Carnet de voyage

Transafricaine / On the road again

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Dernière étape postée il y a 1817 jours
"Selon la tradition des steppes, appelée Tengri , pour vivre dans la plénitude, il fallait être constamment en mouvement, ainsi chaque jour était différent de l'autre." Le Zahir - Paolo Coelho
Novembre 2018
24 semaines
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"Il existe une montagne sur la Lune que l'on appelle le promontoire des Songes. Du sommet, on a une vue splendide sur la mer de la Tranquillité. Depuis la nuit des temps, les pêcheurs de rêves viennent là pour attraper les plus beaux songes. Ils les relâchent ensuite sur Terre, dans les ruisseaux et les forêts pour qu'ils puissent nous chatouiller le soir dans nos lits."

Pêcheur de rêves

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... J'ai fait plusieurs fois ce rêve, parfois endormie, parfois éveillée... ce rêve où je pars loin, celui où je me sens chez moi peu importe l'endroit que foulent mes pieds ; mon vrai chez moi est nul part et partout, il est en moi !

Ce rêve je m'apprête à le réaliser à nouveau ! Cette fois je le partagerais avec Pauline ; et Christiane comme la dernière fois. Pauline et moi même, deux jeunes infirmières sur les routes cahoteuses d'Afrique de l'Ouest ! #noma2nurse

3 novembre 2018, Jour J : LE DEPART !

Jour du départ, réveil à 5h30 après une petite nuit d'un sommeil agité.

Nous voilà en train d'essayer de faire rentrer toutes nos affaires dans la petite voiture rouge de Christiane, de son petit nom "Coquelicot". Il nous reste juste de quoi nous mouvoir un peu ! L'aventure commence, après des au revoir et quelques larmes pour nos mamans inquiètes, nous prenons les petites routes de campagnes.

Après une petite pause café a Valros dans la famille de Christiane nous voilà reparties sur les routes direction l'Espagne.

Les Pyrénées enneigés 

Les paysages défilent, j'ai encore du mal à réaliser notre départ. Nous passons la frontière espagnole et prenons une pause pour pique niquer nos quelques menues victuailles.

Montserrat nous nous retrouvons… Ton relief dentelé se dessine au loin toujours aussi captivant. Tes dentelles se transforment de près en longs pics de roches brunes foncées.

Montserrat

La route est longue, la nuit tombe sur un ciel en feu, rouge, rose, orange, jaune… Cette semi pénombre se poursuit un moment puis la nuit tombe et nous continuons notre chemin.

Arrivées à Valencia vers 20h00, nous trouvons notre chemin grâce à la technologie du GPS ! Que ferions nous sans internet et sa magique orientation dans l'espace ?

Après un accueil très chaleureux de la part de nos hôtes Airbnb nous descendons manger un bout. Un petit resto à tapas fera l'affaire, nous sommes affamées.

En descendant dans la rue, devant la porte de notre immeuble, nous tombons nez à nez sur une procession de jeunes gens vêtus d'habits d'une époque ancienne, une fanfare les précèdent. Un instant très sympathique et totalement imprévu.

Après un épisode malheureux de potatoes très onéreuses et dégoulinantes de ketchup et de mayonnaise, nous retournons à l'appartement pour nous y reposer, une grosse journée nous attend demain.

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Réveil bien matinal à 6h00 : sauter dans ses habits, un thé ou un café et hop dans la voiture. Il ne faut pas traîner nous avons un bon bout de chemin et un horaire à respecter, le ferry est à 15h00 à Motril.

Aujourd'hui le copilote c'est Pauline et moi je passe à l'arrière dans la boîte à sardines ! Il serait tellement pratique et agréable de pouvoir enlever ses jambes et les remettre à la fin du voyage …

Nous traversons le sud de l'Espagne, des terres agricoles aux couleurs chaudes de la rouille. Les champs délimités dessinent le paysage et donnent l'impression d'un puzzle de parcelles de terre rouge, rouille, or et parfois boisées. Quelques champs d'oliviers aux allées rectilignes zèbrent ce paysage rapiécé tel un patchwork de tissus aux couleurs chaudes. Puis un paysage de petites collines et de valons recouverts de conifères et de chênes liège aux troncs dénudés, s'offre à nos yeux. Le long des routes, à perte de vue, des champs d'oliviers, un paysage sans fin, ces champs n'ont de limite que l'horizon…

Après une centaine kilomètres de champs d'oliviers la route sillonne entre des reliefs montagneux aux rochers semblables à des personnages de dessins animés aux formes improbables. L'arrivée sur Granada est impressionnante avec la Sierra Nevada enneigée en toile de fond.

