Tunisie: Hammamet-Carthage-Tunis-Kairouan & désert

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Voyage de dix jours en deux temps: d'abord la découverte de la riviera de Hammamet, Tunis, Sidi Bou Saïd et Carthage. Ensuite, plongée plein sud en direction du désert à la rencontre des Tunisiens.
Du 11 au 20 août 2023
10 jours
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Le 11 août nous atterrissons à Tunis en début d'après-midi. En passant la douane, la fonctionnaire dans la cinquantaine nous demande:

  • Où allez-vous séjourner ?
  • A l'hôtel Radisson Blu de Hammamet.
  • Vous voulez payer trop cher ? Il y a plein d'établissements mieux et moins chers...

Sans attendre notre réponse, elle nous lance nos passeports et se tourne vers les touristes suivants... Comme premier contact avec un continent et un pays où nous n'avions jamais mis les pieds, il y a mieux, non ?

Nous arrivons ensuite dans le grand hall de l'aéroport où nous désirons faire le plein de Dinars, la monnaie locale. Devant le distributeur, une file d'une dizaine de personnes. Quand arrive enfin notre tour, nous nous apercevons que le maximum qu'on a le droit de retirer est d'environ 100 euros... Et comme derrière nous ça s'impatiente, nous décidons de refaire la queue, au guichet de change cette fois. Là, nous regrettons de n'avoir pas pris davantage de francs suisses avec nous. C'eut été plus simple et pas plus cher qu'à l'automate!

Tunis, l'avenue Habib Bourghiba, pompeusement surnommée "les Champs Elysées tunisiens". Son standing est pourtant loin du compte!

Ensuite, nous rejoignons le responsable de l'agence qui doit nous amener à l'hôtel. D'emblée, celui-ci nous explique que nous venons de rater le minibus. Il va nous falloir attendre entre trente et soixante minutes jusqu'au prochain transport.

Finalement, notre chauffeur arrive et nous emmène dehors où il fait une chaleur à laquelle nous les Alpins, ne sommes pas habitués... L'homme qui charge nos valises dans le bus attend de nous un pourboire, car il ne travaille pas pour le transporteur... Ce que nous ignorons. Il ne recevra hélas rien de notre part, car nous pensions lui donner quelque chose au moment du déchargement.

Nous traversons Tunis sur une quatre voies complètement surchargée. Et, quelque chose que nous n'avions encore pas vu, des personnes en tongs traversent à pied l'autoroute en se faufilant entre les voitures et les camions lancés à 100 km/h!

Finalement, après une heure de conduite stressante imposée par un jeune chauffeur qui roule beaucoup trop vite, nous arrivons dans la majestueuse entrée du Radisson Blu situé en périphérie est de Hammamet à 4 km de la Médina.

Vue depuis notre chambre du Radisson Blu Hotel 

A la réception, nous attendons notre tour, patiemment. Lorsqu'enfin nous montons vers nos chambres, nous recevons deux chambres éloignées dont une sans vue sur la mer alors que nous avions réservé deux chambres donnant sur la grande bleue.

Nous redescendons à la réception et là, nous leur annonçons qu'ils se sont trompés ce qu'ils semblent surpris d'entendre. Heureusement, la chambre à côté de celle de nos enfants, qui aurait dû nous être donnée depuis le début, vient d'être nettoyée. Ouf!

Notre chambre avec balcon: les lumières de chevet côté droit ne fonctionnent pas et aucun porte-savon dans la douche...

Après nous être rapidement changés, nous descendons à la plage privée de l'hôtel où on nous attribue les derniers transats libres ainsi qu'une grande serviette de bain à chacun. Les vacances commencent!

L'aurore est vraiment admirable et c'est l'unique moment où les hauts-parleurs ne diffusent pas une musique "d'ambiance" pénible
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Après une bonne nuit réparatrice, nous décidons de visiter le centre historique de cette ville de 75'000 habitants. Devant le portail bien gardé de l'hôtel, nous trouvons un vieux taxi jaune qui nous fait traverser en dix minutes des quartiers modernes sans âme. Il nous dépose à quelques mètres du bazar qui entoure la vieille forteresse qui a vu passer pléthore d'envahisseurs... C'est ce que nous apprendrons en visitant l'intéressante exposition au cœur du ksar (fort).

La citadelle de Hammamet 


Cours intérieure de la citadelle qui abrite le tombeau d'un saint musulman 


Vue sur la principale baie d'Hammamet depuis les remparts du ksar 


Vue sur les toits de la médina (à gauche) et sur la ville nouvelle (à droite)


Ensuite, nous redescendons vers le petit souk que nous avions traversé en vitesse en arrivant. Dès que l'on fait mine de s'intéresser à un produit, on est immédiatement abordé énergiquement (pour ne pas dire plus...) par un ou deux vendeurs qui nous invitent avec autorité à l'intérieur de leur échoppe.

"Shopping Center" pour une douzaine de modestes boutiques de souvenirs! Ici on n'a pas peur d'exagérer...

Finalement, nous achèterons quelques articles après en avoir dument négocié le prix. Maintenant, on peut se réfugier au calme dans un petit café fort sympathique où nous sommes les seuls touristes. L'eau minérale y coûte 3,5 fois moins cher qu'à notre hôtel: 2 dinars contre 7, soit 0,60 euros au lieu de 2,07 euros pour une bouteille d'un litre et demi avec 4 verres.

Les portes tunisiennes rivalisent d'élégance et de créativité. On adore! 

En sortant de la médina, nous nous dirigeons vers la banque toute proche afin de tirer quelques billets du distributeur. A peine suis-je en train de taper le code, qu'un individu s'approche de moi et commence à me parler, histoire de me distraire. Je n'entre pas dans son jeu, prends vite mon argent et nous fuyons vite fait vers le petit supermarché tout proche.

