d’une vin du cru, nous permettent de reprendre quelques forces, avant la visite du château de la Ferté-Saint-Aubin.

Porte de la Sologne, le village de la Ferté-Saint-Aubin privilégie son château dans sa vitrine touristique. Les premières pierres furent posées par Henri de Saint Nectaire, au XVIIème siècle. Jean Renoir y tourna son film «La règle du jeu». La visite est agréable et libre. On passe de pièce en pièce, au nombre de quinze, avec plaisir. Des combles au sous-sol, de nombreuses surprises attendent le visiteur, comme l’ancienne épicerie de la Ferté, et tous ses accessoires, déménagés ici, ainsi qu’au sous-sol, dans la cuisine, un étonnant tourne broche animé par une système d’horlogerie du XVIIIème. De temps à autres, dans cette même cuisine, la cuisinière du château vous sert des histoires croustillantes, tout en confectionnant de savoureuses madeleines offerte aux visiteurs. S’en suit, la promenade dans la cour d’honneur, et dans l’immense parc de quarante hectares.

Le château de La Ferté-Saint-Aubin 

Beaugency

A quelques lieux de là, Beaugency sera notre dernière halte de la journée. Étroitement surveillée par son imposant château, aux puissants et hauts murs, la petite ville laisse glisser tout son charme dans ses étroites ruelles.

Ruelles du joli village de Beaugency 
Le château de Beaugency 

Une belle surprise nous attend dans la cour d’honneur du château. Un duo de musiciens, mandoline et violoncelle, fait résonner les murs en un impromptu de musique baroque, accompagnant avec douceur la lente descente de l’astre solaire. Une belle heure passée en belle compagnie, dans un décor approprié. A la dernière note, la lumière du jour s’estompe respectueusement, comme pour laisser la musique achevée son œuvre méditative. Il est l’heure pour nous de reprendre la route vers Vouzon, notre port d’attache.

Une fin d'après-midi musicale 
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Pont-canal de Briare

Aujourd’hui, c’est un mélange des époques qui nous attend, à commencer par le canal de Briare.

Le canal de Briare, voici un ouvrage, pour partie, tout droit sorti des ateliers de Gustave Eiffel. Il s’agit d’un pont utilisé pour franchir la Loire. Aucune voiture ni camion ne l’emprunte, pas même un train, mais des bateaux, oui ! Six cent soixante trois mètres de long, encadré par des piliers de fer, et tout un décor ouvragé à la mode 1900, le pont canal offre aux visiteurs une promenade paisible avec ses petites guinguettes où l’on déguste produits du terroir et glaces rafraîchissantes.

Château de La Bussière

Château de la Bussière 

A quelques kilomètres, nous faisons halte au château de La Bussière. On pourrait le décrire, charmant, humble, au regard de ses voisins du pays de Loire, beaucoup plus éclatants en volume et en ouvrages d’art, il n’en demeure pas moins étonnant, avec ses communs, écuries et même un minuscule tribunal.

Le château semble flotter sur un miroir d’eau qui l’isole du parc et des forêts. Sa façade hérissée de quatre tours chapeautées d’ardoises, lui confère une silhouette élancée, dont le reflet joue avec les vaguelettes de l’étang. La Bussière est meublé de ses plus beaux atours, les couleurs chatoyantes des tentures, fresques et plafonds guident la promenade, jusqu’au troisième niveau, où les propriétaires des lieux exposent le pourquoi, et comment des travaux en cours.

Autour de la bâtisse, un superbe parc de près de soixante hectares, dessiné au XVIIème par André Le Notre, invite à promenade et contemplation.On se laisse prendre par les allées bordées de fleurs, les bords de canaux, les grands arbres, on se laisse si bien prendre que le temps n’a plus de prise. Déjà, le soleil devient beaucoup plus timide, les couleurs sont changeantes, comme pour accompagner les âmes romantiques à retrouver les humeurs du quotidien de notre siècle.

