Carnet de voyage

Objectif Amérique du Sud !

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1 an et demi après s'être rencontrés en Mongolie, nous ne pensions qu'à repartir ! Février 2018, nous re-voilà sur la route. On ne s'engage pas à tout écrire, seulement quand l'envie nous prendra !
Février 2018
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Voyager, découvrir le monde, rencontrer des gens, partager leur vie, faire du bénévolat, du wwoofing, travailler, se déplacer en stop, dormir sous la tente, partir en rando, changer d'itinéraire, être spontané, ne rien regretter, rencontrer d'autres gens, sourire souvent, aimer, être heureux... Il nous est possible de trouver 100 000 raisons de partir voyager. Mais ce que l'on veut le plus c'est de prendre le temps. Essayer de vivre le moment présent. Ne pas chercher à tout voir, se laisser aller au fil des rencontres et trouver des activités utiles et justes, sans penser qu'à nous-mêmes.

Certains diront que l'on fuit. On ne fait que partir à la rencontre de notre monde, pendant notre vie !

Date de départ : 5 fevrier 2018

Date de retour : inconnue !

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Tout avait pourtant si bien commencé ! Nous sommes arrivé à Gibraltar en auto-stop depuis Barcelone dans le but d'essayer de continuer en bateau-stop pour rejoindre les îles Canaries ou l'Amérique du Sud.

Le bateau-stop surprend quand on en parle, mais en réalité c'est un peu plus répandu qu'on ne le crois. Des amis en ont déjà fait l'expérience, et nous avons lu beaucoup de récits fabuleux à ce sujet, de voyageurs qui ont traversé l'Atlantique ou fait le tour du monde sans prendre l'avion.

On en rêvait depuis quelques mois, et nous voilà à la dernière étape avant d'embarquer : Gibraltar !

GBZ, the Great Britain Zone. 

Dix jours auront suffit pour atteindre Notre graal. Dix jours bien remplis où nous passions nos journées entre les 2 marinas de Gibraltar et celle de La Linea, la ville espagnole à la frontière avec ce petit bout d'Angleterre.

Les débuts sont timides, on ne sait pas comment s'y prendre. On déambule lentement sur des pontons en regardant les bateaux comme des monstres des mers. Et puis il nous suffit d'aborder une seule discussion pour que la machine se débride. Ça y est, la recherche a réellement commencée.

Dépose d'affiches, rencontres avec des skippers, mise a jours de nos annonces en ligne, tous les moyens sont bons pour trouver un voilier. Pas facile d'y croire quand on sait que la haute saison de navigation est passée, mais certaines rencontres nous poussent a continuer. On entend que c'est possible, et que tout ce qui tourne autour de la voile n'est qu’une question de temps. Ça tombe plutôt bien on n’est pas pressé !

C'est l'ascenseur émotionnel ! Une annonce en ligne vient de paraître alors on fonce et on y croit ! Puis la réponse est négative ou n'arrive jamais. Le jour d'après on accoste un skipper français qui part pour les Canaries ! Mais son equipage est déjà presque complet, une personne aurait pû être envisageable... On navigue de sentiments en découragements.

Heureusement que nous avions trouvé un endroit ou poser notre sac à dos et dormir (merci Roonie de nous avoir ouvert la réserve de ton restaurant !)

Jeudi 15 fevrier.

Ce matin le baromètre du moral est assez bas. Fatigue, perte de confiance, on traîne la patte. Nous traversons une énième fois la frontière historique pour rejoindre le port espagnol.

C'est ici que nous rencontrons notre capitaine ! Il nous a reperé sur le port et cherche un crew (ou équipage) pour aller aux Canaries. L'improbable est arrivé ! Nous discutons formalités, trajet, météo, et nous décidons d'embarquer avec ce belge de 49 ans qui navigue seul sur son voilier de 12 mètre depuis la Hollande.

Nous découvrons un sentiment que nous n'avions pas vraiment soupçonné, la peur ! C'était pourtant si simple de venir ici, de trouver un bateau et de partir non ? Oui mais en vrai c'est super effrayant.

Lundi 19 fevrier :

Aujourd'hui on ne peut plus reculer, c'est le grand départ. Nous traversons le détroit en évitant les gros cargos puis en commençant notre apprentissage de navigateurs. C'est très excitant, on est entrain de vivre ce que l'on a longtemps imaginé.

On se rempli d'adrénaline et on éprouve le sentiment d'être plus libres que jamais. Nous sommes au coeur de la définition du voyage !

Jusqu'à ce que malheureusement la réalité vire de bord...

On s'attendait à partir pour une semaine minimum, en pensant s'arrêter de temps en temps pour se reposer. C'est alors qu'on découvre une version différente du scénario initial... Notre skipper est très exigeant, nous en demande beaucoup. Nous devons jongler entre la fatigue, le mal de mer et la navigation éveillée toutes les nuits... Cest très dur pour nous deux. Le pire c'est quand on essaye de lui en parler. Suivant sont humeur, ses réactions sont incontrolables. Pas de contact physique heureusement, mais parfois c'est très violent moralement. Après trois jours on lui demande de débarquer, ce qu'il refuse. Sentiment d’impuissance sur l'eau dont nous ne pouvons nous échapper.

C'est finalement contre de l'argent et après quatre jours en mer que nous avons posé les pieds à Safi au Maroc. La police et la douane nous ont accueilli à bras ouvert, et c'est après quelques formalités et un tampon sur le passeport que nous mettons les voiles loin du bateau.

Nous trouvons un petit hotel pour se laver, dormir et surtout manger ! Nous soufflons et positivons. Nous allons bien et nous sommes au Maroc. Ce n'est pas tous les jours qu'on arrive dans un pays sans que ce soit prévu et par un port de pêche !

Nous avons rejoins l'Afrique en bateau depuis Gibraltar. Certain rêve de faire le trajet inverse. Nous nous retrouvons migrants volontaires, échappés de l'Europe.

“Sur le Détroit de Gibraltar, vogue, vogue vers le merveilleux royaume du Maroc”. On s'est beaucoup inspiré d'Abd Al Malik finalement.

Notre projet de traverser l'Atlantique en bateau est tombé a l'eau. Nous n'avons plus envie de tenter l'experience. En tout cas pour l'instant. Nous profitons de cette opportunité de visiter le Maroc, avant de penser à rejoindre l'Amérique du Sud... en avion.

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Mercredi 7 mars 2018 :

Depuis notre arrivée à Safi, nous avons passé deux semaines au Maroc. Nous avons appris et échangé sur la culture marocaine, notamment grâce aux personnes qui nous ont chaleureusement accueilli. Nous avons pu vivre au rythme des locaux, au sein de leur familles ou de leur groupes d'amis. Merci le couchsurfing !

Nous retiendrons beaucoup de notre rencontre avec Simo et Abdeladim qui nous aura particulièrement touchée.

Voici un extrait de notre carnet de voyage du 27 février 2018 :

"Ce soir nous dormons chez Simo et Abdeladim. Nous venons de partager un excellent tajine de pomme de terre (parce qu'il n'y avait plus de légumes) et nous avons discuté, avec Simo surtout, de nos voyages respectifs.

Nous sommes arrivés à Douar Louihat cette après midi en stop depuis Essaouira. Il nous aura fallu peu de temps pour parcourir les quelques 150km.

Nous avons l'habitude du stop tous les deux, mais ce matin on était un peu anxieux. On a sans doute perdu un peu de confiance depuis cette histoire de bateau. Mais tout ça s'est très vite effacé et la magie du stop à repris le dessus !

Et le plus drôle dans tout ça c'est que notre première voiture c'était deux espagnols... des Canaries. Quand on leur raconte notre histoire on se dit quand même quelle ironie du sort !

Simo et Abdeladim sont deux amis. Ils travaillent dans un domaine agricole d'oranges et de mandarines. Un domaine royal paraît-il ! Tous les deux sont au contrôle qualité. Pendant leur mission de trois mois ils travaillent sept jours sur sept pour un salaire mensuel de 2000DH soit environ 200€.

Un habitant du village à déménagé pour leur louer sa maison. 500DH ça va beaucoup l'aider pour continuer à la construire. Son prochain projet est de faire une cuisine.

Simo à tout le temps le sourire quand il nous parle dans son bon français. Il l'a encore plus lorsqu'il évoque les voyages. Il a beaucoup parcouru le Maroc à pieds, mais n'est jamais sorti de son pays. Il n'est pas attiré par l'Europe, il préférerait descendre vers l'Afrique Noire.

Sa passion c'est la photographie qu'il a découvert dans son école de cinéma à Ouarzazate. Il doit nous montrer des photos de ses voyages d'ailleurs. Son appareil il s'en est séparé, faute de moyens. Il a plein de projets Simo, mais il doit les repousser à un peu plus tard.

Avec Zuzana nous sommes émerveillé de cette rencontre. Ce soir nous allons dormir sous un toit où il n'y a presque rien, si ce n'est beaucoup de générosité. Nous prenons une des premières leçons de vie de notre voyage."

Avec Simo et Abdeladim 
Dans leur maison Berbère 

Au total nous sommes restés trois nuits dans ce petit village Berbère. Nous avons échangé sur beaucoup des sujets différents, sur la politique du pays, sa géographie, ses dialectes, son système éducatif.

Nous avons également appris à préparer le thé, cuisiner des tajines, utiliser des épices.

Quelques jours pour autant de moments riches de simplicités.

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Rio de Janeiro, 14 mars 2018

Quand on lit Céline et qu’on suit les aventures de Ferdinand Bardamu (dans Voyage au bout de la nuit) on voyage beaucoup en peu de temps. Exactement comme ce qu’on est entrain de vivre depuis que l’on est partis. En pacifistes, on se déplace et on va à la rencontre de comment elle se passe la vie ailleurs. On passe une partie de notre temps à philosopher sur le pourquoi du comment et à analyser les choses de la vie. Parfois le monde est absurde dans bien des domaines, mais souvent y trouve plein de bonnes choses aussi ! On est un peu moins nihilistes que Bardamu, en somme.

C’est tard que nous arrivons à Rio de Janeiro, après un long trajet en avion depuis Marrakech. Nous avons fait escale à Lisbonne avant de se lancer dans la traversée jusqu’au Brésil en un petit peu plus de 10 heures. Il nous aurait fallut un mois en bateau !

En avion tu as à peine le temps de dire ouf que tu es déjà arrivé. Changement d’heures, différence de température, choc culturel. Tout ça se passe très vite, le temps d’adaptation est court. On s’est beaucoup imaginé une arrivée triomphale en voilier, telles des survivants de l’océan, imitants les premiers explorateurs portugais et célébrants par des cris et accolades l’aperçu des côtes : “terre !” Ça sent un peu la frustration c’est vrai, comme une mission non accomplie qui nous laisse un petit goût “à mer”. C’est le rapport au temps qui nous plaisait dans ce projet !

