Carnet de voyage

Amérique du sud

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Février 2018
52 semaines
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Publié le 4 février 2018

Bien arrivés à la Havane, nous dormons chez Anaysa et sa fille dans le Vedado et parcourons la ville en espadrilles, 20km par jour au compteur !

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Publié le 8 février 2018

Balade à cheval dans la vallée de Vinales. Culture de café, haricots, patate douce, papaye, bananes et tabac (gros cigares).

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Publié le 14 février 2018

5 jours chez Ailin à Cienfuegos, une petite ville au bord de la mer des Caraïbes. Première pluie de notre voyage, des torrents d'eau qui ont transformé les trottoirs en carrelage du centre en aire de jeu pour les enfants qui se jettent en "ventre et glisse". Nous avons assisté à des combats de boxe d'enfants sur le sable à la mjc du coin, et avons découvert une boisson, le batido de Mani (sorte de milkshake à la cacahuète) hyper bonne mais malheureusement peu disponible, cacahuètes en rupture de stock.

Nous sommes aussi allés dans la réserve de la lagune Guanaroca, et avons vu des flamants roses.

Petite journée à la plage Rancho de Luna et première baignade dans les Caraïbes !

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Publié le 20 février 2018

Étape de 5 jours chez José et sa femme à Trinidad, couple trop mignon !

Excursion dans la Vallée de los Ingenios, randonnée à Topes de Collantes, balade en vélo jusqu'à la playa Ancón et promenades dans les rues de Trinidad.

Arrivée à Trinidad

Valle de los Ingenios.

Excursion en train à vapeur avec bain de fumée et "Mario" le contrôleur déjanté à travers la vallée de la canne à sucre.

Opération commando à Topes de Collantes (massif de l'Escambray) en jeep russe, massage des fessiers en prime. Descente en direction de la cascade de Vegas Grandes, 200m de hauteur, petit bain frais sous les trombes d'eau.

Playa Ancón en vélo.

Apprentissage de la conduite à la cubaine, anti crevaison.

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Publié le 12 mars 2018

Petit passage à Santa Clara, la ville dans laquelle s'est illustré le Che lors d'une attaque décisive pour achever la révolution. Rémy a fait son premier basket au stade du quartier ! Grosse découverte, une boutique entièrement consacrée à la cacahuète déclinée sous forme de glace et de gâteaux.

Retour à La Havane chez Anaysa, la boucle est bouclée. Tristes de quitter Cuba, mais curieux de découvrir la suite !

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Publié le 12 mars 2018

Arrivée à Santiago où on retrouve Dan et son pote Axel qui y vit depuis un an et nous entraîne aux quatre coins de la ville pour le combo rando-resto-pisco.

On attaque avec l'ascension du Cerró Manquehue, vue incroyable sur la Cordillère des Andes et Santiago.

Balade dans Santiago

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Publié le 27 mars 2018

Après cette semaine à Santiago, nous faisons escale à Valparaíso avec les copains! Petite mission annexe du week-end : faire faire nos cartes d'identité chiliennes.

La première étape franchie à la police de l'immigration, direction le Registro Civil où nous attend une jolie queue de 120 personnes devant nous. Les numéros défilent dans un désordre déroutant qui nous tient en haleine 3 heures, nous ressortons blêmes mais victorieux.

Nos mollets ont gonflé à Valparaíso, une ville portuaire bâtie sur des collines connue pour ses couleurs et son street art.

©Dan pour le pano resto :)

La Sebastiana, maison de Pablo Neruda

Les dunes de Concón

Laguna Verde

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Publié le 13 avril 2018

Premier volontariat à Algarrobo, une petite station balnéaire sur la côte pacifique où nous avons passé 4 semaines en compagnie de la Martín Martin familia!

Juan Carlos, le papa, a construit 7 bed and breakfast dans son immense jardin, ni plus ni moins, et s'occupe de ses "petits projets", nombreux et variés. Mariela est psychologue dans une école que fréquente également leur fils, Carlos Simón.

Pour finir les présentations, mentionnons les deux chiens Saro et Feliz et les poules.

Nous avons débarqué le "Super Lunes", le jour de la rentrée !



Pendant ces 4 semaines, nous nous sommes principalement occupés des repas pour la famille (et avons fini par développer une procédure vaisselle du tonnerre), du jardin et de quelques petites missions annexes allant du lavage de voiture à la coupe de bois (les lunettes de soleil façon moniteur de ski ayant pour but de protéger des éclats vous l'aurez compris)

Nous avons aidé à la tenue du bed and breakfast, en nettoyant et préparant les chambres ainsi qu'en aidant au coup de feu du petit dej.


Nous avons aussi pu passer de chouettes moments en famille: apprendre le québécois avec des chiliens, passer le dimanche dans la maison de campagne et jouer aux dominos avec la mamie, faire du tandem (!), organiser un vide-grenier avec vente de poisson frit (Rems assistant en chef de Martha LA reine du poisson frit), faire des Pisco sour, tenter des créations culinaires (et assister à la mort du four), aller au garage (et assister à la mort de la voiture), casser beaucoup de vaisselle, vivre la semana santa et pâques à la chilienne...

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Entre deux volontariats, nous sommes partis nous balader dans la vallée de l'Elqui réputée pour ses vignes où se fabrique l'alcool national, le Pisco, et ses observatoires astronomiques.

Premier arrêt à La Serena où nous rencontrons Míriam, son fils et son teckel agressif, avec qui nous partageons de bons repas et discutons du système éducatif chilien.

La Serena est une ville très étendue, comme souvent ici, avec un petit centre animé, un jardin japonais et une plage immense de laquelle on aperçoit les montagnes environnantes.

Changement de décor dans la vallée de l'Elqui, paysages désertiques et ambiance quasi mystique.

Nous avons atterri dans la jolie petite ville de Vicuña avant de visiter dans les alentours une fabrique de Pisco et un observatoire astronomique (découverte des constellations de l'hémisphère sud, et par conséquent de l'absence de notre Grande Ourse, avec en prime les commentaires en espagnol en pleine nuit).

Trop chouette !

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Après une petite percée au Nord, retour surprise à Valparaíso pour aider Rocío et Nico dans leur hôtel durant 3 semaines. C'est une belle maison sur trois étages, cachée dans la verdure et décorée des peintures et autres créations de la fille de Rocío. Nico, architecte, a créé 3 belles terrasses sur 3 niveaux où il fait bon prendre le petit dej face à la mer, et un petit cabanon hammam et jacuzzi.

Au programme de nos matinées, la préparation et le service du petit déjeuner aux clients (l'occasion de faire de jolies et souvent surprenantes rencontres ! ), nettoyage et rangement des chambres et des terrasses, travaux de construction pour Rems avec Nico, et création de matériel pédagogique pour Zoé avec Rocío qui donne en parallèle des cours d'anglais à l'université. Nous travaillons aussi avec Jessica, employée à l'hôtel, avec qui nous profitons des petits déjeuners pour discuter et déchiffrer le chilien.

Kuki, la sœur de Rocío, vit également dans la maison lorsqu'elle n'est pas en déplacement et nous a appris à tricoter à l'indienne et à faire du pain.

C'est également dans cette maison que nous avons vécu notre premier séisme de magnitude 6,2 ! Nous avons été réveillés au petit matin par les tremblements qui ont duré quelques minutes, Sensation très surprenante !

Nous avons découvert le Lambe Lambe lors d'un festival, un type de théâtre très présent en Amérique du Sud : il s'agit d'un spectacle de quelques minutes, réalisé dans une boîte plus ou moins grande et percée de 2 trous pour l'unique spectateur qui y assiste.

Nous avons profité de nos jours de repos pour découvrir les alentours, à commencer par Zapallar, un village sur la côte au nord de Valparaíso. Ce littoral huppé est une succession de maisons d'architecte toutes plus spectaculaires les unes que les autres. Entre collines et mer, c'est aussi un espace naturel protégé où nous avons pu observer en plein pique nique un dauphin jouer devant nous. Lézards multicolores, loutres de mer et île aux pingouins d'humboldt, on en a pris plein les yeux !


Nous avons également visité Pomaire, un village de céramistes dont on retrouve la vaisselle dans toutes les cuisines chiliennes, également reconnu pour ses empanadas gigantesques.

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Publié le 1er juillet 2018

A 3h au sud de Santiago, nichée entre la côte pacifique et la cordillère des Andes, nous faisons étape dans la vallée de Colchagua. Nous rencontrons un couple étonnant établi depuis 8 ans à Santa Ana et propriétaire du petit vignoble "Beso Negro" : Pie et Sharif, une princesse malaisienne et un producteur télé espagnol/américain/malaisien. Ce sont de bons vivants, qui multiplient les soirées au coin de la cheminée de leur cuisine immense, toujours en bonne compagnie et autour de vin et plats délicieux...

Nous sommes arrivés pour la dernière ligne droite des vendanges, certainement les dernières du Chili ! Nous avons ramassé du Petit Verdot et du Carmenere (un cépage français qui n'est presque plus produit en France depuis les épidémies de phyloxera) avant d'en retirer les rafles et de les presser à la suite d'une première fermentation. Le tout mené en musique, dans la joie et la bonne humeur, par Marcella et Claudio qui vivent et travaillent sur place depuis les débuts.

Première fois que nous nous retrouvons à vivre en coloc au Chili avec Ollie, un anglais qui est en contrat pour l'année, et Fabiana, une brésilienne également volontaire qui sera ensuite remplacée par Nathalie, une française en tour du monde viticole 😀

On ne change pas une équipe qui gagne, la cuisine reste au centre de nos préoccupations même à des milliers de km de chez nous ! Ces 3 semaines auront été l'occasion d'apprendre à faire des empañadas brésiliennes, des pancakes à l'anglaise, de faire découvrir la tarte tatin à nos hôtes, de manger des plats malaisiens, de visiter les vignobles alentours et de fêter la fin des vendanges autour d'un asado, le barbecue chilien !

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Nous avons débarqué les mains lisses, au beau milieu de la vallée de Colchagua, un lundi soir fin avril. On en est reparti deux mois plus tard, les mains calleuses et des souvenirs plein la tête!

Nous avons rencontré Tamara, moitié chilienne moitié "gringa". Après 13 ans dans les studios photos de Brooklyn, elle a entamé une reconversion professionnelle pour s'installer dans son pays d'enfance et construire son projet de permaculture.

Nous arrivons à la fin de la saison, début d'automne, pour récolter les tomates, aubergines, chou kale et autres merveilles de goût et de couleur, désherber, préparer le terrain pour la prochaine saison et l'aider à préparer les paniers qu'elle livre chaque semaine à des particuliers et restaurants de la région et de Santiago.

Nous avons passé deux semaines avec Tamara avant de rejoindre le vignoble, puis nous sommes revenus garder la maison, le jardin et les chiens Malka et Mota pendant ses vacances d'un mois aux États-Unis.

Dans la continuité de son projet, Tamara a voulu construire une maison à partir de matériaux écologiques et durables. Sa maison est en bois, les murs sont recouverts d'un mélange de boue, sable et crottin de cheval, très bon isolant qui nous a sauvé des nuits très froides de la vallée et de la chaleur des journées ! Rémy a travaillé sur la construction avec Iván, l'ouvrier qui a réalisé la totalité des travaux. Autre mission: construire une grange avant l'hiver pour entreposer les matériaux. Mission accomplie, Rems a également créé un super banc et un fauteuil-trône pour meubler le salon de Tamara !

Nous avons pu profiter des produits ultra frais et savoureux et tester toutes les recettes qui nous passaient par la tête ! Nous nous sommes lancés dans la création d'un levain naturel pour faire du pain maison (et oui, le pain français nous manque, cliché oblige), et l'une de nos missions a été de préparer des conserves des dernières récoltes avant l'hiver. Enfin, autre expérience, Tamara ne consommant pas de viande, nous nous sommes prêtés au jeu, et ça nous a plutôt plu !

Nous avons bien profité de cette période pour voir nos voisins du vignoble, fêter l'anniversaire de Claudio, faire un asado (barbecue chilien) dans les règles de l'art en apprenant à faire des sopaipillas (petites galettes frites à base de courge d'ordinaire réservées aux jours de pluie) avec Marcela. L'hiver s'installant, Pie a organisé un "Noël en Juin" ayant tout l'air d'un vrai : dinde, sapin et cadeaux pour tous !

Vallée d'Apalta

Petit retour au vignoble pour la pressée !

C'était "bacán" comme on dit ici 😀 (=cool)
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Publié le 29 août 2018

Au mois de juillet, nous avons débarqué à Pichilemu, LA ville du surf chilien. L'ambiance s'en ressent, beaucoup de jeunes sportifs au look soigné, et pas mal d'étrangers venus se confronter aux vagues impressionnantes. Autre nouveauté, le sable est noir, et il semble tout à fait normal de promener son lama sur la plage.

Nous avons été accueillis par Macarena (prénom très courant ici, nous avons donc rapidement du arrêter de ricaner niaisement en l'entendant), Andrés, les enfants Katari, Amaru et Aurora. Maca est prof de yoga et enseigne dans sa petite salle au fond du jardin, Andrés est cartographe et, à ses heures perdues, s'intéresse à l'éco-construction.

Leur terrain est immense et situé au cœur des eucalyptus, des arbres introduits en masse au Chili. Il abrite leur maison toute de bois, boue et paille, la salle de yoga de Maca (où nous avons rdv 2 fois par semaine pour les cours 💪) un dôme et un vaisseau terrestre (où nous logeons) pour accueillir des touristes l'été.

Nous rencontrons Flo et Mélanie, deux jardiniers suisses allemands également volontaires sur place. Notre première mission a été de mettre en place un compost et de construire des bacs pour faire pousser un potager. Nous nous sommes ensuite attelés au gros œuvre : réparer la structure du dôme dans laquelle l'eau s'est infiltrée et qui menace de s'effondrer. Le dôme est un assemblage de triangles de bois, l'isolation est réalisée avec un mélange de paille et de boue, et des bouteilles de verres y sont incrustées pour laisser passer la lumière.

Gros travail de réflexion, de Tetris et d'agencement pour Rémy et Andrés, gros coups de masse pour abattre les parties pourries et pataugeage dans la boue pour Zoé !

Notre mission s'achève malheureusement avant la fin des travaux, mais on aura beaucoup appris.

Comme toujours, la cuisine a été au cœur de nos préoccupations pendant ces 3 semaines ! Entre les asados d'Andrés, l'après-midi confection d'empanadas, les repas suisse, puis français (hachis parmentier et notre désormais culte tarte tatin), on a passé de super moments autour du feu ou de la table. Nous avons eu la chance d'arriver pendant les vacances scolaires d'hiver et de passer beaucoup de temps avec les enfants, mais aussi de vivre la coupe du monde et la victoire de la France !

Dernier atout du Pangal, le nom du terrain de Maca et Andrés : l'accès privé à une plage magnifique et vide après une balade dans les bois !

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Publié le 9 septembre 2018

5 mois après notre arrivée au Chili, et les 5 volontariats enchaînés, nous avons ressenti le besoin de prendre un peu de vacances (#ironie) et de découvrir d'autres régions!

1ère étape: Chillán

Nous avons quitté non sans mal Pichilemu grâce à une organisation dont seuls les Chiliens ont le secret : )

Nous avions prévu avec la famille de faire nos adieux le dimanche soir et de partir le lundi matin, jour de rentrée des vacances d'hiver pour les 3 enfants. Jusqu'ici, le plan semblait parfait. Le dimanche soir néanmoins, alors que nous montons voir Andrés pour préparer l'apéro, pas de trace de Maca ni des enfants qui ont finalement décidé de rester à Santiago une journée de plus pour aller au parc (et louper la rentrée, mais c'est ici un détail). Andrés nous assure qu'ils seront de retour le lendemain à 12h, que nous pourrons ainsi nous dire au revoir, récupérer la voiture pour aller à la gare à 25km (pas de transport en commun) et prendre le bus à 14h40. Gros programme, mais nous sommes motivés à les voir avant de partir. Une chose en entraînant une autre, et bien qu'Andrés continue de nous certifier qu'ils arrivent "al tiro" (expression chilienne, littéralement = "sur le champ", comprendre = "tu as le temps de prendre 3 thés et de faire une sieste"), nous attendrons jusqu'à 14h10, pour finir par faire du stop avec un chef cuisinier fort sympa, et prendre le bus suivant.

À Chillán, nous faisons notre premier couchsurfing ! C'est un système où des gens qui ont un canapé libre offrent l'hospitalité et ainsi la possibilité de partager un moment de leur vie. Nous avons rencontré Coté (surnom de María José, ça paraît évident) et Andrés, un couple super sympa avec qui nous avons passé deux soirées. Cette première expérience nous a donné envie de la réitérer dans d'autres villes... Chillán est une ville de petite taille, reconnue pour ses longanizas, des saucisses au goût fumé délicieuses, ses stations de ski et ses thermes environnantes. Nous avons beaucoup aimé le marché où il est possible de manger des plats généreux qui réchauffent le corps et l'âme des travailleurs, et des curieux comme nous, sur de grandes tablées.

Porotos con riendas (traduction maladroite:"fayots avec des rênes",les spaghettis faisant penser aux rênes des chevaux).Très bon!

