On voulait voir du pays ? On a été servi ; sortir des sentiers battus ? On n'a pas été déçu.
Depuis la ville d'Akosombo, nous avons pris le ferry pour rejoindre le nord du lac Volta. Sur le bateau, pas de cabine, alors comme tous les autres nous avons dormi sur le pont. Un vieux bout de mousse dégotté dans un recoin fit office de paillasse improvisée.
Voulant éviter la ville peu accueillante de Yeji (dixit notre guide de poche), nous débarquons 18 heures plus tard à Kete Krachi. Nous espérons trouver un transport qui nous emmènera le jour même à Bimbilla plus au Nord, malheureusement le bus est déjà parti et il est impossible de quitter la ville, pas même en stop. Apres un court moment de déception nous prenons nos quartiers dans le seul hôtel de la ville.
Pas un seul "O'brunie" dans les parages, nous sommes ravis, d'autant plus que l'accueil des gens est encore une fois chaleureux. Nous profitons de l'après-midi pour se balader sur les berges du lac. Des gens y pêchent, y font leur lessive, sous le regard de quelques rapaces qui terrorisent bien malgré eux Anne-Laure.
De crainte de rater notre seule chance de quitter Kete Krachi, nous sommes les premiers le lendemain matin à la station de bus. S'en suivent 5 heures de piste poussiéreuse et cahoteuse a trente entasses dans un vieux Mercedes passe partout. Entre les chèvres, les nids de poule à éviter, le bac du Volta à attendre, les kilomètres défilent lentement. Le chauffeur est prudent (pour une fois) et adroit, c'est rassurant.
Nous arrivons vers 13h30 à Hohoe, et avons juste le temps de sauter dans un tro-tro pour l'étape suivante; 1 heure et une panne plus loin, nous voilà dans le charmant village de Liati Wote.
150 kilomètres parcourus dans la journée, nous sommes bien loin des belles routes d'Accra. Nous voilà bel et bien au fin fond du Ghana!
Question de référentiel
"Il y a 3 vérités : La tienne, la mienne et la vérité." Proverbe africain
"Tu vois, je suis plus grand que mon ami. Maintenant, s'il monte sur son vélo, il est plus haut que moi, mais je reste le plus grand." Et bien pour les montagnes ghanéennes, c'est le même principe...
L'Est du pays abrite une petite chaîne de montagnes qui délimite la frontière avec le Togo. L'une d'elle, le Mont Afadjato, est le point culminant du Ghana (885 m). A son pied, se trouve le ravissant petit village de Liati Wote. Des allemands y ont développé des projets d'écotourisme il y a quelques années, c'est pourquoi ici vous pouvez manger des champignons de culture, ou bien déguster un miel délicieux. Au passage, ils ont du inculquer aux habitants leur conception de la propreté, car (et pour la première fois au Ghana) pas un papier ou plastique ne traîne à Liati. Il y a une poubelle tous les 50 m, c'est incroyable !
Le lendemain de notre arrivée, tôt le matin, nous entreprenons les 2 heures "d'ascension" qui doivent nous mener au sommet. Le sentier est raide mais bien entretenu, la végétation luxuriante (comme d'habitude pourrait-on dire). Au bout d'une heure et quart, nous atteignons un premier pic qui nous permet d'avoir un beau panorama sur toute la région et une partie du lac Volta, à 15/20 km vers l'Ouest. Pour atteindre le sommet final, il nous faut redescendre sur une petite crête, la longer, puis remonter un peu plus loin. C'est ici que les choses se compliquent : 50 m plus loin, le chemin qui semble y mener se sépare en deux. Coté gauche, une descente vertigineuse qui ne peut nous mener vers les hauteurs, coté droit, le chemin s'avère rapidement impraticable, la végétation étant trop dense... Nous tournons en rond 30 mn, puis décidons de redescendre au village pour demander la route. Pierre est furax, il n'a pu faire "son sommet" (comme d'habitude pourrait-on dire...).
En bas, nous croisons Kofi, le responsable de la Guest House où nous avons élu domicile.
"Comment on fait pour monter là haut ?" lui demande t'on.
"Ben tu suis le sentier, la montagne est juste devant toi.
- Celle-là tu veux dire ?
- ah non, celle-ci." Et il nous montre le premier sommet que nous avions atteint.
"Mais comment ce pic peut-il être le point culminant du Ghana, alors que la montagne juste derrière est plus élevée ?" demande Pierre dubitatif.
"Parce qu'il a été mesuré depuis le niveau de la mer, il est donc bien plus grand que la montagne derrière, posée sur la crête, qui n'a été mesurée elle que depuis le bas de la vallée..."
C'est ainsi que le pauvre Mont Aduadu, sûrement le plus élevé du pays (flirtant avec les 1000 m), n'a pas toute la reconnaissance qu'il mériterait ! Nous profitons de l'après midi pour rejoindre une petite cascade. Papillons et fleurs multicolores au rdv le long du chemin.
Togoland
German Togoland, c'est le nom qui avait été donne entre 1898 et 1918 au présent Togo et à la région de la Volta qui appartient aujourd'hui au Ghana. A l'issue de la première Guerre Mondiale, les allemands se firent expulser du coin, le Togo revenant aux Français, la Volta aux Anglais. C'est ce qui explique la présence de plusieurs projets de développement pilotés par nos chers voisins d'outre Rhin en Volta.
Plutôt que d'emprunter un chemin exclusivement tracé pour les touristes à la conquête du point soi-disant culminant du pays, nous décidons de rejoindre Kuma Bala, premier village togolais après la frontière. La végétation est encore humide de la pluie torrentielle de la veille, si bien qu'après 30 minutes de marche nous sommes trempés. Le chemin est nettement plus agréable que les pentes escarpées qui mènent à l'Afadjato.
Nous traversons de petites plantations disséminées dans la forêt. Nous croisons des paysans Togolais qui se rendent dans leurs champs côté Ghanéen. Ils nous disent bonjour en Français ("Bonne arrivée!"), ne manquent pas de nous renseigner sur le chemin à suivre, et de nous proposer les fruits de leurs récoltes (bananes, avocats). En fait, de nombreuses familles vivent de part et d'autre de la frontière, une frontière que les gens franchissent à leur guise, le sentiment d'appartenance régionale nous paraissant ici nettement plus important que la nationalité. Si les uns apprennent le français à l'école, les autres l'anglais, tout le monde se comprend grâce au dialecte local (sauf nous...!).
Après une heure au Togo, nous rebroussons chemin pour rentrer au pays. Sur le retour nous en profitons pour rejoindre un petit sommet, pour le plaisir du panorama sur le lac Volta, et pour la plus grande joie de Pierre-Antoine!
Nous quittons le soir même, non sans un pincement de cœur, le petit village de Liati Wote, pour rejoindre Tafi Atome, un sanctuaire de singes.