Sälem! Priviet!
Je débarque donc du train à 7h30 à Huoerguosi et mon vélo y est déjà! Yahouu! Je fais les emplettes avant de me diriger vers la frontière Kazakh. À l’approche de la frontière, je rencontre un Français qui a travaillé plusieurs années au Sichuan pour des ONG notamment dans le domaine de l’éducation. Autour de nous, la police et l’armée sont partout, littéralement, il est impossible de ne pas être en vue par l’un ou l’autre des corps de sécurité dans cette ville. Il est 9h, nous attendons l’ouverture du poste frontalier. À 10h, on nous dit que l’ouverture est à 12h en raison du décalage horaire au Xinjiang. Je comprends par la même occasion que toute la Chine a la même heure, celle de Beijing, excepté la province du Xinjiang. Cela malgré le fait que la Chine couvre dans la réalité 5 fuseaux horaires différents. Le Xinjiang a 2 heures de moins que l’heure de Beijing, mais conserve le même horaire dans le sens où la journée normale de travail débute à 10h plutôt que 8h et finis conséquemment plus tard.
1. Dépanneur chinois en Chine 2-3. J’ai pu prendre de photos plus proche, déjà qu’un soldat m’a averti de ne pas prendre dephotos Nous allons alors bruncher dans un restaurant kazakh pas très loin. Vers 12h30 nous sommes de retour au poste frontalier. Nous essayons une entrée, ce n’est pas la bonne, puis une autre et on nous dit que ce n’est pas possible de traverser la frontière à pied ni même en vélo, il faut prendre l’autobus, merde… Aussi, à chaque fois que nous croisons un policier ou un soldat, il vérifie attentivement notre passeport, ce qui veut dire de nombreuses fois… Nous nous rendons donc à la station d’autobus du centre-ville, il en coûte 70 yuans chacun (près de 15$cad) pour se rendre à la première ville Kazakh. C’est également l’occasion de franchir le premier contrôle de sécurité. Je m’essaie à nouveau de pouvoir franchir la frontière en vélo: impossible. À partir de la station d’autobus jusqu’à la frontière, la voiture utilisée est trop petite donc je dois la suivre avec mes deux roues. Une odeur d’arnaque plane déjà.
Nous franchissons un deuxième contrôle de sécurité avec scanner, puis un troisième dans le bâtiment qui suit. Il faut bien créer de l’emploi! Bref, suite à ce dernier contrôle de sécurité nous nous mettons en file. Puis, évidemment, contrairement aux autres dans la file, on m’informe que tous mes sacs seront fouillés. (Honnêtement, je sais pas pour vous, mais à chaque fois, chaque fois, je me fais fouiller. Avec ou sans vélo. Est-ce que c’est la barbe? Le regard? L’attitude? Je vais méditer la-dessus..!) En plus, mon visa a été fait à Saigon au Vietnam, c’est louche!
Cela prend 45 minutes à l’agent pour passer en revue toutes les photos et vidéos des deux cellulaires et de la caméra. Il veut savoir les raisons de ma présence en Chine, où j’ai rencontré mes amis chinois, pourquoi je suis en relation avec eux, quels sont tel et tel chose dans mes sacs et quelle est la couleur de mes bobettes... Je deviens un livre ouvert, une fois de plus. Tout cela et je ne suis pas encore sortie de la Chine! Suite à cette étape, je me rends compte qu’il ne reste plus de place pour mon vélo dans ce fameux autobus. Avec l’aide d’un américain du Minnesota, je demande à un soldat chinois si je peux me rendre en vélo à la frontière Kazakh. Bien sûr il faut attendre plusieurs minutes, le temps qu’il appelle son supérieur et que son supérieur appelle son supérieur. Finalement, ils acceptent! Wow! Je suis charmé par toute cette confiance qu’il porte en moi. J’enfourche finalement mon vélo pour me faire arrêter quelques mètres plus loin, contrôle d’identité, ils doivent noter sur une feuille qui je suis. Enfin! C’est terminé! À nouveau en selle, puis… 5 mètres plus loin, après un virage, autre contrôle d’identité. Doux Jésus Marie Joseph! Contrôle d’identité pertinent? Non. Curiosité personnelle? Probablement. Se réconforter dans son poste hautement névralgique pour la sécurité de la nation. Oui.