Châteauneuf sur Loire

Nous nous accordons une halte dans le village de Châteauneuf sur Loire, pays de Maurice Genevoix, dont la vie peut se découvrir au fil d’un parcours culturel organisé autour des principaux lieux fréquentés par l’homme de lettres. Châteauneuf possède de magnifiques maisons couleurs de briques, des parcs majestueusement arborés, le tout témoin de son évidente richesse passée. Ses bords de Loire s’offrent à de somptueuses villas, d’où proviennent tintements de verres, discussions et rires, en attente d’un coucher de soleil resplendissant.

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Cheverny

Lorsque l’on énumère les châteaux de la Loire, celui-ci s’inscrit immanquablement dans le trio de tête : Cheverny. Situé en Sologne Blésoise, le château de Cheverny fût l’une des premières demeures privées à s’ouvrir au public (1922).

Château de Cheverny 

A peine arrivé dans la cour d’honneur, le regard du visiteur est aussitôt happé par la large et solide façade du château. Sa pierre blanche rehaussée de toits fuselés ou arrondis, à l’équilibre architectural parfait, s’impose aux pelouses et allées de gravier parfaitement alignées.

Le hall d’entrée, s’ouvrant sur l’escalier d’honneur distribue une multitude de pièces : grand salon, salle à manger, vestibule, bibliothèque, chambre du roi et autre salon des tapisseries. Tout ici n’est qu’élégance et raffinement. Richement décoré et meublé, le château de Cheverny restitue avec délicatesse, l’atmosphère d’une époque au cours de laquelle le goût des arts, de la découverte, de l’éducation, ouvrait un avenir pourtant tout tracé. S‘asseoir sur l’un des fauteuils recouverts de soie rose devant l’une des imposantes cheminées, se laisser bercer par le tic tac lancinant d’un horloge d’un bronze ébène, fermer les yeux, et la magie opère : nous viennent alors aux oreilles, quelques notes de clavecin, le froissement d’une robe, les aboiements des chiens dans le parc... un allé simple vers le siècle des lumières. Cheverny offre du temps, et il faut le prendre, sagement, délicatement.

La promenade du parc alentour y est fort agréable. Qu’ils soient d’agrément ou potager, les jardins qui entourent le château s’allongent en une palette de couleurs jusqu’à se perdre dans le labyrinthe de verdure, autrefois jeu préféré des invités du château.

Tout au bout du parc assombri par les grands arbres, parviennent les aboiements retenus de la meute. Les chiens de Cheverny lézardent au soleil. Ils sont une trentaine, anglo-français tricolores, à attendre leur maître d’équipage, pour une chasse dans les forêts environnantes.

Un dernier regard sur la sublime façade du château, et l’on se dit qu’à bien le regarder, il nous semble l’avoir déjà vu quelque part. Il suffit pour cela de lui enlever les deux imposantes ailes situées à droite et à gauche, pour que Cheverny se transforme aussitôt en Château de Moulinsart, si cher au capitaine Haddock. Hergé c’est en effet inspiré de Cheverny pour créer la demeure qui verra défiler Tintin, Milou, le professeur Tournesol, sans oublier la Castafiore et ses précieux bijoux.


Chambord

Plus loin, nous voici devant l’imposant, le majestueux, Château de Chambord. Digne reflet du roi François 1er, il semble avoir été bâti à l’échelle de ce dernier, qui mesurait près de un mètre quatre vingt dix huit. Chambord est fait de dentelles de pierre, s’harmonisant autour de son fameux double escalier d’honneur croisé. Chambord impressionne c’est indubitable. Il fait se lever les têtes, comme dans les cathédrales, mais dans ce cas précis, était-ce pour vénérer Dieu ou le roi ?

Malheureusement pour nous, toutes les tours du château sont aujourd’hui sous bâches et échafaudages pour des travaux de conservation bien légitimes. Il n’en reste que les bâtisseurs et architectes de François 1er, ont réussi, avec Chambord, un tour de force architectural. Qui a vu Chambord une fois, conserve à tout jamais son image bien en tête.

