Incredible India !

L'Inde du nord, de Calcutta à Amritsar.
Décembre 2006
8 semaines
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Si Bouddha est né à Lumbini sur le territoire de l'actuel Népal, il a passé la majeure partie de sa vie dans l'Etat très pauvre du Bihar en Inde. Cet état est encore l'un des plus pauvres du pays, et la corruption gangrène la région. Pour la première fois depuis 6 mois de voyage, des policiers ou militaires ont tenté de nous soutirer des "bakchichs"... Le douanier voulait des roupies pour nous tamponner le visa, 2 gardes sur une colline voulaient de l'argent sous prétexte d'assurer la protection des touristes, un militaire voulait 1 dollar pour nous avoir répété 10 fois "beautiful temple" (merci on avait remarqué !) face à un stupa que nous étions en train d'admirer... Nous avons toujours refusé ces avances un peu cavalières.

Né six siècles avant le christianisme, le bouddhisme est, contrairement à ce que beaucoup racontent en Occident, avant tout une religion et non pas une démarche philosophique. Il n'y a qu'à voir les rituels des tibétains et des népalais pour s'en convaincre. Bouddha s'appuie sur 4 vérités :

- La vie est souffrance; - le désir engendre la souffrance; - il est possible de se libérer de la souffrance en éliminant les désirs; - pour éliminer les désirs, il faut suivre la "Voie du Milieu" (Octuple Sentier), voie enseignée par le bouddhisme.

Le bout de la voie mène au Nirvana, un état d'éveil et de sérénité absolus. Car non seulement le Nirvana libère l'homme de ses souffrances, mais il lui permet également de sortir des cycles de réincarnations dans lesquels il est plongé depuis la nuit des temps. Chaque ville ou village ayant vu un événement majeur de la vie de Siddhârta Gauthama (Son nom avant de devenir Bouddha) est devenu sacré et un lieu de pèlerinage pour tous les bouddhistes de la planète (qui ne sont qu'une petite minorité en Inde).

Ainsi, des milliers de pèlerins se rendent chaque année à Ragjir. Bouddha y aurait vécu 12 années de méditation au sommet d'une des collines du village. Mais le site le plus sacré et célèbre reste Bodhgaya. Sous un arbre banian, Siddhârta y atteignit l'éveil pour la première fois. Aujourd'hui, chaque grande nation du bouddhisme y a fait construire son temple et son monastère dans lequel il est possible de séjourner. Ainsi, si nous avons dormi au monastère bhoutanais, nous aurions très bien pu dormir dans celui de la Birmanie, du Japon, du Sri Lanka... Chaque année, des délégations se pressent pour des conférences, des stages de méditation ou simplement pour se recueillir dans le temple de Mahabodi, construit à l'endroit même de l'Illumination.

Par contre, si certains touristes disent avoir été transcendés par cet endroit sacré et affirment avoir atteint, comme Bouddha, le Nirvana, nous restons dubitatifs... Selon nous, ils auraient plutôt abusé de la Ganja que forcé sur le Yoga !

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Ces premiers jours passés en Inde m'ont quelque peu déroutée. Je me réveille fatiguée, encore sous l'emprise des milliers de rêves étranges qui ont agité mon sommeil. Ai-je du mal à évacuer toutes les sensations et perceptions emmagasinées lors de mes journées ? Et pourtant ce pays présente des similitudes avec le Népal que nous venons de quitter, mais il faut se rendre à l'évidence : nous sommes bel et bien dans un autre monde. Un monde situé quelque part entre Moyen-âge, tradition, et des esquisses de leur modernité.

Mais après ces mois passés sur la route, qu'est ce qui me bouleverse autant?

Peut être la pauvreté tellement apparente du Bihar, premier état que nous avons traversé, avec ses décharges qui polluent nos yeux et nos narines le long des routes? Ou bien cette circulation incessante entre les bus bondés jusqu'au toit, poids lourds, rickshaws, cyclistes et piétons, dont l'unique chef d'orchestre semble être le klaxon? Ou encore ces rabatteurs qui nous happent dès notre descente du bus, voulant nous emmener partout et nulle part, du moment qu'ils toucheront leur commission...