Mais tout ça est pleinement assumé, et c’est tout de même avec un grand sourire que nous atterrissons au Brésil, évidemment ! Une première en Amérique du Sud pour nous deux, encore un continent au compteur.

Nous vous parlions de l’incroyable accueil reçu au Maroc, nos premiers hôtes Brésiliens ont largement de quoi rivaliser. Nous passons trois jours bien chargés chez Marcos et sa famille. Marcos s’est inscrit sur le site de couchsurfing depuis un mois, et nous sommes ses premiers “invités”. Il nous explique que chez lui tout le monde est stressé à l’idée de nous recevoir ! Nous passerons finalement des supers moments à découvrir Rio en touristes privilégiés, faisant intégralement partis de la famille.

Si on devait retenir qu'une seule chose de Rio, ce serait notre visite d’une de ses favelas. Ces bidons villes où s’entassent depuis des décennies les descendants d’un esclavage dont la seule pensée ne laisse pas indifférent. Favelas ou comment les évènements sociaux et historiques ont conduits certains hommes à créer des villes dans les villes. On se dit qu’elle est loin l’utopie du monde parfait ! Il a peut-être raison finalement Bardamu ? Si on remonte un peu le temps on arrive à imaginer, facile de comprendre pourquoi ici la violence et la drogue règnent (ou ont beaucoup régné).

Nous avons passé quelques heures à Santa Marta, la première favela soit disant “pacifiée” de Rio ( mais en général l'information 'FautPasS'yFier'). Marcos ne souhaite pas nous accompagner, mais il comprend pourquoi on veut aller là bas. Il sait que Rio ce n’est pas seulement les montagnes, le carnaval ou Copacabana, mais il nous met en garde. “On ne sait jamais ce qu’il peut se passer, je connais ma ville”.

Un peu tendus, nous avons finalement déambulé sans problème dans les petites ruelles pentues de la favela. Nous avons pris le funiculaire pour monter, qui est communautaire et gratuit. Certains enfants nous ont indiqué le chemin à suivre, sans forcément demander de l’argent en retour. Ils nous ont même emmené voir la statue de Mickaël Jackson ! C’est à Santa Marta qu’il avait tourné une partie de son clip "They don't care about us".

Sur les hauteurs, la vue sur Rio est incroyable !

Nous avons essayé de rester discrets tout le long de notre “promenade” en respectant au maximum les habitants de la favela. Certains n’apprécient pas du tout qu’on prenne des photos, mais la plupart comprennent que des gens viennent visiter leur quartier.

Nous sommes ressorti de Santa Marta émus et plein d’adrénaline.

Favela Santa Marta 

Voici le lien vers une petite vidéo rapide pour comprendre un peu la situation des favelas à Rio :

https://m.youtube.com/watch?v=1W_zM7koJy8

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Le 24 mars 2018.

Voilà déjà une semaine que nous sommes chez Emiliano, à Maromba. Nous sommes dans la vallée du Rio Preto, plus connue sous le nom de ''Maua''. Il y a une voix officielle pour accéder à cette vallée qui est fermée pour quelques mois. Une partie de la route s'est effondrée à cause des fortes pluies de ces dernières semaines. Il y a un autre chemin pour arriver depuis Resende, mais il faut compter une heure et demie de plus. La route de montagne est magnifique et nous profitons du sympathique chauffeur qui nous a pris en stop pour travailler notre portugais.

Nous sommes surpris car les villages qui longent la rivière sont assez touristiques. Il y a beaucoup de petits hôtels ou de restaurants, sans pour autant entrer dans la démesure. Ici c'est touristiques parce que c'est calme, la rivières et ses nombreuses cascades attirent, et puis surtout c'est la montagne ! Nous sommes à l'entrée du parc national Itatiaia, à la frontière avec l'état du Minas Gerais.

Avant il y avait beaucoup de hippies ici. Aujourd'hui il y a beaucoup de Brésiliens qui aspirent à une vie simple ou alternative.

Emiliano s'est installé ici il y a douze ans. Sur son terrain il n'y avait qu'un seul arbre et rien d'autre. Aujourd'hui il y a une grande maison, une cuisine, plusieurs petites chambres à louer et surtout une multitude d'arbre fruitiers et de plantes.

Nous sommes chez Emiliano en tant que volontaires en 'workaway'.

Workaway c'est une site internet qui cache une grande communauté d'entraide et de volontariat international. C'est un peu comme le 'wwoofing', sauf qu'on n'y trouve pas forcément que du travail en fermes. Certaines personnes ont des projets, et ils font appels à des bénévoles pour les aider. On peut ainsi travailler dans des hôtels, donner des cours d'anglais, participer à la restauration de monuments historiques, prendre part à des projets de reforestation ou encore au développement de fermes de permaculture, etc.

Chez Emiliano c'est simple, il a besoin d'aide au développement de son terrain, de son jardin, et des chambres qu'il loue de temps en temps (Bed and breakfast). Il y a beaucoup à faire en construction, mais aussi en décoration.

Zuzana s'est lancée dans la création de lampes pour égayer un peu les chambres pendant que j'ai participé à la construction d'une nouvelle pièce à vivre.

Nous mettons à profit nos savoir-faire, exactement comme pour un contrat entre patron et employé. Sauf qu'ici c'est plus sain, il n'y a pas où très peu de rapport à l'argent. En général quand tu commences un 'workaway', les relations sont simples, il n'y a pas de pression et la confiance s'installe instantanément.

La manière de faire me rappelle mes expériences en Australie. Cette logique de construction pas vraiment durable mais uniquement réalisé avec du matériel récupéré ou recyclé. Bien souvent les outils sont basiques et il faut un peu s'adapter, mais à la fin on se rend compte qu'on peut tout faire, sans rien gaspiller.

Le workaway c'est un peu comme une grande source d'inspiration. Une banque de données mondiale sur le comment vivre simplement. Le but c'est le prendre les bonnes idées et de les garder pour plus tard !

La contre partie de notre travail, c'est d'être logés et nourris gratuitement. On ne compte pas notre temps mais en général on ne travaille pas plus de cinq heures par jour. Chez Emiliano c'est plus cool. On prend aussi le temps de profiter de la rivière, des montagnes, de cuisiner des produits locaux, de lire ou de faire de la musique. Emiliano a beaucoup d'instruments, et parfois la soirée se prolonge un peu plus que d'habitude.

Au total nous sommes restés deux semaines. Tout s'est très bien passé, mais nous ne ressentons pas forcément l'envie de rester plus longtemps. Pour moi c'est facile il y a toujours à faire en bricolage et construction. Pour Zuzana c'est différent, il n'y a malheureusement pas grand chose à faire dans le jardin alors qu'on était venu au départ principalement pour ça. Emiliano n'a pas de projets concrets et défnis, et l'inertie de l'initiative est parfois un peu dure à gérer.

C'est aussi l'avantage du workaway. Tu restes, tu pars, tu fais un peu ce que tu veux, tant que ça reste dans le respect de l'hôte. Ça profite tout à fait à la logique de la spontanéité !

Nous repartons l'esprit apaisé et remplie de bonne énergie 'naturelle'. C'est sereinement que nous continuons notre chemin à la découverte du Brésil.

www.workaway.info

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Dimanche 1er avril 2018. Plage ''d'Aventureiro''

Aujourd'hui ça fait quatre jours que nous nous baladons sur 'Ilha Grande' (Ila Gràndjé), une île située dans l'état de Rio de Janeiro. Nous sommes partis jeudi matin à pieds depuis Abraão en direction du sud de l'île et de la plage de Lopes Mendes (une des plus belles plages du Brésil paraît-il).

Abraão 

Nous pensions laisser quelques affaires au camping pour avoir des sacs moins lourds, mais ils n'ont pas voulu ! Impossible de trouver quelqu'un qui accepte à Abraão. Heureusement nous rencontrons Romina qui est daccord pour garder nos affaires chez elle le temps de notre absence. Elle dit qu'elle croit à la transmission du bien, et qu'un jour quelqu'un sera là pour l'aider elle aussi. Nos sacs ainsi allégés nous sommes partis pour quelques jours sans trop savoir combien exactement. Nous avons un peu de nourriture, un réchaud et de quoi camper. On a aussi une carte de l'île avec les randos et itinéraires indiqués. Jusqu'à hier nous ne savions pas quel chemins nous allions prendre, mais aujourd'hui c'est décidé, nous allons faire le tour de l'île !

Officiellement ce n'est pas possible, il y a des chemins non indiqués sur la carte et une réserve à traverser. Et puis surtout une partie du business de l'île est accordé aux bateaux-taxis. Il est relativement facile de passer d'une plage à l'autre en déboursant quelques Reals (la monnaie brésilienne). Officieusement il n'y a pas de problème pour faire le tour à pieds ! Hormis les touristes qui profitent des plages (c'est le week-end de Pâques et il y a pas mal de monde), nous rencontrons aussi d'autres marcheurs qui nous confirment dans notre idée. Quand on ne tourne pas de le même sens c'est un agréable échange d'informations sur les étapes à venir et sur les lieux où dormir.

Officiellement, il interdit de faire du ''camping sauvage''. Officieusement, il suffit d'attendre que la nuit tombe pour planter la tente et de se lever tôt le matin... Nous passons ainsi nos matinées à marcher et nos après-midi à profiter de la plage et à se baigner.

L'île est une jungle entourée de plages paradisiaques. Nos heures de marches sont parfois très physiques. Ça monte pas mal, et puis surtout la chaleur tropicale est vite accablante. Mais quand nous partons au petit matin en se laissant guider par les bruits de la forêt, nous apprécions tous les deux ces moments de réflexions intenses. Il est bien connu que la marche à des vertus positives, et c'est à deux que nous profitons de ces temps de méditation.

Depuis quatre jour nous sommes dans la partie la plus sauvage de l'île. Il est possible de trouver à manger mais c'est très cher. Nous essayons d'optimiser nos vivres et de manger en quantité raisonnable. Quoi de plus sain pour le corps et l'esprit qu'un effort physique associé à une nourriture dont on apprécie la moindre miette !? Et quand on se réveille sur une plage vide dont la couleur de l'eau nous appelle pour le bain du matin, on est pleinement conscients que l'expérience est complète !

