Carnet de voyage

Journal de bord ⚓ Canaries - Guadeloupe

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À l'assaut de l'Atlantique 💪 Récit d'une aventure au milieu de l'océan.
Décembre 2022
25 jours
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Publié le 30 décembre 2022

C'EST LE GRAND JOUR !


On a navigué de nuit jusqu'au nord de l'île pour aller à la rencontre de nos colis et du réparateur. Celui-ci entame les réparations vers 10h, il en aurait pour 6h. L'équipage se repose, mine de rien, on vient de passer plusieurs journées, certes au paradis, mais emplies d'embûches.



Je vous passe les détails mais après plusieurs changements d'avis et de plans, on fera les courses en fin d'après-midi avant de faire cap sur le port de San Miguel (là d'où on vient) pour refaire les pleins de gasoil, d'eau mais aussi aller chercher Thomas, qui sera le sixième moussaillon de l'équipage de César. Thomas, c'est un des copains du port, qui cherche lui aussi à traverser. On l'emmène jusqu'au Cap Vert avec nous. On sera sept à bord !



Ceux qui se sentent suffisamment éveillés se succèdent jusqu'au port de San Miguel, avant le départ pour le Cap Vert.


Merci les îles Canaries pour l'émerveillement, les rencontres, les souvenirs. On aura bien profité de toutes tes merveilles en attendant ces colis.



On est heureux de ce dénouement, on a hâte de partir en mer, de ne plus voir que l'horizon et de passer le cap de la nouvelle année entourés de l'océan.

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Publié le 6 janvier 2023

Aujourd'hui, c'est une journée compliquée pour moi. Je commence à être un peu malade depuis hier, et le départ en pleine nuit n'est pas évident point de vue gestion du sommeil.


Nous sommes arrivés à 1h15 du matin au port de San Miguel, pour remplir les cuves d'eau et de gasoil, dire au revoir aux copains et embarquer Thomas, ce jeune français cuisinier et baroudeur qui, comme nous, attendait sa chance d'être emmené vers de nouveaux horizons. Il fera la traversée avec nous jusqu'au Cap Vert. La transatlantique à sept par contre, c'est vraiment tendu. Nos réserves d'eau seront déjà limitées pour six.


Départ vers 2h. Je n'ai pas encore dormi parce que j'ai déjà veillé sur ce trajet jusqu'au port. Mon quart sera de 5h à 8h. Ouille, le réveil pique vraiment, j'étais plongée dans un profond sommeil réparateur et j'ai beaucoup de mal à reprendre ce quart. Je passe ma première heure avec Ali à l'intérieur autour d'une petite infusion de thym fraîchement coupé à Ténérife avec Facundo. Dehors il fait froid, mais je m'y aventure pour mon heure en solitaire. On ne croise aucun bateau et le ciel est légèrement voilé. Quand Lolo arrive, je pars me réchauffer à l'intérieur puis lui demande pour l'abandonner plus tôt que prévu parce que je tombe de fatigue, mes yeux se ferment et je ne suis plus réactive pour une veille visuelle.


Cette "nuit", je partage ma cabine pour la première fois, avec Thomas. C'est le capharnaüm, il y a des affaires partout et on se réveille en permanence l'un l'autre aux moindres de nos mouvements. Je tombe malgré tout de fatigue et émerge vraiment à 16h30. Je me sens mieux, toujours un peu malade mais plus reposée.


On a perdu la connexion vers 6h du matin et la vision des côtes vers 7h. Ça y est, on est bel et bien partis. Mais le comble, c'est qu'une partie de cette réparation a déjà lâché, lors d'un empannage sauvage. Rien de grave mais c'est frustrant d'avoir attendu tout ce temps pour... rien.


Ce soir, c'est le dernier soir de 2022. On s'affaire en cuisine pour préparer un repas de fête. Au menu : en entrée, écrasé de pommes de terre avec fondu de poireaux, noix de Saint-Jacques à la crème et tomate séchée. En plat, haut de cuisses de poulet au curry, lait de coco, gingembre. En dessert, brownie au citron. Tout l'équipage s'y met mais on sent la touche du chef Thomas👌


Les filles, toujours plus créatives, ont imaginé une boîte remplie de défis. Un chaque jour à partir d'aujourd'hui jusqu'à notre arrivée en Guadeloupe.


La soirée se déroule comme les autres avec beaucoup de rire, d'amour, de chant et de danse. Pour le plus grand plaisir des trois extravertis fans de karaoké et variété française. Pour ma part, ce serait mentir que de dire que je saute de joie de reprendre la même playlist de chansons françaises tous les deux jours 😀


Les maux de tête auront raison de moi et je ne ferai pas aussi long feu que l'équipage en ce soir de nouvel an. On a quand même eu le tps de se souhaiter la bonne année trois fois : à l'heure française et belge (23h) puis des Canaries (minuit) et enfin du Cap Vert (1h).


En tous cas, bye bye 2022, bienvenue 2023. Les filles m'ont demandé de crier le mot qui allait définir cette nouvelle année. Spontanément, j'ai crié amour et ça signifie beaucoup de choses pour moi.

À cette nouvelle année 🥂

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Publié le 6 janvier 2023

Je devais être sacrément épuisée pour ne pas entendre mon réveil de 9h30 ! Ça ne m'arrive jamais. J'émerge à 11h, Thomas "veille" affalé dans le carré, son réveil à la main, le sortant de son sommeil toutes les 10 minutes. Bon et ici c'est comme après le passage d'une tempête, je retrouve le paquet de beurre sur le fly (pont près de la timonerie (poste de pilotage)), fondant à souhait sous 25 degrés, des cadavres de bières absolument partout et à peu près tout ce qui existe comme vaisselle sur le bateau, sale et éparpillée. Je me lance dans ce grand ménage. Thomas veut m'aider, mais mal réveillé (ou toujours bourré), il renverse le seau de la vaisselle à l'océan pour changer l'eau, avec... une bonne partie des couverts dedans. C'est bon Thomas va dormir un peu, il est midi, il est temps ! 😀


Vers 14h, tout l'équipage a émergé. Je ne m'attendais pas à les voir si tôt, eux qui ont veillé jusqu'au lever du soleil. Ce sera aprèm repos, lecture et petite séance de sport entre nanas. Parce qu'on a décidé de prendre quelques bonnes résolutions quand même, à savoir : on arrête de manger n'importe quoi n'importe quand et on reprend les séances de sport.


Ah, on a vu un bateau ! Un voilier de français qui est passé à 100m de nous. Paupau s'est emparée de la VHF pour leur souhaiter bonne année. Ils faisaient cap sur la Guadeloupe. Bientôt ce sera nous !


Je commence les quarts ce soir, 18h-21h. J'adore, le soleil se couche, je prends mon livre et me mets sur le fly. J'entends puis vois les dauphins à l'étrave. Enfin ! Quel bonheur de les voir s'amuser. Je prolonge mon quart jusque 22h, je suis bien là dehors, plongée dans ma lecture, bercée par le son des vagues et du vent.

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Publié le 6 janvier 2023

Cette nuit a été réparatrice (je me sens en forme et plus malade du tout), et pourtant depuis qu'on est partis, on avait un appui moteur. À 10h, César les éteint enfin. On fait une moyenne de 6 noeuds, ce qui n'est pas trop mal. Les vents restent favorables jusqu'au Cap Vert. À cette vitesse, nous y serons le 5 vers midi. Si on relance les moteurs, on peut y être le 4 en début de soirée.

6 noeuds, c'est très bien et quel bonheur de se laisser porter par le vent uniquement. Enfin, ça c'est ma vision des choses. En me lançant dans ce projet de voyage, c'était pour me rapprocher de mes valeurs, notamment via le slow travel, qui est le mode de voyage le plus respectueux de l'environnement mais qui demande du temps. Ne pas avoir de plan, se laisser porter par les rencontres, les opportunités,... les vents. Moi, j'ai le temps, mais je suis sur un convoyage et les filles, qui partagent aussi ma vision des choses, commencent par contre à manquer de temps.