Nous arrivons enfin au Port de Motril et nous sommes finalement bien à l'avance. Après quelques formalités administratives nous attendons le ferry sous un hangar avec d'autres voyageurs.

Il est 15h10, nous quittons le port de Motril, la bateau se dirige doucement en direction des côtes marocaines. Le soleil se reflète sur l'eau comme des milliers de petits diamants éphémères.

Ce départ sonne comme le réel commencement du voyage ! Des lieux inconnus attendent qu'on les découvre ! Les côtes s'éloignent et s'embrument peu à peu. La mer et l'horizon s'ouvrent à mes yeux. Comment ne pas être émerveillée par les éléments, l'eau bouillonnante se dentelle, se transforme en sillon, ... Au plus loin que porte mon regard il a seulement l'horizon… Cette ligne dessinée distinctement et pourtant il est impossible d'évaluer une quelconque distance dans cet espace infini.


Cet espace infini invite à la pensée, à l'imagination... Quelles aventures, quelle vie nous attend là bas de l'autre côté de cet horizon. Mais pour l'instant rien n'est fixé, tout est à créer, rien ne compte que le présent. La pensée du Mektoub me vient à l'esprit, tout n'est il pas déjà écrit ? Peut on changer le futur par nos choix guidés selon le moment présent ? Ecrivons nous vraiment l'histoire de nos vies ? Ou bien mettons nous les nuances de couleurs comme un peintre sur une toile vierge ? Le soleil descendant se rapproche de l'horizon et forme un halo de lumière sur les vagues. Un triangle lumineux m'éblouit, il me fait à ressentir un sentiment de liberté et de renouveau. Le futur n'existe pas, je suis juste là transportée par le temps et les vagues.


La mer est calme, comme si elle savait que j'avais besoin de cette douceur ; mon cœur s'apaise lentement au rythme des vagues.

Nous nous rendons compte que ce n'est pas à 19h00 que nous arriverons mais plutôt 21h30, un problème de changement d'heure qui n'est en fait plus d'actualité au Maroc.

Les passeports ne sont tamponnés qu'au moment de la sortie du bateau, les douaniers montent à bord et le salon sert de poste de douane. Nous nous mettons donc dans le "tas" de gens entassés autour des "bureaux de la douane" qui n'est en fait qu'une des tables de la cafétéria. Un jeune garçon nous fait gentiment remarquer que les hommes sont d'un côté et les femmes de l'autre. N'ayant pas le choix nous respectons cette séparation.

Les deux douaniers arrivent et s'installent ; mais ils ne tamponnent que les passeports des hommes. Après un certain temps, une femme s'indigne ouvertement de l'ignorance manifeste des douaniers et des hommes à notre égard, mais rien n'y fait. Cela dure un long moment et l'ambiance dans le "camp" des femmes s'en ressent mais à force de persévérance, nous y arrivons enfin et les douaniers tamponnent nos trois passeports.

Nous montons dans la voiture et sortons du bateau, on nous vérifie les papiers et fouille le coffre.

Nous partons ensuite en direction de Nador qui est à quelques kilomètres afin de trouver un hôtel et de quoi manger. Au bout de trois ou quatre hôtels nous en trouvons un peu onéreux, Hôtel Afrika, avec la wifi … mais pas dans toutes les chambres. Les toilettes sont au fond du deuxième couloir de chaque étage, pas de chasse d'eau et pas de douche ! Les chambres ne sont pas très propres mais des lits nous attendent gentiment et c'est tout ce qui compte à nos yeux ! Après la visite des chambres nous partons à la recherche d'un petit casse-croûte et le monsieur de l'hôtel nous conseille un petit restaurant.

