Muli bwanji
Après un long trajet de bus dimanche depuis Harare du lever jusqu'au coucher du soleil, j'arrive enfin à Victoria falls, ville la plus proche des chutes Victoria du côté zimbabwéen. Au levé du soleil le lendemain matin, avant de me diriger vers la cataracte, je pars plus en amont pour me faire une randonnée dans le parc national des chutes victoria. Je marche alors seul dans le silence de la savane. Un silence agréable et accueillant, à la fois familier et étranger, troué de temps à autre par un oiseau qui se met à chanter, le doux murmure du vent, une antilope apeurée qui s'enfuit, des singes qui jouent, un vautour qui scinde le ciel par son vol evident ou d'autres bruits plus difficilement perceptibles laissant ressentir une présence furtive quelque part qui observe sans pour autant se laisser apercevoir. Mais cette marche fut aussi marquée par l'odeur. La fraîche odeur fécale des excréments. Celle qui t'indique qu'un imposant pachyderme est passé tout récemment là où tu te tiens. Celle qui te dis que non loin de là, quelque part derrière ces fourrés et ces arbres, le plus gros mammifère terrestre se tient debout et bien vivant.
Et bien-sûr il y a les babouins. Des êtres qui possèdent à la fois la mâchoire allongée et acérée du loup ainsi que sa taille et en même temps la mobilité, l'aisance et l'acrobatie du singe. Ils sont comparables aux pigeons de nos villes par leur proximité avec nous, raison de leur développement démographique par la nourriture que nous jetons et, involontairement, leur laissons. Mais contrairement à nos pigeons, les interactions que l'on a avec eux peuvent rapidement mal tourner si on ne montre pas assez de considération à leur égard. Je prends donc beaucoup de plaisir à m'arrêter, me poser dans le silence et le respect et les observer, les écouter, les admirer, tenter de les comprendre.
Une fois ma randonnée terminée je m'engage vers ce que certaines personnes ont décidé d'appeler : l'une des sept merveilles de la nature. Je traverse donc le Victoria falls bridge entre Zimbabwé et Zambie, entre Le Cap et Le Caire, sur la route de l'impérialisme de Cecil Rhodes. Depuis ce pont les gens se jettent dans le vide sans crainte. En effet il s'agit du plus haut spot de saut à l'élastique au monde. Je finis donc par arriver devant ces chutes où des quantités phénoménales d'eau se jettent fatalement à l'intérieur de ce long et étroit canyon. La puissance d'impact des jets est telle qu'elle fait remonter de grandes quantités de vapeur d'eau créant ainsi un épais nuage s'élevant dans les airs et générant une pluie continue aux alentours. "La fumée qui gronde" donne ainsi naissance en aval à une forêt humide tropicale, riche en verdure et en biodiversité. Cette forêt fait sévèrement contraste avec son environnement sec, pauvre et aride en cette saison sèche. Les chutes sont un oasis dans ce milieu stérile. Si la puissance des chutes semble plus que dominer et s'imposer comme éternelle en cette periode, c'est loin d'être le cas lorsque l'hiver prend fin en octobre où l'année dernière plus une seule goutte ne s'échappait de ces falaises asséchées. C'est tout le fleuve Zembèze qui vut sont débit drastiquement réduit laissant la majorité de la population sans électricité, dépendante en grande partie du barrage du lac Kariba, lui-même alimenté par le fleuve.
Mugone bwino chiloto