C'est vrai que ça me frustre un peu et que je remets parfois en question ma place sur ce bateau. Je voulais embarquer sur un catamaran pour cette première transatlantique parce que je trouvais cela plus confortable et stable. Je me rends compte que le confort n'a jamais été un critère déterminant pour moi, et que le catamaran bouge tout autant, si pas plus, qu'un voilier. Et qu'en plus, on perd les sensations de voile... Alors, oui on a la place pour faire des séances de sport, le confort de ne pas se marcher dessus et le luxe de mettre la musique à tout va. Mais était-ce vraiment ce que je recherchais ? Il y a 2 semaines, j'avais l'opportunité de rejoindre un voilier monocoque au Cap Vert, qui partait pour la transat... sans moteur. Je m'imagine parfois ce qu'aurait été la traversée sur ce voilier. Ce qui est sûr, c'est que je choisirai un voilier pour ma prochaine transatlantique. Enfin si je trouve, parce que je continue de mesurer ma chance d'avoir trouvé si facilement un bateau, avec un si chouette équipage.


Décision qui met tout le monde d'accord : on profite au maximum des voiles lorsque le vent souffle suffisamment pour faire 6 noeuds mais on relance les moteurs en appui lorsque le vent faiblit un peu. Ainsi, on gagne du temps, pour viser une arrivée le 5 au matin. On compte s'y arrêter 2 jours et profiter un maximum de ces journées.


Thomas nous régale. Chaque plat est magnifié de ses talents de cuisinier. Un simple repas fajitas devient un festin dont on se délecte. Après-midi jeu de société, soleil et écriture, rythmée par des sons pop, rock, folk. J'adore !



Comme toujours, les journées passent si vite ! Il est déjà 17h30 ! Dans 1h le soleil se couche, nos quarts débuteront et le calme de la nuit prendra place. Mais on n'oublie pas notre séance de sport collective.


Ça fait trois jours que le soleil se couche derrière une nappe brumeuse et que le ciel est recouvert d'une pellicule jaune. Le vent souffle de l'ouest et donc du Sahara. C'est le sable qui nous prive d'un beau coucher de soleil.

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Publié le 6 janvier 2023

À l'annonce de mon quart hier soir, j'exulte. 6h-9h, c'est passer une bonne nuit sans devoir se réveiller et voir le soleil se lever. Un de mes préférés. Depuis hier soir, on est à la voile uniquement. Le vent souffle à 20 noeuds établis, c'est suffisant pour nous faire avancer à une bonne vitesse.

J'oubliais que les nuits à la voile étaient encore moins reposantes que celles aux moteurs. Les cabines, dans les coques, décuplent toutes les sensations. Un bon petit vent portant sur un océan agité se traduit par une impression de tempête. Ça claque, bouge, siffle. Je suis réveillée vers 3h30 et ne replonge que dans un demi sommeil. Sur un bateau en mouvement, les rêves entremêlent la réalité, ils sont étranges et marquants. J'attends, presque avec impatience, 6h pour me lever et aller pousser mon nez dehors.

Il fait toujours nuit noire et je retrouve Paupau qui veille depuis 2h. Effectivement, il n'y a pas de tempête mais juste ce bon vent qui gonfle nos voiles et ces grosses vagues qui nous font surfer. Comme c'est agréable. La lune s'est couchée, laissant place à l'obscurité la plus totale et un ciel rempli d'étoiles. Le vent est chaud, il vient des terres. La Mauritanie n'est pas loin, mais on ne voit pas les côtes.

Vers 7h, le jour commence à se lever. Le ciel étoilé fait place à des lueurs chaudes, dont on savoure chaque variation jusqu'au lever du soleil. Cette étoile magistrale et vitale.


Il est 8h30. Je me retrouve seule et profite pleinement de cette solitude. Je contemple l'océan à perte de vue. Je ressens du bonheur, de la plénitude, du respect aussi face à cette nature, de l'humilité encore et toujours face à cette force et immensité. J'admire le mouvement de l'océan, sans m'en lasser. Chaque vague est différente et magnifique. Je dévore ces nuances de bleu. Dans l'eau. Dans le ciel. Au loin, une vingtaine de dauphins voltigent et enchaînent les sauts dans les vagues. Je les regarde debout, me tenant au mât et ne faisant qu'un avec les mouvements du bateau, le sourire aux lèvres.

Il est 10h. Les heures sont des secondes. Je pourrais rester là toute la journée. C'est un spectacle vivant, majestueux et puissant que j'ai en face de moi, derrière moi, tout autour de moi. 2 semaines d'Océan à perte de vue pendant la traversée, 2 semaines de ces sensations, ce ne sera jamais assez.


Ça fait 4 heures que je suis debout mais une fois de plus, je n'ai pas vu le temps passer. La journée continue sur cette lancée. On discute avec Thomas. Il est 14h. C'est mon ventre qui me fait prendre conscience de l'heure. Je pousse mon nez en cuisine, les filles ont préparé ces délicieuses aubergines chèvre. Avec amour, comme toujours.

J+4, pourrait-on prendre une douche ? Cette traversée c'était la mise en condition transatlantique, mais bon on n'y est pas vraiment encore non plus, du coup, oui lavons-nous. Il est 16h. Une sieste au soleil, un livre en main. Il est 17h30. Lolo a pioché dans la boîte à défis aujourd'hui. Il devait nous préparer un cours de sophrologie. À la Lolo, son récit est emprunt d'humour et nous faire rire plutôt que nous détendre. Il est 18h, nos estomacs crient encore famine (qu'est ce qu'on peut manger sur ce bateau !), une tarte carottes feta ça vous dit ? Il est 20h, c'est l'heure de la sieste parce que mon quart cette nuit fait mal : minuit-3h.


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Publié le 7 janvier 2023

Lorsque mon réveil sonne à minuit, je suis très grognon. J'ai besoin de beaucoup d'heures de sommeil et être tirée d'un profond sommeil est douloureux. Cette expérience de voile m'apprend à gérer mon (manque de) sommeil. Généralement quand je sors, mon humeur change instantanément. Cette nuit, on ne voit que très peu les étoiles et il y a du vent. Les rafales montent à 28-29 noeuds. Et le mât - ce fameux mât qui menaçait (on ne sait plus si l'imparfait est de mise) de démâter - grince. Le même bruit que le premier soir, sous 45 noeuds de rafales. Mmh, peu rassurant. César la joue safe, on prend un ris. Je suis toute excitée de faire une manœuvre. Je ressens que j'ai vraiment l'envie de faire de la voile, et non me laisser bercer sur une croisière. Mais bon, c'est la transat, je savais que c'était un cap à garder et non une succession de manœuvres. J'apprendrai plus tard. César part se reposer. Durant ce quart, je veille sur le vent, s'il monte au delà de 30 noeuds, on prendra un deuxième ris. S'il baisse en deçà de 25, on relâchera le ris.


Ce quart, dans l'action, passera finalement vite. Je ne comprends pas cette distorsion du temps qu'on vit sur un voilier. Chaque minute semble être une seconde.


La nuit aussi est animée. Impossible de me rendormir, les mouvements et les bruits sont trop envahissants. Ils prennent le dessus sur le manque de sommeil, malheureusement.


Je me lève pour voir le lever de soleil moins époustouflant qu'hier mais toujours aussi plaisant. En arrivant sur le pont, je découvre trois poissons volants échoués. À défaut de pêcher (voilà trois jours qu'on met les lignes de pêche mais qu'on ne remonte rien), ils viennent à nous. Apparemment, ils se mangent. On en voit partout, ils volent à la surface de l'eau avant de replonger.


Je sens que c'est une journée peu productive, je passe du carré au fly, toujours en position couchée, lorsque les tâches ménagères ne m'occupent pas. À sept sur un bateau, il y a toujours quelque chose à ranger, nettoyer, cuisiner. Il est déjà 11h et j'attends que Thomas se réveille pour aller faire une sieste. Ça doit paraître étrange pour ceux qui ne vivent pas sur un bateau de lire qu'on dort n'importe quand. On est loin d'être paresseux, on dort juste quand notre corps en ressent le besoin puisque la navigation de nuit nous contraint à nous priver de sommeil pendant 3 heures chaque nuit.


On approche du Cap Vert. On y sera dans la nuit. L'idée est donc de profiter un maximum de ces deux journées. Les filles sont généralement à l'initiative des activités. Elles forment un binôme soudé et sont des femmes de caractère ! Chacun est bien-sûr libre de son programme. Personnellement, j'apprécie de me laisser guider dans leurs aventures. On sait qu'on va profiter et découvrir, combo gagnant. Le reste de l'équipage n'est pas toujours aussi réceptif que je le suis à leurs plans.


