Carnet de voyage

Aventure & éducation Polaires

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Embarqué sur le navire scientifique allemand "Polar Stern" en tant que pilote d'hélicoptère, vous trouverez dans ce journal le périple qui nous mènera jusqu'au Pôle Nord puis vers le pôle Sud.
Du 8 août 2019 au 3 avril 2021
605 jours
Ce carnet de voyage est privé, ne le partagez pas sans l'autorisation de l'auteur.
Publié le 16 juillet 2019

Ancien pilote d'hélicoptère de l'Aéronautique Navale française et servant encore comme lieutenant de vaisseau de réserve, j'ai pu naviguer durant 25 années sur la plupart des frégates de la Marine, sur de nombreux océans, et participer à des missions passionnantes telles que le sauvetage en mer, la lutte contre le narcotrafic, la lutte anti-piraterie, la traque de la pêche illicite notamment aux îles Kerguelen (Terres Australes et Antarctiques Françaises), la lutte contre la pollution ou encore la guerre en Libye. Vers 10 ans (1984), je découvrais, émerveillé, les reportages de Jacques-Yves Cousteau en hélicoptère au-dessus de sa Calypso. Plus tard, les émissions de Nicolas Hulot "Ushuaïa" m'ont profondément marqué, en particulier les survols d’endroits inaccessibles et vierges aux paysages somptueux.

En apprenant que le navire scientifique Polar Stern recherchait un pilote d'hélicoptère embarqué pour une expédition polaire, je me suis dit que le rêve de gosse pourrait bien se réaliser...

LA CALYPSO !!! 
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PROJET PÉDAGOGIQUE


Chevalier de la Légion d'Honneur et secrétaire général de la SMLH, section des Vosges, je souhaite, sous l'impulsion de mon Président (M. Eric Bœuf), m'inscrire dans le plan d'action de cette société qui veut résolument se tourner vers la jeunesse.


Mon projet est donc de profiter de cette aventure pour mettre en place un contact hebdomadaire via un Blog (en septembre 2019 puis de novembre 2019 à avril 2020) avec plusieurs collèges ou lycées qui pourraient l'utiliser pour différents objectifs éducatifs ou pédagogiques : l'étude scientifique du réchauffement climatique, certes, mais aussi celles des langues (interviews et reportages en anglais ou allemand), des mathématiques, de la biologie, de la physique, de la géographie, de l'histoire, du droit, pourraient aussi bien en découler...

A mon retour, une conférence plus aboutie avec les élèves sur l'expédition permettrait de clôturer l'année, appuyée par l'intervention de Luc MOREAU, glaciologue à Chamonix, docteur en géographie alpine ayant participé à une dizaine d'expéditions polaires.

Sous cette bannière, la SMLH a pour ambition de contribuer au renforcement de la cohésion nationale, en particulier sous l’angle intergénérationnel et dans une approche civique, solidaire et ouverte sur la société, telle que nous la connaissons aujourd’hui mais aussi en anticipant sur son évolution future et en particulier le risque d’affaiblissement du lien social.Cette ambition porte tout naturellement la SMLH à s’investir, parmi d’autres acteurs, au profit de la jeunesse de notre pays et à s’intéresser à l’éducation des futurs citoyens.

En espérant que cette aventure suscite votre intérêt. N'hésitez donc pas à me poser directement vos questions ou à me proposer des thèmes à aborder en lien avec vos programmes scolaires sur ce blog ("commenter") ou sur drachsebastien@gmail.com

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L’EXPÉDITION MOSAIC

Il s’agit de la plus importante expédition de recherche arctique jamais réalisée jusqu’à ce jour. Pendant un an, le navire Polarstern va dériver dans les glaces du pôle nord, avec à son bord pas moins de 600 personnes. Les chercheurs, issus de 17 pays dont la France, vont effectuer des relevés et collecter des données relatives au climat et aux écosystèmes durant la période hivernale, dans cette région du monde difficilement accessible aux scientifiques.

Pour approvisionner le navire, plusieurs brise-glaces, avions et hélicoptères seront mis à contribution. L’objectif est d’obtenir des informations importantes sur les interactions entre océan, calotte glaciaire et atmosphère, afin de mieux anticiper les conséquences du réchauffement climatique.

La mission, dont les préparatifs ont débuté en 2011, est pilotée par l’Institut Alfred-Wegener pour la recherche polaire et maritime (AWI), appartenant à la communauté des centres Helmholtz. Le budget de l’expédition s’élève à 120 millions d’euros, financé à 90% par le BMBF.

En octobre prochain aura lieu à Berlin la seconde Conférence ministérielle sur la recherche scientifique dans l’Arctique (Arctic Science Ministerial), à laquelle participeront une trentaine de pays dont la France.

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LE POLARSTERN

Le Polarstern (l’étoile polaire) est un navire de recherche et brise-glace allemand de l'Institut Alfred Wegener pour la recherche polaire et marine de Bremerhaven.

Il est principalement utilisé pour des recherches en Arctique et Antarctique.

D'une longueur de 118 m, c’est un brise-glace double coque. Il peut être opérationnel jusqu'à une température extérieure de −50 °C et peut briser une banquise de 1,5 mètre d'épaisseur à une vitesse de 5 nœuds.

Il abrite dans son hangar, 2 hélicoptères BK117 de la compagnie HeliService basée à Emden (Allemagne).

L'Institut Alfred Wegener (AWI) pour la recherche polaire et marine est un institut scientifique fondé en 1980, et nommé d'après le météorologue et climatologue Alfred Wegener.

Comment ça fonctionne ? 
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LES HÉLICOPTÈRES

BK117 HELISERVICE 

Il s'agit de deux hélicoptères légers (3350 kg) BK 117 C1 de la Compagnie HeliService basée à Emden (Allemagne) mis à la disposition de l'institut pour apporter leur soutien aux opérations de sauvetage, de transport de personnel ou de matériel, d'emport sous élingue, de prises de vue, et d'emport de capteurs (laser, sondes) participant à la collecte de données.

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Je remercie en tout premier lieu mon père m'ayant transmis le goût de l'Aventure, de la Marine, de l'Aviation et des Hélicoptères ...

Xavier P., ancien pilote de l'Aéronautique Navale ayant largement contribué à mon recrutement.


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Pour en savoir plus :

https://www.largefacilitiesworkshop.com/wp-content/uploads/2019/03/SupportingMOSAiC.pdf

Publié le 17 juillet 2019

Afin d'embarquer sur le Polar Stern, il m'a fallu passer pas mal d'examens médicaux et aéronautiques et me mettre à jour de quelques stages.

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EXAMENS MÉDICAUX

Imaginez qu'un rapatriement sanitaire soit nécessaire près du pôle nord en hiver par nuit permanente... Plutôt compliqué donc. Même si un médecin est embarqué, j'imagine que ses compétences chirurgicales sont limitées. C'est pour cette raison que l'Institut Alfred Wegener (AWI) impose à tous les participants embarqués un check-up médical complet du dentiste à l'ophtalmo en passant par l'électrocardiogramme d'effort (qui confirme que le patient peut essayer de fuir l'ours polaire ???). S'il vous plait, ne vous moquez pas de ma ceinture abdominale qui est là uniquement pour mieux résister au froid arctique !!!

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STAGES

AWI fournit tous les vêtements nécessaires, de la tête aux pieds, pour supporter les froideurs extrêmes nordiques. Ces équipements individuels sont entièrement chargés à bord avant l'appareillage de Bremerhaven soit environ 500 sacs bien fournis...






HeliService m'a (re)formé au travail en équipage car un mécanicien dit "assistant de vol" sera assis en place gauche et pourra ainsi m'aider dans toutes les tâches hors pilotage (coordonnées GPS, radar météo, fréquences radio, lecture d'une procédure...)

Un cours sur les précautions à prendre en cas d'emport en vol de certaines matières dangereuses autorisées m'a aussi été dispensé. Matières telles que des piles lithium, bouteilles de gaz, groupe électrogène, que les scientifiques d'AWI ne manqueront pas de demander à embarquer.

Heureusement, grâce à mon emploi récent comme pilote réserviste de la Marine Nationale au détachement 35F de sauvetage en mer de La Rochelle, mon stage de préparation au crash et de survie en mer est à jour... Ci-dessous le petit film qui vous explique en quoi cela consiste. L'idée est d'avoir les bons gestes et réflexes et de matérialiser cet événement sans aucun doute hyper-stressant pour que le jour où il survient, il n'y ait pas trop de surprises...

STAGE CESSAN 
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ENTRAINEMENTS AÉRONAUTIQUES

J'ai également dû apprendre les caractéristiques et performances de ce nouvel hélicoptère avec les procédures d'atterrissage, de décollage et de gestion de pannes qui lui sont propres. Un examen en vol d'1h30 ponctué de pannes fictives m'a permis d'obtenir la qualification de pilote sur cette machine.

Début août, un entraînement au transport de charges sous élingue est programmé à Emden. Puis le mois de septembre sera consacré à l'entraînement aux appontages (atterrir sur le pont arrière du navire) et au transport de charges sous élingue, cette fois à bord du Polar Stern en mer, de Bremerhaven vers le nord de la Norvège (Tromso). Il risque bien de ne jamais faire nuit sur cette période estivale !

En octobre viendra le stage "fusil de chasse" car la curiosité des Ours blancs impose que nous en ayons un à bord de l'hélicoptère, puis les vols de nuit et les atterrissages dans la neige dans les Alpes afin d'être préparés à la mission MOSAIC qui débutera pour moi en janvier 2020.

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NOUVEAUX ÉQUIPEMENTS DES HÉLICOPTÈRES

Les hélicoptères aussi subissent des modifications consistantes permettant d'être mieux adaptés au froid (dispositif permettant de réchauffer l'huile et autoriser le vol jusqu'à -45°C), à la nuit (ajout d'un phare de recherche en plus du phare d'atterrissage), à la neige (skis élargis à l'arrière des patins pour ne pas s'enfoncer), et aux scientifiques avec la possibilité d'embarquer un laser permettant de sonder l'épaisseur de la glace en vol (modification de la porte arrière PHOTO 4, ajout de câblage). Un système de ballons gonflables sur les patins permet de ne pas couler en cas d'amerrissage et le radar météo installé dans le nez de l'appareil peut être utilisé pour détecter le navire même sur la glace en plus d'éviter les orages (quand c'est rouge sur la PHOTO 3, c'est une zone orageuse à éviter !!!). Les techniciens sont donc eux-aussi à pied d’œuvre pour être fin prêts dans les temps.

Préparation et adaptation des hélicoptères aux cercles polaires 


Voici quelques explorateurs polaires français des plus remarquables. J'en oublie sans doute...



SOURCE WIKIPÉDIA


Yves Joseph de Kerguelen de Trémarec (1734-1797)

officier de marine et un navigateur français du XVIIIe siècle. Il découvre les îles de la Désolation, auxquelles l'explorateur anglais James Cook donnera le nom d'archipel des Kerguelen.

Le 12 février 1772, dans le sud de l'océan Indien, il aperçoit une terre où il croit voir le continent austral, et lui donne le nom de France australe. Il s'agit en fait de l'archipel des Kerguelen. Le gros temps empêche tout débarquement jusqu'au 14 février, jour où un enseigne, Charles-Marc Du Boisguéhenneuc , peut débarquer et prendre possession du territoire au nom du roi.

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Jean-François de La Pérouse (1741-1788)

L'expédition de la Baie d'Hudson (1782) resta assez obscure à l'époque, mais elle développa les talents de La Pérouse, et le fit connaître comme un officier capable de diriger une campagne de découvertes notamment en milieu polaire. Il venait de parcourir des parages peu connus, et il avait eu à surmonter, dans un espace très restreint, la plupart des dangers que la navigation peut offrir dans toute l'étendue du globe. Cette renommée lui vaudrait le commandement de l'expédition de 1786 autour du monde.


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Joseph-René Bellot (1826 -1853)

officier de marine et explorateur français.

En 1851, il participa à une expédition arctique britannique sur le Prince-Albert , qui allait tenter de retrouver sir John Franklin, disparu dans l'archipel arctique canadien en 1847, alors qu'il était parti à la recherche du passage du Nord-Ouest.

Le Prince-Albert fut pris dans les glaces pendant onze mois. Au cours de ce long hivernage, Bellot effectua une exploration de 1 800 km à l'aide d'un traîneau tiré par des chiens autour des îles Somerset. Il rédigea un journal au cours de cette expédition qui présente encore un grand intérêt scientifique et qui aurait même inspiré Jules Verne...

Bellot repartit en mai 1853 à bord du Phénix, toujours à la recherche de Franklin. Il disparut entre deux blocs de glace, dans le canal de Wellington, le 18 août 1853.

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Jules Dumont d’Urville (1790-1842)

Officier de marine et explorateur français qui mena de nombreuses expéditions, notamment à bord del'Astrolabe. On lui doit la découverte de la Terre-Adélie en 1840, rappelant le prénom de sa femme Adèle.





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Jean-Baptiste Charcot (1867-1936)

S'il a d'abord suivi des études de médecine, comme son célèbre père, Jean-Baptiste Charcot a toujours rêvé de prendre la mer à bord d'un bateau qu'il nommerait, à l'image de son désir fou, "Le pourquoi pas ?"

Fasciné par l'exploration, influencé très jeune par les œuvres de Jules Verne, il refuse aussi de voir la France prendre du retard sur la fiévreuse exploration polaire qu'ont entrepris de nombreuses nations au début du XXe siècle. Ses expéditions en Antarctique lui permettent de recueillir des données d'une rigueur et d'une ampleur telles, qu'elles profitent encore aujourd'hui à la recherche, notamment dans l'étude des bouleversements climatiques en cours.

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Paul-Emile Victor (1907-1995)

Premières expéditions au Groenland (1934-1939) avec le Cdt Charcot.

Pilote de l'US Air Force (1941-1946)

Chef des Expéditions polaires françaises (1947-1976)

Pour en savoir plus Cliquez sur ce Lien.

La seule chose promise d'avance à l'échec, c'est celle que l'on ne tente pas.

Jean-Louis Étienne (1946 ...)

est un médecin et explorateur français. Il est connu pour ses expéditions en Arctique, il a été le premier homme à atteindre le pôle Nord en solitaire en 1986, et en Antarctique, notamment la Transantarctica réalisée en 1989-1990.

Mike Horn (1966 ...)

est un explorateur-aventurier de nationalités suisse et sud-africaine.

L'Exploit sportif !

2002-2004 : Expédition Arktos, trek de 20 000 km autour du Cercle Arctique sans chien ni véhicule motorisé en 27 mois.

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Pour ceux qui s'intéressent aux Terres Australes et Antarctiques Françaises, vous trouverez sur ce lien les informations sur les navires Astrolabe et Marion Dufresne ainsi que les postes à pourvoir des différents districts, de Saint-Paul à la Terre-Adélie, dans l'onglet Recrutement.

Hélicoptère Panther de la frégate Floréal sur l'île d'Amsterdam (TAAFs) en 2009 

ACTU - https://www.meretmarine.com/fr/content/avis-favorable-pour-le-classement-des-taaf-au-patrimoine-mondial-de-lunesco

L'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) a émis un avis favorable pour le classement d'une partie des Terres Australes et Antarctiques Françaises au patrimoine mondial de l'UNESCO. Celles-ci comprennent, pour mémoire, les archipels de Crozet, Kerguelen et les îles de Saint-Paul et Amsterdam situés dans la zone subantarctique au sud de l'océan Indien. Dans son avis rendu mi-juin, l'UICN décrit ces territoires comme ayant une valeur universelle exceptionnelle, notamment en raison de leur biodiversité, leurs paysages et leur intégrité. Les îles subantarctiques sont, depuis plus de 50 ans, réservées aux observations scientifiques et moins de 200 personnes y résident en tout. Le site retenu pour le classement correspond aux 673.000 km2 de la réserve naturelle des TAAF, créée en 2016.

Les Terres australes et antarctiques française (TAAF) ont été inscrite au Patrimoine mondial de l’Humanité, ce vendredi 5 juillet, lors de la 43ème session de l’UNESCO à Bakou.

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Le détachement de la Flottille 35F de La Rochelle honore les 10 000 heures de vol de son hélicoptère Dauphin 

Merci au détachement 35F La Rochelle et au LV Thomas P. de m'avoir offert ce très beau livre pour mon départ...

Publié le 20 juillet 2019

Préambule

Je sais... Vous allez me dire que les étapes se transforment en cours d'abord d'histoire et maintenant de géographie mais mon but était d'une part d'en savoir plus avant l'expédition et d'autre part d'intéresser des lycéens de seconde pour qui l'Arctique est au programme. Vivement l'expédition donc ...

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Entre l'Arctique et l'Antarctique, on peut parfois s'y perdre. Ces deux endroits de la planète situés aux antipodes l'un de l'autre présentent de nombreuses différences.

Le terme arctique vient du grec ARKTOS qui signifie ours. Dans l'antiquité, les navigateurs prenaient la direction de la Grande Ourse et de la Petite Ourse pour s'y rendre. Celles-ci brillent en effet toujours au-dessus de l'horizon nord.

L'Antarctique est un continent, l'Arctique un Océan.

Cette différence fondamentale explique un statut Arctique régi par le droit de la mer et enclin à de multiples revendications d'extension de territoires maritimes (définition du plateau continental plus bas).

Au pôle Sud, l’Antarctique est à l’abri des revendications jusqu’en 2048. Il dispose d’un statut différent depuis que des scientifiques ont poussé leurs gouvernants à le déclarer « terre de paix et de science » et d’en interdire toute activité militaire (bases, essais nucléaires, dépôt de déchets nucléaires) et l’exploitation.

Souvent considérés comme deux frères jumeaux, les pôles Nord et Sud sont donc en fait très différents. Physiquement tout d’abord, le pôle Nord géographique correspond à l’océan Arctique, recouvert été comme hiver, par la banquise, tandis que le pôle Sud est représenté par le continent Antarctique, qui lui, supporte une calotte glaciaire.

Jusqu’à ce jour, l’océan Arctique, hors les îles souveraines et leurs 200 milles nautiques réservés, est donc une partie des eaux internationales. Inaccessible (pour le moment) à cause de la banquise, il n’est exploité ni par la pêche, ni le transport maritime et encore moins par l’exploitation des pétrole, gaz ou minerais.

Carte tirée du journal La Croix 

• L'Arctique est une région très riche en ressources naturelles.

• Les ressources halieutiques (liées à l'activité de la pêche) et les grandes zones de pêche sont déjà exploitées. Mais certaines espèces (morue) migrent vers le nord : de nouvelles perspectives s'ouvrent avec le recul de la banquise.

• Les réserves minérales et énergétiques de la zone semblent énormes, estimées à 20 % des réserves énergétiques de la planète. Or, avec le réchauffement climatique, l'augmentation du prix du pétrole et l'amélioration des techniques de forage et d'exploitation (offshore notamment), ces ressources autrefois négligées, car trop coûteuses à prélever, intéressent de plus en plus les grandes compagnies.

• Les acteurs locaux voudraient également développer le fort potentiel du tourisme (1,9 million de personnes pour le Groenland et la Laponie.

• Les enjeux pour le contrôle et le développement d'une région autrefois plus ou moins délaissée sont donc multiples.

Pour en savoir plus avec des exercices : LIEN VERS COURS DE SECONDE

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QUI CONVOITE L’OCÉAN ARCTIQUE

En projetant la fonte des glaces, cet océan deviendrait ainsi bien plus accessible permettant l'ouverture de nouvelles voies maritimes, ouvrant l'accès à la pêche et au tourisme mais aussi rendant son exploitation énergétique rentable...

RUSSIE

Le 4 août 2015, la Russie a déposé auprès de la commission de la Convention de la mer (Convention onusienne de Montego Bay, 1982) une nouvelle revendication de l’extension de son territoire maritime en océan Arctique.

Une première requête russe, en 2002, avait été rejetée. Moscou a donc entrepris des campagnes de cartographie et de géologie sous-marine s’appuyant sur des relevés sonars et des carottages pour étayer son dossier.

Le 02 août 2007, un sous-marin russe, plongeant au niveau du pôle Nord a planté, muni d’une pince mécanique, un drapeau russe en titane, par 4 200 m de fond, sous la banquise. Pour prouver que les dorsales de Lomonossov (qui courent sur 2 000 km, de la Sibérie jusqu’à l’île d’Ellesmere au Canada) et de Mendeleïev sont les prolongements sous-marins du plateau continental sibérien.


ÉTATS-UNIS

Tiré de L'Express

Jamais, depuis la guerre froide, l'Arctique n'avait suscité autant l'intérêt des puissances. Le réchauffement climatique crée autant d'opportunités que d'inquiétudes.

L'industrie des hydrocarbures a reçu de belles étrennes de la part de l'administration Trump. Celle-ci a annoncé le 4 janvier dernier que la quasi-totalité des eaux littorales des Etats-Unis seraient ouvertes, à partir de 2019, à l'exploitation du pétrole et du gaz offshore. Sur 47 autorisations de forage envisagées, 19 concernent les côtes de l'Alaska, que Barack Obama avait pourtant sanctuarisées à la toute fin de son mandat.

Négligé après la chute de l'URSS, dans les années 90, l'Arctique fait dorénavant figure d'Eldorado. Son potentiel suscite des convoitises à mesure que certaines richesses planétaires s'épuisent. Au point que s'y joue une lutte d'influence inédite depuis la fin de la Guerre froide.


NORVÈGE

Alors que les États-Unis promettaient de nouvelles concessions pétrolières, la Norvège a vu les siennes confirmées en justice. Ce même 4 janvier, le tribunal d'Oslo a débouté plusieurs ONG, dont Greenpeace, qui voulaient remettre en cause les licences attribuées en mer de Barents en mai 2016. Un mois plus tôt, un projet à 5 milliards d'euros dans ce secteur a d'ailleurs obtenu le feu vert du géant norvégien Statoil.

La mer de Barents, justement, illustre les intérêts de plus en plus convergents des Etats "polaires" en ce qui concerne l'exploitation des ressources. C'est mû par la volonté d'exploiter cette zone recelant de fortes réserves d'hydrocarbures que la Norvège et la Russie ont réglé en 2010 un différend frontalier de 40 ans.

"Le fait que les pétroliers veuillent forer dans ces zones en dit long sur leur absence de perspectives concernant le pétrole conventionnel. Surtout qu'il faut un baril au-delà de 100 dollars pour espérer de la rentabilité, quand il est actuellement à 60-70 dollars, explique Matthieu Auzanneau, auteur d'un livre référence sur le pétrole, Or Noir (La Découverte). Mais ce n'est pas de gaité de coeur qu'ils y vont. Shell a perdu une plateforme en Alaska en 2012 et la marée noire de 2010 dans le Golfe du Mexique a failli avoir la peau de BP."

Le risque est si grand pour les compagnies pétrolières que certaines ont d'ores et déjà annoncé qu'elles excluent ce type d'investissement. Total a ainsi assuré qu'elle n'exploiterait jamais de pétrole offshore en Arctique à cause des risques environnementaux - les traces de la marée noire de l'Exxon Valdez en Alaska en 1989 sont toujours visibles.


LE SITE DE YAMAL

Total n'a pas les mêmes réticences quand il est question de gaz, dont le sous-sol arctique regorge et que le réchauffement climatique rend moins coûteux à atteindre. Il possède 20% du projet dominé par les Russes Yamal, sur la péninsule sibérienne du même nom, qui a débuté en fin d'année 2017 les livraisons par méthanier brise-glace. Ce site hors norme a coûté 27 milliards de dollars (23 milliards d'euros) et mobilisé des dizaines de milliers d'ouvriers pour construire un port, un aéroport, une usine et des réservoirs, malgré un froid extrême. A partir de 2019, il devrait livrer 16,5 millions de tonnes par an.

Ce type de projet gigantesque d'un nouveau type n'en est qu'à ses débuts. La Russie prévoit dans la même zone de développer "Arctique-2", un site dont la première phase de construction doit s'achever en 2022-2023 et qui doit produire autant de gaz que Yamal.

La fonte des glaces ne fait pas que rendre les ressources plus accessibles, elle ouvre également des axes de navigation. Les méthaniers de Yamal pourront livrer l'Asie du sud-est l'été en profitant d'une route du nord-est plus courte de 15 jours que le passage par Suez.


CANADA

Le Canada et la Russie présentent des conclusions conflictuelles à la Commission des limites du plateau continental des Nations Unies. Canada et Russie ont les mêmes revendications territoriales sur le Pôle Nord. Le Canada cherche à s’appuyer sur les Etats Unis pour l’aider à défendre ses intérêts dans l’Arctique dans une lutte commune contre Moscou en une sorte de « nouvelle guerre froide ? ».


CHINE/DANEMARK

Lien Le Figaro - Convoitise chinoise au Groenland

Fortement convoité, le territoire proche de l’Arctique fait l’objet d’intenses tractations entre les États-Unis et la Chine.

Le Groenland, territoire semi-autonome du Danemark dans l’Arctique, demeure la chasse gardée des États-Unis. Lesquels entendent bien en tenir éloignés les Chinois. Pas question de les laisser s’implanter dans cette île stratégique pour Washington qui y possède une base radar. Aussi, les Américains ont-ils réussi, avec leur allié danois, à contraindre le mastodonte public China Communications Construction Company (CCCC) à se retirer de l’appel d’offres pour l’extension des aéroports internationaux de Nuuk, Ilulissat et Qaqortoq, d’un coût estimé à 483 millions d’euros.


A lire aussi : Journal La Croix : La route de l’Arctique aiguise les appétits

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DROIT DE LA MER - LE PLATEAU CONTINENTAL

Le droit international s'est intéressé depuis peu au plateau continental autorisant alors les pays à prétendre leur souveraineté jusqu'à 350 nautiques de leurs côtes.

Dans cette zone, définie par l'article 76 de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer signée en 1982 à Montego Bay, les États côtiers disposent de droits souverains sur l'exploitation des ressources du sol et du sous-sol des fonds marins.

Le plateau continental d'un État côtier comprend les fonds marins et leur sous-sol jusqu'au rebord externe de la marge continentale, ou jusqu'à 200 milles marins des lignes de base. Sa limite coïncide alors avec celle de l'extension maximale de la zone économique exclusive (ZEE), zone dans laquelle l'État côtier dispose du droit d'exploiter toutes les ressources économiques, dans les eaux, sur les fonds et dans le sous-sol.

Lorsque la marge continentale s'étend au-delà de 200 milles, les États peuvent prétendre exercer leur juridiction soit jusqu'à 350 milles marins des lignes de base en fonction de certains critères géologiques. En contrepartie, l'État côtier doit contribuer à un système de partage des revenus tirés de l'exploitation des ressources minérales au-delà de la limite des 200 milles, géré par l'Autorité internationale des fonds marins.

Pour prétendre à cette extension, l'État côtier doit constituer un dossier technique et juridique devant la Commission des Limites du Plateau Continental (une trentaine de pays sont dans ce cas de figure, dont la France, notamment au titre de ses territoires d'outre-mer).

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CONCLUSION


Les enjeux de l'Arctique

L’Arctique est devenu un véritable enjeu des relations internationales. Son sous-sol abrite un important potentiel énergétique et minier et ses ressources naturelles sont considérables. Avec la fonte des glaces, sa position géographique stratégique ouvre de nouvelles et importantes perspectives en matière de transport maritime international. Ces atouts sont à l’origine d’enjeux très sensibles autour de l’accès aux ressources, du contrôle des zones de pêche et des voies maritimes : cela amène a des tensions en termes de revendications territoriales et l’existence de conflits,entre le Canada et la Russie en particulier. En conséquence les tensions entre les pays concernés se traduisent par un renforcement de leur présence militaire dans l’Arctique pour affirmer leur puissance.

Les États se disputent le contrôle des potentialités de l’Arctique, mais l’exploitation abusive de ses ressources et des routes maritimes pourrait amener a un grave danger environnemental qui viendrait s’ajouter à la menace majeure que représente déjà le réchauffement climatique pour l'Arctique. C’est la raison pour laquelle il est important que des mesures soient prises au niveau international pour encourager un développement durable de l'Arctique.

POUR RÉSUMER :

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Allez, pour vous encourager, Bande Annonce "Top Gun 2" :

Publié le 21 juillet 2019

Un peu d'aération avec ce ventilo géant qu'est l'hélicoptère...

LE GUÉPARD, futur hélicoptère des 3 Armées 

Dans ce chapitre récréatif, vous trouverez pas mal de petits films pédagogiques très bien réalisés sur le fonctionnement d'un hélicoptère mais aussi de nombreux liens vers la filière de recrutement de l'Aéronautique Navale (la Marine Nationale Française).

Comment ça marche ???

Pour un cours d'anglais :

La turbine

EN CAS DE PANNE MOTEUR, L'AUTOROTATION

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COMMENT DEVENIR PILOTE ?

CLIQUEZ Devenir pilote d’hélicoptère

Deux options existent : suivre une formation dans l’Armée ou dans le civil.

Dans l’Armée : un baccalauréat est requis. Vous pouvez vous rapprocher, comme Dorian, de la Marine nationale, de l’Armée de terre ou de l’air. La formation, gratuite, dure de vingt-quatre à trente-six mois. Le futur pilote s’engage alors pour dix ans.

Dans le civil. Il faut alors passer son PPL/H, la licence de pilote privé d’hélicoptère, qui s’obtient après un examen théorique et au moins quarante-cinq heures de vol. Puis le brevet de pilote professionnel, pour lequel une centaine d’heures de vol est nécessaire. Mais il faudra encore de l’expérience avant de pouvoir être recruté par des entreprises. La formation est onéreuse. "Il faut compter environ 350 € par heure de vol, car utiliser un hélicoptère a un coût !", précise Jacques Escaffre, président de la Fédération française de giraviation. Pour une centaine d’heures, cela peut représenter plusieurs dizaines de milliers d’euros.

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Dans la Marine Nationale :

Souvenez-vous plus haut, Paul-Emile Victor :

La seule chose promise d'avance à l'échec, c'est celle que l'on ne tente pas.

Le pilote de l’aéronautique navale est un officier au cœur de missions aériennes très variées : protection d'une force, assaut contre des unités à terre ou en mer, renseignement, lutte anti-sous-marine, sauvegarde maritime ou secours en mer. Selon ses aptitudes et ses mérites, l'élève-pilote sera affecté à l'issue d'un tronc commun vers la filière pilote de chasse (Rafale), pilote de multimoteurs (Atlantique 2, Falcon 50…), pilote de guet aérien (Hawkeye) ou encore pilote d’hélicoptères (Lynx, Panther, Caïman…). Opérant de jour comme de nuit, depuis une base aéronautique navale ou un bateau porte-aéronefs (porte-avions, bâtiments de transport, frégates), il peut être amené à intervenir sur des théâtres d'opérations très divers, au large des côtes françaises mais aussi à l'étranger.

Mettez un peu de sel dans votre avenir !!!

Loin du mythe, la réalité d'un parcours accessible : Lien reportage France 3

Le cursus commence sur la base d'aéronautique navale de Lanvéoc-Poulmic sur la presqu'île de Crozon, au sein de l'escadrille 50S où ils sont évalués. C'est une sélection en vol. Durant sept mois, les élèves vont voler sur l'avion de voltige Cap 10 et devront montrer leurs capacités à apprendre puis restituer en vol. Les élèves-pilotes ayant réussi la sélection en vol sont ensuite envoyés dans la suite de leur formation : full-US aux États-Unis pour la chasse, Salon-de-Provence pour le cursus avion, ou Dax pour le cursus Hélicoptère. Le choix est fait selon la demande des élèves mais surtout les besoins de la Marine Nationale.

Le cursus hélicoptère est effectué en majeure partie avec des pilotes de L'Armée de l'air et de l'Armée de Terre. La première partie du cursus se voit être faite sur l'Aérodrome de Dax - Seyresse au sein de l'École de l'aviation légère de l'Armée de terre, en volant sur EC120 Colibri pendant un an. Puis l'élève partira au Luc sur l'Aérodrome du Luc - Le Cannet sur AS550/555 Fennec. Enfin, la dernière partie de la formation se fera sur SA365 Dauphin sur la BAN Lanvéoc-Poulmic. C'est à la fin de ces vols à Lanvéoc-Poulmic que l'élève sera "macaronné " pilote et rejoindra finalement la machine sur laquelle il volera.


CURSUS

Focus sur la filière EOPAN

La Marine sélectionne chaque année une quarantaine de pilotes, répartis ensuite dans les trois composantes de la Force d’aéronautique navale (chasse, patrouille maritime ou hélicoptère). C’est l’opportunité pour les passionnés d’aéronautique de s’engager dans une filière hors du commun, mêlant les environnements aériens et maritimes, dans un contexte opérationnel.

Le sauvetage en mer n'est qu'une partie des missions d'un pilote d'hélicoptère de la Marine Nationale.

Dédicace à mon ami Mathieu le treuilliste avec qui j'ai partagé des moments forts, parfois durs mais souvent très valorisants et à qui je souhaite tous mes vœux de rétablissement...

Pour preuve :

LA FLOTTILLE 36F au sein de laquelle j'ai eu l'honneur de servir pendant 12 ans.

Particulièrement dans cette Flottille, j'ai pu naviguer sur la plupart des frégates de la Marine, sur de nombreux océans, et participer à des missions passionnantes telles que le sauvetage en mer, la lutte contre le narcotrafic aux Antilles comme en méditerranée, la lutte anti-piraterie au large de la somalie, la traque de la pêche illicite notamment aux îles Kerguelen (TAAFs), la lutte contre la pollution ou encore la guerre en Libye.

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MON CURSUS MILITAIRE DONC :


2018 - 2019 : Adjoint au détachement de Service Public 35F La Rochelle (Dauphin) - missions de sauvetage maritime en tant que réserviste ;

2015 - 2017 : Chef du détachement de Service Public 35F Hyères (Dauphin) - missions de sauvetage maritime ;

2013 - 2015 : Moniteur IFR DHMA Le Luc - Armée de Terre (Fennec) – formation IFR monopilote et qualification de type ;

2012 - 2013 : Stage Moniteur à Dax EALAT (EC120) ;

2010 - 2012 : Officier de sécurité aérienne et chef de détachement Flottille 36F (Panther) – responsable de l’analyse des incidents et chef de détachement en mission Harmattan (guerre en Libye) ;

2008 - 2010 : Chef de détachement 36F frégate Floréal (Panther) - La Réunion - missions de lutte contre la piraterie, de police des pêches dans les terres australes antarctiques françaises ;

2005 - 2007 : Chef de détachement 36F frégate Ventôse - La Martinique - qualifié CDB toute mission sur Panther – mission de lutte contre le Narcotrafic ;

2001 - 2005 : Adjoint au chef de détachement 36F (Panther) – nombreux embarquements en océan indien ;

1998 - 2001 : Chef de détachement Flottille 35F (Alouette III - Dauphin) Clémenceau, Foch et BCR ;

1997 - 1998 : Officier AVIA sur TCD Foudre – responsable de l’intégration et de la formation des détachements ALAT – mission en Guinée Bissau ;

1996 - 1997 : Escadrille 23S (CDB Alouette II et III – copilote Dauphin) ;

1993 - 1996 : Formation EOPAN : EIP 51S Rochefort (CAP10) – Cognac (Epsilon) – SME Dax (Alouette II - Gazelle) – 22S Lanvéoc-Poulmic (Alouette III).