Nous avons passé une journée dans la vallée Hermoso pour profiter des balades dans la forêt enneigée et des termes face aux volcans. L'un d'eux est même entré deux fois en éruption devant nos yeux ébahis !

2ème étape : Contulmo

Ce petit village au bord du lac Lanalhue a été fondé en 1884 par 48 familles allemandes. Ces colons s'y sont installés avec l'appui des gouvernements chilien et allemand pour développer l'agriculture dans cette région à la végétation dense, mais aussi pour évangéliser et acculturer les Mapuches sur leurs territoires.

On retrouve l'héritage allemand dans l'architecture et la gastronomie locale. Le village a toutefois une atmosphère un peu mystique, renforcée par la brume qui enveloppe la forêt environnante et les légendes mapuche.

Au parc, les statues de bois sont protégées par des sacs poubelle que chaque visiteur prend soin de remettre, humidité oblige !
Nous avons enfin pu observer le fameux Copihue, la fleur emblème national 🇨🇱

3ème étape : Concepción

Pour visiter la 2eme ville étudiante du Chili, rien de mieux qu'un couchsurfing dans une coloc étudiante ! Nous squattons donc le matelas gonflable au milieu du salon de Monse (= Monserrat, oui ce prénom existe) et Nacha (= María Ignacia, passion diminutifs surprenants) où défilent les copains dès le petit-déjeuner et jusque tard dans la nuit pour des conversations passionnées. Notamment à propos du blocus de 3 mois pour dénoncer les violences faites aux femmes qui vient de se terminer et pour lequel Nacha, en dernière année de fac de sciences de l'éducation, a milité. Ici aussi, la parole se libère peu à peu, et la lutte pour un accès étendu à l'avortement (autorisé uniquement dans 3 cas: viol, malformation du fœtus ou risque pour la vie de la mère) est vive chez les jeunes. On a aussi eu vent grâce à eux,du récent scandale du papier toilette qui fait rire jaune les chiliens : les grandes entreprises qui occupent ce marché se sont secrètement accordées sur la hausse les prix (c'est en effet très cher, et cela manque souvent), une entente déloyale qui a été dévoilée par les médias. Ces entreprises ont été condamnées, et chaque citoyen âgé de plus de 18 ans a reçu une indemnité de 7000 pesos (= 9 euros =12 rouleaux) sans certitude de baisse de prix qui les laisse un peu amers...

Monse, en 1ere année de psycho, est en vacances et nous balade partout ! Nous avons fêté l'anniversaire de son amie Ellie de bars en bars, mangé des empanadas de fruits de mer délicieuses dans un boui oui au fond d'une ruelle coupe gorge d'un port, fait du yoga gratos, du vélo sur les quais, visité le campus et sa pinacothèque, fait une rando le long de l'océan en suivant un ancien chemin de fer... On ne s'est pas ennuyé !

Le campus

4ème étape : Temuco

Nos vacances s'achèvent à Temuco, capitale de la région Araucanía ! Daniel et Valéria, rencontrés via couchsurfing encore une fois, nous accueillent pour partager un once. C'est le repas préféré des chiliens, une sorte de goûter /dîner informel où l'on mange le plus souvent des petits pains avec du jambon, fromage, parfois de l'avocat, de la confiture ou de la pâte de coing,le tout accompagné de thé ou café. C'est avant tout l'occasion de se poser pour raconter sa journée, partager les dernières nouvelles, discuter ! Daniel et Valéria sont chiliens et viennent de rentrer après 3 années passées à Montréal où Valéria étudiait. Ils sont très contents de pratiquer le français, où plutôt le québécois, et nous font découvrir des musiciens locaux. Nous apprenons par la même occasion que Zaz est une super star au Chili mais aussi au Québec, première nouvelle !

A Temuco, nous avons une nouvelle fois visité le marché, et avons noté quelques nouveautés : des bouquets et des bouquets de plantes médicinales, beaucoup de merkén (LE condiment phare au Chili à base de piment Cacho de cabra, graines de coriandre et sel) mais cette fois fumé, et des bijoux, instruments, tissages différents... C'est en effet que nous sommes maintenant en terre mapuche, la population originelle de cette région. On sent vraiment la force de cette culture, bien que les colons aient tenté de l'écraser, les mapuche ont toujours résisté à l'acculturation. Ils subissent néanmoins toujours beaucoup de persécutions de la part de l'état et font partie des populations les plus pauvres du pays, leurs terres ayant été volées et exploitées par de grandes compagnies.

Nous avons grimpé sur le Cerró Ñielol où a été signé l'armistice de la guerre entre les mapuche et l'état chilien en 1881 et qui surplombe la ville.

Nous avons mangé dans un restau mapuche tenu par une mamie et sa fille et découvert de délicieux desserts à base de quinoa et de mote (sorte de blé cuit) dans du lait parfumé.

Autre chouette découverte, le pavillon "Amor de Chile" présenté à l'exposition universelle de Milan en 2015 et remonté à Temuco. Son architecture toute en bois représente un panier et la richesse agricole du pays.

L'hiver et la pluie nous ont conduit pour la première fois au ciné voir un film 100% en espagnol sans sous-titres: Les indestructibles 2 ! Super expérience : )


Nouvelles rencontres pour finir notre séjour à Temuco : André et son coloc Nico. Nous avons passé 3 jours chez eux, le père d'André est un français qui a tout quitté pour venir vivre au Chili et travailler dans l'agriculture il y a plus de 30 ans. Il y a rencontré sa femme, a eu 2 enfants et a monté des pompes funèbres. Le voyage nous réserve plein de surprises ! André nous a invités à passer le Día del niño (Dimanche 5 août) avec lui et sa famille. C'est une fête commerciale qui s'est bien implantée au Chili où les parents se coupent en 4 pour offrir le meilleur à leurs enfants. C'est au mall (=centre commercial gigantesque, présent dans toute grande ville, the place to be le week-end) que nous retrouvons sa sœur, son beau frère, sa maman et sa nièce, la star de la journée, pour partager des donuts. Ça a été un super moment !

Avant de quitter Temuco, nous avons pu voir en direct à la télé Nico, le coloc d'André, qui présente tous les jours une matinale sur la chaîne locale. Flash de ce jour :une dame est tombée en descendant du bus et a été secourue par des voisins suite à l'indifférence du chauffeur.

On repart ensuite vers de nouvelles aventures !

La teuf au mall / Nico en pleine interview
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Publié le 16 octobre 2018

Depuis notre arrivée au Chili, nous avions régulièrement entendu parler des Mapuche, l'un des peuples originels du pays dont le fief le plus important se situe en Araucania. Entre les montages de l'état qui orchestre des attentats pour nuire à l'image des Mapuche, la méfiance d'autres habitants, l'implication des grandes entreprises dans la répartition de leurs terres, nous avons voulu en savoir un peu plus en passant le mois d'août en territoire Mapuche (mapu=Terre, che=gens).

Si les Mapuches ont résisté avec succès à la colonisation espagnole, l'état Chilien et les grandes entreprises (principalement des scieries) se sont appropriés leurs terres après le traité d'armistice en 1881. Depuis quelques années, dans une démarche de réconciliation, certaines ont été redistribuées et organisées en communautés, dirigées par une sorte de maire.

Nous avons posé nos sacs dans la communauté Manuel Lorenzo, près de Nueva Imperial, à l'école Baha'i Faizi et son jardin écologique Mongelechimapu.



Statues mapuches

Lili et Gerardo sont arrivés il y a près de 30 ans pour reprendre les rênes de cet endroit, et y ont eu 4 enfants.

Lili est ingénieur agronome et la principale créatrice du jardin écologique. Sur cette terre qui n'était pas propice à la culture, asséchée par les plantations d'eucalyptus qui ont envahi le pays pour la production de bois de chauffage, elle a voulu montrer qu'il était possible de faire pousser des légumes de qualité sans recourir aux produits chimiques. À force de beaucoup d'efforts, le résultat est probant ! Lili reçoit désormais des agriculteurs pour diffuser ses enseignements.

Le jardin éducatif est organisé en trois parties : la première est un jardin traditionnel Mapuche suffisant à nourrir l'équivalent d'une famille, les différentes fleurs ou légumes sont plantés ensemble, mélangés, pour que chacun apporte à l'autre des bénéfices: certaines fleurs attirent les insectes ce qui évite que ceux-ci s'en prennent aux choux ou salades avoisinants. Une autre partie du jardin représente une production dans un espace restreint, à la verticale, pour les personnes vivants en appartement ou sans jardin. Et la dernière partie est organisée pour une production plus importante, destinée à ceux qui souhaitent en vivre.

Don Ramón est l'âme et l'artisan de ce beau jardin depuis 10 ans! Tranquillement, sereinement, il nous explique avec pédagogie le fonctionnement du jardin et nous réserve chaque jour une tâche différente. Le tout intercalé de nombreuses pauses discussion, de cours de mapudungun, et de long silences contemplatifs le pied appuyé sur la fourche :)

Au programme: Repiquer les jeunes pousses de chou et laitue germées sous serre / Désherber, notre spécialité ! / Préparer l'engrais 100% organique en 3 étapes : laisser se décomposer les déchets organiques, l'aérer en intercalant une couche de branches et brindilles puis de feuilles et gazon frais, et enfin le laisser reposer / Retirer le mulch, une couche de paille et de végétaux secs qu'on applique sur les rangées pour étouffer les mauvaises herbes. Privées ainsi de soleil, elles meurent et se décomposent, rendant à la terre les nutriments dont elles s'étaient nourries. Ramón prépare également une infusion d'orties en guise d'insecticide / Trier et sélectionner les graines de lin, de blé, et les pomme de terre chilote (de l'île de Chiloe, de toutes les tailles et de toutes les couleurs) pour les semer / Semer du blé, puis tasser la terre à l'aide d'un engin primitif mais super efficace (et hyper lourd accessoirement) / Tailler les haies de Tagasaste pour nourrir les lapins / Retirer le hummus frais du bac de lombriculture et "nourrir" les lombrics avec du crottins de cheval...

Bref, plein de chouettes missions rythmées par les cris et les attaques agressives des treile, oiseaux qu'on retrouve partout au Chili, qui ont eu la bonne idée de pondre leurs œufs verts au beau milieu d'une rangée de laitue. Nous avons assisté à la naissance de 3 petits, à la mort d'un d'entre eux 😢, mais pour autant nous n'avons pas été acceptés par eux comme le tío Ramón qui lui ne craint rien !

Nous avons également eu la chance d'être conviés à une journée de formation dispensée par Lili à un groupe d'agriculteurs Mapuche d'une autre communauté. Nous n'assisterons malheureusement pas au Txafkintu, l'échange de semences paysannes qu'ils organisent chaque année.

A côté de ce jardin, il y a donc l'école dont Gerardo est le directeur et qui accueille une cinquantaine d'enfants de la maternelle à la 3ème, intimiste et familial !

Au Chili, le système éducatif est plus proche de celui des États-Unis que de la France. Il y a beaucoup d'écoles privées, surtout dans les villes, aux tarifs astronomiques et qui rivalisent de créativité pour proposer des spécialités (cours d'anglais intensifs, sensibilisation à l'écologie, pédagogies alternatives type Waldorf,...) et ce dès la maternelle. Il y a également beaucoup d'écoles créées par des missionnaires évangélistes, méthodistes, "Jésus-Christ des derniers jours" et autres courants débarqués des USA. Les parents sont prêts à investir énormément d'argent dans l'espoir que leurs enfants aient davantage d'atouts pour entrer à l'université, un système encore plus élitiste.

Il existe aussi des écoles publiques gratuites, subventionnées par l'état, qui sont plus accessibles à la campagne qu'en ville où il les meilleurs dossiers sont privilégiés compte tenu de la forte demande.

C'est dans ce type d'école que nous sommes arrivés. 3 minibus vont chercher les enfants dans un rayon de 10km chaque matin, l'école dispose également d'un internat de 6 lits (où nous dormons) pour les élèves vivant plus loin mais il n'est désormais plus utilisé. Les professeurs nous racontent qu'ils perdent chaque année des élèves car les écoles évangélistes promettent monts et merveilles aux parents pour grossir leurs rangs, comme par exemple une paire de chaussures neuves à chaque rentrée.

La tía Meche à l'œuvre

La tía Meche, surnom de Mercedes, prend soin de nous et est une sorte de Josephine ange gardien de l'école. Elle est chargée de sonner la cloche, de veiller sur les récréations, d'accompagner les enfants en minibus... 3 soirs par semaine, elle reste dormir à l'école, nous prenons donc le once ensemble, elle nous apprend des expressions chiliennes et mapudungun (langue des Mapuches), tricote à gogo et fabrique des glaces maison.

Tous les matins à 10h, heure de la récré, nous prenons le petit-dej dans la bibliothèque avec les profs ! Il y a Marie, prof d'anglais, Sylvia, prof de langage, Cécilia, prof de maths, Nelson, prof de mapudungun et machi (guérisseur) dans une autre communauté, Camilo le prof de sport qui n'est présent que le lundi, Daniela, qui assiste les profs et qui est également la fille de Marie, et enfin deux autres instits qui s'occupent des tout petits et que nous ne voyons pas souvent.

Nous déjeunons aussi avec eux, c'est l'occasion de connaître les dernières nouvelles de la cour de récré: amitiés trahies et aussitôt rabibochées, tour de taca-taca (baby-foot) non respecté, but non réglementaire... Les enfants débarquent alerter les tías et tíos (on appelle les profs "tata" et "tonton" ici) de toute injustice.

Le rythme nous semble plus détendu, l'école est rarement au complet, et c'est souvent les élèves qui viennent chercher les profs qui traînent en buvant du mate à la fin de la récrée 😀

8h30-10h00: 1er cours

10h00-10h30: Récré /petit-dej

10h30-12h00: 2ème cours

12h00-14h00: Déjeuner et récré

14h00-15h45 : 3ème cours

15h45-16h00: Goûter et départ des minibus

Le vendredi, les cours terminent à 13h00,et ce dans tout le Chili.

Les élèves sont répartis en 5 classes, une pour les maternelles, et 4 pour les niveaux du CP au CM2. Lors de la récré du matin, chaque classe à tour de rôle apporte des choses à grignoter confectionnées le plus souvent par les mamans. Gâteaux au citron, beignets, glaces... Il y a même eu une matinée où les élèves ont fait frire dans leur classe des sopaipillas, les fameuses galettes/beignets chiliennes, pour les vendre. Toute une épopée dont l'odeur nous aura accompagnés longtemps :)

Les bénéfices de ces ventes permettent à chaque classe d'organiser un petit voyage de fin d'année et d'acheter du matériel ou des prix pour les meilleurs élèves.

Gros évènement lors de notre séjour, le concours communal inter-école de Cueca ! 4 couples y participent, entraînés sans relâche par David le chauffeur de minibus. Toute l'école soutient ses représentants ! Nous avons tous embarqué, les 50 enfants, les profs et nous dans 3 minibus prévus pour 12 personnes, direction le gymnase de Nueva Imperial, enfants sur les genoux et ceinture en option mais en veillant toutefois à fermer les fenêtres pour éviter tout rhume !

Là bas, tout était prêt pour encourager les couples: banderoles, confettis et ballons aux couleurs de l'école, beignets pour apprécier le spectacle, et caméra sur trépied pour capturer ces instants, mission de haute importance qui nous a été confiée.

3 écoles ont participé, et 2 couples de la nôtre se sont retrouvés sur le podium, la porte d'accès au concours provincial. Gloire ultime !

Autre point à noter, et pas des moindres : il s'agissait d'une école Baha'i. Si vous êtes comme nous qui avons débarqué sans avoir la moindre idée de ce que c'était, petite explication: La foi Baha'i, née il y a à peine 200 ans en Iran, croit en l'unité de Dieu (elle reconnaît ainsi les prophètes des religions monothéistes comme Jésus, Bouddha, Mahomet, Abraham...) et en l'unité de l'homme. Lili, fervente croyante, nous a également dit que cela s'inscrivait dans notre époque en reconnaissant la nécessité de la science pour ne pas sombrer dans le fanatisme. Sur le papier, c'est plutôt pacifiste et plein de bon sens, nous avons observé tout ça d'un œil lointain jusqu'à notre dernière journée où Marie nous a surpris au réveil en nous demandant d'apprendre aux CP l'oraison en français. Situation plutôt cocasse, emmitouflés dans nos doudounes, nous avons récité nos prières docilement en français, accompagnés des enfants sur motivés et qui se se sont super bien débrouillés avec l'accent !

L'autre grande rencontre de ce séjour, c'est la tía Lonsa, la cuisinière en chef depuis 20 ans !

Avec son œil malicieux un brin moqueur, elles nous a appris à confectionner le pain integral servi au petit-dej, nous a régalés avec ses gratins de quinoa, ses rillettes de maquereau, le quinoa au lait, les gâteaux à la chuchoca (sorte de semoule de maïs) ... Nous avons aussi goûté le café de higo, ou café de figue, qui était très répandu à la campagne il y a encore quelques années. Les figues séchées sont torréfiées et moulues, la version à base de blé est encore plus répandue, et cette poudre est infusée avec de l'eau selon le même procédé que le café. Très bon !