Ce pourraient être aussi ces images sorties directement d'un rêve, tels ces éléphants énormes qui déboulent en pleine capitale, leurs trompe et oreilles délicatement décorées, ou bien leurs confrères les chameaux qui avancent, tête haute au beau milieu de la circulation... Sans compter les chiens errants, les macaques qui traversent à toute vitesse, et les biquettes un peu paumées dans tout ça... Les vaches sacrées qui déambulent, squelettiques, à la recherche d'une maigre denrée. Les baignades sacrées, les rituels perpétués et murmurés. Et puis ces cloches qui s'affolent à l'heure de la prière hindouiste, à peine couvertes par le chant endiablé des fidèles dans leurs micros. Les regards insistants, voire gênants, des hommes sur la "blanche" que je suis.

Tout ceci prend place sur un tableau de couleurs chatoyantes qui saturent notre vue. Les saris des femmes qui drapent leur nonchalance, les bracelets et bijoux en tous genres qui couvrent leur corps, les camions défoncés et les tuks-tuks savamment décorés. Les murs des maisons blanchis à la chaux ou peintes d'un bleu électrique, les fruits, légumes, épicés et pigments qui s'amoncellent sur les étalages des marches. Les couchers de soleil enflammés...

Vraiment, l'Inde n'a pas fini de nous dérouter...

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Tout commence au consulat de l'Inde à Katmandu au Népal. Nous y faisons une demande de visa pour 6 mois, ce qui se fait en général. Le consulat nous demande de remplir un formulaire qu'il envoie ensuite par télex je ne sais pas où. En fonction de la réponse, les autorités indiennes délivrent ou non le sésame... Lorsque nous revenons au consulat 20 jours plus tard, on nous explique que n'ayant pas eu de réponse à notre télex, la validité de notre visa sera de seulement 3 mois. Nous soupçonnons fortement nos interlocuteurs d'avoir égaré le fameux téléfax, mais nos protestations restent vaines et nous nous retrouvons avec notre visa de 3 mois en poche. Après tout, nous pourrons toujours demander une prolongation de visa à New Delhi...

New Delhi, un mois plus tard. Nous nous rendons au Ministère des Affaires Intérieures pour effectuer la demande de prolongation. Entre-temps nous avons appris qu'il est extrêmement difficile, voire impossible de faire prolonger un visa touristique. Il faut une très bonne raison, et nous pensons que le fait de vouloir travailler bénévolement pour 3 mois dans une organisation humanitaire en est une. Nous sommes donc optimistes pour la suite des événements. Nous remplissons le formulaire, expliquons brièvement nos arguments et rencontrons quelques minutes plus tard un bureaucrate indien.

"Quel est l'objet de votre visite ?

- Nous voudrions rester 3 mois de plus en Inde et obtenir un visa de 6 mois comme cela se fait généralement...

- Qui vous a dit ça ???

- Ben personne, c'est juste que d’habitude les gens obtiennent 6 mois de visa...

- Mais c'est faux ! Des fois c'est 15 jours, des fois c'est 1 mois, il n'y a pas de règle ! Et puis vous avez du lire sur votre visa que le visa touristique ne peut être prolongé ! - Oui Monsieur, mais nous voudrions rester pour travailler bénévolement dans une organisation humanitaire...

- Quoi ?! Vous voulez travailler en plus ?? Mais il est strictement interdit de travailler avec un visa touristique !!!

- Mais Monsieur, c'est pourtant ce que tout le monde fait pour aider dans les ONG...

- Ces gens peuvent avoir des problèmes, et même prendre des amendes !!!

- Donc vous ne voulez pas que nous restions 3 mois de plus pour aider dans votre pays ?

- Il est interdit de travailler avec un visa touristique, et il ne peut être prolongé. Je vous rends vos photocopies ?"

Fin de l'entretien. Il est pas gentil le monsieur et puis c'est tout. Nous irons essayer d'aider ailleurs si en Inde ils ne veulent pas de nous...

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Un peu de musique indienne pour continuer la lecture 

O voyageur bien chargé, Si dans mon autorickshaw tu veux monter, Très cher tu vas devoir payer;

Ou en chemin t'arrêter, Dans une boutique ou je suis grassement commissionné.

Mon compteur est en bon état, Mais pour toi il ne tournera pas.

Dans ton hôtel sélectionné je ne peux t'emmener,

Il a depuis longtemps brûlé, explosé ou déménagé, S'il n'est pas déjà complet!

Mais viens donc chez mon cousin, Ce n'est ni propre ni calme ni bien.

Tu paieras juste un peu plus cher, Puisqu'au passage je me sers.

O Voyageur qui a mal dormi Dans mon hôtel tout défraîchi.

Les cafards t'ont chatouillé? L'eau chaude n'est jamais arrivée?