On avait beaucoup entendu parlé d'Ilha Grande depuis notre arrivée au Brésil, mais on ne savait pourtant pas à quoi s'attendre. C'est assez touristique mais très facile de s'isoler pour autant. Il n'y a pas de routes et pas de voitures, le seul moyen de se déplacer étant à pieds ou en bateau. L'île est relativement propre même si à certains endroits c'est jonché de déchets. Nous n'avons pas acheté une seule bouteille d'eau depuis notre départ, il nous suffit de remonter une rivière pour remplir nos gourdes. L'eau de la montagne est pure et fraîche ! Parfois nos réflexions sont malheureusement tournée vers la folie de ce monde. Comment est-il possible de trouver autant de plastique sur les plages et dans l'océan...

Vendredi 6 avril 2018. Abraão

La deuxième partie de notre tour s'est avérée un petit peu différente. Nous avons rejoint la côte Nord de l'île et commencé notre retour vers Abraão (à l'extrême Est). Contrairement au Sud, c'est beaucoup moins tranquille. Il y a beaucoup plus de petits villages et surtout de touristes. Nous sommes plus proches du continent et des compagnies proposent des tours à la journée. Certaines plages sont très calmes le matin avant d'accueillir un véritable défilé de bateaux l'après midi. Escales de quelques minutes seulement, de quoi patauger un peu et de prendre une quinzaine de selfies. Facile de comprendre pourquoi ici les plages sont bien plus sales.

C'est marrant parce qu'en passant au Nord la météo a changé aussi. La pluie à fait son apparition et nous avons essuyé quelques gros orages tropicaux. Nous avons eu le sentiment que cette partie de l'île ne voulait pas de nous ! Le matin du sixième jour nous sommes au bord de l'abandon ! Fatigués, humides et dégoûtés d'assister à ce souillage touristique...

Mais nous continuons malgré tout de faire des belles rencontres positives et qui nous poussent a continuer. Et puis nos moments dans la jungle restent toujours aussi intenses, et la nature plus humide nous réserve d'autres surprises. Au Sud on voyait des singes dans les arbres, ici on aperçoit des serpents sur les chemins. Il y a beaucoup plus de grosses araignées aussi, qui s'amusent à tisser leur toiles au milieux du passage. À tout ça s'ajoute les moustiques qui piquent trop ! (Ou moustiques des 'trop-piques')

Les jambes sont lourdes, l'aventure est belle ! Et la magie de la nature nous comble toujours autant.

C'est finalement huit jours après notre départ que nous rejoignons Abraão par le côté opposé. Nous célébrons ''À Bras Hauts'' notre petite victoire personnelle. À deux nous avons essayé de suivre le chemin philosophique censé nous mener en haut de la montagne, en cherchant des réponses aux questions que nous nous sommes posés.

Comment vivre en harmonie avec la nature sans pour autant la détruire, comment éviter la surconsommation, comment se contenter d'un peu moins, comment éprouver du plaisir par les choses simples. Comment être modeste tout simplement. Comment réapprendre à se faire petits que nous sommes.

Notre plus grand défi n'aura pas été seulement physique, mais également moral. "Ne pas mépriser celui qui te méprise". Voilà sur quoi nous avons travaillé.

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Le voyage fait naître beaucoup de sujets de réflexions. Le mouvement, l'existence, le temps, la famille, la vie et ses interminables mystères. Il permet de mettre des mots sur quelques-uns de ces sujets mais souvent s'amuse à en créer d'autres ! Nous profitons de cette opportunité de ne pas avoir à rentrer tout de suite pour essayer de vivre au maximum notre voyage et de trouver les réponses à nos pensées. La lecture étant un outil incroyable pour ça !

Nous sommes dans un café à Santa Cruz de la Sierra, en Bolivie, et nous sommes tous les deux entrain de finir le célèbre livre de Gabriel Garcia Marquez : "Cent ans de solitude".

Il peut se passer énormément de chose dans un livre, comme dans une vie ou dans un voyage. Le temps passe et il faut en profiter !

Nous sommes en Bolivie depuis une semaine, après être restés un mois et demi au Brésil. Depuis Sao Paulo, cette immense cité chaotique sans réelle âme mais pleine de bonnes surprises, nous avons traversé le pays en stop jusqu'à la frontière. Nous sommes partis à la rencontre d'autres Brésiliens et nous avons continué de découvrir une partie de leur culture.

Malheureusement nous avons aussi beaucoup appris sur les tensions actuelles. Le pays semble divisé en deux camps, soumis aux lois imposées par la politique abusive de ceux qui gouvernent. Comme dans beaucoup de pays la corruption fait mainmise au Brésil, et certaines décisions arbitraires passent inaperçus par le contrôle de la pensée commune des médias. A force de rabâcher que le pays est dangereux, il devient plus facile de justifier des décisions politiques. Exactement comme en Europe et partout ailleurs !

En stop c'était super intéressant ! Il ne s'est pas passé un jour sans que l'on entende dire qu'il faut faire attention, que c'est dangereux, que la criminalité est élevée et bla bla bla. Nous n'avons pas toujours été rassurés à cause de ça, surtout lorsque l'on cherchait des endroits où planter la tente, mais au final, il ne nous est rien arrivé de mauvais.

Comme à chaque fois nous avons fait des belles rencontres, et nous avons su déjouer les pronostics de la peur. Le monde est rempli de belles personnes, et c'est ce qu'on devrait entendre dire tous les jours ! Comme avec André par exemple, chauffeur livreur de soja et de maïs. Nous avons partagé une partie de son trajet quotidien pendant une centaine de kilomètres. Avec notre portugais de débutant nous avons réussi à nous comprendre, et il était ravi d'écouter quelques-unes de nos anecdotes. Le genre de moment qui nous permet de mettre des mots sur ce que l'on vit et qui nous donne une visions globale du voyage. En arrivant il a insisté pour rallonger son trajet et nous déposer à un endroit avantageux pour continuer notre route. En descendant à la station essence nous avons à peine eu le temps de poser notre sac qu'un chauffeur nous a proposé de nous emmener jusqu'au village suivant. Le mouvement, le temps qui passe... Il y a des jours comme ça ou voyager en stop c'est magique !

Dans le camion d'André ! 

Après avoir traversé des centaines de kilomètres de culture de maïs, de coton ou de soja (le Brésil est le deuxième producteur mondial de ce dernier), nous sommes arrivés à "Chapada Dos Guimaraes". Les "Chapada" sont des formations géologiques de faible altitude et formées par l'érosion, et qui souvent se détachent du paysage. Nous étions au centre géodésique de l'Amérique du Sud ou sur le point géométrique représentant l'exact centre du continent !

 Chapada Dos Guimaraes

L'endroit était calme et magnifique et c'est ici que nous avons fini notre chapitre brésilien.

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Nous sommes arrivés en Bolivie par “l'Oriente”, la partie de plaines basses du pays, et couverte d’une incroyable végétation. Au Nord c’est l’Amazonie, à l'Est c’est le Pantanal, une immense zone de prairies et savanes innondables. Nous sommes passés entre les deux, s’écartant tout doucement du paysage brésilien, et laissant derrière nous la poussière rouge de la terre.

Sans vraiment le savoir, nous avons suivi le chemin des jésuites, missionnés pour “christianniser” les populations indigènes pendant l’occupation hispanique. Il en résulte aujourd’hui des petits villages de bois typiques, aux églises et cathédrales impressionnantes.

San Ignacio  De Velasco

Lentement, nous nous dirigeons vers l’Ouest du pays, lentement nous commençons notre ascension vers “l’Altiplano”. Un haut plateau situé au dessus de 3000m d’altitude, fascinant de beauté et d’histoire, et nettement peuplé par les populations indigènes Quechua et Aymara.

Entre les deux, nous avons découvert Samaipata, où nous sommes restés une dizaines de jours. Loin de représenter l’image qu’on peut avoir de la Bolivie, nous sommes dans une des “Vallées” du pays, coincés entre la chaleur de l’Est et le froid des montagnes de l’Ouest. Ici le climat est doux et la nature verdoyante.

Samaipata 

Samaipata, c’est un village dont le nom signifie en Quechua : “un repos dans les hauteurs”. Traversant les siècles, l’histoire, les invasions des Incas et des espagnols, c'est devenu un petit village “hippie” dont l’énergie particulière attire. Il y a beaucoup de passage, de voyageurs comme nous qui posent leur sacs à dos quelques jours, mais il y a aussi beaucoup de personnes qui un jour ont décidé de rester. Ainsi fleurissent les projets divers et variés de chacun. Vie authentique ou vie alternative, voilà encore un endroit dans le monde où les gens ont soif de simplicité. Ici beaucoup de choses fonctionnent par le biais du volontariat, sans forcément passer par une plateforme comme 'workaway'. Le bouche à oreille suffit, et c’est ainsi que l’offre et la demande s’équilibrent.

Voilà comment Zuzana s'est retrouvée à peindre dans un petit café du centre. Sol, la maîtresse de maison, a aimé ses aquarelles colorées et lui a proposé de créer quelque chose dans son “Café Tango”. C’est comme ça qu’il est décoré, des gens de passage, qui l’espace d’un moment impriment le lieu de leur énergie. Zuzana s'est bien amusée et en contrepartie elle a bien mangé. Un échange de bon procédé !

Café Tango 

Samaipata c’est aussi un village à l’entrée d'un important parc national, le parc Amboró. De part sa géolocalisation, il est soit disant unique, et comporte entre autres une des plus grandes diversité d'espèces d'oiseaux au monde. On y trouve également des ours, des pumas, des reptiles... Tout ce qui donne envie d'y aller pour camper !

Pas facile d’y accéder sans passer par un tour et de payer pour un guide, nous avons donc opté pour une randonnée improvisée. A quelques kilomètres à l'Est de Samaipata, nous avons remonté une rivière au départ de Bermejo. Nous avons marché entre sable et rochers jusqu’à atteindre un premier bivouac rêvé. Quel plaisir de se retrouver de nouveau à marcher ! Après Ilha Grande au Brésil, ça commençait à nous manquer, partir vers l’inconnu, avec tout le nécessaire à notre portée. C’est sûrement dans ces moments que l’on apprecie le plus notre voyage .

Au total, nous avons marché quatre jours, pour trois lieux de camping insolites. Nous n'avons croisé ni Ours ni Pumas, mais nous avons tout de même profité de la beauté et du calme des montagnes. Le parfait combo pour s'abandonner à des activités de peinture, de lecture ou d'écriture.

Dix jours ont passé, il est temps de se remettre en route. Nous partons découvrir une nouvelle facette de la Bolivie.