Le dernier jour, nous avons cuisiné tous les 3 un repas français : Bœuf bourguignon (au vinaigre de vin, école oblige, le vin n'a pas été autorisé) et gratin dauphinois. En dessert, une tarte tatin qui a bien failli ne pas voir le jour à cause d'une pénurie de gaz en pleine cuisson... Heureusement, la cuisinière à bois chauffe toujours à plein régime ! Avant de partir, la tía Lonsa a veillé à nous glisser des sopaipillas à la mode du Sud, c'est à dire sans potiron, dans un petit sac afin que nous ne mourrions pas de faim durant le trajet.

Ni de froid d'ailleurs grâce à la tía Meche qui nous a tricoté un cache cou et des chaussettes en laine filée par sa maman !

Bilan de cette expérience : nous aurons appris les rudiments du mapudungun, une langue qui ne ressemble en rien à celles que nous connaissons, nous nous serons mis à siroter du maté comme des pros. Nous aurons vu que les territoires Mapuche ne sont pas des zones de non droit comme peuvent le laisser croire les médias. Cécilia et Nelson, 2 profs de la communauté, nous auront fait entrevoir d'autres facettes de leur culture. En subventionnent davantage l'agriculture conventionnelle que les solutions naturelles, de même qu'en leur en "offrant" des maisons peu solides du style préfabriqué, maintient finalement les Mapuche dans une certaine misère et dépendance. La région est la plus pauvre du pays, et la mauvaise image entretenue par les faux attentats n'aident pas les entreprises à y investir leur argent. Malgré tout, nous n'avons rencontré que des gens motivés par le changement, ce qui donne bon espoir, et avons passé un super séjour !

Marie- Lili- Daniela- Cecilia- Gerardo- Rémy- Tío Ramón- Zoé- Tía Lonsa- Jessica
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Publié le 22 octobre 2018

Alors que l'hiver s'adoucit déjà dans la région centrale, nous poursuivons notre descente vers le sud et vers le froid. Les paysages changent, se font plus humides, verts et volcaniques. Nous quittons la région de l'Auracania pour entrer dans la région des fleuves, puis des lacs. Premier stop à Pucón, au bord du lac Villarrica et près du volcan du même nom.

Pucón

Le village est très mignon avec ses maisons en bois. L'ambiance quant à elle oscille entre la station de ski chicos, restos branchés pour touristes sur-équipés et l'auberge de jeunesse à ciel ouvert pour les mordus de sports extrêmes. On ne sait pas trop où se situer dans tout ça, mais c'est sympa !

Nous logeons dans une grande maison face aux cerros qui abrite 2 autres personnes à l'année. On y fait la connaissance de Diego, un étudiant en STAPS super sympa dont la spécialité est le kayak. Il nous explique que Pucón a la meilleure formation en la matière, et qu'il rêve de voyager en France à Pau où se situe le plus beau parcours en eaux vives... Une découverte pour nous !

Nouvelle "première fois" et pas des moindres : nous avons testé sur les conseils de Diego la laverie à la chilienne, mille fois plus familiale que la version morne parisienne 😊 On dépose nos vêtements à une dame qui nous appelle mi amor et qui nous les rend propres mais surtout secs, ce qui relève littéralement du miracle dans cette région humide, et repassés avec l'odeur de la lessive de ta maman. De quoi revigorer un voyageur fatigué !

Pucón a été une bonne base pour se reposer, visiter les alentours et profiter de la vie animée du village.

Parque Huerquehue

Pour profiter de la seule journée ensoleillée de notre séjour, nous avons opté pour une petite rando au parc Huerquehue, à 35km de Pucón. Si les derniers mois de volontariats ont forgé nos muscles, on était un peu rouillés niveau endurance... L'ascension dans la neige a parfois été périlleuse, mais le paysage en valait la chandelle! Dans les forêts d'araucanias millénaires, nous avons d'abord longé le lago Tinquilco pour arriver aux cascades Trufulco, puis au lago Chico et enfin au lago Toro. Face au lac gelé et dans un silence d'or, nous avons fait une pause maté et pique nique bien méritée.


Termas los Pozones

Comme la pluie était de la partie, décidés à ne pas se laisser abattre et à soigner nos cuisses de grimpeurs, nous sommes allés passer une journée aux thermes Los Pozones. Peut-être est-ce dû à leur situation au bout d'une route en cul de sac, ou à une chance inouïe (deuxième team 🤞), nous étions environ 7 à se partager les 5 puits naturels dont la température oscille entre les 35 et 50 degrés. Petite baignade tranquille donc, dans une ambiance rendue mystérieuse par la fine pluie, le bruit de la rivière toute proche et les nuages de vapeur.


Villarrica

Cette ville se situe à l'opposé de Pucón, aussi bien géographiquement sur le lac qu'en terme d'ambiance. C'est une "vraie" ville vivante, animée, plus chilienne et moins touristique que sa consœur. On y a enfin trouvé du fromage au goût plus marqué que les habituels gouda et queso mantecoso (danse de la joie) . Il y a également un petit marché d'artisanat Mapuche, toujours de belles fresques et une architecture en bois qui rappelle la colonisation allemande.

Grosse promo sur les jupons et les nappes avant les Fiestas Patrias 🇨🇱

Valdivia - Niebla

Nous avons poursuivi notre descente vers Valdivia. Cette ville est très connue au Chili suite au séisme qui l'a frappée en 1960, le plus fort jamais enregistré au niveau mondial avec une magnitude de 9.5, et au tsunami qu'il a engendré. La ville est sympa, fondée au confluent de 3 rivières et entourée de forts comme celui de Niebla que nous avons visité. À l'époque des colons espagnols, c'était une enclave stratégique avec accès au Pacifique qu'il fallait protéger des attaques ennemies.

Coïncidence ou non, Valdivia est le siège de la brasserie Kunstmann, une très bonne bière chilienne, mais aussi le gros centre universitaire du sud du pays. Le campus est très agréable, situé sur une petite île face à la ville, nous avons pu retrouver les joies du pique nique sur la pelouse de la BU !

Il dispose également d'un jardin botanique où l'on a pu voir de plus près les arbres qui constituent le Bosque Valdiviano (ou bosque siempre verde = toujours vert) caractéristique de la région.

Pas de mystère, si c'est si vert et dense, c'est qu'il pleut souvent! L'un des arbres qu'on a le plus aimé et que l'on a souvent retrouvé au Chili, c'est l'arrayán dont le tronc est orangé.

L'attraction de Valdivia, c'est aussi son marché fluvial où les lions de mer font partie du décor et guettent le moindre morceau de poisson abandonné, quitte à être offensifs.

Puerto Montt - Puerto Varas - Frutillar

Dernière étape de cette traversée de la région des lacs: Puerto Montt. C'est la première fois depuis le début du voyage que le feeling ne passe pas avec une ville.

À sa décharge, nous sommes arrivés un dimanche gris de bonne heure. Néanmoins, l'ambiance triste et miséreuse des ports est pesante. Les regards ne sont pas très amicaux, et on croise plusieurs personnes, parfois jeunes, dont la nuit semble avoir été agitée. Cela semblait donc mal parti puisque nous avions choisi cette base pour se balader dans les environs (plus jolis mais plus chers). Heureusement, Stéphanie nous accueille chez elle avec tant de dynamisme et de bonne humeur qu'on reprend du poil de la bête!

Nous nous sommes baladés dans les villages de Puerto Varas et de Frutillar, très marqués par l'architecture et la culture allemande, tout deux situés au bord du lac Llanquihue et face aux volcans Osorno et Calbuco.

La célèbre cape capuche frontale est aussi pratiquée par les élèves chiliens

Maison/musée/œuvre d'art de Pablo Fierro où nous sommes tombé sur l'artiste. C'est un projet fou qu'il mène depuis plus de 15 ans et qui évolue au fil du temps, la maison est pleine d'objets insolites. Elle devrait atteindre sa forme définitive l'année prochaine...

Saltos de Petrohué - Lago todos los Santos

Le coloc de Stéphanie, notre hôte, nous avait dit à propos des Saltos de Petrohué "Préparez-vous à voir une merveille." On ne savait pas très bien comment se préparer, et on avait surtout peur d'avoir de trop grandes attentes (l'effet des recommandations en voyage 😉) alors on y est allé tranquillement. Et c'est vrai que c'est l'un des plus beaux paysages que nous ayons croisés au Chili. Les couleurs déjà: entre les nuances de vert de la végétation abondante, le bleu parfois turquoise et la transparence de l'eau, le blanc de la neige sur le volcan Osorno, le soleil éclatant, ça nous a éblouis. Les sons ensuite, le bruit des torrents et celui des oiseaux dans les petits sentiers alentours. Bref, on a aimé.

Des saltos, nous avons poursuivi sur le sentier de randonnée "El Solitario" qui grimpe sur le Volcan Osorno. Les balises du chemin jouent à cache à cache, ça donne un côté ludique à la rando. En quelques heures, on passe des coulées de lave où le soleil cogne à une jungle humide, presque étouffante tant l'abondance des feuillages cache le ciel. Tant de beauté ça épuise, et le pauvre conducteur qui nous a pris en stop pour rentrer à Puerto Varas en a fait les frais, nous nous endormons au bout de 5 mn de trajet !

A l'auberge, nous rencontrons Victoria, une étudiante en STAPS à Grenoble qui fait du ski freestyle et voyage avec ses rollers sur le dos. Nous avons passé quelques jours de pluie ensemble, et au retour du soleil, avons décidé de faire ensemble la rando "Pasó Desolación" (notez les noms qui donnent envie).

Sur place, on rencontre un couple français (et oui, ce coin était truffé de compatriotes) qui a le même type de visa Vacances Travail que nous mais en Argentine. Ils en profitent pour faire un passage au Chili, et nous racontent leur expérience de 2 ans en Australie, toujours avec ce même visa. Nous faisons la rando tous ensemble en parlant voyage, tandis que les paysages toujours aussi riches en couleurs et variés défilent sous nos yeux.


Nous terminons cette traversée de l'Araucania, de la Région des fleuves et de celle des lacs avec de beaux souvenirs, du vert et du bleu plein les yeux !

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Publié le 17 novembre 2018

Début septembre, nous nous envolons vers la ville la plus australe du Chili, Punta Arenas, dans le détroit de Magellan. L'ambiance de la ville est particulière, on se sent tout à coup un peu moins au Chili mais au bout du monde. Les cargos attendent dans le port aux côtés des cormorans, le drapeau national se fait plus rare au profit du drapeau de la région Magallanes. On comprend que le sentiment d'appartenance à cette dernière soit plus fort, la province n'est reliée au Chili que par les airs ou par l'océan. Par voie terrestre en revanche, pas d'autre choix que de passer par l'Argentine.

L'architecture très européenne nous surprend et l'on croise des gens aux origines multiples, ce qui n'était jusque là pas très fréquent en dehors de Santiago. Il paraîtrait que la moitié de la population de la ville aurait des ascendants croates. En se baladant dans le cimetière, on croise en effet de nombreux mausolées rivalisant de grandeur de familles allemandes, croates, italiennes, et même françaises, venues s'installer à la fin du 19ème siècle. Cette période est l'âge d'or de la ville qui occupe une position stratégique, reliant les océans Atlantique et Pacifique et servant de base pour les explorations en Antarctique. Ces familles de colons et immigrés ont fait fortune dans la laine, l'élevage des moutons pour leur viande et leur laine, d'autres dans les mines d'or et de charbon.

Nous profitons de cette visite au milieu des allées colorées, des panachés de fleurs en tissus toutes plus éclatantes les unes que les autres pour faire un vœu devant l'indiecito, un mystérieux indien au nom inconnu qui accomplirait des miracles... Affaire à suivre.

L'Indiecito

Nous sommes vite frappés par le niveau de vie plus élevé que dans les régions que nous venons de traverser. Si l'isolement de la région rend certains produits, notamment alimentaires, plus onéreux, l'arrivée de cargos en provenance d'Asie en rend d'autres plus accessibles, dont l'électronique. D'après nos rencontres, ce serait la ville chilienne offrant la meilleure qualité de vie. Les salaires sont légèrement plus élevés pour la rendre attractive, car l'ouverture du canal de Panama en 1914 et la concurrence des laines de Nouvelle Zélande avaient porté un coup à l'économie régionale. L'exploitation des hydrocarbures dans le détroit lui a redonné de beaux jours...

Agréable découverte à notre arrivée, les maisons sont chauffées au gaz, en partie subventionné par l'état compte tenu de la rigueur du climat, et plusieurs sont dotées de fenêtres en PVC, une première! Nous retrouvons avec émotion la douce sensation de dormir sans chaussettes ni bonnet.


Quelques jours plus tard, nous prenons le bus pour Puerto Natales dans la province d'Ultime Espérance, un nom prometteur comme on les aime au Chili! En voyant les paysages défiler sous nos yeux, la pampa jaune doré et les lagunes bleu nuit, on commence à se laisser bercer par le charme de la Patagonie.

La ville est jolie, les maisons sont basses et colorées. C'est un joyeux mélange de randonneurs tous de fluo vêtus, ambassadeurs Quechua venus se confronter aux treks du parc Torres del Paine non loin, et de Gauchos des estancias environnantes au béret vissé sur la tête et éperons aux pieds, accompagnés de leur famille pour les commissions hebdomadaires. Cela donne à Puerto Natales un air loufoque mais très attachant. Le vent est un élément indissociable de la ville, il n'est pas rare de se faire happer par une bourrasque à l'angle d'une rue et de se retrouver aveuglé par une capuche trop imposante. Nous aurons tôt fait de comprendre qu'il règne en maître dans cette région...

C'est un de ces jours de grand vent que nous rencontrons Karen, Ricardo, Almendra et Matilde, la famille avec laquelle nous allons vivre un mois. Nous les retrouvons à 19h dans une petite cabane de pêcheurs sur le port où s'entassent leurs provisions pour la semaine et les cartables des filles. Ils vivent sur la péninsule Antonio Varas, face à Puerto Natales, qui n'est accessible qu'à l'aide d'un bateau à moteur. Le vent souffle fort, Don Lucho le propriétaire du bateau préconise la patience. Nous discutons, jouons avec les filles qui semblent nous avoir déjà adoptés à coup de "trois petits chats" local. Don Lucho suit les prévisions météorologiques avec attention, et nous indique que le vent devrait tomber sur les coups de 23h. Nous en profitons donc pour retourner dans le centre et faire connaissance autour d'une pizza bien chaude.

A 23h, le verdict tombe : le vent est trop violent, nous devrons reporter la traversée au lendemain. Il faut alors activer le plan B: chercher un hébergement pour la nuit. Nous avions déjà eu des dizaines d'illustrations de la capacité de résignation/du fatalisme (on ne sait pas toujours pas très bien comment le qualifier) des chiliens, mais ce nouvel exemple a achevé de nous impressionner. Pas un grognement lorsqu'ils se sont aperçus qu'ils n'avaient pas les clés de la maison dans laquelle ils passent la nuit si besoin, ni lorsque les filles ont du braver le vent, de nuit, en sandalettes à talon et robe traditionnelle nouvellement reçue, ni lorsque nous avons atterris dans un dortoir un peu miteux au tarif injustifié. Ça en bouche un coin.

Départ aux aurores, et bel arc en ciel à notre arrivée.

Le lendemain à 7h00, nous retrouvons Lucho et, miracle, le vent s'est calmé. Nous embarquons les victuailles, les yeux encore mi-clos, et en 5mn de traversée, nous rejoignons la péninsule. C'est fou de réaliser à quel point nous sommes soumis aux éléments.

Le périple n'est néanmoins pas encore terminé. Entre 45mn et 1h de jeep sur une piste, à travers un ruisseau puis dans la boue avant d'arriver à l'estancia. Vivre en Patagonie, ça se mérite. Leur "jardin" est digne d'un paysage de parc naturel. On s'installe dans notre cabane à 5mn de la maison, sans électricité, l'eau vient d'une source un peu plus eau et le poêle sera notre meilleur ami. C'est assez fou, la cabane regorge de trésors : une côte de baleine, rien que ça, pour faire sécher nos serviettes, une vieille radio, des bouquins d'explorateurs... Et la vue au réveil est un spectacle différent chaque matin.

Notre cabane au fond de la Patagonie

L'organisation de la vie (ou de la survie?) de la maison suit un rythme qui semble inaltérable. Ici, nous ne sommes raccordés ni à l'électricité, ni au gaz. Un panneau solaire et une petite éolienne (de rigueur vu les fréquentes bourrasques à 100-120km/h) chargent les batteries permettant de s'éclairer le soir dans la maison principale, de regarder la télé quelques heures et de lancer une machine. Un peu de 21ème siècle dans cet endroit hors du temps. Lorsque les batteries ne suffisent pas, un générateur à essence sert de renfort.

L'éolienne dont il a fallu désenrouler les câbles pour qu'elle fonctionne correctement

Une petite présentation de notre famille s'impose. Ricardo, dont nous avons fêté les 60 ans lors de notre séjour, vit dans cette maison depuis toujours ou presque. Beaucoup de meubles, dont la machine à coudre à pédale, appartenaient à ses parents, et la décoration très axée sur les oiseaux de la Patagonie et les bateaux doit dater de la même époque. Ses parents s'y sont installés lorsque les terres ont été récupérées par l'état à de grandes entreprises et redistribuées aux habitants en location. Ils ont ensuite pu l'acheter et y élever jusqu'à 4000 brebis. Aujourd'hui, à cause de la prolifération de lapins, des renards et des pumas, Ricardo n'a plus que 800 brebis et une centaine de vaches.