1992 : BAC D (sciences et biologie) à 18 ans.

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En espérant que tous ces liens vous intéressent et pourquoi pas créent une vocation !??

N'hésitez pas à me poser directement vos questions sur ce blog ou sur drachsebastien.gmail.com

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LES BONUS


ARMÉE DE TERRE

MARINE : APPONTAGE EN CONDITIONS EXTRÊMES

Publié le 25 juillet 2019

POPULATION

SOURCE NATIONAL GEOGRAPHIC

500 000 autochtones de l’Arctique vivent encore aujourd’hui dans le Grand Nord. Selon le Conseil de l’Arctique, où siègent six associations représentant ces peuples, ils se répartissent sur les trois continents. Une zone de 30 millions de km2 couvrant huit pays : Norvège, Suède, Finlande, Russie, Canada, États-Unis, Islande et Danemark. Traditionnellement nomades, pour la plupart, ils tentent de conserver leurs cultures : chasse, pêche, élevage de rennes, construction d’abri temporaire (igloo, tchoum, lavvùs, yourte…).

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LES INUITS

Le plus célèbre des peuples du Grand Nord est dispersé sur quatre pays, du nord-est de la Sibérie au Groenland (Danemark), en passant par l’Alaska (États-Unis) et le Canada, et regroupé en deux groupes de langue : le yupik et l’inupiak. Aujourd’hui, on compte 160 000 Inuits, dont plus de 50 000 vivent au Groenland. Au Canada, ils sont parvenus à obtenir, en 1999, un territoire doté d’une certaine autonomie : le Nunavut (« notre terre », en langue inuite). Historiquement, les Inuits sont des chasseurs-cueilleurs nomades. Aujourd’hui, une bonne partie des Inuits sont devenus sédentaires, mais la plupart d’entre eux vivent encore de la chasse et de la pêche.

AUTRE VIDEO. Les Inuits, peuples aux premières loges de la crise climatique

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LES SAMI

Ils sont 70 0000 Sami, traditionnellement nomades, à peupler aujourd’hui le nord de l’Europe : la Suède, la Norvège, la Finlande et une petite partie de l’ouest de la Russie. Ils vivent en Laponie, une terre qu’ils nomment « Sápmi » (le nom « lapon » est issu d’un terme dépréciatif suédois). En Norvège, ils sont les plus nombreux (environ 20 000). Ils sont désormais assignés à des parcelles précises, où pâturent les rennes durant l’année. Les Sami travaillent aujourd’hui pour l’essentiel dans d’autres secteurs : l’agriculture, la pêche, l’industrie ou le tertiaire. En Suède, en Norvège, et en Finlande, ils sont aujourd’hui représentés par le Parlement Saami : une assemblée démocratiquement élue qui agit comme une autorité gouvernementale.

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LES PEUPLES DE SIBÉRIE

La Sibérie arctique abrite de nombreux peuples, souvent nomades, pratiquant la chasse et la renniculture : les Aléoutes, les Dolganes, les Énètses, les Évènes, les Tchouktches, les Nenets, les Koriaks, etc. Ils sont 45 au total ! Les Nenets de la péninsule de Yamal, en Sibérie, proche du cercle polaire, effectuent chaque année une transhumance de 1 200 km. En outre, le réchauffement climatique fait sortir de terre des agents pathogènes décimant les troupeaux. Les Nenets sont considérés par les géographes comme l’un des peuples les plus résistants d’Arctique.

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LA FAUNE


source Wikipédia

Seuls les animaux les mieux adaptés au froid, comme l’ours blanc, le renard arctique et le phoque annelé, vivent en permanence dans ces contrées hostiles. Le morse, le phoque du Groenland et de nombreuses espèces d’oiseaux migrent dès que le froid s’intensifie.

Les animaux et les végétaux de l'Arctique sont, par leur physique et leur comportement, adaptés aux conditions particulières des régions au nord du cercle Arctique (66° 32′ Nord).

Cette biomasse arctique est principalement constituée de zooplancton se nourrissant du phytoplancton qui poussent sous la surface de la glace flottante. Même durant l'hiver, certaines algues peuvent continuer leur processus de photosynthèse en profitant des très faibles lueurs de la nuit polaire. Cette production attire les poissons, les cétacés et les phoques durant l'été, parfois même à proximité du pôle24. Les récits témoignant d'une présence animale autour du pôle Nord demeurent tout de même anecdotiques, mais on observe une importante perturbation de la productivité causée par le réchauffement climatique26. En effet, on peut observer plus de 275 espèces de plantes et d'animaux se rapprochant du pôle durant l'été en raison du réchauffement27.

L'ours blanc se déplace rarement au-delà de 82° de latitude Nord, en raison de la rareté de la nourriture, bien que des traces soient parfois observées près du pôle Nord28. Une expédition en 2006 a signalé avoir observé un ours blanc à un peu plus d'un kilomètre du pôle29. Le phoque annelé a également été observé près du pôle, et un renard polaire a été vu à moins de 60 kilomètres, à 89° 40′ Nord30.

Parmi les oiseaux observés près du pôle, plusieurs espèces ont été signalées : des bruants des neiges, des fulmars boréaux et des mouettes tridactyles, bien que certaines observations puissent être faussées par le fait que les oiseaux ont tendance à suivre les navires et les expéditions28. Des poissons ont été vus dans les eaux au pôle Nord, mais ils sont probablement peu nombreux28.

La pollution des eaux arctiques a également un impact important sur la natalité via la chaîne alimentaire du cercle polaire. Certains métaux lourds tels que le zinc, le cadmium, le mercure et le sélénium sont concentrés dans l'océan Arctique par les courants marins provenant des océans Atlantique et Pacifique. Des prélèvements de sang de cordon des nouveau-nés inuits révèlent un taux de polychlorobiphényles quatre fois plus grand et un taux de mercure quinze à vingt fois plus élevé que chez les bébés nés plus au sud.

Lien La faune et la flore des régions polaires : l'arctique

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Pour n'en citer donc que quelques-uns parmi les plus emblématiques :


L'OURS BLANC

On estime qu’il reste de 20 000 à 25 000 ours blancs, vivant pour la plupart dans l’Arctique canadien.


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LE RENARD POLAIRE

Le renard arctique (Vulpes lagopus), mesurant 85 cm de long (incluant la queue), possède un pelage dense qui change de couleur selon les saisons. Grâce à son épais pelage, à son museau court et à ses petites oreilles limitant les pertes de chaleur, le renard arctique supporte des températures de –70 °C.

ACTU : L'incroyable périple d'une renarde arctique du Svalbard au Canada

Périple d'une renarde en 2018 en seulement 4 mois
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LE PHOQUE ANNELÉ (ou marbré)

Le plus commun des phoques de l’Arctique, le phoque annelé (Pusa hispida), doit son nom aux taches en forme d’anneaux dessinées sur sa fourrure.

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LE MORSE

La population de la sous-espèce type, comprenant moins de membres, occupe l'Arctique canadien, le Groenland, le Svalbard et la partie occidentale de l'Arctique russe. On estime qu'il y a huit sous-populations, principalement distinguées par leurs répartitions géographiques et leurs déplacements. Cinq vivent à l'ouest du Groenland et les trois autres à l'est49.

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LE BŒUF MUSQUÉ

Ces mammifères herbivores de 1,3 m de hauteur possèdent un lourd manteau de fourrure qui leur permet de braver des températures de –70 °C.


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LE BÉLOUGA

Le Bélouga, mammifère marin emblématique de l’océan Arctique, vit à proximité de la banquise au Canada, au Groenland et en Russie. Narval et béluga sont affectés par des conditions d’englacement des mers arctiques devenues très imprévisibles, qui bouleversent leurs voies migratoires et l’accès à leurs zones d’alimentation ancestrales. Ils sont également sensibles à l’augmentation des taux de polluants dans l’océan, au trafic maritime, aux activités de prospection pétrolière et à la pression exercée par les chasseurs autochtones du Canada et du Groenland.Ces petites baleines blanches, qui mesurent 4 m de long en moyenne, communiquent en utilisant une gamme impressionnante de sons, ce qui leur vaut le surnom de canaris des mers.

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LE NARVAL

Le narval ou licorne des mers (Monodon monoceros) est une espèce de cétacé de la famille des Monodontidae vivant dans l'océan Arctique. Le mâle possède une unique défense torsadée, issue de l'incisive supérieure gauchea,1, qui peut mesurer jusqu'à 3 mètres de long. L'animal lui-même a une longueur de 4 à 5 mètres.

ACTU: Les scientifiques ont fait la découverte du tout premier hybride béluga-narval.

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LA BALEINE BORÉALE

La baleine boréale (Balaena mysticetus), ou baleine du Groenland, mesure près de 20 m de long et peut vivre plus de 100 ans. Parfaitement adaptée à la vie en milieu polaire, la baleine boréale n’a pas de nageoire dorsale et utilise son énorme tête pour briser la glace épaisse, afin de respirer. En 2007, la première aire de protection de la baleine boréale a été créée au Canada.

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LA MORUE POLAIRE

C’est le plus arctique de tous les poissons ! Il vit à très haute latitude et a une forte tolérance aux eaux glacées, grâce à ses protéines antigel. La morue polaire, comme d’autres poissons, le flétan notamment, voit son aire de répartition reculer vers le nord, au rythme de plusieurs dizaines de kilomètres par décennie. Cette « boréalisation » de l’Arctique est accompagnée par l’arrivée d’espèces venues de latitudes plus basses, comme la morue de l’Atlantique et l’aiglefin. Par ailleurs, dans le bassin de l’Arctique, une zone de la taille de la Méditerranée est en train de se libérer de ses glaces, ménageant un nouvel espace de pêche. Il paraît donc urgent de mieux réglementer la pêcherie, notamment dans les eaux internationales.

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LE REQUIN DU GROENLAND

Le requin du Groenland est l'un des plus gros requins carnivores de la planète, avec le requin blanc, et aussi l'un des plus gros poissons de l'Arctique, et sans doute le seul requin des eaux polaires de l'Atlantique Nord1. Sa longueur moyenne est de 2,5 mètres à 4,5 m, mais il peut atteindre jusqu'à 7,3 m 2. C'est également le vertébré à la longévité la plus importante (estimée à près de 400 ans)3.

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Expédition scientifique le long du cercle polaire

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Embarquez à bord du Polarstern

Recherche scientifique à bord du Polarstern 
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Publié le 1er août 2019

DÉFINITION

Wikipédia

Le réchauffement climatique est le phénomène d'augmentation des températures moyennes océaniques et de l'air, induit par la quantité de chaleur piégée à la surface terrestre, mesurée depuis plusieurs décennies, du fait des émissions de gaz à effet de serre (CO2, etc.). Ce terme désigne communément le réchauffement mondial observé depuis le début du XXe siècle. On rencontre fréquemment l'expression « changement climatique » utilisée pour désigner le réchauffement climatique, alors qu'en principe le changement climatique désigne les épisodes de réchauffement ou refroidissement d'origine naturelle qui se sont produits avant l'ère industrielle.

Selon les prévisions actuelles, le réchauffement planétaire se poursuivrait au cours du XXIe siècle mais son amplitude est débattue : selon les hypothèses retenues et les modèles employés, les prévisions à l'horizon 2100 vont de 0,3 à 4,8 °C.

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ÉTUDE (RÉCENTE)

Le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) ou IPCC (Intergovernmental Panel on Climate Change) est créé en 1988 avec pour objectif d’étudier l’évolution du phénomène de réchauffement climatique et ses conséquences. Il rassemble des centaines de scientifiques, climatologues, géologues, océanographes, biologistes, mais aussi des économistes, sociologues, ou ingénieurs et d’autres spécialistes de divers domaines afin d’avoir une vision globale de ce phénomène.

Le GIEC est structuré en trois groupes de travail:

Le dernier rapport date de novembre 2014. Cliquez sur ce lien complet.

Ou sur le résumé.

Le 6ème rapport est prévu pour 2022

LIEN RAPPORT SPÉCIAL DU GIEC traduit en français pour l'éducation.

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CAUSES


Le degré de certitude a augmenté dans les rapports 2007 puis 2013 du GIEC, qui qualifient de « très probable », puis d’« extrêmement probable » le fait que le réchauffement climatique soit dû à l’activité humaine.

Plusieurs hypothèses ont été testées :


  1. les fluctuations cycliques de l’activité solaire ;
  2. la rétention de la chaleur par l’atmosphère, amplifiée par les gaz à effet de serre ;
  3. la modification de la réflectivité de la surface terrestre — l'albédo — par la déforestation, l’avancée des déserts, l’agriculture, le recul des glaces, neiges et glaciers, mais aussi par les cirrus artificiels créés par les traînées des avions et des navires, et l’étalement urbain ;
  4. les émissions volcaniques.

Certaines de ces causes sont d’origine humaine, comme la déforestation et la production de dioxyde de carbone par combustion de matière fossile. D’autres sont naturelles, comme l’activité solaire ou les émissions volcaniques.


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CONSÉQUENCES


liens Wikipédia

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EFFETS SUR L'ARCTIQUE


Les observations satellitaires montrent que les banquises perdent le plus de superficie dans l'océan Arctique. Par ailleurs, un amincissement de ces banquises, en particulier autour du pôle nord, a été observé.

Le réchauffement dans cette région est de l'ordre de 2,5 °C (au lieu de 0,7 °C en moyenne sur la planète), et l'épaisseur moyenne des glaces a perdu 40 % de sa valeur entre les périodes 1958-1976 et 1993-1997.

2007 marque un minimum de la banquise en été. Cette année-là, les observations satellitaires montrent une accélération de la fonte de la banquise arctique, avec une perte de 20 % de la surface de la banquise d'été en un an.

Par ailleurs, le Groenland a vu ses glaciers se réduire de 230 à 80 milliards de tonnes par an de 2003 à 2005, ce qui contribuerait à 10 % des 3 mm actuels d'élévation annuelle du niveau des mers.

La disparition de la banquise en été diminue l'albédo de l'Arctique, renforçant le réchauffement de l'Océan Arctique pendant cette saison. Une partie de la chaleur accumulée est transmise à l'atmosphère pendant l'hiver, modifiant la circulation des vents polaires.


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ACTUALITÉS


Depuis plus d'un mois, des incendies ravagent l'Arctique, dévorant des hectares de zones boisées. Un phénomène "sans précédent", dû à la chaleur et la sécheresse des sols, qui s'inscrit dans un cercle vicieux : il pourrait bien faire monter les températures de notre globe dans les années à venir.

Un requin marteau aperçu au large de l'Irlande.

C'est la première fois qu'un requin marteau commun est signalé dans cette zone. À quelque 160 kilomètres au sud-ouest de l'Irlande, pour être plus précis. Le requin marteau commun, en effet, préfère généralement les eaux plus chaudes des Caraïbes et des côtes de l'Afrique de l'Ouest.


Le "premier monument en l'honneur d'un glacier disparu" érigé en Islande

"Le 18 août prochain, l'Islande dévoilera une plaque à la mémoire de l'Okjökull, premier glacier de l'île victime du réchauffement climatique, qui menace de disparition ses 400 autres massifs glaciaires. Un hommage qui veut sensibiliser la population à ce phénomène de plus en plus fréquent."


200 rennes meurent au Svalbard - Le réchauffement climatique mis en cause !

Est-ce seulement la cause du changement climatique ?

"Cette mortalité élevée est aussi due à une nette augmentation sur l’archipel norvégien du nombre de rennes qui entrent ainsi en compétition pour les mêmes zones de pâture, a précisé la chercheuse. Selon l’Institut polaire norvégien, le nombre de rennes au Svalbard, territoire grand comme deux fois la Belgique, a doublé depuis les années 1980 pour atteindre aujourd’hui environ 22.000 têtes."

N'est-il pas normal qu'un pourcent du cheptel meure ?

Veillez donc à toujours garder votre sens critique...

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LES DÉTRACTEURS


D'ailleurs certains scientifiques, dits climato-sceptiques, s'insurgent : ON VOUS MENT !

A vous de faire votre opinion...

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D'autres liens intéressants :

Article de l'OBS sur la fonte des glaces de l'Arctique et les convoitises qu'elle engendre.

"Entre 1986 et 2005, la fonte des glaces arctiques était en moyenne de 5.000 tonnes d’eau par seconde, entre 2005 et 2015 elle était de 14.000 tonnes."

Nouvelle route maritime transpolaire projetée en 2040 

Article de TRUST MY SCIENCE plus récent.

"L’Arctique est l’une des zones du monde les plus touchées par le réchauffement climatique, qui s’accentue depuis ces dernières années. Au cours des derniers mois, la calotte glaciaire arctique a fondu à un rythme sans précédent. Et il y a quelques jours, entre le 12 et le 13 juin, le Groenland a perdu environ 2 milliards de tonnes de glace sur 40% de son territoire. Cette tendance, désastreuse pour l’écosystème arctique, a également des répercussions dans le monde entier où elle impacte considérablement le climat global".

Par Rick  Thoman 2019 
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BONUS MYSTÈRE


Publié le 7 août 2019

Nous partons donc nous entraîner trois jours au transport de charges externes sur le BK117 à Husum en Allemagne sur un terrain d'aviation plus tranquille qu'Emden où les nuisances sonores de ce genre d'activité agacent les riverains.




L’ÉQUIPE INTERNATIONALE

Il y a Xavier, instructeur pilote français, Ingo, autrichien aussi pilote de Sky crane et deux assistants de vol : Dave, hollandais et Alberto, espagnol. Nous devons nous coordonner pour faire cet entraînement en toute sécurité et avec un maximum de précision.

L'idée est bien d'être capable de lever et décharger du matériel sur la plate-forme du Polarstern comme sur la banquise. 5 heures de vol chacun nous permettront d'obtenir la qualification initiale.


INTÉRÊT DU TRANSPORT DE CHARGES EXTERNES

1/ nous pouvons dépasser notre masse maximale autorisée soit 3500 kg avec charge externe, contre 3350 kg à l'intérieur : la charge externe se situant alors exactement sous le mât rotor, le centre de gravité n'est pas impacté ;

2/ pour des charges trop volumineuses ou trop lourdes pour notre plancher, ce peut être la solution ;

3/ pour des matières trop dangereuses à l'intérieur de l'hélicoptère aussi;

4/ pour atteindre des lieux difficiles d'accès où il serait impossible de se poser ;

5/ pour gagner du temps dans les chargements/déchargements.

L'inconvénient est que notre vitesse de transit est diminuée (dans tous les cas inférieure à 100 nœuds - 180 km/h) et adaptée au comportement en vol de la charge.


10 m puis 20 m d'élingue 

Nous commençons avec une élingue de 10 m et une charge de 200 kg. Pour rendre l'exercice plus démonstratif ou plus délicat nous volons proche de la masse maximale afin de rendre minime notre marge de puissance disponible*.

Puis nous passerons à 20 m et sans l'aide du pilote automatique qui rend l'hélicoptère moins stable et donc le pilotage plus difficile. L'appréciation de la hauteur de la charge par rapport au sol est aussi moins aisée pour notre opérateur.

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*MARGE DE PUISSANCE DISPONIBLE - THÉORIE DU VOL


Tout hélicoptère, quel qu’il soit, respecte cette courbe de puissance si l'altitude est maintenue constante :

courbe de puissance hélicoptère 

Le point A est donc un stationnaire dit "hors effet de sol". Le point B est un stationnaire dans l'effet de sol. En effet, sur un terrain plat et suffisamment grand, le propre souffle de l'hélicoptère permet de bénéficier d'un coussin d'air porteur.


En quittant le stationnaire, plus la vitesse augmente, moins il faut de Puissance jusqu'à la vitesse de puissance minimum (VPM - 65 noeuds - 120 km/h pour le BK 117) car le disque rotor agit comme une aile d'avion et porte l'hélicoptère. Cette VPM est donc la vitesse de moindre consommation et permet de voler le plus longtemps possible autour d'un même point. Elle est aussi la vitesse de meilleure montée et celle offrant le plus de marge de puissance disponible*.

Le point C est ensuite la vitesse de meilleur rayon d'action (120 nœuds - meilleur rapport vitesse/consommation) permettant donc d'aller le plus loin possible.

Ensuite pour transiter à une vitesse supérieure à la VPM, la puissance doit être augmentée jusqu'à atteindre notre puissance maximale en croisière (130 nœuds - 240 km/h).

Le trait horizontal représente la puissance maximale disponible (performance des moteurs et efficacité des pales). L'écart entre Puissance requise et puissance disponible est appelé "marge de puissance".

Cette puissance disponible dépend de la masse de l'hélicoptère mais aussi de l'altitude (densité de l'air définie par la pression atmosphérique) et de la température.

Pour vulgariser, s'il fait chaud et qu'on travaille en altitude, le trait horizontal descend !!!

A l'inverse, en Arctique, nous sommes au niveau de la mer et les basses températures donnent de meilleures performances : le trait remonte.

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L'opérateur en vol, à la porte arrière ouverte, devient nos yeux et nous guide pour poser la charge en douceur et le plus précisément possible (axe, hauteur, distance). Avec notre marge de puissance faible, nous sommes proche de notre puissance maximale (point A) en stationnaire (hors effet de sol). Cela requiert donc un pilotage plus fin et plus précis pour déposer ou décoller la charge.

MOYENS DE LARGAGE

Nous disposons aux commandes de deux moyens de largage de la charge, l'un électrique et l'autre mécanique (de secours).

La commande électrique est facilement accessible à notre main gauche sur le levier de pas collectif permettant de monter ou descendre. Il est protégé par un cache pour ne pas actionner le largage par inadvertance... Cache rouge "Cargo Hook Release" sur la photo.

Le système mécanique est disponible par une action du pied droit sur une manette rouge actionnant un câble de vélo ...(photo 2).


Puis c'est le retour à Emden en place arrière de façon à former notre technicien à son autre fonction d'assistant de vol. Assis en place gauche, il doit être capable de nous aider dans toutes les tâches autres que le pilotage : utilisation du GPS, du radar, changements et sélections de fréquences radio, de codes transpondeur, lecture des vérifications ou d'une procédure en cas de panne.

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PROCHAINE ÉTAPE

Mise en place des deux hélicoptères à bord du Polar Stern demain et appareillage Samedi.

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LES BONUS

Ingo est aussi pilote de Sky Crane !!!


Les américains savent faire aussi :

Le temps c'est de l'argent :

La France a aussi ses experts :

Le 08 août enfin, nous mettons nos hélicoptères à bord du Polar Stern à Bremerhaven.


Le vent est un peu fort, 30 nœuds (55 km/h) mais heureusement le bateau est à quai. Nous nous mettons en place deux jours avant le départ car il est paraît-il déjà arrivé que les hélicoptères soient bloqués par la Météo le jour de l'appareillage, pénalisant le départ du navire devant alors rester à notre portée.




Harold, pilote hollandais, et moi décollons les premiers d'Emden, l'autre hélicoptère arrivera une heure après avec Mischy, un 3ème pilote qui me remplacera en avril, temps qu'il nous faut pour plier puis rentrer sereinement l'hélicoptère dans son hangar puisqu'il n'y a qu'un spot d'appontage. Nous sommes comme deux gamins toujours aussi heureux de voler et de participer à cette aventure (malgré nos 40 ans passés !!!).


C'est un peu pour moi la concrétisation de tous ces entraînements, stages et qualifications. Je n'ai pas encore pu mettre le pied à bord et j'ai hâte de découvrir le personnel avec qui je vais passer quelques mois mais aussi le cadre et l'ambiance de travail.

L’ÉQUIPE HÉLICOPTÈRE

L'équipe d'Héliservice pour cette mission se compose d'Harold, un grand pilote hollandais chauve à l’œil vif et pétillant, dont le surnom est d'ailleurs "Too Tall", naviguant depuis 5 ans sur le Polar Stern du pôle Sud au pôle Nord. Roland, déjà à bord, est un technicien allemand très expérimenté pour ces missions aussi, ancien, petit et trapu. Elena est une jeune technicienne espagnole motivée qui embarquera comme moi pour la première fois à bord du Polar Stern.


MON PREMIER APPONTAGE ?

J'apponte donc fièrement, totalisant plus de 3500 appontages sur des bateaux en mouvement et dont la plate-forme était parfois plus petite. Pour apponter sur les frégates anti-aériennes Cassard et Jean Bart notamment, il fallait avoir l'impression de rayer la porte du hangar avec les pales pour se situer à la verticale du spot, la queue dépassant dans le vide : "Quand tu as peur, tu es bien !" disait-on en instruction.

Bref, ma crédibilité est immédiatement anéantie par Roland, debout devant la porte du hangar, me faisant des grands signes autoritaires que seuls les allemands peuvent connaître, m'indiquant que je suis trop sur l'arrière du pont et qu'il n'accédera pas facilement à la queue de l'hélicoptère. Je redécolle donc, un peu honteux, pour me repositionner un mètre plus avant...


Le carré blanc (octogone) sur le pont mesure 26 m de côté d'où les chiffres "13" mesurés depuis le centre du "H". L'inscription "5T" au-dessus du hangar correspond à l'homologation de la structure du pont d'envol à résister à l'appontage d'un hélicoptère de 5 tonnes. Chaque pilote connaît en effet les dimensions de son rotor (une pale fait 11 m sur le BK) et sa masse (3350 kg pour le BK).


PLIAGE DES PALES ET RENTRÉE DANS LE HANGAR

A peine le pied sur le pont, nous nous activons pour plier et rentrer l'hélicoptère avant l'arrivée du second. Je m'aperçois vite que nous sommes uniquement quatre pour effectuer ces opérations. Elena monte sur la tête rotor, afin de plier deux pales, Roland installe les perches qui les maintiendront, Harold pilote le chariot électrique et moi, ... je prends bêtement des photos !!!

Le chariot électrique est installé sous l'hélicoptère, attaché à chaque patin par des sangles. Deux roues sur vérin hydraulique permettent de déjauger l'arrière de l'hélicoptère. Le vérin du chariot permet ensuite de lever l'avant. Ainsi, les patins ne touchent plus le pont et nous pouvons rouler. L'opération est délicate car il faut coller le premier hélicoptère au ras de la paroi du hangar pour laisser la place au deuxième. Et aujourd'hui, le bateau à quai ne bouge pas...


VISITE DU BORD

A bord, c'est l'effervescence comme je m'en doutais. En effet, à deux jours de l'appareillage, c'est la course au chargement du navire, aux réparations de dernières minutes, aux finitions des moquettes et peintures, aux rinçages et autres graissages. Tout le monde est bien occupé mais chaque personne qui m'est présentée prend le temps de me souhaiter la bienvenue. Je croise ainsi le commandant, le "Doc" (médecin) qui m'explique sans me rassurer qu'il peut opérer en contact par téléphone satellite avec un vrai spécialiste, le maître d’hôtel ou plutôt "serveur du restaurant", le responsable de la buanderie, chinois et d'autres personnes dont je ne comprends pas toujours la fonction de part mes connaissances de langue anglaise traduite par un hollandais, sur des propos allemands...

Ancien militaire, j'admets que le personnel n'a pas l'apparence du standard auquel je m'étais habitué sur les frégates françaises, à commencer par le commandant, avec une barbe de trois jours et une grosse boucle d'oreille. Pour vous le décrire, je dirais qu'il a un physique situé entre Axel Bauer, chanteur de "cargo de nuit" et Bertrand Cantat, ex-chanteur de Noir Désir... La plupart des membres d'équipage ont les cheveux longs certes, mais parfois même teints, et certains tatouages, courants largement au-delà des bordures de la chemisette définies par le règlement militaire, sont assez expressifs. Peu m'importe car l'ambiance a l'air très chaleureuse et ma surprise est sans doute liée à ma déformation professionnelle.

Je découvre ma chambre en coup de vent. Assez petite à vrai dire, mais je serai seul alors qu'il y a deux "bannettes" (lits) superposées. A mon grand étonnement, je dispose de deux fenêtres avec vue sur la mer, et d'un petit frigidaire, choses impensables aussi sur un navire militaire. J'y jette mon sac.

Ensuite, entre deux mouvements de grue ou autre soudure, nous visitons les lieux de vie, restauration, bars, salles de briefing, infirmerie, buanderie, PC météo jusqu'à atteindre la passerelle.



Harold m'explique alors nôtre rôle à bord quand l'autre vole : directeur de vol en passerelle.

Le but est d'assurer le suivi permanent des éléments météorologiques et de navigation, de la trajectoire du vol, de l'avancement ou de la mise à jour de la mission : fréquences radio (indicatifs BIRD 1 et BIRD 2), suivi radar (AIS), téléphone satellite pour communiquer directement avec l'hélicoptère en vol si la VHF ne passe pas, enregistrement de la dernière position connue si l'écho disparait, éléments pour l'appontage (force du vent et direction, mouvements du bateau), guidage vers le PolarStern, déconfliction avec les drones ou autorisation d'atterrir sur la banquise des autres aéronefs logistiques, assistance en cas d'urgence, guidage du zodiac, du Polaris ou de la moto-neige...

Il me conseille d'ailleurs vivement de toujours veiller à laisser de la place à l'éventuel atterrissage du second hélicoptère, en secours, lorsque je me poserai sur la banquise et de ne jamais baisser complétement le manche collectif afin de ne pas s'enfoncer ou basculer brutalement... Le choix de la couleur de la glace est aussi important pour non seulement les études des scientifiques toujours à la recherche d'une banquise très ancienne mais aussi pour des raisons de résistance à notre atterrissage. Une banquise bleue polie semble donc préférable à une glace blanche brillante.

Le second hélicoptère arrive et interrompt ses explications passionnantes. Harold s'assure depuis la passerelle que la porte du hangar est fermée, que le pont est libre (écrans vidéos filmant le pont) et donne les éléments à Mischy :

Bird 02, you are cleared to land, wind on the deck 9 o'clock 20 knots - no pitch no roll.

Phrase si souvent entendue dans ma carrière militaire. Cela signifie que le vent sur la plateforme est, par rapport au cap du bateau, travers gauche pour 35 km/h, soit notre limite inscrite au manuel de vol de l'hélicoptère. No pitch, no roll signifie aucun mouvement de la plate-forme (Tangage, Roulis) dû aux vagues...

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Extraits du manuel de vol de l'hélicoptère, définissant les limitations du constructeur :

2.8.2 Sideward and Rearward Flight

Sideward flight or crosswind hover and rearward flight or tailwind hover has been demonstrated:

– up to 30 kt for DA ≤ 3000 ft

– up to 20 kt for DA > 3000 ft

DA = Density Altitude. En stationnaire au niveau de la mer (hover), Mishy a le droit à 30 kts de vent de travers.

2.8.3 Crosswind

Directional controllability during standard type takeoff and landing has been demonstrated for flight conditions with crosswind components up to 20 kt.

Un vent de la gauche est plus favorable sur le BK car il soulage notre rotor anti-couple...

Si Mishy est gêné pour tenir son cap, il peut tout à fait apponter dans l'axe du vent plutôt que dans celui du navire, la limite étant alors de 60 nœuds de face pour se poser ou plutôt même 50 nœuds s'il veut stopper le rotor. Il se pose, lui, en une seule fois...

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Nous redescendons sur le pont pour plier et ranger l'hélicoptère puis nous déchargeons tout le matériel : combinaisons étanches, canot de sauvetage, lots de survie, gilets gonflables, pièces de rechange, casques ...

Il est déjà l'heure de repartir car si nous n'avons effectué que 35 minutes de vol pour venir, il nous faudra 1h30 de retour à Emden en voiture. Pas le temps pour moi de décharger mon sac, de faire mon lit ni de prendre un peu possession de ma chambre.

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La prochaine étape est l'appareillage samedi.

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LE BONUS

De magnifiques images d'une frégate dans le mauvais temps :

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Publié le 15 août 2019

Le samedi 10 août à 21h00 nous larguerons les amarres.

15h00 : nous arrivons à bord. Le vent est fort (30 nœuds) et nous savons déjà à quoi nous attendre en mer du Nord. Il faut donc arrimer tout le matériel dans le hangar pour ne pas risquer d’abîmer nos hélicoptères.

Chaque malle, poubelle, échelle, bidon et autre matériel est fixé aux cloisons à l’aide de bouts. Les hélicoptères sont bien sûr eux-mêmes solidement maintenus par quatre énormes sangles.


Une petite photo de groupe puis c’est le briefing de sécurité dédié aux nouveaux embarqués.

Nous sommes 100 à bord dont une cinquantaine de membre d’équipage et autant de scientifiques. On nous y explique les différentes alarmes du bateau et le point de rassemblement : la plate-forme hélicoptère.

Un exercice est alors déclenché et nous rallions, munis de nos brassières de sauvetage, le pont d’envol. Quatre groupes de 15 personnes sont alors affectés à une embarcation de sauvetage.

Tandis que le chef de la sécurité fait l’appel, le dernier BK117 de la compagnie nous survole, cerclant bruyamment au-dessus de nos têtes. Cet hélicoptère revient d’Husum où d’autres équipages s’entraînaient au transport de charges externes et qui n’ont pas résisté à faire un crochet afin de nous saluer. Autant vous dire que notre petite équipe joviale improvise immédiatement une « ola » sans prêter attention aux élucubrations du chef, de toute façon devenu inaudible.


17h30 : Harold m’annonce qu’il est l’heure de passer à table !!! Pour moi, c’est pourtant l’heure du goûter et je pense d’abord à une blague ! Eh bien pas du tout : « saucisses et frites » en plein après-midi.

21h00 : Enfin l’appareillage. Les membres d’équipages s’affairent à nous faire sortir du port avec l’aide de deux remorqueurs et d’un pilote tandis que les scientifiques et l’équipe Hélicoptère nous installons sur les extérieurs munis de quelques bières. De nombreuses familles ou amis nous font des signes chaleureux depuis le quai.

23h00 : il est temps de ranger la chambre. La bannette est confortable, équipée d’une couette et d’une couverture. Il y a même deux radiateurs me rappelant que nous partons vers l’extrême Nord… Le sac vide et chaque chose étant plus ou moins à sa place, je m’endors rapidement, bercé par un léger roulis.

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DIMANCHE 11 AOUT

Je dois dire que nous n’avons pas pris nos précautions d’arrimage de la veille pour rien car la nuit sera mouvementée, le Polar Stern naviguant travers à la houle.