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19 mai 2018 _ Isla Del Pescado

Le Salar d'Uyuni. Voilà un endroit mystique dont nous avons entendu parlé depuis longtemps, dont on a vu plusieurs photos de la famille ou des amis, mais dont on a vraiment commencé à s’intéresser en s’en approchant sérieusement. C’est comme pour tout finalement, tu ne prends conscience de quelque chose que quand tu le vois avec tes propres yeux. L’égoïsme de l’être humain qui s’associe un endroit au moment même où il y va.

Arrivée en stop à Uyuni 

Voilà presque un mois que l’on est entré en Bolivie, et autant de temps que l’on sait que l’on va passer par Uyuni. Seulement voilà, au Salar comme ailleurs, toutes les belles à voir dans ce monde se payent. La Bolivie est un pays peu cher, où l’on mange, on dort, on vit pour pas grand chose (d’un point de vue de touriste européen en tout cas), mais quand il s’agit d’aller voir les merveilles de la nature, c’est une autre histoire.

Perché à 3600m d’altitude, le Salar est un immense désert de sel de 12500 km carrés, où se perdent quelques îlots hérissés de cactus de 10 à 12 mètres de haut. Un endroit unique, magique, féerique, ou tout ce que tu veux, mais où la seule possibilité de s’y rendre est de payer pour un tour organisé. En moyenne, il faut compter une centaine d’euros pour un tour qui “vaut le coup” avec au moins une nuit dans le désert. Le tourisme 4x4, voilà ce qui plaît dans ce monde. Impensable pour nous malheureusement. Nous n’avons pas envie de nous mêler dans la masse touristique.

Alors voilà, en cherchant un peu, nous avons trouvé notre propre version pour profiter de cet endroit exceptionnel :

UN : Zuzana a trouvé un bus qui part d’Uyuni et qui traverse le Salar jusqu’à un village qui s’appelle Llica. DEUX : nous sommes tombé sur un blog d’un couple Argentin qui a pris ce bus, et qui s’est arrêté au milieu pour aller camper sur une des îles !

Imaginez la scène : nos sacs remplis d’eau et de provisions, nous prenons le fameux bus pour Llica. Départ d’Uyuni à 17h30, nous pénétrons dans le désert au soleil couchant. Incroyable ! 120 kilomètres plus tard, le bus s’arrête. Il est 20h, et pourtant habillés chaudement, nous sommes envahit d’un froid glacial en descendant, et nous posons les pieds sur une épaisse couche de sel. Nous récupérons nos sacs à dos, et puis le bus s’en va. Nous voilà seuls, de nuit, au milieu d’un immense désert blanc. Le sentiment que nous éprouvons tous les deux à ce moment là est quasiment indescriptible !

La lune naissante nous offre un petit peu de lumière, et le ciel dévoile son spectacle d’étoiles scintillantes. Nous apercevons la silhouette de notre île, l’aventure du Salar peut commencer.

"Isla del pescado", cest Sur cette île volcanique que nous avons rendez-vous. Notre objectif est de rejoindre une grotte pour y passer la nuit. Sur le blog, on a lu qu’il est possible de dormir là bas. Et à Uyuni, “Vicky Del Salar”, la bonne étoile qui nous vend les tickets de bus, nous confirme l'information. C’est grâce à elle que nous nous sommes décidés pour cette aventure.

La nuit est glaciale, même si dans la grotte le froid est moins prenant. Peu importe, au réveil le spectacle est saisissant ! Nous ne tardons pas à prendre de la hauteur et à explorer les lieux. Facilement, on se "laisse saler". Le temps passe mais le spectacle est à chaques moments plus fascinant ! Des cactus, vieux de mille ans, nous aiguillent le chemin, et quelques chinchillas surveillent nos pas. Ce sont eux les vrais gardiens de l’île. L’expression “à couper le souffle” n’aura jamais autant pris de sens, et nous atteignons le sommet complètement ivres de joie !

Entre 3000m et 4000m d’altitude on respire parfois difficilement. La nature, elle, inspire plus facilement. Marcher, écouter, écrire, regarder, lire, voyager... La moindre occupation devient intense, plus intense encore. Un simple coucher de soleil devient extraordinaire, tout comme observer un ciel plus étoilé que jamais. Au total, nous sommes restés deux nuits sur ce petit paradis. Autant de temps où nous n’avons cessés d’exprimer haut et fort nos sentiments. Une île déserte entourée par un océan de sel, nous sommes devenus les éphémères propriétaires de ce lieu envoûtant.

Sur le blog, le couple explique qu’ils ont laissé un livre caché dans la grotte. Leur aventure date de 2016, j’ai bon espoir de tomber dessus. J’aurais cherché pendant deux jours, sans rien trouver. Un peu déçu, j’en profite pour attaquer un livre du Norvégien Tomas Espedal : “Marcher, ou l’art de mener une vie déréglée et poétique”. Je l’avais dégotté dans un petit hotel de Potosi deux jours plus tôt. Je m’attendais à trouver un livre dans une grotte, il était en fait caché dans mon sac. Une belle découverte littéraire !

Deux jours après notre arrivée, le même bus est revenu nous chercher. Cette fois nous allons jusqu’à Llica, et nous achevons notre traversée du désert. Le rendez-vous était fixé au milieu de nulle part, à 14h30. Merci Vicky pour ton aide ! 50 bolivianos chacun (environ 6euros), voilà en tout ce que nous avons dépensé. Moindre coût et petit impact écologique, notre aventure du Salar s’est achevée aussi vite qu’elle à démarrée, en ayant le sentiment d’en avoir bien profité.

S’enfuir d’une île en bus, voilà un concept un peu particulier. De toute façon en bateau, ça n’aurait pas marché...

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A peine remis de nos émotions du Salar, on en remet une couche à Sajama. Pas le temps de redescendre : un parc national, des hautes montagnes, peu de touristes, beaucoup d'alpacas. Le décor est sublime !

Nous sommes à 4200 mètres d'altitude, un bon soleil la journée, un froid polaire la nuit. A Sajama, le village, on loue une chambre pour 20 bolivianos (2,5 euros). On a le minimum, on est bien. Une nuit on tente le camping, une seule nuit ! A quelques kilomètres aux sources d'eaux chaudes. Eau à 35°, nuit entre -5° et -10°. On dort très mal, on se baigne très bien !

Et puis on prend un peu plus de hauteur, on part randonner. La marche, que c'est bon de marcher ! Je pense à Tomas Espedal, qu'on pourrait certainement définir comme le Sylvain Tesson Norvégien. Dans son bouquin il cite Jean-Jacques Rousseau :

"La marche à quelque chose qui avive mes idées : je ne puis rester en place ; il faut que mon corps soit en branle pour y mettre mon esprit. La vue de la campagne, la succession des aspects agréables, le grand air. Le grand appétit, la bonne santé que je gagne en marchant, l'éloignement de tout ce qui me rappelle à une situation, tout celà dégage mon âme, me donne une plus grande audace de penser. "

Il a juste oublié de préciser qu'en marchant en altitude on a du mal à respirer ! On mâche des feuilles de Coca. Leurs vertus ont traversé les siècles, et en altitude elles sont efficaces. Mâcher pour mieux penser. Dans son livre, Tomas Espedal voue un culte à la marche à pied :

"Les pensées se modifient en montagne. Elles se font plus rares, plus concentrées à mesure que la montagne s'ouvre et s'agrandit. On pense mieux en marchant dans la montagne."

Après un bel effort commun et trois heures de pensées, nous arrivons au sommet. 5053 mètres d'altitude, notre record ! La vue s'ouvre sur le Nevado Sajama, le plus haut mont Bolivien. Un volcan qu'à défaut d'avoir atteint, on s'est contenté d'admirer.

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La Paz, ville chaotique unique. Elle n'est pas vraiment belle mais elle a un charme fou. Pour se déplacer, soit on prend un minibus, au risque de rester coincer dans le trafic, soit on monte dans un téléférique. La Paz c'est vivant, c'est poétique. On peut tout acheter partout. On se fond dans la masse. Il y a du bruit, il y a du mouvement, et puis d'un coup on s'élève, et c'est calme. Le téléférique en ville c'est magique. On observe, on commente, l'espace d'un instant on prend la ville de haut. La Paz en arrivant d'un parc national c'est dur à supporter, à peine arrivés on souhaite déjà s'en aller. J'ai dis à Zuzana : "Le pire c'est que l'on va s'habituer !" Après trois jours on est habitué c'est vrai. Nous sommes en couchsurfing à El Alto, une ville au dessus et presque aussi grande que La Paz. La "capitale" des Aymaras. Demain on retourne dans le centre encore. Le téléférique on l'aime bien. On est content d'y aller et il y a plein de choses à visiter. On s'est habitué. La Paz...

C'est à La Paz que nous avons terminé notre périple Bolivien. Depuis le Brésil nous avons fait la traversée d'Est en Ouest en découvrant nombreuses facettes du pays. Un mois et demi pour mesurer plusieurs climats, pour apprécier différents modes de vie. La Bolivie est le premier pays à avoir élu un président d'origine indigène : Evo Morales. Depuis son arrivée, en 2006, il a bouleversé l'ancien régime et installé une nouvelle politique sociale. Il a su améliorer l'industrialisation et apporter soin et éducation à la population. Il se dit combattant du capitalisme à l'avantage de la "Pachamama", la terre mère. En dix ans, le pourcentage d'extrême pauvreté à considérablement diminué, faisant du président Morales un homme politique idolâtré.

Aujourd'hui les choses ont changé et le pays semble lui aussi divisé. Nous avons ressenti un profond racisme des populations d'origines hispaniques envers celles d'origines indigènes. Les anti contre les pro Morales. Les controverses du président de multiplient, les accusations de corruption également. Un président que certains Boliviens n'hésitent pas à qualifier de dictateur...

L'Art de la politique 

La politique c'est comme partout finalement, ça va et ça vient en promettant le meilleur. Les gens y croient et votent, mais en attendant il faut bien vivre. Pour un touriste en visite, les problèmes passent presque inaperçus. Entre tous ces conflits les gens ils vivent, dans une mixité culturelle visible, et belle. Partout dans le pays les femmes des peuples indigènes resplendissent de leurs tenues traditionnelles. Elles donnent à la Bolivie une identité unique, et n'hésitent pas à rappeler aux touristes qu'ils ont l'air bien bêtes à porter des vêtements Quechua... fabriqués en Chine.

Beaucoup de bons moments passés dans ce beau pays, on reviendra ! Nous prenons maintenant la direction du plus grand lac d'Amérique du Sud, le lac Titicaca. On a hâte d'être au Pérou ! Mais la Bolivie nous manque déjà...