Karen quant à elle a 38 ans. Elle est vétérinaire de formation, et surveillait / observait la population de pumas dans le parc Torres del Paine. Elle a rencontré Ricardo alors qu'elle était en mission sur la péninsule pour réguler le problème des lapins omniprésents (vaste sujet). Elle s'y est installée avec Almendra encore bébé, et a eu une petite fille avec Ricardo, Matilde.

Au cours de notre séjour, nous avons été rejoints par les parents de Karen, Adriana et Raúl (le roi incontesté de l'inaction haha).

Papi Raúl, Karen, Les filles Almendra et Mati, Mamie Adriana et Ricardo

Ricardo et Karen vivent de 3 activités: la laine, la vente d'agneaux et la vente de bœufs. Nous avons été surpris de ne pas voir les animaux à notre arrivée, et pour cause: le terrain fait plus de 5000 hectares, et tous se baladent tranquillement ! Ricardo les rassemble parfois à cheval, notamment pour la tonte.

Ce volontariat nous a vraiment plongés dans un autre style de vie! La journée commence pour nous à 8h00 au son de la radio argentine, mais à 5h00 pour Ricardo qui allume alors tous les feux de la maison, avant de prendre un mate. Après le petit dej (une grande assiette de maïzena et lait pour Ricardo 😟), chacun file à ses activités.

Pour Rémy, il s'agit d'une bonne heure ou plus à couper du bois pour alimenter tous les foyers, et surtout celui de la cuisinière où je m'affaire toute la matinée avec Karen. Ricardo l'embarque ensuite en jeep débiter un arbre mort, chasser des canards sauvages ou lapins pour faire des pièges à renard/puma (ce dernier étant protégé, il ne le chasse pas mais veille à ce qu'il n'aneantisse pas son troupeau), ou réparer des clôtures... Je nourris les poules, ramasse les œufs, m'occupe du compost et autres taches domestiques pendant que Karen fait tous les lits de la maisonnée (mission incroyablement longue compte tenu des dizaines de couvertures sur chaque lit) et s'occupe de faire cours aux filles.

Et oui, le périple pour aller à l'école est tel qu'Almendra (8 ans) n'y va qu'une fois par semaine. Le reste du temps, sa maman lui donne des exercices et des leçons à étudier, environ 2 à 3h par jour. Sa sœur Mati (6 ans) entrera à l'école l'année prochaine, mais elle fait déjà quelques exercices d'écriture et d'addition simples. Nous avons pu constater que, Patagonie ou pas, la bataille des devoirs reste la même pour tous :)

Un de nos grands plaisirs a été d'inventer des problèmes pour réviser les multiplications avec Almendra. Nous avons aussi été amusés de constater que la notion de "jours de la semaine" était très confuse pour les filles, car chaque jour se ressemble et suit le même rythme, difficile de distinguer un dimanche d'un mardi :)

Nous avons eu la chance de célébrer les Fiestas Patrias (commémoration du premier gouvernement chilien) peu de temps après notre arrivée. Certes, l'isolement nous aura privé d'assister à la débandade nationale que nous avaient annoncé tous les chiliens sur notre route (cette année, les jours fériés s'agencent si bien qu'une semaine entière est chômée !) mais nous avons bien ri ! Au programme:

- Hisser le drapeau chilien (c'est obligatoire, bien qu'aucun témoin aux alentours ne puisse nous dénoncer).

- Préparer des anticuchos (brochettes) à base de viande de mouton bien sûr, de knackis et de longaniza, une saucisse très parfumée.

- Boire un bon Pisco sour.

- Chanter et danser la cueca !

Le lendemain, nous avons remis ça en confectionnant des dizaines d'empanadas frites, toujours au mouton, un délice.

Asado à l'intérieur à cause de la pluie !

Parmi nos missions, il y a eu la construction d'une serre résistante aux rafales de vent pour cultiver les légumes de la famille. Nous avons aussi tressé du colihue, une sorte de bambou chilien, pour créer un pot autour d'un arbuste.

Le résultat final avec des poids en sable, des briques, et des cordes. Jusqu'ici, ça fonctionne !

Lorsque l'abuela Adriana est arrivée, Karen et moi avons eu un peu plus de temps pour aller poser un filet de pêche dans la mer qui nous fait face. Bonne prise, la première nous a donné 3 robalos (sorte de bar) et la suivante, 8 robalos et 4 saumons échappés des élevages environnants. On s'est régalé !

La mission la plus marquante reste l'affaire du bœuf ! La tonte étant réalisée par Don Iván, un spécialiste qui vient de la ville et reste toute la durée de l'opération sur la péninsule, il a fallu faire le plein de viande. Ce monsieur ultra carré mange un solide petit dej (steack, œufs fruits et saucisses, rien que ça) et de la viande midi et soir. Aux grands maux les grands remèdes, Ricardo a embarqué Rémy et 2 autres voisins pour aller tuer un jeune bœuf au fusil. Pas de petit speech sur l'aspect sensible de la question, Rémy s'est retrouvé au cœur de l'action, aidant à découper à la scie l'animal mort... On ravalera nos questionnements sur la cause animale (comme ceux sur le machisme dans d'autres situations). Pour ma part, je m'occuperai de découper chaque morceau de viande pour en faire de petits sachets pour la soupe, les steaks etc. l'occupation d'une journée. Le congélateur a été branché pour l'occasion et rempli pour 3 mois.

Attention âmes sensibles...

Notre séjour a été marqué par l'époque de la tonte, l'esquila ! Nous avons accueilli Don Iván, l'esquilador, qui habite une petite cabane à côté le temps de la tonte. Ricardo a progressivement ramené les brebis à cheval durant 4 jours. Les journées ont été légèrement réorganisées pour l'occasion. Les hommes et Karen partent à 8h à la tonte, Adriana et moi-même restons aux fourneaux. À 10h, pause petit déjeuner pour les hommes qui font le plein de protéines, demi pause debout sur un coin de table pour Karen... À 13h, tout le monde déjeune, et on repart pour l'esquila, cette fois moi comprise, jusqu'à l'heure du thé à 18h.

Don Iván a un dos colossal, et le voir tondre est une chorégraphie incroyable, fascinante même. Entre le moment où il saisit une brebis, où Karen la vaccine, et où il la relâche une fois tondue, il ne se passe uniquement que 3 minutes ! Les brebis pleines passent en priorité. Viennent ensuite celles qui ont déjà un agneau, puis les mâles. Don Iván tond d'abord la guata, le ventre en chilien, que l'on ramasse pour la mettre à part. Il tond ensuite en une pièce le vellón, le reste de la laine,dont nous faisons une boule pour l'entreposer plus loin. La laine de meilleure qualité est celle des brebis d'un an, nous la mettons donc à part car ils la vendront plus chère. En deuxième position dans l'ordre de valeur, le vellón des brebis blanches, puis la guata, puis les petites bouloches qui traînent par terre qui elles serviront à faire du remplissage de coussins, doudounes... La laine noire quant à elle ne vaut rien, ils la gardent donc. Nous l'avons nettoyée avec Karen pour qu'elle la tricote et en fasse des chaussons !

Nous avons assisté à beaucoup de naissances, de morts également, vu des petits abandonnés par leur mères... Pour nos cœurs sensibles de citadins, ça a été une rude épreuve ☺️

À la fin de la tonte, Adriana a cuisiné un disco, un plat en forme de disque sur le feu, à base de lapin, de bœuf, de patates, carottes, oignons excellent ! Karen à la guitare et Adriana en chef de chœur et du feu ont entonné des chansons folkloriques chiliennes, une belle façon d'amorcer la fin de notre séjour...

Toujours avoir un poney rose avec soi pour les soirées mondaines

Nous avons appris énormément aux côtés de Karen et Ricardo (et on a bien bavardé avec abuela Adriana pendant nos longues heures de cuisine!), ce sont vraiment des puits de savoir. Karen a été hyper accueillante, curieuse de tout. Les filles nous ont parfois épuisés, mais on s'est bien attachés à ces petites boules d'énergie. Que de courses, parcours d'obstacles, sessions bracelets brésiliens, jeux de mains, polly pockets, coloriages et j'en passe! On aura bien progressé en espagnol grâce à elles, mais aussi grâce à la novela "Isla Paraíso" qui nous a tous réunit avec assiduité chaque soir devant l'écran 😀

Nous avons eu la chance de vivre dans des paysages incroyables, de voir des condors... Ce mois aura été riche en premières fois, en discussions variées et petits rituels, et nous aurons eu du mal à quitter la péninsule (au sens figuré comme au sens propre, notre ferry a été retardé de 2 jours). Cette expérience nous aura marqués et l'on espère avoir l'occasion de revoir toute cette petite famille !

En rouge c'est nous !

Top 3 des expressions enseignées par l'abuela Adriana:

Limpiar donde mira la suegra: passer un rapide coup de balai, "où regarde la belle mère"

Si no te gusta, ponle de sombrero: quand les filles ne veulent pas goûter un plat, "si ça ne te plaît pas, tu n'as qu'à t'en faire un chapeau !"

Quedo la escoba : laisser tout en plan, "le balai est resté là."

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Publié le 28 novembre 2018

Quitter Puerto Natales a été une longue épopée ! Deux options s'offraient à nous: la voie terrestre, avec une boucle par l'Argentine pour contourner la portion chilienne faite de fjords et de glaciers, ou la voie maritime par un ferry de 41h. Intrigués par cette dernière possibilité, nous avons dégainé tout fiers nos cartes d'identité chiliennes pour acheter le billet.

L'embarquement était initialement prévu un mercredi à 22h, pour un départ à 4h du matin le lendemain. Finalement, les vents auront encore prouvé leur toute puissance, nous quittons Karen et toute la famille le jeudi soir pour l'embarquement repoussé au lendemain matin.

Vendredi, 10h, la fleur au dent, nous montons à bord du Crux Australis en compagnie d'une soixantaine de passagers. Le ferry embarque également des camions, des motos, il y a des animaux, du bois, des sacs de croquettes ou de farine,... Beaucoup de familles viennent de très loin pour s'approvisionner en "ville", le trajet est opéré 2 à 3 fois par mois.


Notre itinéraire, 41h de traversée au programme...

Lorsque le bateau prend enfin le large à 17h, on a déjà bien pris nos marques, dégusté notre premier repas et discuté avec quelques passagers. Déjà 7h au compteur, on est paré pour la suite, ou plutôt pour le véritable commencement.

Pas loin de 60h plus tard, soit 8 repas qui ont rythmé nos journées, 127 allées-venues sur le ponton à voir défiler des paysages quasi mystiques, environ 12 films diffusés, 8 podcasts écoutés, beaucoup de maté pour duper la faim liée à l'inaction, 4 nouveaux copains suisses, mexicains et chiliens, la naissance d'un nouveau couple (dans cet environnement en huis clos, tout prend des allures d'Orient-Express ou de Loft Story, les langues se délient vite avec nos co-detenus), d'innombrables échanges de cartes topographiques et de conseils GoPro entre motards, un ballon reine des neiges et 1 livre perdus par de jeunes parents,... nous arrivons à Caleta Tortel en pleine nuit.


Il est temps de dire au revoir à Daniel qui continue le périple jusqu'à puerto Yungay où il va travailler sur la création de nouvelles routes, et Adriana (qu'on recroisera en fait une paire de fois ensuite) qui rejoint le logement de fonction où l'attend son nouveau boulot.

Alexis, notre nouveau copain chilien et désormais gourou, est en possession d'une bonne adresse où dormir. Fabienne et Maurizio, un couple de retraités suisses, Yocelín, une mexicaine super enthousiaste expatriée au Chili, et nous-mêmes formons un petit clan animé par une seule quête : remonter la Patagonie par la Carretera Austral. Pour l'heure, notre mission semble compromise car la propriétaire du super hébergement d'Alexis n'est finalement pas sur place (et oui, on arrive avec 3 jours de retard, un dimanche soir en pleine nuit). Nous nous faufilons à travers les passerelles en bois du village pour tomber sur le seul hébergement ouvert. La dame nous annonce le prix le plus cher de notre vie chilienne, mais après avoir fait une contre vérification dans les alentours sous la pluie, nous nous résignons tous à poser nos sacs chez elle. La soirée ne sera pas perdue pour autant, nous avons gagné une invitation à la teuf du village. Haut les cœurs, on suit notre hôte à la salle des fêtes.

Les basses sont au maximum, la musique résonne dans la salle quasi vide. Seul un petit groupe est arrivé, notre hôte nous rassure en précisant qu'il est encore un peu tôt. Nous aurons bien ri en esquissant quelques pas sur le parquet de la salle de basket/fête, et la présence de notre petit groupe aura quelque peu aidé à faire décoller le chiffre d'affaire de la buvette.

Ambiance survoltée sur le parquet

Le lendemain, nous partons nous balader dans le village de Caleta Tortel qui a la particularité d'être construit sur des pilotis et à flanc de colline. Ici, pas de route, de voitures ni même de bicyclettes, on découvre la ville en empruntant un réseau sinueux de passerelles et d'escaliers en "ciprés". Le village est paisible, les couleurs contrastées, on imagine les efforts colossaux pour le bâtir au fin fond des fjords.

En ce jour férié (fête de la "Rencontre entre les deux mondes", une tournure toute en retenue pour qualifier l'arrivée de Christophe Colomb), nous peinons à trouver de quoi nous restaurer. Heureusement, le club du troisième âge de Caleta Tortel, dont les membres doivent être en super forme vu la configuration de la ville et ses escaliers, nous accueille gentiment. Une dame nous prépare des completos dans une ambiance improbable de pépés qui trimballent des enceintes pour une fête.

Rémy au club du 3ème âge, entre la faim et l'envie de faire une belote.

Le soir venu, notre fine équipe entame la fameuse Carretera Austral en direction de Cochrane, une ville moins onéreuse que la jolie Caleta Tortel. Cette fois, c'est Yocelín qui a une bonne adresse ! On passe une super soirée près du feu, Maurizio notre italien installé en Suisse nous prépare avec les moyens du bord des spaghettis, le tout accompagné d'un vin chilien.

Mines réjouies

La Carretera Austral a été inaugurée par Augusto Pinochet dans les années 1980 pour relier la Patagonie du nord, longtemps isolée, au reste du Chili. Elle est la continuité de la fameuse route Panaméricaine qui traverse le continent depuis l'Alaska. Autant dire que le voyage en soi est une aventure et un défilé de paysages grandioses. Mais pour y avoir droit, il faut se lever tôt ! Départ le lendemain à 6h30 en direction de Coyhaique, notre troupe a bien failli être séparée suite aux calculs hasardeux de notre chauffeur néanmoins très jovial de si bon matin. Nous faisons un arrêt à Puerto Tranquilo sur le lac général Carrera, réputé pour la couleur turquoise de son eau et les "chapelles de marbre" au milieu du lac. Nous avions prévu d'y passer quelques jours, mais la pluie incessante rend le village un peu triste et l'eau plutôt grise. On file donc rejoindre le Cerró Castillo avant 13h, heure à laquelle la piste sera fermée pour poursuivre son élargissement à l'aide d'explosions de dynamite. Là haut, tout est enneigé ! Nous devons attendre les instructions des ouvriers avant de continuer notre chemin.

Nous arrivons à Coyhaique, la route a été très belle. C'est là que nous laissons Alexis, notre compagnon de route chilien, ainsi que Fabienne et Maurizio, le couple suisse. Nous gardons bien entendu nos contacts pour se recroiser sur la route... Nous avons rendez-vous avec notre hôte couchsurfing, Felipe. Ils nous entraîne chez lui, sur les hauteurs de la ville. Sa motivation pour se rendre à l'entraînement de boxe diminue à vue d'œil, et c'est tant mieux pour nous car cela débouche sur une énorme pièce de bœuf rôtie au four, des patates, d'autres copains et beaucoup de vin ! On a passé une super soirée dont il ne reste aucune trace photographique, sauf celle d'un de ses copains trop heureux de nous dévoiler son nouvel achat, un matelas gonflable ultra fin isolant dont Rémy fera la démo.

Le lendemain, nous quittons Felipe qui a fait l'école buissonnière (il est psy dans un collège) et reprenons la Carretera Austral ! Nous avions prévu de faire du stop, mais vu l'heure tardive de notre réveil, le bus fera l'affaire. Direction Puyuhuapi, un tout petit village au fond d'un fjord fondé par 4 colons allemands de Tchécoslovaquie (incongru !).

Sur place, l'épicier nous souffle que peut-être, avec un peu de chance, il se pourrait qu'il y ait enfin une acalmie le lendemain. On croise doigts et orteils, car la pluie nous poursuit sans relâche.