Le ventre bien tendu nous rentrons nous coucher !

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Premier petit déjeuner au Maroc : pain plat, huile d'olive, œuf au plat, jus d'orange pressé, thé à la menthe, olives et croissants !!

Le ventre bien rempli nous partons direction Guercif. Après quelques petites villes nous commençons la traversée du Rif. De grandes plaines avec en fond de petites collines et de plus grandes montagnes, le sol paraît pelé avec quelques touffes d'herbes parsemées sur cette toile immense. Quelques maisons solitaires s'éparpillent sur les collines, entourées d'une barrière naturelle de cactus. Des bergers gardent leurs moutons sur ces collines escarpées où là, juste au bord de la route. Le paysage est un dégradé de jaune ocre, de plusieurs nuances de marron et de rouille et le vert foncé des touffes d'herbes.

Une plaine sèche où le vent donne un effet de brouillard de sable domine jusqu'à l'horizon, la route est mangée par le sable de cette plaine désertique.

Après la ville de Guercif, les plaines arides s'étendent, quelques champs d'oliviers bousculent cette monotonie, et au loin l'Atlas enneigé se profile.

Le paysage change, le oued a creusé la terre pour former comme des petits canyons de terre rouge et ocre. Un vieux pont en pierre à moitié démoli devait dans le passé faire communiquer deux berges du canyon. On aperçoit les sillons qu'ont formé l'eau au cours de ses nombreux passages.

Après un pique nique au bord de la route avec une vue panoramique sur les monts enneigés de l'Atlas ; nous continuons notre chemin, le paysage est plane avec pour horizon des montagnes de tous côtés. Le soleil a sorti le bout de son nez et le ciel est d'un beau bleu turquoise où quelques gros nuages duveteux embrassent le sommet des montagnes.

Puis nous passons dans une région de terre marron rouille aux nombreuses dunes de terre qui recouvrent cet espace et donne l'effet d'être sur une autre planète ; Mars peut être au vu de la couleur rouge foncée de la terre environnante.

Quelques dromadaires broutent l'herbe drue. Nous avons changé de planète nous voilà passer lentement de Mars à la Lune.

Après ce petit désert, le paysage se pare de verdure, de champs d'oliviers et les maisons des villages sont construites en pisé de la couleur de la terre qui les entourent. Ces grands rectangles habités se confondent avec le paysage.

Les plaines et les collines se recouvrent de mottes d'herbes touffues et de loin cela ressemble a une couverture de mousse.

De grands massifs montagneux se dessinent, la neige les recouvre presque jusqu'à la moitié, la température extérieure a baissé de quelques degrés et le vent s'est rafraîchi. Après une pause pour acheter quelques pommes, la route se dirige vers la montagne en direction d'Ar-Rachidia. La route serpente doucement entre les montagnes caillouteuses.

A Rich nous traversons le Oued Ziz et suivons son cours jusqu'à un hôtel au milieu des Gorges du Ziz. La nuit tombe sur les montagnes alentours et sur la Kasbah Jurassic. Après quelques palabres pour discuter le prix de la chambre et du repas, nous tombons d'accord et partons nous installer dans une chambre propre et confortable. La terrasse donne sur le Oued Ziz et ses Gorges couleur rouille. Le lever du jour promet d'être magnifique…

Après une bonne douche chaude nous partons prendre le repas dans la Kasbah. Des plats immenses nous sont servis : plat de légumes, tajine au poulet, assiette de fruits, gateaux et dates du jardin ! Un repas digne de la Reine de Saba !

Après un petit interlude pour regarder les photos de la journée nous partons nous coucher au chaud sous quelques couches de couvertures aux imprimés floraux et animaliers : Christiane porte son choix sur un imprimé "discret" panthère et Pauline et moi penchons pour une chaude couverture tigrée. Les Reines du Désert se couchent emmitouflées sous leurs peaux de bêtes…

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Je me réveille et je vais tout de suite sur la terrasse voir si le jour pointe le bout de son nez... Quelle surprise en sortant, ce n'est pas le soleil que je vois mais des milliers d'étoiles scintillantes. La petite ourse et la grande ourse brillent intensément et s'imposent à mon regard. J'entends le bruit reconnaissable d'une rivière qui s'écoule inlassablement. Je suis sous cette voute d'étoiles, le froid est piquant mais la beauté de cette image céleste me réchauffe le cœur et l'âme.