La pauvreté de l'offre de ce dernier nous impressionne. Que mangent les Tunisiens ? Ont-ils tous leur propre jardin ou un cousin qui les alimente en fruits et légumes ? Ceux-ci ne trouvent-ils qu'au marché ? Des questions restées sans réponse. Si tu as une idée lecteur de cet article, n'hésite pas à nous éclairer en commentaire. Merci d'avance.

En sortant, plus trace de mon harceleur, mais une chaleur implacable et des petits restos qui ne donnent pas spécialement envie de s'y poser. Nous rentrons à l'hôtel en taxi.

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Après une journée de farniente (ou presque) sur la belle plage du Radisson Blu, nous nous levons tôt ce 14 août pour passer une journée complète à Tunis et dans les environs.

Le Radisson Blu au petit matin 

Un minibus arrive avec une bonne demi-heure de retard et nous emmène directement sur l'autoroute de Tunis. Notre guide, la soixantaine est un puits de culture et il nous régale d'explications sociologico-historiques dès les premiers kilomètres. Nous apprenons notamment qu'une grève des éboueurs a perturbé le pays tout l'hiver jusqu'au début de la saison touristique.

Les déchets sont partout en Tunisie

Dans tout le pays, on a pu observer les conséquences de ce mouvement social: les déchets sont partout! Le long des routes dans les fossés, au milieu des villes sur des places, même au milieu du désert. Toutefois, on peine à croire que la situation est aussi catastrophique juste à cause de cette grève...

Autre information glanée en chemin, après plus d'une année sans pluie, il y a eu des précipitations début 2023. Un véritable soulagement pour le secteur touristique, car comme le dit si bien notre guide:

On ne peut pas dire à un touriste qui s'offre un quatre étoiles qu'il ne peut se douche qu'un jour sur deux...

Vers 9h du matin, nous arrivons sur le site de l'ancien port militaire de Carthage. Hélas, à part une mare verte qui entoure un ilot à la végétation dense, rien ne rappelle la grandeur passée des lieux. Alors, nous enchaînons rapidement avec la visite des thermes d'Antonin:

Les Thermes, considérés parmi les plus vastes de l’Afrique Romaine, ont été mis en service sous le règne de l’empereur Antonin, en « 165 après Jésus-Christ », après 15 ans de travaux initiés sous le règne d’Hadrien. Le monument s’élevait sur trois niveaux et était surmonté de nombreuses coupoles. Aujourd’hui, seuls des « îlots » subsistent de ce formidable édifice, en particulier, des vestiges du niveau inférieur, réservés au personnel et au service. Ils permettent cependant d’en entrevoir la grandeur et la magnificence. La visite en est facilitée grâce au fléchage au sol et à une signalétique élaborée. (cf. voyage-tunisie.info)

Une fois de plus, l'office tunisien du tourisme exagère: nous n'avons pas vu le moindre "fléchage au sol" et encore moins "une signalétique élaborée". Nous avons pourtant parcouru tout le site en long et en large sous une chaleur matinale déjà écrasante.

Les Thermes d'Antonin ou plutôt ce qu'il en reste: les sous-sols et quelques colonnes pour donner le change...

Malgré le côté imposant des fondations et leur charme suranné, nous sommes déçus du peu qui reste. Comparé aux sites romains chypriotes ou crétois, celui-ci fait pâle figure. Pour nous consoler, le site tunisie-info explique que

le site a servi de carrière de pierres pendant des siècles afin d’édifier de nombreux monuments, tant à Tunis que dans de nombreuses villes du nord du Bassin méditerranéen dont Pise!

Des souterrains, c'est tout ce qu'il reste de ce « colosse abattu et dépouillé de presque tous ses éléments ornementaux » 

Ce que nous raconte ensuite notre guide, c'est qu'il ne reste presque rien des ruines carthaginoises proprement dites. En 146 avant Jésus-Christ, à la suite de la troisième guerre punique, les Romains ont tout saccagé et simplement construit par-dessus... Et en plus, jusqu'à sa protection par l'UNESCO en 1979, les ruines ont été pillées pour leurs marbres afin de construire notamment Tunis, la nouvelle capitale créée en 698 par les Arabes.

Enfin, comme si cela ne suffisait pas, le site archéologique a été grignoté au cours des siècles par l'élargissement des quartiers huppés de la capitale voisine:

C'est au XIXe siècle que certains hauts dignitaires de l'État beylical choisissent Carthage pour villégiature estivale. Le premier à s'y installer est Mustapha Khaznadar avec un palais à Salammbô, en bord de mer près des ports puniques, puis un autre sur les hauteurs de Byrsa, devenu une école de cadres. Ensuite, le général mamelouk Ahmed Zarrouk construit le palais Zarrouk, devenu la résidence officielle de Lamine Bey, puis un night-club après l'abolition de la monarchie, pour devenir le siège de l'Académie tunisienne des sciences, des lettres et des arts. (cf. Wikipedia)

D'ailleurs, à l'heure actuelle le palais présidentiel domine les thermes d'Antonin: il a certainement été construit sur des vestiges antiques, mais rien n'est trop beau pour l'égo des "grands" politiciens, non ?

Il faisait si chaud en ce début de matinée, que même notre guide s'est rapidement réfugié dans le café  à la sortie du site

C'est en parcourant Wikipédia pour rédiger ces quelques lignes que je m'aperçois que notre guide aurait mieux fait de nous emmener visiter le Musée du Bardo plutôt que ces ruines en plein soleil. C'est en effet là, ainsi que dans le Musée de Carthage actuellement fermé pour d'obscures raisons, que se trouvent les plus belles pièces antiques qui ont pu être sauvées des chasseurs de trésor et autres prédateurs pseudo-scientifiques...

