Cela fait quelques temps que nous voulions visiter cette île de feu et de glace. C'est parti pour une traversée de 400 km du Nord au Sud à pieds, en autonomie.
Septembre 2018
12 jours
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KM
0

Avant de raconter notre aventure, nous tenons à remercier ceux qui nous ont inspiré et aidé:

  • http://www.deuxfreresenislande.com
  • https://www.randonner-leger.org/perso/doku.php?id=Accueil
  • https://blog.le-yeti.net/trek-en-autonomie-en-islande/
  • https://www.myatlas.com/TO/traversee-sud-nord-de-l-islande-juillet-2017

A la fin de cette page vous trouverez la vidéo qui relate notre histoire. Nous espérons l'avoir retranscrite au mieux 😀. Pour les plus impatients voici le lien : https://www.youtube.com/watch?v=z1ArHsAMM2A&t=257s

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Au départ du périple, le poids de notre sac se décomposait de la manière suivante:

  • Matériel: 11 kg (y compris le matériel qui n'était pas dans le sac, du style chaussures, bâtons, t-shirt, sac lui-même, etc)
  • Nourriture: 9 kg
  • Eau: 2 kg
  • Total: 22 kg
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Nous tenons à préciser que nos repas ont été cuisinés, déshydratés et mis sous vide par nous-même 😀 Nous vous conseillons d'en faire de même, vous y gagnerez en qualité et en argent. Cela vous demandera par contre beaucoup de temps.

Autre avantage des plats déshydratés "maison", pas besoin d'eau bouillante pour les cuire. Il suffit juste de les laisser "tremper" puis de simplement réchauffer l'ensemble. Vous économisez ainsi du gaz (lourd et encombrant dans un sac de randonnée ...).

KM
15

15 km

75 mD+

A peine arrivé à l’aéroport et on prend directement la route (en voiture de location) vers Akureyri. 5h30 de route, arrivée à 3h30 du matin, aïe ! Malgré un peu de repos dans la voiture, la fatigue est là. Mais bon l’excitation du voyage nous tient éveillés. On rend la voiture à Akureyri, mais il nous reste une centaine de kilomètres pour rejoindre notre point de départ: le lac Myvatn (qui signifie « lac des mouches ». Ca aurait été intéressant de savoir ça avant d’arriver en Islande).

La chance nous sourit, après seulement 20 minutes de stop, on rencontre Marta qui nous emmène jusqu’au Nord du lac Myvatn (à Reykjahlio). Grâce à elle, on a gagné 4 heures sur l’itinéraire initialement prévu en bus.

L’aventure pédestre commence enfin! Mais pas comme on le souhaitait. En effet, 10 kilomètres sur le bitume le long du lac Myvatn et des moucherons par milliers autour de nos visages… On a connu mieux. Après ces 10 kilomètres, on commence à s’enfoncer dans les grands espaces. C’est le moment de monter le tipi pour la première fois.

KM
42

27 km

260 mD+

C’est notre premier vrai jour dans la nature après la route d’hier. Les mouches sont toujours là, quelle horreur ! Benoit, ayant oublié sa moustiquaire de tête, s’équipe de lunettes et d’une cagoule… En plus d’être ridicule, il a chaud et ne voit rien avec la buée sur les lunettes. Le pauvre, il rate de beaux paysages.

Le repas du midi est compliqué à cause des mouches, mais c’est l’occasion de tester nos fameux plats cuisinés et déshydratés maison. Tout le monde se régale !

27 km plus tard on pose enfin la tente… sous la pluie. Il fait froid. On doit optimiser notre organisation dans la tente. A 3 bipèdes avec 3 sacs de 55 litres, ça rentre au millimètre ! Heureusement, on s’aime bien, et ça ne nous dérange pas d’être tactiles entre nous.

KM
72

30 km

280 mD+

Enfin délivrés des mouches ! Nuit et réveil sous la pluie. On gère la logistique à 3 dans le tipi pour ranger les duvets, s’habiller, manger et préparer les sacs malgré l’espace restreint. On gagne en souplesse jour après jour.

On arrive sur un paysage plus minéral que les jours précédents, c’est canon ! Et ce n’est que le début.

En milieu de matinée, le refuge de Botni se présente à nous. On fait le plein d’eau dans le petit lac attenant au refuge.

