Ce sont les Portugais qui ont baptisé l'île Florès, et on comprend pourquoi dès les premiers kilomètres parcourus dans la voiture de Michael. Tout pousse, à profusion, dans un gigantisme exubérant.
Michael habite à Barjawa, c'est le fils d'un restaurateur qui a monté sa guesthouse. Au fil de la discussion (en anglais, profitons-en car ça ne durera pas à mesure qu'on ira plus loin à l'est), il nous fait découvrir le monde des clans familiaux, des villages traditionnels, les croyances locales et catholiques, et nous fait mieux comprendre la société moderne de Florès et le petit monde des professionnels du tourisme dans l'île.
Les seules voitures circulant dans l'île sont destinées au transport des touristes. Les locaux prennent le bemo, minibus ou mini benne où ils s'entassent, toutes portes ouvertes, avec veaux vaches cochons. Ou leur scoot s'ils en ont un.
Un. Sans ces voitures et ces drivers, point de salut pour les familles un peu chargées et paresseuses comme nous. La voiture, c'est la condition pour espérer un petit revenu pour ces chauffeurs, mais ce n'est même pas une assurance, car il leur faut encore trouver le touriste perdu dans la jungle. Alors entre voyageurs et sur facebook, on s'échange les whatsapp des drivers. Moderne.
Deux. On se dit qu'on va prendre un driver pour chaque étape, en l'embauchant là où il habite... erreur ! Les routes sont tellement mauvaises que la moindre section du voyage prend au minimum 5h. Sachant que la conduite de nuit est franchement déconseillée (animaux sur la route, scooters sans phares...), les drivers n'habitent en réalité nulle part. Ils dorment dans la voiture, sur un canapé, n'importe où en fait, et viennent vous chercher à l'heure que vous voulez, tout sourire, comme si de rien n'était. Pareil au retour. Bref, certains se font guides, après avoir planché un peu sur leur anglais. Alors ils prennent un client tout au long du voyage, et, si le courant passe bien, c'est beaucoup plus simple pour tout le monde.
Notre Michael est jeune, très sympa, et sa playlist nous met en joie des le départ : Kids United pour Iris, Bob Marley pour Alex, Feu Chaterton pour moi. Merci les Français qui sont passés avant ! D'ailleurs le deuxième jour Alex le surprendra au micro dans un bar de sa ville.
Allez, photos !
Séchage du riz. Avant l'indépendance, les Floresiens se nourrissaient de patates douces et légumineuses locales. C'est le gouvernement central de Java qui leur a imposé la culture du riz.
Nanas. On ne se sert pas à Florès. Le moindre papayer appartient à quelqu'un. La moindre parcelle, même inaccessible, toute sauvage qu'elle paraît, est en réalité cultivée. Sauf les nanas, ils en ont trop. Et c'est délicieux !
Infrastructures : écoles et églises. Les unes et les autres sont grandes et pleines d'activité. Les uniformes varient selon l'école, mais les enseignants sont eux (surtout elles en fait) toujours en marron/kaki. Pas sûr qu'en France on serait ravi de porter ce costume, mais je dois admettre ici les professeurs ont l'air très fiers de leur situation. D'ailleurs le mot en bahasa indonesia, c'est guru ! Autre différence qui a son importance : l'école commence à 7h, et finit entre 12 et 14h, selon la classe d'âge.
A Ruteng, les rizières sont aménagées en toile d'araignée. Avant d'être très photogénique, cette disposition reflète la cohésion des familles paysannes, puisque la taille inégale des parcelles et la dépendance envers l'irrigation obligent à la solidarité.
Sur le sentier qui y mène, les enfants sont tout contents de nous faire goûter des baies acides. On en voit d'autres, plus grosses, mais bizarrement les enfants semblent beaucoup moins les apprécier. Vous les avez reconnues ?
A Florès, comme sur les autres îles volcaniques d'Indonésie, il peut tomber des trombes ici, et faire très beau là, de l'autre côté de la route. Et le brouillard est magique.
Les habitations sont de plus en plus bizarres. On verra demain pourquoi. En attendant il faut s'habituer à voir des tombes, toutes carrelées et ornées des portraits de Marie et Joseph, dans les jardins de chaque maison. Les poules grimpent dessus, les enfants y jouent, les parents s'y reposent à la fin de la journée... ce n'est pas si mal !
Bajawa est une petite ville de montagne. Il y fait frais. Ça bûcheronne du bambou toute la journée dans la forêt. Ça fume, ça grille le café. Tout le monde fait son café, un arabica franchement bon, si ce n'est l'absence de filtre 🥺
Après une nuit écourtée par les chants des coqs (fini le muezzin !), Michael nous guide à travers deux villages traditionnels. Le premier n'est pas du tout touristique. On comprend l'origine des toits très hauts qu'on voit un peu partout.