Ci-dessus, on aperçoit le mur blanc du palais présidentiel qui domine le site archéologique 

Lorsque nous retrouvons notre guide après une heure d'intense transpiration, quelle n'est pas notre surprise lorsqu'il décrète que nous quittons (déjà!) Carthage pour nous rendre à Sidi Bou Saïd, le Santorin local. Dire que nous restons sur notre faim est un doux euphémisme: nous n'avons probablement pas vu un dixième de ce que Carthage peut offrir.

La visite de ce mini site n'était apparemment qu'un alibi pour inscrire le mot "Carthage" au programme fort peu culturel de la journée.

Et, lorsque que quelques jours plus tard nous nous somme retrouvés à Kairouan (cf. ci-dessous l'une des prochaines étapes), première capitale islamique de la Tunisie, rebelote: au lieu de nous emmener visiter la Grande Mosquée qui selon Wikipédia "constitue le plus ancien et le plus prestigieux monument islamique de Tunisie et du Maghreb", notre guide nous emmènera exclusivement dans un magasin d'état vendant des babioles pour touristes et des tapis d'Orient...

Pauvre Tunisie! As-tu honte de ton patrimoine exceptionnel?

Ou est-ce plus prosaïquement la soif de devises et surtout une corruption de bas étage qui fait dévier les caravanes touristiques vers des souks plutôt que vers des trésors culturels ? Encore une question ouverte...

A ce stade, notons qu'à aucun moment, l'office tunisien du tourisme ne nous a donné l'occasion de nous exprimer sur notre expérience dans ce pays. Apparemment, cela ne les intéresse pas beaucoup de s'améliorer. Pour des Européens, cette attitude nonchalante est assez surprenante et probablement contreproductive.

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Pour arriver au "St-Tropez tunisien", nous avons longé l'interminable enceinte du palais présidentiel construit sans retenue sur une partie du site de Carthage... Quant un président-dictateur se prend pour le nouveau César, rien n'est trop beau!

D'ailleurs, à en croire Arte, l'actuel chef de l'Etat Kaïs Saïed n'a plus grand chose à envier à son triste prédécesseur...

Alors qu'il est à peine dix heures, la chaleur nous surprend dès la sortie du minibus climatisé. Nous traversons rapidement le petit marché touristique situé à la sortie du parking et montons directement la jolie rue menant au cœur de la bourgade.

Première (bonne) impression de Sidi Bou Saïd en montant vers le centre

Nous sommes immédiatement attirés par une maison traditionnelle cossue située sur notre gauche. Il s'agit de l'ex-maison d'un médecin restée dans son jus des années 1980 et transformée en musée.

Cours intérieure de l'ex-maison d'un médecin actif jusque dans les années 1980

L'aménagement luxuriant du grand patio nous plaît d'emblée! On tombe sous le charme de cette demeure bourgeoise et on essaye de s'imaginer comment la vie s'y déroulait. Une sensation assez agréable 😀.

Intérieur de la maison-musée du médecin


Vue sur Tunis depuis le toit de la villa visitée

En sortant, nous décidons de nous séparer. Pendant que ma femme et mes enfants restent avec le guide pour aller déguster un rafraichissement, je décide de visiter les moindres recoins de ce lieu d'exception qui paraît préservé de la pauvreté et de la saleté vues à Hammamet (cf. ci-dessus).

A elles seules, les portes de Sidi Bou Saïd valent le détour!

Et je dois dire que je ne vais pas regretter ma petite ascension jusqu'au sommet de la colline. Ici, tout est vraiment charmant. Au point que Sidi Bou Saïd restera pour moi comme l'un des meilleurs souvenirs de Tunisie.

Au sommet de la colline qui domine la Méditerranée se trouve une station météo d'où on a une superbe vue sur la côte est de Tunis


Le port et la plage de Sidi Bou Saïd

Alors, un seul conseil: si vous avez la chance de visiter cette banlieue exquise de Tunis, ne restez pas au Café des Délices comme les Américains, Russes et Français, mais explorez ces magnifiques rues pleines de charme!

Le quartier de la mosquée et ses portes aux arcs outrepassés si typiques
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Nous quittons Sidi Bou Saïd vers midi et nous rendons en minibus dans un restaurant sans âme situé au premier étage d'un bâtiment modeste situé à quelques pas de la plage centrale de Tunis. On nous sert d'abord une salade fade puis, très rapidement on nous enlève les assiettes sans nous demander si on a fini; la classe...

Un repas bâclé à peine digne d'une cantine industrielle

En plat de résistance, que nous n'avons pas non plus choisi, on reçoit une tranche de dinde informe et sans goût avec quelques tristes légumes et des pommes de terre à l'eau. Pour le dessert, des tranches de pastèque en nombre limité. Autant dire que nous sommes si déçus que nous en faisons part, d'entente avec l'ensemble du petit groupe, à notre guide qui lui a mangé à l'étage inférieur.

Nous lui expliquons que nous ne sommes pas venus en vacances pour manger comme dans la cantine d'une entreprise et que nous aurions préféré payer 5-6 euros de plus et avoir un repas plus traditionnel et un personnel plus aimable. Naturellement, nous voyons de suite que notre suggestion aura autant d'effet qu'une goutte de thé à la menthe dans la Méditerranée toute proche...

Les Tunisiens semblent davantage habitués à obéir et à flatter leurs chefs plutôt qu'à dialoguer avec eux. Comment dans ces conditions améliorer le service à la clientèle et faire remonter ses doléances ?