Miracle, pas de pluie à notre réveil, on fonce se balader dans le parc naturel Queulat dans l'espoir de voir le premier glacier de notre vie. Sur le chemin, on rencontre une fois de plus un compatriote, Bernard, un bordelais retraité de la Poste avec qui nous entamons la rando. Le sentier, bien que pentu, est très agréable et nous entraîne sur un pont suspendu, dans des forêts humides, jusqu'à la découverte finale, le Ventisquero Colgante (glacier suspendu). On reste sans mot, c'est impressionnant, le glacier est long d'environ 2km, et son volume diminue malheureusement d'année en année. La couleur bleue de la glace est surprenante, tout comme le vert jade de la lagune. Plus bas, dans la rivière, d'imposants rochers ont été entraînés ici suite à la fonte des glaces.

Cette randonnée nous a livré un spectacle épatant, malgré la grisaille.


Nous voici arrivés à notre dernière étape sur la Carretera Austral (qui continue quant à elle jusqu'à Puerto Montt), Chaitén. Deux volcans la dominent, le Corcovado et le volcan Chaitén. Ce dernier ne paie pas de mine, il passe même inaperçu, pourtant, en 2008, il entre en éruption et provoque l'évacuation de toute la population. Chaitén est alors devenu une sorte de ville fantôme, car le gouvernement a décidé de la "déplacer" plus au nord, décision finalement abandonnée deux ans plus tard. Ce qui surprend toutefois, ce sont les coulées de lave encore visibles sur la plage, et la largeur incroyable des routes, comme pour en faciliter l'évacuation. Le village est peu peuplé, mais très étendu !

Plus de 920km parcourus depuis Caleta Tortel, nous quittons la Patagonie émerveillés par l'intensité des couleurs, la force des vents, l'isolement, les pistes escarpées, et l'accueil parfois brut mais chaleureux de ses habitants.

1. Trajet en ferry / 2. Trajet par la carretera austral
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Publié le 8 décembre 2018

Afin de parfaire notre expérience de la flotte chilienne, nous embarquons à Chaitén pour une nouvelle traversée en direction de l'île de Chiloe. Cette fois, nous avons droit à une cafétéria fort coquette où l'on peut siroter son maté en matant des reportages sur une télé à tube cathodique, des fenêtres avec vue panoramique et même une terrasse sur le ponton. Ajoutons à cela une ponctualité exemplaire, et en avant la croisière s'amuse !

Nous arrivons au port de Quellón qui a grise mine, nous filons donc à Castro, à une petite heure de là, où nous établirons notre base pour nous balader sur l'île. Celle-ci n'est pas immense, environ 180km du nord au sud pour une cinquantaine de kilomètres de largeur, mais c'est la plus grande de l'archipel auquel elle appartient.

C'est avec stupeur et allégresse que nous retrouvons enfin le soleil et les températures du printemps ! Qui l'eut crû, Chiloe ayant la même réputation que notre chère Bretagne.

Pour notre première balade, nous optons sans surprise pour une activité riche en adrénaline: le marché dominical de Dalcahue. Une petite partie est consacrée à l'alimentaire et aux babioles de toute sorte, mais sa renommé est plutôt due aux artisans de l'île qui y vendent leurs créations en laine de mouton (différents de la Patagonie 😊).

Au hasard des rues, notre fin odorat de bons français a été attiré par une odeur familière. Nous osions à peine y croire, trop beau pour être vrai... Mais oui, nous sommes tombés sur une fromagerie ! Devant nos yeux ébahis, un petit monsieur nous demande ce que nous cherchons : du fromage affiné ! Il parcourt ses étagères et en sort un premier pour nous le faire déguster, nous prévenant qu'il est "fort". Pleins d'espoir, nous le goûtons, mais d'un regard en coin, nous nous rendons tristement à l'évidence... La déception a dû se lire sur nos visages, car le fromager nous dit "Bon, pour les gens qui aiment vraiment le fromage, qui ont un goût plus mûr, j'ai autre chose..." Et du fond de la boutique, il nous apporte un petit paquet qui doit être à peine plus jeune que lui. Et là, c'est la révélation, l'émotion, le goût de la maison. Un vrai fromage qui sent fort, qui a une croûte et du goût youhou ! Après mille mercis, nous partons en quête de pain pour savourer notre trophée au bord de l'eau.

Le lendemain, toujours en quête de sensations extrêmes, nous nous aventurons sur la péninsule de Ten Ten face à Castro. Armés de bâtons glanés en chemin, nous bravons la horde de chiens errants qui semblent fort intéressés par nos mollets (beaucoup d'émotions qui nous vaudront plus tard une glace de réconfort sur la place où les groupes de jeunes s'entraînent aux chorés de K-pop, mais c'est une autre histoire...)

Chiloe est une île de pêcheurs, l'eau est partout. Depuis la péninsule, on aperçoit mieux les palafitos, les maisons construites sur pilotis. C'est une farandole de couleurs toutes plus vives les unes que les autres. Nous nous sommes tout de suite bien sentis à Castro, les rues sont animées mais l'ambiance est paisible. À la sortie de l'école, la place principale se remplit et on assiste à un défilé auquel le Chili nous a bien habitué, de vendeurs de glaces, de Super 8 (sorte de barre chocolatée qui a un succès fou), churros et autres délices estampillés "Alto en calorías" par le gouvernement.

Sur cette fameuse place trône l'église San Francisco, d'un jaune éclatant serti de violet. Des missions évangélistes jésuites sont venues sur l'île dès le 18ème siècle et ont mené la construction de dizaines d'églises. Leur particularité est d'être faites de bois, avec un système qu'on retrouve sur les palafitos, de petites tuiles de bois superposées. L'île en compte plus de 150 aujourd'hui, dont plusieurs sont classées au patrimoine mondial de l'unesco.

Lors de notre escapade sur l'île, nous avons retrouvé 3 de nos compagnons de la carretera austral ! Fabienne et Maurizio, le couple de retraités suisses, avait loué une voiture et nous a embarqués avec Yocelín, notre mexicaine expatriée au Chili, pour une balade sur la côte ouest. Attention, on est bien loin de LA, San Francisco etc. Chiloe, encore une fois, c'est paisible, on prend le temps. Premier stop à Chonchi, une petite ville pleine de vie avec une belle église à la nef étoilée. Nous passons ensuite à Cucao, pour voir ... encore une église, oui, toute petite et certes moins sophistiquée que ses voisines mais avec beaucoup de charme. Une cabane colorée apparaît sur notre route, c'est le moment de faire une pause repas toujours très équilibrée : empanadas au fromage, et mote con huesillo (une sorte de jus de pêche et canelle dans lequel flottent une petite pêche et de gros grains de blé cuits, à boire très frais, l'emblème du Chili). Le cadre est idyllique, on profite de ces rencontres qui jalonnent notre voyage.

La dernière étape de cette journée est le Muelle de las almas, le pont des âmes. La randonnée pour y accéder nous fait penser à un mélange de pays Basque et de méditerranée. La végétation est luxuriante, c'est calme, quelques moutons nous tiennent compagnie, la vue est très belle. Nous arrivons au fameux pont entouré de falaises. La légende raconte qu'il existe une âme universelle, de laquelle nous sommes issus à la naissance. Notre âme devient alors individuelle. Lorsqu'un être humain meurt, son âme le quitte et prend une autre forme, Pillü. Dans cet état, l'âme reste près des lieux où elle a vécu. Mais cet état est dangereux, il ne peut être que temporaire au risque pour l'âme d'être attrapée par de mauvais esprits et de rester coincée dans cet état. Elle doit donc se rendre jusqu'à ce pont pour rejoindre l'horizon puis le ciel et se transformer en Alwe. Dans ce nouvel état, l'âme peut revenir sans risque sur les lieux chers à son cœur pour accompagner et aider ses proches. Quand le temps passe et que plus personne ne se souvient du défunt, l'âme retourne se dissoudre dans l'âme universelle...

Chiloe, par son insularité, possède une mythologie riche très centrée sur le monde de la mer et donc peuplée de sirènes, nous avons entrevu une culture bien différente du reste du Chili.

Cette balade nous a beaucoup plu, peut-être avons-nous été emportés par l'atmosphère mystique, mais il nous a semblé que les paysages avaient eux aussi une âme !

Il nous a fallu quitter pour de bon nos acolytes, à moins que nos routes ne se recroisent à nouveau...

Nous terminons notre séjour chilote par une escale à Ancud, son marché et le quartier des vieilles maisons colorées.

Ces colliers qui pendouillent sont en fait des sortes de moules et mollusques séchés : cholas, navajuelas et piure.

La fin de notre vie chilienne approche, cette petite parenthèse à Chiloe nous a permis de nous reposer avant de faire le tour des adieux 😊

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Avant de nous envoler pour notre ultime étape chilienne, un petit tour des lieux et personnes chers à nos cœurs s'imposait...

Santa Ana, nous (re)voilà ! Après y avoir passé plus de 2 mois entre mai et juin, les astres se sont alignés pour que nous revenions à temps pour la despedida d'Ollie (les adieux), l'anglais qui lui a passé plus d'un an au vignoble de Pie et Sharif. Avec l'aide de Pie et de Tamara, nous organisons notre arrivée surprise. Dès la descente du bus, nous retrouvons le soleil brûlant de la vallée de Colchagua et le sourire de Tamara qui débarque en jeep. Les retrouvailles avec Marcela, Claudio, Pie, Sharif, Tamara, Ollie et tous les voisins autour du barbecue furent mêlées d'excitation et d'émotion ! Tout a changé, et rien à la fois. Avec le recul, nous nous revoyons arriver à tâtons il y a plusieurs mois dans cet univers tout nouveau, et l'on se sent désormais plus confiants, cce hameau, c'est un peu notre famille chilienne. Nous avons passé un week-end, et même une semaine de festivités déjantées comme il est de rigueur ici. Refaire le monde avec Claudio, danser sur du reggaeton avec Marcela, faire une tatin de betteraves avec Pie, débattre inlassablement avec Sharif, jouer au rami avec Tamara, et trinquer avec Ollie, le programme était parfait. Au milieu de toutes ces réjouissances, il a bien fallu enfiler nos combinaisons pour aller désherber et transplanter chez Tamara, puis tailler et ébourgeonner la vigne avec Marcela et Claudio. Si cette dernière tâche a le mérite de remplacer une session de 500 squats et de nous forger des fessiers en béton, elle n'en reste pas moins minutieuse et extrêmement lente. Heureusement, un couple français et une new yorkaise m'accompagnent et nous souffrons ensemble de bon cœur. Claudio a quant à lui mis le grapin sur Rémy pour endosser une mission tout aussi sportive: vêtu d'une très seyante tenue de cosmonaute dans laquelle il perd 3 litres d'eau chaque jour, muni d'un jerrican de 30L sur le dos, il arpente les 5ha de vignes, pulvérisant à tout va, sous un soleil de plomb. Autant dire que nos soirées arrosées étaient amplement méritées. Pour notre dernière journée, Pie et Sharif nous ont embarqués avec les autres volontaires à bord d'un minibus tout droit sorti des 80's, avec écran, karaoké, et micro (le karaoke, une passion chilienne), du jamais vu, pour une virée au restau. À Santa Ana, plus rien ne nous étonne!

Départ d'Ollie : Anna, Laura, Jonathan, Claudio, Ollie, Marcela, Pie et Sharif !

Transformations chez Tamara depuis notre dernière visite : Bienvenue dans "Extreme Makeover, Avant / Après"

Dur de retenir notre émotion en quittant cet endroit riche de souvenirs et de belles rencontres.

Nous remontons vers Santiago pour voir Axel qui nous avait si bien accueillis 9 mois plus tôt et fait découvrir la ville. Ses conseils, astuces ainsi que son aide nous ont été précieux, on profite ensemble des soirées chaudes en terrasse de la capitale. Tant d'émotions en si peu de temps auront eu raison de nous, et de notre carte bleue qui s'est mystérieusement volatilisée après un café. Par chance, les tentatives pour dévaliser notre compte juteux ont échoué, notre périple peut continuer.

En pleine enquête, sur la trace de notre carte.

Nous décollons le 7 novembre de Santiago en direction de Calama, tout au nord du Chili. A l'arrivée, on se fait des copains, un couple de jeunes chiliens qui vient aussi passer quelques jours à San Pedro de Atacama. Partageant le même credo, "le temps est notre plus grande richesse", nous délaissons les navettes ultra rapides qui rallient San Pedro en un temps record pour un joli pactole et optons pour un bon vieux bus de 2h comme on les aime. Une fois les courses faites (San Pedro est au milieu de nulle part, tout est donc très cher, alors on fait moult provisions de pâtes et d'eau à Calama), on improvise un pique nique dans le terminal de bus. Encore une chouette rencontre !

A San Pedro, changement de décor, on a déjà presque l'impression d'avoir quitté le Chili. L'architecture, les couleurs, les visages, les tenues, tout est différent. On est en plein désert, et la ville est une oasis qui ressemble de jour à un Disneyland pour touristes. Des excursions, il y en a à la pelle, on ne sait plus où donner de la tête tant il y a d'agences, et on entend parler français à tous les coins de rue. Le village n'est définitivement pas l'attraction principale, nous profiterons de notre petit Hostal en périphérie pour nous reposer avant de plonger dans la Bolivie voisine. Nous découvrons toutefois de jolies maisons en pierre ou en Adobe (mélange de boue et paille), un système d'irrigation par alternance à travers le village très performant, un cimetière très coloré après la fête des morts, et un atelier de poterie.

Pour apprécier les paysages environnants et s'éloigner un peu de la foule, nous nous lançons à l'assaut du Pukará de Quitor, une forteresse atacamene à quelques kilomètres du village. Elle aurait été érigée par l'ayllu (une forme d'organisation communautaire) de la région au 12ème siècle pour se défendre de ses voisins, notamment aymaras. Bien qu'ils aient longtemps réussi à protéger leur culture et leurs terres de leurs voisins, les incas ont fini par les vaincre au 15ème siècle. Ils leur ont alors imposé de nouveaux rites et une nouvelle organisation. Au 16ème siècle, c'est au tour des conquistadores espagnols de s'inviter dans la région et de l'annexer, après une vingtaine d'années de lutte avec les habitants. Une croix énorme surplombe maintenant le Pukará, comme un triste symbole de l'acculturation dont ont été victimes les atacamenes.

On peut encore observer les différentes divisions correspondant aux habitations, aux remises ou aux enclos pour animaux, qui forment une sorte de labyrinthe. Du haut de la colline, la vue est imprenable sur le canyon de la rivière San Pedro, la Vallée de la Mort ainsi que sur la Cordillère de sel.

De l'autre côté du site, nous nous faufilons à l'intérieur d'une grotte pour nous rafraîchir avant la marche du retour, en plein soleil désormais !

Pour notre dernière nuit chilienne, pas de folies, nous avons déjà bien fêté ça auparavant. Nous nous couchons de bonne heure car une grande expédition nous attend le lendemain !

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Derrière les photos de paysages toujours nouveaux et les belles rencontres, il y a les calculs d'apothicaires pour déterminer nos priorités et estimer la durée de ces longues vacances! Comme il existe toujours des chemins de traverse pour découvrir un pays, et que Paris nous a vacciné des foules, nous avions convenu de seulement 2 investissements majeurs pour ce voyage, dont le premier était une expédition dans la réserve Eduardo Avaroa et le salar d'Uyuni en Bolivie (pour le deuxième, il faudra continuer de suivre nos aventures !)

Le samedi 10 novembre, après une infusion de feuilles de coca, un minibus nous récupère à la fraîche à San Pedro de Atacama et nous emmène avec d'autres touristes en direction de la frontière bolivienne. Et oui, ça y est, le Chili c'est fini !

Nous arrivons au poste chilien, il y a déjà une queue de véhicules à l'ouverture, nous en profitons pour descendre du minibus et faire connaissance avec les autres passagers de tous horizons. Au bout d'un moment, Rémy s'absente et je ne le retrouve dans le véhicule qu'au moment de faire tamponner nos passeports. En quelques minutes, son état a empiré, il ne peut pas se lever, a un mal de crâne aigu et des sueurs froides, il finit par faire un malaise. De nature sereine et raisonnée, j'alerte dans le plus grand calme notre conducteur qui lui demande de choisir dans l'instant s'il souhaite continuer ou rentrer à San Pedro. Heureusement, la notion du temps est relative ici, l'instant dure plusieurs minutes, et dans un élan d'énergie, Rémy décide de continuer. Tout le monde lui proposera infusions, pastilles, médicaments miracle ... Mais le petit-déjeuner de l'autre côté de la frontière aura l'effet salvateur tant désiré. Le soroche (mal aigu des montagnes) l'a frappé de plein fouet, et à juste titre car nous sommes passés de 2400m (à San Pedro) à 4480m d'altitude (Hito Cajon, le poste de frontière) en moins d'une heure ! Concernant les recommandations de ne pas dépasser un écart de 400m d'altitude par jour au delà de 3000m, on repassera. Raté! Mystérieusement, une fois ce choc passé, Rémy ira bien mieux, tandis qu'on assistera à une hécatombe parmi les autres voyageurs.

Bienvenue en Bolivie !

