A lire pour s'endormir, c'est long !
Aller à Jérusalem par la voie terrestre en traversant le Jourdain au pont Allenby : un projet qu'on savait soumis aux aléas de la situation locale, et en effet une expérience dont on se souviendra !
Pour parcourir ces 100 petits kilomètres, il faut en théorie :
- prendre un taxi jusqu'aux bureaux jordaniens,
- montrer le passeport, le visa, acquitter une taxe aller-retour de 10 JOD
- acheter un billet pour le bus autorisé à conduire les passagers sur les 15km qui constituent la frontière (les pressés qui en ont les moyens prennent un taxi special)
- traverser le pont Hussein dans ce bus, le conducteur se chargeant de montrer les passeports aux gardes jordaniens
- puis israéliens de l'autre côté
- on vous dépose aux bureaux israéliens ou vous devez passer différents checkpoints, rassurer les agents sur vos intentions purement touristiques et votre destination (pas les territoires), et obtenir d'autres petits papiers à glisser dans votre passeport.
- si vous avez des bagages, pas de chance, il y a des guichets en plus.
- vous passez la douane
- une fois sorti, vous prenez un minibus Sharut pour Jérusalem, qui part quand il est plein. Vous traversez le désert de Judée puis les territoires de Cisjordanie, et vous arrivez à la Porte de Damas.
Ce trajet n'est pas à tenter ni vendredi ni samedi, forcément.
Voilà pour la théorie. Maintenant voici notre expérience...
Jusqu'à Allenby, pas de problème. On découvre la conduite locale en prévision de notre road trip, on traverse les palmeraies et bananeraies (eh oui !).
Côté administration jordanienne, ça va toujours. Contrôle des sacs succinct, conversation agréable avec un Palestinien âgé qui brosse avec pudeur l'histoire difficile de son peuple.
Montés dans le bus autorisé, on attend 1h30 qu'il soit plein. Le sourire nonchalant de notre chauffeur, aux allures de capitaine Stubing, aurait dû nous mettre la puce à l'oreille : on se sait pas quand on arrive !
Devant les gardes jordaniens avant le pont, il gare le vehicule et nous laisse enfermés pendant près de 2h. Les taxis vip et les camions passent, les tasses de thé aussi devant la cambuse.
La traversée du petit pont se fait au pas de l'escargot, dans des embouteillages faramineux.
A l'arrivée au terminal israélien, les bagages sont balancés sur la chaussée (on se félicite de ne pas en avoir).
La traversée des différents checkpoints du terminal nous prend près de 2h. On doit attendre le numéro attribué au passeport du chef de famille, mais quelque chose cloche : ce sont toujours les mêmes numéros qui défilent, la plupart des desks sont fermés.
Nous sommes séparés, nous attendons Alexandre dehors. On essaie de profiter de la climatisation, mais les gardes nous refoulent dehors. On note leur regard complètement méprisant. L'habitude de parquer les Palestiniens.
Ensuite près de 2h d'attente encore par 43° à l'ombre,mais l'attente se fait côté soleil.Pour des raisons non connues mais supposées les Palestiniens de la compagnie de bus autorisée, Sharut, refusent de nous vendre des tickets. Et en plus il n'y a pas de bus. Nous sommes sauvés par un grand-père charismatique, sans doute arabe chrétien accompagnant sa petite fille arrivant d'Angleterre. Il nous obtient les tickets,jouant d'autorité et nous garde des places.
Dans l'attente et la foire d'empoigne pour enfin entrer dans le véhicule, une jeune Palestinienne fait plusieurs malaises. Aucune réaction du mari qui refuse poliment l'eau qu'on lui propose.il faut attendre un bon moment pour qu'il accepte de la mettre à l'ombre.
Encore des checkpoints armés, la traversée de territoires d'une pauvreté sans nom, et nous voici largués 500m avant la destination.
Bilan : Plus de 6h pour parcourir 15km. Un aperçu saisissant des haines locales, des multiples côtés. Le triste tableau du quotidien des Palestiniens. Et si vous espérez que votre sort de touriste européen sera meilleur, vous rêvez ! Tout le monde est trop occupé à se haïr pour vendre du rêve.
Mais bilan du bilan : qu'est-ce qu'on est heureux de l'avoir fait !!!
Allez, quelques photos et ensuite la récompense sublime : Jérusalem !
Pour l'instant, ça va !En plein no man's Land, des petits bergers qui ne feront pas la rentrée...Admirez la spécialité locale : la barrière qui précède et protège une barrière...La porte de Damas !