Le ressenti des touristes n'intéresse nullement les autorités locales: "paie et va-t-en" semble leur devise

Les suggestions n'intéressent pas les responsables du tourisme dans un pays qui pourtant n'a pas beaucoup d'autres atouts économiques. Surprenant ? A moitié, car les Tunisiens sont davantage habitués à obéir et à flatter leurs chefs plutôt qu'à dialoguer avec eux. A part la personne de contact que nous avions à Hammamet, jamais on ne nous a demandé notre opinion sur les prestations touristiques offertes: ni au Radisson Blue, ni à l'issue des deux sorties (payantes) faites avec des tour opérateurs. Même l'aéroport de Tunis qui est tout sauf convivial, n'a pas profité du temps d'attente imposé pour nous soumettre un QCM sur nos impressions du pays. Surréaliste, mais c'est ainsi.

L'entrée du grand souk de Tunis se fait par Bab El Bhar ou Porte de France

Encore une occasion culturelle manquée

Au lieu de nous amener au musée du Bardo (le "Louvre tunisien") climatisé à l'issue de ce repas inoubliable 😦, notre guide nous lâche à quatorze heures au centre de Tunis et nous impose à mots couverts d'aller visiter le grand souk. Il ne nous accompagne pourtant pas... Bizarre. Encore une fois, la culture ne semble pas une priorité dans la "nouvelle Tunisie" pseudo démocratique. Quel est le problème?

L'Hôtel Royal Victoria dans l'hypercentre de Tunis

Sous une chaleur étouffante, nous pénétrons une étroite ruelle bordée d'une infinité de boutiques qui vendent plus ou moins toutes la même chose: des articles du folklore local, jolis sur place, mais totalement inutiles dans nos maisons du Nord, parce que décalés et peu pratiques.

Le souk de Tunis: des milliers d'objets "traditionnels" qui n'ont que peu d'utilité pour les Nordiques que nous sommes

Si on a l'imprudence de s'arrêter, une nuée de vendeurs agressifs se ruent sur le touriste pour le forcer à l'achat. La persuasion n'a pas sa place ici. On fait pression sur le chaland afin que celui-ci paie pour avoir la paix et ensuite s'en aille...

Même l'Avenue Habib Bourghiba, pompeusement appelée "les Champs Elysées tunisiens", nous a fortement déçus

Après un quart d'heure de déambulation oppressante, tout le groupe décide de rebrousser chemin pour aller prendre un rafraîchissement sur l'Avenue Habib Bourghiba, pompeusement appelée "les Champs Elysées tunisiens". Pourtant, la ressemblance est comment dire... ténue. Aucun magasin attractif, pas de librairie, mais des dizaines de vendeurs improvisés qui étendent leur modeste marchandise sur les trottoirs, rendant le passage difficile.

Encore deux arnaques minables pour couronner la journée

Finalement, nous échouons en nage sur la terrasse légèrement ombragée "de la meilleures pâtisserie" de la capitale. Pendant que les hommes commandent les boissons, les femmes vont à l'intérieur pour acheter des pâtisseries typiques.

Quand elle ressort, en consultant le ticket de caisse, ma femme constate qu'on lui a facturé quelques pièces au poids, pas à la pièce. Et le prix est dix fois celui indiqué dans la boutique!

Au moment de payer nos consommations, nous aurons la surprise de voir que plusieurs boissons que nous n'avions pas commandées figurent sur l'addition... Heureusement, notre ami dijonnais a expliqué au jeune sommelier musclé qu'il ne fallait pas nous prendre pour des buses...

C'est avec plaisir que j'aurais visité la cathédrale Saint-Vincent-de-Paul (1897). Mais elle n'ouvrait qu'en fin de journée...
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Afin d'avoir une vision plus large de la Tunisie sans nous limiter à ses côtes, nous avons réservé un voyage organisé de deux jours à l'intérieur des terres.

Après presque une heure passée à récupérer d'autres clients dans les principaux hôtels de Hammamet, notre bus climatisé nous emmène enfin sur l'autoroute qui travers le pays du nord au sud jusqu'à la frontière lybienne. Manque de chance, nous nous trouvons du côté du bus qui reçoit tout le soleil du matin...

Environ deux heures de route plus tard, le chauffeur nous lâche en plein centre de Kairouan (140'000 habitants) la quatrième ville sainte de l'islam et la première ville sainte du Maghreb selon Wikipédia. Et là aussi, à notre plus grande surprise, la seule visite prévue n'est pas celle de la Grande Mosquée, fondée en l'an 670 par Sidi Oqba.

Kairouan se situe à 150 kilomètres au sud-ouest de Tunis et cinquante kilomètres à l'ouest de Sousse, à l'intérieur des terres

Non, nous allons entrer exclusivement dans un magasin d'état qui vend des makrouts au rez-de-chaussée et des tapis au premier étage... Je vais finir par croire que le ministère du tourisme tunisien a fait sienne cette réplique d'un héros d'une pièce de théâtre politiquement orientée intitulée Schlageter:

Quand j’entends le mot culture, j'arme mon revolver.


Heureusement, depuis le toit du magasin, j'aperçois le minaret de la Grande Mosquée qui reste le sanctuaire le plus ancien et le plus prestigieux de l'Occident musulman selon Wiki.

Le minaret de la Grande Mosquée (670) et la partie moderne de Kairouan vus depuis le toit du magasin d'état de la ville

Première ville arabe et musulmane d'Afrique du Nord, Kairouan a été un important centre pour la diffusion de l'islam et de la langue arabe au Maghreb. Avec sa médina et ses marchés organisés par corporations à la mode orientale, ses mosquées et autres édifices religieux, Kairouan est inscrite depuis 1988 sur la liste du patrimoine mondial de l'Unesco.

Wikipédia, Kairouan, novembre 2024

Alors, après avoir demandé l'autorisation à notre guide et informé ma famille, je décide d'aller visiter la Grande Mosquée distante de quelques centaines de mètres d'où nous sommes retenus pour écouler des tapis et faire entrer des devises dans les caisses de l'état local.