Les édifices centraux représentent les ancêtres fondateurs des clans vivant ici. Les parasols sont les hommes, les petites maisons les femmes. Il y a donc trois clans installés dans ce village.
Le faîte des toits des demeures de chefs est orné. La maison est constituée de plusieurs espaces qui vont du plus ouvert au plus intime. Seul le podium devant la terrasse est maçonné, ensuite c'est un plancher sur pilotis.
Les motifs, qu'on retrouve partout dans le cœur de l'île, font la part belle aux animaux essentiels pour la population ; cheval, porc, bœuf/buffle. Le porc et surtout le buffle sont l'unité de mesure des fortunes familiales. On les tue pour les cérémonies et on expose les crânes sur les vérandas des maisons.
Tout est en matériaux traditionnels. On assiste au remplacement d'un toit, en bambou. Ça va vite, c'est gratuit, ça tient 4 ans environ.
Le combat pour la scolarisation des enfants n'est pas encore gagné ici... Les enfants que vous voyez là boudent parce que Michael vient de leur demander pourquoi ils n'étaient pas à l'école !
Deuxième village, beaucoup plus grand. Il bénéficie d'une petite rente touristique.
Le frère de Michael vient de se marier avec une jeune femme d'ici. On la trouve dans la maison de ses parents, avec son bébé. Allez, encore un petit café.
Bajawa à 30 minutes d'intervalle. Tiens, et si on buvait un petit café ?
Vanille, macadamia et ikats ; c'est le tissage local. A Florès, pas de batik, mais de l'ikat. Les fils de couleurs sont teintés naturellement sur place. Entre 1 et 3 mois pour un sarong...
Allez, un ptit café 😬
Le kopi, sur l'arbre. Il n'y a qu'une récolte par an. Pas d'exportation malheureusement. Une idée de business !
Le Wolobobo, qu'on verra demain dans les nuages.
Le cratère.
Vue pas vraiment dégagée du Wolobobo. Comme les 12 autres volcans de l'île, il est sacré pour les habitants. Ils s'y réunissent pour quantités de cérémonies, pour les sorties scolaires. Au fait, il est éteint... pour le moment !
Il est temps de reprendre la Transflorès vers Riung, sur la côte nord. Voyage joyeux, on arrête vite de compter les saluts échangés avec les gens, c'est déjà 50 au bout de 30 minutes ! Pagi ! Hello mister !
Observations végétales au programme : fruits du jacquier, kapok, jambu air (goyave d'eau, très bon).
Michael repart à Bajawa pour un mariage.
Hello mister !
Riung est un village côtier. Comme partout en Indonésie, pas d'endroit non habité. C'est très sympa, jusqu'au port. Là vivent les pêcheurs, en général de l'ethnie bajo (les fameux villages sur l'eau), et musulmans. Et là c'est crado 😅. Mais on s'en fiche un peu, on est venus pour le parc des 17 îles.
Le vrai problème, c'est la nourriture... Sur les 4 resto de Riung, un est au milieu d'une marre à moustiques, un est fermé 3 fois sur 4, le 3e est introuvable. Donc on connaît bien le 4e, et même qu'il n'est pas très bon ! Bref, entre le covid, la basse saison touristique et la pauvreté des gens, le boulé (blanc) à du mal à se nourrir à Florès ! Tous les touristes se retrouvent tous les soirs devant leur mie-bintang (nouilles biere) : les retraités québécois en bénévolat, la famille catalane en woofing, l'allemande de Bali avec son guide... et les 3 français affamés !
Pour vous rassurer, voici le resto 2, photographié quand il était ouvert.
Un coca pour se remonter !Pas exactement Saint Trop', et tant mieux, mais on ne voit pas très bien comment la croisière du lendemain pourrait être aussi bien que les locaux nous l'ont vendue...
D'accord, toujours faire confiance aux locaux, et surtout à un bon captain, même d'un petit rafiot !
Il nous emmène voir les bats, au plus près.
Il y en a en plein la mangrove.
17 îles, et plus en fait.
Barracuda-becue, de plage, au feu de noix de coco.
Pas le droit d'emporter, alors on photographie.
Toujours pas de photos de snorkeling, et pourtant les séances étaient incroyables. J'ai juste réussi à shooter ce joli poisson multicolore.
Quand on vous dit qu'ils aiment le volley !
Départ pour Moni. La photo illustre :
Les grigris
Les animations sur la route
Un guide francophone et son jeune apprenti qui vont crever un pneu dans 1 km.
Après la crevaison, notre apprenti prend le siège dans le coffre. On doit lui parler en français pour qu'il apprenne, mais comme il n'a pas l'habitude de la voiture, il dort tout le temps !
Pause au marché. Odeurs, couleurs, sourires teintés de noix de bètel. C'est puissant !!!
Sur la route, une plage bleue.
Là franchement, je ne sais plus quoi dire...
Ardus se réveille à temps pour partager ce magnifique repas.