Tous les matins devraient commencer d'une manière aussi belle !

Le jour s'étant levé, nous décidons de rejoindre les bordures du Ziz. L'orange des pierres de la montagne se colorent peu à peu ; l'eau couleur taupe s'écoule le long des gorges.

Après un petit déjeuner copieux nous reprenons la route. Quelques mètres de route et nous sommes à Ifri un village en terre cuite avec de vieilles Kasbahs de la couleur des montagnes. Des palmiers datiers recouvrent les berges de l'oued.

Ar Rachidia est une ville agréable aux nombreux remparts ocre.

Après la ville le paysage change, les montagnes se dessinent au loin et une plaine rouille désertique et caillouteuse s'étend devant nous.

Par moment quelques touffes rondes d'herbes drues décorent cet espace désertique.

En arrivant sur Goulmima la route descend d'un coup dans un creux, on aperçoit la ville en contrebas, entourée de palmiers. Cette petite ville est en fait une palmeraie immense où les murs de terre cuite côtoient les palmiers et les maisons rosées plus récentes. Nous prenons selon les conseils de notre hôte de la Kasbah Jurassic une petite route qui traverse les rues de la palmeraie. Au détour d'une ruelle, nous achetons un kilo de citron vert et reprenons notre chemin. Nous nous dirigeons vers Tadirhoust, Amellago, Assoul pour enfin reprendre la route de Ouarzazate à Tinerhir.

Sur cette petite route nous traversons le lit de l'oued qui alimente la ville et les champs agricoles du coin. A Tadirhoust nous passons devant le "gîte Pauline" ! Sur le côté droit je vois des dates posées sur le sol certaines en grappes d'autres cueillis. A la sortie de la ville, l'ancienne ville en terre apparaît sur le haut d'une petite colline : des ruines perchées au dessus des champs et des palmiers.

Nous achetons un carton de dates à des enfants sur la route. L'un d'eux demande des bonbons et ce sont plein de petites mains qui se tendent par la fenêtre de Christiane ; c'est à qui en empochera le plus !

La route serpente maintenant entre des gorges profondes, nous traversons plusieurs gués immergés. A certains endroits l'eau du oued devient bleu vert de la couleur d'un lagon. Nous rencontrons des bergers accompagnés de leurs moutons et de leurs chèvres, des femmes perchées sur leurs mulets, des enfants sur des ânes, ... Tout le monde nous fait coucou !


Puis la route remonte sur les plateaux, la couleur beige domine maintenant et les collines forment des dessins arrondis sur leur pourtour, comme s'ils avaient été tracés par la main de l'homme.

Le village d'Amellago s'étend en longueur, des maisons de terre s'accrochent le long des gorges du oued, quelques très anciennes maisons sont quant à elles accrochées aux parois de la montagne comme des maisons troglodytes.

Plus loin des petits jardins vert de luzerne ou de terre retournée s'accrochent sur les rives de l'oued. Nous traversons avec émerveillement ces gorges.

Au bord du oued après le passage d'un gué nous nous arrêtons pour un repas de fruits les pieds dans l'eau.

C'est un réel enchantement de voir tous ces petits villages accrochés aux flancs des montagnes surplombant les gorges du Oued Todra. Les peupliers trembles côtoient les oliviers et les pommiers.

Puis nous traversons de nouvelles gorges plus écartées et escarpées où la route a été faite en cassant le flanc des montagnes, ce sont les Gorges du Todra. Les traces du tourisme sont très forte dans ces gorges ce qui gate un peu ce paysage naturel. Les flancs des deux montagnes se rapprochent et nous avons l'impression de rouler sous une grotte.

Ensuite nous dépassons la Vallée du Dades avec ses plantations de roses et Ourzazate pour nous diriger vers le Ksar d' Aït-Ben-Haddou* pour y passer la nuit. L'arrivée dans ce village se fait comme dans un rêve, le Ksar est perché sur la colline en face, les maisons anciennes et traditionnelles sont entretenues et paraissent être comme lors de leur construction au XVIIème siècle.