L'entrée du magasin d'état et la ruelle adjacente menant à la Grande Mosquée

Après m'être acquitté d'un modeste prix d'entrée et une fois mes jambes nues recouvertes d'un tissu prêté à l'entrée, je pénètre dans la cour de l'édifice sacré. Et je ne vais pas regretter mon escapade solitaire! Voyez plutôt.

A gauche, le minaret à trois étages dégressifs superposés. A droite, Façade de la salle de prière sur le côté sud de la cour.

Après avoir admiré la cour, je me dirige vers un groupe de touristes qui écoute avec attention les explications d'un guide local qui s'exprime en espagnol. Alors, je ne peux m'empêcher de me poser la question: pourquoi n'avons nous pas au programme la visite de ce lieu unique ?

Mais, comme je ne sais pas quand notre bus va repartir, je n'ai pas le loisir de visiter l'intérieur de la mosquée, ce que je regrette amèrement.

L'intérieur de cette incroyable mosquée photographié de l'extérieur

Pour vous permettre de comprendre ce que les passagers francophones des trois bus qui voyageaient ensemble ont raté ce jour-là par la négligence (volontaire ou prescrite) de leurs trois guides, voici encore un extrait de l'article consacré à ce noble édifice:

D'un point de vue esthétique, la Grande Mosquée de Kairouan apparaît comme le plus bel édifice de la civilisation musulmane au Maghreb. Son ancienneté et la qualité de son architecture font d'elle un joyau de l'art islamique. Nombreux sont les ouvrages et les manuels d'art musulman qui y font référence.

Mais, au-delà de son importance artistique et architecturale, elle a joué, selon l'universitaire et islamologue tunisien Mohamed Talbi « un rôle capital dans l'islamisation de tout l'Occident musulman, y compris l'Espagne"!

Wikipédia, Grande Mosquée de Kairouan, novembre 2024


Un conseil: abandonnez quelques instants la horde des touristes consommateurs et rejoignez la minorité cultivée des voyageurs
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Finalement, nous quittons Kairouan vers onze heures pour rouler vers le sud-ouest en direction de Gafsa. Vers midi, alors que la faim commence à nous tenailler, notre convoi entre dans la cour d'un restaurant situé en rase campagne au milieu du désert.

A nouveau, la politesse n'est pas le souci premier du maître d'hôtel qui nous dirige avec autorité vers la table à laquelle nous devons nous assoir sans discuter. On nous sert rapidement un menu simple, mais correct que nous n'avons pas pu choisir. Et comme déjà vécu à Tunis, pas question de traîner à table à la fin du repas: le prochain groupe de touristes arrive et il faut faire place nette...

Nous remontons dans le bus et roulons encore une centaine de kilomètre jusqu'à une route secondaire où nous attendent une cohorte de 4x4 Toyota et des chauffeurs habillés comme des Touaregs. Nous montons à bord rapidement, car dehors la chaleur est accablante, ce qu'on a tendance à oublier dans notre bus bien climatisé.

Le désert près de Tozeur: cette fois on y est vraiment!

Et c'est parti! Notre chauffeur s'éloigne des autres véhicules et nous emmène à toute vitesse sur la piste de sable. Il monte sur les dunes, nous laisse apprécier la majesté du désert puis dévale des pentes à 20% comme s'il s'agissait d'une rue de San Francisco. J'avoue que nous passons un excellent moment, conscients du privilège que nous avons d'être là, si bien accompagnés.

Une petite pause en plein désert pour apprécier les mirages au loin

Après quelques dizaines de kilomètres dans une zone qui ressemble à la lune, nous arrivons sur le lieu de tournage d'un épisode de la Guerre des étoiles. Au centre de ce village en carton-plâtre, des artisans locaux, à peine protégés du soleil, vendent des bijoux et de magnifiques minéraux scintillants. Je préfère ne pas penser à la force morale qu'il faut pour tenir un stand toute la journée sous cette chaleur... Respect.

Ce qu'il reste du village de la Guerre des étoiles. A droite, un stand de minéraux du désert.


Les commerçants n'ont qu'un petit parasol pour se protéger d'un soleil de plomb. Leur ténacité mérite le respect!
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A peine sortis du désert, on nous emmène à l'oasis de Degache pour la visite d'une palmeraie. En arrivant dans le village, on est d'emblée sidéré par la modestie des maisons qui s'alignent sur la rue centrale.

La rue centrale de Degache qui n'a pas dû beaucoup changer depuis les années 1960... 

Finalement, nous descendons des 4x4 Toyota sur la place de la mosquée. Là, je suis choqué par la maigreur et l'état de santé des chevaux... Rien que d'imaginer qu'ils vont devoir tirer les lourds chars métalliques avec au moins 4 touristes à bord me fait de la peine.

Le centre de Degache avec à droite un cheval famélique et résigné attelé à un chariot sur lequel monteront quatre touristes...

Mais, pas le temps de gamberger. Sans le moindre sourire, les cochers nous font monter sur les chars et nous partons immédiatement vers la palmeraie à vive allure.

Entrée du convoi de chars dans la palmeraie de Degache

D'emblée, je suis séduit par la beauté de ces arbres et la luxuriance rassurante de leur feuillage. C'est juste magnifique!

Les palmiers sont chargés de lourdes grappes de dattes, la seule richesse de l'oasis

Arrivés au chœur, on nous invite à descendre pour écouter la présentation du chef du village. Celui-ci est fort charismatique et il nous explique comment se fécondent les palmiers femelles: les villageois grimpent sans assurage et fécondent à la main chaque arbre individuellement. Un travail qu'on imagine dangereux et qui effectivement présente un risque...

Cette vidéo permet de s'immerger dans l'ambiance de la visite d'une palmeraie

Finalement, l'orateur nous invite à goûter la dernière récolte de dattes du cru: elles sont savoureuses et agréablement sucrées.