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A son apogée, l'empire Inca s'étendait de l'actuelle Colombie au Nord de l'Argentine. Depuis la Bolivie nous avons commencé à suivre leur traces, et à Cusco, au Pérou, nous avons atteint leur capitale. Les Incas ont disparu avec l'arrivée des conquistadors espagnols, au 16ème siècle, mais ont laissé un héritage archéologique immense, entouré de nombreux mythes et légendes.

Dans l'histoire, toutes les civilisations sont basées sur celles antérieures. Il en a été de même pour les espagnols, qui se sont appuyés sur les Incas pour développer leur idéologie. La ville de Cusco est superbe : beaucoup de constructions centenaires fondées sur des ruines, qui font encore pâlir les ingénieurs et les tailleurs de pierre.

Cusco 

La société Inca était basée sur l'agriculture. Ils savaient exploiter les terrains accidentés en construisant des terrasses destinées aux cultures et des canaux à l'irrigation. Avant d'arriver à Cusco, c'est dans la vallée de la Colca, au nord de la ville d'Arequipa, que nous sommes partis marcher pour découvrir une partie de cet immense travail de labeur. Des terrasses extrêmement bien conservées et encore aujourd'hui fréquemment utilisées. A l'époque ils n'avaient sans doute pas imaginé que leur travail serait parfaitement adapté pour planter une tente... Depuis le village de Chivay, nous avons suivi le lit de la rivière à la rencontre de la vie paysanne et locale. Il n'y a presque pas de touristes dans cette partie de la vallée et les gens sont très accueillants et ouverts à la discussion. Le chemin nous a mené jusqu'au canyon, impressionnant de beauté. Une profonde inspiration et un moment privilégié pour apprendre à connaître une partie de la culture andine du Pérou.

Vallée de la Colca 

L'empire Inca était tourné autour d'un système de caste. Dans l'ensemble plutôt pacifiste, leur politique n'en était pas moins autoritaire. Il faut dire que leur chef avait l'air d'être Un Cas. Travail dur pour les prolétaires, polygamie pour les élites. Un empire spirituellement tourné vers les astres et vers les Dieux de la terre, dont les nombreux rites de sacrifices animaliers et humains étaient censés les protéger des mauvais sorts. Ils ont construits des temples, des forteresses, des lieux de cultes, mais leur plus grande merveille est sans aucun doute le Machu Picchu. Cette "cité perdue" a été mise au jour en 1911 par un explorateur américain. Bien connue des locaux, dont une famille de paysans s'y était installée, elle a été protégée de la barbarie espagnole puisque quasiment inaccessible. Au 20ème siècle elle est devenue un symbole pour un Pérou en quête d'identité, coincé entre sa cordillère, sa jungle et sa côte pacifique. Une formidable aubaine pour un pays dont le site est devenu le lieu de plus visité d'Amérique du Sud.

Il existe plusieurs anciennes voix Incas qui y mènent, et qui en font de magnifiques randonnées. La plus mythique est "l'Inca Trail", qu'il est impossible de faire sans passer par une agence touristique. La plus longue et plus physique est le "Salakantay trek". On peut aussi y accéder avec un tour moyennant quelques centaines d'euros, ou alors on peut y aller seul et gratuitement. Quel est l'intérêt de payer une petite fortune pour marcher avec un groupe sans avoir le choix d'où dormir ni même d'avoir la possibilité de s'arrêter quand tu veux quand on peut y aller par soit même en étant libre et sans rien avoir à payer ? Pour nous le mystère reste entier.

Nous voilà donc partis pour 5 jours censés nous mener au très célèbre Machu Picchu. Un voyage spirituel à travers les montagnes sacrées des Andes. La marche est intense, et d'entrée nous payons nos quelques excès de Cusco. Comme à chaque randos en itinérance, le premier jour tu te dis que tu ne vas pas y arriver, et puis le dernier tu n'as pas du tout envie de t'arrêter. Marcher, monter, s'arrêter, contempler, s'émerveiller. Le corps s'habitue et l'esprit s'évertue. On devient accro. Le Salkantay trek nous fait passer par toutes les émotions et remplis tous les critères d'une extraordinaire randonnée.

On évite les endroits occupés par les agences et on calcule pour marcher seuls la journée. On aime à être sauvages, sans cesse à la recherche de la tranquilité et de la solitude à deux. Le Salkantay est notre pèlerinage. Les soirs nous nous impregnons un peu plus de la culture Inca, nous avons un livre qui retrace leur histoire. A chaque pas nous en apprennons un peu plus, cinq jours de marche et de médiation sur la route d'une civilisation perdue. Au total, nous avons parcouru 75 kilomètres, passant de 4600 à 2000 mètres d'altitude en peu de temps. De la neige et des glaciers aux bananiers et caféiers. En effet, le quatrième jour nous avons emprunté une partie de la "Ruta Del Café". Une gentille dame nous montre son modeste domaine : de l'arbre à la tasse, il faut compter sept jours pour avoir un café. Tout est préparé à la main, la visite improvisée est courte et passionnante. Un "Express-Haut", et nous revoilà sur le chemin.

La Ruta Del Café 

Le dernier soir, nous sentons monter la pression. Nous dormons sur une montagne en face de notre objectif. A droite on aperçoit le mont Salkantay, qui paraît si haut et si loin déjà. Au fond c'est le début de la cordillère blanche. Au milieu, entre plusieurs îlots dont la vue n'est pas sans nous rappeler Amboró en Bolivie, domine les ruines du Machu Picchu. Au réveil, le temps est brumeux. Une humidité qui tarde à s'envoler, laissant une part de mystère planer sur la vallée. Il n'a pas l'air si aisé de percer les secrets de la cité perdue des Incas.

Jour 5 : le soleil est finalement arrivé, et en face la vue s'est dégagée. Lentement nous descendons vers la vallée de l'Urubamba. Nous empruntons le même chemin qu'Hiram Bingham, arrivé cent ans plus tôt. Nous sommes les explorateurs du jour, et demain nous allons découvrir les ruines du Machu Picchu.

 Vallée de l'Urubamba

La visite du site est à la hauteur de nos attentes. Le jour même, nous avons acheté nos billets, que certains réservent des mois auparavant. L'entrée est limitée à 2500 visiteurs par jour, mais L'UNESCO se bat pour revoir à la baisse ce nombre qui lentement est entrain de détruire ce lieu unique. Depuis Agua Calientes, le village du Machu Picchu, il est possible d'accéder à l'entrée à pied, ou de payer un peu plus cher pour prendre le bus. Nous étions préparés à un bain de foule, ce n'était finalement pas si chargé. En cette période de mondial, il n'y a pas eu Match au Picchu.

Le Machu Picchu 

Cinq jours de randonnée, nous avons l'impression d'avoir mérité notre ticket d'entrée. Jour 6, ultime effort, il nous restait encore 500 mètres de dénivelé pour y accéder. Les jambes étaient un peu lourdes, mais au moins nous l'avons fait à pied. Nous sommes restés plusieurs heures sur le site, attirés par la beauté du lieu et fascinés par son histoire. Une sacrée expérience que nous ne sommes pas prêts d'oublier.

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Au moment où l'on rédige cet article, nous sommes déjà en Colombie ! Depuis le Machu Picchu, nous n'avons pas beaucoup pris le temps d'écrire, et pourtant il s'est passé bien des choses. Voici un petit résumé de nos deux derniers mois, que l'on a principalement passé dans la jungle du Pérou.

Depuis Cusco, nous avons rejoint la côte pacifique du pays, et ce fut pour nous la fin d'une longue période dans les montagnes. Nous avons lentement quitté nos vêtements chauds et commencé à profiter de températures plus clémentes. Le Pérou fait parti de ces pays dont l'ambiance et le climat change complètement d'une région à l'autre.

Pour la petite histoire, à la fin du 19ème siècle, le Pérou a dû se battre pour garder son littoral, très convoité par le Chili. La Bolivie, elle, l'a perdu, se retrouvant enclavé dans les Andes. C'est ainsi que la guerre du Pacifique à éclaté entre ces trois nations. La "Guerre du Pacifique". Quel drôle de nom ! Encore une bêtise contradictoire menée par des politiques ineptes. En tout cas nous, c'est dans la paix que nous sommes remontés le long de la côte. Entre Auto-stop et bus, nous sommes passés par Nazca et ses "lignes" mystérieuses, Huacachina et ses dunes de sables, La capitale, Lima, et son bruit incessant qui n'a pas grand chose à raconter, ainsi que Huanchaco pour sa sympathique atmosphère de petit village de surfeur. Tout s'est passé assez vite. On en a bien profité, mais on ne s'est pas attardé. L'objectif était de remonter plus au Nord, jusqu'à la ville de Tarapoto, située aux portes de la jungle. C'est là que nous attendait une nouvelle expérience de bénévolat.

Océan Pacifique 

Association CERELIAS :

Nous avions rendez-vous dans ce centre de protection des animaux pour un volontariat d'un mois. A Tarapoto nous avons été accueilli par l'association puis organisé notre départ pour la jungle. Situé à deux heures de marche de la ville, nous y avons rencontré Orlando, qui y vit seul depuis douze ans. Ainsi le centre accueille des animaux orphelins, issus du trafic ou qui ont été domestiqués puis abandonnés, et qui pour la plupart ont été maltraités. Dans ce lieu ils sont en liberté, et lentement ils réaprennent à vivre dans leur environnement naturel. C'est le pari qu'a fait Orlando et qui visiblement donne des résultats : il revendique déjà plus de 1000 animaux étant passés par le centre, et qui un jour sont partis, seuls ou en groupe, rejoindre la vie sauvage de la jungle. Le principe est fabuleux et nous avons eu un accès privilégié pour une expérience unique.

Le lieu n'est pas ouvert aux touristes, mais seulement aux bénévoles qui y viennent de temps en temps, et qui participent aux frais de nourriture (Nous avons payé l'équivalent de 5€ par jour). La vie y est simple : pas d'électricité, pas d'internet, on cuisine au feu de bois, on se lave dans la rivière et on boit son eau fraîche. Un véritable retour aux sources qui fait du bien. Les journées commencent tôt et finissent tard, le rythme étant donné par les animaux.

En tout il y en a une trentaine, des Coatis, des Kinkajous, mais la majorité étant des Singes. Auparavant il est aussi arrivé qu'Orlando s'occupe de Paresseux et de Peccaris (les sangliers de la jungle). Ils sont quasiment tous en liberté, sauf certains qui sont "bipolaires". Ils ont parfois un comportement agressif et dangereux pour les autres et pour les bénévoles. Notre travail était varié, mais parfois répétitif, et les premières journées ont été un peu longues. Certains singes peuvent parfois avoir des réactions virulentes et facilement mordre, même si pour eux c'est purement involontaire et seulement pour jouer. De plus, il y en avait une (Valentina) au comportement différent avec les femmes, ce qui n'a pas toujours été facile à gérer. Ainsi, le temps qu'ils s'adaptent à nous et que nous apprenions à les connaître, nous avons passé beaucoup de temps en "cage" dans la cuisine.