04h00 : je suis réveillé en sursaut par la chute de mon ordinateur portable, littéralement expulsé du bureau mais heureusement tombé sur la moquette sans dégât. J’avais pourtant déjà perdu ma touche «Enter» dans ces mêmes conditions sur la frégate Chevalier Paul, celle-ci manœuvrant brutalement à 30 nœuds … Pas facile de se rendormir ensuite car tout glisse, grince ou roule. Nos chambres étant situées au plus haut du bateau, les mouvements de roulis sont plus encore ressentis. En effet, le centre de gravité se situant au ou même en-dessous du niveau de la mer, nous parcourons physiquement bien plus de mètres au 3ème étage pour le même degré de roulis. Demandez à votre professeur de mathématiques ou de physique de vous expliquer si cela ne vous paraît pas clair…

07h00 : le roulis jusqu'à 20 degrés fait que le jet de douche n’arrose que les parois et que la mousse à raser ne tient définitivement pas debout. Il est aussi utile de s’assoir pour uriner mais je l’apprends à mes dépends, pour des raisons de précision, certes, mais aussi parce que la cuvette peut soudainement se refermer au cœur de l’action. Une petite ronde dans le hangar confirme que nous avons bien travaillé et que rien n’a bougé.




07h40 : petit déjeuner. La nappe est heureusement antidérapante et les rebords de la table retiennent les couverts ou pots de confitures récalcitrants… J’y trouve parfaitement mon compte avec du café, du pain frais, du beurre mais mes voisins germaniques prennent plutôt omelette, fromage et charcuterie.


08h15 : briefing météo confirmant que ce n’est ni favorable aux vols, ni à la navigation.



10h00 : Le commandant ouvre le briefing en allemand en nous souhaitant semble-t-il la bienvenue car je n’en comprends pas un mot.

A peine commencer, Harold, Elena et Roland sortent rapidement de la salle… Je pense d’abord à une mission d’évacuation sanitaire urgente par hélicoptère ou quelque chose est-il tombé dans le hangar. Je demande, inquiet, s’il y a besoin de moi par Whatsapp. Roland me répond que non :

Harold et Elena ont juste une bouffée de chaleur et le mal de mer !!! Je m’en amuse, soulagé.

Heureusement, les autres intervenants passent en anglais et nous présentent la vie à bord, les créneaux d’ouverture du sauna ou de la piscine, de la coopérative, de la buanderie, les horaires des repas. Il est annoncé que notre dîner-goûter sera maintenant avancé à 17h15 … et qu’il doit être terminé à 17h30 !

Puis chaque groupe de scientifiques se présente, du biologiste au géologue en passant par le pilote de ROV, sous-marin des profondeurs munis de caméras et de bras articulés. Ils ont planifié un nombre important de prélèvements de sédiments et d’analyses de toute sorte dans une zone proche des Spitzberg, au 80ème parallèle nord, zone qu’on atteindra dans une dizaine de jour. Ces groupes sont constitués de personnes de tout âge, de sexe ou de nationalité, de l’étudiant au professeur, du technicien au docteur, mais hélas aucun français pour cette fois.


11h30 : déjeuner : Choux de Bruxelles pour les survivants de la nuit !!!

Une petite sieste s’impose car les mouvements fatiguent.

Roland me fait un tour du navire. Je découvre alors un énorme chasse-neige flambant neuf, digne des plus grandes stations de ski alpines. Il servira à créer la piste d’atterrissage pour les liaisons aériennes logistiques sur la banquise.


La salle de sport est bien équipée ;

La piscine est pour l’instant vide mais sert de terrain de basket ;

Le solarium nécessaire pour se remonter le moral quand la nuit deviendra permanente ;

Et le grand sauna est déjà en fonction.

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LUNDI 12 AOÛT

Nous naviguons à l’ouest de la pointe sud de la Norvège. Ce matin la mer est grise comme le ciel, le vent a tourné au nord-ouest et il pleut.

La mer de face nous crée cette fois un peu de tangage. La température de l’eau est de 15°C, de l’air 12°C et le vent relatif dans la mature atteint les 40 noeuds (75 km /h) : relatif car c’est la vitesse du vent météorologique (30) + la vitesse du navire (10). Nous sommes limités à une mer <4 (creux inférieurs à 2 m) pour voler car au-delà, nos ballons de flottabilité ne sont plus certifiés et amerrir deviendrait périlleux.


Les scientifiques déballent leurs matériels des containers et nous en extirpons aussi 24 sacs d’effets polaires pour tous les équipages d’Héliservice qui se succéderont pendant la mission MOSAIC. Heureusement Roland a une idée de génie : se servir de l’ascenseur qui mène tout droit au hangar, 3 étages au-dessus. Ouf !!!

Je vois ainsi sortir un mini sous-marin puis une espèce de char des profondeurs avec ses chenilles qui deviendra autonome à la surface sous-marine et dont les ballastes permettront sa remontée et son repêchage.

Une armature métallique munie d’une trentaine de cylindres prélèvera des colonnes d’eau. Des caisses en aluminium bardées de capteurs et de réservoirs sont sanglées sur le pont en bois tout près des grues du navires.

J’apprends qu’il existe un filet à plancton dédié à l’hélicoptère utilisable en charge externe.

Pour mesurer l’épaisseur de la glace nous transporterons aussi un « Hélipod » en charge externe qui devra survoler la banquise à une hauteur et une vitesse aussi constantes que possible, soit 40 pieds (13 m) et 80 noeuds (145 km/h).

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MARDI 13 AOÛT

Elena reprend des couleurs et se plaint déjà de ne pas pouvoir boire d’alcool avec ses patchs anti-mal de mer fournis par le Doc : c’est donc qu’elle récupère… Mais pour combien de temps car la météorologue nous prédit des creux de 3 mètres dans la soirée jusqu’à jeudi.

Nous disposons donc d’un petit créneau un peu moins mouvementé ce matin afin de déployer et de tendre un immense filet sur la plate-forme. Celui-ci permet de retenir l’hélicoptère sur le pont, bien trop glissant pour nos patins, et plus encore lorsqu’il sera gelé. Je regrette un peu que chaque groupe travaille individuellement et qu’il ne semble pas question de rassembler d’autres équipes pour nous aider comme j’en avais l’habitude sur les frégates (corvée de vivres, corvée de poubelles … rassemblant tout le personnel disponible).


Nous faisons ensuite le plein de bouteilles d’un litre d’essence que nous plaçons dans nos sacs de survie. En cas de problème sur la glace, nous pourrons ainsi allumer le réchaud…


Harold m’explique alors l’utilisation du téléphone satellite depuis l’hélicoptère en vol ou à pied sur la banquise et d’un autre système dit « Spider Watch ». Ce dernier permet de transmettre instantanément au bâtiment notre position, hauteur et vitesse, par l’appui sur un simple bouton vert siglé « Mark ». Nous l’utiliserons dès que nous aurons l’intention de nous poser sur la glace ou en cas d’avarie. Une autre touche, rouge cette fois et marquée « SOS », n’est à utiliser qu’en cas de détresse car elle permet d’alerter aussi bien le navire que notre base support à Emden.


11h30 : c’est déjà l’heure de déjeuner : poulet épinard frites.


13h00 : rendez-vous en passerelle. J’arrive le premier et distingue ce qui pourrait être une frégate à nos 1H. Après interrogation du chef de quart et recherches, il s’agit bien d’une frégate russe de type «Udaloy». Surveille-t-elle nos activités ?



Harold me rejoint et nous prenons un café. La partie administrative de nos vols nous exaspère mais nous préparons méticuleusement nos dossiers informatiques, incluant notre masse en fonction du plein, du nombre de passagers, de l’emport du réservoir supplémentaire, du canot de sauvetage, du sac de survie et vérifions que nos calculs automatiques du centrage sont cohérents. La partie saisie informatique de chaque vol est aussi révisée.


Ensuite nous discutons avec passion de nos prochains vols et des nouvelles procédures à tester puis à standardiser : apponter avec un moteur en panne, percer à l’aide de notre propre radar et GPS, percer en étant guider par le directeur de vol, particularités et dangers du vol de nuit, hauteur du pont, hauteur de la mature…Une fois la méthode validée entre nous, il nous faudra ensuite former les assistants de vol.




Le soir Harold et Roland nous montre (à Elena et moi) des images splendides tournées lors de leurs multiples expéditions arctiques et antarctiques accompagnées de leurs commentaires passionnés fusants tantôt en allemand, en anglais ou même en hollandais. Belle soirée.

Un coup d’oeil à notre dernière position : nous avons franchi le 65ème parallèle nord.

Problème de mathématiques :

Rappel : 1 nautique est égal à 1852 m. 1 nœud est égal à 1 nautique/heure soit 1,852 km/h.

Sachant que le Polar Stern navigue sensiblement au cap Nord à une moyenne de 12 nœuds et qu'un degré de parallèle correspond à 60 nautiques, combien de degrés de parallèles sont-ils franchis par jour ?

Prochaine étape : les premiers entraînements à l'appontage.

Publié le 13 septembre 2019

JEUDI 15 AOÛT

PREMIERS VOLS A BORD

Enfin nous allons déployer les ailes de notre « faucon millénium ». La mer est enfin calme et le vent météorologique n’impose pas au navire une autre route que celle qui nous mènera, demain, au site de recherche tant attendu par les scientifiques. Nous libérons un hélicoptère de ses sangles, « D-HAPS », le sortons du hangar, déployons ses pales, le ravitaillons, le branchons électriquement, abaissons tous les garde-corps cerclant le pont puis nous équipons comme des cosmonautes avec nos combinaisons étanches et nos brassières gonflables car la température de l’eau avoisine les 10°C et l’air est frais, 6°C pour un 15 août…

Ces brassières sont équipées d’un petit équipement respiratoire permettant de tenir environ 1 minute supplémentaire sous l’eau, si nous avions des difficultés à nous extraire après un amerrissage. Rassurant, … ou non !??


Le premier vol, Harold est aux commandes à droite afin de prendre cette nouvelle machine en main et me montrer sa façon de faire pour les décollages et appontages. Elena grimpe armer le canon à mousse et Roland fera le relais en passerelle.


En place gauche et les mains libres, je peux « jouer » avec nos deux écrans tactiles multifonctions, afin de me perfectionner dans leurs nombreux modes : fréquences radio, utilisation du GPS, création de points, réglages du radar afin d’obtenir l’écho parfait du bâtiment, transpondeur, TCAS (système permettant d’être alerté si un autre aéronef muni d’un transpondeur est dans la zone) … Nous testons presque tous les équipements de l’hélicoptère entre chaque appontage et sommes satisfaits que tous fonctionnent parfaitement.



Après une heure de vol, nous coupons les turbines sur le pont afin d’interchanger nos places. A l’inverse d’une voiture, tout du moins française, le pilote aux commandes d’un hélicoptère est normalement en place droite.

A mon tour. Je n’ai pas apponté en mer depuis plus de 2 ans mais tout revient naturellement comme le vélo si bien que je demande même à Harold de me couper le pilote automatique. « Are you sure ? » me questionne-t-il, inquiet. Cette manie qu’ont les marins de toujours vouloir s’entraîner en mode dégradé doit-il penser… J’apponte même mieux qu’avec le pilote automatique : je dois donc sûrement mal l’utiliser, plaisantons-nous ensemble.

Au dernier appontage, Roland et Elena rincent les moteurs encore tournants en y pulvérisant un produit, l’atmosphère salin étant nocif à nos aubes de turbines. Puis nous coupons, ravitaillons, plions, roulons et harnachons DHAPS dans le hangar, comme si nous rentrions notre cheval de course à l’écurie.

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LE BAR

Le soir, le « Zillertal bar » est ouvert et gratuit. Quoi de mieux que de fêter mes premiers appontages "polarsterniques" autour d’une bière bien méritée.

A mon arrivée, le bar est déjà bondé et le niveau sonore assez élevé car la « playlist », à n’en pas douter allemande, passant sans transition de la musique traditionnelle à Ramstein, nécessite de pousser nos voix pour communiquer.


Les équipages du Polar Stern étant sans doute trop habitués à naviguer à de telles latitudes, je regrette qu’il n’existe aucune forme de bizutage ou de cérémonie d’intronisation lors du franchissement du cercle polaire. La Marine Nationale m’aurait rendu ce passage bien plus mémorable, même sans doute bien plus désagréable, y voyant là-encore un motif de cohésion de l’équipage et de respect des traditions.

Le cercle arctique est l'un des cinq parallèles principaux indiqués sur les cartes terrestres. Il s'agit du parallèle de 66° 33' 47,445" (au 1er janvier 2019) de latitude nord, la latitude la plus au sud sur laquelle il est possible d'observer le soleil de minuit dans l'hémisphère nord.

Après 1 litre de bière, sans doute trop enjoué, je ne résiste pas à me lancer dans la tentative de traduction d’une de mes blagues favorites, assez osée et mimée, dite du « pingouin », surnom d’ailleurs donné aux pilotes de l’Aéronautique Navale française. Je n’hésite donc pas à finir en slip, le pantalon sur les chaussettes, puis à déambuler dans le carré tel un pingouin, effet indispensable à son final. Je suis alors pleinement rassuré car elle obtient un très vif succès ! Heureusement, le commandant n’a pas fait une irruption au pire moment car il n’aurait sans doute ni compris ni apprécié.


Minuit, je dois fermer les rideaux pour me coucher car il fait encore plein jour. Ce changement de point de vue, bouleversant mes repères, me fait réfléchir (ou peut-être est-ce l’alcool ?). Cette lumière qui m’est encore bien visible correspond au début d’après-midi en Californie et aux premiers rayons de soleil sur le Japon. Je ne suis peut-être pas sur le « toit du monde », puisqu’on a déjà donné ce nom au mont Everest, mais sans doute pas loin d’un de ses sommets aussi majestueux et non moins prestigieux, le pôle Nord. Sur ces pensées rêveuses et philosophiques, je redescends sur terre en me jurant de ne plus jamais suivre le rythme de consommation de bière des allemands et m’endors.

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VENDREDI 16 AOUT

Aujourd’hui, Harold « briefe » les huit scientifiques autorisés à voler dans le hangar. A vrai dire, Elena et moi l’écoutons aussi très attentivement.

A des fins pédagogiques, nous avons étalé tous les matériels des sacs de survie et Harold en explique chaque utilisation : réchaud, tente, couchage, allumettes, fusées, piolets, piquets ainsi que la brassière gonflable, le casque, la combinaison étanche et le canot de sauvetage. Puis, les scientifiques s'harnachent dans un hélicoptère, apprennent à en ouvrir ou larguer les portes puis à en sortir sur la banquise rotor tournant …

L’après-midi nous décidons d’un commun accord d’annuler mon vol en solo car les limites de vent et d’état de la mer sont atteintes.


JEUDI 17 AOÛT

Solo et serpent au 79ème degré Nord.

Assis en place droite, je suis en train de tirer mon manche collectif afin de me mettre en stationnaire sur le pont, fixant le montant de la porte du hangar comme référence quand « quelque chose » surgit sur ma gauche. J’interromps la manœuvre et lance mes yeux vers cette direction. Je souris car il ne s’agit en fait que de l’autre manche collectif à gauche qui m’apparaît au-dessus du siège comme un serpent noir qui se dresse. Il est visible cette-fois car je vole seul, avec des doubles-commandes…




Je vole ainsi 2h, Harold m’assistant en passerelle, testant entre deux appontages encore d’autres équipements : la balise ADF émise par le navire permettant de me donner son relèvement, le téléphone iridium, une balise AIS embarquée dans l’hélicoptère donnant cette fois continuellement au navire mes position/cap/vitesse, et le « Spider Watch ». Le haut du pare-brise commençant à montrer des légères traces de givre, nous annulons le vol suivant. Il fait 2°C, l’eau est à 6°C, et les stratus couvrent entièrement le ciel à 800ft, altitude de l’isotherme 0°C.


NOUVEAU SURNOM

Le soir, en avouant à notre petite équipe ma peur reptilienne du matin, ils décideront unanimement et hilares de me surnommer «Anaconda», indicatif que j’utilise depuis quand je suis directeur de vol…






RECHERCHES SCIENTIFIQUES

En transit vers le site des recherches, les conditions météorologiques interdisaient les vols. Maintenant que le temps est idéal, exceptées les conditions parfois givrantes, nous avons des restrictions car l’utilisation de la plate-forme devient incompatible avec les incessants mouvements des grues situées sur l’arrière-tribord dont les énormes câbles d’acier tantôt immergent ou émergent des appareils de mesure en tout genre. C’est le « Top départ » des prélèvements et les équipes de scientifiques travaillent jours et nuit afin d’en tirer le maximum d’informations, de l’étude du plancton, aux microbes et bactéries en passant par le carottage du sol sous-marin et autre extraction de sédiments.

Depuis 20 ans, les études sont menées sur ce site d’Hausgarten, un réseau de pas moins de 20 stations fixes y étant implanté. Chaque été, l’institut vient y prélever les échantillons de l’année précédente et y déposer de nouveaux.

Pour cela, ils disposent de deux AUV (Autonomous Underwater Vehiche) et d’un ROV (Remotely Operated Vehicle).


« PAUL », le sous-marin jaune, zigzague à 6 m du sol sous-marin en le filmant et en prélevant des échantillons d’eau. Muni d’un sonar, il en établit aussi la cartographie.





« NOMAD », le mini-char, va rouler sur le fond pendant deux ans, scannant la composition des sédiments par son laser, analysant leur teneur en carbone, en matière organique ou encore en chlorophylle.






Le ROV, bardé de caméras et de spots d’éclairage, est piloté depuis un container et nécessite d’être toujours relié à un câble, transmettant ses images en direct au pilote et en passerelle.

Son atout majeur est d’être équipé de pinces hydrauliques qui lui confèrent de multiples missions, du dépôt d’appâts afin d’étudier la concentration d’étoiles de mer et autres crevettes, à la récupération d’échantillons captés par d’autres innombrables appareils.


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DIMANCHE 18 AOÛT


Ce dimanche matin notre vol est donc reporté car l’équipe d’AWI souhaite plonger « NOMAD », le mini-char, presque lunaire quoique bien plus lourd, et le faire déambuler en toute autonomie au fond de l’océan pendant une semaine avant de le récupérer et de le reconditionner. Ce n’est que la première étape avant de le laisser ainsi deux ans, durée maximale de tenue de ses batteries, analysant la composition du sol sous-marin.

Je suis étonné de l’absence de planification en amont des activités du navire. En effet, tout est décidé le jour même, au gré de la demande. Je questionne Harold qui comprend mon désarroi mais m’explique que je suis maintenant dans le monde civil et que, par expérience, les activités évoluent tellement vites qu’une programmation de la veille volerait immédiatement en éclats et ne serait donc que perte de temps… Je croyais en une rigueur allemande plus stricte mais pour l’instant cela fonctionne.

Nous avons déjà préparé l’autre hélicoptère, D-HARK, déplié sur le pont, car il n’a pas volé depuis notre mise en place à bord. Il est en effet recommandé de mettre en route chaque hélicoptère au moins une fois par semaine. Au-delà, nous devrions lui injecter un produit de stockage dans les moteurs. Il est donc temps d’amener notre âne au pré afin de lui dégourdir les pales !


Il fait 0°C et quelques flocons de neige ne suffisent pas à blanchir le pont. A cette température et par la présence de nuages bas alentours, il nous faudra éviter les précipitations et surveiller notre pare-brise, premier indicateur de début de givrage. Au moindre symptôme et ne volant jamais très loin de la plate-forme, un appontage immédiat serait entrepris. Je monte en passerelle et pense apercevoir un sillage sur l’horizon.... Il n’y a aucun bateau. Est-ce l’écume blanche d’une vague ? Non, c’est la banquise !

Harold décide alors que nous volerons ensemble afin de nous entraîner à nous y poser, à en déceler la qualité, l’épaisseur ou bien l’âge. Il commence en place droite et nous rallions les plus gros échos radar à une quinzaine de nautiques du Polar Stern. La banquise me semble trop morcelée et bien trop fine pour nous y poser mais Harold m’explique comment choisir une plaque propice à l’atterrissage. Il opte pour une parcelle plus sombre et en très courte finale, je me rends compte qu’il est bien difficile d’en distinguer ses aspérités et de se faire une idée de la hauteur précise de nos patins par rapport au point de contact. Harold me demande alors d’abaisser la visière jaune de mon casque et je constate immédiatement que j’y vois un peu mieux. Une fois posé avec la plus grande douceur, il s’agit ensuite de tasser la glace en pompant légèrement sur le manche collectif en main gauche mais sans jamais le baisser complétement, parés à redéjauger au moindre enfoncement. La plaque ondule avec la mer mais ça tient !

Nous choisissons d’autres plaques parfois en les refusant parce qu’y jugeant une trop faible épaisseur, y découvrant une craquelure ou une pente trop prononcée. Après une heure de démonstration, nous retournons à bord pour faire un plein et interchanger nos places.

Nous voilà repartis vers nos îles gelées que nous avons soigneusement enregistrées dans le GPS, contournant quelques grains. J’effectue une dizaine d’atterrissages, ou devrait-on dire d’amerrissages, sous les conseils avisés d’Harold qui ouvre sa porte en stationnaire pour mieux me guider. Au dernier, il décide de descendre de l’appareil afin de prendre une photo puis me fait des gestes afin d’effectuer un tour sans lui. Je refuse. Non pas que j’ai peur de ne pas le retrouver mais une avarie pourrait me contraindre à rentrer à bord, le laissant là, seul sur ce fragile radeau gelé, à une heure de ralliement du navire …

Mon premier "abanquissage" !!! 

Retour à bord, dîner-goûter, pliage, roulage, « hangarage », « saisinage » et paperasse. Notre petite équipe fonctionne maintenant à merveille car chacun sait mieux ce qu’il a à faire (surtout moi) et nous sommes ainsi bien plus efficaces qu’aux premiers jours.


LUNDI 19 AOÛT

NAVIGATION EN SOLITAIRE

A des fins d’entraînement et pour ne pas perturber les activités scientifiques, Harold me demande de rejoindre un autre navire de recherche à une trentaine de nautiques (55 km) au sud-est du Polar Stern puis d’essayer de trouver de la banquise possiblement à l’ouest, m’y poser, avant de retourner à bord.

La mer est plate comme un lac et le soleil perce au sud-est mais des nuages bas et noirs arrivent par l’ouest. Harold me préviendra si la météo se dégrade. J’enregistre la position du Polar Stern, décolle, règle mon radar pour détecter mon objectif et Harold me donne les dernières coordonnées : « contact », j’ai bien un écho. Toutes les dix minutes, je donne ma position par radio et rends compte de la quantité restante de kérosène dans mes réservoirs. La couverture nuageuse devenant plus disparate, je monte à 2000 pieds (600m), fleuretant avec le sommet de quelques nuages. Le contact radar est toujours aussi bon. Je redescends dans un trou.

Le navire est maintenant en vue, immobile et en levant un peu les yeux, attiré par une extrême blancheur rayant soudainement l’horizon derrière lui, je décèle pour la première fois les montagnes enneigées des Spitzberg.

Je suis subjugué par ce panorama magnifique, pur et d’une clarté étincelante, presque mystique.

« Terre, Terre ! »

Je règle ma fréquence sur le canal marine VHF 16 pour ne pas inquiéter le chef de quart de mon survol et enroule ce premier point de navigation. Il est plus petit que le Polar Stern et ne dispose pas de pont d’envol. Seul un point de treuillage, cercle jaune siglé « Winch Only » se situe à sa proue.

Cap maintenant plein ouest à la recherche de banquise. Je louvoie à la moindre vue d’une risée fendant le miroir salé, signe de présence animale.

Ainsi, je cercle autour de grands dauphins dont les flancs blancs et leurs nuances de gris sombres m’avaient d’abord fait croire à des épaulards. Puis je détecte un chapelet de petites boules noires semblables à des têtes humaines qui s’immergent une à une à mon arrivée comme des dominos que j’aurais bousculés. Je m’interroge : étaient-ce des phoques annelés ou bien des macareux moines, oiseaux plus agiles dans l’eau que dans les airs ?


Enfin je me dirige vers un souffle de baleine. Elle est seule, majestueuse, immense, et ne semble aucunement dérangée par mon vacarme brisant son monde du silence. Je m’abstiens de prendre des photos car je suis seul aux commandes mais je savoure le privilège qui m’est donné d’être là !

Après 20 minutes de vol vers le Nord-ouest, les stratus devenus plus foncés bouchent maintenant complétement le ciel et la visibilité diminue. Je descends, réduit la vitesse. Le radar n’indique pas de banquise, seuls quelques glaçons surgissent çà et là puis défilent sur cette mer devenue couleur acier trempé, servant de refuges instables à quelques mouettes. Mon altimètre, barométrique, est recalé sur l’indication bien plus précise de ma radiosonde* puis j’actionne mes couplages automatiques (altitude et cap). L’horizon n’est plus visible, brumeux, mais je m’assure de toujours garder la mer en vue et surveille mon pare-brise.

radiosonde* : cette dernière me donne exactement ma hauteur par rapport à la surface par impulsions radar tandis que mon altimètre m’indique seulement une altitude pression. Rester à un isobare constant n’implique pas de ne jamais impacter la surface car la pression varie selon qu’on se dirige vers une dépression ou un anticyclone…

Sur mes comptes-rendus radio, Harold me demande de revenir à bord. Je suis maintenant plein ouest de la « maison ». Je tourne un petit index sur ma rose des caps et mon fidèle destrier obéit, virant vers l’écho radar. Harold m’indique que le vent sur la plate-forme est à 5h pour moins de 10 nœuds et me demande d’apponter à 3h. C’est plutôt bien car j’arrive par l’ouest et le cap du bateau est au nord, parfaitement dans l’axe de la finale donc.

5 nautiques, … 4 nautiques, toujours rien en vue. Je vérifie que je vole au-dessus de la hauteur de la mature. 3 nautiques, je réduis encore ma vitesse et arme la percussion des flottabilités.


2 nautiques, … 1,5 nautiques, le bateau fantôme apparaît enfin, tel un iceberg surgi des brumes, sa façade bâbord me barrant presque la route. Radar sur Stand-By, coupure des modes automatiques, « green deck » : vert appontage. Je m’applique pour ne pas subir encore les foudres de Roland, debout devant la porte du hangar, les bras croisés, scrutant avec bienveillance l’état de la monture, tel un vétérinaire à qui on ramène le poulain après une course hippique. Il a l’air cette fois satisfait de ma position d’appontage.

APPONTAGE A 3H 
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Je comprends mieux maintenant les envolées lyriques du commandant Cousteau, commentant ses documentaires de sa voix sérieuse, lente et monocorde. En effet, comment ne pas être inspiré par la toute-puissance de cette nature, semblant éternelle quoique fragile. Le vent, la mer, les nuages et les montagnes m’apparaissent vierges comme aux premiers jours de la Terre et me rendent si infiniment petits comparés à de telles forces… Le voyage ouvre l’esprit et fait inévitablement réfléchir sur sa propre existence comme sur l’avenir du monde. Le marin, ne se réveillant jamais au même endroit, en est sans aucun doute l’un de ses plus fidèles passagers.


Jacques-Yves Cousteau :

Pour la majeure partie de l'histoire, l'homme a dû combattre la nature pour survivre; dans ce siècle, il commence à comprendre que, pour survivre, il doit la protéger.

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LIEN VERS LES BLOGS DU POLARSTERN

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BONUS

Publié le 19 septembre 2019

JEUDI 22 AOÛT

VOL DE NUIT ... DE JOUR.

Aujourd’hui nous devons mettre en application nos méthodes déjà réfléchie de décollage et de percée adaptées aux vols de nuit. Durant 4h de vol, Harold et moi notons tout pour établir la meilleure façon de faire : l’utilisation maximale des couplages automatiques de l’hélicoptère, les meilleurs sites et échelles du radar à régler, les distances /hauteur/vitesse appropriées pour la descente, les minimas à appliquer et la procédure de remise de gaz associée. Ainsi nous aurons élaboré une méthode standard, applicable par tous et avec un maximum de sécurité. Une fois cette procédure écrite puis validée, nous devrons alors former Elena sur toute l’aide qu’elle devra nous apporter, à l’image d’un copilote à l’exception près qu’elle n’aura pas de commandes de vol.

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VENDREDI 23 AOÛT

Le plafond est trop bas (300 pieds) ce matin. Nous sortons l’hélicoptère et le branchons au courant afin d’instruire et familiariser Elena aux manipulations des divers systèmes que nous pourrions lui demander en vol. L’après-midi, les mises à l’eau du ROV et de PAUL nous interdisent de voler.

EXPOSE SCIENTIFIQUE

A 18h30, Katja Metfies, la chef scientifique de cette expédition, réunit ceux qui le souhaitent en salle de cinéma afin d’expliquer les méthodes d’analyse du plancton, premier élément de la chaîne alimentaire.

Heureusement, elle effectue toute sa présentation en anglais.

Le site d’analyse est choisi car c’est ici que deux océans se mélangent. En effet, la mer de Norvège, relativement chaude (5°C) à l’ouest des Spitzberg, remonte vers le nord, tandis que la mer du Groenland plus à l’ouest, avoisinant les -1°C, redescend au sud. Ce brassage régule la température de l’océan atlantique et influe directement sur notre climat. Ainsi la banquise n’apparaît en cette saison que sur une diagonale bien démarquée du nord des Spitzberg au sud du Groenland, comme une frontière entre ces deux mers.


BUSE et LABORATOIRE AUTOMATIQUE 

Un système de buses situées sous la coque à la proue du navire aspire l’eau en surface et la transmet à un mini-laboratoire en fond de cale, entièrement automatique, qui va alors analyser la composition ADN des molécules de plancton ainsi piégées.

Chaque position du navire est répertoriée afin d’avoir une répartition horizontale des types de plancton rencontrés.

Parallèlement et afin d’obtenir une coupe verticale de ces examens, ce sont les multiples immersions des CTD (Conductivity, Temperature and Depth), cylindres de captation de colonnes d’eau, dont les prélèvements sont soigneusement enregistrés en position et profondeur, qui apporteront leurs données.

CTD : Conductivity, Temperature and Depth

Je retiens que 150 spécimens de planctons différents sont référencés et comptés pour chaque échantillonnage. Les premières analyses montrent que trois familles distinctes de planctons sont successivement rencontrées au fur et à mesure qu’on s’éloigne à l’ouest des Spitzberg.

Il est aussi décelé que le phytoplancton, ayant donc besoin de lumière, est anormalement détecté à 80 m de profondeur au lieu de la surface, sans savoir encore quelle sorte de perturbation entraîne ce phénomène.

A terre, ces échantillons feront encore l’objet d’analyses plus poussées notamment bactériologiques.


Cliquez sur ce lien vers la "news letter" de la chef scientifique.

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"THE POLARSTERN BAND"

Plus tard dans la soirée, l’équipe du ROV, à la recherche d’un guitariste, m’invite à former le « Polarstern Band ». Une fois le petit matériel musical installé à l’avant du navire, entre quelques containers, Patrick fait sonner sa mini-batterie dont la grosse caisse n’est ni plus ni moins qu’une valise, Martin lance les graves sur une basse premier prix, Matthias rythme le tout avec un bambou rempli de sable et j’essaie de suivre avec une guitare sanglée artisanalement avec un bout. La scène irréaliste me paraît digne d’un clip du groupe Muse !!! Ils seront déçus de ma prestation mais quelle bonne ambiance !


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SAMEDI 24 AOÛT

MISSION DE RECHERCHE

Tandis que je relis mes procédures de pannes dans ma chambre, Harold surgit devant ma porte : « we have a mission for scientists » s’exclame-t-il réjoui. Il nous faut relocaliser précisément NOMAD ayant, espèrent-ils, refait surface à 10 nautiques du Polarstern.

Harold décide qu’il volera avec Elena, Roland au canon à mousse et moi en passerelle. Je me dis que l’hélicoptère va enfin apporter son aide à cette expédition car jusqu’à présent, les vols d’entraînement n’ajoutaient que des nuisances sonores aux équipes de transbordement…

Après 1 heure de vol de recherches infructueuses, l’hélicoptère revient bredouille, le char n’ayant donc jamais fait surface… Demain, il faudra envoyer le ROV en sauvetage sous-marin pour le retrouver à 1500 m de profondeur.


A mon tour de voler avec Elena. Pendant une heure, nous travaillons les utilisations du radar, du GPS et des couplages. Elle apprend comme une éponge et manipule les écrans tactiles aussi vite que son téléphone portable.


ANNIVERSAIRE

Le samedi soir, le bar du village est ouvert : le « Zillertal Bar ». Au comptoir, l’équipe du ROV tente ironiquement de me persuader que leur machine est bien plus compliquée à piloter que l’hélicoptère et compare mon travail à celui d’un grutier. Pour mettre fin à leurs sarcasmes, je leur explique, d’un ton hautain et moqueur, que je n’ai pas besoin d’être relié à une « laisse » pour voler et que si, pour eux, rater un atterrissage signifie perdre beaucoup d’argent, moi, j’y joue ma vie… Quoique chauvins, ils acquiescent tout de même.

Un joyeux anniversaire est chaleureusement chanté à Carla, la plus jeune des stagiaires fêtant ses 21 ans.

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DIMANCHE 25 AOÛT


Sauvetage de « Nomad ».

Je ne rate rien des opérations du ROV dont les nombreuses caméras transmettent leurs images sous-marines « en direct » en passerelle. Tandis que le chef de quart s’applique à positionner le navire pour toujours laisser du mou à la « laisse », actionnant tantôt le propulseur d’étrave* tantôt celui de poupe, le robot descend à 1500 m de profondeur. Il y retrouve immédiatement le véhicule englouti, atterrit, puis articule sa pince motorisée afin de tirer une poignée mécanique, lui déclenchant son système manuel de remontée. Nomad décolle avec frénésie vers la lumière. Plusieurs minutes après, ses bouées jaunes surgissent à la surface à 30 mètres sur l’arrière-tribord du bateau, là où les équipes de récupération sont déjà parées à le cueillir. Sauvetage réussi !


*propulseurs d'étrave et de poupe : il s’agit de deux rotors mus par des moteurs électriques, l’un situé à l’avant, l’autre à l’arrière, dont les hélices sont orientées parallèlement à l’axe du navire. En actionnant leurs deux joysticks indépendants, le chef de quart peut alors aussi bien tourner sur lui-même que se déplacer latéralement.


VOL BANQUISE

L’après-midi, la banquise étant estimée à 30 nautiques du Polar Stern sur les images satellites, Elena et moi partons en vol à sa rencontre, tous deux enchantés par la perspective. Elle apparaît au radar et s’étend sur une large surface cette fois. Nous trouvons quelques rares plaques suffisamment épaisses pour que je m’exerce à m’y poser et je restitue scrupuleusement tout ce que m’a appris Harold la semaine précédente.

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LUNDI 26 AOÛT

Ce matin, le temps est estival : 5°C au soleil ! Vol d’entraînement avec Elena.

Nous effectuons les tours de piste comme si nous volions de nuit puis j’inclue quelques exercices de panne afin de lui expliquer ce que j’attends d’elle. Elle recherche la page correspondante dans le manuel de vol puis me lit la procédure, je lui explique les types d’urgence et les limites du vol avec un moteur en panne.