Une fois la douane passée et les multiples formulaires remplis, nous prenons le petit-déjeuner. Plusieurs chauffeurs boliviens nous attendent là avec leur jeep, ils font l'appel et nous rencontrons nos compagnons de route pour les 3 prochains jours: Niels notre chauffeur, Nicoletta et Rob, une italienne et un anglais qui vivent en Australie, Marie et Benjamin, deux nantais. Sur fond de musique bolivienne (un concentré d'histoires d'amour à sens unique que l'alcool console), Niels nous fait passer la coca à chiquer pour lutter contre le mal d'altitude car l'ascension n'est pas terminée !


Le bolide

Premier arrêt de la journée, la laguna blanca qui doit sa couleur à la présence de borax (utilisé ici pour la faïence). Le périple commence fort, nous avons peine à réaliser que ce qui se présente devant nous est réel.

Niels nous raconte que les œufs de flamants roses sont exquis, c'est un plat de luxe consommé en décembre lors de la reproduction

Quelques minutes plus tard, au détour d'une colline, nous arrivons à la laguna verde. Sa couleur est étonnante, intense. Cette fois, elle est due à la forte concentration de magnésium, plomb et arsenic,un cocktail explosif. Nous ne sommes dans cette région que depuis quelques heures, et déjà l'impression d'avoir quitté la terre s'empare de nous.

Sur la route en direction des thermes de Polques, nous traversons le désert de Dalí. D'étranges rochers sont posés ça et là, comme tombés du ciel, et rappellent à priori les paysages que l'on retrouve sur certaines œuvres du peintre.

On vous l'accorde, c'est pas hyper flagrant.

Pour le déjeuner, nous nous nous arrêtons aux thermes de Polques. L'harmonie de couleurs pastel fait une fois de plus sont petit effet...

A cette altitude, le soleil est fort, mais l'air est frais. On se camoufle de la tête aux pieds pour éviter les coups de soleil, la réflexion du sable et de l'eau est traîtresse. Nous sentons les effets de la déshydratation et devons boire régulièrement pour ne pas voir le mal de tête s'accentuer. La coca est très efficace. Mine de rien, c'est un sacré challenge pour le corps!

Nous atteignons en milieu d'après midi le point culminant de la journée, les geysers Sol de Mañana à 4990 mètres d'altitude. L'odeur de soufre n'aide pas à respirer, mais une fois encore, c'est un spectacle incroyable. Les puits bouillonnent, fument, les couleurs vives sont différentes d'une source à une autre, on en reste sans voix. C'est comme si nous faisions un bond dans le passé. La géothermie de cette région est également utilisée pour produire de l'électricité.

Quand on pense avoir sillonné plus de paysages incroyables que nos yeux peuvent en voir en une journée, nous atteignons la laguna Colorada. Les mots finissent par être superflus, espérons que les photos parleront d'elles mêmes 😊

On y aperçoit quelques îles blanches de borax, le rouge est quant à lui du a la présence d'algues et de sédiments de cette couleur

Fin de cette première journée sensationnelle à tout point de vue, nous faisons étape à Villa Mar (au milieu du désert, cherchez l'erreur...). Les maux de tête et la fatigue sont bien présents, nous luttons tous pour faire honneur au dîner qui nous attend, mais à 21h, nous rendons les armes et plongeons dans le sommeil.

Avant de reprendre la route le lendemain, nous faisons un petit tour dans cette "ville de la mer". La différence de ce premier village bolivien que nous croisons avec le Chili est frappante, tant dans les matériaux utilisés que dans son organisation et son niveau de vie. Nous avions suivi depuis le Chili les revendications de la Bolivie auprès de la cour internationale de la Haye concernant l'accès à l'océan dont elle a été privée par le Chili vainqueur lors de la guerre du Pacifique en 1884 (revendications d'ailleurs rejetées par la Cour). Désormais passés de l'autre côté de la frontière, nous constatons concrètement l'amputation dont ils se sentent victimes à travers les fresques murales ou les noms de rue: rue du littoral, rue de la plage...

Nous voilà repartis pour une journée moins rythmée, et moins haute en altitude. Nous nous baladons dans la Vallée de Rocas, des formations rocheuses vertigineuses qui surgissent du sol. L'une d'entre elles est surnommée "l'Italie perdue" car les roches sont semblables aux colonnes d'un temple romain en ruine... Les boliviens ont beaucoup d'imagination, on nous emmène voir une roche en forme de coupe du monde, une autre en forme de dromadaire, il y en a pour tous les goûts.

Nous découvrons la llareta, une sorte de plante/mousse qui pousse entre 3500 et 5000m et qu'on utilise comme combustible.

Nous nous dirigeons ensuite vers un bofedal, première fois qu'on entend ce mot! C'est une zone humide, et qui le reste en permanence, une sorte d'oasis, qui se forme en altitude à environ 4000 mètres. Cela donne une prairie verdoyante où broutent paisiblement les lamas et leurs petits.

L'heure du déjeuner avec Nicoletta, Rob, Niels notre chauffeur, ne manquent que Marie et Benjamin à l'appel.

La journée se poursuit le long des pistes poussiéreuses vers le canyon de l'anaconda. Au fond de ce précipice serpente une rivière, d'où le nom du canyon. Niels nous fait découvrir la Koa, une plante native utilisée comme un encens pour faire des offrandes à la pachamama, notamment lorsque l'on ouvre un business.

Nous terminons cette 2ème journée d'expédition à Juliaca, un drôle de petit village perdu dans un nuage de poussière, coupé en deux par une voie ferrée. Il semblerait bien endormi, voire abandonné, si ce n'étaient les 2 bars qui se font face dont les enceintes grésillent chacune de leur côté. Le village devait avoir plus fière allure à l'âge d'or de l'exploitation du salpêtre, à la fin du 19ème siècle. La ligne de train reliait Antofagasta, un port désormais chilien, à la Bolivie, elle est encore un peu empruntée pour le transport d'autres matériaux ou minéraux. Aujourd'hui, c'est assez triste...

On ne serait pas surpris de voir des bottes de foins rouler avec le vent tellement c'est désertique.

Nous passons la nuit dans un drôle d'endroit à l'orée du Salar, un hôtel de sel. Toute la structure est en briques de sel, le mobilier aussi, en passant le doigt dessus on pourrait se servir pour assaisonner notre plat, c'est très perturbant. Force est de constater que ça conserve très bien la chaleur car nous ne ressentons pas la fraîcheur de la nuit.

Pour cette troisième et dernière journée, le réveil est matinal. Nous montons dans la jeep à 4h30, Niels s'engage dans le salar (désert de sel) et conduit dans l'obscurité profonde. L'habitude le guide, car l'horizon s'étend à perte de vue sans repère. Nous nous arrêtons enfin et sortons emmitouflés pour assister au lever du soleil sur cette mer blanche, dans un silence incroyable.

Le salar d'Uyuni est le plus grand désert de sel du monde, 10 582 km2 ! Son apparition est due à l'assèchement d'un lac préhistorique. Sous nos pieds, une dizaine de couches de sel, d'environ dix mètres d'épaisseur chacune. Le salar est riche en lithium, 1/3 des ressources exploitables de la planète: on comprend que c'est un enjeu de taille pour la Bolivie qui espère devenir leader du secteur. Reste à espérer aussi que l'impact environnemental soit moindre, et que les richesses tirées de cette industrie profitent vraiment à la population...

Nous allons prendre un petit déjeuner surréaliste au pied de l'île d'Incahuasi, littéralement la maison de l'inca, située au milieu du Salar et qui abritent des centaines de cactus géants. Sur l'île, nous rencontrons aussi un couple de français d'une soixantaine d'années partis en tour du monde à vélo en 2006, autant dire qu'ils ont de sacrées cuisses!

La réverbération du soleil et l'altitude nous ont complètement asséchés, la peau craquèle, les lèvres gercent, c'est fou, les effets sont quasi immédiats !

Après cette matinée, nous avons droit à la traditionnelle séance photos dans le salar avec effets d'optique, menée d'une main de maître par Niels. C'était rigolo, même si un peu long et en décalage avec ce lieu étonnant.

La jeep suit ensuite la route du Dakar pour sortir du Salar. C'est la partie que nous avons le moins aimé, d'une part car nous ne sommes pas fans de cette course et de ses impacts, d'autre part car tous les véhicules se rejoignent à cet endroit, on est des dizaines au milieu de nulle part. On se dit avec inquiétude que tout ça n'est pas sans conséquence. En questionnant Niels, il nous raconte que les flamants roses ont peu à peu déserté le salar. Ça nous laisse un goût amer: même si la réserve traversée les jours précédents et l'île sont soumis à un droit d'entrée sensé en assurer la conservation, le salar est quant à lui "gratuit", et la quantité de personnes qui passent par ces zones n'est pas contrôlée. Ce tourisme est certes un revenu important pour la région, mais on se demande dans quelle mesure notre présence ici n'est pas néfaste...

L'expédition s'achève à Uyuni, une ville de sable qui nous paraît toute plate et toute triste. Nous partageons un dernier repas avec toute l'équipe, ça fait tout drôle de revenir à la civilisation après ces 3 jours hors du monde et du temps. Il nous faut maintenant assimiler tout ça, on file à Potosí pour y passer la nuit car le lendemain, c'est mon anniversaire 🎉

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Publié le 30 décembre 2018

De retour du Salar, nous faisons un passage éclair à Potosí, une des plus hautes villes du monde (4070m) au pied du Cerró Rico d'où on extrait de l'argent dans des conditions franchement insalubres. Ce sera notre premier vrai contact avec la Bolivie, la foule dans les rues, les maisons en briques rouges inachevées, la cohue des voitures et les chariots de friture tenus par des dames à hauts chapeaux, c'est vibrant !

Nous filons nous installer pour la semaine à Sucre, chez Bertha et Pepe, histoire de digérer les dernières aventures vécues et nous familiariser avec ce nouveau pays.

Notre outil de prédilection pour ce faire: la visite du mercado central! On y découvre des tas de fruits et légumes inconnus au bataillon, ainsi qu'une quantité astronomique de variétés de pomme de terre. Mais notre partie préférée, c'est le patio des jus de fruits animé par les voix aiguës des caseras, les pro du smoothie. C'est là que nous venons chaque matin tester toutes les combinaisons possibles. Le petit-déjeuner des champions est constitué de beignets frits à l'anis et d'un verre de toroji, du lait parfumé à la cannelle et au clou de girofle avec de gros grains de maïs blanc. Ça tient au corps !


Sucre brille par son architecture coloniale et ses bâtiments d'un blanc éclatant. Il y a de nombreux parcs et espaces verts, on prend beaucoup de plaisir à s'y promener. La nuit tombée, plusieurs groupes se retrouvent le long de l'esplanade pour danser la cueca. Nous assistons également à l'illumination des décorations de Noël qui peinent malgré tout à nous faire rentrer dans cette période, il fait si beau et chaud ! Le soir, nous mangeons au patio de comida près du parc où s'alignent différents stands.

Derrière les façades se cachent des patios ombragés dont nous nous sommes mis en chasse. Notre curiosité a été largement récompensée en cette période de fin d'année scolaire : nous nous sommes retrouvés aux portes ouvertes d'une école de gastronomie lors de laquelle de petits groupes d'étudiants avaient créé leur resto éphémère. Une fois notre choix fait, nous avons dégusté une assiette végétarienne délicieuse au milieu de parents, amis... Une super découverte !

Le lendemain, en entrant à nouveau dans un patio, nous tombons sur les portes ouvertes d'une sorte d'IUT avec des stands d'étudiants en mécanique, biologie, informatique... L'un d'eux nous explique son projet de fin d'étude : il a recueilli l'huile de friture usagée des restaurants de la ville (la friture est très présente dans la cuisine bolivienne et est compliquée à traiter en tant que déchet) avant de la purifier pour en faire un combustible qu'il espère pouvoir commercialiser.

Sucre est la capitale constitutionnelle du pays, tandis que La Paz est le siège du gouvernement. C'est aussi la ville où a été déclarée l'indépendance de la Bolivie en 1825. Perché sur les hauteurs de la ville, le quartier de la Recoleta et son couvent est le plus ancien de la ville. Nous arrivons à l'heure de la sortie des cours, la place se remplit d'écoliers qui font la queue au marchand de glace ambulant entre deux ballons. On se croirait dans un petit village, ça a beaucoup de charme.

Tout près, nous mangeons dans une halle qui sert des plats copieux aux travailleurs du quartier, bercés par la télé.

L'après-midi, nous visitons le musée d'art indigène qui expose les tissages de deux communautés de la région, Jalq'a et Tarabuco. Les couleurs, d'origine naturelle, et les techniques sont éblouissantes. Certaines méthodes sont en voie de disparition, les jeunes désertent les campagnes pour tenter de mieux gagner leur vie dans les villes, et ce musée contribue à la formation de nouveaux tisserands.

Nouveau pays, nouvelles cultures à appréhender ! La Bolivie recense 36 nationalités différentes, Evo Morales qui se targue d'être le premier président indigène a d'ailleurs modifié la constitution et le nom du pays pour les mettre en valeur, il s'agit désormais de l'état plurinational de Bolivie. A Sucre, on croise surtout des Quechuas, les femmes ont des jupes au niveau du genou et des chapeaux plats et larges.

Nous nous dirigeons vers le musée du folklore et de l'ethnographie pour une première introduction. La première exposition met en avant le syncrétisme religieux et culturel qui s'est opéré entre les croyances et traditions indigènes et celles des colons espagnols. Les divinités de la cosmogonie andine ont été rapprochées des saints catholiques sous la forme de binômes par les colons pour évangéliser les locaux. L'un d'eux, Santiago (Saint Jacques, ilustre comme un guerrier) a été identifié à Illapa, la divinité qui contrôle les pluies, grêlons, le gel, mais aussi le vent et le tonnerre. Ce dieu est le protecteur des yatiris, les sorciers guérisseurs qui ont été élus car ils ont survécu à la foudre et qui ont des pouvoirs divinatoires. Il y a maintenant un mix entre ces deux entités, et on appelle avec affection Tata Santiago cette source de protection.

Une deuxième exposition traite des tenues et des apparat des femmes des communautés andines, et un tout petit peu de leur rôle dans l'organisation familiale et sociale. On y voit des parures magnifiques, dont des broches pour accrocher leur châle qui ont été discrètement transformées en arme affûtée... Trop fortes.

Le troisième thème abordé est celui des illas. Ce sont de petites figurines qui ne sont pas de simples représentations mais de véritables incarnations d'animaux, de personnages, d'objets ou de concepts. Elles sont très souvent enterrées comme des graines pour que la terre nous donne des animaux forts, de l'argent, etc. La plupart d'entre elles sont des lamas, des moutons, des vaches. Il y a une version plus contemporaine sur les alasitas, des marchés où l'on retrouve aussi des miniatures de produits modernes, des voitures, maisons, denrées alimentaires, toujours avec l'idée que le petit objet deviendra grand. La miniature la plus célèbre est celle d'Ekeko, un personnage commerçant qui représente l'abondance, la prospérité car il traîne avec lui de l'argent, des cigarettes, de la coca, une maison, de l'alcool, tout un tas de richesses que l'on espère récolter avec lui. Ce personnage intervient particulièrement lors de la construction d'une maison ou l'inauguration d'une entreprise.

Bertha et Pepe, nos hôtes, ont mis beaucoup de cœur à nous partager un peu de leur quotidien en organisant une projection d'un documentaire sur un enfant mineur dans les mines de Potosí (une réalité, bien qu'effarante), en nous invitant ainsi que les autres pensionnaires à partager un repas (nous avons découvert et cuisiné des papas lisas, de petites pommes de terre tachetées de rose fushia à la texture d'une châtaigne et au goût sucré) et en nous conviant à une kermesse ! A l'occasion de l'anniversaire du village d'origine de Bertha, les enfants du pays exilés à Sucre se retrouvent pour un grand barbecue dans la rue. Magie de l'heure bolivienne, nous sommes arrivés avec toute la famille bien trop tard, le barbec avait été victime de son succès. Sans se laisser abattre, nous allons chercher des plats à emporter pour festoyer avec les autres, la musique bat son plein et la bière coule à flot. Elle se boit pas mal en cul sec lors de nombreux toasts, les jeunes nous initient à la bière/coca, un mélange plutôt réussi.

Le dimanche, direction le marché de Tarabuco, l'un des plus grands de la région où se croisent différentes communautés avoisinantes. On a bien cru ne jamais y arriver, malgré la courte distance, notre chauffeur en costard sur dimensionné pour sa taille de gringalet a oublié 2 touristes en ville et avait bien du mal à garder les yeux ouverts sur la route. Les tissus sont incroyables, il y a beaucoup de monde, les vendeurs de sandales en pneu ont beaucoup de succès, elles ont l'air solides aux pieds de ces gens qui marchent des kilomètres et des kilomètres chaque jour. On trouve absolument de tout, c'est mieux qu'un hypermarché. Pour le déjeuner, il n'y a que l'embarras du choix, on s'attable devant un stand de poulet frit, patate, riz, le combo gagnant, en compagnie d'un père et sa famille, et d'un couple trop mignon de papi mamie très élégants et minuscules.

Pour notre dernier jour dans la région, nous allons nous balader dans le village de Yotala le long d'une ancienne voie ferrée qui reliait Sucre, Potosí... C'est un petit écrin de verdure qui nous a fait du bien, car la Bolivie, ça bouscule !

