Après 11 mois de voyage, quel est notre état d’esprit face à un retour imminent ? Comment le vivons nous ? Quelles sont nos craintes du passage d’un mode de vie nomade à un mode de vie sédentaire ?


Dans un sens, nous sommes heureux de retrouver notre maison, notre nid que nous avons construit et laissé 11 mois, nos amis et nos familles. Nous n'avons pas peur de rentrer car nous n'avons pas fui notre maison ni notre travail. Rentrer sera l'occasion de donner naissance à d'autres projets liés à la maison, au boulot, au voyage , à un autre mode de fonctionnement... Mais à côté de cela, rentrer d’un tour d'Europe en van de 11 mois n’est pas facile, pourquoi?


"L'appréhension de la routine"

D'une part, nous vivons dans un véhicule de 10 mètres carrés en couple avec un bébé de 2-3 ans et une chienne (pas toute petite avec ses 26kg), soit un petit espace, et pourtant nous nous y sentons bien, heureux et épanoui. C'est aussi notre maison et notre jardin n'a jamais été aussi immense et varié que pendant ces 11 mois. Rentrer, est synonyme de monotonie, routine, reprise du travail à l'identique avant notre départ pour nous deux, reprise d'un rythme où l'on se voit que le soir, début de l'école pour Tom, bref beaucoup moins de temps ensemble et de temps d'épanouissement personnel ce qui peut être effrayant. Habituellement, revenir à la réalité au bout d'une semaine de voyages / découvertes est déjà compliqué alors imaginez au bout de 11 mois.


"Le retour de plein fouet du handicap"

D'autre part, cela fait 11 mois que je ne me suis pas assise dans mon fauteuil roulant électrique, ni eu d'inombrables séances de kinésithérapie... Non ce n'est pas un miracle, non je ne suis pas guérie de ma pathologie génétique héréditaire ! Non je ne souffre pas moins ! Seulement, pendant ces 11 mois, j'ai adopté un autre rythme: pas de réveil le matin (dodo jusqu'à 9h passé), on a écouté mes douleurs et adapté nos journées à elles et pas l'inverse. Le van est mon fauteuil, si je ne peux pas marcher, c'est depuis le van que je découvre les merveilles du monde. J'ai repoussé mes limites chaque jour un peu plus, de 500 m de marche au début de l'aventure je passe à 6-7km en fin. Par contre, après ces 2h de dépassement de soi journalier c'est l'épuisement, l'irritabilité et la récupération prime. Je ne peux pas rester statique, ni dans le piétinement (je suis trop élastique et douloureuse pour maintenir toutes mes articulations en place sans bouger), ce qui signifie que le retour sera synonyme de fauteuil roulant pour pouvoir enseigner et ça moralement c'est difficile à accepter.


"Tout le monde veut nous voir, mais nous ?"

En voyage, on rencontre, on croise beaucoup de monde, mais ce sont des relations de passage, la plupart du temps il n'y a pas d'échange de coordonnées. En rentrant, ça fait du bien de retrouver des attaches durables. Néanmoins, après 11 mois dans notre bulle et nos 8-10 mètres carrés on n'est pas forcément prêt à se sentir "oppressé" socialement et voir tout le monde en même temps... On a besoin de temps pour retrouver nos repères, s'adapter à ce nouveau changement de vie afin de retrouver chacun avec envie.


"Un sentiment de décalage"

Pour finir, 11 mois se sont écoulés, on a avancé, évolué, vu d'inombrables choses, on a développé une vision différente de la vie et en parallèle nous retrouvons les gens qui ont eux aussi évolué mais dans leur routine, loin de toute l'ouverture d'esprit qu'a pu nous procurer ce voyage. On a l'impression de revenir dans le "jus" un an en arrière. Certains comportements négatifs ne nous ont pas manqué et pourtant sont omniprésents : l'inhumanité, le peu d'altruisme, le dédin, la non franchise, la non reconnaissance et non valorisation de l'individu, l'indifférence ... Beaucoup pensent qu'on a été en vacances 11 mois, alors que ce n'est pas le cas, voyager en van sur une longue période est un changement de mode de vie. C’est aussi bien une aventure qu’une philosophie de vie. A notre retour, certains vont s'intéresser à ce qu'on a vécu, d'autres non, certains nous dirons qu'on a de la chance et d'autres nous dirons "oui et alors ?"... La clef : ne pas être déçu du peu d'intérêt que porteront la plupart des gens face à notre aventure. Personne n'attend un recit détaillé alors que nous on crève d'envie d'en parler des heures. Souvent c'est " Quel pays avez vous préféré ? " ou "C’est quoi votre lieu incontournable ? " ou alors "C’était bien ? ", comme si nous étions parti en vacances deux semaines... mais les propos enchaîneront vite sur la vie quotidienne... On aura un réel sentiment de décalage humainement parlant.


En bilan, le retour est forcément une étape difficile à passer, mais il ne faut pas s’empêcher de partir à cause d’une simple appréhension du retour…

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