L’après-midi elle vole avec Harold vers la banquise mais aucun atterrissage n’y est cette fois possible, les plaques de glace étant trop fines.

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3 PHARES - 7 INTERRUPTEURS !

Harold m’explique les commandes pas toujours intuitives de nos nouveaux phares. Nous en possédons maintenant 3 dont 2 orientables dans tous les azimuts, le dernier étant fixe. Dans le cockpit, nous disposons de pas moins de 7 interrupteurs pour les utiliser, quatre situés directement sur le manche collectif et trois au plafonnier. A force d’en rajouter, l’ergonomie n’est donc pas parfaite mais je me dis qu’avec un tel dispositif on pourrait largement animer une soirée « son et lumières » !

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MARDI 27 AOÛT

La dépression que nous surveillions depuis quelques jours nous arrive par le sud. Nous n’y échapperons pas : Vent force 8 Beaufort soit 40 nœuds, mer 6-7 soit des creux de 5 m, et tangage 5°.

Le chef de quart diffuse l’interdiction de circuler sur les extérieurs. Nous n’avançons pas, ou du moins juste assez pour de tenir le cap face aux déferlantes.

J’essaie d’extraire les films de ma Gopro de mes premiers atterrissages sur la banquise sur le modeste ordinateur portable emprunté à mon fils dont les performances ont bien du mal à supporter la Haute Définition. Alors je finis le livre offert par mon épouse avant de partir : « Robinson des glaces ». Emmanuel Hussenet y raconte son périple d’un mois en solitaire en kayak du détroit de Smith à l’île Hans, au 80ème parallèle nord lui-aussi mais cette fois à l’ouest du Groenland. Il y mêle savamment exploit sportif, aventures épiques, récit historique et réflexions écologiques.

Elena a perdu en couleur ce midi mais parvient à grignoter quelque peu avec nous !!!

Stupéfaction ! La machine à café, pourtant de qualité professionnelle, est en panne.

Je propose à Harold cet argument pour décoller dès que le temps le permettra vers les Spitzberg afin d’en acheter une nouvelle mais il connaît déjà tous mes subterfuges pour inventer des vols au-delà du 80ème Nord ou vers ces îles magnifiques que j’aimerais tant survoler.

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MERCREDI 28 AOÛT

En relevant le rideau de la chambre, la visibilité est d’à peine 200 m. Nous sommes en plein brouillard maintenant au cœur de l’occlusion. Les météorologues confirment qu’il ne devrait pas se lever aujourd’hui et qu’aucun vol ne sera possible.

Le Polarstern navigue vers le Groenland pour y trouver la banquise.

L’après-midi, les rides sur la mer s’estompent peu à peu jusqu’à ce que sa surface devienne complètement noire et lisse, lentement ondulante par une houle bien large et espacée. On croirait glisser sur le dos d’une baleine. Surgissant du brouillard dense, quelques glaçons font leurs apparitions, de plus en plus nombreux, de plus en plus larges puis la coque vibre doucement, heurtant maintenant quelques plaques, et enfin les bruits de ressac des morceaux ainsi repoussés se font entendre. Les vagues semblent au ralenti, freinées, presque paralysées par cette mélasse gelée. Les membres d’équipage sortent joyeusement sur les extérieurs et les commentaires enthousiastes fusent comme les photos. Nous y sommes.

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JEUDI 29 AOÛT

Premiers pas sur la banquise.

Le brouillard a disparu ! A cheval !

Il nous faut faire enlever un objet non identifié ayant apponté sans autorisation sur le pont d’envol. La grue se charge de redescendre cet étrange appareil de mesure deux ponts plus bas.

Le vol consiste à atterrir sur la banquise et y débarquer un scientifique factice et son matériel : Harold et nos trois sacs de survie ainsi qu’un fusil, au cas où des ours polaires seraient attirés par notre présence.


Dans un premier temps, il sera assis en place gauche et Elena à l’arrière afin de lui montrer les bons gestes à adopter, vérifier l’état de la glace puis guider l’évacuation car la machine pourrait être instable en lacet ou glisser à tout moment.

Après analyse des dernières images satellites, nous volons vers le Groenland, là où nous trouverons la meilleure quantité et qualité de banquise. Après 15 minutes de vol (30 nautiques), Harold me désigne la cible, une plaque épaisse, bleutée et présentant plus d’aspérités. Il relaie notre position par radio à Roland, en passerelle, avant mon approche car, en bas, le contact VHF avec le bateau-mère sera momentanément perdu. Je trouve une surface à peu près plane, me pose, pompe légèrement la glace puis il descend, inspectant la qualité de l’esquif. Il me fait signe que le débarquement est possible. Il ouvre la porte coulissante arrière, prend le fusil et guide Elena à environ 15 m de l’hélicoptère puis ils s’accroupissent. Je redécolle seul. Virant en vent arrière, j’essaie de reprendre le contact visuel avec mes naufragés mais je me rends vite compte que ce n’est pas si simple, chaque plaque ressemblant à si méprendre à une autre. Heureusement, j’ai soigneusement enregistré ma position avant de décoller car les deux êtres pourtant tout d’orange vêtus sont bien minuscules au milieu de ce dédale blanc couvrant la surface jusqu’à perte de vue.

En courte finale, Harold me guide par gestes afin de me poser puis ils embarquent. Après deux démonstrations, Elena s’installe maintenant à côté de moi et devient elle-même chef de débarquement, Harold jouant le rôle du passager scientifique indiscipliné. Nous enchaînons les exercices en y ajoutant le déchargement de nos trois sacs de survie et du fusil par les portes «papillon», situées à l’arrière, sous la queue.





Après 2 h de vol, il est temps de ravitailler. Un déjeuner « express » et nous voilà repartis. A moi d’être tour à tour passager puis assistant de vol. Je débarque ainsi pour la première fois sur la banquise. Une fois l’hélicoptère éloigné et le silence revenu, Elena me promulgue très sérieusement, toute concentrée sur son nouveau travail, les derniers conseils d’Harold s’agissant de sonder la banquise. Elle m’en fait la singulière démonstration, marchant lentement les jambes écartées et les bras en croix afin d’être en mesure de réagir à tout enfoncement.

Armstrong ? 

Habillée telle une cosmonaute, j’ai l’impression d’être témoin des premiers pas sur la lune de Neil Armstrong ! Je lui rétorque que nous, les français, avons une toute autre façon de faire. Devant son air étonné et son regard soucieux, j’effectue ma plus belle roulade avant puis tente de lui envoyer une boule de neige mais la glace est si parfaitement compacte que je n’y parviens pas. Nous éclatons de rire et son enthousiasme exulte enfin.

Débarquant sur la dernière plaque, je découvre une trace qui pourrait bien être celle d’un ours polaire. L’empreinte fait presque deux fois la longueur de mon pied. Imaginer la taille de la bête me fait frissonner et mon embarquement dans l’aéronef n’en est qu’accéléré mais Harold nous demande de prélever des morceaux de glace afin de les ramener à bord. Pensant à une requête de quelques chercheurs glaciologues, nous chargeons alors deux blocs d’une dizaine de kilogrammes chacun à l’arrière de l’hélicoptère.

A gauche la vraie trace d'Ours, à droite les scientifiques s'interrogent encore...

Sur le transit retour, tandis qu’Harold tente de m’expliquer que c’est maintenant devenu une sorte de tradition que je comprendrai plus tard, je l’interromps subitement en criant « Whales ! Whales ! In your 9 o’clock, turn left, turn left ». Je le guide afin qu’il entoure deux baleines à bosses, toutes deux à la gorge extraordinairement blanche, dont l’une d’elle finit par sonder. Elle dresse furtivement sa nageoire caudale hors de l’eau en guise d’adieux avant de disparaître à la verticale, ne nous laissant plus que le souvenir de sa dernière expiration.

Baleines

En soirée, une fois l’hélicoptère à l’abri et nos papiers renseignés, je connais enfin la véritable raison de notre étrange cargaison et comprends que les besoins de la science ne sont nullement concernés :

LES TRADITIONS ! 

Tel un cérémonial clôturant cette extraordinaire journée, notre fine équipe internationale se réunit afin de déguster un peu de « Jager Meister » dans un verre préalablement rempli de ces glaçons des plus naturels, sans nul doute bien plus anciens que le plus vieux des Cognac et dont le caractère exceptionnel en démultiplie la saveur ! J’exprime ma totale adhésion à cette belle tradition initiatique et jure même désormais de toujours veiller à son plus scrupuleux respect.

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BONUS - ET L'ANTARCTIQUE ALORS ?

REPORTAGE ARTE ANTARCTIQUE

https://www.arte.tv/fr/videos/078142-000-A/la-fonte-des-glaces-sous-haute-surveillance/

Que nous dit précisément l'évolution de la banquise en Antarctique sur le changement climatique ? Un état des lieux des défis à relever pour les scientifiques.

Quand le plus gros iceberg jamais observé s’est détaché en juillet 2017 de la barrière de Larsen, dans le nord de l’Antarctique, le monde entier a retenu son souffle : les images satellite de ce colosse de glace de 5 800 km², baptisé A-68, ont défrayé la chronique. Faut-il s’alarmer de cet événement, ou le considérer comme un simple "vêlage", comme disent les glaciologues – un spectacle de la nature certes rare, mais normal ? Pour les spécialistes du climat, cette question se révèle un véritable casse-tête. Alors que des techniques de pointe – mesures par radar ou images satellite – permettent aujourd’hui d’observer les régions polaires les plus inaccessibles et de suivre de près la fonte des glaciers, quel lien les chercheurs établissent-ils entre leurs constats et les évolutions climatiques de l'ensemble de la planète ? Cherchant à prévoir ces dernières, et leurs conséquences sur l’écosystème, certains scientifiques tentent même de mettre au point des techniques de géo-ingénierie visant à stopper le réchauffement du globe. Mais ces dernières sont-elles à la hauteur des défis à relever ?

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Sans aucun commentaire :

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Reportage en anglais :

Compte-rendu scientifique en anglais de cette semaine

PS121 - Weekly Report No. 2 | 18.08. – 25.08.2019

Working in Hausgarten [04. September 2019]

A large part of the work and projects that we scientists planned for this expedition are closely related to furthering the long-term observatory HAUSGARTEN, established by the AWI’s Deep-Sea Group 20 years ago, and to supporting the Helmholtz Infrastructure Initiative FRAM (Frontiers in Arctic Marine Monitoring). The long-term observatory Hausgarten is a network of twenty stations in the Fram Strait, whose coordinates are re-visited by us every year in the summer months.

We are a multidisciplinary team of biologists, physicists, chemists, engineers, and technicians, who have the common goal of better understanding the marine biodiversity and climate-related processes in the Arctic Ocean. Our research in the long-term observatory HAUSGARTEN covers almost all parts of the marine ecosystem. It reaches from the water column to the seafloor, from the relatively shallow area of the Spitzbergen shelf to the deepest point in the Arctic, the Molloy Deep, as well as from the smallest bacteria to microalgae through to larger planktonic and benthic organisms.

The results of our research should contribute to better identifying and quantifying the effects of sea ice and climate change for marine ecosystems in the Arctic. The Fram Strait is a very good region for this research, because here relatively warm ice-free areas with water masses of Atlantic origin, as well as cold, ice-covered areas with water masses of polar origin are relatively close to one another and can be comparably investigated.

Fig. 2: Amphipods are feeding on the squid (here: 3 hours after start of the experiment). (Photo: GEOMAR) 

At the stations of the long-term observatory, a whole array of complementary standardized investigations is conducted, that together should give as complete a picture as possible of the present state of the marine ecosystem and its functioning in the Fram Strait. This requires annual deployment of samplers and optic observation systems for studies in the water column and on the seafloor, as well as deployment of an AUV (autonomous underwater vehicle) and an ROV (remotely operated vehicle). The annually repeated investigations in summer became part of the Helmholtz Infrastructure Initiative FRAM some years ago, through the installation of anchored sensors, samplers, and automatic measurement systems, that collect and deliver information on the most important ecological parameters throughout the year.

The whole-year measurements are essential for assessing the state of the Arctic ecosystem as completely as possible, because ecosystem functions have strong underlying seasonal patterns. The work in the past week has included furthering the long-term observatory HAUSGARTEN and conducting ancillary projects IMMIPLANS (University of Bremen) and CarCASS (GEOMAR), whose research goals are complementary to the questions asked by the Hausgarten team.

The weather conditions were perfect over the past week, and so the varied instruments could be deployed and exchanged as planned. In mostly calm seas, the moorings were exchanged, various lander systems were deployed and recovered, and the water column and the seafloor were sampled. The highlights of the week were certainly the two ROV deployments. With this vehicle, the actions of an autonomous benthic crawler outfitted with cameras and sensors could be filmed on the seafloor, and experiments about the effects of ocean acidification on organisms on the seafloor could be completed. The ROV delivered very impressive live footage of brittle stars and amphipods reacting to bait in the form of squid, which was deployed by the ROV. The mood on board is good. We will report on our work in the western Fram Strait next week.

With best wishes from all expedition participants, Katja Metfies (Translation: Kirstin Meyer-Kaiser)


Télécharger le fichier PDF présentant le programme scientifique de cette expédition via :

https://epic.awi.de

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VENDREDI 30 AOÛT

BARBECUE

Le temps a encore changé et est inadapté aux vols : il pleut, le plafond est bas (300 ft – 100 m) et l’isotherme 0°C n’est qu’à 400 ft. Heureusement que nous avons bien profité hier des conditions météorologiques exceptionnelles en effectuant plus de 4 heures de vol.

Les membres d’équipages s’organisent pour dresser les tables et préparer le barbecue de ce soir. Une salle de bar musical est improvisée sur le pont principal, décorée de multiples drapeaux et éclairée par des ampoules multicolores telle une guinguette d’un autre temps. Celui français y tenant une bonne place, je suis heureux et reconnaissant de cette délicate attention. Les couleurs germaniques, quant à elles, trônent évidemment derrière la pompe à bière… Trois barbecues nous réchauffent sur l’aire de mise à l’eau et chacun peut y faire cuire ses "brat wurst" ou la viande de son choix. L’ambiance est chaleureuse et la piste de danse ne fermera que tard dans la nuit.

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SAMEDI 31 AOÛT

OURS POLAIRE

Je monte en passerelle et salue le chef de quart, Jacob, la trentaine passée, élancé, barbu pour se vieillir, les cheveux longs et lisses dépassant largement de son bonnet bleu marine.

Seul depuis 4h du matin, il y écoute "Live and let Die" des Guns’N’Roses, tandis qu’il manœuvre ses propulseurs pour maintenir la position, les équipes de scientifiques ayant encore et toujours besoin de mettre à l’eau leurs multiples appareils. La visibilité est exécrable mais il décèle soudain un ours polaire nageant sur l’arrière du navire. Il prend immédiatement le micro et en fait la communication à tout l’équipage. Je fonce vers l’aire d’envol. L’énorme mammifère grimpe sur une plaque de glace à 200 m, se secoue comme un labrador puis se dresse sur deux pattes, tel un géant, ses deux billes noires fixant l’étrange monstre d’acier, aussi étonné que la brochette de scientifiques maintenant alignée sur le pont. Sous le vent, il relève et balaie maintenant sa truffe vers le ciel pour mieux humer notre odeur puis il se laisse lourdement retomber, replonge dans l’eau glacée et nage à l’opposé.

Nous sommes à 150 nautiques à l’est du Groenland et 200 nautiques à l’ouest des Spitzberg au 79 Nord. J’en déduis que cet animal singulier est donc plus marin que terrien.

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DIMANCHE 1ER SEPTEMBRE

Aucune évolution du temps.

Nous réfléchissons aux conditions qui nous attendent, de février à avril 2020, pour l’expédition MOSAIC. Seul Roland n’y participera pas.

En dessous de -20°C, le démarrage sur notre propre batterie nécessite son préchauffage préalable d’après le manuel de vol donc il ne faudra sans doute jamais couper les moteurs à l’extérieur du navire.

Par -35°C, notre température d’huile de transmission principale pourrait avoisiner les 0°C, son minimum autorisé, donc devenir bien plus visqueuse qu’habituellement et en influencer sa pression.

Par expérience, Roland explique que par ces températures extrêmes, certains joints des tuyauteries d’huile moteur sont à surveiller au démarrage car pouvant présenter des fuites.

Le chauffage intérieur de la cabine sera-t-il seulement suffisant ?

Les éphémérides transmis par les météorologues nous indiquent qu’il fera nuit en permanence du début du mois de février, date de notre arrivée à bord, jusqu’au 18 mars en fonction de notre position et donc de la dérive de la banquise.

De nuit, afin d‘atterrir sur la glace, il nous faut une référence visuelle donc disposer d’un balisage sur batterie ou larguer nos propres fumigènes. Comment utiliser au mieux nos phares et quelle est la meilleure façon de nous présenter afin d’éviter le « White Out », phénomène de perte totale de référence dû au soulèvement de la neige par notre propre souffle.

Bref, pas mal de défis passionnants en perspective.


SÉANCE DE SPORT

7 km de tapis roulant, 7 km de vélo, 2 km de rameur et … plongeon dans la piscine dont l’eau n’est qu’à 18°C certes mais quel luxe !

La mer du Groenland nous entourant atteint une température bien plus glaciale : -1°C, sa salinité l’empêchant de geler. Grelotant déjà, je songe au choc que cela doit représenter d’y tomber et au faible temps escompté d’y survivre si nous ne parvenions pas à grimper dans le canot gonflable ou sur la banquise, même munis de nos équipements étanches et de nos sous-vêtements chauds. Afin de me rassurer, je me dis qu’au mois de février, lorsque nous serons prisonniers des glaces, l’amerrissage sera rendu impossible, tout du moins sur une surface liquide…


Il est presque 23h et les rayons du soleil jaillissent soudain dans ma cabine. Je flambe car je dispose ici de deux hublots, ouvertures normalement réservées tout au plus au commandant sur mes anciens navires de guerre. Bref, le brouillard a donc enfin disparu et demain, nous frôlerons le 80ème nord alors je compte bien passer cette ligne toute fictive mais ô combien mythique en vol avec Elena.

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LUNDI 2 SEPTEMBRE

Changement des plans. Nous fuyons l’arrivée d’une dépression pour nous mettre à l’abri dans la baie de Ny-Ålesund (« Nouvelle-Ålesund » en norvégien). Nous y arriverons ce soir.

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LIEN WIKIPEDIA

Ny-Ålesund (78° 55′ N 11° 55′ E) est située sur la péninsule de Brøgger, sur la rive sud du Kongsfjorden (fjord du Roi), dans l'île du Spitzberg, dans l'archipel du Svalbard, à plus de 100 kilomètres au nord de la capitale Longyearbyen. Elle est la ville la plus septentrionale du monde, bien que n'étant pas le lieu habité le plus au nord du monde, et possède la plus grande concentration de bâtiments protégés et de monuments culturels du Spitzberg3.

La péninsule de Brøgger, située sur la côte ouest du Spitzberg, reflète différentes périodes géologiques. Elle est située dans une zone où le Groenland a subi des pressions du Spitzberg à l'époque du Tertiaire. Les couches plus jeunes — du Carbonifère et du Permien, y compris sur la partie nord du mont Zeppelin, est composée de roche mère, de mica, d'ardoise et de marbre. Les sols juste au sud de Ny-Ålesund sont composés de grès rouge issus de la période où le Spitzberg était à la même latitude que le désert d'Afrique du Nord. C'est pourquoi les glaciers et les rivières de la région ont une couleur rougeâtre3. De récents dépôts géologiques de la région se sont formés lors de la dernière période glaciaire (environ 10 000 ans) et sont à l'origine des gisements de charbon. Ce solide est à la base de l'exploitation minière de Ny-Ålesund, qui a commencé en 1920 et a duré jusqu'en 1962.

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Vers 23h, le soleil, orange vif puis pourpre, touche la mer et dore de ses derniers rayons les sommets crénelés des montagnes rocheuses.


Ces blocs basaltiques, tantôt noirs, tantôt ferreux et presque totalement dépourvus de végétation contrastent avec les énormes glaciers blancs-bleus qui les encerclent jusqu’à en atteindre la mer, telle une exposition de minéraux sur un écrin de coton.

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MARDI 03 SEPTEMBRE

VOL AU-DESSUS DES SPITZBERG

Protégés de la dépression glissant au sud-est des Spitzberg et sous l’effet de foehn* de ses montagnes, nous profitons de cette embellie pour combler mes vœux. Je pars en vol avec Elena explorer la côte Ouest.


*L’effet de foehn, ou effet de föhn, est un phénomène météorologique créé par la rencontre de la circulation atmosphérique et du relief quand un vent dominant rencontre une chaîne montagneuse1. Le nom vient de foehn, nom donné à un vent fort, sec et chaud dans les Alpes.

L'air situé sur le versant ascendant subit un refroidissement adiabatique sec, ce qui augmente son humidité relative jusqu'à possiblement saturation. S'il y a condensation, il y aura production de nuages et précipitations de ce côté puis le taux de changement devient celui plus lent du gradient adiabatique humide. En aval de l'obstacle, l'air redescend et se réchauffe selon l'adiabatique sèche ce qui dégage le ciel de ce côté. Selon la quantité de vapeur d'eau perdue et la différence d'altitude avant et après l'obstacle, la température en aval pourra être plus chaude qu'en amont.


https://education.francetv.fr/matiere/sciences-de-la-vie-et-de-la-terre/sixieme/video/qu-est-ce-que-l-effet-de-foehn

Les paysages découverts paraissent d’une autre planète.

Nous voilà survolant Mars, le sol rocailleux et désertique, de couleur ocre et rouille, ne semblant que momentanément au contact de l’air car totalement enseveli sous la neige le reste de l’année.

En atteignant la vallée voisine, un sable gris uniforme défile sous le fuselage et nous voici donc en apesanteur sur la Lune.

Afin de vérifier notre seul lien avec « la Terre », je tente de contacter Harold en passerelle : "Houston, Bird Two, for contact ?". Aucune réponse… Le cordon ombilical est coupé car le Polar Stern navigue à 40 nautiques. Je monte, relance un second appel infructueux, puis change de poste radio. Je l’entends maintenant, sur le canal 15 de la VHF Marine et réussis à lui transmettre ma position et mon autonomie. Nous sommes tous deux rassurés car il perd souvent mon contact "AIS" dans ce relief tortueux.

Maintenant, nous remontons un énorme serpent de glace aux écailles tranchantes. Passant d’une eau salée verdâtre et opaque à ses pieds, nous découvrons, prisonniers de ses profondes crevasses, des petits lacs dont l’eau douce, pure et limpide vire du turquoise au bleu profond.

Les amas de pierres ravinés sur ses flancs laissent facilement deviner que le monstre grossit d’un bon tiers en hiver ou peut-être est-ce le signe plus inéluctable du réchauffement climatique ? Je n’en sais rien. Il ressemble à une gigantesque coulée de lave ridée mais blanche et froide, extraterrestre vous dis-je…

Enfin, nous longeons de hautes falaises échancrées, noires et abruptes, dressées telle une muraille protectrice barrant la route aux nuages amoncelés sur le versant opposé.

Il est temps de redescendre et de rejoindre notre "base de lancement".

Sur la dernière île survolée vers le navire, je distingue un renne non loin de la berge. Ne trouvant ni le terme hispanique, ni allemand, ni même anglais, je m’exclame bêtement vers Elena : "Animal, Animal !!!" et vire autour de lui par la gauche. Elle l’immortalise sur une photo puis nous rentrons, les yeux encore écarquillés par la splendeur de ce décor, façonné par la seule puissante main de la nature.

L’après-midi, j’ai même droit à une séance d’entraînement aux appontages en solitaire. Le navire est à l’arrêt mais la houle résiduelle ne me facilite pas tâche car, par moments cycliques, le tangage fait monter ou descendre la plate-forme de plusieurs mètres. Harold, au micro devant la caméra de la passerelle, y juge chacun d’eux et me promulgue ses conseils.

PASSERELLE

Je monte en passerelle et y discute avec Tibor, un autre chef de quart, la quarantaine, petit et trapu, la barbe rousse, sa casquette toujours vissée sur la tête afin de masquer sans doute son début de calvitie. Passionné de bateaux, il me questionne sur les porte-avions français.

Je lui raconte que j’éprouve une certaine fierté d’avoir pu naviguer sur les "Clemenceau", "Foch" puis "Charles de Gaulle" mais que, si certains peuvent adorer les grandes villes, je préfère les petits villages à l’image des frégates à taille plus humaine sur lesquelles j’ai majoritairement embarqué. Les missions de l’hélicoptère y sont aussi autrement plus variées, lointaines et valorisantes que la mission de sauvegarde des pilotes de chasse, trop prédominante à mon goût à bord des gros "bateaux plats".

Il dispose en passerelle d'un radar spécialement conçu pour détecter la glace (photo de gauche) et, depuis peu, d'une caméra infrarouge permettant de surveiller toute présence humaine, ou animale, durant la nuit.

Le commandant et la chef scientifique, priorisant les recherches dont les jours sont maintenant comptés, décident de quitter notre abri côtier pour remonter vers un site au nord-ouest au 80ème parallèle Nord malgré les prédictions météorologiques défavorables. Force 9, 45 nœuds de vent et des creux de 5m ne tardent pas à se faire sentir...

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MISS SVALBARD

Depuis deux jours, nous connaissons le thème de l‘ouverture du "Zillertal bar" de ce soir : se travestir.

Chacun a donc secrètement préparé son déguisement avec ses faibles moyens comme lors de mes précédents passages de "La Ligne", nom donné au franchissement de l’équateur que la Marine nationale française célèbre en grande pompe.

L’équipe Hélicoptère ne voulant jamais décevoir, j’ai pu glaner une robe verte, un soutien-gorge et des bas, une perruque rose, du maquillage, du vernis à ongle, du rouge à lèvre et un collier. Elena m’a confectionné une écharpe de scotch sur laquelle est inscrit "Miss Svalbard", une couronne de princesse avec l’armature d’un casque anti-bruit et un bâton de fée en tuyauterie de drain surmonté d’une étoile argentée. Elle-même sera habillée d’un costume cravate et parée d’une fausse moustache de mousquetaire.

Après bien une heure de préparation, du rasage de mon bouc, au maquillage par fort roulis jusqu’à l’essayage, nous entrons triomphalement tous deux dans ce lieu de vie le plus excentrique et septentrional que je connaisse. Les femmes ont aussi joué le jeu. Vêtues par exemple en "chef machine" noir de suie ou encore en supporter de foot, leurs bras bardés de tatouages éphémères et vulgaires, leur visage peint de barbes et de moustaches, leur ventre gonflé de fausse bedaine, elles jurent grassement, une chope de bière à la main. Quant aux ex-hommes, certains sont en peignoir, d’autres en mini-jupe de plastique, du chanvre de cordage en guise de chevelure, parfois même tressé en nattes, maquillés à l’excès et aux poitrines factices toujours surdimensionnées.

Le commandant et la chef scientifique débarquent à l’improviste, évidemment sans aucun déguisement, et je perds alors immédiatement toute crédibilité. J’espère seulement qu’en me voyant ainsi accoutré, ils prennent au moins conscience de ma totale implication à vouloir m’intégrer… Après un mois de mer, cette soirée de cohésion permet à toutes et à tous de bien décompresser.

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MERCREDI 04 SEPTEMBRE

Le commandant me regardant d’un drôle d’air ce matin au briefing météo, je lui demande s’il n’a pas croisé ma "sœur jumelle maléfique" hier soir… Il esquisse un sourire.

Finis les plaisanteries, la météorologue annonce des conditions givrantes interdisant les vols.

Je regagne ma cabine par les extérieurs et manque de tomber, le pont étant complétement recouvert de givre transparent. Déambulant comme un patineur novice, je croise deux membres d’équipages munis de sceaux répandant du sel un peu partout.

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BONUS

LIEN ÉDUCATION LE FIGARO

80 députés de tous bords, emmenés par les écologistes Delphine Batho et Matthieu Orphelin ainsi que Cédric Villani (LREM), ont déposé jeudi une proposition de loi pour généraliser l'enseignement des enjeux liés à la préservation de l'environnement et aux changements climatiques.

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https://www.francetvinfo.fr/meteo/climat/mission-mosaic

Une fois au cœur de l'océan Arctique, le moteur du Polarstern sera coupé et le navire sera alors à la dérive, piégé dans les glaces du pôle Nord. L'objectif est d'observer et d'analyser les conséquences du réchauffement climatique sur cet océan.

- 45°C dans le noir

"Quand les tempêtes de neige et les vents violents sont descendus jusqu’en Floride, cela était dû au changement climatique dans l'Arctique. Il faut comprendre ce à quoi ressembleront les conditions météorologiques extrêmes à l'avenir", explique le professeur Markus Rex, responsable de l'expédition MOSAÏC.

En 2018, la température a augmenté deux fois plus qu'ailleurs dans l'Arctique, ce qui a un impact direct sur le reste du monde. Grâce à un budget de plus de 120 millions d'euros, le Polarstern sera transformé en laboratoire flottant pendant un an. Les scientifiques travailleront parfois par - 45°C et dans l'obscurité la plus totale.

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3 ARTICLES sur mon projet SMLH avec l'Education Nationale et la jeunesse.

LIEN ARTICLE L’ÉCHO DES VOSGES- 4 septembre, 08:21

LIEN ARTICLE L’ÉCHO DES VOSGES - 11 septembre, 13:29

LIEN ARTICLE L’ÉCHO DES VOSGES - 11 septembre, 13:25

POUR SUIVRE L’EXPÉDITION EN DIRECT

https://follow.mosaic-expedition.org

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BONUS


Publié le 24 septembre 2019

Compte-rendu hebdomadaire par Magda, scientifique colombienne.

2. September 2019 by Polarstern Fahrtleiter Leave a Comment

By Magda Cardozo, PhD student of Max Planck Institute for Marine Microbiology, Bremen.


CTD about to go into the water. Photo: Magda Cardozo 

In the open ocean, microbes are the most active and abundant organism, and control processes that are crucial for sustaining life on earth. We can study microorganisms from samples taken from a wide range of equipment and sources, from the sea surface to the sea floor. We can explore these tiny forms of life in the water, but for that we need to collect large volumes of water, so our gear is rather large and heavy. For example, we use auto-samplers that sample water all year long, or a “CTD” (conductivity, temperature and density), which is basically a metal rosette with several large bottles that can collect water from different depths at each research location or station. On this cruise, my research is focused on bacteria in the water column. We filter water from different regions of the Fram Strait, including those, which are covered by ice. This year I am using an in-situ pumping system that can filter large volumes of water without the constraint of time, which is crucial for molecular studies.

In-situ pump prepared to be deployed. Photo: Magda Cardozo 

The procedure is rather simple. Before we begin, we receive an announcement from the chief scientist, with the research stations for the next 24 – 48 hrs scheduled. On a research cruise such as this one, we work in shifts to insure sampling whenever it is possible throughout the day. After we reach a station we stop the ship and deploy the pump at the scheduled time, which for our research group is often during the night. The pump is attached to a special wire and a CTD and then lowered into the ocean, and we wait for a couple of hours while the pump is in action. During that time my colleagues gather to wait for the CTD to collect the water sampled from different depths in the water column. It is a very special moment at this time of the year, as the sun continues to shine in the Arctic region throughout the full 24 hrs of a day, which makes the task a lot easier and very special.

We might have a coffee or a hot cocoa while we wait for the gear to come back on deck. Collecting water is one of the most reoccurring events during our cruise, scientist from different fields of science wait to answer their questions from those same litters of sea water. Back on deck I have to be fast, I open the pump and take the hand sized filters out, which are designed to catch microorganisms of different sizes. We then cut the filters into sections for subsequent tests, and quickly freeze them in liquid nitrogen so all the bacteria and associated DNA remains intact for as long as possible. The filters will be further analysed back in Germany to answer questions of microbial community structure, functioning and activity in the Arctic Ocean. The Arctic is changing quickly, and we are facing changes that will affect the marine ecosystem, from the smallest to the largest members of the food-web. These samples might provide us with answers on how climate change is affecting the Arctic ecosystem.

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JEUDI 05 SEPTEMBRE

VISITE MACHINES

J’ai rendez-vous à 14h00 devant la salle des machines. Henning, le "chef machine", le teint blafard, lunettes sur le nez et la barbe brune impeccablement taillée, nous y attend.

Le navire, construit en 1982 et d’une masse à vide de 11800 tonnes auxquelles se rajoutent 5500 tonnes de fret, dispose de quatre moteurs diesel "DEUTZ" à huit soupapes de pas moins de 4800 chevaux chacun pouvant le propulser jusqu’à 16 nœuds.

Deux moteurs à bâbord et deux à tribord font tourner deux lignes d’arbre à une vitesse de rotation constante. La vitesse de propulsion est uniquement obtenue en faisant varier le pas des hélices, modifiant leur incidence. Les deux rotors en bout de ligne d’arbre sont protégés chacun par une couronne métallique extérieure empêchant les gros morceaux de glace de venir heurter les pales mais ayant aussi l’inconvénient d’en accumuler des plus petits, pouvant créer un effet de bourrage engendrant de fortes vibrations jusqu’à leur broyage. En secours, un seul moteur sur une seule ligne d’arbre permet de naviguer sans problème, le grand gouvernail devant être légèrement désaxé pour compenser le déséquilibre de poussée.

La puissance des moteurs électriques des propulseurs d’étrave et de poupe est quant à elle de 1500 chevaux.

1982 

Le Polarstern, long de 118 m, est un brise-glace « double-coques » : l’une extérieure, suffisamment solide pour affronter la navigation dans une banquise d’un mètre cinquante d’épaisseur, l’autre intérieure, plus fine et entre les deux des ballasts d’eau douce en guise d’amortisseur. La partie supérieure au niveau de la mer de ces réservoirs doit être chauffée afin de ne pas geler lors des températures négatives extrêmes.

Sous les ordres d’Henning, une équipe de 12 machinistes, travaillant en permanence par quart (période de 4 heures), ne s’occupe pas uniquement de la propulsion. Elle gère l’électricité à bord, les eaux usées, les ballastes, la répartition des réservoirs de fuel, la cuve de kérosène, la production d’eau douce et le chauffage. Ces deux derniers points représentant leurs principaux défis à relever lors de l’expédition "MOSAIC", en hiver arctique.

Il est temps de s’équiper de casque et de faire un tour au cœur de la mécanique géante et bruyante avant de revenir au PC.

Je remercie Henning d’avoir fait l’effort de donner ses explications en anglais par ma seule présence dans le petit groupe de visite. En dernière question, je lui demande malicieusement s’il peut pousser la température de la piscine à 25°C, sans quoi il m’est impossible de m’y baigner. Tout le groupe éclate de rire … sauf lui, dépité.

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VENDREDI 06 SEPTEMBRE

LA MISSION !