À un certain point, on en vient à frôler la psychose. Suis-je réellement qui je suis? Vient en Chine en tant que touriste, tu es le bienvenu avec ton argent, mais on va te faire baver! On va te poser des questions plusieurs fois et sous différents angles pour être sûr que ta réalité est bien la tienne! Il faut dire aussi que de voyager en vélo attire davantage l’attention des autorités, surtout dans la partie ouest de la Chine avec ses méchantes et dangereuses minorités ethniques.
Je fais ensuite les 15 kilomètres de la zone neutre qui me sépare de la frontière kazakh, il est près de 15h. J’arrive dans une sorte de cour arrière où un agent Kazakh m’ouvre une grande clôture grinçante et me pointe un bâtiment un peu plus loin. Je m’approche, il n’y a même pas d’affiche en kazakh et encore moins en anglais. Le bâtiment est délabré et semble abandonné. J’ouvre une des portes et je ne vois personne, c’est le silence total. Je dis « Hello! », puis quelques secondes plus tard un agent frontalier me fait signe de m’approcher. En l’espace de trois minutes, il poinçonne mon passeport…! Bienvenue au Kazakhstan ! :-)
Malgré les inconvénients et le stress causé par la chose sécuritaire en Chine, j’ai énormément appris et apprécié ces deux derniers mois. Au delà du choc culturel et de l’indifférence de beaucoup de gens, j’y ai rencontré de nouveaux ami.e.s et plusieurs belles découvertes. Que ce soit le décor des montagnes, la nourriture, la réalité politique vécu sur leur territoire, l’architecture, etc.
Dès la première journée au Kazakhstan, je sens déjà que la culture dans ce pays se rapproche de la mienne. Quel plaisir de se sentir moins étranger! Des fermiers me saluent sur la route et cela à leur initiative, oui oui leur initiative! Et d’aucun ne reste de marbre quand je le salue. :-) L’environnement est sec et rustique, il semble que ce soit déjà l’avant-goût des steppes kazakhs. Contrairement à la Chine, je vois à nouveaux beaucoup de chevaux utilisés pour le transport et pleins de vieilles bagnoles renipées.
Le lendemain matin j’arrive dans le village de Chundhza, à la chasse au guichet automatique. Je n’ai pas de tenge depuis mon entrée au Kazakhstan et je n’ai pas encore eu un repas complet. Je voulais me concocter ce désormais populaire et traditionnel met de nouilles au poivre du Sichuan, mais ma casserole était remplie de moisissures puisque j’avais oublié de la laver quelques jours plus tôt, aieaie! Les surprises nomades comme dirait-on! Je finis par trouver deux guichets automatiques où se trouve deux files de kazakhs impatients et également une heure d’attente. Une fois les tenges en poche, je vais manger dans un petit resto kazakh. Je fais aussi le plein d’eau et de gâteaux, et hop c’est reparti sur la route!
Tout comme le matin, il y a beaucoup de vent, mais plus la journée avance et plus il est question d’énormément de vent. Au point où j’en arrive à avoir du mal même à pousser mon vélo en marchant! Il est hors de question de pédaler. D’abord, parce que la vitesse est à peu près la même qu’en marchant, ensuite c’est que je dépense globalement trop d’énergie à pédaler en plus d’essayer de garder le guidon droit, finalement, les bourrasques irrégulières qui viennent de biais me poussent vers l’intérieur de la route où les automobilistes kazakhs gardent nettement moins une distance sécuritaire que les Chinois. Si le vent continue de la sorte, l’avancement possible devient plus de l’ordre du 35km/jour plutôt qu’une moyenne de 100km/jour, c’est assez décourageant! Surtout que je n’ai pas traîné un vélo tous ces kilomètres pour prendre une marche avec lui main dans la main, bien que je l’aime! :-)
1. Petit clin d’oeil 2. Postérieur, pardonne-moi! Il faut dire que le vent a le temps de courir un ultra marathon sur ces longues étendues quasi-désertiques. Je réfléchis peut-être à m’arrêter pour la journée et espérer que le lendemain soit mieux. Encore là, ce serait impossible d’installer ma tente, la seule possibilité est de faire une sorte de toit avec mon vélo dans une des crevasse contraire au vent. C’est bien excitant ce type de camping, mais les quelques heures de marche dans le corps le sont moins… Dans ces moments là, je me dis toujours qu’il faut au moins continuer à avancer, peu importe la vitesse. Autrement, le découragement prend le pas.