Écrasés par la touffeur moite de la palmeraie, nous écoutons malgré tout avec intérêt la présentation du leader du village

Naturellement, on nous propose d'en acheter un carton pour une somme modeste pour un Européen. Mon épouse, aussi bien par gourmandise que par empathie pour ces producteurs démunis, décide d'en acheter deux boîtes. En rentrant chez nous, nous constaterons qu'elles avaient des vers et nous pourrons les jeter immédiatement...

Les dates qu'on nous a vendues se sont avérées avariées...

De retour au village, je veux donner un pourboire à notre jeune cocher pauvrement vêtu. Celui-ci semble mal à l'aise, mais il finit par accepter mon don. Peut-être devra-t-il le reverser au propriétaire du char ? Qui sait. En tous cas, il ne semble pas très épanoui...

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Comme la fin de la journée approche, il est temps de nous diriger vers l'hôtel réservé par le tour opérateur. D'emblée, celui-ci nous fait bonne impression, voyez pourquoi.

Un établissement *** moderne, mais qui a su conserver le charme d'antan. Une réussite!

On nous attribue deux chambres éloignées de la réception et de la piscine, ce qui nous assurera une nuit tranquille. Les chambrettes sont fonctionnelles, chaleureuses et propres. Mais elles n'atteignent tout de même pas le confort du Radisson Blu d'Hammamet.

Nous posons rapidement nos affaires et partons rejoindre la foule des voyageurs autour de la piscine. L'eau est si chaude, qu'on se croirait davantage dans une baignoire. Mais, après une journée de voyage, ça détend!

Après une bonne douche purificatrice, il est déjà temps d'aller dîner. Un buffet, encore une fois plus modeste que sur la côte nous attend. Les mets sont simples, mais bons.

Durant le repas, je ne peux m'empêcher d'observer le comportement glouton de certains touristes, notamment une tablée d'Italiens qui reviennent du buffet avec des assiettes chargées comme s'il n'avaient pas mangé depuis la veille.

En partant, ils laisseront la moitié de ce qu'ils ont pris. Dans un pays aussi pauvre, ce comportement prête à réflexion, c'est un euphémisme.

Des assiettes encore à moitié pleines laissées par un groupe d'Italiens... Ce n'étaient hélas pas les seuls à agir ainsi.
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Ce matin, réveil à 3h30 histoire de prendre le petit-déjeuner avant le départ du bus prévu à 5h. Alors qu'il fait encore totalement nuit, nous somnolons tout en essayant de distinguer par la fenêtre, des rues, des maisons puis plus rien...

Environ une demi-heure plus tard, le bus s'arrête au milieu de nulle part, le long de la route rectiligne qui traverse la plus vaste plaine saline (ou sebkha) du Maghreb avec une superficie d'environ 5 000 km2.

La plaine saline du Chott el Jerid (le lac salé) avant le lever du soleil (5h44 du matin)

Tout le monde descend et sort son appareil photo ou son téléphone le regard tourné vers l'est. Autour de nous, aucun bruit, même pas le vent.

Pour quelqu'un de pas habitué au désert, ce paysage est assez émouvant...

Quand soudain, à 5h52 en ce 19 août, une sphère orange émerge à l'horizon...

L'astre solaire commence sa course

On a un peu l'impression d'être au commencement du monde.

Les voyageurs se prennent en photo pour immortaliser cet instant


Puis, il est déjà temps de repartir, le guide tunisien veille au grain 😀

Juste avant de remonter dans le bus, je prends une dernière photo de ce moment vraiment magique!

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Nous repartons vers le sud-est en direction de Souk Lahad puis Kebili.

Dans les villages qui s'éveillent, toujours le même tableau, d'abord des maisons souvent pas terminées puis le café où exclusivement des hommes commencent leur journée en fumant et en regardant passer notre convoi de bus.

Beaucoup de maisons en construction ou inachevées dans cette région relativement démunie de Tunisie

Vers 7h nous arrivons à Douz où nous attend un café avec toutes les commodités, y compris des chèches pour nous protéger de la supposée chaleur du soleil.

Alors qu'il fait enfin jour, nous contemplons médusés des déchets de chantier abandonnés le long de la route, en toute illégalité

Derrière le café, on se croirait presque revenu au temps des caravanes: des dizaines de chameaux et leur chamelier nous attendent.

Des dizaines de chameaux qui n'attendent plus que nous!

Malgré nos efforts pour rester tous ensemble, au moment du départ nous sommes séparés en deux groupes. Qu'à cela ne tienne! Et c'est parti pour une balade inoubliable en plein désert.

Le démarrage est un peu surprenant, mais quel pied de pouvoir vivre ça!

Alors que nous sommes au milieu des dunes, apparemment loin de tout, deux jeunes Tunisiens arrivent juchés sur une moto. Ils veulent nous vendre des boissons fraîches et autres babioles. Comme le guide nous avait déconseillé d'accepter en raison des prix abusifs pratiqués, nous refusons poliment mais fermement histoire d'éviter le début du marchandage. Dépités, les motards repartent d'où ils sont venus.

Les chameaux sont habitués aux touristes et on peut les caresser avec l'accord du chamelier

A peine une heure plus tard, nous revenons au point de départ des étoiles pleins les yeux. La chaleur commençait à devenir pénible, alors c'est mieux ainsi même si personnellement j'aurais encore continué un petit moment. Et cela malgré le fait que ma monture se retournait fréquemment pour mâchouiller une corde située tout près de mon pied!

Un souvenir inoubliable que le contact avec ces "rois du désert". A faire absolument!
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Nous roulons maintenant vers l'ancien village de Matmata El Qadima. Le bus traverse une zone totalement désertique, dénuée de la moindre localité sur plus de 80 kilomètres.

