Le réveil se fait de bonne heure car aujourd’hui il y a des kilomètres à pagayer !
Cette nuit à la « semie belle étoile » (on a dormi sous une grotte) fut très reposante. Nous avons profité de la lumière de l’aube qui dessinait au fur et à mesure le magnifique relief qui nous entourait.
Mis à part quelques bêlements, la vallée est silencieuse. On est surement les deux seuls bipèdes !
Comme depuis le début, Ben est le plus rapide à ranger le matos, surement parce que c’est le plus glouton de nous deux et qu’il veut attaquer le petit dej !
Je finis de ranger le matériel quand une main bronzée (celle de Ben !) me tend la tasse commune de thé, bien fumante ! Le petit dej est simple: thé, gâteaux secs, voire très secs, aux 14 céréales et … des gâteaux au miel ! On les adore, ce sont nos préférés, mais nous n’en avons que très peu. Juste 1 par personne tous les deux jours. Ce fut un test de les prendre et on approuve déjà pour les futurs treks !
Une fois rassasiés, nous prenons la direction de la sortie. La redescente du canyon à pieds est rapide. Il faut dire que nous connaissons bien le coin maintenant.
Surprise ! Une tente à moitié camouflée apparait derrière un buisson, finalement nous n’étions pas les seuls… perdu !
La mise à l’eau est trop compliquée par notre point d’arrivée. La configuration de la plage forme des vagues qui s’écrasent sur les galets. Trop risqué pour le matos, nous préférons longer la côte à pieds et tenter notre chance ailleurs.
Au bout de 10 minutes, chargés comme des mules, un homme d’un certain âge nous interpelle :
Lui : Bonjour, vous êtes français ? Ça se voit.
Nous, interrogatifs : heu, bonjour. Oui nous sommes français, vous aussi?
Lui : vous avez dormi où cette nuit ?
Nous, sentant son cheminement intellectuel pour nous piéger : on a dormi dans une grotte au fond de la vallée, la mauvaise météo nous a contraint de nous arrêter là. On est en train de faire un trip en paddle en autonomie, on est tombé ici par hasard.
Lui : vous savez que c’est interdit et que nous avons des problèmes avec le feu et les campeurs qui n’ont aucun respect pour les lieux ?
Nous : Ah, on ne savait pas mais ne vous inquiétez pas, tout est nickel ! Il n’y a aucune trace de notre passage (hormis les crottes aplaties sur lesquelles on a dormi !).
Lui : bon ok, bonne journée.
Echange étrange, comment a-t-il su que nous étions français ? Cet homme reste un mystère et on décide de l’appeler le Maire (ou le gros Maire). On en rigole bien.
Juste après cette conversation, on se prend un vilain orage. Grosse pluie, foudre, tonnerre, on se demande comment va se passer la journée. Mais ce mauvais temps (qui n’était pas prévu) ne dure pas, le soleil reprend ses droits rapidement.
Un spot de mise à l’eau est vite trouvé, matos gonflé et chargé, let’s go !
La mer remue un peu plus que les autres jours. Nos cervelets sont mis à rude épreuve pour nous maintenir en équilibre. Est-ce que cela améliorera notre performance à la slickline ? Vous avez deux heures...
Les paysages sont grandioses, le moral est bon et nous filons bien à travers les vagues.
Ben est souvent devant, je ne comprends pas… Pourtant nous avons le même rythme de pagaie et l’écart se creuse ! Encore un mystère… Il est pourtant petit et pas balaise...
La côte devient moins sauvage, le relief s’adoucie et les falaises laissent place à d’immenses plages de sable blanc.
Nous suivons la côte un certain temps jusqu’à arriver à une tache verdâtre dans cette eau turquoise. C’est l’embouchure d’un canal. Nous l’avions déjà repérée sur la carte et prévu de la remonter. L’embouchure est mouvementée mais nous tenons bon, nous parvenons à la franchir sans chute ! L’eau n’est plus du tout limpide et bleue, elle devient turbide et verdâtre. C’est un changement radical.
Nos nouveaux copains sont les canards. Ils sont curieux et s’approchent de nous. Quelques centaines de mètres plus loin, un pont se dresse devant nous et des pictogrammes signalent qu’il est interdit de continuer plus loin… dommage, nous avions très envie de nous perdre dans les canaux entourés de roseaux.
C’est parti pour un demi-tour. Les gens sont amusés de nous voir et nous font des coucous.
L’embouchure nous attend, mais cette fois les vagues sont dans notre dos ! C’est un exercice plus difficile à gérer pour nos cervelets. Les gens qui lézardent sur les enrochements nous regardent et attendent la chute ! Que Nenni, on ne se dégonfle pas et on pagaie fermement. Ben ouvre la voie et se fait aspirer sur la droite. Je file droit et m’éloigne de mon binôme. Ça bouge bien ! Fléchis sur nos appuis, on encaisse. Aucun roulis, ni tangage, ni lacet ne nous fera chuter. Tant mieux, vue la couleur de l’eau.
La plage redevient plus sauvage et le cordon dunaire semble intact de toute trace de civilisation. Seule une vieille tour de guet abandonnée en pierre y siège. Ce sera notre point de chute pour cette fin de journée.
Nous accostons et en profitons pour décharger tout le matériel. Il nous tarde de retourner à l’eau ! Le spot est propice pour tenter de faire du surf. Les vagues sont espacées et suffisamment hautes.
Après plusieurs essais, nous remarquons que nos paddles gonflables subissent les vagues comme de grosses bouées. Ils ne sont pas assez rigides, leurs nez piquent dans l’eau dès que la vague nous lève et ils tournent sur eux même. Ceci combiné à notre technique inexistante en surf, nous réussissons à faire 3 sessions qui ressemblent vaguement à quelque chose. Tout le reste n’est que chute et rigolade.
Fatigués, nous nous posons enfin sur la plage et un spot sublime est découvert pour bivouaquer. Une caoudeyre comme le fait remarquer le cultivé Ben.
Cet espace de sable, en plein milieu de la végétation qui s’ouvre sur la mer est parfait. Nous sommes invisibles et à l’abri de la brise marine.
Le tarp est monté en configuration « vaisseau Goa’uld ». Ce soir le menu est spécial. Notre ami Petu nous a donné, juste avant le départ, un plat déshydraté préparé par ses soins (un chili con carne!). Bien qu’un peu épicé, on se régale. Merci Petu. Nous filons dans le tarp. La journée fut longue.