La suite de la journée est très agréable, avec de véritables décors lunaires. L’objectif de la journée est atteint, on finit au refuge de Dyngjufell. Il fait relativement chaud (… quand le poêle fonctionne). On en profite pour sécher la tente. On répare également nos petits bobos aux pieds.

KM
99

27 km

1 300 mD+

Réveil dans un décor sublime qui provoque en nous de grosses palpitations de bonheur. On enchaine les kilomètres avec grand plaisir. Trop rêveurs et dans nos pensées, on fait notre première erreur de parcours. On loupe une bifurcation et on marche 3 kilomètres hors de l’itinéraire prévu. On rattrape bien le coup en crapahutant à travers falaises et glaciers.

On prend de la hauteur jusqu’à arriver sur un plateau brumeux. Le brouillard est dense, l’aventure prend un air mystique. Puis une vaste étendue de roches volcaniques abrasives (cratère d’Askja) qui ralentissent notre progression et mettent à mal une des semelles de Boris. Il faut la bricoler pour qu’elle tienne le coup. On n’a que du gros scotch, pourvu que ça tienne.

L’espoir se présente à nous à travers une ranger qui patrouillait autour du lac Viti. Elle n’a malheureusement rien pour nous aider mais nous conseille de rejoindre le poste de ranger de Dreki. On y passera la nuit.

On est obligé de donner notre itinéraire aux rangers. Ils nous déconseillent de bivouaquer à proximité du glacier Vatnajokul. Ils nous obligent également à envoyer un sms 120 kilomètres plus loin pour confirmer notre position. Nous sommes seuls sur cet itinéraire en cette saison et les prévisions météo ne sont pas des plus clémentes … Cela nous procure un sentiment partagé entre excitation et stress.

Bonne surprise, on rencontre dans le refuge de Dreki des amis venus faire un trip en 4x4. On passe une soirée joviale avec charcuterie et apéro.

KM
138

39 km

250 mD+

Départ sous la pluie. Sur les conseils des rangers, On cherche à éviter de bivouaquer près du glacier Vatnajokul. On vise alors une journée à 50 km … Ambitieux mais on y croit, c’est notre côté naïf.

Le rythme est bon et nos dos souffrent ! Les sacs sont encore lourds pour nos corps maigres. Heureusement, chaque jour, chacun perd environ 650g dans son sac (nourriture consommée). Notre progression est stoppée par un champ de lave où les roches sont très abrasives et le sol chaotique. Nos semelles et nos vêtements ne tiendraient pas. Après une pause propice à la réflexion, la solution nous vient du GPS qui nous permet de voir par où contourner cette coulée de lave récente (de 2014).

On reprend le chemin, on se sent bien seul dans ces immensités désertiques. Nos réserves d’eau sont justes. On choisit de faire le plein avec l’eau des glaciers. Celle-ci est très turbide, très chargée en sédiments. Elle ressemble un peu à du Smecta, ce médicament contre la diarrhée… Elle ne sera utilisée qu’en cas d’urgence (nécessité de filtrations multiples, etc).

Fatigués, le 40ème kilomètre sonne la fin de la journée. L’objectif des 50 km n’est pas atteint et on se retrouve à dormir dans une vallée au plus près du glacier : pile à l’endroit déconseillé par les rangers…

Il fait déjà -15°C et la nuit n’est pas encore tombée. Le tipi n’a jamais été aussi bien arrimé. Par peur du vent, on a lesté les sardines de lourdes pierres.

KM
169

31 km

420 mD+

Super réveil sous la neige ! Le paysage sec et lunaire du la veille est devenu tout blanc. On se gèle en sortant de la tente malgré nos 3 couches. Le froid est tellement présent que nos galettes au miel du petit déjeuner sont raides et collées entre elles. Hier soir, l’huile qu’on rajoute à nos plats pour être moins secs était solide, un peu comme du beurre.

La météo se résume à de la neige et de la pluie presque toute la journée. Avant midi, un refuge de secours (Gaesavotn) se dresse devant nous. On en profite pour se réchauffer un peu et faire le plein d’eau. Boris en profite même pour une pause biologique dans la cabane WC à l’extérieur par -5°C.

On reprend la route, il est trop tôt pour manger. Une piste de 4x4 coupe à travers les roches volcaniques abrasives et nous permet de garder une belle allure sans se ruiner les godasses. La carte nous indique des rivières à traverser. Par ce froid et sous cette pluie/neige, cela ne nous emballe pas… Des trekkers en 4x4 nous rassurent sur le fait que le niveau est bas et sans danger. Il faudra quand même se mouiller les pieds !