Les toilettes ont débordé? M'en voilà bien désolé...

Laisse-moi donc te proposer Tous mes services personnalisés.

J'ai un masseur aux mains baladeuses, Un prof de yoga aux idées fumeuses,

Un vendeur de sarees de qualité douteuse, Des taux de change à conversion avantageuse.

O Voyageur affamé, Entre donc dans ma gargote te restaurer.

Lorsque l'addition te sera portée, N'oublie pas de recompter. Une erreur en ma faveur est si vite arrivée...

O Voyageur par l'Inde envoûté, Dans ton pays tu dois maintenant rentrer.

Tous ces petits ennuis ne t'ont pas appauvri.

Avec des arnaques à 10 Roupies, Les Indiens ne se sont guère enrichis.

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Aujourd'hui, ce sont les parents de Pierre qui s'y collent. Ils sont venus nous rejoindre en Inde pour faire un bout de chemin avec nous, en bus, en train, en tuktuk.... et même en chameau !! Ils nous livrent leurs impressions sur une journée de voyage.

- Le premier bonheur : celui de retrouver les vadrouilleurs, Pierre-Antoine et Anne-Laure.

- Le deuxième Bonheur : celui de découvrir l’Inde, pays aussi désarmant, qu’étonnant, que touchant. Pays aux contrastes multiples : couleurs, odeurs, ordures, belles demeures délabrées, femmes en sarees, rues grouillantes où se côtoient dans un bruit infernal de klaxon : auto-rickshow, scooters, vélos, motos, vaches, cochons, chèvres, chiens errants, chameaux, charrettes, gamins pieds nus et où s’écoulent à ciel ouvert les égouts... Nous sommes retournés au Moyen-âge. Nous sommes tombés sous le charme de sites architecturaux comme les forts, les mosquées, les temples, les mausolées tels le Taj Mahal, la perle de l’Inde.

- Le troisième bonheur : celui de partager pendant vingt jours la vie de nos vadrouilleurs.

Vous êtes prêts ? En route pour l’Aventure!

1- A leur contact nous rajeunissons de plusieurs années : sac au dos, chaussures de marche, l’inévitable bob sur la tête, la bouteille d’eau et surtout l’indispensable guide pour ne pas le nommer « Lonely Planet ». Il sera notre bréviaire. Un peu de tourisme en famille, ça faisait bien longtemps !

2- Destination : Delhi – Bîkaner: 450Kms - 16h30, nous prenons le train à la gare de Delhi et quel train !!! D’une extrême rusticité et saleté. Installés à nos places réservées, nous voici vite rejoints par de nombreux indiens rejoignant leur village après le travail. Nous nous entassons. Les échanges sont sympathiques. Etonnés, ils le sont, de voir une famille française voyager ainsi. Pendant un long moment, la voie ferrée longe des bidonvilles... Quelle misère, mon Dieu quelle misère... La nuit tombe et nous nous retrouvons tous les quatre dans le compartiment. Nous installons les couchettes, peu confortables ma foi. Beaucoup de bruit, d’arrêts, le cri des marchands ambulants, les vibrations du train de toutes parts, on croit que tout va se disloquer, le froid qui nous gagne, font que notre nuit est bien mouvementée. On essaie de dormir, on se recroqueville. Si vous avez une petite envie, mieux vaut vous retenir ! La propreté des toilettes laisse à désirer...

3- Arrivée à Bîkaner - Arrivons avec 3h de retard, il est 6 heures du matin. A peine descendus, les chauffeurs d’auto rickshaw se précipitent, nous harcèlent... 100 roupies, c’est trop ! 80 non ! 60... 50 roupies. OK pour nous conduire à l’hôtel, et nous voilà tous les 4 entassés dans ce petit triporteur conçu pour 2 ou les Indiens s'entassent à 6 ou 8!

4- Direction l’hôtel - Nous l’avons repéré sur le guide, catégorie « petits budgets ». Après une visite nous nous installons. Les chambres sont toujours très simples, sans décoration, éclairées au néon, les draps souvent d’une propreté douteuse (heureusement, nous avons nos sacs à viande). De petites bestioles peuvent nous y accueillir comme d’assez gros lézards (mais pas de danger, ouf !). Quant à la salle de bain (un bien grand mot) : une pomme de douche qui vous éclabousse, ou un mince filet d’eau, ou rien du tout, alors on nous propose un seau d’eau chaude. L’eau du lavabo s’écoule sur nos pieds. Et les toilettes ? Pensez-vous ! A la turc ou à l’occidentale, elles ne sont pas des plus modernes.