Entre Douz et Tamezret, pas le moindre village à l'horizon

Plus nous nous rapprochons, plus le relief devient montagneux. D'ailleurs, la peuplade berbère qui a fondé Matmata au XIe siècle, s'est retrouvée là pour fuir l'invasions des Hilaliens originaires d'Arabie. Jusqu'alors, ce peuple natif vivait dans l'actuelle El Hamma (arabe : الحامة), une oasis située en plaine à une trentaine de kilomètres à l'ouest de Gabès.

Le terme Matmata provient du nom de la tribu berbère des Matmata (en langue berbère Imatmaten), qui est elle-même descendante des Temzit et longuement décrite par Ibn Khaldoun dans son ouvrage Histoire des Berbères et des dynasties musulmanes de l'Afrique septentrionale. Elle fonde, près d'une source thermale, la ville de Hamma Matmata (actuelle El Hamma). Elle est contrainte de la fuir au cours des invasions des Hilaliens et fonde l'actuelle Matmata dans les montagnes avoisinantes qui portent le même nom. Toutefois, on n'y parle plus berbère, ce qui est encore le cas dans les villages voisins de Taoujout, Tamezret, Techine et Zraoua (Wikipédia, Matmata).

Le vieux village de Tamezret qui abrite un musée berbère que j'aurais volontiers visité...

A mon plus grand regret, nous ne visitons ni Tamezret ni Matmata. Le guide préfère arrêter le bus devant un bar sans âme où nous prenons un rafraichissement en vitesse. Le personnel est antipathique au possible et je me réjouis déjà de repartir. Pourtant, il y a apparemment un café typique au centre de Tamezret ainsi qu'un musée amazigh. Mais encore une fois, les visites culturelle ne sont pas une priorité pour notre guide, surtout si celles-ci n'avoisinent pas un bazar à touristes!

En réfléchissant au déroulé du voyage depuis notre départ de Hammamet, je ne peux m'empêcher de penser que la plupart des endroits où nous nous sommes arrêtés ont été choisi pour des raisons avant tout commerciales.

Autrement dit, les haltes se font en fonction des bakchichs versés par les tenanciers des établissements visités au tour opérateur voire carrément à notre guide...

Le paysage avant et après le village berbère de Tamezret

A 10h30, nous visitons une maison troglodyte transformée en musée. Un groupe de sexagénaires locaux nous accueille en nous offre du thé à la menthe avant de nous laisser visiter le site à notre guise.

Maison troglodyte transformée en musée

"Naturellement", il y a des choses à acheter comme du miel et des amandes "en circuit court, directement du producteur local". Mon épouse, empathique comme à son habitude, achète un peu de tout. Lorsque nous gouterons ces produits plus tard, on constatera que le miel est de la mélasse ou du miel industriel et que les amendes proviennent probablement du supermarché le plus proche...

Vous me direz, "ces gens doivent bien vivre". D'accord, mais alors pourquoi systématiquement nous vendre des produits industriels en les faisant passer pour de l'artisanat local avec un prix majoré ?

Tous les produits alimentaires acquis durant ce voyage de deux jours se révéleront au final immangeables et nous les jetterons une fois de retour chez nous!

Contrairement à ce que j'ai cru entendre de la bouche du guide, personne ne vit ici. C'est un musée ethnographique.

Alors que nos estomacs crient famine, nous repartons en direction de la Nouvelle Matmata construite en plaine au début des années 1970 (cf. ci-dessous) suite à la terrible inondation de novembre 1969 (chat GPT).

Située en plaine sur la route menant à Gabès, la ville est construite en 1969 pour reloger les habitants du village troglodytique de Matmata. Son développement reste limité même si un aéroport aménagé à proximité est destiné à désenclaver la région (Wikipédia, Nouvelle Matmata).

Bien que je n'ai pas voulu prendre de photos à travers la vitre du bus, je me souviens que la route en lacets qui descend vers la nouvelle Matmata offre un paysage digne d'intérêt.

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Après avoir déjeuné dans un restaurant à touristes correct, nous fonçons vers Gabès pour reprendre l'autoroute remontant vers le nord.

Peu avant 15h et dans une chaleur apocalyptique (43° à l'ombre, record du voyage) nous partons visiter l'amphithéâtre d'El Djem.

L'amphithéâtre d'El Djem est le troisième plus grand au monde derrière Rome et Capoue (Italie)

Fondée sur les ruines de la cité antique de Thysdrus ou Thysdritania colonia, El Djem est célèbre pour son amphithéâtre, le plus grand de l'Empire romain (entre 27 000 et 30 000 spectateurs) après le Colisée de Rome (45 000 spectateurs) et celui de Capoue. Il accueille le Festival international de musique symphonique d'El Jem chaque été depuis 1985 (Wikipédia, El Jem).

Malgré la canicule, nous avons beaucoup de plaisir à visiter ce monument hors norme pour la ville actuelle de 21'000 habitants qui l'abrite.

L'amphithéâtre d'El Djem est vraiment bien conservé. Sa visite en vaut la peine.

Mais l'amphithéâtre n'est pas uniquement le témoin de la grandeur passée de la ville. Il permet aussi d'avoir une vue imprenable sur la cité actuelle et ce n'est pas le moindre.

Au centre, un beau minaret de style tunisien qui rappelle celui de Kairouan
La relative fraîcheur des coulisses, un bienfait par une telle canicule!
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Commençons par les points positifs

Malgré les quelques défauts (corrigibles) mentionnés plus haut, nous recommanderions l'hôtel Radisson Blu de Hammamet. Ses points forts:

  • Confort et propreté garantis
  • Une belle vue sur la baie avec un coucher de soleil romantique
  • Des buffets au petit-déjeuner et au dîner qui dépassent de loin tout ce que nous avons pu manger ailleurs en Tunisie
  • Attention toutefois au resto de la piscine: la salade césar rend malade et l'antipathie du patron n'a pas d'équivalent...
  • Last but not least: la plage privée gratuite est juste fantastique. Un sable et une mer ultra-propres et des transats confortables. En plus, un garçon passe à chaque heure pour voir si on a besoin d'un encas ou de boissons fraîches, même de la bière 😀
Le Radisson Blu de Hammamet, un très bon établissement

Une virée inoubliable

Clairement, notre virée de deux jours dans le sud tunisien restera comme le point fort de notre séjour africain. En effet, malgré les défauts détaillés précédemment, ce voyage nous aura donné une vision un peu moins superficielle du pays.