La journée prend fin lorsqu’un spot sublime s’offre à nous. Au même moment, la météo s’améliore. L’occasion rêvée pour se relaxer, sortir l’appareil photo et couper le saucisson !

KM
201

32 km

410 mD+

Départ à 8h00, 30 minutes de retard sur nos habitudes. Et oui, la fatigue se fait sentir ! Le soleil brille. On regrette de ne pas avoir pris de panneau solaire pour recharger nos batteries (appareil photo, gopro).

Un choix cornélien se présente à nous. Contourner des rivières sur un itinéraire long ou les traverser sur un itinéraire plus court. On choisit l’option 2, le temps est propice à se mouiller les pieds (l’eau est quand même glaciale …). C’est aussi l’occasion de mettre nos plus beaux souliers, nos Crocs !

Cette option 2 nous fait gagner beaucoup de temps. Le soleil continue de briller, les paysages sont tops. On est de plus en plus rapides et efficaces pour traverser les guets. On profite, le moral est bon. Cédric ne cesse de chanter tant son bonheur est intense.

Le soir ce n’est pas la même ambiance. Le vent souffle fort, il faut bien arrimer la tente et charger les sardines de lourdes pierres. Notre expérience en Norvège (2016) nous pousse à la prudence face au vent (la tente s’était envolée pendant la nuit, on a dû sortir en slip sous la pluie et le vent, c’était désagréable).

Le vent forcit. A l’intérieur, c’est stressant. On sent que le matériel est mis à rude épreuve. On prie pour qu’il ne cède pas. La nuit est difficile et on dort peu.

KM
232

31 km

590 mD+

La vent à mis la tente et nos esprits à rude épreuve. A chaque fois que j’ouvrais l’oeil, je voyais Boris les yeux grands ouverts vers le ciel. Il tenait le mât du tipi dans sa main. Comme s’il cherchait un espoir dans le seigneur…

Réveil sous la neige, le vent et le froid. On se gèle. Après à peine 20 minutes de marche, il faut traverser une rivière. On n’est pas fier.

Le reste de la journée se déroule d’une toute autre manière. On s’éloigne du glacier, et là, soleil, lacs, plaines, rivières, on en prend plein la vue. On enchaine les kilomètres et toujours aucun autre bipède à l’horizon. Ils sont où les islandais? Et les touristes?

Au moment de poser la tente, Il fait toujours beau. Quelques instants plus tard, la pluie arrive. On se couche plus tôt que d’habitude, la fatigue se fait sentir.

KM
263

31 km

470 mD+

Départ en avance, mais avec un vent fort et glacial. Ne nous plaignons pas, il ne pleut pas et le vent est dans notre dos… Les kilomètres défilent et le vent froid ne cesse pas. Même nos pâtes du midi sont mangées tièdes. Boris n’aime pas ça, il boude un peu. Impossible de chauffer quoi que ce soit avec ce vent, et le désert ne nous offre pas beaucoup d’abri pour le contrer.

On aperçoit au loin la rivière Illugaven. Elle parait énorme, puissante. On se demande bien comment on va la traverser. D’habitude, on enfile nos Crocs et c’est parti, avec de l’eau jusqu’aux cuisses mais pas plus. Là, ça semble bien plus coriace. Mais cette fois, on peut remercier l’être humain d’être passé par là et d’y avoir construit un pont! On garde les pieds au sec, on est soulagé.

Sur le chemin, des WC dans une belle cabane triangulaire se présentent. Curieux, on ne peut pas s’empêcher d’aller voir, et pour certains d’aller y poser une petite commission. Le sol y était très abîmé, on avait peur de tomber dans le purin …

Plus loin, on monte la tente. On prend un soin particulier à bien l’attacher au sol, à charger les sardines de pierres. Heureusement car le vent a été fort toute la nuit. On ne dormait que d’un seul oeil. Le tipi a beaucoup subit mais a tenu bon. On n’était pas fier. On apprendra plus tard que cette nuit-là, le vent soufflait entre 70 et 100 km/h.

KM
299

36 km

400 mD+

Cette journée est loin d’être la plus belle qu’on ait eu. 36 km sur une véritable autoroute… Une piste dure, un paysage monotone, du vent et rien de passionnant. Ah si, les Kinder Country ! Heureusement qu’ils sont là pour nous redonner du moral. Le repas du midi est une fois de plus pris froid, à cause du vent. Nos pauses sont brèves, il fait vraiment froid, on ne peut pas rester statique bien longtemps.