Aujourd’hui, nous devons rejoindre la banquise à 50 nautiques (95 km) du Polar Stern, trouver une glace âgée et y déposer sept scientifiques avec 200 kg de matériel afin qu’ils en prélèvent des échantillons. Deux d’entre eux seront dédiés à la surveillance des ours et munis de fusils. Nous leur laissons évidemment des sacs de survie et un téléphone Iridium.



Harold et Elena effectuent les deux vols de mise en place nécessaires tandis que je surveille les opérations en passerelle. Je ne quitte pas des yeux leur progression sur l’écran AIS et ne manque pas de les féliciter à leur franchissement du 80ème parallèle Nord, Elena entrant pour la 1ère fois dans ce cercle nordique. Les scientifiques sur la glace me rendent compte toutes les 30 minutes par téléphone satellite de leurs coordonnées et du bon déroulement des opérations. En les notant, je suis surpris par la vélocité à laquelle ils dérivent : un peu plus d’1 nautique par heure (soit 2 km/h), un vent bien établi de 20 nœuds poussant l’ensemble des îles gelées. Je crée un point désigné "man over board" (homme à la mer !) sur mon écran de contrôle.

Une fois les deux vols effectués et disposant de deux heures avant leur récupération, Harold décide un ultime vol d’entraînement aux atterrissages sur la banquise à mon profit avant de me laisser seul les récupérer. Nous embarquons mon premier passager, Christian, le technicien météorologue. Me désignant une plaque, j’effectue mon approche normalement mais cette fois-ci, de la neige fraîche s’envole tout autour de moi rendant mes repères plus difficiles à tenir.

Pédagogiquement content que je me sois fait quelque peu surprendre, il me désigne une autre plaque afin de me démontrer une autre méthode : une arrivée en stationnaire au-dessus de la zone, suffisamment basse pour expulser la neige mais aussi assez haute pour éviter qu’elle ne nous atteigne. Au fur et à mesure que la neige se dégage, je descends par paliers successifs jusqu’à que la surface de glace apparaisse, lisse et brillante comme un glaçon. C’est efficace sur la banquise afin d’éviter la perte totale de référence dite "White Out". J’en prends bonne note.

Nous choisissons alors un énorme bloc différent des autres, sans doute détaché d’un glacier groenlandais, et émergeant à plus de trois mètres au-dessus de la surface pour une cinquantaine de mètres de long. Après mon déneigement prudent, mon patin gauche touche le premier, jusque-là rien d’anormal sur un hélicoptère dont les pales tournent en sens anti-horaire. Tandis que je continue la descente, je ne parviens pas à poser le patin droit sans que le patin gauche ne dérape… La pente à droite est pourtant largement sous la limite des 8° autorisés mais le sol bien trop glissant m’en empêche. Je remets les gaz et nous remontons contacter Roland en passerelle.

Il nous rend compte que les scientifiques sont déjà prêts à être rapatriés. Ils avaient pourtant annoncé deux heures de travail et nous ne volons que depuis une heure. Après un rapide calcul de masse et de pétrole, nous pouvons en récupérer deux et un maximum de matériel. Harold introduit les coordonnées dans le GPS et nous mettons le cap vers eux. Nous survolons initialement le point sans les apercevoir puis nous tournons autour, chacun se partageant un secteur visuel et scrutant la banquise. Quel soulagement quand nous les détectons légèrement plus à l’est ! Ils ont en effet encore dérivé avec le courant dû au vent. J’atterris sur une glace bleutée très dense et déjà déneigée par les premières rotations. Harold descend et guide l’embarquement des glacières, des sacs de survie, du matériel de prélèvement puis du personnel tandis que je veille à ne pas glisser, en équilibre précaire sur cette savonnette digne d’un terrain de "curling".

Nous rentrons à bord, coupons les moteurs, déchargeons personnel et matériel et faisons le plein hâtivement, les cinq naufragés patientant à près de 80 km du navire, dans le silence le plus absolu, et supportant depuis plusieurs heures maintenant les -5°C à la surface de la glace.

Harold laisse place à Elena en place gauche et me confie la mission. Il me jette un dernier regard mêlé de confiance et d’anxiété, telle une mouette observerait le premier envol de son oisillon, puis file en passerelle me délivrer ma clairance. Sur le transit et afin d’en garder la preuve, j’immortalise le passage des 80°N en photographiant les coordonnées du GPS.



Nous récupérons nos cinq "glacionautes" après 20 minutes de vol et je mets immédiatement le chauffage en butée après le décollage. Ils m’en sont plus que reconnaissants. Quittant la banquise, je détecte le souffle d’une baleine que j’entoure lentement d’abord par la gauche puis par la droite afin de satisfaire mes premiers clients désireux de prendre quelques clichés. Harold m’annonce alors une autorisation toute spéciale d’apponter comme si nous étions un avion de ligne, avec nos 7 personnes à bord…

Heliservice International Cie, you are cleared to land, wind on the deck 12 o’clock - 20 knots, green deck".

Mission réussie !!!

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ÉTUDES SCIENTIFIQUES DE LA BANQUISE

By Magda Cardozo

The Fram Strait the major gateway between the Arctic and the Atlantic Ocean and is located in the Marginal Ice Zone. This means that during summer, Arctic sea ice travels southwards through the Strait. This makes the Fram Strait a rather unique area. However, our understanding of the Arctic Ocean is currently restricted to the summer season because active cruise work and sampling has largely only been possible during the summer months.

The physical and chemical characteristics of the Arctic sea ice have been studied extensively, yet, the knowledge of microbes in the ice and their interaction with the sea water community that surrounds them is still sparse. This year, we visited the ice in the Marginal Ice Zone, and we collected samples of ice to conduct an experiment on board to answer some of these questions.

Working group extracting 2-3 m ice cores. The ice cores are then cut and the lower 20 cm are used to run a on-board experiment.

Visiting the ice in the Arctic Ocean requires some preparation and depends largely on the weather conditions. On a calm weather day, we flew by helicopter and landed on an ice floe big enough to land and to set our base camp. We explored the conditions of the ice by extracting different ice cores from different areas until we decided on a suitable floe for ice sampling. We worked, and at the same time, we enjoyed every minute of it. Like any ice-covered region on earth, the sunlight that reflects off of the ice can be harmful, so we had to wear sunglasses and sunscreen lotion to protect from UV rays.

We observed the beauty of the white ice and the shades of blue frozen water ponds underneath. We could hear the sound of the cracking ice far in the distance, and this reminded us how in civilization, we are constantly surrounded by all sorts of anthropogenic noises that we forget the beauty of nature. The absence of sound is something I thought I would never experience so deeply. While sampling, we were constantly visited by Arctic birds that surveyed us from above to see what we were doing in their ecosystem. We said goodbye to the ice after three hours of hard work and headed back to RV Polarstern. During the flight back, we spotted a fin whale swimming beneath us in all its majesty, as if it was waving us goodbye.

Experiment set up. The ice melting is sample every few hours. Photo: Magda Cardozo 

Back on board of RV Polarstern, I performed an experiment in which I submitted the ice cores to melting in sea water at 1 -2 °C and collected samples every few hours until the ice was completely melted. These samples will be further analyzed back in Germany for bacterial DNA and other parameters that aim to address the connectivity between bacterial communities in sea ice and the surrounding water during ice melt. With every summer, we face new minimum ice records in the Arctic sea ice coverage due to climate change and ocean warming, and these samples are fundamental for us to understand what is occurring with the microbes in the Arctic sea ice, and how anthropogenic activities are affecting the Arctic ecosystem.

By Magda Cardozo, PhD student of Max Planck Institute for Marine Microbiology, Bremen.

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SAMEDI 07 SEPTEMBRE

Opération "Lavage des hélicoptères".

Nous sortons d’abord DHARK sur le pont et le nettoyons de fond en comble mieux que si on lavait notre propre voiture.

Au tour de DHAPS. Alors que nous franchissons le léger obstacle du passage de la porte du hangar, le chariot électrique casse. Nous le détachons et poussons l'hélicoptère à la main. Roland et Elena s’affairent sur le petit char blessé, la vis d’élévation étant cassée tandis qu’Harold et moi brossons notre monture. Heureusement, nous disposons de la pièce de rechange.

L’équipe des trois météorologues nous rejoint ensuite sur le pont pour la photo traditionnelle de fin de mission.

Roland, après cinq ans de navigation sur le Polarstern du pôle Nord au pôle Sud, tire sa révérence avec une certaine émotion et nous le félicitons chaleureusement.

Au revoir Roland ! 

18h30 : Harold nous réunit dans sa cabine pour un debriefing de la mission PS 121. Il est très satisfait de notre travail. Je lui reporte toute ma fierté et mon honneur d’en faire partie, le félicite d’avoir su y insuffler un fort esprit de cohésion et le remercie de la patience dont il a fait preuve envers moi et du temps qu’il a pu consacrer à ma formation. Notre petit groupe n’est plus seulement un « patchwork » de nationalités mais dorénavant presque une famille, parée à affronter les défis de notre prochaine mission. Il sort alors une bouteille d’Amarula de son frigo et nous trinquons solennellement comme pour marquer notre engagement et notre reconnaissance envers chacun.

Photos officielles de la "Dream Team".


Photos NON OFFICIELLES !!! 


DIMANCHE 08 AU MERCREDI 11 SEPTEMBRE

L’heure est aux comptes-rendus.

Sur le transit retour, les membres d’équipage rincent les extérieurs à grands jets d’eau douce, rembobinent et graissent les câbles des grues et treuils, trient les déchets, tandis que les scientifiques reconditionnent leurs équipements, nettoient leurs laboratoires, démontent leurs antennes et préparent leur départ.

Le commandant souhaite faire retirer le filet du pont d’envol car de multiples nouveaux matériels en container vont y être déposés lors de notre dernière escale avant le grand Nord. Nous le détendons puis le roulons sur l’avant de la plate-forme. Je nettoie les vitres et les plastiques de nos deux appareils tandis que Roland et Elena font les pleins d’huile et réinstallent la version de sièges d’origine. En effet, nous nous efforçons de laisser une situation parfaitement claire et irréprochable à notre équipage de relève.

Je leur prépare d’ailleurs un diaporama récapitulant les procédures que nous avons mises au point, détaillant le fonctionnement de nos nouveaux équipements, des commandes des phares au réservoir auxiliaire puis proposant une courbe simplifiée des conditions de masse et de vent nécessaires à un appontage en monomoteur. Un coup d’aspirateur sur la moquette de mon loft, puis je prépare mes valises.

Les scientifiques se rassemblent sur le pont supérieur afin de prendre l’ultime photo de groupe.

Devinez qui est le seul français sur cette photo ? Celui qui lève les bras ... 

Le soir venu, le Polarstern naviguant maintenant plus au sud, je me réjouis qu’il fasse enfin nuit après près d’un mois de jour, ou plutôt de rêve permanent.

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JEUDI 12 SEPTEMBRE

TRIATHLON

16H30 Rendez-vous en salle de sport pour le Triathlon le plus septentrional de la planète. Hélas, la piscine est vidée et l’épreuve de natation est remplacée par le rameur.

10 minutes de course, 10 minutes de vélo et 10 minutes de rameur. Je donne tout (7681 m) mais ne finis qu’à la 4ème place. Je porte réclamation car l’âge n’est pas pris en compte et seule la distance totale compte. J’obtiens tout de même un diplôme signé du commandant et de la chef scientifique… Elena sauve Héliservice en terminant médaille d’or féminine !

RESULTATS SPORTIFS 
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Dernier compte-rendu hebdomadaire de la chef scientifique :

This is the last weekly report for PS121, which describes our activities on board during a full week of research. The research activities have continued to go well, and there is already a feeling on board that the expedition is nearing the end.

Some working groups have already finished their planned work during the last two days and are working on the first preparations for the trip home. In the last week, we have continued our work for the continuation of the long-term observatory HAUSGARTEN at stations in the western and northern Fram Strait. These stations are covered by sea ice more often throughout the year, which has a significant influence on the ecological processes in these areas. The comparison of these stations with stations that are covered by ice for shorter periods of the year offers a glance at the significance of sea ice for the Arctic marine ecosystem. Similar to previously visited stations, moorings were exchanged, various lander systems were deployed and recovered, and the water column and the deep sea were sampled. During one of the best weather days, it was possible to fly a team of scientists with a helicopter from Polarstern to the ice, so that they could collect ice cores for microbiological experiments.

Fig. 1: A team of scientists left on an ice flow to collect Arctic Ocean sea ice samples. (Photo: Katja Metfies) 

Among the participants in PS121 is the PEBCAO group (Plankton Ecology and Biogeochemistry in a Changing Arctic Ocean), which has been a constant participant in the research program in the long-term observatory HAUSGARTEN. The group’s focus is investigations of plankton communities and microbial processes in the research area, which is influenced by rapid changes in the surrounding climate conditions.

It is expected that changes in the temperature and ice cover will lead to changes in the biodiversity, ecology, and biogeochemical cycles in the Arctic Ocean, which can only be detected by long-term observation programs. The investigations of the PEBCAO group are based on combined investigations of various parameters, which in sum contribute to understanding process and changes in the Arctic marine ecosystem. The chlorophyll concentration in the water is measured as an indicator of current photosynthetic biomass. In addition, the biodiversity of plankton is investigated using classical light microscopy and modern optical and molecular methods.

During the last 10 years, the PEBCAO group has collected complementary information regarding the annual variability in the plankton assemblage, primary production, and bacterial activity. The results show that the phytoplankton assemblage, the smallest organisms at the base of the food web, have changed in the summer months in the eastern Fram Strait during the investigation period.

During PS121, light profile measurements are being measured as part of a PEBCAO project. In addition to nutrients, light is one of the important limiting factors for biological growth in the ocean, especially for photo-synthetically active organisms like phytoplankton. Sediment and dissolved particles limit light penetration depth in the water. Exact knowledge of how the light color changes in the ocean is necessary to develop robust algorithms to build continuous global maps of the amount and assemblage of phytoplankton and associated by-products from satellite measurements at high temporal (daily) and spatial (300 m) resolution.

In addition, our light measurements must be validated, for which we also measure specific values such as the absorption and diffraction of seawater continually, along with all components of the pigment assemblage of phytoplankton from water samples at six different depths. This way, we receive continuous information along the ship’s route at the surface and for the whole water column at our stations about the abundance and assemblage of phytoplankton and by-products, which are very different in different regions of the Fram Strait. In addition to primary producers, which are at the base of the marine food web, assemblages of small animals, the zooplankton, are also studied in the long-term observatory HAUSGARTEN.

These investigations are part of a multi-year cooperation between the PEBCAO group and zoo-planktologists at the University of Bremen. In the Fram Strait, zooplankton species from the Arctic Ocean and the Atlantic mix. Animals with different origins are carried into the area by the opposing ocean currents, the polar East Greenland Current and the Atlantic West Spitsbergen Current. As an effect of global warming, which is strongly felt here in the Arctic, zooplankton species of southern, Atlantic origin advance every further and push back the native polar fauna. Biologists from the University of Bremen are investigating how the various zooplankton species react to increases in temperature.

For this purpose, amphipods just a few millimeters long to krill a few centimeters long are kept at various water temperatures in climate-controlled chambers on board, and their metabolisms are measured over multiple hours. The results will show at what temperature Atlantic “warm-water species” begin to have an advantage over their polar relatives and how the plankton community will change in species assemblage and biodiversity in the context of climate change. The mood and comradery on board have thus far been very good. The scientists have continued their presentation series with results from their own research in HAUSGARTEN during the past week, and there are always lively scientific discussions afterwards.

With warm greetings from all expedition participants,

Katja Metfies (Translation: Kirstin Meyer-Kaiser)

Pour les professeurs d'allemand, vous trouverez les textes dans votre langue sur ce lien.

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VENDREDI 13 SEPTEMBRE

ARRIVÉE A TROMSO (NORVÈGE)

A 5H du matin, je ressens les vibrations du propulseur d'étrave signalant que nous embarquons le pilote de port de Tromso à l'entrée du fjord norvégien : branle-bas ! Je sors et me délecte de ce décor somptueux.

WIKIPEDIA

Tromsø est une ville du Nord de la Norvège. Située dans le comté de Troms, au nord du cercle polaire arctique, elle a une superficie de 2 558 km2 et comptait 70 358 habitants au 1er janvier 2012, ce qui en fait la huitième ville du pays. Elle est surnommée « le Paris du Nord » (« Nordens Paris » en norvégien) et est la ville de plus de 50 000 habitants la plus septentrionale du monde.

Porte d'entrée du Svalbard, c'est le point de départ des expéditions polaires. Fondée officiellement en 1794, la ville serait bien plus ancienne avec des restes d'églises en bois debout remontant aux années 1250.

N'ayant jusqu'au milieu du XIXe siècle que 1 400 habitants, la ville connut une forte expansion à la fin du XIXe siècle lorsque les nombreuses expéditions vers les régions boréales s'intensifièrent pour la chasse aux phoques.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, elle servit brièvement de siège au gouvernement norvégien.

Nous ne sommes pas les premiers :

Norsel : l'ancêtre du Polarstern -  la 1ère expédition scientifique internationale en Antarticque en mars 1952 avec un hydravion.

Le soir, nous retrouvons notre équipage de relève et leur passons le flambeau. Ils ont appareillé le 20 septembre pour le début de l'expédition MOSAIC.

Mon nouveau programme me fera embarqué de novembre 2019 à avril 2020 dans la nuit permanente pendant près de 4 mois sur la banquise. Un défi mais une expérience unique.

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J'espère que ce blog a suscité votre intérêt et que mon projet pédagogique vers les écoles prend forme.

Pensée à mon défunt père, le Capitaine de Vaisseau Jean-Claude Drach... 

A bientôt pour la suite de l'Aventure Arctique...


Publié le 1er octobre 2019

Juste avant mon départ imminent et profitant de mon accès à internet, je vous ai concocté un petit résumé des forces magnétiques qui nous protègent des radiations solaires, régissent notre navigation et créent les aurores boréales.

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WIKIPEDIA

Le pôle Nord magnétique de la Terre est un point errant unique sur la surface où le champ magnétique terrestre pointe vers le bas. C'est-à-dire que le « Dip » (plongeon) est de 90°. L'aiguille d'une boussole pointe approximativement vers ce lieu (plus ou moins approximativement suivant le lieu où on se trouve ; exactement la boussole est tangente à la ligne de champ).

Il s'agit en fait du pôle sud de l'aimant constitué par la Terre. Induit par les déplacements du noyau ferreux de la Terre, ce pôle est en déplacement avec une vitesse accélérée (auparavant 10 km par an, mais depuis 2001, 55 km environ par an) : il a franchi en 2005 la côte canadienne et il se dirige vers la Russie. Certains spécialistes considèrent qu'il s'agit du début du phénomène d'inversion des pôles Nord et Sud.

Le pôle Nord magnétique ne doit pas être confondu avec le pôle Nord géographique.

C'est le Chinois Shen Kuo qui a découvert et rapporté ce concept de « vrai Nord » au XIe siècle.

Une détermination in situ de la position du pôle nord magnétique a été faite par une équipe franco-canadienne en avril 2007, au moyen de plusieurs mesures dans un rayon d’environ 100 km autour du pôle. La position obtenue est 83.95 N 120.72 W.

Depuis le début de la mesure précise de sa localisation jusque dans le milieu des années 1990, le pôle nord magnétique se déplace d'environ 15 km par an. À partir de cette époque, il se dirige du Canada (où il avait toujours été localisé depuis les premières mesures) vers la Sibérie à une vitesse de 55 km par an sans que cette évolution ne soit comprise par la communauté scientifique.


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Le pôle Nord magnétique perd la boussole.

LIEN LE MONDE

Le point de convergence des lignes du champ magnétique terrestre accélère sa dérive du Canada vers la Sibérie. Une course folle imprévisible et de plus en plus rapide.

Il y a du grabuge dans l’Arctique. Pas une énième querelle entre ours et phoques, mais une escapade vers l’est du pôle Nord magnétique, qui se dirige depuis le Canada vers la Sibérie. Imprévisible et de plus en plus rapide, sa course folle oblige les géologues à mettre à jour avec un an d’avance sur le calendrier prévu le Modèle magnétique mondial, échafaudage théorique sur lequel reposent les instruments de navigation modernes.

Evolution de la position du pôle nord magnétique depuis 1900. National Geophysical Data Center 
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Le pôle nord magnétique se déplace de façon étrange

LIEN LE FIGARO

Le champ magnétique de la Terre est produit par les mouvements de fer liquide dans le noyau. ESA/ATG medialab 

Le champ magnétique terrestre connaît des variations brutales qui peuvent perturber les instruments de navigation dans certaines régions et poussent les scientifiques à mettre à jour les cartes magnétiques globales.

Connu depuis 1831, le mouvement du pôle Nord magnétique n'a jamais été parfaitement régulier. Mais depuis le milieu des années 1990, il s'est tout de même accéléré dans des proportions inédites. De 15 km/an, le pôle se déplace depuis à une vitesse de 55 km/an.

Résultat: il a déjà parcouru autant de distance depuis l'an 2000 que pendant l'intégralité du 20e siècle. Ce qui pousse les spécialistes à adapter les modèles magnétiques intégrés dans les instruments de navigation avec un peu d'avance par rapport au calendrier prévu, révélait le site de Nature la semaine dernière. Le World Magnetic Model (WMM) fourni par la NOAA américaine et le British Geological Survey à l'administration américaine, à l'OTAN et à d'autres organisations internationales sera ainsi modifié dès le 30 janvier plutôt qu'en 2020.

Le pôle Nord magnétique sert en effet encore et toujours… à nous diriger sur Terre! Si les systèmes de positionnement par satellite (GPS américain, Galileo européen, Glonass russe ou Beidou chinois) nous donnent parfaitement notre position sur Terre, à quelques mètres près, ils ne donnent pas le cap, c'est-à-dire la direction dans laquelle nous sommes orientés. Pour cela, nous dépendons toujours des bonnes vieilles boussoles et autres compas magnétiques.

Un décalage trop important

Et les instruments les plus perfectionnés intègrent un modèle magnétique global qui donne la direction et l'intensité précise du champ magnétique en tout point du globe à un instant donné. En comparant l'indication de «l'aiguille» avec cette donnée, on peut déterminer correctement la direction réelle dans laquelle on est orientée à la surface de la Terre, mais aussi jusqu'à 1000 km d'altitude environ.

L'accélération du déplacement du pôle Nord magnétique en elle-même est bien connue. Mais elle se conjugue à un autre phénomène: des impulsions, appelées secousses géomagnétiques, qui donnent par endroits une sorte de «coup d'accélérateur» au champ magnétique. Il s'en est produit une en 2016 qui a conduit peu à peu le modèle à diverger par rapport aux mesures réalisées depuis l'espace.

«Les deux phénomènes s'additionnent d'une certaine façon, si bien que dans une zone autour du pôle Nord, cela donne lieu à des décalages trop importants entre le World Magnetic Model que nous élaborons et les observations», explique Arnaud Chulliat, géophysicien à l'université du Colorado à Boulder et à la NOAA américaine. Décision fut donc prise l'année dernière de mettre à jour le modèle et d'en «distribuer» une nouvelle version dès le 15 janvier. Le «shutdown» qui touche actuellement tous les services publics américains, dont la NOAA, a poussé l'administration à reporter au 30 janvier cette dissémination.

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INVERSION DES PÔLES ?

LIEN SPUTNIK

L'analyse de l'intensité d'aimantation des anciennes roches volcaniques a révélé que la dernière inversion des pôles de la Terre avait duré environ 22.000 ans, ce qui est largement supérieur aux estimations précédentes. Cela indique que notre planète restera sans bouclier magnétique pendant une période inhabituellement longue.

Les flux de lave constituent des enregistreurs parfaits conservant les traces de l'ancien champ magnétique. Ils contiennent une grande quantité de minéraux riches en fer où s'impriment pour toujours les propriétés du champ au fur et à mesure de leur refroidissement.

La position des pôles et l'indication de l'aiguille de la boussole ne sont pas permanentes pour notre planète. Environ une fois tous les 450.000 ans - 1 million d'années, les pôles Nord et Sud s'inversent, et des inversions temporaires de l'axe magnétique se produisent encore plus souvent. Les chercheurs retrouvent les traces de ces processus dans les argiles anciennes et dans les sédiments de roches volcaniques.

CC0 / Andrew-ArtLe champ magnétique terrestre agît étrangement, rendant les scientifiques dubitatifs

Par exemple, ils ont découvert récemment qu'après le dernier changement temporaire de l'axe, qui s'est produit il y a environ 40.000 ans, l'aiguille de la boussole indiquait pendant plusieurs milliers d'années le pôle Sud actuel. De plus, il y a environ 780.000 ans, les pôles étaient orientés en permanence dans ces directions, et par la suite leur position a brusquement changé.

Aujourd'hui, de nombreuses personnes et certains scientifiques supposent qu'un événement semblable devrait se produite à court terme à l'échelle géologique car la force du champ a diminué progressivement mais fortement au cours de ces derniers siècles, alors que les pôles magnétiques Nord et Sud se déplacent de plus en plus vite.

Cet événement arrivera effectivement assez rapidement, mais à l'échelle géologique et non humaine - d'ici quelques milliers ou dizaines de milliers d'années. De plus, l'inversion des pôles en soi ne sera pas instantanée, c'est pourquoi nos descendants auront du temps pour se préparer à cet événement et évaluer tous les risques éventuels.

Brad Singer et ses collègues ont analysé en détail les circonstances de la dernière inversion, en collectant et en étudiant les roches magmatiques rejetées par des volcans terrestres et sous-marins dans les différentes régions du monde il y a environ 800.000-770.000 ans.

CC0 / Andrew-ArtLa nouvelle cause d’une catastrophe planétaire annoncée

Les auteurs de l'article ont réglé ce problème en récoltant plusieurs centaines d'échantillons d'anciennes éruptions de magma pour les réunir dans un tableau commun du changement de la force, de l'orientation et de la structure du champ magnétique terrestre juste avant et après l'inversion des pôles. Pour cela, les scientifiques ont calculé leur âge en mesurant les parts d'isotopes d'argon et de béryllium, puis ont comparé leur aimantation mutuelle.

Ces roches ont montré que les anciens pôles avaient cessé d'exister il y a près de 785.000 ans. A cette époque, dans les profondeurs de la Terre il n'existait pas deux mais une multitude de faibles foyers d'activité magnétique qui faisaient leur apparition et disparaissaient tous les quelques milliers d'années. La situation s'est normalisée seulement il y a environ 22.000 ans, quand les pôles ont définitivement changé de place et ont pris leur forme actuelle.

Ces chiffres, indique Brad Singer, sont deux fois plus élevés que lors des précédentes tentatives mesurer la durée de cette période d'«interrègne». D'une part, cela indique que la faune et la flore de la planète seront soumises à l'effet du rayonnement cosmique bien plus longtemps que ne le supposaient les chercheurs. De l'autre, une telle lenteur des pôles indique que l'inversion de l'axe magnétique de la planète ne se produira pas rapidement, en quelques dizaines ou centaines d'années, comme le craignaient certains géologues. Cela laissera à l'humanité plus de temps pour s'adapter à un tel «changement de coordonnées» et évaluer toutes les conséquences de ces changements, conclut le géologue.

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POURQUOI LE NORD BOUGE ?

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HUBERT REEVES

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CYCLES DE MILANKOVITCH

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LA CARTOGRAPHIE

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ARTE

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EURONEWS

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BONUS

Pour l'instant, le Polarstern arrive à communiquer et avec de belles photos.

Appontage sur le brise-glace russe Federov - derrière D-HARK, l'hélicoptère russe mythique MIL-MI -8.

On peut même télécharger l'application de suivi de l'expédition avec la position, la température et les comptes-rendus sur son téléphone !

https://follow.mosaic-expedition.org/blog/mosaic_29-09-19/?lang=en

Publié le 19 octobre 2019

Tout d’abord, je tiens à remercier M. Eric Boeuf (ci-dessus), président de la Société des Membres de la Légion d’honneur, ayant porté mon projet bien plus loin que je ne pouvais l’imaginer avec l’appui indispensable de M. Emmanuel Bourel, directeur d’académie, Mme Lydie Chagnot, conseiller technique en charge de l'éducation au développement durable, et M. Rémy Haydont, inspecteur d’académie.

Emmanuel Bourel puis de gauche à droite : Rémy Haydont, Lydie Chagnot, Christelle Georgel et Audrey Drach mon épouse  

J’ai été surpris par l’accueil plus que chaleureux que m’ont réservé les proviseurs ou chefs d’établissement scolaire ainsi que celui des professeurs impliqués.

Ensuite, l’intérêt manifesté par les élèves, aussi bien du CE1 que des lycées, lors de mes premières interventions dans les classes, m’a tout à fait conforté sur le bien-fondé de notre action.

Mon idée est multiple : me tourner activement vers les jeunes, par le biais de la SMLH et de ses valeurs, les sensibiliser au réchauffement climatique, sujet au cœur de l’actualité, leur transmettre ma passion de l’hélicoptère et de l’aventure, ouvrir leur esprit sur le monde, et pourquoi pas créer des vocations vers la Marine Nationale ou la science.

C’est donc parfaitement rassurés et avec un plaisir non dissimulé qu'Eric Boeuf et moi-même avons arpenté 13 établissements scolaires cette semaine, soit un premier contact avec pas moins de 400 élèves.

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Les établissements :

Lycée Claude Gellée Epinal – Proviseure Mme Georgel

Lycée Malraux Remiremont – Proviseur M. Carlier

Collège H. Curien Cornimont – Principale Mme Chrétien

Collège L. Armand Golbey – Principal M. Grunenwald

Collège G. Apollinaire Le Tholy – Principale Mme Boucher

Collège Le Tertre Remiremont – Principal M. Charousset

Collège Jean Montemont Rupt/Moselle – Principale Mme Thiery

Collège Fleurot d’Herival Val d’Ajol – Principal M. Sage

Xertigny – classe de Mme Colombain Isabelle et de M. Bertocchi Franck, CM1

Golbey élémentaire centre – classes de Mme Philippe Françoise et de Mme Villemin Inès, CM1/CM2

Golbey élémentaire Beaulieu – classe de M. Ambroise, CE2/CM1

Cornimont Champs à Nabord – classe de Mme Daval Julie, CM2

Cornimont Centre – classe de M. Bailly Denis et de Mme Lyard Mélodie, CM1/CM2

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Interview DES ÉLÈVES du collège du Tertre

Êtes-vous déjà allé aux pôles avant ? Tom

Non, jamais. J’ai pu voler cet été au-delà du 80ème parallèle nord à l’est du Groenland lors de ma première expédition à bord du Polarstern.

Est-ce que ce n’est pas trop dur de se séparer de sa famille pendant plusieurs mois ? Robin

Mon épouse, mes enfants et moi-même avons toujours eu ce rythme d’absence après plus de 20 ans dans la marine nationale mais bien sûr que le départ fait toujours un pincement au cœur. Les retrouvailles sont aussi d’autant plus belles…

Qu’est-ce qui vous a motivé pour partir ? Alexis Est-ce que c’est un rêve d’enfant ? Lola

C’est avant tout un rêve d’aventure. A votre âge, je regardais, émerveillé, les reportages de Cousteau avec ses vols en hélicoptère depuis son bateau : « La Calypso ». Plus tard, les émissions de Nicolas Hulot m’ont passionnées. Oui, c’est donc littéralement un rêve de gosse qui se réalise à 45 ans.

Parlez-vous plusieurs langues ? Philomène

Hélas, je ne parle que laborieusement l’anglais et je vous encourage à le travailler dès maintenant pour vous ouvrir sur le monde. L’allemand aussi d’ailleurs.

Quel est l’événement le plus merveilleux que vous ayez vécu jusqu’à présent ? Morgane

Cercler au-dessus d’une baleine de plus de 20 m fut un moment d’émerveillement.

Quel est l’événement le plus dangereux que vous avez vécu jusqu’à présent ? Paul

J’espère ne pas t’en raconter bientôt Paul !

Est-ce que les scientifiques étudient les animaux ? Eliana Quels animaux avez-vous vus ? Lola

Ils étudient plutôt le plancton et les microbes mais sans doute s’intéresseront-ils à toute espèce détectée sur la banquise ou sous l’eau. J’ai pu admirer des ours polaires, des phoques annelés, des macareux moines, des baleines à bosses et des bancs de dauphins du Groenland.

Est-ce que les scientifiques déposés sur la banquise ont déjà été attaqués par des ours ? Ambre

Pas à ma connaissance mais des attaques mortelles sont recensées en Alaska.

Quelle est la t° minimale que vous avez affrontée ? Christian

-5° lors de ma mission estivale mais je dois m’attendre à -45° ou même -60°C lors de l’hiver arctique.

Avez-vous déjà vu des aurores boréales ? Lou

Pas encore mais j’espère en profiter bientôt.

Sur quels critères vous basez-vous pour savoir si vous pouvez vous poser sur la glace ?

Comment savoir si elle est assez solide ? Sherine

Très bonne question Sherine : sa couleur (bleue c’est mieux car plus vieux), sa surface légèrement en relief indique aussi son âge, son épaisseur peut parfois être estimée visuellement sur ses bords quand une plaque est isolée, l’absence de craquelure doit être vérifiée et après l’atterrissage en douceur, vérifier que les patins ne s’enfoncent pas.

Quels sont les principaux dangers en Arctique en tant que pilote ? et pour les scientifiques ? et pour la navigation ? Ambre

Dangers du pilote : la nébulosité (nuages), le niveau de nuit, le givrage, le phénomène de « White Out », et la réaction à adapter en cas de panne car la banquise n’est pas très hospitalière. Pour la navigation, nous avons deux écrans tactiles GPS et un radar permettant de détecter le Polarstern même à 50 km.

Pour les scientifiques : le froid (vêtements, gants), l’ours (veille et fusil), la survie sur la banquise si nous ne pouvons pas les récupérer (sacs de survie, eau, nourriture, lance-leurres).

Est-ce que c’est vous qui rangez l’hélicoptère dans le hangar ? Est-ce que les manœuvres sont difficiles ? Edgar

Toujours, seuls les russes laissent leur hélicoptère dehors. C’est assez long, fastidieux et sera plus difficile avec le pont gelé et les températures extérieures très froides. Il nous faut la plus grande prudence car les deux hélicoptères nécessitent un placement au centimètre près dans le hangar.

Est-ce que les conditions de traversée ne sont pas trop dures, pas trop longues (tempête ?) ? Elfy. Avez-vous déjà été malade ? Elyna

Harold et Elena ont raté pas mal de repas et de conférences en raison des conditions de mer et de vent rencontrées : 20° de roulis et 5° de tangage ne sont jamais agréables et fatiguent. Au moins, il n’y aura plus ce problème sur la banquise !!!