Après avoir demandé le prix de quelques hôtels nous trouvons un monsieur sympathique qui nous fait visiter une chambre avec vue sur le Ksar. L'hôtel est magnifique, en terre crue, décoré d'objets berbères. Le toit terrasse offre une vue panoramique sur ce village merveilleux avec en contrebas, le Oued qui s'écoule en séparant l'ancien village du plus récent où nous logeons. Le coucher de soleil s'installe doucement et nous buvons un thé accompagné de cacahuètes offert par la maison sur cette terrasse.

Le Ksar d'Aït Ben Haddou

Après un bon repas de couscous de légumes nous montons dormir, la journée en voiture nous a bien fatiguée et nous comptons bien profiter du lever du jour.

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FOCUS !

Le Ksar d'Aït Ben Haddou est inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l'UNESCO, près de Ouarzazate, dans la Vallée de l'Ounila. C'était un point de passage traditionnel des caravanes reliant Marrakech au sud du Sahara.

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Publié le 15 décembre 2018

Le réveil sonne à 6h00, nous ne voulons pas rater le lever du soleil sur le Ksar aux couleurs de la terre environnante. Quand nous montons sur le toit terrasse il fait encore nuit et les étoiles brillent. Je ne reconnais que les constellations de l'ours et me promets donc d'en apprendre d'autres !

Une faible lueur apparaît au loin et donne un effet brillant à l'oued en dessous du village. Les rayons du soleil illuminent peu à peu les Kasbahs du Ksar, la terre se réchauffe des rayons lumineux et leur couleur rouille orangée se devine et s'impose de minute en minute.

Nous décidons de descendre dans le lit de l'oued pour profiter pleinement de ce lever du jour. La fraîcheur est plus intense mais la beauté du paysage qui s'offre à nous n'a pas de prix !

J'essaye de rejoindre l'autre rive en sautant sur les sacs de terre posés dans l'eau mais le courant est fort et j'ai peur de me tremper les pieds, je reste donc au milieu de cet oued et je profite de l'instant et de ses lumières.

En remontant à l'hôtel nous prenons le petit déjeuner et repartons à bord de notre petite Coquelicot !

Nous prenons la route en direction d'Agadir ; le paysage avec ses collines marron aux nuances presque violettes me fait penser à une terre volcanique avec en toile de fond l'Atlas enneigé.

Puis les plaines se colorent de tons pastels : beige, rosé, marron clair, ocre, jaune clair… Des couleurs douces pour le regard, comme une aquarelle où même la rondeur des collines caillouteuses parait douce.

Après Taliouine le paysage change et les collines se parent d'arganiers au feuillage vert sombre.

Au fond trois reliefs de montagnes se disputent l'horizon, chaque chaine ayant sa couleur particulière. La première dans les tons pastels ocre et rose parsemée d'arganiers, la deuxième dans les couleurs marron et la dernière la plus haute se couvre de neige en son sommet.

L'arrivée sur les routes côtières après Agadir nous change complètement d'ambiance : pollution, plastiques, monde sur la route... On s'était habituées aux plaines désertiques et aux vallée luxuriantes des palmeraies. Heureusement la voix douce d'une chanteuse apaise ce décor, et nous transporte dans son monde chantant.

Nous reprenons des routes montagneuses aux sols recouverts de petits buissons de cactus et de terre rouille ; puis parsemés d'arganiers à perte de vue.

Après Guelmim que l'on nomme aussi "les portes du désert", les terres deviennent arides, seules quelques touffes d'herbes sèches poussent par endroit. Du sable marron commence à apparaître à certains endroits.

Le désert n'est pas une terre infertile, par moment elle peut se parer d'une herbe fine verte ou de buissons d'épineux.

Au début je crois rêver mais non, les petits points blancs sont bien des fleurs au milieu des buissons de cactus ; le désert a vraiment ses secrets.

J'aperçois les premières dunes de sable au loin, les formes que le vent dessine sur leurs flancs paraissent douces comme un tissu de soie étalé négligemment sur cette terre désertique.