Pour nous achever, on croise un vieux dans un 4x4 qui nous annonce que la météo va être très mauvaise dans les jours à venir: pluie, neige et vent violent. La présence d’une sorte de corbeau annonce peut être un mauvais présage et nous fait dire qu’il a surement raison ce vieil homme.

On a hâte de changer de décor, heureusement que notre petit tipi chaleureux est là. Ce soir, on soigne nos bobos, apéro et repas chaud. Dehors, le vent est encore plus fort qu’hier soir. On stresse, le tipi est mis à mal.

KM
331

32 km

600 mD+

Le réveil est excitant et agité. Le vent nous a tabassé toute la nuit, bien plus que les fois précédentes. On avait vraiment peur pour le tipi et pour nous. Voir la tente se déchirer et finir dehors en slip, cela nous effrayait. On décide de lever le camp à 4h30 pour préserver le matériel. Bien sûr, dehors il fait nuit, froid et le vent est difficilement supportable. Selon les rangers rencontrés plus tard dans la soirée, cette nuit-là, le vent soufflait à plus de 100 km/h…

On assiste à un beau lever de soleil. Le paysage change, on aperçoit des reliefs verdoyants. On est impatient d’être dans les montagnes au Sud.

Le soir, on arrive au camp du Landmannalaugar, le spot prévu pour la nuit. Une fois de plus, dans les camps islandais, la nuit est chère, même pour poser une tente. Mais, fatigué et saisi par le vent froid, on ne réfléchit pas trop et on rentre se réchauffer. On en profite pour demander des conseils aux rangers.

Et là … Coup de massue! Les informations des rangers ne sont pas encourageantes. 30 à 40 cm de neige sont tombés dans les montagnes qui nous attendent. De plus, le vent va forcir (on se demande si c’est vraiment possible au vu des journées qu’on vient de subir), 200 km/h annoncés…

On réfléchit un peu, on imagine comment passer la neige, comment rendre plus solide le montage de notre tipi, mais on se rend vite compte qu’on est bloqué ici. On ne pourra pas continuer. On accuse le coup, le moral est au plus bas. L’aventure s’arrête là.

Notre itinéraire initial était le plus simple et rapide pour rejoindre la route n°1 au Sud sur laquelle on aurait pris un bus vers Reykjavik. Maintenant, on est au milieu de nulle part. Pas de bus, quelques 4x4 qui restent au camp, peu de monde.

Une nouvelle aventure nous attend cependant: rentrer à Reykjavik autrement que par les montagnes au Sud et la route n°1 (car on a quand même un avion à prendre).

Depuis notre position, et ne pouvant plus passer par le Sud, Reykjavik est maintenant à 220 km (70 km de piste puis 150 km de route). La meilleure solution est de suivre la piste puis la route à pied en espérant croiser un 4x4 qui veuille bien prendre 3 mecs sales avec leurs sacs.

KM
344

13 km

300 mD+

On attaque donc cette piste de 70 km. Le moral un peu bas au début bien sûr. On aurait tellement aimé aller au bout de notre aventure … Mais on est sûr d’avoir fait le choix le plus raisonnable. Continuer dans ces conditions était dangereux à notre niveau.

Petit à petit, on retrouve le sourire. La piste offre tout de même de beaux paysages, et la météo est bonne où on est. On aperçoit quand même beaucoup de nuages et de neige vers le Sud.

Après 13 km et 3h de marche, on voit le premier 4x4 de la journée. C’est tellement rare qu’on ne peut pas laisser passer notre chance ! On marche bien au milieu de la piste, on fait de grands signes. En fait, on ne laisse pas vraiment le choix au conducteur. Il s’arrête.

La scène aurait pu ressembler à un braquage tellement on était déterminé à rentrer dans cette voiture ! En plus, c’est Ben, le plus basané et barbu du groupe qui parle au conducteur …

Dave, pasteur dans le Minnesota, est en vacances en Islande et se balade seul sans but précis ce jour là. Peut-on dire qu’il nous a été envoyé par Dieu? Qui sait … En tout cas, on monte dans le 4x4.

On roule presque 100 km avec lui. On s’arrête dans une petite ville pour manger un bout et boire une bière en sa compagnie. De là, on trouvera un bus pour aller à l’aéroport.