Les premiers jours ont donc été un peu difficiles. La communication avec l'association avant notre arrivée ayant été vraiment mauvaise, nous ne savions pas du tout à quoi s'attendre, et certainement pas a passer nos journées enfermés dans une cage (ce qui soit dit en passant est une belle manière de méditer sur le ressenti des animaux qui vivent en zoo). De plus, nous avons recensés beaucoup de faits contradictoires dans les manières de procéder d'Orlando. L'idée n'est pas ici de toutes les énoncer, mais au moins de l'évoquer. Pendant notre séjour nous avons appris à vivre avec un homme très caractériel et qui n'accepte nullement la critique. Or, nous n'avons certainement pas eu la prétention de changer sa façon de travailler, mais au moins de lui faire remarquer. Mais ainsi va la vie, quand on fait du bénévolat on se rend compte qu'on apprend beaucoup sur le fond, mais aussi sur la forme. Dans tous les cas la clé c'est de savoir s'adapter.

Passé un début difficile, les choses ont finies par s'améliorer. Si les relations avec l'homme n'ont pas toujours été bonnes, avec l'animal elles ont été excellentes ! C'est avec les singes que nous avons le plus partagé. Jours après jours nous avons appris à les connaître et à découvrir la personnalité de chacun. La plupart sont jeunes et ne demandent qu'à jouer. Il y a ceux qui mordent pour taquiner, ceux qui fond preuve de jalousie, certains plus réservés et d'autres toujours prêts à caliner. Dans tous les cas il s'est installé une curiosité réciproque, objectivement bien plus développée de notre côté. Nous sommes les descendants de ces primates dont nous ne nous sommes lassés d'observer.

Faire du feu, cuisiner, nourrir les animaux, nettoyer les cages, couper du bois, aller chercher de l'eau... Ainsi nos journées se sont écoulées. Autant de tâches pas très compliquées, quand elles sont sans compter sur une bande de singes toujours prêts à jouer ! L'important, c'est de rester vigilant. On s'est fait peur parfois, on s'est fait mordre aussi, mais de leur part ce n'était jamais mal intentionné. On a vite assimilé que tout ça fait parti du travail, et on a surtout compris qu'il ne faut surtout pas stresser. Les singes sont sensibles, intelligents et malins, mais on apprend vite à les cerner. Les caresser dans le sens du poil pour développer une complicité. Au fil des jours nous avons multiplié le contact et les activités, et un incroyable échange s'est installé. C'est comme ça que nous en avons vraiment profité.

Nous avons appris beaucoup de choses sur leur histoire, leur mode de vie, leur race, leur alimentation. Nous avons également appris qu'ils sont acteurs de la reforestation. Il y a des années, le lieu à été nettoyé pour cultiver, puis plus tard contaminé (Il y aurait eu des laboratoires de drogues utilisant nombreux produits chimiques). Aujourd'hui, un long et lent processus de réhabilitation s'est installé. Avec leur selles, les singes répandent les graines des fruits qu'ils consomment, et s'en vont faire pousser des fruitiers pour les générations à venir. Un intéressant cercle vertueux biologique.

Il est vraiment difficile de rester insensible au charme de ces petites bêtes, mais parfois facile d'oublier qu'ils sont sauvages. Il est bien de jouer avec eux, parce qu'ils sont jeunes, mais le travail c'est de se fixer une limite. L'objectif pour l'animal est de retourner vivre de manière autonome dans la jungle, et non d'être dépendant a l'humain. Il nous est malheureusement arrivé plusieurs fois de voir des singes sur les marchés, les mêmes qui plus tard sont maltraités puis abandonnés. Ainsi on se demande comment l'homme peut-il oser vouloir se les approprier ? Quel égoïsme nous pousse à vouloir toujours exploiter ? Le monde va mal, mais il faut positiver. Il est bon de vivre en forêt, il est bon de se connecter avec la nature et il est bon de rencontrer des gens qui agissent dans le bon sens.

Nous ne sommes finalement restés que deux semaines dans le centre, les problèmes de communications ne s'étant pas vraiment arrangés. Nous étions plusieurs bénévoles à partir plus tôt que prévu, tous déçus du personnage et de certains points de l'association. Ça ne s'est malheureusement pas bien passé avec Orlando, mais nous respectons énormément sont travail. Nous n'aimons pas la personnalité, mais on ne peut avoir que de la compassion et la sympathie pour un homme qui a décidé de dédier sa vie pour ces animaux. Ce contraste et la cause de notre départ anticipé serait un peu long à expliquer (par écrit en tout cas), mais nous ne l'avons pas regretté. Nous garderons évidemment un souvenir positif de cette nouvelle expérience.

Aujourd'hui cela fait plus d'un mois que nous avons quitté le centre. Les noms, les sons, la présence des singes nous manquent... Pourquoi ? En vidéo, y'a pas photo !

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Nous avons quitté Tarapoto pour aller jusqu'à la petite ville de Yurimaguas, située à un centaine de kilomètres plus au nord. C'est à partir de là que nous avons commencé à voyager en bateau, avec comme premier objectif de rejoindre la ville d'Iquitos.

Dimanche 5 août :

Nous naviguons depuis environ deux jours entre Yurimaguas et Iquitos. Nous avons atteint le point sur la carte où il n'y a plus de routes, et nous continuons ainsi notre progression en bateau. Le fleuve est l'unique possibilité de se déplacer, et c'est ici que commence l'immense forêt amazonienne.

Nous avons embarqué au port de Yurimaguas, où nous sommes entrés dans l'incroyable système de communication fluvial du Pérou. Savoir sur quel type de bateau, à quelle heure est le départ ou quel jour on arrive est impossible à anticiper. On monte sur un bateau, on s'installe, on attend, on regarde les hommes charger, décharger, transpirer. Le port est une plateforme où transitent tout types de produits, en provenance ou en direction d'Iquitos et des villages qui bordent la rivière. La société de consommation semble également avoir contaminé les communautés de la jungle. Ici aussi on commande sur Amazone.

Port de Yurimaguas 

D'un coup nous sommes sorti de nos rêveries, on apprend qu'il ne faut pas rester, à l'endroit même censé être réservé aux particuliers vont bientôt être apportés 2000 poulets... C'est tellement drôle quand on y repense ! On est loin de l'image ou le passager attend tranquillement de se faire contrôler son billet électronique avant le départ... Pour voyager en bateau au Pérou, il ne faut pas être trop exigeant, et pas trop pressé. Ça tombe bien on a le temps ! Et quand certains diraient qu'ils le perdent, nous on a l'impression de le gagner. C'est ça la magie du voyage, c'est concrèt, et c'est comme ça qu'on l'aime ! Et puis toute cette attente, cette confusion, on le prend comme un droit d'entrée, un permis de naviguer. Il faut mériter de pouvoir voyager sur le mythique fleuve Amazone.

On fini par trouver une autre embarcation. Le bateau s'appelle Kiara, chargé à bloc, et le départ est prévu au lendemain matin. Il n'y a pas beaucoup de places, mais on se retrouve quand même à une quinzaine de voyageurs. Le bateau n'est pas adapté pour des passagers, mais chacun y a finalement trouvé une place pour installer son hamac.

Notre bateau Kiara 

Nous voilà en route, ou en fleuve, pour un voyage de deux ou trois jours. Comme pour le reste, on ne sait pas, on verra. Nous sommes sur le Rio Marañon, qui devient Fleuve Amazone quelques miles avant Iquitos. On l'a beaucoup imaginé, et d'un coup nous y voilà. Nous naviguons sur des eaux qui traversent la plus grande forêt de la planète, le poumon de la Terre. La respiration s'accélère et on a du mal à calmer notre excitation. Le paysage défile sous nos yeux, offrant un spectacle intense de beauté. Il est imposant ce fleuve, et depuis nos hamacs nous apercevons son lit s'élargir. On sait que si l'on continue comme ça, on arrivera jusqu'à l'océan. Chacun y médite à sa façon, le bateau étant un formidable outil de concentration.

On observe, on se ballade, on discute, on se repose, on dort, on lit. L'ambiance est sympathique et chacun y trouve son occupation. Nous n'avons pas le même itinéraire ni la même destination, mais le temps de quelques heures on partage la même embarcation. Ensemble nous découvrons une partie de la vie de l'Amazonie.

Et puis au milieu de la troisième nuit, nous arrivons à destination. On était vraiment bien sur ce bateau, on aurait pû rester une semaine ! On est presque déçu d'arriver... On se rassure, l'idée c'est de passer quelques jours à Iquitos, avant de continuer vers un nouveau lieu et sur un autre bateau.

IQUITOS :

Une cité coloniale bâtie au milieu de la jungle. Historiquement, ce sont les jésuites qui l'ont fondée, pour venir se mettre à l'abri des indigènes réticents à la christianisation. Elle est rapidement devenue la capitale du Loreto, le département Nord du Pérou. Avec l'apparition des bateaux à vapeur, les voies fluviales se sont ouvertes à la navigation, facilitant le commerce et le développement de la ville. En 1880 a débuté le boom du caoutchouc, donnant à Iquitos une tournure historique. Des riches compagnies européennes s'y installent et commencent a développer leur business d'exploitation. L'age d'or de l'hévéa va durer trente ans et donner à Iquitos une nouvelle image de ville riche et prospère. Les "Barons du Caoutchouc" construisent des grands hôtels et des belles maisons pour y installer leur famille. Les colons s'enrichissent pendant que les indigènes crèvent sous le travail. C'est tout le poids que porte aujourd'hui Iquitos, qui doit le gros de son développement à trente années d'esclavagisme intensif.

Au milieu des années 1910, l'hévéa s'est exporté, et des plantations ont vu le jour en Asie. Son exploitation s'y est avérée bien plus rentable que dans la jungle, et le succès du caoutchouc s'est ainsi effondré presque aussi vite qu'il est arrivé. Iquitos est redevenue une ville oubliée du monde.

Décrire l'ambiance qui règne à Iquitos n'est pas chose facile. 400000 habitants pour presque autant de "moto-taxis", voilà une première image bien représentative. Le centre est joli, et la ballade du "bord de fleuve" très agréable. Les anciennes maisons coloniales datant de l'époque du caoutchouc sont une des particularités principales. Certaines ont été rénovées puis transformées en restaurant ou café, mais la plupart sont abandonnées. Leur architecture de style européen contraste avec la qualité de construction péruvienne, donnant à la ville une atmosphère étrangement attractive.