Soyez rassurés, nous nous accommodons de ce confort relatif et nous n’avons attrapé aucune maladie. Alors pourquoi payer plus cher ? C’est ce que pensent les vadrouilleurs. Un peu reposés, nous prenons un copieux petit déjeuner, café ou thé, pancake, bananes, confiture, miel... et nous voici en forme pour les visites : fort, mosquée, vieux quartiers... On nous interpelle : hello ! hello ! Nous répondons : hello ! Namaste ! On nous remarque. Les Indiens sont très accueillants et souriants, les enfants nous courent après et réclament : pen…pen…money... money... Pour tout achat ou transport, il faut marchander. Un jeu qui devient pesant, voir épuisant surtout pour nos deux vadrouilleurs qui le pratiquent depuis plus d’un mois (ou plus d'un an, ça dépend du référentiel...). Déjeuner dans un petit resto où nous nous régalons de riz accompagné de plusieurs sauces aux légumes ou au fromage, petits beignets, ceci plus ou moins épicé et arrosé de coca, d’eau ou de thé. On mange végétarien pour 250 roupies soit 5 euros pour 4.

L’après midi nous poursuivons notre visite. Pierre toujours prêt à déclencher l’appareil photo au grand bonheur des Indiens tandis qu’Anne Laure note sur son petit carnet. Nous regardons les échoppes : de véritables bric à brac, les étales de légumes et de fruits d’une superbe fraîcheur, les mouvements incessants de la rue, les vaches sacrées qui se nourrissent de plastique et de carton, les tas d’ordures, les enfants qui déambulent, les mendiants, les femmes aux sarees colorés qui accomplissent toutes tâches dans cette tenue et les multiples petits oratoires dédiés aux différents dieux.

Internet. La nuit est tombée, la ville s’éclaire et prend une toute autre atmosphère. Toujours beaucoup de va et vient, c’est l’heure de trouver un cybercafé et nous voici tous les 4 devant l’écran à donner et recevoir les nouvelles. Nos deux vadrouilleurs y passent du temps pour maintenir leur blog à jour, correspondre et se tenir au courant.

Dîner. Retour à l’hôtel, prenons le repas très souvent sur le toit en terrasse et découvrons d’autres spécialités indiennes.

Bonne nuit ! Nous regagnons nos chambres parfois sans lumière (vive la frontale!). Un bon sommeil nous permet de récupérer afin d’être d’attaque pour une nouvelle journée.

Merci à nos vadrouilleurs. Vous avez été des guides parfaits. Sans vous, nous n’aurions jamais fait ce voyage et surtout nous n’aurions jamais voyagé de la sorte (comme quoi, tout arrive). Les journées se sont déroulées ainsi durant tout notre séjour, avec autant d’intérêt et de plaisir. Nous sommes revenus enchantés de notre « grande vadrouille ».

Bernadette et Jean-Pierre

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Nous voulions observer les Tigres dans le Parc National de Sariska. Mais ça fait quelques années que plus personne n'en a aperçu la queue. On dénombrait 16 à 18 tigres en 2004 dans la réserve. Mais en 2005, le WWF s'est aperçu qu'il n'y en avait plus un seul... Surveillés par des gardes forestiers sans moyen et/ou peu scrupuleux, les félins ont été victimes de braconnage jusqu'à l'extinction.

Alors, plutôt que de passer une journée barricadés dans une jeep à la recherche d'un Roi de la Jungle inexistant, nous avons décidé de nous rendre dans le Sanctuaire de Keoladeo, dont les oiseaux migrateurs sont la principale "attraction". Ici, pas de grand prédateur, il est donc possible de se balader à pied en pleine nature et de tomber au détour d'une branche nez à nez avec des antilopes, des cerfs, des chacals, des pythons, et surtout des milliers d'oiseaux, du plus minuscule au plus grand (1.56m de haut quand même!).

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Une fois n'est pas coutume, nous laissons aujourd'hui la parole sur notre blog a un petit jeune plein d'avenir! Les parents et la sœur d'Anne Laure nous ont fait le joli cadeau de nous rejoindre en Inde pour 15 jours, vous trouverez ci-dessous leurs impressions, sous la plume du papa.