Peu de temps après nous arrivons à Tan-tan où nous déposons nos sacs dans une chambre toute rose de l'hôtel Al Aoubour ; oui je dis bien TOUTE rose : murs, draps, moquette, carreaux et accessoires de la salle de bain,... Je me sens autant chez moi que la panthère rose dans une caverne…

Les "Pink ladies" vous disent bonne nuit !

Après un petit repas sympathique dans un restaurant proche de l'hôtel, nous nous couchons bien vite.

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Départ à 7h00 de l'hôtel tout rose, où Christiane a réveillé le gardien de manière fracassante et fort bruyante en se prenant la porte après avoir loupé une marche indiquée préalablement par Pauline. Un fou rire plus tard nous montons dans la voiture en direction de Dakhla.

Le début de notre étape se fait sous les étoiles et dans la pénombre de la fin de nuit. La lueur du jour pointe son nez avec douceur et lenteur sur les plaines désertiques.

Il faut faire attention sur les routes à cette heure matinale entre la nuit et le jour, les pêcheurs partent sur de petites mobylettes, souvent peu ou pas éclairées.

Le ciel se pare de couleurs pastelles, du orange et du rose qui se marient avec le jaune puis le vert et le bleu. Un dégradé de couleurs claires et lumineuse s'empare du ciel. Le désert se réveille et nous distinguons maintenant les touffes d'herbes sèches, le sable beige, les tentes des pêcheurs perchées aux bord des falaises et par moment un morceau d'océan entre deux falaises.

C'est la première fois que je vois autant d'eau au Maroc, les oueds sont presque tous remplis.

Nous faisons un petit arrêt sur les falaises d'où les pêcheurs lancent leur ligne, des bornes blanches sont mises au bord des falaises et jusqu'au bord de la route, elles servent à étudier l'avancée de l'océan sur les terres par satellite.

Les vagues forment des rouleaux énormes au bord de la plage, cinq rangés de vagues s'enchaînent les unes derrières les autres.

De grandes dunes de sable beige s'imposent maintenant des deux côtés de la route. A la place de l'océan, une mer de sable et de dunes s'étend devant nos yeux. Le paysage se partage entre dunes de sable et plaines arides parsemées de touffes d'herbes. Nous passons le long du lac Maila où l'eau n'est présente qu'en son milieu ; de loin on aperçoit de tous petits points blancs, ce sont en fait des miliers d'oiseaux. Et les petites tentes blanches sont en fait des tas de sel ramassés dans le lac.

Le desert de dunes ressemble à une mer déchaînée qui aurait été mise sur "stop", les vagues formées arrêtées en plein mouvement.

Nous retombons sur la route bordant les falaises se jettant verticalement dans le tumulte de l'océan. Après un petit arrêt petit déjeuner (pain, huile d'olive, amlou, olive noir et fromage) nous repartons. Les dunes de sable mangent la route.

Attention traversée de dromadaires potentielle !

Après les belles routes toutes neuves nous voilà sur des routes dentelées sur presque la moitié de la voie... Certains tronçons sont remplacés par de la piste le temps que les travaux soient fait.

La roche est friable dans ce coin, sur une couche d'environ 50cm, le sol se détache des collines et forme des amas de roches trouées, me faisant penser à des osselets tombés sur le flanc d'une colline.

Les lunettes radar devant les yeux et hop 71 km/h au lieu de 60 : nous sommes soulagées de 150 dh par un policier.

Avant Dakhla, une surprise nous tombe dessus : un pick-up avec trois dromadaires à l'arrière assis dans le plateau. Ils tendent le cou, la tête haute, ils ont des allures très fière malgré leur posture serrée et forcée.

Air Dromadaire

Lorsqu'on prend la route de la presqu'île de Dakhla, on commence à apercevoir les plages des deux côtés de la route au loin. Le sable est plus clair dans les tons blanc et beige. Arrivée dans la ville nous trouvons un hôtel pas cher mais très sale, la preuve : quelqu'un avait déjà dormi dans mon lit.

Nous partons à la recherche d'un restaurant sur le front de mer et trouvons un snack.