Même si l'effet de nouveauté à joué, se promener à dos de chameau dans le désert constitue une expérience inoubliable tout comme le lever du soleil sur le Chott el-Jérid.

Lever du soleil sur le Chott el-Jérid (le lac salé)

Sidi Bou Saïd: incontournable!

Je n'attendais rien de ce haut-lieu touristique, et pourtant... J'ai été ébloui! L'architecture typique, la propreté des rues, la vue sur la baie de Tunis...

Patio de la "Maison du médecin" à Sidi Bou Saïd

C'est bien simple, c'est le seul endroit de Tunisie où je pourrais m'imaginer acheter une maison si j'en avais les moyens.

La plage de Sidi Bou Saïd et la baie de Tunis (sauf erreur...)

Ce que nous avons moins aimé

Notre première sortie au cœur d'Hammamet aura été révélatrice de l'état actuel de la Tunisie:

  • une riche histoire pas suffisamment mise en valeur. Les moyens muséographiques sont nettement insuffisants quand ils ne sont pas inexistants: pas ou peu de panneaux explicatifs, de balisage des principaux sites, sans parler des QR codes encore totalement inexistants en 2023!
Ce qu'il reste des thermes d'Antonin à Carthage... C'est maigre! 
  • des possibilités de shopping (très) limitées. Que ce soit à Hammamet ou à Tunis, nous n'avons jamais vu de magasins, de boutiques ou de librairies attractifs... On a eu l'impression que l'offre se limitait aux souks qui vendent des produits "typiques" mais qui relèvent davantage du folklore que des habitudes de consommation du 21e siècle...
Tunis, l'Avenue Habib Bourghiba: des possibilités de shopping vraiment limitées
  • de la saleté partout. Que ce soit en parcourant l'autoroute traversant Tunis, en arrivant à Hammamet ou même en plein désert, il y a partout des déchets abandonnés le long des routes, sur les places, dans les quartiers résidentiels... Trop c'est trop, à fortiori pour un pays se voulant touristique! Seule exception: Sidi Bou Saïd qui fait figure d'îlot européen au milieu d'une mer de négligence urbanistique.
Rue centrale de Degache à l'intérieur des terres. Ici, rien n'a changé depuis les années 1970...
  • une pauvreté choquante. Sur les trottoirs de l'Avenue Bourghiba, le long de la sortie d'autoroute d'Hammamet ou carrément sur la bande d'arrêt d'urgence de l'autoroute reliant Tunis à la frontière lybienne, partout des vendeurs à la sauvette qui passent la journée en plein soleil pour vendre des boissons, des fruits ou d'autres babioles... En comparaison, travailler en usine avec un salaire fixe semble presque enviable.
Les responsables locaux du tourisme prennent les touristes pour un troupeau de consommateurs avides de babouches et de tapis... 
  • une défiance incompréhensible par rapport à la culture. Que ce soit en visitant Carthage, Tunis, Kairouan ou Matmata, à chaque fois nos guides ont privilégié la visite d'un souk ou d'un café sans intérêt au dépend d'un musée, d'un village authentique ou d'un site culturel majeur voire mineur... Est-ce un ordre qui vient du sommet de l'état ou juste une course aux bakchichs de la part des guides ? Difficile de le savoir. Une chose est sûre, la Tunisie privilégie le tourisme de masse et traite les voyageurs comme des incultes que seuls les souks et les pauses pipi intéressent. Quel dommage!
La remarquable mosquée de Kairouan a simplement été ignorée par notre guide! Le souk à tapis étant jugé prioritaire...
  • des produits de piètre qualité ou inutilisables. Que ce soit les makrouts achetés à Kairouan, les dattes de Degache ou encore les amandes et le miel achetés sur le site troglodyte de Matmata, à chaque fois on nous a vendu des produits avariés ou industriels à un prix européen en les faisant passer pour de la production locale de qualité. Nous avons dû jeter les makrouts (pas bons, fades) et les dattes (pleines de vers) en arrivant chez nous. Quant au miel "récolté à Matmata", il s'est avéré être plus proche d'une mélasse de grande surface que du produit d'une ruche de village...

Conclusion

Dire que la Tunisie nous a déçus relève de l'euphémisme. Après quelques jours déjà, nous avions décidé de ne plus revenir dans ce pays à l'avenir. Ce que nous avions pu observer nous a amenés à cette décision radicale.

Visiter un bazar c'est bien. Mais voir les monuments de Carthage, Kairouan ou Matmata, laisse davantage de souvenirs!

Et pourtant... Il suffirait de quelques changements structurels tout à fait envisageables pour transformer l'impression laissée par ce pays. Et la première serait d'arrêter de traiter les touristes en pigeons pourvoyeurs de devises et de les considérer avec le respect dû à des voyageurs curieux et potentiellement avides de culture et d'histoire, mais surtout d'authenticité.

Une photo que je n'aurais pas prise si j'étais resté sagement avec notre guide...

J'avais visité le Nicaragua il y a une vingtaine d'année, mais je n'ai pas eu du tout l'impression d'être pris pour un simple consommateur qui veut juste une chambre climatisée et un coca-cola on the rocks. Et pourtant, Dieu sait si ce pays est pauvre.