6h du matin ce 02 décembre 2006, c’est le jour J pour notre départ vers New Delhi. Après de multiples lectures, consultations, échanges et prises de renseignements, nous sommes pressés et en même temps un peu perplexes sur ce qui nous attend… Mais avant tout nous sommes ravis d’aller retrouver nos enfants. Après un excellent voyage avec Air France, nous arrivons à minuit à New Delhi où comme prévu Anne Laure et Pierre-Antoine nous attendent. Nous sommes vite dans le bain avec l’inévitable discussion pour trouver un taxi et dès l’arrivée au Star View hôtel, nous plongeons immédiatement dans l’ambiance locale : rue sale et grouillante, vaches maigres et omniprésentes, chiens errants, nombreux mendiants qui nous ont vite repérés et par-dessus tout le bruit insupportable des klaxons.

Heureusement nos hôtes nous ont concocté un super programme. La première journée est consacrée à la visite de Delhi, ses principaux monuments, à l’apprentissage des transports en auto-rickshaws (sorte de scooters carrossés à trois roues) et aussi à la découverte de la cuisine indienne. Et là c’est la bonne surprise : les cartes de menus sont extraordinairement variées, leurs plats végétariens sont excellents, tout ça pour un prix vraiment dérisoire. Puis c’est le départ matinal en train et sacs à dos vers Agra. Dès les premières minutes de voyage nous faisons la connaissance de notre voisin de compartiment, un très sympathique indien habitant à New Delhi et travaillant dans une banque à Agra. Notre hôtel à Agra est calme, superbement situé, et nous permet d’aller assister au lever du jour sur le célèbre Taj Mahal. Nous ne nous lassons pas de contempler ce superbe monument entièrement construit en marbre blanc, d’une beauté et d’une pureté extraordinaires!

Le fort d’Agra est également magnifique et nous en profitons pour aller passer une journée et visiter la "ville fantôme" de Fatehpur Sikri. Après le train, le bus pour se rendre Orchha. Un bus surchargé, très ancien d’apparence mais les freins et le klaxon ont l’air de bien fonctionner… Après cette étape, nous comprenons l’utilité de la housse sur les sacs à dos, car même dans le coffre arrière du bus, les nombreux trous dans la carrosserie sont de véritables aspirateurs à poussière ! Mais la visite du palais de Maharadja et autres monuments de la ville en valaient la peine. Notre périple se poursuit vers Khajurâho et ses célèbres temples, d’une incroyable richesse !

Entre temps nous avons goûté aux plaisirs des coupures d’électricité et au manque d’eau chaude à l’hôtel. Tout s’arrange très vite et l’hôtelier se fait un plaisir de nous apporter un seau d’eau chaude par personne, moyen très écologique pour prendre sa douche à l’ancienne !

Afin de se ressourcer un peu et de prendre un bain de fraîcheur, nous nous dirigeons vers un parc naturel en caressant l’espoir de voir un/des tigre(s) en liberté. Espoir vite déçu, mais beaucoup d’autres espèces se sont laissées approcher. Cerise sur le gâteau et après moultes tractations, nous avons séjourné dans un superbe hôtel Resort où nous étions les seuls clients ! Mais il manquait à cette découverte de l’Inde un des lieux mythiques de la religion hindoue, et c’est sans hésiter que nos hôtes nous ont accompagnés à Varanasi (anciennement Bénares) sur le bord du Gange, la cité de Shiva, une des villes les plus saintes d’Inde. Ce fut encore un nouveau choc de voir se côtoyer tous ces rites, de l’immersion dans ce fleuve si pollué à la crémation des morts sur un bûcher, sans parler de cette foule grouillante dans ce dédale de ruelles, passages étroits, escaliers, le tout dans le vacarme assourdissant des klaxons et autres manifestations...

Oui vraiment ce pays très attachant ne peut laisser indifférent tant les contrastes sont grands, les écarts de niveaux de vie importants et la tâche immense pour aider les millions de misérables. Heureusement nous avions de très bons guides en les personnes d’Anne Laure et de Pierre-Antoine avec qui nous avons partagé leur vie de vadrouilleurs et sans qui ce voyage initiatique n’aurait certainement jamais eu lieu.

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Mais qu'est-ce qui peut bien provoquer l'engouement des touristes pour les temples de Khajurâho ? Certes ils ont été construits il y a plus de 1000 ans. Mais encore ? Ils possèdent sur leurs murs de belles sculptures. Très bien, mais ce n'est peut être pas la peine d'en faire tout un foin... 5% d'entre elles présentent des particularités singulières... Bon... Allons voir de plus près puisque vous insistez.