Autre aspect d'Iquitos, son interaction avec le fleuve. En saison sèche, Juillet-Août, l'eau est très basse et assez loin du centre. Mais avec les fortes pluies, le fleuve monte de plusieurs mètres et donne à la ville une tout autre image (que l'on a malheureusement pas pû apprécier). Les gens du fameux quartier de Belen savent s'adapter à ces changements, vivants sur des maisons flottantes ou des constructions sur pilotis.

Le quartier de Belen 

En arrivant à Iquitos, nous avons eu la chance de croiser une amie rencontrée à Samaipata, en Bolivie. Nous savions qu'elle habitait là, mais nous n'avions pas de contact. Despina est grecque, et passe une grande partie de sa vie à voyager. Elle est vit à Iquitos depuis six ans, et fait parti de ces étrangers qui sont tombés sous le charme de la région, attirés par le pouvoir de la jungle. Elle nous a ouvert quelques portes de la ville, dont celle d'une de ces anciennes maisons datant du début du 20ème siècle. Un genre d'auberge espagnole au Pérou. Nous y avons passé une superbe semaine, profitant de la vue et rencontrant des belles personnes.

Nous avons également pu découvrir les alentours d'Iquitos et passé quelques jours plus au sud au bord d'une rivière. Nous y avons entre autre profité d'une des plages qui se découvre seulement en saison sèche. Autre ambiance, nous sommes aussi allés passer quelques jours dans la forêt, au sein d'une communauté. C'est ici que nous avons eu l'opportunité de se "reconnecter" avec la nature. Nous avons pris du temps pour nous, profité du calme, et beaucoup échangé avec les personnes présentes. De part cette expérience, nous avons découvert l'univers du chamanisme et des plantes natives de cette partie de l'Amazonie. Il est peut-être être là le vrai secret de la jungle, enfouis dans la forêt et bien gardé par ses habitants. Une incroyable force de la nature dans un équilibre envoûtant.

Bien trop long à expliquer, mais on sera ravis d'en discuter !

Nous pensions passer "quelques jours" à Iquitos, nous y sommes finalement restés trois semaines. C'est sans doute encore trop court pour sentir toute l'énergie qui s'en dégage, mais nous en avons eu un bel aperçu. Une ville dans la jungle, ce pays n'aura pas fini de nous étonner.

Et puis comme prévu nous avons embarqué sur un nouveau bateau. Cette fois-ci le fleuve nous aura emmené jusqu'à la triple frontière Pérou/Brésil/Colombie. C'est ici que s'est terminé notre périple péruvien, trois mois après y être arrivés. Et alors c'était quoi le meilleur, la montagne ou la jungle ? Il fait bon vivre dans les hauteurs, mais en Amazonie aussi, c'est vraiment coule la vie.

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Après le Brésil, la Bolivie et le Pérou, nous voici arrivés en Colombie ! Notre quatrième pays d'Amérique du Sud, où nous voyageons depuis déjà plus de six mois. C'est incroyable comme le temps peut façonner les choses. Avant d'arriver au Brésil, nous ne connaissions rien ou presque de ce continent dont on ne parlait qu'au futur, en s'imaginant de nombreuses aventures, et aujourd'hui on peut retracer notre route sur une carte, et parler de ce que l'on a vécu au passé. Nous sommes les nostalgiques d'un voyage révolu et les éternels excités des projets à venir. Mais le temps qui passe n'est pas toujours qu'un inconvénient, et souvent il nous apprend.

BOGOTA :

Nous voici arrivés dans la capitale Colombienne, où nous sommes restés chez José Alfredo qui nous a accueilli en couchsurfing. Nous avons passé quatre jours a déambuler dans cette ville dont nous avons apprécié les charmes et la beauté. À Bogota nous sommes sur les pas des Muisca, une ancienne civilisation qui connut son apogée à la même époque que les Incas, mais qui était, elle, réputée pour vivre en paix. Avec l'arrivée des conquistadors espagnols cette tranquilité a changé, et au fil des années ils ont fini par disparaître. Débarquement des colons, exploitation des indigènes, bataille pour l'indépendance sur fond de Simon Bolivar... On commence à connaître l'histoire qui se répète !

Bogota est architecturalement marquée du sceau espagnol, et nouvellement décorée par des peintures censées. Elle a traversé l'histoire, pas toujours joyeuse, et se bat pour se défaire de ses étiquettes qui lui collent à la peau. Non cette ville n'est plus seulement que le berceau des guerrillas, des cartels de drogues ou des groupes paramilitaires, elle est aussi un haut lieu historique et culturel qu'il est plaisant de découvrir. Malheureusement c'est vrai que l'on ne s'y sent pas toujours en parfaite sécurité, et il y a beaucoup de quartiers à éviter, reflétant comme un symbole la situation dont le territoire cherche à s'extirper.

Comme pour beaucoup de pays d'Amérique du Sud, la Colombie doit une partie de son indépendance à la révolution française et à ses philosophes, la littérature ayant joués un rôle déterminant dans son émancipation. Aujourd'hui à Bogota on trouve énormément de Street Art et des librairies abondantes, porteurs d'influence et d'éducation.

Bogota 

Chargés de nouveaux livres, nous avons ensuite quitté Bogota en direction du Nord de la Colombie et de la mer des Caraïbes. Il y a la haut une ville qui s'appelle Santa Marta, et plusieurs petits villages autour, dont nous avons beaucoup entendu parler. Nous sommes parti en auto-stop, et nous avons retrouvé un plaisir que l'on avait perdu dans les deux pays précédents. En effet, en Bolivie et au Pérou, on a passé beaucoup de temps sur le bord de la route à attendre une voiture ou un camion qui parfois n'est jamais arrivé. C'est comme ça aussi que l'on découvre la personnalité d'un pays, son identité. Au Pérou, et plus encore en Bolivie, le touriste européen est une potentielle source de revenu, et il n'y a pas ou peu de contact sans arrières pensées liées à l'argent. Ainsi, associé à des longues distances en haute montagne, voyager en stop n'est pas une chose vraiment aisée, et l'on y a perdu l'envie et le courage.

En Colombie, c'est le plaisir retrouvé ! De Bogota nous avons emprunté une petite route agréable à la découverte de l'histoire coloniale, dans une vallée coincée entre les cordillères orientale et centrale du pays. Nous avons ainsi pu découvrir Villa de Leyva et Barichara, aujourd'hui considérés comme deux des plus beaux villages Colombiens.

Il nous a été relativement facile de trouver des chauffeurs, et qui ont brillamment joué leurs rôles habituels : certains veulent te déposer sur un endroit plus facile, quand d'autres s'improvisent guides touristiques le temps d'un trajet...

Vamos a la mar ! 

... Et il y a aussi ceux qui t'invitent au café, ou parfois même qui te proposent de venir passer la nuit chez eux. Aeorita et Hernando ont été heureux de nous ouvrir les portes de leur paradis. Ils ont beaucoup voyagé dans leur vie, vécu en Europe, traversé la France en stop, etc. Mais pour eux rien ne peut aujourd'hui égaler la vie en Colombie. Dans leur jardin ils ont des mangues, des avocats, des goyaves, des citrons, du cacao, du café ! Et qui poussent en abondance toute l'année. Proche de la ligne de l'équateur, ici il fait tout le temps chaud, et les fruitiers sont constamment en activité.

La Colombie est un pays qui "va bien", dont l'économie est bonne et qui doucement est entrain de s'extraire d'un passé très violent. On ne peut malheureusement pas en dire autant du Vénézuela, le voisin, qui est lui entrain de vivre l'effet complètement opposé. Depuis quelques années, la vie semble y être devenue impossible et extrêmement dangereuse, poussant la population des classes inférieures à fuir leur pays. Officiellement, il y aurait plus d'un million de vénézuélien passés en Colombie. Officieusement, il y a aussi tous ceux qui voyagent sans papiers...

En remontant joyeusement le pays en stop, nous avons été directement confronté à cette triste situation. Sur la route, nous avons croisé des gens, des familles, des enfants, poussés à l'exode pour aller vivre ailleurs. Quand on leur demande où ils vont, ils répondent à Bogota, au Pérou, à Lima... Ils sont en route pour leur Eldorado, à la recherche d'une nouvelle situation plus vivable que dans leur propre pays. Politiquement, la Colombie n'est pas du tout favorable à ce flux migratoire, mais humainement la population semble sensible à la situation de ces clandestins. Nous avons assisté à des élans de solidarités qui prouvent que les gens ne semblent pas tous indifférents à cette terrible situation.

Nous n'avons pas arrêté de voyager pour autant, mais toutes ces rencontres nous ont profondément touchées. Que dire à tous ces gens, qui voyagent contre leur gré, quand nous nous balladons tranquillement en Amérique du Sud depuis plusieurs mois ? Comment la situation économique d'un pays peut-elle sombrer à ce point ? Est-ce le prix à payer quand un gouvernement se bat trop fort contre le capitalisme ? Tout ça est très triste, et nous souhaitons beaucoup de courage à tous ces vénézuéliens aujourd'hui sur la route.

Nous avons finalement atteint la côte nord du pays, où nous avons découvert une partie des hauteurs de la Sierra Nevada, et où nous avons profité de la mer des Caraïbes pour se rafraîchir. Entre la plage et le café, nous nous sommes plongés dans la culture caribéenne de la Colombie.

À Minca et Taganga 

À Santa Marta nous avons atteint le point sur la carte le plus haut de notre voyage. À partir d'ici nous allons redescendre de l'autre côté du pays, pour aller jusqu'en Équateur, d'où nous rentrerons en Europe. Notre retour étant maintenant prévu pour la fin novembre.

Plus proche de la fin que du début... Mais on continue d'en profiter !

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Combien de temps faut-il pour découvrir un pays ? Combien de temps est-il nécessaire pour le connaître ? Pour commencer à le comprendre ? Pour saisir son identité ? Il faut certainement compter plusieurs années pour ça, mais du coup combien faut-il de vies pour connaître le monde entier ? Pour parcourir la terre et découvrir ce que la vie a semé ? Voilà presque deux mois que l'on se ballade en Colombie et l'on commence tout juste à s'y sentir vraiment. Il faut dire que notre séjour au Pérou nous a marqué et qu'il nous a été difficile de s'en détacher ! Plus on voyage et plus on a envie de voyager. Plus on découvre un pays et plus on a envie d'y rester.