Depuis hier soir, un gros point noircit le tableau. Hier pour la première fois depuis longtemps, on a eu un bon vent. Top ! Mais visiblement moins pour le mât qui nous a rappelé qu'il menaçait de tomber. Il grince et ce n'est pas normal. Ça inquiète même César et il en faut beaucoup pour l'inquiéter. Lui qui ponctue chacune de ses phrases par une touche d'humour nous lance : "aussi bien on y est pour 3 semaines au Cap Vert". Cette fois, il ne rit qu'à moitié...


Même si rien n'est concret, on ne peut s'empêcher d'avoir cette possibilité en tête. L'éventualité d'être de nouveau bloqué + mes deux nuits à 3h de sommeil + mon besoin de solitude ne m'offrent pas le même moral qu'hier. Une journée n'est pas l'autre, jamais.


Ce soir je ne veille pas, nous arriverons vers 2h et je profite donc d'une bonne nuit de sommeil.

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Publié le 7 janvier 2023

Nous sommes arrivés à 2h au port de Mindelo, sur l'île de Sao Vicente.


Réveil collectif à 8h. Deux jours d'escale, c'est court. Une fois de plus, le planning est chargé. Après être passés se présenter aux autorités portuaires, à la police et à l'immigration, on se dirige vers le marché. Même si ces îles conservent les traces de leur passé de colonie portugaise - entre autre la langue qui influence beaucoup le créole capverdien - on retrouve bien la culture africaine. Étals de tissus en wax, de tresses africaines, de contrefaçons ou de fruits et légumes locaux nous dépayse totalement. On adore. On commande tous un pantalon, une jupe ou une chemise sur mesure dans des tissus magnifiques. Ils seront prêts demain !


Il est déjà temps de retourner au bateau, préparer nos sacs de randonnée et bivouac, parce qu'à 14h on prend le ferry pour aller sur l'île voisine, Santo Antao. Ça l'air magnifique et on y dormira. Où ? À la belle étoile sur la plage. C'est le "plan". Une fois installés dans le ferry, on prend le temps de chercher une rando. Parfait, on trouve la randonnée pépite : du cratère de Cova jusqu'à la ville côtière de Cidade das Pombas en passant par la vallée de Paul. Et on rencontre même un chauffeur de taxi qui nous amènera tout en haut de l'île, point de départ de la rando. Il fait un peu plus frais tout en haut mais on a une vue surprenante sur la vallée. Il y a toujours cette étonnante couverture nuageuse, comme une brume qui entoure les îles.

La randonnée est facile, ce n'est que de la descente. On arpente les chemins en passant devant des plants de café, des manguiers, des avocatiers, des bananiers, des cannes à sucre et des papayers. La plupart des exportations de fruits et légumes de l’île proviennent de cette vallée. Ça descend de manière abrupte, nos genoux le ressentent mais il n'y avait pas mieux pour nous plonger dans la flore et culture locale, puisque le sentier passe aussi par plusieurs petits villages. Les habitants sont accueillants. Une dame nous fait goûter l'alcool local : le grogue, une eau-de-vie produite à partir de la canne à sucre, similaire au rhum agricole. C'est la boisson nationale du Cap Vert. Plus bas, des enfants jouent au foot et Paupau ne résiste pas à la tentation de faire quelques passes.

Nos estomacs commencent à gargouiller, on s'arrête à une petit restaurant annoncé typique, bio et local. Le meilleur plat qu'on ait mangé depuis longtemps ! Simple mais savoureux : riz, thon parfaitement cuit, et légumes locaux. On a découvert le fruit à pain (goût similaire à la patate douce) et l'igname (goût qui se rapproche de la châtaigne). Un délice, on s'est régalé.

Il fait noir et on décide d'appeler un taxi qui nous amènera à un village côtier recommandé par un guide rencontré au resto. C'est 45 min en voiture mais apparemment on pourrait y trouver une plage de sable et des piscines naturelles. Sur cette île, il y a très peu de plages, c'est majoritairement des falaises abruptes et parfois des plages de galets. Les courants sont très importants et c'est donc dangereux de se baigner. Lorsqu'on arrive à l'endroit conseillé, on se rend vite compte qu'il nous sera impossible de dormir sur les rochers puisqu'il n'y a... pas de plage. On trouvera refuge sous le toit d'un petit bar extérieur. Une nuit sur le béton, pq pas ?



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Le réveil est doux malgré la nuit fraîche et peu reposante.

Petite promenade côtière et repos aux piscines naturelles, avant un petit resto recommandé : CasaMarajuca Restaurant dans le village de Paul. Mmmh, à nouveau un délice. On y a goûté le poisson perroquet, avec le même mix de légumes locaux. Des bananes flambées. Des jus de papaye et fruit de la passion. C'est si bon de manger local, bio et simple. Pas gras, pas transformé. Naturel.

Il est déjà temps de reprendre le ferry. On doit aller récupérer nos vêtements sur mesure au marché, acheter fruits et légumes et partir.

Enfin, ça c'était ce qui était annoncé à notre arrivée au Cap Vert. En réalité, je ne sais même pas pourquoi on croit toujours tous ces délais. On devrait savoir que ça va encore être retardé. Ou alors César devrait être plus transparent avec nous. Puisqu'il nous annonce que de toute manière un départ en fin de journée aujourd'hui, c'était tendu. Ok.

Et puis surtout on attend des nouvelles par rapport à ce bruit de mât. Simplement entendre que ce n'est pas grave. Le feu vert pour partir...


Aujourd'hui, je ressens un peu d'agacement. On a beau être au paradis, voilà 1 mois et demi qu'on passe H24 ensemble et c'est normal de ressentir un peu de tension. Ce voyage est beau, mais il comporte des parts d'ombre comme tout dans la vie. Tout va bien. C'est juste le besoin d'être vraie qui me pousse à l'écrire ici.





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Publié le 9 janvier 2023
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Publié le 9 janvier 2023

Excursion à Sao Pedro

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Publié le 10 janvier 2023

C'EST LE GRAND DEPART POUR TRAVERSER L'OCEAN ❤️❤️❤️


Préparatifs, courses, et goooooo !


J'ai hâte. Hâte de ne plus entendre le brouhaha de la vie quotidienne, de réapprivoiser la notion du temps, de me (re)trouver face à moi-même, de (re)prendre conscience de notre infime place face à l'immensité de la nature. J'ai hâte de voir l'horizon à perte de vue pendant deux semaines, d'entendre le calme, de sentir l'air sain, frais et naturel, de me satisfaire de petites choses simples mais si belles de la vie et d'être émerveillée par l'océan et des habitants.


À dans deux semaines ❤️

À ma famille et mes proches, je vous aime ❤️

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Publié le 28 janvier 2023

JOUR J ! Je suis si excitée 🤩

J'attend ce moment depuis 49 jours exactement. La traversée de l'Atlantique, l'océan à perte de vue. Les 49 jours passés ensemble et le chemin parcouru jusqu'ici ont déjà été un voyage, une aventure, avec du partage, de la folie, des exploits sportifs, des rires. D'abord à 6, puis à 7, parce que rester dans les marinas tisse des liens entre marins et vagabonds et que nos petits cœurs d'artichaut nous ont donné envie d'embarquer tous ces bateau-stoppeurs en quête de la même aventure que nous. On largue les amarres une dernière fois avant de passer une quinzaine de jours sur l'océan, et d'accoster dans les Antilles.



Beaucoup de sentiments se bousculent en moi. Je continue de réaliser mes rêves et je repense à l'origine de celui-ci : traverser l'Atlantique, ça doit être un projet fou. Aussi longtemps sur un bateau, avec des inconnus, sans voir les terres, c'est complètement dingue. Un jour, moi j'aimerais réaliser cette aventure. Je me donnerai les moyens d'y arriver. Je ferai la transatlantique. Ça y est, je traverse l'océan.

Chaque rêve est réalisable. Il suffit d'y croire si fort qu'il en devient réel. Chaque rêve que je réalise me rend heureuse, fière et confiante en la vie, et en la réalisation du rêve suivant. Capitaine Soso résonne désormais encore plus fort dans ma tête. Croyez en vos rêves et ne les perdez jamais de vue ❤️


J'avais commencé ce carnet de voyage virtuel pour partager cette expérience folle - qui ne me paraît plus si folle, maintenant que j'en fais ma réalité - avec vous. J'avais envie de m'exprimer sur chaque journée vécue en transat', décrire mes sentiments, mes sensations, mes ressentis, mes émotions. Je tâcherai d'être la plus fidèle possible en les écrivant. Qu'ils soient positifs ou négatifs. Parce qu'on traverse tous des hauts et des bas, parce qu'un jour n'est pas l'autre et parce que, même en réalisant ses rêves, il est possible de parfois douter ou avoir des jours "sans".