A première vue, rien d'extraordinaire... A seconde vue non plus d'ailleurs...

Une femme dénudée se maquille, pas de quoi s'affoler... Cherchons encore !

Ha ha, ce monsieur a les mains baladeuses... Ça chauffe... OK, j'ai compris...

En cherchant mieux, dans les recoins des temples, on trouve de sacrées perles, mais celle-là je la mets en petit... Après le porno chic des clubs de strip tease parisiens, voilà que la Citrouille invente le porno culturel...

Khajurâho c'est.... chaud ! 
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Nous nous pointons à 16h en gare de New Delhi. Le train prévu à 16h30 est reprogrammé pour 18h50. Nous retournons dans Main Bazaar pour un dernier vrai repas avant les 24 heures de train pour Calcutta. De retour à la gare, le quai est bonde. Même si peu d'indiens célèbrent Noël, c'est tout de même une période de vacances, donc de transit, et donc, plus qu'à l'habitude, de bordel généralisé.

La gare de Old Delhi 

19h30, le train démarre enfin. Nous prenons place dans notre compartiment avec 4 hommes "enturbannés". Deux musulmans très pratiquants, l'un libanais, l'autre jordanien, et deux sikhs, le père et le fils. C'est un vrai casse-tête pour les sacs, tous les voyageurs étant extrêmement charges. Des bagages d'autres indiens arrivent sur ma couchette, j'ai même le plaisir de retrouver le propriétaire assis au bout de mon lit à mon réveil, chaque centimètre carre laisse libre étant immédiatement exploité...

Chaque arrêt en gare est un spectacle. Les vendeurs ambulants défilent pour proposer des samossas, du "tchai", des pistolets en plastique, beignets, cacahuètes... C'est l'occasion de partager des petits plats bon marche et d'engager la discussion avec nos voisins. Ainsi les sikhs rejoignent de la famille, idem pour un fonctionnaire fort sympathique travaillant à Delhi. Les deux musulmans vont voir des confrères au Bangladesh. 22h30, soit 27 heures après avoir quitte Delhi, nous atteignons Calcutta.

Pour le monde entier, Calcutta est la ville de Mère Theresa, celle qui a dédié sa vie à aider les pauvres parmi les plus pauvres. Bien qu'elle soit décédée en 1997, Mother Theresa est encore pressente dans le cœur de tous les Bengalis de Calcutta. Il suffit de visiter la Mother's House, l'endroit ou elle repose, au milieu du centre administratif de l’institution. Tous les jours, des dizaines de visiteurs anonymes défilent pour fleurir et se recueillir sur sa tombe. Bien que moins médiatisé, son ordre est toujours aussi actif. Mues par une foi profonde et par une énergie de tous les instants, les sœurs nous ont subjugués. Pas un mot plus haut que l’autre, accueillantes, souriantes, nous comprenons que des milliers de volontaires de tout âge et de tous les pays se pressent pour aider ici !

Dans les rues de Calcutta 

Lors de notre visite de l’orphelinat, nous faisons la connaissance d’une française quinquagénaire qui vient 3 semaines chaque année depuis 26 ans ! Elle nous fait faire le tour du propriétaire, fière comme une petite fille au pays des merveilles. Nous apprenons qu’il y a plusieurs centres dans Calcutta, mais aussi sur toute la planète (en France aussi). Des orphelinats, des « mouroirs », des instituts pour les handicapés... Nous sommes le 24 décembre et des « cuistots » préparent une immense soupe populaire améliorée pour le lendemain. Des dizaines de poulets attendent naïvement de passer à la casserole...

Cette charmante dame nous invite le soir même à la rejoindre pour passer le réveillon à la Mother’s House. Des volontaires y jouent une pièce de théâtre puis une messe est célébrée. Même si nous ne sommes pas religieux, nous sommes heureux de se retrouver dans une ambiance chaleureuse et fraternelle le soir de Noël. Nous frissonnons en écoutant chantée A Capella « Douce nuit, sainte nuit » par une volontaire, reprise par un chœur de trente personnes en une dizaine de langues.