Château de Chambord (photo Marie-Hélène Mangin), avant travaux de rénovation
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Publié le 30 septembre 2022

Blois

Remonter la Loire, le fleuve royal, c’est côtoyer une nature apprivoisée dans le seul but d’agrémenter le chapelet de châteaux, demeures, abbayes et abbatiales, implanté sur ses rives. C’est traverser des villages typiques, blottis contre petits canaux, mares et étangs. C’est emprunter des routes qui se frayent un passage dans les forêts épaisses et mystérieuses d’où surgissent, sans prévenir, chevreuils et biches, apeurés et bondissants.

La route nous dépose à Blois, sous-préfecture du Loir-et-Cher, bâtie sur les coteaux qui dominent la Loire. Cette cité fût le centre de la renaissance française. Son château royal en est un magnifique témoignage. On pénètre dans sa cours d’honneur, pour admirer ses quatre façades différentes. L’histoire entre le XIIIème et le XVIIème siècle, les courants architecturaux, les influences venues d’Europe, et les bons vouloirs des rois, ont donné ce reflet unique de l’évolution de l’architecture française. Nous sommes devant quatre monuments différents, quatre époques. Louis XII avait fait de Blois la capitale de son royaume et fait transformer la forteresse d’origine, en un palais digne d’accueillir la cour et ses réceptions. François Ier y introduisit le style renaissance, de par son escalier d’honneur qui peut faire penser à celui de Chambord, en plus modeste. C’est dans ce château que Le duc de Guise reçut les vingt trois coups de couteaux qui lui furent fatals. Gaston d’Orléans, frère de Louis XIII y apporta une touche classique.

Château de Blois 
Entrée du château 
La cour d'honneur 
L'escalier monumental 
La salamandre, emblème de François 1er  et l'hermine, emblème de la reine
Le porc-épic, emblème de Louis XII  

La cour du château propose un voyage dans l’histoire à trois cent soixante degrés. La visite de salons d’apparats, chambre du roi, chambre de la reine, salle de jeux, est faite d’enrichissantes découvertes historiques, illustrées de mobiliers et de collections adroitement présentés pour coller au plus près des évènements qui ponctuaient la vie de la cour.

Galerie des rois de Louis XII à Henri IV, portrait de François 1er et Louis XII sur son cheval
L'intérieur du château 

Vus des terrasses, les toits de la ville, gris d’ardoise, semblent se serrer au plus près, pour défendre ce joyau architectural. Des ruelles qui l’entourent, on perçoit le château comme un protecteur, qui plus est, royal.

Vue sur les toits de Blois 
La dentelle de l'architecture 

La promenade dans la ville permet de passer du quartier des arts, série de petites échoppes de création et galeries, aux ruelles bordées de maisons à colombages, décorées de statuettes de bois finement sculptées, parfois religieuses, souvent païennes. L’église Saint Nicolas, édifiée au XIIème et XIIIème siècles, embroche le ciel avec déférence, et le pont Jacques Gabriel, nous permet de franchir la Loire, pour la suite de notre journée.

La cathédrale 
Scénographie de l'escalier 

Amboise

Sous le pont Leclerc coule la Loire, pour paraphraser Guillaume Apollinaire, et il nous ouvre les portes d’Amboise, autre cité royale.

Louis XI y habita, Charles VIII y naquit et y mourut après s’être heurté le front à une poutre, Louis XII et François Ier y séjournèrent. C’est dire si la ville garde des traces du passage de ces royales personnes : le château et ses remparts, la chapelle royale Saint-Hubert, l’orangerie, les jardins panoramiques.

Plus loin, laissant dernière nous les ruelles pavées, et la belle animation des terrasses de cafés et restaurants, par une rue en pente, nous arrivons au domaine château du Clos Lucé, connu pour avoir abrité, à la fin de sa vie, Léonard de Vinci. Peintre, ingénieur, architecte, inventeur, naturaliste... on ne sait comment vraiment définir ce génie italien, venu ici à la demande de François Ier, y faire ce que l’on pourrait aujourd’hui appeler une résidence d’artiste.

