Depuis hier, Ambre a décidé de faire des crêpes et de les distribuer. L'une des résidente des lieux en profite pour lui demander si elle veut aller voir l'hôpital des tortues marines à quelques pas d'ici. Le rendez-vous est pris pour 15 heures avec Sue, pour partir à pied au conservatoire des tortues.
L'association a plusieurs missions : l'éducation environnementale pour les écoliers et les communautés locales, le secours aux tortues prises dans les filets des pêcheurs et les soins en cas de maladies ou de blessures.
Une demoiselle nous fait la visite. Nous commençons par l'exposition des carapaces, des squelettes et des cranes de ces chéloniens. Elle nous demande si nous connaissons l'un de ces objets sur la table, Ambre dit oui nous avons cet os dans le camper. C'est une plaque dorsale que nous avions trouvé sur la plage au Mozambique, nous croyions que c'était un os de baleine, nous avions vraiment tout faux. Nous ne savions pas non plus que sous la carapace il y a un squelette dont les plaques dorsales où reposent les écailles. Nous apprenons aussi quelle est l'alimentation des tortues, toutes omnivores, mais chacune ont leurs préférences. La tortue verte se régale d'herbe, la tortue imbriquée d'éponges, la tortue luth de méduses et la tortue caouanne de coraux (elle participe à la fabrication du sable coralien).
Nous partons ensuite pour la visite, où de nombreux panneaux ludiques peints, étayent le discours de la voix fluette de notre guide. La décoration est faite avec du plastique collecté, donnant lieu à des sculptures de méduses, crabes, tortues...
Ils ont aussi une pépinière de palétuviers pour reconstruire la mangrove.
Régulièrement ils font des saisies de tortues chez les habitants. La tortue verte est l'espèce principale ici, peu réputée pour son écaille, elle est chassée pour sa viande. Les os, boîtes crânienne, carapaces sont stockés ici, sans sécurité particulière.
Une dernière question, très bien posée. Sur les portes d'une armoire il est écrit "Quelle est la plus grosse menace pour les océans ?", en ouvrant les portes nous découvrons la réponse.
Eh oui, c'est nous qui sommes les plus dangereux pour eux. Par l'excès des prélèvements, par la pollution générée, par le braconnage, par le réchauffement climatique,...
Nous arrivons à l'hôpital des tortues où elles sont soignées. La raison des admissions est diverse : la fibrose (herpes virale) qui serait dû à la pollution des eaux, les blessures à cause des activités de pêche, les évènements climatiques tels que les cyclones, la malnutrition (à cause de la mauvaise santé des récifs coraliens ou de la détérioration des zones enherbées), le braconnage et enfin la flottaison induite par l'ingurgitation de plastique endommageant leur système de digestion ou les empêchant de plonger pour trouver leur nourriture.
Aujourd'hui il y a deux tortues dans les bacs de soins, atteintes de fibroses . L'une d'elle était quasiment morte lorsqu'elle a été recueillie, aujourd'hui les soigneurs la nourrissent par intubation. Les fibroses vont êtres brulées en plusieurs étapes. Elles resteront ici jusqu'à ce qu'elles soient rétablies, avant d'être relâchées dans la mer. Les enfants semblent prendre conscience de la menace de ces reptiles en les voyant en convalescence.
C'est une belle association ayant un vrai impact sur la protection des tortues. Le braconnage diminue et les pêcheurs les appellent lorsqu'ils en capturent accidentellement dans leurs filets.
Sur le chemin du retour nous discutons longuement avec Sue, qui travaille dans l'élevage. Elle a un cheptel et crée une application pour faciliter la vie des agriculteurs dans leurs décisions agronomiques. Elle a une vision très intéressante de l'agriculture et de l'élevage dans son pays. Elle n'est pas favorable aux donneurs de leçons occidentaux (d'ONG, assurances, ...) qui oublient souvent de comprendre le contexte local avant de proposer leurs solutions. D'ailleurs, lorsqu'elle discute avec quelqu'un, elle a une question que je trouve très pertinente, "quels sont les problèmes que tu rencontres?". Au lieu de vouloir tout révolutionner, elle se concentre sur les problèmes où il faut trouver des solutions. Et non, voila le projet, pouvant bouleverser des choses qui fonctionnent.
Véronique et Dominique, que nous avions croisés à Nakuru et Nairobi, nous rejoignent au camping, ils arrivent du nord de la côte. Nous passons une soirée agréable ensemble.