Nous consacrons la journée du 25 à visiter la ville avec Aziz, un tunisien rencontre la veille. De toute l’Inde, Calcutta est bien la ville la plus chrétienne. Partout, des églises sont la pour le rappeler. Des crèches (avec des chameaux en plus de l’âne, du mouton et du bœuf) ont été dressées dans les rues, nous en trouvons même une face à une mosquée, difficile de voir ça ailleurs... Les bâtiments de l’ère britannique sont en bien piteux état et menacent même de s’écrouler... Mais ils sont habites. Malgré l’extrême pauvreté de certains quartiers, nous trouvons les habitants plus accueillants et souriants qu’à Delhi. N’ayant pu prolonger notre visa indien, nous n’irons donc pas faire du volontariat chez Mère Theresa. Mais nous ne le regrettons pas, cette œuvre de charité n’a pas vraiment besoin de nous tellement elle croule sous l’afflux de volontaires.

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Amritsar est notre dernière étape indienne avant le Pakistan. Capitale administrative du Punjab, c'est aussi la ville sainte des Sikhs. Né à la fin 15ème siècle, le Sikhisme se veut prendre le meilleur de ses deux frères ainés que sont l'Islam et l'Hindouisme. C'est une religion monothéiste mais qui croit aux cycles de réincarnation éternels. Les Sikhs rejettent le système des castes et ont l'air d'accorder plus de considération à la Femme. Les hommes ont cinq signes d'appartenance qu'ils se doivent de respecter tout leur vie :

- Ne jamais se couper les cheveux ni la barbe.

- Porter un turban maintenant les cheveux. Celui-ci est différent selon que l'homme est marié ou non.

- Arborer un poignard à la ceinture.

- Porter un caleçon ample en guise de sous-vêtement.

- Porter un bracelet en acier au poignet.

Comme toutes les religions, le Sikhisme a son livre saint : Le Guru Granth Sahib, qui rassemble les enseignements des 10 "gourous" ("guide spirituel" au sens noble du terme, pas malfrat dirigeant une secte) ayant structuré les rites et croyances. L'original du texte est conservé à Amritsar dans le Darbar Sahib, plus connu sous le nom de Golden Temple. C'est un endroit incroyable, rempli de quiétude, de paix de sérénité. Le temple est ouvert 24h/24, 7 jours sur 7. Du coup il est intéressant de se rendre au Temple à différentes heures du jour ou de la nuit, car si l'ambiance générale est au recueillement, la lumière, le nombre de pèlerins varient et des événements rythment les journées. Deux musiciens et un chanteur sont en permanence au cœur du Golden Temple, leurs musiques et chants religieux sont diffusés via des haut-parleurs. A dix heures du soir, le livre saint est ramené du Darbar Sahib vers "ses appartements" au cours d'une procession où tout le monde se presse pour l'accompagner.

Les gens sont d'une gentillesse! Ils viennent nous voir, nous demandent d’où nous venons, si nous avons des questions sur leur religion et leur histoire. Certains viennent du Canada ou d'Angleterre, comme un Musulman se rendrait à La Mecque. Il y a un immense réfectoire ou les pèlerins peuvent manger trois fois par jour gratuitement. Tout le monde met la "main à la pâte" pour préparer les repas, faire la vaisselle... C'est un honneur pour eux que de servir dans ce lieu sacré. A divers endroits des petits-déjeuners ou déjeuners sont servis de manière temporaire, on nous invite, nous nous asseyons sous le regard curieux mais toujours bienveillant des locaux.

Un petit vieux d'Amritsar (photo ci-contre) qui vient quotidiennement au Temple nous accoste et nous voilà partis pour 2 heures de discussions... Il nous parle de son immigration depuis son Pakistan natal lors de la partition des Indes en 1947. Il nous appelle "ma fille", "mon fils", nous explique qu'en différents endroits du complexe des prêtres lisent les 1430 pages du Guru Granth Sahib en 46 heures sans prendre une minute de répit ! Il nous montre ensuite des marques laissées par des balles, témoignant de l'occupation du Temple d'Or par des extrémistes Sikhs et de leur expulsion en force par l'armée indienne (plus de 500 morts) ordonnée par Indira Gandhi. Elle se fera assassiner peu de temps après par ses gardes du corps Sikhs, une décision de Dieu nous dit-il. Nous pénétrons à l'intérieur du Golden Temple, là où le livre sacré repose pendant la journée. Les pèlerins, hommes et femmes, font des offrandes de nourriture ou d'argent. Certains s'assoient autour et écoutent religieusement les chants sacrés. D'autres méditent, prient.

Nous quittons Amritsar enchantés, mais également impatient de découvrir bientôt le Pakistan.