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Publié le 15 janvier 2019

La longueur et la pénibilité des trajets en bus boliviens ont eu raison de certains de nos plans. Nous avons donc décidé de poser nos sacs quelques temps à Cochabamba, histoire de récupérer suffisamment d'énergie pour la suite des aventures!

Comme Sucre, la ville a conservé un centre à l'architecture coloniale, ce qui nous change considérablement du Chili où le plan des villes est quadrillé et les bâtiments plus récents. C'est très joli, la place centrale est cerclée d'édifices colorés reposant sur des arches, dont la farmacia boliviana, et d'une imposante cathédrale. L'air est si chaud qu'il est agréable de regarder passer les gens sous les grands arbres de la place.

La vierge Marie surveille nos sacs avant d'embarquer dans le bus, les boliviens préfèrant définitivement s'en remettre à elle plutôt qu'à un quelconque code de la route.

Pour assouvir notre (ok, ma) dévorante passion pour les marchés, direction la Cancha, soit le plus grand marché en plein air d'Amérique du Sud. Rien que ça. Quand on sait que le moindre bout de marché du plus petit village qui soit regorge de bricoles, on s'attend à en prendre plein les yeux ici, et l'on n'est pas déçu. Tout, on y trouve absolument tout, les stands sont regroupés par spécialité, quincaillerie, VTT, costard sur mesure, boutons et broderies, tuyauterie, high tech, volailles bien vivantes... Sorcellerie !

Le mercado de brujas, marché aux sorcières, est une section plus ou moins grande dans chaque marché, mais néanmoins toujours présente. Les Yatiris aymaras ou les jampiri quechua (sages/guérisseurs) , lisent l'avenir dan sles feuilles de coca, et le monde se presse pour entendre leurs paroles. On peut se procurer sur ces stands des mesa d'offrandes à la pachamama prêtes à l'emploi, composées de bonbons, graines, encens, etc. ou encore une farandole de poudre pour provoquer un coup de foudre chez l'être aimé, séparer les couples jugés mal assortis, venger les offensés... Dernière surprise, et pas des moindres, les fœtus de lama suspendus au stand. Dans la cosmovision andine, le concept de réciprocité est essentiel, et il faut rendre à la terre pour la remercier de ce qu'elle nous donne. On enterre donc ce fœtus séché en offrande, en prévision des récoltes, lors de la construction d'une maison etc. Le lama ayant une grande valeur, notamment pour sa laine, sacrifier un fœtus déjà mort permet aux paysans de ne pas perdre une trop grande source de revenus, d'autant plus qu'on nous a raconté que cet animal avait de fortes propensions aux fausses couches. Vrai ou faux, nous n'en saurons pas plus, c'est toutefois assez déroutant lors du premier face à face.

Lors d'un déjeuner au marché, nous avons vu s'installer sur la table voisine un famille Mennonite. Si comme nous auparavant, vous n'aviez jamais entendu ce terme, vous pouvez jeter un œil à ce micro reportage. C'est un courant du catholicisme né aux Pays-Bas au 16ème siècle. Ces communautés font penser aux Amish aux États-Unis par leur rejet des technologies modernes. À priori, la Bolivie abrite la principale communauté de mennonites d'Amérique du Sud, elle les aurait accueilli dans les années 50 en leur offrant la liberté de culte. On estime leur population à plus de 70 000 personnes aujourd'hui.

Leur mode de vie est plutôt traditionnel et conservateur. Les vêtements que portait cette famille étaient en décalage avec les couleurs vives boliviennes ! Seul l'homme le plus âgé s'adressait en espagnol à la serveuse lors de la commande pour toute la tablée, tandis que les autres parlaient une autre langue, apparemment un allemand qui n'est plus usité ailleurs. C'était assez fou de voir se confronter 3 mondes et 3 réalités différentes dans ce boui boui du marché, la leur, la culture bolivienne et la nôtre européenne.


Nous sommes également tombés sur une grande foire aux illas, ces petites figurines qui incarnent des animaux, véhicules, maisons etc. et que l'on enterre afin de les faire germer et qu'elles deviennent réalité. Cet événement donne lieu à une petite fête foraine, avec de nombreux stands de paris et de jeux d'argent. Le stand qui nous a captivé plusieurs soirs d'affilée est celui des enchères au cours desquelles un animateur survolté met en vente des statues, dorées et bien lustrées de préférence. Le public se déchaîne pour remporter ces énormes pièces de décoration, mais nous avons pu établir un top3 des sujets les plus plébiscités: en première place, DragonBall Z, en seconde, La Cène (variante:la Vierge Marie) et en troisième, une valeur sûre, les chiens ! Une autre bestiole à attiré notre attention, les statues de crapauds coiffés d'une couronne. Nous avons alors appris que le crapaud était un symbole de richesse et de prospérité dans les Andes.

Lors d'une balade au jardin botanique, nous avons entamé l'ascension périlleuse de la colline San Pedro qui domine Cochabamba, pour atteindre la statue du Cristo de la Concordia (Christ rédempteur). C'est le plus haut du continent, il dépasse de six mètres le Corcovado de Rio ! Une fois au sommet, la vue sur la ville est impressionnante, et le spectacle des cholitas (dames habillées de façon traditionnelle) se prenant en selfies vaut le détour. Assoiffés comme jamais, on cède à l'appel des poches d'eau que l'on voit pendre à la bouche des boliviens affairés depuis notre arrivée. C'est certes très peu cher, mais pas très écolo, ça a un petit goût de plastique mais ça fait l'affaire en cas d'urgence. On s'apercevra en descendant qu'un escalier gigantesque menait à la statue, beaucoup moins vertigineux...

Quelques anecdotes à ajouter à notre palmarès: après avoir rencontré par le plus grand des hasard dans notre airbnb un couple formé d'une dijonnaise et d'un clermontois, nous avons fait la connaissance de deux couples boliviens lors d'un petit déjeuner passé à discuter. Sur ces entrefaites, notre hôte nous propose de partager un repas le soir même tous ensemble et avec sa famille, nous acceptons tous volontiers l'invitation ! Commencent alors les discussions sur ce que chacun va préparer pour ce dîner, sachant que notre hôte est prof de cuisine, la pression est grande. Rendez-vous est pris pour 19h, chacun part faire sa vie entre temps. En fin d'après midi, nous faisons quelques courses au marché et rentrons pour cuisiner vers 18h, toujours aussi determines et disciplinés malgré les 10 mois de voyage qui auraient dû nous roder... On s'attele à la préparation de notre tatin de betterave et fromage à commencer par la pâte sablée, tout en s'étonnant de ne voir personne arriver. 3h, une moitié de tarte engloutie et un énième ascenseur émotionnel plus tard, alors que nous nous apprêtons à sortir prendre l'air pour nous consoler, la famille arrive s'excusant du retard. Nous aurons quand même un peu discuté, mais n'aurons toutefois jamais recroisé les autres pensionnaires qui se sont volatilisés. Nouvelle démonstration que tout est toujours mouvant ici !

La fameuse

Prochaine étape, La Paz !

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Publié le 27 janvier 2019

Nous voilà arrivés dans la plus haute capitale du monde ! 3650 à 4150 mètres au dessus du niveau de la mer, plus d'un million d'habitants, La Paz est une ville vertigineuse à tout point de vue.

Nous nous sommes installés une petite semaine dans le quartier très vivant de Socopachi. Plongée immédiate dans le quotidien des habitants de la capitale, une canalisation a explosé, privant le quartier d'eau courante durant 2 jours. Celle-ci n'étant dans tous les cas pas potable, le seul désagrément aura été la douce odeur que nous laissions sur notre passage...

La Paz nous a donné du fil à retordre avec ses parcs/labyrinthe dont nous ne trouvions au choix ni l'entrée, ni la sortie, où dont on nous évacuait à peine entrés. Soit, nous sommes coriaces, et les vues panoramiques sur cette ville tentaculaire nous ont bien récompensés !

La capitale est bien plus agréable que ce à quoi nous nous attendions. Malgré l'agitation et la foule, les voitures d'un autre âge qui polluent plus que de raison, elle garde un côté rural. On rencontre toujours autant de vendeurs ambulants, de cholitas qui vendent 3 fruits et 2 épis de maïs, toujours pas ou peu de supermarchés, et aucune grande chaîne de prêt-à-porter.

À leur arrivée, les colons espagnols ont établi deux zones de chaque côté du cours d'eau qui traversait la ville, aujourd'hui sous-terrain: une rive pour eux-mêmes, et l'autre pour les locaux. L'architecture a gardé la trace de cette évolution à deux vitesses, les édifices coloniaux du centre historique se distinguent des constructions plus récentes. La norme pour les habitations reste la même que dans le reste de la Bolivie, des maisons inachevées aux incontournables briques rouges.

Sur la place Murillo, les murs ont beaucoup à dire ! On découvre avec stupeur des impacts de balles sur l'un des édifices, vestige d'affrontement lors d'un des nombreux coups d'état qui ont soulevé la Bolivie. Face à celui-ci se dresse le congrès dont les chiffres de l'horloge ont été inversés. Cette décision a été prise en 2014 lors du nouvel an andin pour symboliser le retour à la valorisation des identités indigènes. Elle serait plus en accord avec la cosmovision andine, qui envisage le temps différemment. C'est aussi une manière de s'affranchir symboliquement de la logique et de la vision des pays de l'hémisphère nord qui contrôlent les richesses. Dans la même idée de déconstruire l'impérialisme, Evo Morales (actuel président) a décidé de transférer le palais présidentiel du palacio Quemado, symbole du colonialisme, à un immeuble flambant de modernité sur la même place, en contraste total avec le reste des bâtiments boliviens.

Petit tour dans l'un des nombreux marchés de la Paz où l'on nous explique le concept de Casera et de llapa. La Casera, c'est la maraîchère, la dame qui fait des jus de fruits, celle qui fait des brochettes, la fleuriste (les stands du marché sont presque exclusivement tenus par des femmes) chez qui on a ses habitudes. Un peu comme en France, pas question de lui être infidèle, on ne peut avoir qu'une Casera par catégorie de produit, on lui raconte un bout de nos vies, elle prend des nouvelles. La nourriture ne se marchande pas en Bolivie, contrairement à presque tous les autres biens, mais il est de coutume de demander à sa Casera la llapa, si celle-ci ne l'offre pas d'office comme ce fut le cas à chaque jus que nous avons dégusté. La llapa, c'est la petite attention, le cadeau bonus qui fait plaisir : un deuxième verre de jus, 3 pêches en extra, quelques fleurs de plus... On se demande où travaillent les hommes, probablement dans des usines en marge de la ville, car ce sont surtout des femmes qui tiennent les commerces, il y a aussi beaucoup plus d'enfants qu'au Chili !

Ci-dessus, les fameuses "tuntas" ou "chuños", des patates andines déshydratées qui peuvent être conservées des années !

Une cholita, petit surnom qu'on donne aux femmes habillées de façon traditionnelle, nous explique les subtilités de leur tenue: le chapeau change de forme selon les communautés: les femmes aymara (en majorité à la Paz) portent un chapeau rond et haut, tandis que les femmes quechua portent un chapeau aux bord plus larges, moins haut. La jupe des aymara est plus longue que celle des Quechuas, principalement pour cacher l'atout séduction majeur qui est le mollet. Plus celui-ci est robuste, plus la femme est désirable. Elle nous explique enfin que la position du chapeau sur la tête, en avant ou en arrière, signifie que la dame est mariée ou célibataire. Plusieurs versions courent sur l'origine de ces chapeaux, cette cholita nous donnera celle-ci : ce seraient des chapeaux anglais fabriqués à Londres au 19ème siècle à destination des ouvriers britanniques travaillant dans les chemins de fer en Bolivie. Problème de taille, on découvre sur place que les chapeaux sont trop petits pour ces hommes. La compagnie, fine en marketing, fait alors une grande campagne pour les refourguer aux boliviennes, arguant que c'est de dernière mode en Europe, et parfois même qu'ils sont symbole de fertilité. Voilà comment ces chapeaux auraient fait leur entrée dans le vestiaire des cholitas Paceñas!

Nous passons enfin par un gigantesque marché de Noël, en plein soleil, où se vendent une ribambelle de faux sapins et de micro tenues clinquantes pour habiller des bébés jésus quasi grandeur nature dans leur crèche. Notre hôte, pour marquer le début du mois de décembre, nous a offert un panettone ! Nous étions assez surpris de voir cette brioche italienne ici, mais elle fait apparemment fureur au moment des fêtes, tant en Bolivie qu'au Pérou.

Nous sommes tombés au détour d'une rue sur une odeur familière, celle du beurre ! Miracle, un boulanger rennais installé à La Paz. Nous n'avons pu résister à la tentation et nous sommes offert le premier croissant depuis 11 mois, très réussi malgré l'absence de beurre tel qu'on le fait en France, et une baguette croustillante à souhait. L'émotion provoquée lors de la première bouchée est intraduisible ici 😊

Dans la catégorie gastronomie toujours, sur les recommandations d'un Bolivien croisé au Chili, nous avons décidé de fêter en retard mon anniversaire dans un restaurant chic de la capitale. Direction les quartiers en contrebas de la ville: contrairement à ce que l'on observe en France, ici les quartiers pauvres sont sur les hauteurs de la ville et les quartiers riches au fond de la vallée, la différence de température est de plusieurs degrés ! Débarqués en tenue Quechua sous les lumières tamisées de Gustu, entourés d'expatriés et de gens dont les tenues doivent coûter un smic Bolivien, c'est un peu le choc des cultures. Mais force est de constater que l'expérience gustative est géniale, que de produits inconnus de nos palais, et on se régale. Pour commencer, un cocktail de Gin andin, tumbo, gingembre, vinaigre fumé. Entrées : tartare d'autruche aux câpres, émulsion de Maca / Pommes de terres natives, caramel croquant à la peau de poulet, pickles d'oignon. Plats: Poisson d'Amazonie, zonzo de yuca (Gratin de fromage et manioc), sauce noix de coco / Porc grillé, gel d'hibiscus, croustillant de pomme de terre d'Amazonie. Desserts: Yaourt de chèvre et glace à la pomme de terre papa Lisa / Kari Kari vinaigré et ganache de chocolat blanc fumé.

Après ce dîner incroyable qui change de la trilogie quotidienne poulet/riz/patates, nous rentrons en téléphérique et admirons l'étendue sans fin de lumières sous nos pieds.

Au cœur de La Paz, il est impossible de passer à côté de la prison de San Pedro. Lors d'une balade guidée à travers la ville, on nous raconte son histoire, son fonctionnement, dignes d'un film hollywoodien. C'est une ville dans la ville, avec ses règles et ses attractions. Tout se paye, les détenus doivent acheter leur cellule ou payer un loyer à un autre détenu. Toute une économie existe à l'intérieur, avec des restaurants tenus généralement par les femmes des détenus, qui vivent aussi à l'intérieur et parfois même avec leurs enfants. Une récente décision de l'état vise à faire sortir ces enfants de la prison où ils grandissent. Certains détenus se sont reconvertis en dentistes ou coiffeurs, mais le plus gros business reste la cocaïne, la prison avait ou à toujours son propre labo et produirait paraît-il la drogue la plus pure... La grande majorité des incarcérés le sont d'ailleurs pour des affaires liées à la cocaïne. Le guide évoque alors un détail qui évoque notre attention : les prisonniers transmettaient la marchandise aux revendeurs dans la rue par le biais de couches de bébé lancées des toits de la prison. Cela fait écho à notre surprise quelques jours plus tôt, lorsque nous sommes tombés sur une couche fermée au beau milieu de la rue... Cette prison est surpeuplée, elle accueille 3000 personnes pour une capacité réelle de 600, et le nombre de garde est dérisoire. Un détenu britannique a eu l'idée d'organiser des tours de cette prison dans les années 1990, tour qui figurait même dans les inmanquables du lonely planet! À sa sortie, d'autres ont tenté de reprendre l'activité mais plusieurs vols, viols ou meurtres ont été perpétrés sur des touristes, coupant court à ce business juteux. Quelques jours après notre passage, nous entendons parler d'un français tout juste relâché après 2 ans de prison pour vol et complètement endetté pour avoir payé sa cellule durant ces années.


Quelques photos du street art de la Paz :

Autre décor, autre ambiance : la Vallée de la Luna aux portes de la capitale. C'est un paysage des plus étranges, un petit carré où des stalagmites de roches surgissent de la terre. On a effectivement l'impression de débarquer sur une autre planète ! C'est l'érosion d'une montagne qui en est l'origine. Au milieu des roches blanches, l'œil vif de Rémy a repéré des vizcachas super agiles qu'on a adoré regarder faire des bonds de folie entre les failles. Au loin, la vue sur la Muela del Diablo nous rappelle l'incroyable variété des paysages boliviens. A quelques kilomètres, la terre est rouge et c'est désormais un voyage sur mars qu'on nous propose.

Énième panneau de propagande/lutte pour que la Bolivie retrouve un accès à la mer.

Après une visite éclair au consulat pour prolonger d'un mois notre visa, nous poursuivons notre découverte de la ville en errant dans les rues pleines d'artisanat, plus ou moins local, et la rue Jaén toute colorée où s'attardent les étudiants en dessin. Nous multiplions les points de vue pour admirer la ville sous tous ses angles, notamment au cœur de la Paz sur la colline Killi Killi, la ville nous encerclé de façon spectaculaire. Nous terminons par les hauteurs au mirador Virgen Blanca qui offre une vue dingue sur la vallée au delà de la Paz.