Est-ce que la nourriture est bonne sur le bateau ? Leona

J’espère que le chef cuisinier sera français mais oui, on y mange bien. Mon problème est le temps consacré à chaque repas : 15 minutes !!! Celui du soir est aussi très tôt : 17h15 … L’heure du gouter…

Est-ce que le bateau est confortable ? Erwan

C’est un bateau de croisière pour un ancien militaire comme moi. Heureusement car ma mission sera longue !

Comment vous habillez-vous face aux conditions climatiques ? Alizée

L’institut nous fournit des vêtements et sous-vêtements chauds adaptés à cet environnement hostile.

Avez-vous des amis sur le bateau ? Kévin

Bien sûr et heureusement !!! En novembre, l’équipage sera nouveau pour moi. En février, je retrouverai ceux que j’ai connu cet été.

Est-ce que l’eau douce gèle sur le bateau ? Samira

C’est très exactement le sujet sensible de l’expédition. Il faut la chauffer certes mais surtout la produire avec de l’eau de mer. Elle est même plus vitale et importante que le gazole qui va permettre de fournir l’électricité et le chauffage à bord.

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Merci Manon, Leny, Lucas et Arthur pour vos beaux dessins :

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Éducation au Développement Durable dans les Vosges

http://www4.ac-nancy-metz.fr/eedd88/une-experience-unique-vecue-par-procuration/

Ici vous trouverez des kits pédagogiques ou des activités de classe suggérées :

http://www4.ac-nancy-metz.fr/eedd88/des-activites-de-classe/

Kit pédagogique

Étudier le changement climatique en classe

Site incontournable

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BONUS

Pour les parents ou professeurs 
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POUR LES PLUS JEUNES 
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"Timelaps" de l'écoulement du glacier de l'Argentière sur le site de Luc Moreau, glaciologue

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Articles de VOSGES MATIN :

https://www.vosgesmatin.fr/edition-de-remiremont/2019/10/19/les-collegiens-vont-suivre-une-expedition-en-arctique

https://www.vosgesmatin.fr/edition-d-epinal/2019/10/17/les-collegiens-aux-premieres-loges-du-projet-environnemental-mosaic

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Le blog de Mike Horn :

Actuellement relevant encore un défi à pied vers le pôle Nord

https://www.mikehorn.com/northpolecrossing/

Publié le 6 novembre 2019

JEUDI 24 OCTOBRE

Me voilà à Bremerhaven afin d'être formé aux règles de sécurité et de protection contre l'ours polaire. Pendant le trajet routier, je découvre avec bonheur, Victor, 26 ans, technicien d'hélicoptère espagnol qui sera mon nouvel assistant de vol de novembre 2019 à février 2020. Nous arrivons dans la salle de briefing où 15 scientifiques de diverses nationalités (chinoise, turque, suisse...) sont déjà installés.

La matinée est consacrée à la théorie. J'apprends que non, tous les ours n'hibernent pas, seules les ourses ayant de jeunes petits "hivernent". Tous les autres chassent, même en hiver... Ils parcourent en moyenne 100 km par jour, nagent autant qu'ils marchent, sont capables de tenir 2 minutes sous l'eau, ont une vue aussi développée que la notre mais un odorat et une ouïe bien supérieurs.

http://www.ursides.com/Hibernation_ou_hivernation.html

https://www.hurtigruten.fr/destinations/spitzberg/inspiration/faune/ours-polaire/14-infos-que-vous-ignoriez-sur-l-ours-polaire/

Autour du Polarstern, un dispositif électrique cercle le navire sur un rayon de 700 m. Chaque 20 m, tout contact avec cette clôture déclenche une fusée éclairante indiquant alors aux veilleurs l'endroit de la menace comme dans le film "Jurassic Parc"! Au-delà de cette frontière, "le mur" dans Game of Thrones, il est obligatoire d'être protégé par un garde professionnel armé et équipé de jumelles de vision nocturne et d'un dispositif infra-rouge. Chaque scientifique et nous-mêmes devrons être en mesure de l'épauler (c'est le cas de le dire) en utilisant d'abord le pistolet lance-fusée pour faire fuir un ours trop curieux, et, en dernier lieu, si la menace devenait indiscutable, manier l'arme et l'abattre ...

L'après-midi nous nous rendons sur un champ de tir militaire allemand afin d'être capable de charger l'arme en sécurité puis d'atteindre un ours à 30 m, limite à laquelle il devient trop dangereux pour l'homme puisqu'il est capable de charger à 45 km/h, soit la vitesse d'une lionne attaquant sa proie. L'arme est une carabine à verrou "SAKO" munie d'un chargeur à 5 munitions de calibre 7.62. Camp militaire oblige, les photos sont interdites.

Tirs debout, tirs un genou à terre, tirs après un sprint, tir avec le pistolet lance-fusée, examen théorique écrit et enfin tirs de nuit clôturent cette journée détonante.

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VENDREDI 25 OCTOBRE

Retour à Emden où la compagnie Heliservice a organisé un "October Fest". Presque tous les invités arrivent en tenue traditionnelle (pantalon court et bretelles, chaussettes hautes et chemises à carreau). Le choix de la musique, la plus ringarde qui soit, est aussi très précis, pas question de dévier du thème... Je retrouve joyeusement Elena et nous savourons notre bière et Bretzel en chantant donc "Ho i Yo i Yo i Yo i Yoooooh" ...

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LUNDI 28 OCTOBRE

Je vole avec Xavier, l'instructeur français, afin de m'entraîner de nuit. Après quelques tours de piste de reprise en main, nous nous dirigeons vers la mer pour se rapprocher de mon futur environnement, sombre et plat. Afin de simuler l'approche sur un camp de base arctique, il me désigne une bouée en mer. Nous en faisons la verticale, la pointant au GPS, puis mettons en place notre approche standardisée. Pas si simple par cette nuit noire. L'ergonomie pour diriger nos deux phares orientables est aussi loin d'être optimale.

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MARDI 29 OCTOBRE

On prend les mêmes et on recommence.

2h d'entraînement de nuit dédié à la recherche de camps simulés à l'aide de nos phares puis à la présentation pour l'atterrissage. La nuit est noire et il s'agit d'être particulièrement méthodique. La difficulté actuelle des pilotes du Polarstern est de repérer les camps. Les batteries des lampes ne résistant pas aux - 30°C, ils ont d'abord enrubanné les piquets avec un revêtement fluorescent afin de faciliter leur découverte dans le faisceau de nos phares. Solution hélas vaine car la glace finit par les recouvrir totalement. Maintenant ils utilisent des fanions qui sont moins affectés par le gel grâce au vent. Les positions GPS de ces spots mouvants sont retransmises automatiquement vers la passerelle mais avec un retard de 20 minutes.

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MERCREDI 30 OCTOBRE

Je repasse aujourd'hui mon test de qualification semestrielle sur le BK117. Le vol prévu est une succession d'exercices de panne d'un des moteurs, au décollage et à l'atterrissage, sur une piste en herbe ou une aire ponctuelle. Xavier me déclenche aussi un voyant "feu moteur", un blocage des palonniers et pour finir une autorotation simulée : procédure de descente très rapide et d'atterrissage à restituer en cas de perte des deux moteurs. Il a l'air content.

Un ravitaillement et nous voilà repartis pour encore 2h de vol de nuit : "entraînement difficile, guerre facile" dit-on dans la marine...

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JEUDI 31 OCTOBRE

Notre vol d'entraînement au transport de charges est annulé en raison de plaintes du voisinage de l'aéroport en ce jour férié en Allemagne. Xavier décide alors un vol du nouvel équipage à constituer, Victor et moi. Le temps est radieux et le courant passe très bien entre nous deux. Normal, deux tempéraments méditerranéens même si nous longeons la côte de la mer du Nord...


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VENDREDI 01 NOVEMBRE

Cette fois, nous partons à Husum, un terrain à 45 minutes de vol au nord-est d'Emden où les nuisances sonores sont encore acceptées. Là-bas, nous effectuons deux heures de vol de transport de charge avec 20 m d'élingue me permettant d'être qualifié à ce genre d'opérations, finement guidé par Victor, l'assistant de vol. Le retour s'effectue de nuit avec une météo plus allemande...

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SAMEDI 02 NOVEMBRE

Ce soir, je vole avec Victor en équipage constitué.

Notre entraînement se rapproche au plus près de nos futures missions en adoptant une phraséologie bien spécifique. Décollage type Polarstern depuis l'aéroport, transit vers le "camp de scientifique", la fameuse bouée, recherche au phare, désignation au GPS, mise en place de notre approche pour atterrissage, jusqu'au vol stationnaire à 50 ft (15 m). L'important est de bien se répartir les tâches par cette nuit encore bien noire. Victor me chante les hauteurs radio-sondes, ma vitesse par rapport au sol et l'azimut/distance de la cible en courte finale jusqu'à ce que j'en prenne le visuel dans les faisceaux de nos phares. Un vrai travail d'équipe.

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DIMANCHE 03, LUNDI 04 ET MARDI 05 NOVEMBRE

Voyage vers Toulon où je dois passer mon ultime examen médical de pilote au CEMPN (Centre d'Expertise Médicale du Personnel Naviguant).

Il y fait bon : 18°C mais avec un mistral à décorner les bœufs (petit clin d’œil à mon président, Eric Boeuf)...

Le lundi matin, j'ai droit à un contrôle complet : urine, sang, électrocardiogramme, poids, yeux, oreilles, médecin. Je suis déclaré valide au contrôle technique et sans contre-visite !

Après cette semaine et demie bien rythmée, me voilà dorénavant totalement apte à embarquer sur le Polarstern...

Mardi, c'est le retour au Tholy avant mon grand départ le 22 novembre vers Tromsoe.

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Quelques liens :

1/ Un bateau pneumatique russe attaqué et coulé dans l’Arctique par… un morse

Craignant pour ses petits, la femelle s’en est prise à un bateau pneumatique qui débarquait un groupe de scientifiques et de militaires sur une île.

2/ Ne pas laisser de la nourriture dans son hélicoptère : un ours détruit un avion !

https://www.buzznick.com/bear-shreds-plane-pilot-fixes-with-duct-tape/

3/ Impacts sur les refuges de montagne :

https://france3-regions.francetvinfo.fr/auvergne-rhone-alpes/alpes-rechauffement-climatique-met-148-infrastructures-montagne-peril-1733583.html

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AU GRÉ DU VENT

Avec un sens aigu de l'hospitalité, Lydia et Yves FESSLER vont vous faire découvrir le massif Vosgien (88) avec vue sur l'Alsace. C'est à bord de leurs Montgolfières, que leur expérience aéronautique incontestable vous permettra de réaliser votre rêve. Vous deviendrez des complices privilégiés d'un tourisme haut de gamme basé sur la contemplation et l'émotion.

http://www.au-gre-du-vent.fr/

Mais aussi, un projet éducatif et social :

https://www.okpal.com/montgolfiere/#/

Yves Fessler : "Éducateur technique au sein d’une institution Vosgienne, j’accompagne des jeunes en difficultés ou en rupture sociale qui deviendront les citoyens de demain. Nous faisons un bout de chemin ensemble que j’appelle : Promenade. Cette promenade peut être aussi aérienne : A bord d’une montgolfière ! L'aéronef devient alors un instrument de relation sociale qui assagit souvent le plus rebelle. C’est une véritable intervention éducative."

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Pendant ce temps-là, sur le Polarstern au 86N et 118E par -25°C, sous la glace : 4200 m de fond !

https://follow.mosaic-expedition.org/blog/mosaic_29-09-19/?lang=en

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Publié le 29 novembre 2019

 TROMSO, NORD NORVÈGE

VENDREDI 22 AU MARDI 26 NOVEMBRE

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Arrivé à Tromso le 23 novembre via Mulhouse et Frankfurt, je retrouve joyeusement toute ma nouvelle équipe hélicoptère (de gauche à droite):

- Lukas, ex-pilote de l’armée de terre allemande, 44 ans ;

- Jörn, technicien allemand, 30 ans ;

- Victor, technicien espagnol, 26 ans.


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Nous avons droit à une multitude de conférences sur deux jours (comportement de l’Ours, moyens de communication, de localisation, d’urgence, équipements de survie, brassières, tentes, stockage et enregistrement des données scientifiques), jusqu’à une baignade dans le port dans une eau à 8°C, pour ma part de nuit, à 15h00, sous la neige… GGRrrrrrrrrr !!!

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AVANT-GOÛT

Afin de pousser l'entraînement jusqu'au plus extrême réalisme, nous tentons de survivre dans un bar de glace conservé à -5°C. L'équipe internationale en sort indemne et la cohésion n'en est que renforcée !!! Puis nous trouvons presque le Polarstern à quai : "le Polarstar" ! Il s'agit de ne pas se tromper de navire...

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MERCREDI 27 NOVEMBRE


Le 27, nous embarquons sur le brise-glace russe « Kapitan Dranitsyn » qui doit nous conduire jusqu’au Polarstern actuellement au 86°N, aux environs de la mi-décembre en fonction des conditions météorologiques et de l'épaisseur de la banquise. Nous sommes 93 scientifiques ou membres d’équipage de relève.

J'ai un pincement au cœur en savourant mes derniers pas sur le quai, dernière terre ferme avant de longs mois en mer, fusse-t-elle gelée.

J'ai le droit à une cabine individuelle au confort tout à fait satisfaisant.

Découverte de ma cabine 


Time to go !!! 

La passerelle, même si elle se mérite, offre une vue imprenable :

Le navire appareille vers 18h et jette l’ancre à l’abri des vents au nord de Tromso. Il faut amarrer et sécuriser les derniers chargements disposés sur le pont d’envol gelé avant d’affronter la pleine mer.

Hélas une tempête sévit plus au nord et le commandant décide de rester au mouillage ce week-end afin de l’éviter.

Afin de respecter le rythme de travail sur ce navire, nous passons tous à l'heure de Moscou, France +2h. La pendule vient sans doute d'un sous-marin. Après "Octobre Rouge", Novembre Blanc...

Très peu de membres d'équipage russes parlent anglais et tous sont très occupés par leurs derniers préparatifs tandis que nous trouvons le temps long. Heureusement un exercice d'évacuation égaye notre journée.

On nous explique qu'il est interdit de circuler sur les extérieurs de nuit. En cette période de l'année, la sortie hebdomadaire doit donc être aussi courte que celle de véritables prisonniers !!!

Dimanche la salle de sport est ouverte : je gagne au Ping Pong contre Victor puis Jörn !!!

L'après-midi, un briefing nous tient au courant qu'il y a une fenêtre météorologique favorable mardi pour débuter notre transit. Puis l'équipe "ICE", composée de 13 scientifiques nous présente les travaux prévus lors de notre mission : un véritable réseau de capteurs est déjà installé, de l'étude microscopique des cristaux au carottage jusqu'à 15 km du Polarstern. Il est certain qu'ils auront grand besoin de l'hélicoptère pour entretenir ce réseau mais il semble qu'il y ait des contraintes sur le Kérosène, peut-être liées au besoin futur de ravitailler les avions. La création d'une piste d'atterrissage n'est pour le moment pas possible en raison des mouvements permanents des plaques et de la fragilité de la banquise...

Au mouillage près de la côte, je profite encore de la connexion internet de mon téléphone... Une fois en route, seul Whatsapp fonctionnera mais sans photo.

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DIMANCHE 8 DÉCEMBRE

N82 - E100

Ice Radar et Table à carte en passerelle 

Nous naviguons dans la banquise à une vitesse plus faible maintenant. Le Dranitsyn est même souvent contraint de faire marche arrière afin de retenter de percer la glace. Le bruit de frottement des plaques le long de la coque est peu rassurant et les sursauts du navire sont très similaires à un voyage en train.

Hier, nous avons pu visiter la salle des machines : 6 énormes moteurs, des pompes de transfert de ballast peuvent être utilisées aussi bien en roulis qu'en tangage afin de se dégager de la glace si nous y étions bloqués. Plus étonnant encore, un système de jets d'air comprimé disposé tout autour de la coque peut briser la banquise. Impressionnant de simplicité et d'efficacité russe.

Chaque jour, une équipe de scientifiques nous présente, en salle de cinéma, ses travaux, ses moyens et ses besoins.

Ils ont beau tenter de vulgariser leurs explications, je me rends compte à quel point leurs études sont pointues.


Ce soir, je participe au tournoi international de ping-pong le plus nord de la planète. Sur 3 matchs, je perds contre Vishnu, un indou venant du Canada et jouant comme un chinois...

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LUNDI 9 DÉCEMBRE

N84 E110

Aujourd'hui, exercices en extérieur afin d'utiliser nos moyens radios, téléphone et GPS : pas facile avec de gros gants et avec -27 degrés, il est utile de ne pas les ôter trop longtemps. Couverts de la tête aux pieds, nos vêtements sont efficaces.

Après midi: séance de sport : un Triathlon. 16 km de vélo, 5 de course et quelques longueurs dans la piscine d'eau de mer heureusement bien chauffée.

16h30 : meeting au cinéma

Nous devrions atteindre le Polarstern dans 1 à 3 jours suivant nos capacités à briser la banquise. L'idée retenue est de se placer "bord à bord" afin de le ravitailler en gazole et d'utiliser les grues pour transférer le matériel.

Nous assistons ensuite à un exposé sur l'ours polaire. Le mâle possède une plus petite queue, plus de longs poils sur ses pattes, un front plus marqué et est muni d'un long poil pubien afin d'éviter que son urine ne gèle. C'est intéressant mais je doute que nous ayons un tel discernement de nuit... Un mâle maigre ou une femelle derrière ses petits représentent les plus grandes menaces en théorie.

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MERCREDI 11 DÉCEMBRE

"mission to Mars"

N86 - E120

-30 degrés, -45 ressentis avec l'effet du vent.

Un des hélicoptères du Polarstern nous a déposé l'officier navigation. Il sera en charge de nous guider sur les derniers nautiques vers notre bateau afin de ne pas détruire tout le réseau de camps scientifiques disposé tout autour. L'objectif est d'être en portée de grue. Le Dranitsyn peine maintenant à franchir les 2m de banquise et louvoie sans arrêt pour gagner du terrain.

Sur le pont d'envol, les équipes russes ont retiré la neige et tendu un filet antidérapant. Avec la pleine lune et une pureté de l'air unique, nous apercevons le phare du mât du Polarstern distant de 50 nautiques - 90 km.

L'hélicoptère coupe ses turbines et nous embrassons chaleureusement nos coéquipiers d'Heliservice.

Dieu qu'il fait froid !!!

Demain, le grand jour, le début des opérations de relève qui dureront 5 à 7 jours.

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VENDREDI 13 DÉCEMBRE

N86 36 E119 28

Je monte en passerelle. Le Dranitsyn est en approche sur l'arrière bâbord du Polarstern. On croirait la finale d'Apollo sur la station MIRE. Seuls le commandant et son barreur sont à la manœuvre. On avance puis recule car l'épaisseur de la banquise avoisine les deux mètres. A 500 m sur le travers tribord, on aperçoit une tente igloo orange illuminée de l'intérieur, telle une capsule ayant alunie. Une fois en portée de grue, à moins de 10 m, le commandant coupe les moteurs : nous y sommes enfin...

Tandis que l'équipage russe installe la coupée (échelle permettant de descendre sur la banquise) et prépare la manche de ravitaillement en gazole, j'effectue mon premier transfert dans une nacelle de fer, suspendue à la grue avant du Dranitsyn. Me voilà à bord de ma future maison pour quelques mois. Je retrouve l'équipe hélicoptère quittante et nous échangeons sur notre travail à bord autour d'un café. Le retour s'effectue à pied, sous la protection armée d'un veilleur d'ours et suivant un tracé sécurisé balisé par des drapeaux verts. C'est la première fois que je passe d'un bateau à l'autre en pleine mer sans zodiac ...

Le Polarstern est éclairé de 1000 feux, scrutant la banquise. Un laser vert sort verticalement d'un de ses containers de la plage avant, à peine perturbé par les larges fumées blanches émanant de sa cheminée. Nous, l'équipage de relève, devons encore prendre nos repas et dormir sur le navire russe.


Le Polarstern et le Dranitsyn 
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BONUS

Article du New-York Times

https://www.nytimes.com/2019/11/22/climate/arctic-mosaic-polar-bears.html

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Publié le 17 décembre 2019

LUNDI 16 DÉCEMBRE

N86 36 E114 58

C'est l'heure de transférer les deux équipages. Nous organisons une chaîne humaine afin d'évacuer nos bagages vers la grue avant du Dranitsyn puis nous franchissons une dernière fois sa coupée afin de rejoindre notre vaisseau mère à pied.



Chacun s'affaire à prendre possession de sa cabine en essayant d'y caler ses innombrables combinaisons. J'y installe fièrement mon drapeau tricolore, le fanion du football club du Tholy et l'insigne de la SMLH. Je place ensuite au frigidaire le foie gras qui servira de cadeau de Noël, le chocolat et le pain d'épices à la mirabelle offerts par le collège de mon village juste avant mon départ. Quelle belle attention !!!

Sur le bureau, je coche déjà les jours passés : 24. Il en reste environ 120... Je change mon fond d'écran d'ordinateur avec une photo de famille.

Nous déjeunons en moins de quinze minutes puis le commandant nous souhaite la bienvenue en salle de cinéma avant un exercice d'évacuation obligatoire.


Le chef scientifique nous présente la dernière mise à jour de la carte de "Mosaic City". Sur la glace sont éparpillés une multitude de camps scientifiques qui dérivent chacun aléatoirement mais qu'heureusement, une balise GPS nous permet de retrouver.

"Met City" est la station météo, "Océan City" permet d'immerger toute sorte de capteurs, "Atmos City" sert à déployer Miss Piggy, un dirigeable orange volant jusqu'à 1500m retenu par un filin, "ROV City" est la tente de mise à l'eau du robot aquatique...

Presque chaque City est accessible par motoneige sur des sentiers balisés par des drapeaux verts. Un drapeau rouge signale un danger. En périphérie de trouvent d'autres sites d'exploration, uniquement accessibles par hélicoptère car maintenant trop éloignés ou séparés par une cassure de la banquise. Ils disposent d'une aire d'atterrissage de 20 m par 20 m constituée de piquets de bois surmontés de fanions et d'un feu d'éclairage que nous pouvons déclencher en vol. On nous y garantit 1 m d'épaisseur de glace. En- dessous, 4400 m de fond !

" Met City "  & " Océan City " 

Une fois par semaine, nous devons nous poser sur ces sites afin d'y prélever les données et changer les batteries de la lampe salvatrice.

Le pôle Nord géographique se situe à 200 nautiques (360 km), soit 1h40 de vol et nous dérivons vers lui à environ 1 km/h. Théoriquement, nous devrions être au plus proche vers la mi-mars.

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MARDI 17 DÉCEMBRE

N86 40 - E113 46

20h00 : puisque c'est le dernier soir en compagnie de notre ravitailleur russe, un match de foot est organisé sur la banquise.

Lutz, un chef de quart allemand du Polarstern installe les poteaux, muni d'une perceuse et vêtu de son maillot de l'équipe de Rostock tandis qu'un drone et une équipe télé se préparent à filmer la rencontre multinationale : russe, espagnol, canadien, australien, italien, américain ...

Coup d'envoi devant une quarantaine de personnes amassées autour du vin chaud près de la coupée.


Je marque dès les premières minutes... Mais hélas contre mon camp ! Afin de calmer les railleries, je rappelle que c'est la France qui est championne du Monde !

Il fait -20 degrés mais je suis si chaudement habillé que je deviens rapidement trempé. Avec nos "Moonboots", chacun d'entre nous a décidément le pied carré mais peu importe, c'est plutôt équilibré et les tacles glissés sont du meilleur effet.

Victor, mon assistant de vol, installé dans les cages, sauve notre équipe in extremis d'une majestueuse parade du bout du poing.


Après 30 minutes, la barbe blanchie et le souffle coupé, je cède ma place et rejoins la foule. J'y retrouve Carsten, le chef pilote quittant. J'ai glissé une bouteille de Rhum dans mon sac à casque et nous dégustons ce breuvage gelé en nous souhaitant mutuellement bon voyage.

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MERCREDI 18 DECEMBRE

N86 40 - E113 01

14h30 : le Dranitsyn repart à Tromso en marche arrière afin de ne pas abîmer "notre nouveau jardin". Le chef de quart du Polarstern lance la musique de "Back to USSR" sur les hauts-parleurs extérieurs et l'équipage précédent, maintenant rassemblé sur la plage avant du Dranitsyn improvise une "Ola".




J'agite mon drapeau français en guise d'au revoir car il devra revenir en février avec une nouvelle équipe.Sans doute aura-t-il alors plus de difficultés à nous rejoindre en cette période en raison de l'épaisseur de la glace et de notre future position plus à l'ouest : noria d'hélicoptères en perspective ? Nous verrons ...

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JEUDI 19 DECEMBRE

N86 41 - E113 00


Une diffusion sonore intérieure nous prévient de la présence d'un renard polaire à proximité : je cours en passerelle. Il est là, blanc immaculé et en pleine santé, reniflant la banquise sur le terrain de foot, puis il trottine autour de la proue, suivi de près par la caméra du veilleur d'ours.



Que peut-il bien trouver comme nourriture pour survivre à cette latitude ? Sans doute profite-t-il des restes d'un repas d'ours ou bien même de ses excréments ? Quelle improbable et magnifique rencontre !

L'équipage précédent nous a indiqué avoir statistiquement détecté un ours par semaine durant leurs trois mois. A surveiller donc ...


Lors du briefing du soir, j’apprends qu’il n’y avait pas un mais au moins trois renards polaires et que l’un d’eux a malencontreusement touché la barrière électrique, déclenchant alors une fusée éclairante. L’événement s’est avéré un très bon exercice pour l’ensemble des scientifiques présents sur la banquise et pour le chef de quart en passerelle, coordonnant leur repli.

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VENDREDI 20 DECEMBRE

N86 41 – E112 39

Quelques chiffres :

Cloué au sol par le brouillard, je consulte la carte. Nous sommes à 2600 nautiques (4800 km) des Vosges, à 350 nautiques (650 km) des îles Sevenaya Zemlya et 440 nautiques (800 km) des îles Franz Joseph.

La température de l’air : -25°, l’eau : -1.5°.

Puis, déambulant au hasard d’une coursive du pont Echo, je découvre un laboratoire. Adela, roumaine, et Patrick, suisse allemand, m’y invitent et m’expliquent leurs travaux quotidiens. Ils analysent les composés chimiques présents dans l’eau et dans l’air depuis le Polarstern. Une heure d’analyse d’air puis une heure d’analyse d’eau de mer se succèdent presque automatiquement jour et nuit grâce à deux machines.


L’une d’elle est plutôt un prototype artisanal ancien, un coffre en aluminium d’un mètre sur cinquante centimètres bardés de tuyauteries, manomètres, réservoirs, jauges et pompes, semblant tout droit sortie d’un vieux film de science-fiction entre « Retour vers le futur », « La Mouche » et « Frankenstein ».

L’autre est un concentré de technologies plus modernes et informatisées.Les deux compresseurs et la batterie d’ordinateurs nécessaires font monter la température du local si bien que deux climatiseurs tentent d’expulser l’air chaud via un énorme tuyau jaune dit « boa ».


Chaque analyse est enregistrée informatiquement mais aussi manuscrite dans un épais registre noir. Ils comparent bien sûr les résultats des deux robots et ne constatent que très peu de différences. C’est donc que les analyses sont cohérentes et fiables.

Plus loin, dans l’entrepôt de matériel, entre traîneaux, équipements électroniques et cordages, je questionne Christian, affairé à entretenir son mini sous-marin : le ROV (Remote Vehicule).

LE ROV 

Il est mu par six hélices et est muni d’une pince hydraulique, d’une multitude de senseurs, phares et autres caméras. Christian est lui-aussi pilote blague-t-il… En raison de l’ouverture soudaine d’une faille de deux mètres de large jouxtant «l’algéco » de ROV City, une équipe logistique s’est empressée de rapatrier par motoneiges tout le matériel sensible et coûteux à bord du Polarstern et attend maintenant fébrilement l’évolution de cette cassure qui pourrait faire disparaître leur local éphémère.

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SAMEDI 21 DECEMBRE

N8641 – E112 25

Poème du matin :

Polarstern

Embarqué sur un bateau,

Dont les moteurs sont coupés,

Tout autour je n’vois pas d’eau,

Car l’Océan est gelé.



Mais quel est donc ce Navire ?

Volontairement échoué,

Là où le Soleil n’est qu’un souvenir,

En cette période de l’année.


A bord de mon Vaisseau,

En plein cœur de l’hiver,

Je désespère qu’il fasse beau,

Pour mon premier vol Polaire.



Cet après-midi, j’ai rendez-vous sur la banquise avec Henning, le chef de l’équipe logistique, afin de réviser les règles de sécurité, le maniement puis le chargement de l’arme, jusqu’au tir à blanc, fusil que nous devons emporter à chaque vol. Ensuite, c’est au tour d’Hannes de nous expliquer le fonctionnement des 8 motoneiges disponibles, comment en changer les bougies, démarrer sur starter ou bien en tirant sur la courroie puis nous avons la joie d’effectuer quelques tours de piste.

Beaux jouets… Les scientifiques peuvent les emprunter, tractant des luges en remorque pour le matériel ou le personnel. Deux d’entre eux, les plus puissants, sont réservés pour les évacuations médicales de secours munis d’un traîneau civière couvert. Dès que les scientifiques quittent le navire vers leurs camps, généralement de 08h00 à 17h30, nous sommes nous-mêmes intégrés au dispositif de secours. Pour un sauvetage de vie humaine, nos minimas météorologiques pourraient être transgressés mais pour les vols programmés il nous faut respecter légalement plus de 1500 pieds de plafond et au moins 5 km de visibilité.

Ce soir, pour fêter le solstice d’hiver, nous sommes conviés à nous rassembler dehors, autour de deux feux de camps allumés dans des barils, et d’une fontaine de vin chaud installée sur un traîneau en bois. Ambiance chaleureuse par -30°C. Tout le monde s’émerveille de cette expédition même si nous sommes loin de nos familles en ces jours de fête.

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DIMANCHE 22 DECEMBRE

N86 39 E112 58

Il faut voler ce matin car la fenêtre météo est courte. Lukas, indicatif «Tiger » vole le premier avec Jorn afin de déposer deux scientifiques et un veilleur d’ours sur le site "L2" afin de changer les batteries de la lampe et vérifier l’état des capteurs atmosphériques. La nuit est complètement noire car la lune est passée sous l’horizon jusqu’à mi-janvier. Après avoir roulé, ravitaillé et déplié D-HAPS par ce froid que même un canard ne pourrait endurer, je monte en passerelle afin de coordonner le vol.


Heureusement, la lampe du site, déclenchable en vol, fonctionne encore et TIGER parvient à s’y poser. L’équipe Météo me rejoint m’informant urgemment de l’arrivée de nuages bas par l’ouest et je parviens à contacter Lukas, posé sur la glace, qui demande alors aux scientifiques d’expédier leurs travaux afin de revenir à bord avant la dégradation. Première mission accomplie mais mon vol suivant est donc annulé.

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LUNDI 23 DECEMBRE

N86 38 – E113 11 (tiens ? Nous dérivons au sud-est maintenant…)

Victor équipe Ashild, veilleuse d'ours, dans le hangar - il la briefe dans l'hélicoptère - Jörn me souhaite un bon 1er vol

C’est donc en cette veille de Noël que j’entreprends enfin mon premier vol avec Victor. Je garde mon indicatif « Anaconda » (se référer au mois d’août…), Lukas, « Tiger » est en passerelle. La mission : 2 vols : site L2 – Polarstern- ravitaillement – site L3, site L2, Polarstern, site L2, Polarstern avec divers scientifiques, matériels et veilleurs d’ours.

Après décollage, sans doute aveuglés par les 1000 feux du navire, nous volons dans la nuit la plus noire que je n’ai jamais rencontrée.

Le pilote automatique fonctionne bien et nous stabilisons à 500 ft en route vers le premier site. En approche finale, Victor actionne la télécommande de la lampe : contact visuel.


Les phares de l’hélicoptère nous donnent ensuite de bons repères de défilement et de hauteur par rapport à la banquise, ridée par de multiples aspérités. En pilotant nos phares, les fanions de l’aire de poser sont maintenant visibles, et je choisis une approche plate, jusqu’à un atterrissage légèrement glissé afin d’éviter le « white out », phénomène de soulèvement de la neige faisant perdre le contact visuel avec le sol.

Victor m’indique l’arrivée de ce souffle blanc dangereux sur son travers et nous « alunissons » avant qu’il ne nous rattrape, sans doute aidés par les 10 nœuds de vent de face.

La veilleuse d’ours, Ashild, sort la première et charge son fusil, puis les deux scientifiques la rejoignent. Enfin seuls, Victor et moi nous congratulons alors mutuellement d’avoir réussi notre première mission nocturne et polaire !!!


Nous enchaînons les sites et sur l’avant-dernier trajet, je découvre, devant nous, la création d’une splendide aurore boréale verte. C’est la première fois que je me délecte de cette radiation magnétique solaire grandiose. J’ai la sensation d’être en orbite autour d’une autre planète. Quelle incroyable aventure nous vivons !!!



Après 3h30 de vol, nous appontons chez nous, sans oublier personne… Ravitaillement, pliage, roulage dans le hangar : je ne sens plus mes doigts malgré mes gros gants protecteurs. Il est 15h et nous n’avons pas déjeuné mais TIGER a géré et nos assiettes nous attendent au Mess 1. Nous y débriefons le vol. C’était réellement le plus beau cadeau de Noël que j’espérais…

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MARDI 24 DECEMBRE

N86 38 – E113 49

Tiger décolle ce matin afin de scanner la banquise autour du navire à l’aide d’un laser installé dans le « coffre » arrière de l’hélicoptère. Une fenêtre a été ajoutée spécialement sur l’une des portes « papillon ». Il ratisse ainsi une zone de 10 km de diamètre centrée sur le Polarstern pendant 2h, à une altitude de 1000 pieds (300 m).


Repas de Noël ?

Le dîner, toujours à 17h30, est malheureusement très simple : 2 saucisses « Knacky » sur une salade de pommes de terre. J’en regrette mes réveillons à bord des frégates de la Marine Nationale sur lesquelles j’aurais sans doute dégusté du foie gras avec un Gewurztraminer, vieilles vignes, suivi d’une langouste flambée au Cognac pour finir par une farandole de desserts sur coulis de framboise avec flûte à champagne. Une autre culture donc…

Mots du commandant puis du chef scientifique 

20h00 : nous sommes rassemblés, tous et toutes vêtus de nos plus belles tenues ou uniformes, dans le salon «bleu» autour du sapin. Le commandant nous formule solennellement ses vœux, hélas en allemand, puis Christian Haas, le chef scientifique, nous gratifie d’un très beau discours, en anglais cette fois, mêlant humour et émotion, rappelant la signification religieuse de Noël, et se réjouissant que notre petite communauté internationale œuvre dans un sens commun avec un bel élan d’enthousiasme, de fraternité et de paix, valeurs ô combien chrétiennes.