Plusieurs capitaines ont dissuadé César de partir hier soir, jugeant le moment trop risqué compte tenu des filets de pêche installés partout devant le port. Il est préférable de partir à l'aube. Il n'en a pas fallu plus pour le convaincre (à raison) et, parce que quatre hommes ensemble redeviennent des adolescents, nos trois moussaillons et notre capitaine sont partis festoyer. Il est donc seulement 8h ce matin lorsque nous arrivons à les tirer du profond sommeil dans lequel ils viennent à peine de plonger. Musique qui réveille, banana bread en préparation, et on largue les amarres. Je ressens de l'émotion, de l'excitation et un sentiment de bonheur profond m'envahit.


TRANSATLANTIQUE JOUR 1.

Je n'ai pas peur de ce qui peut nous arriver, et je ne crois pas que ce soit de la naïveté, je crois sincèrement et profondément que lorsque je poursuis mes rêves, ma bonne étoile m'accompagne. Lorsque je suis alignée, tout ce qui se mettra sur ma route ne sera que positif, même si c'est une épreuve. Je suis plus que prête à vivre cette expérience et j'envisage déjà une transatlantique retour. Chaque chose en son temps, et surtout je veux vivre le moment présent. Se projeter c'est bien, mais vivre l'instant c'est mieux.


À 10h, le soleil tape déjà bien, j'aime sentir ses rayons sur ma peau. C'est vital pour moi de l'avoir au quotidien. On s'éloigne des côtes avec un petit vent portant et une vitesse de 6 noeuds. Grand-voile et génois suffisent déjà. Les poissons volants sont partout. César fait le pitre. J'écoute de la musique en écrivant ces lignes et en pensant à l'aventure qui nous attend. J'aime être en mer, naviguer, tenir les quarts. Je veux devenir marin. J'aimerais profiter de cette transatlantique et de ces moments hors du temps pour prendre soin de moi, de mon corps (sport), mon cœur (lire) et de mon esprit (introspection). Je suis aussi très heureuse d'être déconnectée pendant 15 jours. Mon seul regret avec ce carnet virtuel c'est de ne pas pouvoir poser mon téléphone. J'en suis quand même dépendante pour écrire sur ce blog et pour écouter de la musique. Mais je ne suis plus connectée avec un moment autre et un monde ailleurs. Je suis pleinement dans le moment présent. Ici et maintenant. C'est tout ce qui compte.


Le temps est à nouveau distordu. La journée file, et on est devant le coucher de soleil, heureux. Très heureux. La musique intensifie ce moment magique. L'astre se couche et laisse place à un dégradé de couleurs absolument magnifique. Je commence à avoir un peu froid mais je veux continuer de profiter de ce moment pleinement.

Un nouveau système de quart s'installe. Fini les quarts croisés. À 7, on opte pour des quarts de 3h en solitaire mais qui couvrent toute la journée. Ça donne donc 15h-18h, 18h-21h, 21h-24h, 24h-3h, 3h-6h, 6h-9h, 9h-12h. Veille collective de 12h à 15h.

On pioche au sort pour le premier soir puis on descendra d'une tranche horaire tous les soirs. Cette nuit, le mien sera de 3h à 6h.

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Publié le 28 janvier 2023

TRANSATLANTIQUE JOUR 2


Le réveil sonne à 2h50. Mais je suis déjà réveillée depuis une bonne heure. Il est temps de monter sur le fly pour faire mon quart. Surveiller l'horizon, bien que les bateaux nous inquiètent peu pendant cette traversée. On a quand même croisé un cargo hier. Et surveiller le vent. Les alizés sont constants et nous permettent d'avancer à 8 nœuds depuis hier, rien qu'à la voile, enfin. On surveille juste que le vent ne monte pas trop, dans ce cas les consignes sont d'abattre de 5 degrés et de réveiller César pour prendre un ris. C'est le premier quart selon le nouveau modèle mis en place. Trois heures seul, c'est long. Surtout en pleine nuit, lorsque la fatigue nous gagne. Mais j'ai hâte de faire les autres quarts. Parce que j'aime ces moments d'introspection, seule face à l'océan et le ciel étoilé.



Je retourne dormir à 6h et me réveille à 10h. La journée commence par... une sieste au soleil. Dure la vie ! Chef Thomas nous prépare un daal de lentilles corail. On se régale. Par contre le frigo n'a jamais été aussi vide alors que c'est notre plus longue traversée. Il est temps qu'on pêche un poisson. Mais rien dans notre ligne.




Bon qu'on se le dise, j'ai passé la journée à dormir. Est-ce dû aux mouvements constants du bateau ou au sommeil entrecoupé ? Je remarque qu'après un passage sur terre, il faut toujours un ou deux jours pour se réamariner.


À 18h, c'est le spectacle journalier : le coucher de soleil. Je suis assise tout à l'avant du bateau, tendant ma jambe au maximum pour toucher l'eau avec mon pied. Elle est à 23 degrés. Les couleurs sont sublimes. Les vagues continuent de faire surfer le bateau. Certaines s'éclatent dessus et éclaboussent le pont. La sono joue de la musique cubaine. Le moment est parfait.


Cette nuit mon quart sera de minuit à 3h.

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Publié le 28 janvier 2023

TRANSATLANTIQUE JOUR 3


Mon quart s'est bien déroulé, sans trop de fatigue. Je me suis replongée dans mes souvenirs d'été en écoutant de la musique. Tout en surveillant le vent. Un ris est pris dans la grand-voile. J'hésite à réveiller César pour le relâcher. Le vent apparent s'établit aux alentours de 18 noeuds. Parfois moins. Rarement plus. Mais on ne perd pas beaucoup en vitesse malgré ce ris, alors j'attends. César se réveille de lui même vers 2h45 et on renvoit le ris. J'ai bien fait d'attendre, me dit-il. Toujours très heureuse de faire une manœuvre. Même si ce bateau est si peu manœuvrant qu'il faut allumer les moteurs pour la faire.


Ce matin à 8h, ça fait 48h qu'on est partis. On avance super bien ! Si on maintenait cette vitesse tout du long, on arriverait en une grosse dizaine de jours. Mais on sait que les premiers jours sont les plus favorables au niveau du vent. Ça fait aussi 48h qu'on navigue à la voile uniquement et ça, ça fait du bien. On doit quand même allumer les moteurs deux heures par jour pour recharger les batteries. Parce que ce bateau est prévu pour de la croisière de loisirs et non pour de l'autonomie ou de la performance. On a bien deux petits panneaux solaires mais ils ne servent pas à grand chose.


On profite du soleil avec les filles ce matin lorsqu'une grosse vague nous surprend. On est trempées ! Ça fait du bien et puis ça nous lave un peu en quelque sorte. 😀

J+3 et on ne se sent pas encore sale !


La nuit, les poissons volants ne semblent pas voir le bateau et finissent leur vol sur le pont. J'essaye de sensibiliser l'équipage à leur sauvetage mais on ne les voit pas tous s'échouer. Selon Moitessier, ces poissons sont délicieux. Alors on tente ce midi. Verdict : c'est ni bon ni mauvais. Pas grand intérêt, sauf si on n'a pas de ligne de pêche. Et...mauvaise nouvelle, on a perdu notre ligne de pêche ! 😥

Rituel de la transat : séance de sport dans la plus belle salle de sport du monde, face à l'océan et au coucher de soleil. Moment magique chaque soir.


Ce soir, mon quart est de 21h à minuit. Je viens de faire les deux plus difficiles, ils seront de plus en plus simples jusqu'à recommencer la boucle. La lune n'est pas encore levée et il fait nuit noire. Le vent continue de souffler, les vagues de s'éclater sur le bateau et les poissons volants de venir s'y échouer.

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Publié le 28 janvier 2023

TRANSATLANTIQUE JOUR 4

Journée paisible agrémentée de lecture, sieste au soleil, douche (à l'eau de mer bien-sûr, la première après 3 jours de nav'), et atelier pommes de Touline !


Mon quart est de 18h à 21h. Autant dire que c'est comme si je n'étais pas en quart car tout le monde est éveillé et le vent a un peu faibli. Je peux donc clôturer ma journée sur notre routine transat : séance de sport devant coucher de soleil. On est si bien devant ce spectacle. On prend l'apéro qui se prolonge jusqu'à être plongés dans le noir complet. La lune n'est pas levée et le ciel étoilé forme un dôme. Les étoiles sont nombreuses et brillantes. C'est le plus beau ciel qu'on ait vu. On éteint tout, dont les feux de navigation. On est alors un navire fantôme. Mais on s'en fiche, parce qu'on est seuls au milieu de l'océan.