En résumé, nous avons beaucoup apprécié notre séjour à La Paz! C'est une capitale certes immense mais dont le fonctionnement reste très "artisanal", et il est vite possible d'échapper à la cohue en prenant un colectivo vers les vallées environnantes.

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Les étapes se sont suivies à un rythme bien plus soutenu depuis notre départ du Chili ! Il nous a fallu beaucoup de temps pour assimiler toutes les choses vues et vécues, les changements de culture, de paysages, de vocabulaire... Le Chili était devenu notre deuxième maison dans le voyage, bouger nous a de nouveau bien bousculés mais c'est aussi et surtout très stimulant de tout re-découvrir ! La mise à jour de cette page a donc été reléguée au second plan.


Après notre séjour à La Paz, nous avons filé sur la route nous menant au Pérou pour s'arrêter quelques temps au bord du lac Titicaca, à Copacabana (3840m d'altitude). Ce village n'a pas un charme fou, on retrouve les habituelles maisons en briques rouges inachevées, mais aussi une grande et longue rue qui regorge de magasins de souvenirs et de bars assez peu remplis (nous sommes en basse saison) dont les menus et la déco sont délibérément conçus pour attirer les touristes. Sans avoir aucune image en tête, ni d'attentes particulières, nous étions tout de même loin d'imaginer que l'on trouverait des pédalos mickey sur le lac le plus haut du monde ! En longeant le bord du lac, nous apercevons de nombreuses familles de la capitale, et réalisons que cette attraction est justifiée : ce point d'eau est la seule "plage" d'une Bolivie dont Evo le président s'acharne à défendre (à tort ou à raison...) le droit d'accès à la mer.

Api(maïs violet,canelle,orange,clou girofle)+buñuelos à l'anis&sirop de sucre=de quoi s'endormir comme une bûche

Passée cette première surprise, nous découvrons la beauté des environs. Le long de la côte, les couleurs sont une fois de plus éclatantes, entre le bleu limpide du lac, les joncs de totora jaunes et verts qui ondulent à la surface et un soleil toujours plus violent à cette altitude.

Nous croisons quelques barques et mêmes des îles flottantes construites avec cette même totora, un roseau qui ne pousse qu'en ces hauteurs.

La balade nous emmène jusqu'à un point de vue superbe, le mirador de l'inca, au milieu de petites criques. L'endroit se prête à la contemplation, mais sûrement à d'autres activités plus lucratives car, au sommet d'un rocher, dans le creux d'une pierre, nous tombons sur une belle couche de bébé toute propre et bien empaquetée. Ayant encore en tête les anecdotes du guide de la Paz, nous n'avons pas poussé l'enquête jusqu'à en vérifier le contenu, mais compte tenu de la proximité avec la frontière péruvienne et les aller-retours en mobylette aux alentours, il est possible que la technique de camouflage de cocaïne certifiée Pamper's ait encore de beaux jours devant elle!

De retour de cette balade, nous nous attablons devant une belle truite à l'ail pour continuer nos spéculations.

Chaque jour de bon matin, de nombreux conducteurs font la file devant l'église de Copacabana afin de faire bénir leur véhicule orné de fleurs pour l'occasion par les petites dames qui tiennent leurs échoppes au même endroit. Ajoutons à cela les multiples stickers, icônes et statuettes divines qui ornent les véhicules, et le voyage peut se dérouler sans ceinture ni rétros en toute sécurité.

Comme très souvent en Amérique du Sud, la ville possède son mirador auquel on accède par un sentier rendant hommage au chemin de croix. Fidèles à nous-mêmes (cf épisode du mirador de Cochabamba), nous ne découvrirons cet escalier pavé qu'au retour... L'ascension en plein soleil par un sentier non homologué relevant davantage de l'escalade que de la promenade méditative a bel et bien pris des airs de calvaire. Au moins, nous restions dans le thème. Entre la grimpe et le coucher de soleil sur le lac Titicaca, nous avons eu le souffle coupé.

La Bolivie est un état "plurinational", 37 langues officielles rien que ça, et la diversité culturelle est impressionnante. Le climat et la géographie font que, d'une vallée à une autre, les villages peuvent être séparés de quelques dizaines de kilomètres et avoir des traditions, des tissages, des danses et des chants très différents. Le fait de traverser le pays en quelques étapes et d'entrevoir cette richesse nous a donné envie d'approfondir et de faire un volontariat en Bolivie.

La pratique est moins courante qu'au Chili. Les petits boulots font vivre tant de gens qu'il n'y a pas lieu d'offrir ce type d'aide en échange du gîte. Une grande partie de la population n'a pas accès à internet et vit en dessous du seuil de pauvreté, ce sont donc principalement des étrangers installés sur place qui proposent des volontariats. Nous tombons tout de même sur Celina dont la famille a fondé une agence de tourisme à la Paz et gère un eco-lodge sur le lac Titicaca. Après un échange téléphonique, le courant passe bien, nous embarquons donc sur un petit bateau qui nous emmène sur l'isla del sol, la plus grande île du lac (14km2).

Sur l'île, aménagée par les incas en terrasses, il n'y a pas de route, pas de véhicule. Escortés par Rodrigo nous grimpons le sentier pavé, les ânes transportent quant à eux des vivres pour l'hôtel et nos bagages.

La famille de Celina a imaginé ce projet de tourisme durable il y a 20 ans avec pour priorités le respect de l'architecture et des techniques de construction locales ainsi que le développement économique de la zone à travers l'emploi des habitants.

Nous rencontrons toute l'équipe, elle est plus grande que ne le requiert l'activité en cette saison, mais cela permet d'assurer un petit revenu à chacun. Le personnage clé, la maîtresse des lieux, c'est Doña Gregoria, la cheffe des cuisines. Elle n'est pas commode de prime abord mais se révèle adorable, c'est elle qui nous raconte les légendes et nous explique les croyances aymaras. Sa fille s'occupe du linge, son bébé sur le dos en toute occasion, et son gendre Ever gère toute la manutention. Ils vivent sur place car leur village est trop éloigné pour faire les aller retour à pied chaque jour. Doña Elena aide doña Grego en cuisine, le duo formé par doña Elisa la plus excentrique, et doña Juana, la plus têtue, s'occupe de l'entretien des chambres. De nombreux jeunes s'occupent du transfert des touristes depuis le port et de leurs bagages à dos de mule. Nous travaillerons principalement avec don Jésus, le jardinier, qui est présent 3 jours par semaine.

Celina et son frère sont très accueillants et ont à cœur de nous mettre à l'aise. Celina a pour projet de développer le jardin en permaculture de façon pédagogique pour sensibiliser leurs clients, et de créer des infusions et produits cosmétiques à partir de plantes médicinales locales.

Le lieu est incroyable, nous avons notre propre maisonette en adobe et paille avec une vue imprenable au réveil. Tout a été pensé dans une démarche écologique, avec un système de récupération des eaux de pluie et de douche pour l'irrigation et de l'énergie solaire. C'est clairement un standing au dessus des habitations locales.

Le lendemain de notre arrivée, Celina nous convie à un événement de la plus haute importance: la remise des diplômes de la promotion dont elle est marraine, les grandes sections qui passent au CP. C'est une cérémonie en grande pompe, les anciens du village, les membres influents de la communauté ainsi que les familles élégamment habillées sont présents. À chaque toast porté, une partie du contenu du verre est versée au sol en offrande à la pacha mama, qu'il s'agisse d'alcool ou de coca cola. À l'appel de leur nom, les enfants sont accueillis par une haie d'honneur, on leur jette des fleurs, des confettis, on accroche des billets sur leurs vêtements, et il semblerait que le cadeau de fin d'année le plus en vue sur cette île à 4100m d'altitude soit la couette à motifs !

Nous sommes honorés mais ne savons pas très bien où nous mettre lorsqu'on nous invite au repas donné par les familles au corps enseignant. On nous sert tout d'abord un bouillon avec des patates et du quinoa. Premier grand moment car si les premières sont faciles à pêcher à la main, le quinoa se perd dans la soupe et manger en toute propreté relève alors du parcours du combattant. Viennent ensuite des barquettes remplies à ras bord d'un demi poulet, de plusieurs sortes de pomme de terre, banane plantain, riz... Ne connaissant pas encore les codes de politesse locaux (et uniquement pour ça), Rémy met un point d'honneur à finir son plat sous le regard amusé et incrédule de la tablée. Nous comprenons ensuite qu'eux mangent extrêmement lentement mais qu'ils ne finissent pas leur assiette: chacun se balade avec un petit sac plastique dans la poche pour y verser sa barquette. On n'était pas au point sur le sac, mais on le saura !

Le lendemain et le surlendemain, l'île était bien calme. Tous décuvaient de cette fête, l'hôtel n'a pu proposé de pain aux clients car la boulangère n'était pas en état, et don Jésus n'a pas pointé le bout de son nez dans le jardin 😊

Nos gardes du corps 😀

Celina nous quitte rapidement pour rejoindre la Paz où se marie son frère et est remplacée par Roxana, une amie qui travaille dans l'agence. Roxana a un fort caractère, elle limite les échanges, nous devons prendre les repas dans notre chambre et plus avec le reste de l'équipe pour "désencombrer" la cuisine. Les premiers jours sont difficiles, c'est un peu frustrant et on se sent isolés.

Les différences culturelles sont très importantes, on se pose beaucoup de questions le soir et malgré la vue magnifique, on se sent un peu démunis. Les employés parlent aymara entre eux, un premier obstacle pour comprendre ce qu'il se passe dans le feu de l'action. La plupart nous voient comme des clients et ont du mal à concevoir que deux européens puissent venir apprendre d'eux, ils ont l'air gênés de nous donner des tâches, et déclinent souvent notre aide. De notre côté, on se sent aussi mal à l'aise car la charge de travail est assez légère, on a l'impression de ne pas mériter le gîte et le couvert. A cette altitude, le caractère un peu taiseux des montagnards joue probablement, l'insularité et la culture aymara qui nous semble très humble, modeste renforcent encore ce trait.

On développe notre petit train de vie autonome, et avec le temps, à force de petites tentatives discrètes, nous nous apprivoisons, Roxana et Doña Gregoria nous adoptent, et toute l'équipe avec ! Nous nous sommes refait une place dans la cuisine où Doña Grego mène la danse au rythme des infos/petites annonces en aymara que scande la radio à toute vitesse chaque matin. C'est le journal de la communauté, ceux qui n'ont pas de téléphone informent par exemple leurs proches de leur arrivée prochaine, ou d'un décès...

Doña Gregoria et doña Elena

Nous sommes ici pour assister Jésus le jardinier lorsqu'il est là, 3 jours par semaine, et poursuivre ses tâches en son absence. Au programme:

Désherber un espace, notre spécialité, pour créer un jardin aromatique

Nettoyer les chemin de pierre devant les chambres

Créer une étagère pour entreposer les jeunes pousses dans la serre, faire des boutures, entretenir la serre...

Tailler et fumiger les plantes de tumbo (plante grimpante donnant un fruit très parfumé) avec un mélange d'eau et de lait contre les insectes

"Paysagisme" d'un recoin

Chercher des pierres et les assembler pour construire un muret. À cette altitude, on est très vite à bout de souffle, avec ou sans pierre sur le dos. Les premiers jours nous peinons à monter les escaliers, le simple fait de parler en marchant nous essoufle... Pas de violence, Jesús n'a de cesse de répéter "con calmita no más" (en gros : tranquille les gars) avec son sourire doré, une devise qu'il applique à merveille en multipliant les pauses discussions. Qui l'eût cru, on a même fini par trouver le rythme un peu trop calme : )

Une fois la pluie venue, désherber les fèves et faire de petits monticules autour de chaque pied pour créer des rigoles et faciliter la penetration de l'eau.

Juana et Elisa veulent apprendre à se servir de Google traduction pour comprendre les commentaires laissés par les clients 😀

Et surtout : arroser !

La peau tire et les cheveux sont secs, le soleil brûle si fort qu'on a moins chaud en étant couverts que bras nus.

Une fois la glace brisée, Doña Grego s'est fait un plaisir de nous partager les croyances et traditions amaras. A notre arrivée, les récoltes de pommes de terre au nord de l'île et celles de fèves au sud étaient menacées par une grande sécheresse. Pas un jour ne passait sans qu'il y soit fait allusion. C'est ainsi que nous avons appris que, dans la cosmovision andine et en particulier aymara, tous les êtres sont reliés, qu'ils soient humains, végétaux ou animaux. Au printemps, lorsque les jeunes pousses commencent à éclore, et jusqu'à ce que la saison des pluies arrive, il ne faut pas brusquer la pacha mama et les petites plantes qu'elle abrite. Pas de gros coup de pioche donc, et si cela s'avère vraiment nécessaire, une offrande est faite au préalable, le plus souvent de la coca. Si tous les êtres sont reliés, les jeunes pousses sont connectées aux nourrissons, la souffrance des uns se communique aux autres. La fille de doña Grego mettait donc une énergie folle à bercer son bébé pour éviter les moindres pleurs (et il est vrai qu'on ne l'a pas beaucoup entendu !) et éviter de faire fuir la pluie. Sa maman nous a invité à poser notre pouce humecté sur le front de la wawa (le bébé) pour attirer la pluie.

Nous avons également vu doña Grego se fâcher en apprenant que des touristes étaient allés se baigner dans le lac, car selon ses croyances, il ne faut pas se dénuder et offenser la pacha mama et le pacha tata pendant cette période sous peine de voir la sécheresse se prolonger.

L'événement le plus surprenant, expliqué par don Jesús et auquel nous avons eu la chance d'assister, c'est la cérémonie pour appeler la pluie. Celle-ci se faisant toujours attendre, et les récoltes commençant à s'affaisser, les plus influents du village ont décidé d'employer les grands moyens. Une petite délégation s'en est donc allée chercher de l'eau dans une montagne au Pérou proche et l'a rapportée triomphante. Ce petit groupe a arpenté tout le sud de l'île en musique, ou plutôt dans une joyeuse cacophonie, en titubant et sur le dos des plus jeunes pour certains, l'alcool ayant dépassé son rôle d'offrande...

On en pensera ce qu'on veut, le lendemain, sous nos yeux ébahis, il a plu sans s'arrêter... Et encore heureux, ça nous aura évité d'assister à l'étape suivante si la sécheresse avait persisté: des crapaux sont placés dans une vasque en haut de l'île et brûlés par le soleil, leurs coassements de désespoir sont censés appeler la pluie.

La procession - Le résultat le lendemain

On nous raconte des histoires qui font froid dans le dos, comme celle du Karikari, une sorte d'esprit qui vole la graisse des gens, et particulièrement des passagers endormis dans les bus. Il ferait une petite incision, sa victime contracte alors une maladie qui l'entraîne souvent à la mort 😱 Roxana, qui a grandi en ville et n'a pas tout à fait les mêmes croyances, pense quant à elle que cette légende a été fondée pour "expliquer" la maladie qui frappe une grande partie de ces populations qui consomment beaucoup d'aliments frits, la maladie du foie gras.

Ce que nous apprenons aussi, c'est que les habitants de l'île, comme beaucoup de populations dites indigènes, sont victimes de racisme de la part des citadins. La fille de doña grego en est un triste exemple, elle a subi le mépris et la négligence du corps médical lors de son accouchement, ce qui a entraîné la perte de son premier enfant...

Nous constatons chaque jour un peu plus combien la vie est dure pour eux, comme pour la majorité des boliviens d'ailleurs, et comprenons mieux le caractère méfiant et modeste des habitants.

Balade dans le sud de l'île. La partie nord est fermée par un checkpoint suite à un conflit entre les 2 communautés sur la gestion

Si les débuts ont été un peu difficiles en termes d'intégration, ces deux semaines sur l'île nous auront profondément marquées. La culture aymara est très riche et repose sur des valeurs et des croyances pleines de bon sens, et parfois surprenantes ! Chacun des membres de l'équipe nous a partagé un peu de son histoire, c'était touchant de se voir accordé leur confiance au fil du temps.

Encore un départ qui est une aventure en soi, ça commence à être notre marque de fabrique! Le jour de notre départ, les habitants de la région ont lancé un blocus de la route reliant la Paz à la frontière péruvienne en passant par Copacabana pour attirer l'attention du gouvernement sur la nécessité de construire un pont au dessus d'une rivière car à l'heure actuelle, la traversée se fait en bac et il y a déjà eu beaucoup d'accidents. Pour quitter l'île, Rémy est mis à contribution avec d'autres hommes pour mettre à l'eau le bateau, on en finit pas de le prendre pour un latino.

Pas de voitures, pas de bus, il faudra marcher les 10 km qui nous séparent de la frontière en compagnie d'autres familles, touristes, on s'échange les dernières nouvelles, des raccourcis... L'ambiance sur les barrages est animée, c'est une sorte de grand pique nique géant. Après avoir traversé des champs, des collines et une piste d'atterrissage, nous arrivons à la frontière: à nous le Pérou !

10 km à pied, ça use les souliers