Mots du commandant puis du chef scientifique 


Udo, veilleur d’ours allemand au physique particulièrement adapté, fait alors irruption dans la salle en tenue de père Noël charriant deux énormes hottes remplies de cadeaux. Nous chantons. Chaque équipe vient successivement « poser sur ses genoux » puis pioche l’un d’eux au hasard. La veille, chacun a livré secrètement ses propres cadeaux : j’y ai placé du foie gras bien français.

J’ouvre mon colis : il s’agit d’un mini ventilateur branchable sur son téléphone dont la notice dit ceci : « le MiniFan vous permet de rester au frais (keeps you cool) pendant les heures chaudes d’été… ». Excellent !

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MERCREDI 25 DECEMBRE

N86 37 - E115 22

16h00 : à mon tour d’effectuer le vol LASER. Le vol n’a rien de passionnant, constitué de multiples branches parallèles à 1000 pieds et 90 nœuds (160 km/h), mais l’apparition d’une nouvelle aurore boréale, encore plus belle et colorée que la première, me rappelle combien notre position géographique est unique.

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JEUDI 26 DECEMBRE

N86 40 – E116 00 (on a dérivé vers le nord-est)

Tiger, Lukas, effectue un point fixe (mise en route des moteurs sans décollage) avec Léopard, Jörn. Viper, le nouveau surnom que j’ai trouvé pour Victor, inspiré de Top Gun, monte armer le canon à mousse tandis que je me charge de brancher et débrancher D-HARK sur le pont.

Il fait -30°C mais nous disposons d’un tableau indiquant le taux de refroidissement d’une surface (telle notre peau) influencé par le vent : c’est l’effet Windchill ou appelé « température ressentie » par nos journalistes. Cet indicateur permet de vérifier l’occurrence d’engelures en fonction du temps d’exposition. Par exemple aujourd’hui, ce tableau précise :

- Sans vent : danger si exposition 10 à 30 minutes ;

- Vent de 10 nœuds* : -45° ressentis : danger si exposition entre 5 à 10 minutes ;

- Vent de 20 nœuds : -47° ressentis : danger si exposition entre 5 à 10 minutes ;

- Vent de 30 nœuds : -50° ressentis : danger si exposition entre 2 à 5 minutes ;

- Vent de 40 nœuds : -52° ressentis : danger si exposition entre 2 à 5 minutes.

*10 nœuds = 18.52 km/h

En dessous de -55°C ressentis, un temps d’exposition inférieur à 2 minutes suffit à vous geler dangereusement vos doigts ou vos joues si vous n’étiez pas protégés. Sous le souffle du rotor de notre hélicoptère en stationnaire, le vent atteint 40 nœuds. Il est donc indispensable de se protéger avec gants, lunettes et cagoule. J’enlève tout de même subrepticement un gant le temps de prendre une photo et mesure ainsi toute la véracité de ce diagramme pas seulement théorique !!!

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VENDREDI 27 DECEMBRE

N86 40 - E115 46

-30°C : vol LASER. Tiger démarre ses deux moteurs et se prépare à décoller quand soudain, un brouillard épais nous envahit. Nous annulons.

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SAMEDI 28 DECEMBRE

N86 40 E115 42

-30°C : re-vol LASER car l’idée est de construire une piste d’atterrissage au moins pour un petit avion en cas de nécessité d’évacuation médicale. Tiger vole 1h30 ce matin mais la température du laser est trop froide (-12°C) si bien qu’ils doivent le couper. L’après-midi, il visite les sites L1, L2, L3. Le vent est nul et il me rend compte que les conditions d’atterrissage sur la neige sont difficiles : sans vent, la neige soulevée diminue fortement voire totalement notre perception du sol.

LE ZILLERTAL BAR

Ce soir, le bar est ouvert et je sonne courageusement la cloche suivant scrupuleusement une vieille tradition de la Marine : « si tu passes dans le journal, tu payes ta tournée générale ». En effet ce jeudi, l’écho des Vosges a publié un très bel article sur notre aventure. Je trinque avec mon compatriote Éric Brossier, aventurier et navigateur, vivant avec sa femme et ses deux filles sur son voilier, le Vagabond, aux côtés des populations inuites, menant également divers projets scientifiques. Lien : Vagabond.fr

A minuit précisément, nous chantons l’anniversaire de Tercio, logisticien portugais fêtant ses 31 ans.

Dimanche, seule de la maintenance sur D-HARK est programmée.

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LUNDI 30 DECEMBRE

N86 38 E116 50

D6HARK et son équipement laser 

Victor et les techniciens du Laser ont rajouté une petite résistance qui permettra de limiter son refroidissement en vol. Nous prévoyons ce matin 2 h de passages très précis en position, vitesse et altitude. Les météorologues nous ont prévenu que la visibilité oblique sera diminuée par de la poussière de glace qu’ils appellent : « diamonds cristal falls » et qui ne présente pas de danger aéronautique autre. Victor et moi décollons dans ce ciel de paillettes en suspension. Elles défilent rapidement maintenant et sont tellement scintillantes dans le halo de nos trois phares que nous pensons tout deux passer dans une autre dimension, tel l’hyper-espace de Star Wars. Mieux vaut les éteindre donc.

D’ailleurs nous coupons aussi tous nos feux de signalement (anti-collision et de position) et une annonce est transmise au personnel sur la banquise afin ne pas lever les yeux vers l’hélicoptère, le laser présentant des dangers oculaires. Décidément, les vols ici sont si singuliers, presque surnaturels.Le laser scanne la banquise en haute définition. Après l’extraction et la compilation des lourdes données du vol, les images de notre balayage (20 km sur 10), permettent de zoomer jusqu’à une résolution de 50 cm. Impressionnant.

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MARDI 31 DECEMBRE

N86 35 E117 10

Quelques points de situation :

Inauguration de NEW ROV City :Le nouvel emplacement de l’Algéco du R.O.V., souvenez-vous en perdition la semaine dernière par l’ouverture de la banquise, est maintenant pleinement opérationnel, le trou creusé, le palan mis en place, le chauffage et l’électricité connectés.

La dérive :

Nous dérivons en spirale, espérant atteindre le pôle Nord. La position initiale d’arrêt des moteurs a été méticuleusement choisie après avoir analysé 5 ans de dérive de la banquise polaire afin de dériver au plus proche de ce point géographique symbolique. Les mouvements des plaques sont essentiellement influencés par le vent et tournoient donc au gré des passages successifs des dépressions. La lune montante ou plutôt descendante influe sur la marée et ces périodes semblent être les plus critiques en termes de formation de rift ou de chevauchement de plaques.

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Saint Sylvestre

Ce soir, le dîner est servi à 18h00 dans le « Wet Lab » où des tables de camping sont dressées. C’est un local au pont en bois, dont les murs sont décorés pour l’occasion des drapeaux de chaque pays participant et où les inévitables pompe à bière et sono sont provisoirement installées. Personne n’a fait d’effort vestimentaire particulier et je suis le seul en cravate. Cochon de lait et pommes de terre sous aluminium. C’est très bon mais, sans doute à cause de ma culture française, je ne considère pas ce repas à la hauteur de l’événement. Nous plions ensuite les tables pour laisser place à la piste de danse et lançons la sono.

Après quelques pas de «disco » et beaucoup de bières, l’équipe hélicoptère est chargée de tirer nos 28 fusées de détresse périmées aujourd’hui à minuit, le hasard faisant bien les choses. Je sors sur la plate-forme hélicoptère habillé de ma robe congolaise et d’une perruque pour embraser le ciel : la plus mauvaise idée de l’année !!!

Avec le vent, la température extérieure ressentie est de -48°C.

Tout le monde est rassemblé en passerelle et le son grave de la corne de brume retentit : il est minuit, le signal pour « déchaîner les enfers » (« Gladiateur »). Victor, Jörn et moi déclenchons joyeusement nos lance-fusées. Ma perruque rose ne couvre hélas que trop partiellement mes oreilles et j’enlève mon gros gant de la main droite pour faciliter mes tirs. Après dix minutes de show pyrotechnique du plus bel effet, mes lobes ont doublé de volume et je ne sens plus ni mon pouce, ni mon index droit comme si je m’étais brûlé.Le lendemain, mes sensations ne s’améliorant pas, je consulte le « doc » qui m’explique qu’il n’y a rien à faire sauf à attendre deux jours en restant au chaud… Je lui jure que l’année prochaine, je mettrai un bonnet d’âne !!!

BONNE ET HEUREUSE ANNÉE 2020

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BONUS

Cet aéroglisseur est resté 13 mois en Arctique en 2014, déposé par le Polarstern.

Respect aux 2 membres d'équipage : Yngve Kristoffersen et Audun Tholfsen


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Publié le 14 janvier 2020

JEUDI 02 JANVIER 2020

N86 51 - E116 15

Avec les 20 nœuds de vent du sud, nous dérivons plein nord à une vitesse record : 0.4 nœuds soit 0.7 km/h contre 5 km/jour cette semaine… 0.7 km/h est la vitesse d’une marche humaine très lente. Pour les plus jeunes, c’est comme si on plaçait des plaques blanches de polystyrène au centre du lac de Gérardmer avec 36 km/h de vent. Elles se retrouveraient rapidement bloquées contre la berge,sous le vent.

Aujourd’hui, Giulia, scientifique italienne de l’équipe ECOSYSTEME, a besoin de descendre son CTD (Conductivity, Temperature and Depth) à 1000 m de profondeur, souvenez-vous, ce cylindre de colonnes de captation d’eau. Cela nécessite un travail fastidieux des membres d’équipage afin de repercer le trou, près de la coupée, et de surveiller les poulies de l’énorme treuil. Ensuite, à la sortie de l’eau du précieux prélèvement, il faut empêcher que les colonnes d’eau de mer ne gèlent à l’aide d’une turbine projetant de l’air chaud sous une bâche. Maintenant c’est au tour d’un filet à plancton d’être immergé. Les analyses seront ultérieurement menées dans son laboratoire, de l’observation microscopique du plancton à l’étude de la composition animale, végétale et bactériologique de l’eau de mer.

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VENDREDI 03 JANVIER 2020

N86 55 E 115 42 – 185 nautiques du pôle Nord

PROBLÈMES DE MATHÉMATIQUES

1 / Élémentaire :

A ce jour, 03 janvier, il me reste 15 FERRERO ROCHERS chocolatés offerts par le collège du Tholy et mon retour est prévu le 16 avril.A combien de FERRERO ROCHERS par semaine dois-je me rationner afin d’en profiter jusqu’à mon départ ?

Merci Le Tholy !!!

2 / Lycée :

A quand le Pôle nord ?

A midi en ce 03 janvier, notre position est N86° 55.

Pour m’aider à connaître le jour où je pourrai planter mon drapeau tricolore au pôle Nord, estimez la date prévue d’arrivée en fonction de la vitesse de notre dérive. Pour vous aider :

Le pôle nord se situe au N 90°00

1 nœuds = 1 nautique par heure

1° de latitude = 60 nautiques

1 minute de latitude = 1 nautique

Présentez un tableau avec en première colonne, les vitesses de dérive de 0.1, 0.2, 0.3 et 0.4 nœuds au plus optimiste ; en 2ème colonne le nombre de nautiques parcourus en 24h, en troisième colonne le nombre de jours pour effectuer les 185 nautiques restants et en dernière colonne la date estimée.

Merci de m’aider … même si la fourchette est assez large.

Pour information, un nautique = 1852 m.

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WEEK-END PLUVIEUX

Ce weekend, nous enchaînons jusqu’à 4 briefings météorologiques par jour sans jamais entrevoir une fenêtre de vol possible, les nuages bas interdisant les vols. Nous nous portons alors volontaires pour devenir veilleur d’ours en passerelle. Munis de bonnes jumelles et pilotant trois phares surpuissants à l’aide de joysticks, nous scrutons les abords des camps, aidés par les images infra-rouges d’une caméra thermique. On croirait devenir l’œil de « SAURON » dans Le Seigneur des Anneaux, surveillant frénétiquement les parois volcaniques de sa tour maléfique. Jusqu’à maintenant, aucun ours n’a encore été détecté depuis mi-décembre alors que l’équipage précédent en percevait un par semaine… Il faut donc continuer à maintenir sa plus grande vigilance sans s’habituer jamais à ce qu’il n’y en ait pas.

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LE « POLAR BEAR GUARD » ou Veilleur d’ours polaire

Ils font partie de l’équipe logistique et sont désignés au hasard des demandes de sorties des scientifiques. Ils peuvent surveiller les alentours du groupe pendant 3 ou 4 heures par -30°C : c’est très long et requiert une attention de chaque instant. Les scientifiques peuvent aussi assurer leur propre sécurité mais c’est alors un travail absolument exclusif : pas question de faire autre chose. Ils sont équipés d’un pistolet lance-fusée, d’un fusil 7.62 mm avec deux chargeurs de cinq cartouches et d’une radio VHF marine.Afin de compléter le dispositif, un veilleur d’ours est en alerte en passerelle et un autre à l’arrière du navire. Ils sont relevés toutes les heures.Parmi eux :

Markus, guide de haute montagne dans les alpes suisses et ancien militaire allemand.

Markus, guide de haute montagne dans les alpes suisses et ancien militaire allemand. 


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LUNDI 06 JANVIER

N87 06 – E115 03

Tiger décolle aujourd’hui pour entretenir les trois sites « L », les ravitailler en méthanol et en récolter les données. Je surveille et coordonne ses vols depuis la passerelle pendant 5h. Il y a Jacob, le chef de quart, Jasper, le point de contact des équipes extérieures et un veilleur d’ours.

Pour cela, je dispose d’un radar permettant de suivre ou même de guider l’aéronef, de 2 radios (VHF et VHF Marine) et d’un téléphone satellite. Je reçois même les dernières coordonnées des camps par e-mail lorsqu’il actionne le bouton SpiderTrack une fois au sol. Il y a de multiples co-activités, gérées en temps réel et pas nécessairement planifiées (encore mon esprit trop militaire). Je choisis les mots pour ne pas employer le terme de « gros Bronx ». Les scientifiques de l’équipe ATMOS veulent par exemple déployer le filin de Mrs Piggy à 500 m, le dirigeable orange. La grue de l’arrière-bâbord demande ensuite à poser sa nacelle de fer sur la banquise, servant d’extraction d’urgence de l’équipe construisant la piste d’atterrissage en cas de menace d’ours. La météorologue veut encore lancer son ballon-sonde alors que Tiger nous survole à 1000 ft. Enfin, la grue tribord veut plonger son filet à plancton… Parmi toutes ces activités, il faut trouver le créneau pour autoriser l’appontage et ravitailler l’hélicoptère.

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MARDI 07 JANVIER

N87 07 E115 20

« A moah, à moah, à moah… », disait la mouette dans Némo !

Les vols Lasers sont bien moins intéressants que de se poser sur les sites extérieurs et les scientifiques m’en ont programmés deux de deux heures. Je dois balayer à vitesse sol et altitude constantes certaines zones bien précises afin de surveiller l’évolution de la banquise se transformant notablement avec notre dérive fulgurante.

Le 2ème vol consiste à évoluer en triangle entre les trois sites « L » et le Polarstern. Je l’appelle le vol du « triangle des Bermudes » ou triangle de la mort. En effet, à ces latitudes, mon compas secours indique n’importe quoi et mon compas magnétique est décalé de 90°, la déclinaison étant de 93°E. Heureusement, ma route sol GPS indiquée sur mon écran tactile est quant à elle tout à fait juste. Victor déclenche l’allumage des lampes de chaque site avec sa télécommande et malheureusement, la lampe du site L2 ne fonctionne déjà plus. L’éclairage de la lune change aussi considérablement la physionomie du vol car, face à elle, on peut discerner l’horizon et même la surface du sol, … enfin de la mer… blanche !

LE TRIANGLE DES BERMUDES 

De retour, je demande à Tiger l’autorisation de me poser sur la toute nouvelle piste d’urgence à 300 m sur le côté bâbord (gauche) du Polarstern, fraîchement damée par un énorme chasse-neige. Il me répond quelque chose du genre : « Négatif Ghost Rider, y a du monde dans la boucle » pour ceux qui ont vu et revu Top Gun. En finale, alors que je me résigne à apponter, Léopard (Jörn) m’informe que je dois patienter car la lance à incendie n’est pas encore armée sur le pont d’envol. J’effectue une baïonnette à gauche, lance un regard malicieux à Victor qui comprend instantanément mes intentions et lance solennellement sur la radio : « Heliservice International, Turning Final Runway 20, 4 Persons on board, gear down and locked ! » Heliservice Intl, dernier virage piste 20 (son orientation étant provisoirement au cap 200), 4 personnes à bord, train sorti et verrouillé !

PISTE D'ATTERRISSAGE 

Nous effectuons une approche d’avion, touchons la banquise à environ 40 nœuds (70 km/h), glissant sur nos patins sur une trentaine de mètres et remettons les gaz en virant à droite, enroulant fièrement le Polarstern. Nous venons d’inaugurer la piste la plus septentrionale de la planète : N87° 07’ !!!

La lance est prête et nous appontons. Lukas descend nous rejoindre sur le pont et me lance un sourire complice. Je lui explique d’une part que c’est la procédure à appliquer si nous perdions un de nos moteurs et qu’il était nécessaire de la tester préalablement et, d’autre part, que s’il voulait me virer, il devrait de toute façon attendre mon remplaçant pendant des mois. Mais qu’ils sont débiles ces français, doit-il penser…

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MERCREDI 08 JANVIER

N87 07 - E115 52

Cette fois, la mission Laser consiste à scanner les sites L1 et L2 afin d’en obtenir une cartographie en haute définition. Avant cela, profitant de la lune, nous devons trouver le site L2 et en remplacer la lampe défectueuse. Nous sommes à 40 nœuds/200ft, tous phares allumés, et approchons la toute dernière position GPS, transmise en vol pour plus de précision. En effet, la balise au sol transmet ses coordonnées toutes les heures mais avec déjà 20 minutes de délai de transmission satellite.Victor s’exclame : «L2 in sight eleven o’clock !» (site L2 en vue à 11h, 30° à gauche de l’axe de l’hélicoptère). Je cercle autour, sans en perdre la précieuse vue afin de me présenter face au vent. Le «white out» est à la limite de la remise de gaz mais je parviens à maintenir le visuel d’un piquet et nous atterrissons. Marcus, scientifique et technicien de notre équipement laser descend changer la lampe et nous la testons avec la télécommande : bon fonctionnement.


Après 1h de scanning laser en hippodrome autour de ce site, nous fonçons vers le site L1. En finale sur la lampe, nous constatons que notre aire de poser n’existe plus : un promontoire d’1,5 m de haut de banquise fracassée la traverse en son centre et a bouleversé l’emplacement des piquets de bois. Notre dérive rapide due au vent a généré des chevauchements violents de plaques ou des cassures impromptues laissant apparaître de larges ouvertures noires et dangereuses d’eau de mer. Tant pis, nous atterrissons sur une autre surface plane, Marcus éloigne la torche de cet agrégat de glaçons et en remplace la batterie. Nous décollons sans marquer le stationnaire et retournons ravitailler à bord. Nous redécollons pour 1 h de scanning sur L1.

Lukas et Jorn prendrons le relais pour le site L3 : 5h de vol aujourd’hui ! Cela rattrape notre week-end de météo capricieuse.

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VENDREDI 10 JANVIER

Christian, le chef scientifique, propose de célébrer la pleine lune par une marche extérieure à 20h00. Pour les scientifiques qui passent leurs journées dehors, ce n’est pas enthousiasmant mais pour les membres d’équipage, les occasions de sorties sur la banquise sont plutôt rares. Je m’équipe des plus chaudement : sous-vêtements chauds, sous-combinaison, combinaison, sous-gants, moufles, cagoule, foulard sur le nez, bonnet couvrant bien les oreilles, doubles paires de chaussettes et Moon boots fourrées.

Je prépare mon sac à casque avec le drapeau des armoiries de mon village, le Tholy, ainsi que le fanion triangulaire de son équipe de football et remplis un thermos de chocolat chaud. Nous sommes 23 rassemblés près de la coupée. Christian ouvre la marche et Eric, mon compatriote la referme, tous les deux étant armés. Nous marchons ainsi deux heures sur le bâbord du Polarstern, loin du bruit continu des chaudières et climatisations du navire. Le silence se déguste ici. Nous longeons une craquelure de la banquise, des blocs de glace d’un mètre de haut nous laissant deviner les forces exercées. La lune est magnifique et nous faisons une pause, prostrés face à sa lueur.


Certains photographes passionnés prennent des clichés avec des temps d’exposition très longs si bien qu’ils font croire à la lumière du jour alors qu’il n’en est rien en réalité. La nature du sol est surprenante, tantôt nous déambulons dans de la neige poudreuse jusqu’aux mollets, tantôt nous sentons la rupture craquante d’une plaque de glace sous nos pieds. De retour à la coupée à 22h00, je les remercie chaleureusement de nous avoir offert ce beau cadeau. Cet endroit de la planète est tout de même tout à fait spécial.

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SAMEDI 11 JANVIER

Pour la première fois je vole avec Jörn comme assistant de vol en place gauche.

La mission consiste à déposer 2 scientifiques et un veilleur d’ours sur le site L2. Ils souhaitent y rester 3h, par -45°C ressentis, afin de mener quelques carottages et prélèvements sous-marins. Nous installons donc Ben, co-leader scientifique, au physique de « Gandalf » en plus jeune (110 kg sans le casque), Steffen, un veilleur d’ours allemand, comment vous dire … plutôt équipé pour les basses températures (100kg sans le fusil) et heureusement Volker, de l’équipe OCEAN, 1.60 m et moins de 60kg tout compris. Maintenant nous chargeons leur matériel par les portes arrière : un traîneau, un mini-groupe électrogène, une tente, deux perceuses, une canne à pêche, et pas mal d’instruments de mesure ainsi que 4 sacs de survie. Le vent est bien établi et la lune nous éclaire presque comme un soleil.

En approche finale sur L2, l’équipage arrière ne dit plus rien car, en tranche avant, nous échangeons comme des pipelettes : allumage de la lampe au sol, réglage des phares, chauffage sur arrêt, coupure des modes de tenue du coupleur de vol, choix du point de poser, direction du vent et donc position du « white out », puissance affichée : tout y passe ! Nous nous posons comme une fleur sur un beau tapis de neige plat malgré notre masse maximale : 3300 kg…

Steffen, entendant que la tension redescend, s’exclame alors sur le téléphone de bord : « What a kiss landing !» Je lui rétorque que non, c’est juste un « French Kiss ». Bon, il faut reconnaître que mes précédents atterrissages glissés, sans vent, étaient plus dignes de l’impact que de l’atterrissage… Jörn sort le premier afin d’ouvrir les portes papillon et surveiller le déchargement du matériel par nos trois aventuriers, et éviter qu’ils ne se dirigent vers notre rotor anti-couple mortel. Tout est déposé, le contact radio fonctionne, nous retournons à bord récupérer Taniel et Michael, de l’équipe ATMOS. Nous enchaînons les sites L3 puis L1. Ils y vérifient et entretiennent leurs équipements de mesure. Nous n’embarquons pas de veilleur d’ours cette fois car nous restons sur place, le bruit des turbines faisant fuir à coup sûr le moindre animal dans cet environnement extrêmement silencieux. Avant de revenir à bord pour ravitailler en kérosène, nous retournons survoler le site L2 afin de vérifier que tout s’y passe normalement. (photo de notre passage). Tiger et Viper s’occuperont de récupérer tout ce beau monde sur le vol suivant.

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ZILLERTAL !!!

Ce samedi soir, le Zillertal Bar ouvre ses portes. Par deux fois, depuis le mois de décembre, je suis entré dans ce pub le plus septentrional accoutré de façon pour le moins originale.

La première fois, j’y pénétrais en chantant « Welcome to the danger zone » du film Top Gun, drapé d’une immense banderole jaune aimantée siglée «DANGER AREA», telle une énorme écharpe de maire traînant jusqu’au sol. La seconde, en chantant encore «Rescue me», une bouée de sauvetage autour du cou avec sa lampe flash clignotante allumée dans la poche de ma chemise vosgienne. D’ailleurs cette chemise n’est pas à moi, elle est à «Caro»… C’est maintenant une tradition, je dois trouver quelque chose ! C’est décidé ! Je place un gros carton cylindrique attaché par une ceinture sur mon torse en guise de poitrine plantureuse, mon oreiller attaché par une autre sur mon postérieur maintient un centre de gravité cohérent, puis j’enfile mon batik congolais (une robe bleue), et me coiffe d’une perruque rose. Souvenez-vous, j’ai gagné le concours de Miss Svalbard au mois d’août et je compte bien maintenant être élu(e) Miss Arctique…

J’entre triomphalement en tant que Sabina, la Mama congolaise et obtiens un vif succès. J’embrasse Christian, hilare mais inquiet puis m’aperçoit que le commandant est présent. Je m’approche sensuellement vers lui sans me démonter car c’est déjà trop tard et lui demande s’il veut lui aussi un baiser. Il me le refuse catégoriquement sans doute car je ne suis pas rasé : « Nein, Nein und Nein !!! » (clin d’œil à la blague de la grenouille magique pour ceux qui la connaissent). Chacun, chacune veut sa photo avec moi. Mon dieu, si cela finit sur facebook… l’éducation nationale me refusera définitivement toute entrée dans ses établissements…

Quelle journée !!! (enfin nuit ?)

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DIMANCHE 12 JANVIER

Nouvelle mission et pas la moindre.

Tiger doit retrouver une sonde blanche de la taille d’un ballon de football sur le site « M5 » qui ne dispose plus d’éclairage car nous devons nous y rendre qu’une seule fois par mois, la batterie ne tenant pas la charge si longtemps par ce froid. Cette sonde, parmi tout un réseau d’autres, transmet automatiquement ses données par satellites. Sous elle, un filin de plusieurs centaines de mètres plonge dans la mer une multitude d’instruments de mesure de la température à la salinité et je ne sais quoi d’autres encore. Tandis que l’hélicoptère la recherche depuis 10 minutes, Taniel, chef de l’équipe ATMOS, me transmet les nouvelles coordonnées qu’elle vient de recevoir par e-mail en passerelle. Tiger les insère dans son GPS et effectue une nouvelle approche sur ce point récent. Je perds son contact radar et ne parviens plus à communiquer avec lui par radio.

Après quelques longues et silencieuses minutes, le téléphone satellite sonne : «we found it and we are on ground !» se réjouit-il (nous l’avons trouvée et nous sommes posés). Je le félicite !

Quelle équipe quand on pense que l’équipage précédent a cherché pendant 7h de vol le site L2 sans sa lumière !

Il me contactera dans 20 minutes par radio après décollage, le temps qu’il faut aux scientifiques pour vérifier les capteurs. De retour vers nous, attendant l’armement de l’extincteur par un membre d’équipage pour donner l’autorisation d’apponter, je propose à Tiger un passage sur notre piste 20 : il acquiesce sans hésiter.

Alors qu’il s’aligne à vitesse de croisière sur cet axe blanc, je lance « La Grange » de ZZ TOP sur mon téléphone portable et appuie simultanément sur l’alternat du micro de la VHF. Après ce beau défilé, je lui demande s’il a bien reçu mon signal sonore : « Affirm, super cool !!! » : me répond-il.

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BONUS :

Nouveau local de ROV City : mise à l'eau du drone sous-marin :

De la glace au microscope dans un beau prisme :

Appareils de mesure atmosphérique sur le site "L2" entretenus par Mickaël, un américain de l'équipe "ATMOS" :

Récolte de l'eau de mer capturée à 1000 m de profondeur par le "CTD" (Conductivity, Temperature and Depth) dans les bidons bleus :

Sur cette photo, vous pouvez voir la bâche orange permettant de chauffer le CTD devant son trou et le filet à plancton (sorte d'épuisette à papillon) juste derrière à droite. Ces équipements sont immergés près de la coupée, sur tribord, par une grue du navire, 10 000 m de câble et un énorme treuil :

Giulia, italienne de l'équipe "OCEAN", s'occupe d'enregistrer ses prises dans le filet à plancton, voici son labo :

Plancton 

Sur L'avant du bateau, Hannes étudie l'atmosphère (et sa teneur en aérosol) dans un conteneur équipé d'ou part un laser vert à la verticale. En arrière plan la fameuse dameuse de piste :

Miss Piggy s'envole jusqu'à 1 500 m d'altitude avec d'autres capteurs atmosphériques de puis la tente de "Balloon Town" :

Cette luge lunaire transmets également de nombreuses informations atmosphériques depuis les sites L :

Radar bande L de "Remote Sensing City", scannant la banquise. Il parvient à distinguer les couches d'eau de mer gelée et de neige ainsi que l'épaisseur totale :

Le plan de la ville de "Mosaïc City". Au centre droit en blanc, la coque du Polarstern (118 m) pour vous donner une échelle. Les images de la banquise bleue sont tirées de nos vols lasers :

Voici notre dérive sur un mois. Seulement 4 km par jour en moyenne mais il semble que nous ayons pris l'autoroute du Pôle Nord après un rond-point !!! Vous trouverez de nombreux petits articles sur le blog d'AWI :

Photos de poisson prises par "ROV" le mini sous-marin. En bas, sa pince hydraulique :

Ils appellent cette espèce "Polar Coat" 

Espèce de lombric pêché entre 1 000 et 2 000 m sous la banquise par le filet à plancton. La tête est en bas, avec une trompe d'éléphant. Environ 8 cm de long. Giulia et Sinuhé de l'équipe ÉCOSYSTÈME en sont ravis !!!

L'équipement laser installé dans D-HARK, 80 kg de technologie et son isolation artisanale pour le conserver au-dessus de -10 degrés :

Voici le résultat d'un vol. En basse définition bien sûr. Trouvez le Polarstern en zoomant sur la photo :

Opération dépliage de D-HAPS sur le pont d'envol. Lukas à droite fait le plein, Jörn sur le toit, installe les broches qui maintiendront les pales, Victor sur l'escabeau, démonte la perche qui a servi à déployer la pale droite. Je le sécurise. Un câble électrique, branché sous le nez, permet à la batterie de rester chaude et de ne pas se décharger par ces températures :

Comme dirait le filleul de mon épouse : Tonton pilote Blade !!!

D-HARK  RANGER  &  BLADE  RANGER  

Voici quelques vues pour le plaisir des yeux :

Ici le vent produit de belles dunes de neiges ... 
Chevauchement de plaques et Dima, scientifique russe de l'équipe "ICE", récoltant des stalactites 
L'équipe ICE s'intéresse aux "fleurs" de glace dont la teneur en sel est impressionnante selon eux 
Rencontre du troisième type ou notre soleil artificiel ??? 
Steffen, veilleur d'ours au meilleur point de vue 
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Publié le 22 janvier 2020

MERCREDI 17 JANVIER

N87 27 - E 104 02

SORTIES SKI ET MARCHE

Un petit groupe se rassemble pour une virée extérieure. Victor s’est porté volontaire pour veiller l’ours. L’arme en bandoulière, il nous compte et informe la passerelle de notre départ par radio. J’en profite pour poser sous la lumière du Polarstern avec l’insigne de mon association : la Société des Membres de la Légion d’Honneur (SMLH).

La demi-lune est orange et basse aujourd’hui et devrait disparaître hélas dès demain. Nous crapahutons dans nos larges combinaisons rouges, telle une horde de pingouins, curieuse de fouler cet univers inconnu. Le vent a créé de belles dunes de neige aux lignes courbes qui me font penser, sous certains éclairages, à un désert de sable. Au plus loin, profitant des sièges offerts par un chevauchement de plaques, nous nous asseyons et admirons le panorama. Chacun est pensif et rêveur, persuadé du caractère unique de notre situation, portant un regard nouveau sur notre planète depuis ce point de vue si singulier… A près de deux kilomètres scintille la lumière artificielle du Polarstern : notre seul soleil, notre phare salutaire, notre étoile du berger dans cette tempête figée de glace .

J’ai préparé un grog (un peu de Rhum dans de l’eau bouillante) dans mon Thermos et propose malicieusement un « thé à la camomille » à Steffen, météorologue. D’abord surpris par la première gorgée, il éclate de rire et en redemande : «ça réchauffe !» s’exclame-t-il. Sur le trajet retour, Victor reçoit les consignes VHF nous imposant un large détour par la gauche, surveillés de près par les projecteurs surpuissants du navire échoué.

Je ne résiste pas à exprimer mon désaccord en me déséquipant furieusement, tournant le dos à la lumière aveuglante et leur faisant profiter d’une magnifique «double éclipse de lune». Le vent glacial me pique un peu à vif mais toute l’équipe de randonnée m’encourage et approuve mon geste rebelle… Jörn a hélas eu le temps d’immortaliser l’affront sur son téléphone portable et me menace maintenant de le publier sur notre réseau : après la «Picture of the day» de Miss Svalbard, ce pourrait bien être la «video of the Year»… Nous voilà arrivés devant la coupée et au complet après 2 heures par – 28°C et 20 nœuds de vent (-44°C ressentis).

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JEUDI 16 JANVIER

N87 28 - E 103 38

LA NUIT DE TOUS LES RECORDS ?

Le ciel s’ouvre enfin après trois jours cloués au sol. J’effectue deux vols de 2 heures chacun sur D-HARK. Cet hélicoptère ayant son coffre réduit de moitié par la présence de l’équipement Laser, Lukas a arrimé le matériel de prélèvement nécessaire aux scientifiques pour deux vols suivants dans D-HAPS, l’autre hélicoptère au chaud dans le poulailler. A peine appontés, il nous faut donc ravitailler, plier et ranger le premier dans le hangar puis sortir, brancher, déplier et ravitailler le second sur le pont. Par ces températures extrêmes, décuplées par le vent, nous ne mettons que 40 minutes… C’est bien la preuve que chacun sait maintenant ce qu’il a à faire et à quel moment. Beau travail d’équipe.Lukas dépose ainsi 4 scientifiques et un veilleur d’ours sur le site L2 puis revient sur le pont. 1h30 plus tard, surveillant leurs comptes-rendus par téléphone satellite, il retourne les récupérer.

6h de vol dans la journée et deux hélicoptères préparés : un record pour notre équipe !!!

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SAMEDI 18 JANVIER

N87 27 - E100 24

2H30 DE VOL

Cet après-midi, Jörn et moi décollons avec trois scientifiques vers les sites L3 puis L1. La nuit est noire et aucune étoile n’est visible car des nuages couvrent le ciel à 3000 ft (1000 m). Depuis la passerelle, Tiger nous transmet les coordonnées toutes récentes des sites en vol et Léopard les enregistre soigneusement dans notre GPS. Les lampes fonctionnent normalement. A peine atterris, Jörn descend guider le débarquement.