Le château de briques rouges s’installe tout en finesse à l’aplomb d’un jardin, et d’un parc voués à la promenade et à la réflexion, lieu des plus propices pour un esprit créatif comme l'était celui de de Vinci. L’ombre de l’auteur de la Joconde plane dans toutes les pièces et les recoins d’un château aux belles dimensions, aux atours modestes et raffinés, qui fût la résidence de plaisance des rois de France, notamment François 1er qui y passa une partie de sa jeunesse.

Le Clos Lucé 

Une succession de salons, salle de travail, chambres, dont celle de de Vinci, témoignent de la richesse de ce lieu. Les inventions de Léonard se découvre dans le sous-sol, comme pour rendre compte du travail de l’ombre, mais également dans les bâtiments annexes et jardins, tels ce portrait géant de Mona Lisa, accroché aux arbres. Sur les pelouses, sur les bancs, sur les chaises longues, les promeneurs font halte, livres ouverts, se laissant emporter avec délectation, sous les derniers rayons du soleil, vers des aventures faites de complots, d’amours défendus et d’inventions prémonitoires.

Les salles où vécut Leonardo da Vinci 
Le parcours artistique dans les jardins 

La route du retour traverse les forêts de Sologne, lourdes de l’obscurité naissante, traversées par l’ombre fulgurante d’élégants cervidés.

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Château de Chamerolles

Château de Chamerolles 

Certes, les dimensions du château de Chamerolles ne lui permettent pas de concurrencer ses voisins, loin s'en faut. Il fût bâti par Lancelot du Lac 1er (pas celui de la légende d'Arthur et des chevaliers de la table ronde), au début du XVIème, à l'aube de la renaissance.

On pénètre dans le château par son pont levis à double entrée (piétons d'un côté, chevaux et voitures de l'autre), qui donne accès à une cour intérieure, encadrée de bâtisses à deux étages aux murs de briques rouges.

L'entrée et le pont levis 

Encadré de quatre robustes tours, le château s'organise en carré autour de sa majestueuse entrée. Sa visite est originale, guidée qu'elle est, par parfums et essences.

La cour d'entrée 

La promenades des parfums vous précède dans chaque pièce décorées avec minutie afin de retranscrire au plus près, la vie du sieur Lancelot et de ses descendants. Une très belle et rare collection de flacons des plus grands parfumeurs s'étire jusqu'aux combles, présentant les plus étonnantes créations.

Les intérieurs 

Parfums, fleurs, senteurs sont ici les guides raffinés jusqu'aux jardins renaissance créés par Lancelot du Lac, deuxième du nom, à la fin du XVIème, après un voyage en Italie. C'est ici que l'on a la plus belle vue du château se reflétant dans le miroir d'eau qui l'entoure avec douceur.

Le château vu des jardins 

Yèvre-le-châtel

Nous laissons derrière nous le château de Chamerolles, et poussons jusqu'au village de Yèvre le Chatel. Serait-ce l'heure de la sieste, ou la fin de la période estivale, toujours est-il que nous trouvons un village tout à fait somnolent, aux boutiques closes, aux ruelles désertées, seulement traversées par quelques chats curieux et désœuvrés.

Au pied de l'imposant donjon, un vieux monsieur fait office de gardien. Chapeau à large bord, jambes croisées, il s'adonne à la lecture, guettant le visiteur, prêt à offrir services et renseignements. La faim nous entraîne vers le village de Saint-Benoit sur Loire où, profitant du soleil, nous nous installons sur la place centrale pour déguster des spécialités locales.


Sully-sur-Loire

Sur la route du retour, nous faisons étape à Sully-sur-Loire.

Son château se présente plutôt comme une forteresse aux formes gracieuses. Entourés d'eau, il diffuse l'ombre de ses hautes tours sur les premières maisons du village blotties contre ses murs épais.

Sully sur Loire 

Son parc fait d’entre-lacets de chemins et de pelouses, s'allonge jusqu'à se perdre dans la forêt voisine.

En cet été, le château abrite une exposition de superbes photographies de Yann Arthus Bertrand, toutefois un peu trop envahissante jusqu'à faire passer le décor intérieur au second plan.

Le Duc de Sully et quelques jolies pièces de son château 

Ce fût pour nous, la dernière visite, d'une journée bien remplie.