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Publié le 28 janvier 2023

TRANSATLANTIQUE JOUR 5


J'ai passé une bonne nuit de sommeil. C'est fou comme le corps s'adapte à tout. On dort dans le bruit et le mouvement, sans difficulté maintenant.


On entame le 5ème jour de traversée. On a déjà bien progressé grâce à ces quatre jours de vent favorables.


Moi qui voulais moins de confort, j'ai été entendue. Je partage désormais ma cabine et ma salle de bain, la douche se prend à raison de deux fois/semaine environ (à l'eau de mer), il faut remplir des bidons d'eau de mer pour tirer la chasse des toilettes et la vaisselle se fait dans une bassine d'eau de mer à l'arrière du bateau. 👌 On le vit tous très bien, c'est l'aventure. Ce que je vis le moins bien (et encore vraiment ça va) c'est l'humidité sur les vêtements et la peau le soir. Le sel de la mer est présent partout sur le bateau et dès que le soleil se couche, ça capte l'humidité présente dans l'air.

Après trois semaines d'escale aux Canaries et cinq jours au Cap Vert, l'équipage est gonflé à bloc pour retrouver un semblant de vie saine. Les hommes font généralement leur session le matin, ensemble ou solo. César fait des tours du bateau en courant (ce n'est donc pas anodin qu'il nous apprenne la manœuvre de l'homme à la mer 🤔). Les filles se sont motivées pour faire deux séances : cardio le matin, renforcement musculaire en fin de journée. Je participe à la deuxième. Ces séances de sport demandent beaucoup d'équilibre parce que le bateau tangue et roule absolument tout le temps. Je n'imagine pas le roulis que ça doit être sur un monocoque !



Il fait beau et chaud. Comme tous les jours on passe notre journée en maillot, à profiter d'un bain de soleil, écrire, lire, écouter de la musique. Les filles composent et chantent. Thomas aime se joindre à elle.

Mon quart est de 15h à 18h. Les quarts en journée ne requièrent pas autant d'attention que pendant la nuit. Car tout le monde est éveillé (bon à l'heure où j'écris, il y en a quand même trois à la sieste. Il serait plus judicieux de dire que plusieurs moussaillons sont éveillés) et on voit mieux. Mais moi j'aime profiter de ces moments pour m'enfermer dans ma bulle. De nuit comme de jour, je fais généralement mes quarts au poste de pilotage, avec un livre, de la musique ou juste moi-même.


Le vent a un peu faibli, on a allumé les moteurs. Mais même avec leur appui, on n'avance qu'à 6 nœuds. Pourtant, il y a quelques nuages, généralement annonciateurs de vent. Je me fais même surprendre par quelques gouttes de pluie pendant mon bain de soleil. Je lève la tête et aperçois un oiseau. Que fait-il si loin des côtes ?


Le soleil perce rapidement et nous permet de faire notre séance de sport. Les quelques nuages ornent le coucher de soleil de rayons et reflets presque divins. C'est beau. C'est pur. C'est le meilleur moment.

On clôture cette belle journée sur un petit jeu de société tous ensemble. Que de rires encore une fois. Sans oublier le "Killer" que Paupau a lancé cet après-midi. Ce jeu consiste à faire faire le gage qu'on reçoit à une personne déterminée, sans limite de temps. Si on gagne, on prend son gage. J'ai perdu en deux heures, parce que César a eu une bonne opportunité ! Aussi parce que je suis trop crédule, impossible de me méfier de tout l'équipage tout le temps ! Pourtant César devait me faire faire le bruit de la truie... 😅


J'ai adoré cette journée, bercée par le mouvement de l'océan, caressée par les doux rayons du soleil. Ce mix de moment partagés, où le rire et la bonne humeur sont communicatifs, et de moments en solitaire, où je me laisse emporter par les récits que je lis ou mes pensées. C'est parfait.

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Publié le 28 janvier 2023

TRANSATLANTIQUE JOUR 6.


Hier, César nous a informé qu'avec un appui moteur, on peut gagner 2 jours au moins sur notre voyage. Inutile de dire que j'étais la seule à m'y opposer et que donc mon vote ne compte pas. Je préfère de loin n'utiliser que la force de propulsion du vent pour avancer, quitte à passer des jours sans avancer. C'est pour ça que j'ai choisi de naviguer en voilier. Mais soit, je me suis fait une raison et ça ne fait que renforcer mes rêves et projets pour la suite, comme traverser un jour avec mon voilier, et avec ma manière de faire et de vivre. ⛵😍


Depuis que nous avons reçu l'iridium (au départ des Canaries), César prend un malin plaisir à rédiger des chroniques truffées d'humour pour envoyer aux familles. Il nous fait rire et j'imagine que nos proches les dévorent chaque jour, comme un nouveau chapitre d'un livre à suspens.


C'est d'ailleurs à son tour de piocher dans la boîte à défis. Il nous concocte des Olympiades composées de trois jeux : cache cache (les cachettes ne sont pas nombreuses sur un bateau 😅), un deux trois soleil, et un parcours de billes. Tout ça sur un catamaran en mouvement ! C'est une franche partie de rigolade qui dévoile au grand jour le côté compétiteur (ou non) de chacun.


Aujourd'hui, c'est ma journée sans quart. J'ai lu et j'ai peint ma première aquarelle (celle que j'avais commencé il y a... 4 semaines). No comment. Quand je pense que je savais dessiner quand j'étais petite...

J'aime le petit rituel qu'on s'est créé : ressentir le moment de bien-être post séance de sport amplifié par le sentiment que provoque le coucher de soleil est tout bonnement parfait.

C'est bon aussi de reprendre ces habitudes sportives, qu'on avait perdu, étant à l'arrêt au port. J'adorais la vie au port mais je suis très heureuse de naviguer à nouveau.

Vivre sur un bateau, c'est changer sa manière de vivre. C'est vivre en harmonie avec la nature. Le vent nous porte et nous dicte où aller. Le soleil rythme nos journées. Quand il se couche, il fait si noir que notre activité cesse généralement aussi. C'est aussi vivre au rythme des quarts et donc parfois se lever en pleine nuit. C'est apprendre à dormir avec le bruit du vent ou des moteurs, de manière entrecoupée, ou ballottés dans tous les sens avec les vagues et la houle. C'est se suffire de choses simples, comme un coucher de soleil, un ciel étoilé, un arc-en-ciel, pêcher son poisson. C'est se rendre compte de sa vulnérabilité face à la puissance de la nature. C'est parfois dur, parfois doux. C'est toujours formateur et enrichissant.

Je suis fan de la vie sur l'eau. C'est paisible et contrairement à ce que d'autres pourraient ressentir sur ce petit voilier perdu au milieu de ce vaste océan, je me sens libre.

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Publié le 28 janvier 2023

TRANSATLANTIQUE JOUR 7 : on est à la moitié de notre traversée ! ⛵


On a vraiment bien avancé durant cette première semaine. On a eu ce bon petit vent depuis notre départ, les alizés tant attendus. Mais le vent faiblit ces prochains jours, nous obligeant à naviguer au moteur.

La couleur de l'Atlantique est magnifique, un bleu pur. L'océan me fascine par sa grandeur, son intensité, sa beauté, sa force.

Je prends conscience de notre petitesse. Nous, sur ce bateau, un catamaran imposant et luxueux à nos yeux, un radeau de survie comparé à cette vaste masse d'eau qui nous entoure. Ce bateau qui pourrait être abîmé par un ciel de tempête ou englouti par un océan déchaîné. On est si peu face à la nature, et c'est bon de se le rappeller. On ne dompte pas les éléments, on apprend à composer avec eux et rien de tel que la voile pour le comprendre.

Malgré tout, je n'ai pas peur. À aucun moment.