Volker pose fièrement tandis que Victor et moi lui gâchons la photo !!! 

Matthias, Volker et David tirent maintenant leur traîneau sur l’avant droit de l’hélicoptère et s’activent à déployer leurs matériels avec une efficacité presque militaire tandis que je mets mes turbines au ralenti.

L’un, muni d’un foret sur perceuse et d’une pelle, creuse la banquise, l’autre prépare ses « mini-CTD » et déroule la corde servant à les immerger à la longueur souhaitée, le troisième monte une antenne GPS et lance ses appareils électroniques tandis que Jörn remplace les batteries des lampes. En moins de 30 minutes, l’opération est terminée. Les prélèvements chargés et les passagers harnachés, nous fonçons alors sur le site L1 distant de 30 km afin de faire exactement les mêmes captations. Nous sommes tous réglés comme du papier à musique et tout se déroule sans le moindre accroc.

VIN CHAUD 20h - 22h :

Ce samedi soir, un vin chaud nous est servi devant deux feux de bois à 300 m de la coupée. Presque tout l’équipage est dehors et l’ambiance est très conviviale.

A minuit, Vishnu surveille les paramètres transmis par Remote Sensing City depuis le Polarstern.

Il s’agit de plusieurs radars et autres appareils sophistiqués américains scannant la banquise afin d’en déterminer l’épaisseur certes, mais aussi de discerner toutes les couches qui la constitue, de l’eau de mer gelée à la neige s’accumulant. L’idée de ce camp, si j’ai bien tout compris, est aussi d’améliorer les analyses des données satellitaires afin de justement obtenir une meilleure cartographie de l’épaisseur de la banquise…

Remote Sensing City 

Bref, Vishnu constate des perturbations sur un des radars. Il sélectionne sa caméra de contrôle et surprend un ours mâle juvénile jouant avec ses capteurs !!!

Le lendemain, une équipe suit ses traces pour évaluer les dégâts. Il a soigneusement évité la barrière électrique à déclenchement automatique de fusée éclairante sensée nous alerter, mais a aussi heureusement enjambé les câbles électriques suspendus sans les endommager. Ouf …

L’après-midi, ne volant pas aujourd’hui, je me suis porté volontaire afin d’être veilleur d’ours en passerelle pendant une heure. Autant vous dire que je ne lâche pas mes jumelles et balaie méthodiquement les alentours avec mes projecteurs. Ce petit rappel à l’ordre de cette nuit n’est pas un mal.

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LUNDI 20 JANVIER

N87 28 - E097 03

Tiger vole 3h afin de récolter, entretenir et ravitailler les trois sites « L » comme s’il ne voulait pas m’en laisser un pour le lendemain. Je surveille en passerelle et coordonne ses ravitaillements.

TOURNOI DE FOOT

Plusieurs équipes sont constituées et ce soir, deux matchs sont organisés. Réfléchissant un peu, je ne me suis pas inscrit par peur de me blesser bêtement… Le commandant m’interrogeant, je lui explique que, la France étant championne du monde, je ne peux m’abaisser à jouer contre des équipes d’amateurs dans cette improbable Ligue Arctique…

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MARDI 21 JANVIER

N87 29 – E095 54

Vol Laser et recherche d’une bouée 2 heures de virages à gauche afin de ratisser la zone du Polarstern avec le laser.

L’école de Xertigny m’ayant souhaité bonne fête hier, je crée deux points sur mon GPS «MERCI» et «XERTIG», prends la photo de l’écran pour l’envoyer plus tard au groupe scolaire qui me suit.

En fin de mission, Tiger me demande si j’ai assez de kérosène afin d’aider une équipe pédestre à trouver une bouée émettrice dans la zone de "Dark Side". Je ne dispose hélas que de 5 minutes pour eux.


Dès le laser coupé, nous fonçons vers la zone en descente, allumons nos trois phares puis apercevons les lampes frontales de l’équipe au sol. Effectivement, des monticules de glaces de deux mètres de haut gênent à la fois leur progression et leur champ visuel. Victor pilote les phares et nous nous répartissons chacun un secteur visuel. L’équipe laser à l’arrière est aussi mise à contribution. Nous avançons lentement au-dessus d’eux à vitesse très faible. Cela me rappelle mes nombreuses recherches nocturnes de naufragés ou de ballots de drogue dans la Marine. La balise est jaune et mesure environ 1 m de haut. Rien, elle doit être ensevelie. Je ne peux pas chercher plus longtemps et retourne apponter, déçu de ma trop maigre contribution. Je demande à Lukas de ravitailler et de repartir les aider. Hélas, il refuse car il faudrait courir aux signatures du commandant et du chef scientifique pour le nouvel « ordre de vol ». Dommage.

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HISTOIRE DE FAMILLE

Ce fameux « ordre de vol », manifeste officiel signé donc, dans lequel sont déclarés les noms de l’équipage et des personnes embarquées, la nature du vol et sa durée, m’incite à vous raconter l’histoire intime et émouvante qui a profondément marqué ma famille.

Mon père, le capitaine de vaisseau Jean-Claude DRACH, m’a donné le virus des hélicoptères et de la Marine. J’étais captivé par ses innombrables récits ou anecdotes qu’il nous relatait, mes frères et sœurs et moi, souvent hilare à ne plus pouvoir les terminer et parfois larmoyant tellement cela l’affectait.Le 22 août 1966, il est désigné membre d’équipage du CEPA (escadrille 20S) afin de convoyer les Super Frelon n°102 et 103, gros hélicoptère à trois turbines que, par jalousie, j’appelais « l’Algéco volant », de Marignane vers Saint-Raphaël pour réception de ces tous nouveaux appareils par la Marine Nationale. Classiquement, c’était à l’Escadrille de Réception et de Convoyage (ERC) de s’en occuper, mais, ne disposant pas encore d’équipage qualifié, la mission revint au CEPA. Désolé pour tous ces acronymes incompréhensibles pour la plupart mais que certains marins comprendront.

Buvant le Champagne inaugural à Marseille avec « Sud Aviation » juste avant de décoller (une autre époque !), mon père est contacté d’urgence au téléphone par mon grand-père maternel et apprend que son épouse, ma mère, a été admise à l’hôpital de Toulon pour des contractions. Il est décidé hâtivement et à la dernière minute qu’il ne montera pas à bord de l’hélicoptère mais repartira immédiatement en train vers Toulon. Ses affaires de vol et militaires sont embarquées dans le SF 103 afin de voyager léger.

Le SF 103 disparaît des radars au tiers du trajet, à Pourcieux, aux pieds de la montagne Sainte Victoire, à la suite de la rupture en vol d’une de ses pales principales, causant l’effroyable mort des 8 membres d’équipage ou plutôt 9 car l’ordre de vol n’a pas eu le temps d’être corrigé. Le lendemain, apprenant la tragique nouvelle dans le journal, mon père se rend à Saint-Raphaël au plus vite. Il y retrouve ses copains, notamment le LV Maurice, blême, choqué de le voir vivant, pensant qu’il se trouvait dans la funeste machine. Plus tard, on lui remettra son insigne de Personnel Naviguant numéroté 4060, l’aile et l’étoile fondues, retrouvé carbonisé dans les débris de l’appareil. Certains y verront un coup de chance inouï, d’autres aimeront penser à un acte divin. Cet insigne, il l’a toujours précieusement gardé, bien plus en souvenir secret envers ses défunts camarades qu’en amulette porte-bonheur.

Je le tiens dans la main en vous relatant cette histoire et remercie Dieu d’avoir repoussé l’échéance au 11 septembre 2015.

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Arttu, technicien finlandais spécialiste du Laser, décortiquant les données du vol, découvre que j’ai dessiné un cœur au hasard de nos évolutions. C’est la 2ème fois que cela m’arrive. Voici ce qu’il écrit sur la présentation du soir : « The French romantic strikes again ! »

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JEUDI 23 JANVIER

TRIANGLE ET LEAD

Tiger commence ses évolutions Laser dans « le triangle des Bermudes » entre les trois sites « L », le Polarstern étant en son centre. Christian, le chef scientifique, monte en passerelle et me demande de lui assigner une nouvelle mission. En effet, une fracture de la banquise vient d’être repérée par une motoneige à 3 km, lui barrant définitivement la route car laissant place à un véritable fleuve fulminant d’eau de mer. Il fulmine car sa température est bien plus chaude (-1,5°C) que la glace elle-même (-30°C). Cette différence importante à l’ouverture de la mer crée des courants ascendants qui peuvent même être turbulents et générer du brouillard d’évaporation. Pour les jeunes vosgiens, c’est comme si vous sortiez par 0°C avec votre bol de cacao chaud ou encore plus simplement quand vous expirez dehors avec à peu près des différences de températures similaires. L’hélicoptère doit d’abord faire l’état des lieux de la cassure à basse altitude, puis la survoler plus haut avec le laser afin d’en obtenir une cartographie détaillée.

Lukas me comprend presque du premier coup. Il est ravi de s’évader de sa mission initiale plutôt monotone et d’apporter une aide plus palpable. Je le guide vers la motoneige en secteur horaire par rapport au cap du navire tandis qu’il descend et allume ses phares. Il l’a maintenant en vue. Il me rapporte que l’ouverture fait 50 m de large sur un axe est-ouest. Nous avons déjà survolé ce genre de failles à la pleine lune mais à bonne distance du navire. L’uniformité blanche du sol semble alors avoir été rayée d’un coup de fusain rageur. Il la longe pendant une dizaine de kilomètres puis remonte à 1000 ft, l’altitude de meilleure définition du laser, afin d’en rapporter les images. Depuis quelques jours, le vent a changé radicalement d’orientation provoquant sans doute la cassure en question. Il est hélas au nord maintenant si bien que nous nous éloignons du Pôle.

CORIOLIS ?

D’abord appris dans la Marine afin de délimiter une zone de recherche en mer, j’ai pu vérifier un phénomène tout à fait intéressant : si vous notez l’axe du vent et l’orientation de notre dérive, vous constaterez une divergence de 30° à droite dans cet hémisphère nord. Cette divergence est à attribuer à la force de Coriolis, engendrée par la rotation terrestre.Votre eau s’écoulant dans le puits du lavabo évolue en spirale dans le sens horaire. Dans l’hémisphère sud, c’est exactement le contraire.

Hémisphère nord :Axe du vent + 180° + 30 ° = Axe de dérive.

Hémisphère sud :Axe du vent + 180° - 30 ° = Axe de dérive.

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Pour les équipes scientifiques, l’Océan facilement accessible est une aubaine à ne pas manquer. Les 8 motoneiges sont déployées tirant parfois jusqu’à deux traîneaux pour entasser le matériel d’analyse ou le personnel. D’autres chaussent leurs skis et tractent eux-mêmes leur luge.Depuis la passerelle, j’ai l’impression de voir se former un bouchon routier sur une route départementale ou plutôt la caravane de la ruée vers l’or.

BRIEFING DU SOIR

Christian a laissé sa présentation ouverte sur son ordinateur dans la salle de cinéma afin d’entériner tous ensembles le programme du lendemain. Profitant de son absence, je corrige l’activité hélicoptère ainsi :

Traduction : Réservoir supplémentaire (nous avons cette option qui nous rajoute 200 litres de kérosène dans le coffre soit 40 minutes de vol) et Pôle Nord – Drach Santos (le nom de Victor) – toute la journée – drapeaux français et espagnol.

A sa lecture devant toute l’assemblée, il sourit et tente de me repérer dans la salle. Hélas il invalide ce programme qu’il juge trop facétieux alors que le pôle Nord n’est qu’à 1h15 de vol d’hélicoptère soit 150 nautiques.

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VENDREDI 24 JANVIER

N87 25 – E093 13

Lars, caméraman de l’équipe TV allemande, veut filmer la cassure de la banquise depuis l’hélicoptère et c’est mon tour ! Le briefing météo n’est pas bon : de la brume et quelques couches de nuages à 300 ft (100 m). Nous annulons pour aujourd’hui. En même temps, par -30°C, je me demande si voler en travers, la porte latérale ouverte pour la caméra, ne relève pas de la bêtise ou même de la pure folie…

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SAMEDI 25 JANVIER

N87 25 – E094 14

Deux missions en une. Je dois d’abord trouver puis longer la faille de la banquise avec l’hélicoptère laser puis déposer Arttu, Taniel et Mickael sur le site L3 pour vérification d’un de ses instruments : la « luge » atmosphérique.

A 1000 ft, altitude recommandée pour une meilleure définition du scan, la détection visuelle de l’ouverture n’est pas aisée, compliquée par une visibilité oblique exécrable. Victor et moi sommes penchés en avant, orientant nos phares juste à la pointe du nez, tel l’équipage d’une voiture cherchant la ligne blanche dans le brouillard. Victor détecte le premier l’énorme serpent noir, large comme la Moselle, et me guide précisément pour suivre ses évolutions. A 90 kts (170 km/h), le préavis est court et Victor m’annonce les sens et degrés des virages comme le ferait un navigateur de Rallye : c’est le Paris-Dakar de la banquise ! Je le félicite d’ailleurs car son compatriote Carlos Sainz l’a remporté cette année. Une fois la première trace sol obtenue sur l’écran de contrôle arrière, c’est au tour d’Arttu de me guider pour juxtaposer la passe suivante à 350 m de la première, soit la largeur du faisceau laser.

Maintenant nous suivons la nouvelle craquelure vers le nord. Elle semble se diriger exactement vers le site L3, à 35 km de là, inquiétant mon équipage scientifique. Et si elle avait tout détruit ?

Après 15 minutes de suivi méticuleux, Victor actionne l’allumage de la lampe du site. La faille de 50 m de large n’est située qu’à 1 km à l’ouest du camp : tout va bien donc pour cette fois. J’actionne mon bouton du «Spidertrack » à la verticale du site, envoyant sa position précise par e-mail à Tiger en passerelle, l’informe de notre descente par radio puis me présente face au dernier vent qu’il me transmet.

A 200 ft (60 m), tous phares allumés, je rentre dans une couche de nuages. Tout est blanc uniforme dans nos faisceaux et, ne parvenant pas à obtenir des références visuelles du sol, je remets les gaz. Victor m’aide en chantant nos paramètres de montée : puissance, taux vario, vitesse, assiette, inclinaison. Cette brume a peut-être été créée par la faille en question, permettant le contact de l’océan relativement chaud avec l’air glacé. Sur l’axe de remise de gaz, la brume disparaît si bien que je décide de redescendre à 100 ft en pilotant à vue. Nous retournons ainsi en vent arrière, passons sous la fine couche de nuages sous le vent et nous représentons avec de bons repères cette fois.Je désigne mon choix de point de poser à Victor qui acquiesce. La partie gauche de l’aire d’atterrissage cerclée par des fanions verts semble en effet plus plane. En courte finale, le « White-out » est plus fort que d’habitude si bien que je me jette un peu sur la « DZ » (Droping Zone) avant d’être aveuglé.

Cette fois-ci, aucun passager n’applaudit ! J’essaie de les détendre en annonçant « Touch down » comme pour un essai de rugby, coupe le pilote automatique et place mes turbines au ralenti. Victor trouve la « luge » dans son phare à 100 m sur l’avant gauche et nos trois scientifiques débarquent. Je débriefe avec lui. L’aire de poser forme maintenant une espèce de cuvette dans laquelle la neige s’accumule et amplifie donc le danger de son soulèvement. Nous sommes d’accord qu’à l’avenir, nous devrions plutôt choisir un atterrissage en dehors de ce rectangle de piquets de bois. Je contacte Tiger par téléphone satellite car la radio ne passe plus, lui rends compte de mes réserves de carburant et nous convenons d’un autre appel à l’heure ronde. Après 30 minutes, les scientifiques reviennent un peu tristes car le capteur atmosphérique est définitivement hors d’usage malgré leurs tentatives de réanimation… Nous décollons sans marquer le moindre stationnaire pour éviter le mur blanc et retournons apponter à la base. Quel métier non conventionnel quand-même !

CAMPING

Victor passera la nuit dehors sous une tente ce soir ! Un camping extérieur est en effet organisé par l’équipe logistique. Je ne me suis pas inscrit, préférant une tournée au Zillertal puis le confort douillet de ma cabine. Nous leur faisons nos adieux avec une belle banderole.

A les retrouver le lendemain matin, je réalise que j’ai bien fait : ils sont transis de froid !!!

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JEUDI 30 JANVIER

N87 28 – E 95 18

SAUVETAGE LUGE ATMOS L3

Là c’est la foire d’empoigne ! Tout le monde veut voler. La priorité est le vol laser triangulaire mais il faut aussi remettre en > état la « luge atmosphérique » en panne sur le site L3. La fenêtre météo ne s’ouvre qu’à partir de 15h mais le commandant donne son accord pour > dépasser l’heure habituelle de fin des activités (18h00). Il est donc essentiel de voler avec D-HARK, muni du laser de 100 kg encombrant son coffre.

Il est décidé de commencer par héliporter une équipe sur le site L3 : Micha un veilleur d’ours russe, Taniel, du Colorado, Mickael, de Denver, et une tente car l’opération de réparation durera entre 3 et 4h par -34°C et 20 nœuds (35 km/h) de vent, soit -54°C ressentis.

Une deuxième rotation leur apportera une énorme caisse de 100 kg avec tous les outils et batteries nécessaires. Nous décollons dans une poussière de glace réduisant notre visibilité dans les phares. Après quinze minutes de transit, nous sommes en finale sur la lampe mais la prise des repères sol indispensable à l’atterrissage n’est acquise qu’à 200 ft, au plus tard donc selon nos procédures. J’en informe Tiger en passerelle qui me certifie que la météo va s’améliorer notablement dans l’heure. Nous atterrissons au plus près de la « luge », en bordure d’un soulèvement de plaque la frôlant dangereusement. Le vent de 20 nœuds pousse la neige que je soulève derrière moi mais nous découvrons avec surprise deux nouvelles petites failles de la banquise à cinq mètres sur l’avant. Les patins au contact de la glace, je pompe légèrement sur le collectif afin de vérifier sa solidité et la tasser comme me l’a appris Harold au mois d’août. C’est solide !

MICHA, veilleur d'ours russe 

Micha sort et arme son fusil, suivi par Taniel et Mickael qui débarquent la tente puis les sacs de survie. Nous fonçons sur le Polarstern, embarquons la caisse et les nouvelles lampes rotor tournant et retournons sur le site. La tente est déjà montée, les abritant du vent pour travailler. Victor descend et aide au transport puis nous retournons sur notre navire, coupons et ravitaillons.

Arttu, Ian et Daniela prennent place à bord pour le vol laser. Alors que je demande la mise en route, Tiger me demande de la reporter car le plafond est descendu à 1000 ft. Victor installe à la hâte un chauffage électrique à bord de l’hélicoptère pour maintenir au chaud le laser qui ne peut fonctionner sous -10°C puis nous rentrons nous abriter. Malgré mes deux paires de chaussettes, mes pieds sont glacés, presque engourdis… Je vole avec des chaussures de montagne, les Moon-boots fournies étant inadaptées aux manœuvres des palonniers.

30 minutes plus tard, le plafond nuageux disparaît. Nous décollons avec un magnifique quart de lune orange pourpre juste au-dessus de l’horizon et un ciel étoilé cette fois bien visible. Steffen, le météorologue, me l’avait promis au briefing. La lune se lève enfin ! Nous sommes à 1000 ft, 90 nœuds. Victor a rentré tous les points du triangle dans le GPS et nous sommes parés à faire la verticale du Polarstern pour la première branche, attendant le feu vert d’Arttu, lançant le démarrage du Laser. Rien à faire ! Sa température est à -17°C et l’acquisition du sol par le Laser ne peut se faire malgré de multiples tentatives.

Mince car maintenant je suis trop lourd en kérosène pour récupérer l’ensemble de notre équipe de sauvetage en L3 et tout leur matériel. Je propose à Tiger de rester en vol à puissance maximale pendant 20 minutes afin de retomber sur nos calculs de masse. Il me faut au plus 250 kg dans mon réservoir principal pour être à la masse maximale au décollage de L3 et j’en ai 350. Il n’est en effet pas possible de siphonner notre carburant à bord et notre hélicoptère n’est pas non plus équipé de vide-vite permettant de vidanger du carburant en vol en cas de panne moteur.

Alors que nous réfléchissons tous les deux, Lukas reçoit alors un appel satellite de Micha, demandant une récupération d’urgence car ils observent du brouillard en formation. On appelle cela la loi de Murphy : quand les ennuis commencent, il n’est pas rare qu’ils s’intensifient encore …

Nous déposons nos trois passagers sur le pont et fonçons vers le site à 200 ft (60 m) afin de toujours garder la vue du sol dans nos phares. L’avertisseur lumineux de la radio-sonde est réglé à 150 ft. En cas de brouillard, soit je ralentirais et descendrais plus bas afin de garder des repères au sol, soit je remettrais les gaz. Je contacte Micha sur VHF qui me demande combien de temps ils disposent après mon arrivée. Il a une heure s’il le souhaite.

En fait le banc de brouillard est très localisé et je me pose dans des biens meilleures conditions qu’à la première rotation. Je garde mes turbines au régime de vol pour consommer plus. Notre hélicoptère est chargé comme un bus à touriste. Atteignant 240 kg dans mon réservoir, je place mes turbines au ralenti car il reste la tente à plier puis à embarquer. Ils ont travaillé presque 4 h par ce froid et ont réussi à remettre en marche ce capteur atmosphérique essentiel à leurs recherches. Taniel, les lunettes complétement blanchies, derrière moi, me tend un bout de chocolat en guise de remerciements.

«We are ready behind» m’annonce mon équipe frigorifiée et je décolle la bouche pleine. Nous nous posons à 19h30, ravitaillons, plions puis roulons D-HARK dans son étable. Nous dînons joyeusement tous ensembles avant de débarquer notre chargement dans le hangar. Au debriefing du soir avec l’équipe hélicoptère, je préconise d’éviter à l’avenir de mixer les vols quand une équipe est déposée au sol…

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SAMEDI 1er FÉVRIER

C’est la tempête : des nuages bas, de la neige à l’horizontale soufflée par 40 nœuds de vent. Tout le monde est confiné à l’intérieur car la visibilité rend la veille d’ours impossible. Seules quelques équipes sont exceptionnellement autorisées par le commandant à procéder à quelques vérifications sur les campements voisins. A 11h, le radar détecte une ouverture de la banquise à quelques kilomètres au sud mais elle se referme dans l’après-midi. La neige s’accumule sur les ponts extérieurs.

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ZILLERTAL

Giulia et Bob ouvrent le bar ce soir. En tant qu’équipe «écosystème», ils collent des affiches du thème de la soirée aux endroits stratégiques du navire. Il s’agit de se déguiser en zooplancton ou autre amphipode.

Chacun ne dispose que de quelques heures afin de trouver une solution. En quelques minutes, j’ai une révélation. Je saute sur une bâche orange qui traîne dans le local « treuil ». Elle me couvrira presque totalement.J’emprunte des Snow-boots orange sur le chemin de l’ascenseur. Un foulard offert par Markus, le guide de Haute Montagne ("die bergführer" en allemand), retient mes deux pics à glace de sécurité orientés vers le haut en guise d’antennes.

J’ouvre péniblement la porte du bar et découvre que tout le monde a brillé par son imagination, de la méduse, à la crevette en passant par le poulpe phosphorescent. Victor est déguisé en Coronavirus, les cheveux hirsutes teints en rose, uniquement vêtu d’une toge en sopalin bardée de points bleu vif et lancent des mauvais gestes à l’assemblée. Jörn a placé la coupelle de la tête rotor sur son dos, enfilé un slip « tête d’éléphant », et vissé un casque de sécurité à l’envers sur sa tête. Une piste de danse aquatique est même improvisée. A 1h du matin, il nous faut éteindre la musique et fermer le bar. Une belle soirée pleine d’éclats de rire.

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DIMANCHE 02 FÉVRIER

N87 21 – E094 16

Le jour (la nuit) où tout a raté !

Dans la seule journée d’hier, le vent nous a poussé 8 nautiques (15 km) plus au sud.Ce matin nous déployons D-HARK pour encore le vol du « triangle des Bermudes ». Les -50°C ressentis piquent le visage malgré nos cagoules.

Je monte en passerelle et découvre qu’une de ses vitres extérieures s’est fendue de toute part, par le froid sans aucun doute.

Après une heure d’essais en vol, le laser ne fonctionne toujours pas car la température est inférieure à -10°C dans le coffre. Tiger se résigne à rentrer et nous plions l’hélicoptère dans son nid.

L’après-midi, nous déployons D-HAPS, l’autre hélicoptère, afin d’héliporter trois spécialistes et une nouvelle bouée sismique chargée sur une luge à destination du site L1. Après 45 minutes sur L1, la bouée sismique est opérationnelle mais Ben n’est pas parvenu à extraire les données des autres capteurs sur son portable. Lukas a récupéré ses passagers et se dirige maintenant vers L3 comme prévu.

Sur un autre ton, il m’annonce son retour d’urgence et me demande une autorisation d’appontage au plus tôt car le voyant d’alarme « FUEL FILTER2 » (filtre carburant du moteur droit) s’est allumé.Je préviens immédiatement le chef de quart qui contacte le personnel pompier par VHF. Victor file sur le pont. Le canon à mousse est armé en moins de cinq minutes et je peux donner le vert appontage sans délai.Je scrute son arrivée sur mon écran TV car en effet, en cas d’impuretés dans notre kérosène, le moteur 2 pourrait couper.

Ouf, le voilà sur le pont sans encombre. Le soir, ma montre s’arrête à 18h en panne de pile… Le froid encore. Décidément, tout a raté aujourd’hui et le mois de février débute mal. Ne sommes-nous pas aux limites d’utilisation de nos machines par ces températures extrêmes ou peut-être serait-ce la date en parfait palindrome : 0202-2020 ???

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LUNDI 03 FÉVRIER

N87 26 - E094 19

Dépannage

Victor refait les pleins d'huile des amortisseurs de vibration dont les joints ne supportent pas de telles températures.

Jörn vérifie les 2 filtres à carburant de nos 2 hélicoptères.

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MARDI 04 FÉVRIER

N87 29 - E095 20

Le ciel est limpide comme rarement, aucune particule de glace en suspension, un vent laminaire sans turbulence, la lune nous éclaire et l'horizon est enfin visible sous sa pleine lueur. Victor et moi décollons pour 2h20 de vol laser. J'ai l'impression de faire un vol en simulateur, tellement les conditions sont parfaites.

A 1000 ft, après que nos yeux se soient acclimatés à l'obscurité, nous décelons même les aspérités de la banquise et découvrons l'ouverture noire d'une nouvelle faille à 10 km au nord du Polarstern.

J'en rends compte à Lukas qui surveille ma position AIS sur le radar de la passerelle. Arttu me guide inlassablement pour juxtaposer les passes.


Soudain, Victor me tapote l'épaule gauche et me montre un secteur horaire, les yeux grands ouverts. On aperçoit maintenant au sud-est un horizon rougeâtre, preuve que le soleil existe encore et remonte lentement vers l'horizon. Il est 14° sous l'horizon soit le jour astronomique :

- jour astronomique : soleil entre -12 et -18° par rapport à l'horizon

- jour nautique : soleil entre -6 et -12° par rapport à l'horizon

- jour aéronautique : soleil au delà des -6° par rapport à l'horizon (30 minutes avant qu'il ne surgisse au-dessus de l'horizon en France).

Une étoile différente des autres par sa couleur orangée, sa luminosité et sa position très basse nous surprend. Elle se situe plein sud : c'est Vénus !

Fin de mission, Vert appontage, je questionne Tiger sur mon futur créneau de décollage normalement prévu juste après le ravitaillement pour maintenir le laser à bonne température. Il m'indique que c'est fini pour aujourd'hui car notre base support, à Emden, nous demande un peu tardivement des analyses plus approfondies de notre carburant à la suite de notre allumage du voyant FUEL FILTER il y a deux jours.

Quel dommage ! J'avais trois vols prévus aujourd'hui dans ces conditions idylliques...


Le soir au briefing, j'apprends que Christian et Maria, alors en poste dans la tente du ROV, ont reçu la visite d'un phoque annelé venu prendre sa respiration dans le trou d'immersion du sous-marin. Ils n'ont hélas pas eu le temps de le prendre en photo. Comment font-ils pour vivre dans cet environnement totalement noir avec si peu de poissons ni d'ouvertures de la banquise...

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JEUDI 06 FÉVRIER

N87 37 - E093 51

Mes vols ayant été annulés le mardi, Lukas me propose aujourd'hui de faire le premier, un vol de simples vérifications de la luge atmosphérique tout juste remise en état sur L3. J'en suis ravi évidemment.

Je dois y déposer Taniel, Mickaël et Daniela pendant 15 minutes. La météo n'est pas la même et la visibilité est à nouveau réduite par de la poussière de glace mais nous parvenons, Jörn et moi, à obtenir nos références du sol vers 300 ft. Une seule lampe est visible et l'aire d'atterrissage est détruite par un rift. Je ne parviens pas à localiser la luge dans mes phares.Tant pis, mes passagers la chercheront à pied. En courte finale, pourtant axé sur la direction du vent du Polarstern à 15 nautiques, je me rends compte que les cristaux de glace se déplacent horizontalement de la gauche vers la droite et le soulèvement de neige me fait remettre les gaz.

Un tour rapide à basse altitude afin de me représenter cette fois parfaitement face au vent et nous atterrissons en glissant sur un mètre.

Le paysage a changé, déformé, vallonné par des mouvements de la banquise. Nos passagers débarquent, cherchant le capteur avec leur lampe frontale.Ils le trouvent à 500 m derrière moi, complétement retourné, après avoir surfé une vague de glace, suite à la percussion de deux plaques. La luge pèse pourtant 700 kg.

Mickaël m'indique qu'une de nos lampes est introuvable, peut-être ensevelie sous un bloc ou maintenant à 4400 m de profondeur... Tiger m'appelle par téléphone satellite. Il souhaite que je me pose au plus tard à 13h00 à bord car la météo se dégrade dangereusement. Mince, je ne dispose que de 5 minutes pour récupérer mes passagers. Pour faire au plus vite, je préfère aller les chercher. Nous montons en stationnaire jusqu'à sortir du White-out (environ 80 ft) puis je recule afin de prendre la luge en visuel guidé par Jörn. Nous atterrissons sur une glace plus récente donc sans doute plus fragile. Je la tasse un peu. Ça tient.

Daniela avant et pendant l'arrivée du souffle de l'hélicoptère... 

Mes trois passagers embarquent et nous rentrons à pleine vitesse à 300 ft. Nous appontons à 13h exactement.

C'est la première fois qu'on m'impose un "Charlie", c'est-à-dire une heure précise d'appontage assortie d'une position comme dans la Marine Nationale.Nous devons la respecter scrupuleusement à 3 minutes près sur les frégates mais ici, c'est généralement quand on le souhaite, à condition de prévenir 15 minutes avant l'appontage, temps d'habillage et de ralliement du pompier de l'équipage afin d'armer la canon à mousse.

Le Dranitsyn est à 390 nautiques de notre position et commence à être ralenti par l'épaisseur de la banquise...

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LUNDI 10 FÉVRIER

N 87 47 - E 091 23

La liste des souhaits de vols des scientifiques est longue et la météo nous force à en définir les priorités. La décision de Christian, ce matin, est d'héliporter une équipe de 3 personnes en L3 afin de redresser la luge sur ses patins. Deux rotations sont nécessaires car ils ont besoin d'outils, de sangles, de tires-forts, de perceuses, et d'une tente car ils souhaitent y rester la journée entière.Je décolle avec Jörn, Hannes, Mickaël et Eric Brossier, mon compatriote aventurier. On discute en français comme des pipelettes vers L3 jusqu'à chanter "Non, Rien de Rien..." en vol.

Jörn, assis à ma gauche, me regarde en fronçant les sourcils car il ne comprend pas un mot de ce qu'on raconte. Je lui avoue que c'est un peu une vengeance car c'est exactement ce que j'éprouve quand il parle en allemand ! En finale sur la lampe de l'aire d'atterrissage, nous balayons nos faisceaux afin de repérer notre naufragé car il nous faut atterrir au plus près du traîneau. Mickaël le décèle par une vitre latérale et m'indique le secteur horaire. Pas simple car tout y est retourné, cassé. Je choisis d'alunir parallèlement à une une cassure, à sa lisière, là où la glace est plus épaisse donc sans doute plus solide.

En effet, hier, Lukas a choisi une glace plus accueillante car bien plane mais parce que très récente, de l'eau de mer nouvellement gelée. Il a eu la surprise de s'enfoncer et a dû redécoller immédiatement sous peine de basculer. Je note sur mon horizon artificiel que nous sommes penchés à gauche à 4 degrés sur de la glace bien compacte. On appelle cela un "dévers gauche" dans notre jargon.

J'ordonne alors aux passagers de ne descendre qu'à tribord (droite) car mon mortel rotor est plus bas par rapport au sol à gauche et l'ouverture dangereuse laissant apparaître la mer noire n'est qu'à 3 mètres à bâbord. L'équipe en place, le fusil approvisionné, les sacs de survie et la tente sécurisés, nous testons nos liaisons radio VHF : "Anakonda, Eric, je te reçois fort et clair" m'annonce-t-il fièrement en français toujours. Nous décollons dans un nuage de neige et générons un vent froid puissant qui les oblige à se courber.

A bord nous chargeons le matériel supplémentaire rotor tournant. A notre retour la tente est déjà gréée. Nous embarquons maintenant Arttu et Ian sur le Polarstern afin de déployer une nouvelle bouée sur le site L1. Son antenne émettrice, disposée sur une luge, rentre tout juste à l'intérieur de l'hélicoptère. Le site L1 est moins tourmenté mais une faille d'un mètre de large sépare l'aire d'atterrissage des autres multiples capteurs. Pendant 40 minutes, nous observons depuis l'hélicoptère au sol l'installation de l'engin. Nous restons à proximité pour effrayer l'ours par notre vacarme et ainsi ne pas solliciter encore un autre veilleur armé.

L'opération terminée, nous retournons tous les quatre à bord.Tiger m'informe que l'équipe L3 a besoin de nouveaux équipements. J'emprunte une glacière à l'équipe "ICE" et Taniel leur prépare généreusement des sandwichs ainsi que deux thermos de thé et café bouillants. La liste demandée (batteries de perceuse, mèches de foreuse, caisse à outils) est acheminée dans le hangar tandis que nous ravitaillons en kérosène.Ils ont réussis à vidanger les 100 litres de méthanol nécessaires au fonctionnement de la luge dans deux bidons de plastique et demandent à les transporter de L3 vers la luge de L1. Il s'agit de matière dangereuse si bien qu'il nous faut la transporter sans aucun passager. Tiger a d'ailleurs rédigé tous les papiers réglementaires afférents à ce transport particulier. Jörn peste car il a déjà compris qu'il devra débarquer seul ces lourds bidons sur L1. Je dois en effe