Bienvenue à Moni ! Superbe petit village de montagne, à l'ambiance très agréable. Notre chambre surplombe l'église et les chemins du village. On passe beaucoup de temps à observer les allers et venues de tout le monde, les changements du ciel, l'arrivée de l'orage du soir...
C'est pour lui qu'on est là, le Kemimutu. Un volcan dont les dernières éruptions ont formé trois lacs aux couleurs différentes, et changeantes. Évidemment c'est aussi un lieu sacré car c'est dans ces lacs que s'en vont "vivre" les esprits des défunts. Bien choisir son lac : le lac des jeunes, le lac des vieux, le lac des méchants. Moi je prendrai celui des très très vieux, dans très très longtemps !
Vous verrez peut-être des photos d'un lac rouge ou blanc ou jaune à rayure bleu... pour nous ils étaient comme ça. Ça change, et c'est imprévisible !
Je tiens à préciser qu'aucun filtre instagramme n'a été appliqué à ces photos. La preuve, Iris est toute rose !
Comme tout lieu sacré, celui-ci est gardé comme il se doit par un vieux sage poilu. Comme il a l'air très pressé de nous voir de près pour nous bénir, je prends un petit caillou sacré. Grâce à ce petit geste pieux et au fait que j'ai écrit 3 fois "comme" dans ma phrase, on peut passer !
Moni, c'est surtout les gens. Ils suffit de prendre un petit chemin pour se retrouver encerclé par des familles entières. Café très sucré, visite des maison, rigolades et tripotage de nez (et oui!), c'est l'ethnologie au bout de la rue !
Bienvenue au hameau de Tewa, chez Gregory, Martha, Élisabeth et tous les autres !
Ensuite Sophia m'a montré comment elle tisse les ikats dans sa petite maison sombre, sur le sol de terre battue... Je n'avais plus de batterie ! Et pas une roupie en poche pour lui acheter un sarong... Mais finalement c'est bien, juste échanger, partager, rigoler, avec quelques mots et beaucoup de signes. C'est gratuit et c'est tellement bon !
Pas de photos non plus de la messe (je nai pas osé) où je suis allée le samedi soir, pendant la coupure d'électricité due à l'orage. Ils sont des centaines là-dedans ! Tous sur leur 31, des filles en enfants de chœur et 5 ou 6 rangées de gamins en costumes du dimanche. Une messe pleine de joie et super bien chantée ! Bref, la fête... un peu moins pour moi quand le prêtre lance un Hello miss dans son homélie et que tout le monde se tourne vers moi en rigolant !
Mais il est déjà temps de quitter Moni pour rejoindre Maumere, à l'est de l'île. Sur la route se trouve Koka beach, halte parfaite. On y accède en traversant une plantation de cacao. C'est une culture qui rapporte une misère, car les paysans ne transforment pas eux-mêmes les cabosses... Encore une fois les Indonésiens sont complètement indifférents au chocolat, je n'arrive pas à comprendre, je n'en dors plus.
Bref, là, Braham, notre jeune driver qui a deux frères et 4 ou 5 cousins dans les ordres en Amérique latine et une sœur religieuse au Vatican (pardon pour la parenthèse mais l'anecdote est piquante), bref, le gentil Braham dégaine une grosse pierre et éventre une cabosse jaune qu'il nous fait manger. C'est délicieux !!!
Mais Koka beach n'a pas été baptisée ainsi par un planteur de cacao dyslexique, ni en hommage au noix de coco flottant dans ses eaux turquoise, mais d'après le nom des choucas qui y vivent et qu'on n'a pas vus. Mais on a profité de la plage de rêve (en la nettoyant toutes les heures des déchets apportés par la mer).
La suite, c'est donc la ville de Maumere, où l'on espère : un peu de confort, un peu de nourriture, l'extension de nos visas pour continuer jusqu'à notre prochaine destination. Il paraît que dans cette petite ville la formalité ne prend qu'un ou deux jours !
Nous nous installons chez Suzy et sa fille, en vacances de ses études à Amsterdam. Le jardin est très beau, mais question confort et nourriture, ce n'est pas encore ça...
"Heureusement ", dès le deuxième jour, le jeune agent du bureau de l'émigration nous explique qu'il ne va pas pouvoir traiter notre demande, car le serveur informatique est en panne. Il multiplie les courbettes. Et en effet, tous les PC sont éteints.
Pas question de retourner à Labuanbajo (12h de route). Il nous reste deux jours pour trouver un bureau ouvert et en état de marche...
En une heure, on prend la décision, Alex fonce en scoot à l'aéroport acheter les billets (en liquide, en retirant 6 fois le max à l'automate...), je fais les valises, on retourne à l'aéroport.
Et Iris ?
Merci Suzy et Marlyse 🥰
Atelier cyanotype à l'indigo naturel et ecoprint !!!Et voilà, c'est ainsi que nous sommes allés à... (où on ne voulait surtout pas aller)... à.... (quel suspense)... à....