Pourtant... plus les jours passent, plus le bateau se détériore. César l'a comparé à un meuble Ikea qu'il va livrer en pièces détachées. Et franchement on n'est pas loin du compte. Liste (non exhaustive) :

- défaut de construction de mât - menace de tomber

- un moteur en panne (première panne avant notre arrivée aux Canaries, seconde panne aujourd'hui)

- une des réparations faites au mât a déjà sauté

- fuite d'eau (réparée)

- défaut d'une pompe à eau (tourne dans le vide, il faut systématiquement relancer tout le système électrique)

- tabouret de la table à carte cassé (réparé)

- perte d'une manivelle de Winch

- casse ou perte de la moitié des ustensiles de cuisine

- perte d'un coussin extérieur (envolé dans la mer Méditerranée lors du gros temps du premier soir)

- mauvaise isolation entre le mât et l'intérieur - laisse passer l'eau lorsqu'il pleut !

- usure "normale" après 2 mois d'utilisation : boutons des taques de cuisson brûlés, coussins affaissés, bouts usés et cassés, lampes de chevet dévissées,...


Si vous cherchez à acheter un bateau un jour, n'achetez jamais un BALI !


Aujourd'hui, mon quart est de 9h à midi. On tente d'amadouer notre capitaine, car nous, les nanas, on aimerait réquisitionner le fly au moins une heure par jour. On aimerait dire adieu à nos marques de bronzage. C'est accepté, il est à nous de 10h à 11h. 💪


Les journées continuent de défiler, sans se ressembler. Qui a parlé d'ennui et de monotonie sur un bateau ? Bien-sûr on s'occupe avec les mêmes activités : jeux de carte, de société, aquarelles, lecture, bain de soleil, musique, écriture. Mais chaque jour est réellement différent, en fonction des humeurs, des états de fatigue, du vent, des envies.


L'ambiance est au top depuis notre départ, et particulièrement aujourd'hui ! On a fêté la moitié de la traversée en débouchant une bouteille de vin rouge à midi. Bouteille, qu'on jetera à l'océan dans quelques jours, en espérant qu'elle trouve un jour le chemin d'un rivage avec nos petits mots.

Il en faut très peu pour lancer les hommes du bateau, qui continueront à vider toutes les bouteilles qu'ils trouveront durant l'après-midi, en riant à gorge déployée à chacune de leur blague. Il en faut très peu aussi pour motiver Paupau et Ali, mais, à la différence des hommes, la musique seule les lance. À 20h30, elles sortent les tenues du Cap Vert et embrayent sur la désormais célèbre - et connue de tous (par cœur, vraiment par cœur!) - playlist de variétés françaises. La célèbre chanson de Claude François a été repensée à mon image. Ainsi c'est désormais "elle a les. Yeux. Bleus. Sophia. Elle a le. Front. Brun. Sophia". Ça enchaîne sur la chanson des sardines, les Rita Mitsouko, Louise Attaque et autres "pépites" de la chanson française. Toujours dans mon humeur contemplative et pensive de cette traversée de l'océan, moi je les regarde assise, à la fois admirative de cette énergie débordante et de cette insouciance permanente (je parle des filles bien-sûr), et désemparée face à cette soirée qui se répète en boucle depuis 2 mois. 😅



J'ai adoré cette journée. J'adore aussi l'ambiance qui se dégage de l'équipage ! Même si en toute transparence, je me suffis amplement des sensations pures de cette traversée, sans besoin ni envie de faire la fête. Pourtant grande fêtarde que je suis, mais j'imagine qu'il y a un temps pour tout.

(Et puis fidèle à moi-même, avec moi c'est blanc ou noir. Toujours dans les extrêmes! 😅)

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Publié le 28 janvier 2023

TRANSATLANTIQUE JOUR 8.


Mon quart est de 6h à 9h. Un de mes préférés pour le calme, la solitude et le lever de soleil.

Mais depuis quelques jours, le soleil se lève plus tard et se couche plus tard, car on continue notre progression vers l'ouest sans changer l'heure. Il va falloir qu'on songe à reculer d'une heure au moins. En Guadeloupe, on en aura trois en moins (cinq par rapport à la France et la Belgique).


Mon quart préféré je disais. Pourtant quand je me lève, je ne suis pas de bonne composition. J'ai mal dormi, j'ai mal à la gorge et je n'ai pas envie. Je fais ce que je fais rarement en quart : rester à l'intérieur devant un film. Je sens que c'est une journée "sans". Ça arrive, et je l'accueille comme ça vient.

Sans doute est-ce dû au faible vent, mais depuis hier il fait très chaud. Si chaud qu'on se renverse des seaux d'eau pour se rafraîchir. Si chaud que les hommes - se croyant toujours être le seul sexe que les rayons du soleil n'atteignent pas - se transforment en écrevisses. Si chaud qu'on n'a désormais plus besoin de mettre un petit pull en début de soirée, et ça ça fait plaisir.


J'ai peut-être trop pris le soleil hier, car aujourd'hui, je le fuis. C'est rare de ma part.


Mais je ne raterais pour rien au monde l'unique baignade de la transat' ! Sauter dans l'océan Atlantique en plein milieu de notre traversée 😍 L'eau est à 25 degrés. Il y a 5000m de fond en dessous de nous. Je suis étonnée du fort courant et des vagues dans lesquelles je me débats. Je ne peux m'empêcher de me dire que si on tombe à l'eau en navigation, c'est fini. J'y pense mais quand je suis sur le bateau, jamais je n'en ai peur. Cette baignade me fait un bien fou. C'est systématique, m'immerger dans l'océan me purifie le mental. On passe une petite demi-heure à profiter de ce moment avant de renvoyer la grand-voile et le génois et de remettre en marche le moteur. Le vent n'est pas encore revenu suffisamment que pour le couper. C'est reparti.


Ça creuse de nager dans l'océan. C'est en tout cas l'excuse qu'on se trouve pour préparer un moelleux au chocolat. Après les pâtes carbo du midi, la séance de sport serait bienvenue. Mais aujourd'hui, non, je n'ai pas envie.


Il est 21h, je ne comprends pas où sont passées les heures entre notre baignade et maintenant. Impressionnant. César fait la sieste, Paupau cuisine, Ali dessine, Martin et Lolo sont sur leurs ordis, Thomas lit. C'est ambiance tranquille ce soir. Je ne vais pas tarder à aller dormir puisque je me lève à 3h.

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Publié le 28 janvier 2023

TRANSATLANTIQUE JOUR 9.


Cette nuit mon quart était de 3h à 6h. J'ai eu le sommeil agité mais visiblement réparateur puisque je me réveille en forme. Quand je me lève, Ali et Thomas sont debout. Ali car c'est son quart, Thomas car c'est un oiseau nocturne. Au moins j'ai eu le lit pour moi toute seule. Voilà deux quarts que je passe majoritairement à l'intérieur. Je suis pourtant toujours émerveillée de voir ce dôme d'étoiles et le lever de lune, que j'ai eu la chance de voir cette nuit.


Quand je pense qu'on pensait vivre un petit mois ensemble lorsqu'on a quitté Marseille le 23 novembre. Le 23 janvier, on arrivera à destination. Deux mois plus tard, jour pour jour.

En commençant ce périple, on pensait débarquer à Saint-Martin, l'île française la plus au Nord, car la destination de livraison du bateau était les Bahamas. Mais la destination a changé et César peut donc nous arrêter sur une île plus au Sud, à savoir la Guadeloupe.

On pensait aussi faire ce périple d'abord à 5, puis à 6 et finalement à 7. Un équipage à qui on a octroyé une confiance aveugle dès le début. Confiance pour les veilles, confiance aussi pour le savoir vivre ensemble. Confiance en les compétences de notre capitaine César, lui qui allait nous emmener traverser l'Atlantique sur un bateau qui n'est pas le sien. Finalement confiance au bateau aussi, même si pour le coup, on n'aurait peut-être pas dû. Tiens le pilote automatique a changé de cap seul pour la première fois ce matin. Prémisse de galères futures ?


Le second moteur ne reprend pas. Le message d'erreur concerne un défaut de gasoil. C'est pourtant le même gasoil qui alimente le second moteur. Encore une bizarrerie.


Sur cette deuxième partie de l'Atlantique, il y a toujours des poissons volants mais beaucoup moins qu'au début. Par contre, l'océan est rempli de sargasses, des algues qui flottent sur l'eau. Je m'étonne de ne voir que très peu de dauphins, comparé à la Méditerranée. Aujourd'hui, c'est la troisième fois seulement qu'on en voit. Par contre, l'oiseau qu'on avait vu les premiers jours survole le bateau tous les jours, souvent en fin de journée. Il doit être épuisé. On espère qu'il prendra suffisamment confiance pour se poser.



Sargasses .


Aujourd'hui, on recule d'une heure. C'est bien de le faire petit à petit pour ne pas avoir un décalage de trois heures à notre arrivée.