Depuis la côte caraïbe, nous sommes redescendu en direction du Sud du pays. Nous avons trouvé là-bas un volontariat. On a eu de nouveau envie de se poser quelque part pour quelque temps. Sur la route on a passé quelques jours à Cartagena, à Medellin, a Cali, en apprenant un peu plus sur l'histoire et sur l'art du pays. On a pris un cours de danse aussi ! Cali est la capitale Colombienne de la salsa. Nous avons quitté la chaleur étouffante de la côte pour rejoindre la température idéale du centre. Le climat change suivant l'altitude, et entre deux massifs il y fait bon toute l'année. Medellin étant joliment surnommée ''la ville au printemps éternel''.

Cartagena, Medellin, Cali 

Voyager c'est difficile parfois, d'être constamment sur la route avec son sac sur le dos, on visite des lieux, on admire des paysages, on rencontre des gens, mais est-ce qu'on voit vraiment du pays ? Jack Kerouac en a aussi passé du temps sur la route. Le leader de la ''Beat Generation'', précurseur du mouvement hippie, sait parfaitement d'écrire certains sentiments que tu ressens en voyage :

Il a mit son engin en marche sans guère m'accorder d'attention. Comme ça je pouvais délasser mon âme épuisée, car c'est un des mots les plus redoutables de l'auto-stop que de devoir converser avec des gens innombrables, leur faire sentir qu'ils ne se sont pas trompés en vous cueillant, quasiment même les amuser, toutes choses qui demandent un grand effort quand vous vous tapez un voyage sans jamais descendre à l'hôtel.

C'est évidemment trop pessimiste pour assimiler son expérience à la nôtre, surtout que le stop à encore une fois merveilleusement bien fonctionné pour nous, mais c'est quand même drôlement bien résumé ! En tout cas son livre (Sur la route) est passionnant. Il est plein de vrai, et il donne envie de voyages, plus encore, et de boire du whisky aussi. Bref tout ça pour dire qu'en voyage il est bon de trouver un équilibre, et que cet équilibre peut facilement se trouver dans le volontariat. Il donne le plaisir de poser son sac pour un temps, offre des rencontres moins éphémères, et surtout il apporte une énergie nouvelle, qui aide à mieux se remettre sur la route par la suite.

Nous venons de passer deux semaines chez Luisa et Charles, non loin du village de San Augustin. Nous y avons découvert la vie locale et culturelle de la région de l'Huila, basée sur l'archéologie et le café. Elle est colombienne, lui est français, et ensemble ils attendent une petite Elena qu'ils nous ont déjà présenté. Ils ont acheté leur ''finca'' (leur ferme) il y a un peu plus d'un an, et accueillent depuis des volontaires pour les aider dans leurs tâches quotidiennes. Ainsi nous avons participé à la collecte des fruits, du café, et aidé au jardin. À deux, nous leur avons également construit un lit de bébé ! J'ai aidé Zuzana a le dessiner et elle m'a aidé à le fabriquer.

Des palettes et du bambou  !

Après ça, j'ai participé à la restauration de leur ''cabane''. Elle est construite depuis six mois pour être louée, mais le toit a déjà eu besoin d'être refait. Passer quelques problèmes techniques et une organisation un peu chaotique, nous avons attaqué le ''chantier''. Quel plaisir de remonter sur un toit ! Une première sur une maison entièrement réalisée en bambous. J'ai travaillé avec deux colombiens et découvert les techniques de constructions locales... Le travail esthétique n'étant pas toujours leur spécialité. J'aurai finalement réussi à m'imposer sur quelques détails de finition !

Et pendant ce temps là, Zuzana s'est adonnée à son activité préférée, la création de lampes en matières recyclées...

Rayons de lumière 

Nous avons partagés plusieurs jours avec Christina, une bénévole allemande qui nous a rejoint. Ensemble on a travaillé, et ensemble on a visité. Pendant notre temps libre, nous avons pu partir à la découverte des alentours de San Augustin, la région étant connue pour ses nombreux sites archéologiques. Dans le courant du 20ème siècle ont été découverts plusieurs sites funéraires et des centaines de statues en pierre. Il y a plusieurs explications concernant leur significations, mais seulement des hypothèses concernant l'origine des habitants. Il y a plus de 2000 ans, vivait ici une civilisation aujourd'hui inconnue...

Comment une telle civilisation est-elle venue s'installer en Colombie et comment a-t-elle disparue ? D'où viennent les tailleurs de pierre et jusqu'où se sont ils étendus ? Pourquoi se livraient-ils à un tel travail de labeur pour construire des tombes et des statues pour leurs morts ? La visite du parc est belle et intéressante. Il n'existe aucun écrits sur cette civilisation, les archéologues ont donc un bel avenir devant eux.

Dessin de Zuzana 

Ça c'était pour le côté historique de la région, mais il y a aussi beaucoup à raconter en géographie ! San Augustin est située sur un massif au nord de la cordillère des Andes, se séparant ensuite en trois autres cordillères qui remontent la Colombie. Elle est bâtie sur un énorme réservoir d'eau, donnant naissance aux cinq principaux fleuves du pays. Deux s'en vont en Amazonie, un vers le Pacifique et les deux plus grands, le Cauca et le Magdalena remontent vers le Nord. Depuis un des sites archéologiques, nous avons pu voir ce dernier couler tranquillement au fond de la vallée. Le même que l'on a traversé quelques semaines plus tôt à Barranquilla, large et imposant, juste avant qu'ils ne se jette dans la mer des Caraïbes.

La vallée du fleuve Magdalena 

Un volontariat pour poser son sac, pour avoir une activité, pour approfondir les rencontres et pour se donner un nouvelle énergie pour la suite. On a eu tout ce qu'on voulait, il est temps de se remettre en route !

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On n'aura jamais mangé autant de fruits que pendant notre séjour en Amérique du Sud. Un véritable festin de saveurs sucrées ! Maracuya, manguo, granadilla, pitaya, guanabana, cherimoya, Papaya, tomate de arbol, camu-camu, zapote, piña, banana, lulo, uchuva...! Autant de fruits exotiques qui poussent en abondance presque partout où l'on est allé et qui nous ont comblé de bonheur tout le long de notre chemin. A l'image de la Goyave, le fruit invite lui-même au Voyage, par le plaisir qu'il procure quand il est consommé dans son environnement naturel. On entend par là qu'il a certainement plus de goût quand il est cueilli dans l'arbre, ou acheté sur place, que quand il a traversé l'Atlantique pour venir gonfler les rangs des supermarchés européens.

Neuf mois passés sans un pépin sur le "nouveau monde", et nous sommes à quelques heures seulement de notre retour sur terre. En cette fin du mois de novembre, notre périple s'achève à Guayaquil en Équateur.

Nous avons rejoint le pays depuis la Colombie, et nous sommes tranquillement descendu en direction du sud. Nous avons emprunté la "route des volcans", et nous avons retrouvé l'ambiance si caractéristique qui règne dans les Andes. Les communautés, les langues, l'histoire pré-colombienne, les costumes, la musique ! Et c'est à Otavalo que nous sommes le plus retombé dans cette culture si spéciale, où nous avons déambulé dans les allées du plus grand marché artisanal d'Amérique du Sud.

Le marché d'Otavalo 

Retour en montagne et reprise d'altitude. À Quito, la capitale, on a senti un léger malaise nous parcourir, qui s'est heureusement assez vite dispersé. Nouveau pays = nouvelle période d'acclimatation. À peine le temps de s'adapter et nous revoilà partis à l'assaut des montagnes ! En Équateur il existe des centaines de chemins de randonnées, on a choisi celui du Quilotoa pour se remettre en jambes. Nous sommes partis du petit village de Sigchos pour quelques jours de marches, censées nous mener jusqu'à un imposant cratère volcanique. A mi-chemin entre la vie locale et des paysages de montagnes sacrées, un rendez-vous pour découvrir une partie des entrailles de l'Equateur.

Nous avions avec nous tout notre équipement de bivouac habituel, sauf que cette fois-ci il nous a fallu faire avec le mauvais temps. Froid, pluie, brouillard, nous avons défié la météo pour atteindre notre objectif et nous avons fait face au vent pour tirer les plaisirs de la marche en montagne. Une randonnée automnale aux couleurs des vacances de la Toussaint, nous avons senti un peu plus notre retour approcher.

Quatre jours de marches et de camping pour un effort récompensé par une arrivée spectaculaire au lac du Quilotoa. Une dernière nuit à 3800 mètres d'altitude avant de longer l'impessionante crête du cratère. Nous nous sommes réveillés dans un brouillard épais, laissant planer une étrange atmosphère sur le volcan. Dissipés, il est grand temps de redescendre de notre petit nuage.

Le volcan du Quilotoa 

À deux semaines du départ, nous avons ensuite changé d'ambiance et rejoint la côte pacifique. Au programme la découverte du plat pays et de ses plages paradisiaques. On s'attendait à arriver sur une côte ultra touristique, on a finalement découvert une vie locale sympathique, passant des petits villages de pêcheurs aux plages de sables fins. On en a profité pour prendre des vacances, passer du temps sur des plages, regarder les pêcheurs, faire du surf, observer les baleines... On a également bien profité de la vie locale, très souriantes et accueillante. Il faut croire qu'en hors saison aussi les touristes ont la côte.

Un dernier bain, et c'est déjà le moment de rentrer. À quelques heures du départ on est un peu déboussolé, perdu entre les images de notre voyage passé et les retrouvailles qui nous attendent. On est ému des choses qu'on a vécu mais on a aussi hâte d'être en famille à Noël ! Il y a quasiment dix mois, nous partions en stop rejoindre Gibraltar et des aventures inconnues. Depuis, c'est dans sept pays différents que nous avons vadrouillé, à la rencontre des gens et de leur culture. C'est sans aucun doute nos déplacements en auto-stop qui resteront, et qui nous ont offerts des dizaines d'anecdotes à conserver ! 100 véhicules différents pour plus de 9000 kilomètres parcourus. En bateau, en voitures, en camion, en moto, en bus... C'est parfois dans des conditions difficiles que notre voyage a pris forme, et qu'il est devenu intéressant.

Aujourd'hui il reste une étape à valider, celle du retour. C'est le retour qui fait le voyage. C'est lui qui valide nos aventures passées et nos expériences accumulées. Dans "Les Fleurs du mal", Charles Baudelaire a écrit un poème sur le voyage. De l'enfant, amoureux des cartes, en voici un extrait qui nous correspond bien :

Étonnants voyageurs ! Quelles nobles histoires

Nous lisons dans vos yeux profond comme les mers !

Montrez-nous les écrins de vos riches mémoires,

Ces bijoux merveilleux, faits d'astres et d'éthers.