Je vois même arriver une tempête au loin. Aaah la la!! Puis, je fais le saut! Un camion vient m’accoster et je ne l’ai jamais entendu venir. 3 kazakhs qui reviennent de la chasse au lièvres m’offrent un lift. Au début, je décline poliment, puisque je suis un guerrier, ou j’aspire à l’être. En l’espace d’un instant je repense à toute la situation. C’est bien jolie de faire le plus de trajet à vélo, mais je ne suis pas maso non plus! Et depuis le début de mon voyage, j’adore découvrir les nouvelles contrées au gré des rencontres spontanées.
Ils sont ultras sympathiques! L’un d’eux doit se cacher dans la cabine à l’arrière puisque nous ne sommes pas règlementaire et la police ferait du chichi, et nous devrions refiler un billet dans sa poche, mais c’est à éviter! J’ai ma première occasion d’apprendre le kazakh et le russe! De plus, quoi de mieux que d’apprendre à connaître un pays de cette façon! Ils me donnent un lift jusqu’à la porte de mon hostel, wow! Et une garantie de sortir un des soirs suivant pour les inviter en guise de reconnaissance.
Almaty est une ville à peu près de la taille de Montréal et sa température est similaire également. La tension est palpable dans l’air, les gens sont stressé et à fleur de peau. Je semble aussi être l’un des seuls cyclistes de la ville. Les automobilistes ne sont vraiment pas habitués à partager la route. En l’espace de quelques jours, j’ai été témoin de deux accidents de voitures, une bagarre et une bonne quantité d’insultes. D’ailleurs, la blague est justement que les bagarres de rues est un sport national! Beaucoup d’hommes semblent juste chercher un prétexte pour en venir à une confrontation. Cela est d’autant plus vrai quand un étranger est avec une femme kazakh, je peux en témoigner! Ce désir de protéger son “territoire”, au delà d’une réaction primaire, serait pour protéger la culture kazakh et éviter sa dispersion dans le contexte où la culture russe pèse lourd dans l’un de ses anciens pays satellites.
Ce type d’atmosphère n’est en rien comparable aux énergies plus zen des villes chinoises que j’ai connu. L’amie de mon amie Kazakh de Montréal, Zauresh, s’explique cette atmosphère par la période soviétique durant laquelle la population attendait des heures en file pour se voir distribuer les denrées alimentaires de base. Ensuite, tout les bouleversements sociaux et économiques, entre autres choses, causé par la chute de l’union soviétique. Malgré cela, je passe un bon temps à essayer quelques bars, brasseries (avec d’excellentes bières kazakhs et russes), cinéma, etc. C’est aussi l’occasion de renouer avec mon vélo en allant au complexe de ski Symbulak. Cela prend 2h30 pour se rendre et seulement une heure pour revenir! Je n’ai jamais vu un angle de route aussi abrupte! À la fin du trajet, je dois m’arrêter aux 5 minutes pour reprendre mon souffle en raison de l’effort physique bien sûr, mais aussi du manque d’oxygène à cette altitude. Disons que je suis bien content d’arriver au fil d’arrivé!
3. Shymbulak 4. Les grands esprits se rencontrent!
C’est que la frontière à Kegen est fermée. Est-ce que je veux vraiment me rendre à Karakol en vélo en faisant le grand contour par l’ouest? Ensuite ça implique de prendre l’autobus avec mon vélo pour Karakol-Bishkek et Bishkek-Almaty. Mais il n’y a pas d’autobus, ce sont seulement des minivan (nommé Marshrutka) qui font le transport, donc pas vraiment de place pour un vélo… Donc c’est décidé! Le trip de vélo est terminé! :-( Ce sera plus simple de voyager pour les deux semaines qui me restent et je pourrai prendre plus de temps pour visiter le Kirghizstan.
Je profite des jours suivant pour trouver une boîte à vélo, une roulette de gros tape et un grand sac de voyage pour y mettre mes sacoches de vélo. Au moins je n’aurai pas à m’occuper de ça à la dernière minute. J’en profite également pour aller avec Zauresh et ses deux filles à la station spatiale sur une des montagnes avoisinantes ainsi qu’au Big Almaty Lake, l’un des réservoir naturel d’eau potable pour la ville.
À très très bientôt! ;-)
Raphaël