Il y a de multiples endroits pour visiter le plus grand monument de la planète, et le site de Hanghua est officiellement ferme aux touristes depuis quelques mois. Malgré les mises en garde, nous allons tenter de réaliser un de nos rêves : Passer une nuit à la belle étoile sur la Grande Muraille de Chine !!! Vous venez avec nous ?
La Muraille longeant les crêtes, il est impossible de trouver de l'eau. Impossible aussi d'acheter des provisions en chemin. Nous avons donc prévu 2 jours d'autonomie totale. Depuis Pékin nous partons de bon matin. Accompagnes de Kerstin, une voyageuse allemande séduite par l'idée, nous prenons un premier bus public (1h30) puis un minibus (45 mn) pour nous rendre sur le fameux site. En arrivant sur place, nous sommes saisis par la beauté du lieu, loin des artères polluées de la capitale. Les montagnes s'étendent a perte de vue et sont recouvertes par une dense végétation qu'il est pratiquement impossible de pénétrer.
Et puis il y a cette Muraille... Ne reculant devant aucun obstacle, aucune pente, aucun pic, les chinois l'ont construite en suivant la ligne de crête. Peu importe la difficulté de l'entreprise, peu importent les dangers. La folie (ou paranoïa ?) de certains hommes a conduit au sacrifice de milliers d'autres au nom de la grandeur de l'Empire, au même titre que ceux qui laissèrent leur peau en construisant les pyramides d'Egypte ou les cités Incas du Pérou.
Pour rejoindre les remparts, nous empruntons un petit sentier. Au bout de 50 m, un homme nous arrête et nous demande 2 Yuans (0.2 euros) pour continuer. Afin de faire comprendre à l'opportuniste qu'il n'a pas le droit de nous extorquer quelconque argent, nous exigeons de voir le reçu qu'il nous donnera en échange (tout en pensant qu'il n'en a pas...). Et le type nous sort trois faux reçus photocopies d'on ne sait où ! Le sifflet coupé, nous payons notre contribution au développement de la région et continuons notre chemin. Une fois sur la Muraille, après avoir grimpe une échelle de bois, la joie nous envahit : Nous y sommes ! La rando peut commencer ! Les 500 premiers mètres ont été restaurés, les dalles sont lisses, bien cimentées, ce qui n'enlève rien à l'inclinaison de certaines parties qui sont vraiment raides...
Nous rejoignons la première tour, et là stupeur ! Deux chinois nous barrent la route, l'entrée de la tour est obstruée par une porte de fortune pleine de barbelés. Un papier y est accroché :"The Great Wall is closed, forbidden to climb". L'un des gardes porte un badge sur lequel on peut lire "Manager of the Great Wall". Ils n'ont pas l'air commode et nous pointent le papier d'un air désabusé lorsqu'on leur fait comprendre que nous voulons continuer... Nous étions prévenus vous me direz...
Tout ça pour rien ? Nous sommes dégoûtés. Pierre leur propose de leur donner de l'argent mais leurs mines patibulaires se renfrognent et, agacés, ils nous repointent la pancarte. Nous posons les sacs et improvisons un sitting devant la tour, passant en revue les différentes possibilités de "secours". Il est déjà 13h, il faut faire vite...
Les minutes passent, elles semblent interminables. Le soleil au zénith cogne. Nous proposons une cigarette à nos "tauliers", ils refusent. Décidément... Nous pouvons rejoindre la Muraille plus loin, mais pour cela il nous faut faire un détour de 2 bonnes heures. Ces deux énergumènes ne vont quand même pas réussir à nous gâcher notre rando sauvage !
Nous nous apprêtons à descendre quand l'un des deux gardiens nous demande d'où nous venons. De fil en aiguille la discussion s'engage et l'atmosphère se détend. Finalement, ils nous laissent passer au tarif "exorbitant" de 5 euros par personne... En espérant que ce soit le dernier péage de la journée, nous reprenons notre lente progression sur le Mur.
La tour suivante se profile mais personne ne semble la bloquer. Pierre, quelques mètres devant, passe le premier. Plus loin, il tombe nez à nez avec un énorme serpent jaune tacheté de noir se prélassant sur un escalier. Énorme, car l'animal devait bien mesurer dans les 2 - 2,5 mètres pour 5 a 7 cm de diamètre. Le temps d'aller prévenir les filles, la bête a déjà filé, au plus grand désespoir de Pierre qui n'a pas eu le temps de prendre une photo!!!
Nous quittons la partie restaurée du Mur pour celle vraiment authentique, datant d'environ 400-500 ans. La Muraille est encore debout; par contre le chemin de ronde est envahi par la végétation et, du fait du ruissellement, la plupart des marches sont écroulées. Les 2-3 prochains kms ont l'air redoutables. Il nous faut grimper environ 600m de dénivelé, et par endroits la Muraille laisse place à une falaise quasi verticale... Trois heures d'efforts plus tard, nous élisons domicile dans une tour de guet, une centaine de mètres sous le sommet. Nous escaladons la dernière paroi sans les sacs à dos avant que le temps ne se dégrade. Nous sommes seuls, heureux de notre ballade. La vue est splendide. Les nuages filent doucement, épousant le relief des collines.
Au loin le tonnerre gronde, il se rapproche vite. De retour dans notre refuge, l'averse éclate, puis laisse place à un magnifique arc-en-ciel, quel spectacle grandiose !
Nous nous endormons des étoiles plein la tête, sauf Pierre qui a rêvé d'un gros serpent jaune !!!