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Après une nuit difficile et fort bruyante, nous partons de Dakhla pour rejoindre Nouadhibou.

Il fait encore nuit et je peux regarder les étoiles. Bientôt une faible lueur apparaît au loin ; la nuit va laisser place au jour.

Pour moi la beauté du monde réside dans le fait que chaque jour, chaque nuit, chaque lever ou coucher de soleil, chaque instant, est unique. On peut être ébloui chaque matin devant un lever du jour car les couleurs ne sont jamais les mêmes, l'odeur, le vent, la température... sont différents aussi et cela donne une impression de nouveau ; c'est peut être pour cela qu'on dit "un nouveau jour se lève". Et moi même je suis différente chaque jour, mon état d'esprit, mon énergie, mon humeur, mon corps, sont différents ; alors je reçois la beauté du monde chaque fois d'une manière unique.

Après Dakhla, en direction de la frontière, le sable et les pierres sont dans les teintes claires : beige, blanc et gris. Le relief est plat, avec parfois une dune dans le lointain.Le soleil en plein sur le pare-brise sale et la route devient presque invisible, on finit après une petite embardée sur le bas côté de la route ! Ouf rien de cassé, nettoyage du pare-brise et on reprend le chemin.

L'océan pointe le bout de son nez sur ma droite, les plages sont immenses et désertiques, on se sent seule au monde sur cette partie de route.

Plus loin nous assistons au désensablement de la route, une pelleteuse dégage les dunes qui grignotent la route.

Les buissons d'herbes forment de petites dunes et sont à moitié ensevelies sous ce sable gris/blanc.

Nous traversons une ancienne zone minée, preuve vivante du conflit avec le Front Polisario*.

La seule preuve d'une présence humaine est un ensemble de petits campements de pêcheurs le long des plages. Le macadam est grignoté des deux côtés, il ne reste plus que l'équivalent d'une voie mais sur le milieu de la route ; puis elle reprend sa taille normale. Les endroits où l'eau passe sur la route durant la saison où les oueds se remplissent, le macadam est très abîmé, des morceaux entiers se détachent.

Campement de pêcheur 

Drôle de rencontre sur la nationale 1, des dromadaires se grattant le cou sur les poteaux au bord de la route. La gratouille est gratuite et fort vigoureuse. Tout au long de la route j'ai observé que certains poteaux étaient penchés, je me demande maintenant si je ne connais pas les coupables du délit !

Un petit arrêt à l'hôtel Barbas à Bir Gandouz non loin de la frontière, pour un petit déjeuner sous la volière et les arbres ; un vrai paradis au milieu de ce désert.

L'hôtel Barbas et sa volière

Nous reprenons notre chemin, à gauche au loin on aperçoit d'énormes dunes de sable blanc de la taille de petites montagnes ; alors qu'au bord de la route les dunes sont faites de roches friables comme attaquées par le temps et les vents de sable. Certaines dunes me font penser à des squelettes de dinosaures. Sur certaines, des hommes ont empilés des tas de pierres qui forment des sculptures naturelles et éphémères. Dans un même paysage on peut distinguer la douceur des dunes de sable blanche et la rugosité de celles aux roches friables.

Plus que 14 km avant la frontière ! Nous roulons bon train et rencontrons quelques camions qui soulèvent du sable sur leur passage.

Nous passons le poste de frontière marocain puis le portail qui donne sur le No Man's Land*. Le tronçon de route construit par les marocains est complètement saturé de camions qui attendent de passer la frontière du Maroc. Nous roulons doucement en passant devant tous ces camions à l'arrêt, les conducteurs doivent être là depuis un moment, ils sont pour la plupart sortis de leur engin et se reposent à l'ombre des camions ou boivent le thé par petits groupes.

No Man's Land

Puis arrive le moment où nous quittons la route goudronnée pour prendre la piste de sable qui mène jusqu'au poste de frontière mauritanien. Des cadavres de voitures démantelées parsèment le bord de la piste que l'on suit doucement. Nous empruntons le sillon d'un camion par sécurité, passant souvent par la frontière ces conducteurs connaissent bien le terrain. Les restes de voitures, de télévision et de pièces diverses jonchent le sable et donnent un effet inquiétant.