Je pense à notre arrivée qui se rapproche, vite. Trop vite. Je pourrais rester longtemps sur l'eau je pense. Je partage des sentiments ambivalents, encore une fois, car j'ai aussi hâte de continuer la suite de mon voyage. Je ne sais pas de quoi il sera fait et j'en suis heureuse. C'est comme ça que j'aime voyager. Ne rien prévoir, me laisser porter. J'ai hâte d'apprendre la voile, la plongée. Mais je profite pleinement de ce bateau et ces moments.


Pendant que chef Thom nous prépare le meilleur risotto du monde (butternut, crème de chorizo, œuf mollet, une tuerie !) le cendrier vole à l'eau ! Un pot métallique, heureusement vidé ce matin de ses cendres. Aucune hésitation, César met le moteur au point mort, enroule le génois et part rechercher le cendrier. Avec cet océan agité et cette caravane non manœuvrante, dur de s'en approcher. Ali finit par sauter à l'eau pour récupérer ce pot métallique.

Les activités sont diverses cet après-midi, bain de soleil pour Ali et moi, lecture pour Martin, partie de cartes pour les autres. Ali s'améliore de jour en jour en aquarelle. Elle a récemment peint au café, au vin et au curcuma. Le résultat est magnifique !


C'est aujourd'hui qu'on jette notre bouteille à la mer ! Chacun écrit son petit mot et je suis touchée de voir autant de bienveillance, d'amour et de souhaits positifs. J'espère sincèrement qu'un jour quelqu'un recevra ces bonnes ondes.

Ce soir, c'est "le dîner de cons" tous ensemble. Qu'on est beaux tous les sept devant l'ordi. Je m'éclipse vers 22h pour faire une sieste car mon quart est à minuit et mes jeux se ferment.

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Publié le 28 janvier 2023

TRANSATLANTIQUE JOUR 10.

Mon quart est de minuit à 3h. Dur dur de se réveiller après 2 heures de sommeil. Je passe la moitié de mon quart à admirer les étoiles sur le fly, c'est beau. L'autre moitié à l'intérieur devant un film. On est tellement seuls au monde que c'est suffisant de sortir faire un tour d'horizon toutes les 30min.


Le planning de la journée s'annonce peu productif. Journée banale, lecture, dodo, sport.


On a encore reculé d'une heure aujourd'hui. Du coup, avant hier à 20h30 on avait encore un peu de luminosité. Aujourd'hui à 19h, le soleil se couche.


Je suis fatiguée d'entendre et de ressentir ce moteur, qui tourne depuis quatre jours non stop. Presque heureusement, le moteur qui ne fonctionne plus est l'arrière tribord, au niveau de ma cabine. On a déjà dû remplir les tanks avec les bidons de gasoil supplémentaires. Et je prie secrètement pour qu'il n'y en ait plus rapidement ! Qu'on stoppe ce moteur et s'en remette au vent, qui devrait forcir un peu déjà cette nuit, demain et les jours suivants.


Aujourd'hui, c'est la première journée où je ressens un peu de lassitude. Du mouvement constant du bateau et puis d'être sur ce bateau depuis deux mois, H24 tous ensemble. Je ressens le besoin d'être seule, notamment pendant mon quart, de 21h à minuit, où je m'éclipse seule sur le fly pendant que le reste de l'équipage regarde un film. La brise est chaude, et le ciel sublime. Tout va bien et l'ambiance est toujours parfaite. Heureusement que c'est un équipage en or. Et puis je vis quand même la transatlantique ! C'est marrant comme c'en est presque devenu banal pour moi. Sans le côté négatif du terme bien-sûr. Mais normal, comme prendre le train.


Au port du Cap Vert, la transat' était le sujet de conversation de tous les équipages. Comme les voisins de quartier parlent de la boulangerie du coin. Couples de retraités, familles, bateau-stoppeurs, skippers, tous partagent cette passion pour la mer et traverser l'Atlantique est naturel. En entendant ces enfants de six ans parler du vent et des poissons comme les enfants citadins parlent des smartphones, ça m'a donné du beaume au cœur et foi en l'humanité. Si tous les enfants étaient élevés de cette manière, avec la nature comme terrain de jeu et d'apprentissage, peut-être récupérerait-on un peu d'espoir pour l'avenir.


Comme quoi, l'anormal devient normal lorsqu'on se rapproche des personnes qui partagent notre vision du monde, nos valeurs, nos aspirations. Et pour quelqu'un comme moi qui aspire à vivre différemment de ses proches, ça fait du bien de se sentir compris.

Lorsque j'ai mentionné ce projet, je paraissais pour une folle aventurière. Ou, à l'opposé, pour quelqu'un de très admirable. Comme si c'était insensé comme projet ou que ce n'était pas à la portée de qui en avait l'envie. Moi dans ma tête et mon cœur, je n'étais ni folle ni admirable. Je suivais juste ma voix intérieure, ma voie tout court.

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Publié le 28 janvier 2023

TRANSATLANTIQUE JOUR 11.


Événement important, ce matin on coupe le moteur ! On a enfin à nouveau assez de vent pour ne naviguer qu'à la voile. J'en suis heureuse ! On a perdu un peu de temps ces derniers jours malgré tout et on prévoit une arrivée plutôt le 24. J'espère en tout cas pouvoir continuer à la voile jusqu'à la fin.


Farniente, soleil, lecture, papotage et séance bronzage intégral sur le fly avant que nos estomacs ne crient famine. Il est 14h, on s'attelle tous ensemble à préparer le... brunch. Galettes, pancakes, saumon, gazpacho. On se régale. À 16h, place à la sieste. C'est la belle vie quand même ! J'envisage de plus en plus de devenir skipper. Je sais que malgré les apparences, César endosse beaucoup de responsabilités et de stress aussi lors de ces convoyages aux allures pourtant détendues.


Je suis quelqu'un de relativement lunatique. Je m'étonne cependant constamment de pouvoir changer de mood si rapidement, et parfois de passer d'un opposé à l'autre. Ainsi hier j'étais comme lassée et aujourd'hui je vis une de mes meilleurs journées de transat'. 🤷 J'apprends à accueillir les émotions comme elles viennent et les vivre pleinement quelles qu'elles soient.


La vie à bord à sept se passe au mieux. Aucune tension, beaucoup de respect, de bienveillance, de partage - naturel et spontané - des tâches, d'entraide. Vraiment, il n'y a rien à redire. Personnellement, je ne ressens pas de manque d'intimité ou d'espace. J'arrive à m'isoler quand j'en ai besoin. Je pense qu'il en est de même pour tout le monde.


Mon quart est de 18h à 21h, pendant le sport et le coucher de soleil. C'est ma-gi-que ! Faire son sport dans la pénombre, puis se coucher sur le fly pour admirer le ciel. J'ai l'impression que mon corps tout entier vibre aux mêmes fréquences que le ciel étoilé, l'océan agité et ce continuum espace-temps. Je me sens bien, parfaitement bien et alignée.

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Publié le 28 janvier 2023

TRANSATLANTIQUE JOUR 12.


Un peu de vent ce matin. On avance avec une moyenne de 5/6 noeuds. C'est pas rapide mais on n'est qu'à la voile. Moins de vent l'après-midi. Ce qui nous contraint à rallumer le moteur pour maintenir cette vitesse. Mon quart est de 15h à 18h. Je lis. Je réfléchis. Je pense. Trop. Aujourd'hui, rien de particulier, c'est une journée banale au milieu de l'Atlantique.


Mais comment une journée peut-elle être banale au milieu de l'océan ? Parce qu'on est des humains, parfois épris d'un mental envahissant, parfois inconscients de la chance qu'on a de vivre ce qu'on vit. Parfois même de la chance de vivre tout court.


Heureusement, le coucher de soleil me rappelle à l'ordre. Première giffle de la journée. C'est si beau et apaisant. Ces couleurs, ces nuances, ces dégradés, ces formes, ces textures dans le ciel. Place à la scène suivante. Deuxième giffle ! La nuit noire. Le dôme étoilé. L'équipage entier est assis sur le côté bâbord du bateau, là où le soleil a terminé sa course. Observant le ciel, se remémorant des souvenirs, chantant ensemble des classiques, parfaitement choisis pour le moment. Le vent est faible et freine notre progression, mais peu importe, le moment est trop beau. L'océan fait reluire le plancton phosphorescent. Le ciel nous émerveille avec ses étoiles filantes. Je suis présente, ici, maintenant, et remplie de ce moment. Je ne peux détacher mes yeux de ce ciel, mon cœur de ce ressenti, mon corps de ce moment.