Le Golden Temple 
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Nous souhaitions partager une journée coup de cœur haute en couleurs. Kolayat, ville de pèlerinage du Rajasthan, à une heure de route de Bîkaner. Déjà dans le bus public qui nous y mène, je suis impressionnée par les bijoux des femmes. Certes les "râjasthânis" aiment les parures, mais aujourd'hui elles brillent et scintillent plus qu'à l'accoutumée, depuis les pieds jusqu'à la tête. Des bagues travaillées ornent leurs orteils, des bracelets parent leurs chevilles, de la simple chaîne au jonc bien plus épais; des dizaines d'autres bracelets tintent autour de leurs poignets; un fin bijou décore leur narine gauche, et parfois une chaîne dorée relie celui-ci au bijou de l'oreille gauche. Enfin, certaines d'entre elles ont orné leur chevelure d'un médaillon que l'on devine sous leur léger voile. Elles sont toutes coiffées d'une longue tresse noire et revêtues du traditionnel saree. Aujourd'hui, les dominantes de couleurs vont vers le rouge, le rose et l'orange, teintes chaudes qui contrastent avec le sable du désert. Une fois au bord du lac, ce sont toutes ces couleurs qui s'animent autour de rituels sacrés.

Les baignades sur les ghâts dans l'eau Sainte, les ablutions, les rites accomplis par les brahmanes sous les arbres : ils récitent des prières au milieu de figurines et statuettes savamment disposées en demi-cercle, leur jettent des petits cailloux et leur offrent les fameux colliers d'œillets d'inde oranges. Pour les non inities que nous sommes cela pourrait passer pour du fétichisme, trop d'éléments nous échappent malheureusement... Pourquoi ce lieu est-il sacré? Pourquoi est-ce un pèlerinage essentiellement de femmes? Aujourd'hui nous voudrions tellement pouvoir franchir cette terrible barrière de la langue...

Ici comme dans beaucoup d'endroits sacrés, la mendicité fait aussi partie du tableau. Les mendiants sont rassemblés dans certaines allées, assis par terre, leur écuelle posée devant eux. Les fidèles y jettent au passage de la nourriture achetée spécialement pour eux. Les enfants nous tournent autour en gesticulant et en nous lançant des "hello" aigus, dans l'espoir d'une pièce ou de quelque chose à se mettre sous la dent. Nous nous fondons dans la foule des fidèles mais il n'est pas facile pour les étrangers que nous sommes de se faufiler incognito!

Nous quittons cet endroit sacré enchantés, les yeux saturés par toutes ces couleurs vives, et nous mettons en quête d'un endroit où nous restaurer... mais ici pas de touristes, donc pas de restaurant! Seulement deux petites échoppes qui se font face, et qui ont l'air de préparer les mêmes beignets. On désigne au hasard, on s'installe, ils sont ravis de nous accueillir. Le jeune garçon de la famille prend sa plus jolie voix aigüe pour nous servir les 4 uniques Coca de son frigidaire. Et on apprécie rapidement ce rafraîchissement car les beignets qui arrivent agrémentés d'une sorte de sauce au yaourt sont très bons mais on a rarement mangé aussi épicé !!!

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A moins de s'installer pour quelque temps, il n'est pas évident pour les voyageurs que nous sommes de rencontrer la classe moyenne indienne. Celle-ci évolue dans les grandes villes, ou comme dans toutes les mégapoles du monde entier les gens se croisent sans se parler ni même se regarder. Par contre, chaque fois que la rencontre se produit, les échanges sont très sympathiques.

Il a fallu un heureux concours de circonstances, comme celui qui nous est arrivé à Allahabad. Par un "intermédiaire", nous avons fait la connaissance de Dinesh, un avocat. Sur la défensive au départ (mais quand est-ce qu'il va nous demander de l'argent ou nous emmener dans la boutique de son cousin ...?) nous avons rapidement compris que Dinesh n'attendait rien en retour, si ce n'était notre satisfaction d'en savoir un peu plus sur sa ville natale et ses coutumes. Il nous a ainsi balladés plusieurs heures sur sa moto (à trois dessus) nous menant d'un temple à l'autre, d'une rive de la Yamuna à une rive du Gange. L'effervescence qui régnait à Allahabad était impressionnante. La ville se préparait en effet à accueillir en Janvier la Kumb Mela, qui rassemble tous les trois ans des dizaines de milliers de sâdhus et pèlerins hindous de tous les horizons. Alors un grand "danyabat" à Dinesh pour avoir pris le temps de nous guider dans cette ville atypique.

La Yamuna au lever du soleil