Nous arrivons enfin au poste mauritanien de Guerguerat. La chienne Elsa (cf : mon ancien carnet de voyage 2016) nous attend au portail, fidèle à son poste. Nous sommes arrêtées et on nous demande d'aller faire les papiers pour le visa. Le premier bureau passé, nous faisons la queue au bureau des visas, les hommes d'un côté les femmes de l'autre. Nous attendons dans la chaleur du début d'après-midi du désert environ deux heures, les hommes sont appelés par petits groupes dans le bureau, les formalités me paraissent longues. Et la forte chaleur de cette journée à laquelle nous n'étions pas habituées nous fait ressentir un coup de fatigue, le thermomètre affiche les 33 degrés.

Après une très longue attente nous empochons nos visas et direction le prochain bureau pour tamponner nos passeports ; et encore d'autres bureaux pour les papiers de la voiture et l'assurance. Au moment de finir les dernières démarches, la prière du vendredi commence, tous les bureaux ferment et nous écoutons la prière à l'ombre d'un mur.

Je demande à des douaniers se préparant pour aller prier où sont les toilettes et on m'envoie derrière un bâtiment auquel on accède par un passage minuscule entre deux autres bâtiments. Arrivée derrière je me retrouve nez à nez avec une décharge de voitures à moitiés décarcassées et des hommes couchés à l'intérieur. Je me dépêche de repartir de cet endroit qui ne respire pas la sécurité.

Après les quelques bureaux restants nous franchissons enfin la frontière.

Sur la route de Nouadhibou nous faisons une pause pour aller marcher sur le sable de l'immense plage désertique qui s'allonge à infinie le long de cette route unique.


Nous marchons sur ce sable durci, évoquant des vagues de sable de couleurs différentes, balayée par les années de vent de sable. Des coquillages épais recouvrent le sol à certains endroits. Une petite dune durcie, trône au milieu de cette plaine sableuse.

Après ce petit intermède nous repartons en direction de Nouadhibou. Arrivées en ville nous demandons notre chemin pour aller au "marché quatrième", la communication n'est pas simple mais nous trouvons enfin le lieu demandé.

Au milieu de cette ville inconnue nous retrouvons Ibou. Il nous emmène devant chez lui dans le quartier du marché, la rue est encombrée par les ânes et leurs charrettes, les vendeurs, les voitures, … Nous nous garons dans cette rue animée et déchargeons nos paquetages. Christiane s'inquiète de laisser notre voiture bien remplie garée à cet endroit insolite mais Ibou l'a rassure.

Après une bonne douche froide au bol, nous sortons acheter de quoi cuisiner un bon repas. Notre première session cuisine se passe à merveille : assises à même le sol dans le couloir nous coupons nos légumes et cuisons les aliments sur la bombonne de gaz. Ca y est l'Afrique se fait sentir, les bons souvenirs s'invitent dans mon esprit !

Après un petit moment à observer les étoiles sur le toit terrasse nous partons nous coucher.

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FOCUS !

Le Front Polisario est un mouvement politique et armé du Sahara Occidental, il a été créé en 1973 pour lutter contre l'occupation espagnole. Il est opposé depuis 1975 au Maroc pour le contrôle du Sahara occidental.

Rappel d'histoire :

En 1975 l’Espagne signe le traité de Madrid avec le Maroc et la Mauritanie puis quitte le territoire. Ce traité divise le Sahara occidental en deux parties, une mauritanienne et une autre marocaine ; mais il est signé sans consulter les concernés qui sont les Sahraouis (habitants et nomades du Sahara Occidental). Le Maroc contrôle depuis ce traité, environ 80 % territoire du Sahara Occidental.

En août 2016, le Maroc a entreprit des travaux de goudronnage d’une partie du No Man’s Land (route frontalière entre la partie du Sahara occidental marocain et mauritanienne, distante d'environ 4 km), officiellement pour lutter contre la contrebande. C'est officiellement un espace de non-droit, où s’activaient du trafic d'armes, d'êtres humains, de drogue, …