Je me surprends encore à être si lunatique. Passer d'un ressenti presque morose à celui de plénitude et profond bonheur. 🤷


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24
Publié le 28 janvier 2023

TRANSATLANTIQUE JOUR 13.


Jour 13, jour de chance. Une baleine ! 😍 Environ 8m. Elle a tourné autour du bateau pendant 1 heure, surfant sur les vagues, jouant avec le courant, passant sous le bateau. C'était magique !


Aujourd'hui, on arrive à terme de légumes, viandes, fruits. On cuisine alors les racines achetées au Cap Vert : manioc, igname et patate douce (à la chaire blanche, différente de celle qu'on connaît, en goût et en texture). Accompagné de riz et lait de coco, un délice.


On prévoit toujours une arrivée le 24 au matin. On est bien en quantité d'eau dans les tanks aussi, environ 50% dans chacun. Les douches à l'eau de mer ont payé, et puis on s'y est habitués.


Je n'ai pas de quart aujourd'hui. Quel confort d'être autant sur un bateau en traversée. On a même le luxe de ne pas avoir de quart 1 jour sur 8. J'imagine une traversée à deux. Ça voudrait dire se relayer toutes les 2 ou 3h pour veiller. Et donc ne jamais dormir plus que par tranche horaire de 2 ou 3h. Veiller ou même pour barrer. Car on a aussi le luxe d'avoir un pilote automatique qui barre seul depuis le début. Jamais on n'a dû barrer. C'est à la fois un gros avantage mais à la fois, une part de moi aurait aimé plus de challenge. Je mesure quand même la chance qu'on a de faire des quarts de 3h seulement par jour et ne pas vivre une vraie privation de sommeil.


Oups, j'ai pensé et écrit trop vite. 18h : voilà plusieurs fois que le bateau part au lof (se rapproche du vent, et donc change de direction) pourtant sous pilote automatique. Un écart de route n'est donc pas normal. Une fois il y a deux jours, deux ou trois fois hier, plusieurs fois aujourd'hui. Le verdict est sans appel : le pilote nous lâche ! Il fonctionne mais n'arrive plus à garder le cap, un problème de réglage que César ne parvient pas à résoudre. Nous sommes à environ 40 heures de notre arrivée et nous allons devoir barrer. C'est l'ironie du sort sans doute. Lors du premier départ au lof il y a deux jours, on avait bien pensé à l'éventualité de devoir barrer. On s'était alors dit avec Ali que barrer pendant quatre jours ça faisait beaucoup mais qu'on était tout à fait partantes si ça arrivait deux jours avant la fin. Hier, en discutant avec Thomas, je lui dis que j'aimerais un côté plus authentique et aventurier à la traversée à la voile : barrer, notamment. Et aujourd'hui, j'écris que je mesure la chance d'avoir un pilote automatique mais que j'aimerais plus de challenge.


En parallèle, je suis en train de lire des livres sur les synchronicités et le pouvoir de l'intention. Que dois-je donc comprendre là !?


Plus de pilote -> nouveau système de quart mis en place. On sera par deux, et César enchaîne des périodes de 2 heures puis 1 heure de repos. Pour lui, ça va clairement être 48h erreintantes. Peu de sommeil, beaucoup d'attention. Heureusement, on a 20 nœuds de vent établis et on ne navigue qu'à la voile. Pour nous, c'est la découverte des sensations de voile sur ce bateau. Enfin.

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Publié le 29 janvier 2023

TRANSATLANTIQUE JOUR 14.


De 2h à 5h, j'etais en timonerie pour barrer. En alternance avec Ali ou César. Mon "souhait" devenu réel. J'adore ! Barrer demande de la concentration et c'est bien de le faire par phases de 30min/1h max. Donc on se relaye. César reste lui toute la nuit là-haut, à dormir 15 minutes par-ci, 15 minutes par-là, sur le fly. Lorsque ça concerne son job et sa passion, César est dévoué. Et puis, ça lui fait un bon entraînement pour la mini transat', une compétition sur petit voilier de 6m, seul. Ça fait 2 mois qu'on est sur ce bateau et c'est la première fois qu'on barre. Première prise en main en pleine nuit, navigation à l'aveugle. Aux sensations et au compas. Je le fais aisément, sans devoir regarder le compas. Je barre en ressentant le vent, les vagues, le départ au lof, juste aux sensations. J'adore !


Ce matin, il pleut. On se prend grain (= nuage qui annonce du vent) sur grain. Comme si après cette belle traversée sans embûches, presque trop parfaite, on devait maintenant traverser quelques épreuves les derniers jours. D'abord un moteur en moins, ensuite le pilote qui lâche, maintenant la météo qui est capricieuse. Personnellement, ça ne fait que me motiver, je suis pleine d'énergie et prête à affronter ces défis.

En réalité, on est tous contents de vivre cette expérience de barre et les sensations de voile que ça nous procure enfin.


Aujourd'hui, c'est le dernier jour. Dernier coucher de soleil, dernier jour d'océan à 360 degrés, derniers moments partagés sur ce bateau. Et notre dernière journée se trouve chamboulée par ce cap à tenir. Encore une leçon de vie : profiter de chaque jour comme si c'était le dernier. On ne sait pas de quoi demain est fait.


Voilà 2 mois jour pour jour qu'on a quitté Marseille, et 2 semaines qu'on est partis du Cap Vert et qu'on navigue pour rejoindre une autre partie de la Terre. C'est passé si vite. Mes sentiments sont partagés, entre tristesse et nostalgie de la fin de cette traversée et aventure, et excitation de retrouver la terre ferme et poursuivre mon voyage.


On passe cette journée à se relayer à la barre, et à terminer de composer une chanson de remerciements à notre cher capitaine. Avec trois artistes à bord, les idées fusent !



Le soleil est vite revenu, chassant les nuages et la pluie. La baleine aussi est revenue et accompagnée de sa maman. On a bien passé deux heures à courir de l'avant à l'arrière du bateau pour suivre leurs mouvements et s'émerveiller à chaque fois qu'elles sortaient de l'eau.


César instaure des quarts de 1h chacun à partir de 18h et pour toute la nuit, jusqu'à notre arrivée à Marie Galante 😍. Mes quarts sont de 20h à 21h puis de 3h à 4h.

Je commence à barrer un peu avant mon quart, pressée de reprendre la barre et... je n'ai plus aucune sensation. Je ne ressens pas les vagues, ni le vent. Je n'arrive pas à anticiper les mouvements du bateau ni les départs au lof. Est-ce dû au courant qui est perpendiculaire ? Le vent est tjs arrière. Je ne sais pas mais je barre toute l'heure les yeux rivés sur le compas, c'est désagréable et je n'éprouve aucun plaisir à barrer. Même un peu de frustration. C'était si instinctif hier dans la nuit et cet après-midi. César me dira plus tard que c'est apparemment à cause du faible vent. La tenue de la barre est différente. Il faut s'adapter. C'est dans ces moments qu'on reconnaît les bons barreurs.. Y a encore du chemin à parcourir !


Je laisse la barre à Ali après mon heure et le petit plat de Thom me réconforte. Petit dodo avant mon deuxième quart. Ensuite on veillera dehors pour la fin de nuit. Pour profiter du ciel étoilé et puis du lever de soleil qui nous laissera apercevoir les terres !


Cette journée aura été ma préférée. Peut-être est-ce dû à notre arrivée imminente mais encore plus de bienveillance, d'amour, de confiance règne dans l'équipage. On sent que c'est la fin, et ça nous rapproche encore. J'ai aimé passer deux heures à scruter l'océan pour apercevoir les baleines, le relai à la barre et les sensations de la navigation à la voile.

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Publié le 30 janvier 2023

TRANSATLANTIQUE JOUR 15 : ON ARRIVE EN GUADELOUPE !

À 7h, Terres en vue ! 😍 On fait cap sur Marie Galante pour y passer la journée. On descendra ensuite tous en Guadeloupe et César continuera sa route jusqu'à Tortola, aux îles vierges britanniques, là où il doit délivrer le bateau.


Quelle excitation d'arriver !


Clap de fin sur une aventure exceptionnelle, qui restera gravée dans nos mémoires et nos cœurs.

Merci IMY CARIBBEAN ❤️

Merci l'équipage et notre super skipper ❤️